2.2. L'enregistrement sonore
L'article 18 du décret du 8 mars 2001, dans sa rédaction issue du décret du 21 avril 2006, dispose que le texte sur feuillet double de ses déclarations que chaque candidat peut faire envoyer aux électeurs doit être déposé dans les mêmes délais que ceux prévus pour l'affiche, sous la forme d'un texte imprimé et d'un enregistrement sonore, auprès de la Commission nationale de contrôle de la campagne électorale. En vertu du dernier alinéa de ce même article, il incombait à celle-ci de vérifier la conformité de l'enregistrement sonore au texte imprimé. Ces éléments ont été mis en ligne sous forme textuelle et sonore sur un site internet désigné par le ministre de l'intérieur. Il s'agit du site de la commission (cnccep.fr) ouvert le 23 février 2007. Ces éléments ont été mis en ligne le 9 avril 2007, jour de l'ouverture de la « campagne officielle ». La déclaration devait être déposée sous la forme d'un fichier au format PDF signé et verrouillé et d'un enregistrement sonore au format MP3.
Cette disposition nouvelle, prise notamment dans l'intérêt des personnes mal voyantes mais aussi des Français à l'étranger, nécessitait de dégager des lignes directrices afin de mettre les candidats en mesure de préparer leur enregistrement. La commission a arrêté le 9 mars 2007 les dispositions suivantes qui ont été portées à la connaissance des candidats. Elles n'ont pas suscité d'observations de leur part.
Au préalable, si, en dépit des démarches réitérées de la commission, aucun enregistrement sonore n'avait été déposé par un candidat, la mention suivante aurait été portée sur le site internet de la commission sous le lien « Ecouter » propre à ce candidat : « Contrairement aux dispositions de l'article 18 du décret n° 2001-213 du 8 mars 2001, et en dépit des invitations de la Commission nationale de contrôle, le candidat n'a pas déposé un enregistrement sonore de sa déclaration » et le Conseil constitutionnel en aurait été avisé. Tous les candidats ont adressé, parfois avec retard, leur enregistrement sonore à la commission, qui a pu les homologuer et les mettre en temps voulu sur son site internet. Cette règle n'a donc pas reçu application.
Les lignes directrices sont les suivantes. En premier lieu, l'enregistrement sonore doit porter sur l'intégralité du texte imprimé. La commission a décidé de ne pas regarder comme un texte imprimé au sens de l'article 18 du décret de 2001 les photographies, les graphiques, les logos ou les emblèmes d'un parti ou groupement politique. En deuxième lieu, il appartenait au candidat de procéder personnellement à l'enregistrement sonore de sa déclaration. Toutefois, il lui était loisible de recourir en tout ou partie à un ou plusieurs tiers à la condition que la lecture de la déclaration par ces intervenants soit effectuée exclusivement par des voix non identifiables par le public. Cette faculté a été utilisée par plusieurs candidats. En troisième lieu, le candidat pouvait, s'il le souhaitait, accompagner l'enregistrement sonore de sa déclaration d'un fond musical à l'exclusion des hymnes nationaux et de l'hymne européen ainsi que, le cas échéant, des « hymnes régionaux ». Enfin, si le candidat faisait usage de la faculté de faire traduire en allemand et/ou en tahitien ses déclarations, ces traductions étant homologuées par la Commission nationale de contrôle, il lui appartenait également de procéder à un enregistrement sonore de sa déclaration dans ces langues. Le candidat pouvait procéder lui-même à cet enregistrement ou avoir recours en tout ou partie à un tiers.
La commission n'a pas été saisie par les candidats de difficultés de mise en oeuvre de ces dispositions. Elle a seulement demandé que toute mention relative à la traduction en langue des signes française sur des fichiers vidéo soit retirée d'un document édité par un organisme afin de favoriser l'accessibilité du processus électoral aux personnes handicapées. En effet, les dispositions applicables au site internet de la commission ne prévoyaient pas que la lecture des professions de foi de l'ensemble des candidats serait accompagnée d'une telle traduction. Néanmoins une telle possibilité serait opportune.
La commission recommande de prévoir la lecture, sur le site internet dédié à l'élection présidentielle, des professions de foi de l'ensemble des candidats en accompagnant sur des fichiers vidéo leurs déclarations d'une traduction en langue des signes française.
2.3. L'utilisation de papier de qualité écologique
L'article 20 du décret du 8 mars 2001, dans sa rédaction issue du décret n° 2007-136 du 1er février 2007, prévoit que l'Etat prend directement en charge notamment le coût du papier et l'impression des textes des déclarations visées à l'article 18. Toutefois, cette prise en charge est subordonnée à la condition que les déclarations soient produites à partir de papier de qualité écologique répondant au moins à l'un des deux critères mentionnés à l'article R. 39 du code électoral, dont la rédaction résulte sur ce point du décret n° 2007-76 du 23 janvier 2007. Pour regrettable qu'elle soit, la publication tardive de ces deux décrets ne semble pas avoir soulevé de difficultés particulières, les imprimeurs ayant été avisés de cette exigence dès le mois d'octobre 2006. Les candidats ont justifié avoir respecté ces dispositions en tout ou, pour l'un d'eux, en partie.
Le dernier alinéa de cet article 20 a prévu que, lorsqu'un candidat s'était trouvé dans l'impossibilité d'être approvisionné en papier répondant à l'un des deux critères, la commission pouvait décider que les dispositions précitées ne s'appliqueraient pas à ce candidat. Elle a été saisie par M. Schivardi d'une demande en ce sens. En effet, compte tenu de l'invalidation par la commission de sa profession de foi, les documents qu'il avait déjà imprimés à partir de papier de qualité écologique ne pouvaient être utilisés et le candidat a fait état de ses difficultés à s'approvisionner dans les délais requis dans un papier de cette qualité pour procéder à l'impression de la déclaration homologuée. La preuve des démarches effectuées auprès des papetiers et des imprimeurs ayant été apportée et plusieurs justificatifs relatifs à l'impossibilité d'un tel approvisionnement et émanant d'entreprises différentes lui ayant été fourni, la commission a décidé d'accepter cette demande et, ainsi qu'il a été indiqué, en a avisé la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques.
- Le déroulement de la campagne électorale
La Commission nationale de contrôle souhaite présenter plusieurs observations au titre successivement de l'examen de la question de la durée de la campagne, puis du déroulement de celle-ci dans la presse, dans l'audiovisuel, sur internet, dans les collectivités d'outre-mer et à l'étranger.
3.1. La durée de la campagne électorale
L'article 10 du décret du 8 mars 2001, dans sa rédaction issue du décret n° 2006-459 du 21 avril 2006, prévoit que la campagne en vue de l'élection du Président de la République est ouverte le deuxième lundi précédant le premier tour de scrutin (soit en 2007 le 9 avril) et prend fin la veille du scrutin à zéro heure (soit le samedi 21 avril à zéro heure). En cas de second tour de scrutin, la campagne s'ouvre à compter de la publication au Journal officiel des noms des deux candidats habilités à se présenter et prend fin la veille du scrutin à zéro heure (soit en 2007 le samedi 5 mai à zéro heure).
L'article L. 49 du code électoral, applicable à l'élection des députés, des conseillers généraux et des conseillers municipaux, interdit la distribution des bulletins, des circulaires et autres documents le jour du scrutin et prévoit qu'il est interdit à partir de la veille du scrutin à zéro heure de diffuser ou de faire diffuser par tout moyen de communication au public par voie électronique tout message ayant le caractère de propagande électorale. Il résulte de ces dispositions que la distribution de tracts, la tenue de réunions publiques ou des manifestations publiques diverses sont autorisées la veille du scrutin. Cet article a été rendu applicable à l'élection présidentielle par le II de l'article 3 de la loi organique du 6 novembre 1962.
L'articulation de ces dispositions et de l'article 10 du décret met en lumière un défaut de cohérence de la réglementation applicable. Le Conseil constitutionnel et la commission ont interprété l'article 10 du décret comme ne visant pas seulement la clôture de la campagne audio-visuelle mais comme interdisant la veille et le jour du scrutin toute réunion électorale, toute distribution de tracts, toute publication par un quotidien d'un entretien avec un candidat, toute modification des sites internet des candidats. En effet et ainsi que le Conseil constitutionnel l'a jugé (13), le législateur a, par le V de l'article 3 de la loi organique de 1962 (14) renvoyant à un décret en Conseil d'Etat le soin de fixer les modalités d'application des dispositions de cette loi, conféré au Gouvernement les pouvoirs les plus larges pour prendre l'ensemble des mesures nécessaires pour en assurer l'application. Il s'agit donc d'une disposition spéciale qui s'explique notamment par le fait que, pour l'élection présidentielle, aucune campagne, sous quelque forme que ce soit, n'a lieu traditionnellement la veille du scrutin. La veille de chaque tour de scrutin est une « journée blanche ». La commission estime que cette spécificité doit être maintenue. Au surplus, une lecture différente de la réglementation aboutirait à ce paradoxe qu'une partie de l'outre-mer votant le samedi commencerait à exprimer son suffrage, alors que la distribution de tracts, la publication d'entretiens dans la presse, la tenue de réunions publiques ou de manifestations publiques diverses pourraient se poursuivre en métropole.
La commission relève que l'interdiction résultant de l'application de l'article 10 du décret n'a pas toujours été respectée lors de la dernière élection. Elle a ainsi été informée de la distribution de tracts ou de réunions la veille du scrutin. De même, elle a dû intervenir auprès du mandataire d'un candidat afin de rappeler cette interdiction alors que l'interview que ce candidat avait donné à un quotidien devait être publiée par ce journal la veille du second tour et alors même que le même journal avait publié la veille l'interview de son concurrent. Elle est aussi intervenue auprès du mandataire de celui-ci compte tenu du non-respect de cette exigence par un journal publié dans une collectivité outre-mer.
La commission recommande de mettre en cohérence l'état du droit par une modification appropriée de la loi organique du 6 novembre 1962 et de l'article 10 du décret du 8 mars 2001 pris pour son application (15) afin que soit clairement explicitée l'interdiction, pour tout candidat à l'élection présidentielle, de faire campagne, sous quelque forme que ce soit, après la date de clôture de celle-ci fixée par voie réglementaire. Il conviendrait aussi d'assortir d'une sanction toute infraction à cette interdiction.