JORF n°0187 du 12 août 2008

Décision n°2008-0896 du 29 juillet 2008

L'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes,

Vu la directive 2002/19/CE du Parlement européen et du Conseil du 7 mars 2002 relative à l'accès aux réseaux de communications électroniques et aux ressources associées, ainsi qu'à leur interconnexion (directive « accès ») ;

Vu la directive 2002/21/CE du Parlement européen et du Conseil du 7 mars 2002 relative à un cadre réglementaire commun pour les réseaux et services de communications électroniques (directive « cadre ») ;

Vu la directive 2002/22/CE du Parlement européen et du Conseil du 7 mars 2002 concernant le service universel et les droits des utilisateurs au regard des réseaux et services de communications électroniques (directive « service universel ») ;

Vu les lignes directrices 2002/C 165/03 de la Commission des Communautés européennes du 11 juillet 2002 sur l'analyse du marché et l'évaluation de la puissance sur le marché en application du cadre réglementaire communautaire pour les réseaux et les services de communications électroniques (« lignes directrices ») ;

Vu la recommandation C(2007)5406 de la Commission des Communautés européennes du 17 décembre 2007 concernant les marchés pertinents de produits et de services dans le secteur des communications électroniques susceptibles d'être soumis à une réglementation ex ante conformément à la directive « cadre » (recommandation « marchés pertinents ») ;

Vu la recommandation C(2003)2647 de la Commission des Communautés européennes du 23 juillet 2003 concernant les notifications, délais et consultations prévus par l'article 7 de la directive « cadre » (recommandation « notification ») ;

Vu le code des postes et des communications électroniques (« CPCE »), et notamment ses articles L. 36-7, L. 37-1 à L. 37-3, L. 38, L. 38-1 et D. 301 à D. 315 ;

Vu le décret n° 96-1225 modifié du 27 décembre 1996 portant approbation du cahier des charges de France Télécom, et notamment l'article 18 de ce cahier des charges annexé audit décret ;

Vu l'arrêté du 12 mars 1998 autorisant la société France Télécom, société anonyme immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Paris sous le numéro 380 129 866 et dont le siège social est situé au 6, place d'Alleray, 75505 Paris Cedex 15, à établir et exploiter un réseau de téléphonie ouvert au public et à fournir le service téléphonique au public, ci-après dénommée « France Télécom » ;

Vu la décision n° 99-490 de l'Autorité de régulation des télécommunications en date du 9 juin 1999 portant adoption des lignes directrices relatives aux procédures opérationnelles de la présélection ;

Vu la décision n° 99-1077 de l'Autorité de régulation des télécommunications en date du 8 décembre 1999 précisant les conditions et les délais de mise en œuvre de la sélection du transporteur appel par appel et de la présélection ;

Vu la décision n° 2000-0030 de l'Autorité de régulation des télécommunications en date du 5 janvier 2000 portant sur un différend entre Télécom Développement et France Télécom relatif à la sécurisation des interconnexions aux commutateurs d'abonnés du réseau de France Télécom ;

Vu la décision n° 2001-691 de l'Autorité de régulation des télécommunications en date du 18 juillet 2001 précisant les conditions et les délais de mise en œuvre de la sélection du transporteur pour les appels locaux internes aux zones locales de tri ;

Vu la décision n° 2005-0425 de l'Autorité en date du 27 septembre 2005 portant sur la définition des marchés pertinents de la terminaison d'appel géographique sur les réseaux alternatifs fixes, la désignation des opérateurs exerçant une influence significative sur ces marchés et les obligations imposées à ce titre ;

Vu la décision n° 2005-0571 modifiée de l'Autorité en date du 27 septembre 2005 portant sur la définition des marchés pertinents de la téléphonie fixe, la désignation d'opérateurs exerçant une influence significative sur ces marchés et les obligations imposées à ce titre ;

Vu la décision n° 2005-1085 modifiée de l'Autorité en date du 15 décembre 2005 fixant l'utilisation des catégories de numéros du plan national de numérotation ;

Vu la décision n° 2006-0551 de l'Autorité en date du 30 mai 2006 portant sur un différend opposant les sociétés France Télécom et Neuf Télécom ;

Vu la décision n° 2006-0162 de l'Autorité en date du 4 mai 2006 spécifiant les modalités techniques et tarifaires de l'offre de vente en gros de l'accès au service téléphonique ;

Vu la décision n° 2006-1007 de l'Autorité en date du 7 décembre 2006 portant sur les obligations de comptabilisation des coûts et de séparation comptable imposées à France Télécom ;

Vu l'arrêté du 24 avril 2007 homologuant la décision n° 2007-0213 de l'Autorité en date du 16 avril 2007 portant sur les obligations imposées aux opérateurs qui contrôlent l'accès à l'utilisateur final pour l'acheminement des communications à destination des services à valeur ajoutée ;

Vu la consultation publique de l'Autorité de régulation des télécommunications relative à l'analyse des marchés de la téléphonie fixe publiée le 22 février et clôturée le 4 avril 2008 ;

Vu les réponses à la consultation publique susvisée ;

Vu le document de synthèse des réponses à la consultation publique susvisée, publié le 7 mai 2008 ;

Vu la consultation publique de l'Autorité relative à l'évolution des prestations techniques de la sélection du transporteur publiée le 11 avril 2008 et clôturée le 9 mai 2008 ;

Vu les réponses à la consultation publique susvisée ;

Vu la consultation publique de l'Autorité relative aux référentiels de coûts et autres éléments pertinents pour la mise en œuvre des obligations de contrôle tarifaire sur les prestations de terminaison d'appel et de départ d'appel sur les réseaux fixes publiée le 20 mai et clôturée le 20 juin 2008 ;

Vu les réponses à cette consultation publique ;

Vu le courrier de France Télécom en date du 6 juin 2008 ;

Vu la demande d'avis au Conseil de la concurrence en date du 6 mai 2008 ;

Vu l'avis n° 2008-A-11 du Conseil de la concurrence du 18 juin 2008 relatif à une demande d'avis de l'Autorité de régulation des communications électroniques, en application de l'article L. 37-1 du code des postes et communications électroniques, portant sur l'analyse des marchés de détail et de gros de la téléphonie fixe ;

Vu la consultation publique de l'Autorité relative au projet de décision précité, publiée le 26 juin 2008 et clôturée le 27 juillet 2008 ;

Vu les réponses à cette consultation publique ;

Vu le projet de décision portant sur la définition des marchés pertinents de la téléphonie fixe, la désignation d'opérateurs exerçant une influence significative et les obligations imposées à ce titre, notifié à la Commission européenne et aux autorités réglementaires nationales de la Communauté européenne en date du 26 juin 2008 ;

Vu les observations de la Commission européenne reçues le 25 juillet 2008 ;

Après en avoir délibéré le 29 juillet 2008,

L'Autorité a effectué sa première analyse des marchés de la téléphonie fixe en 2005. Cette analyse a fait l'objet des décisions n° 2005-0425 et n° 2005-0571 en date du 27 septembre 2005, dont la portée temporelle a été fixée à trois ans. Le présent document s'inscrit dans le deuxième cycle d'analyse des marchés de la téléphonie fixe. Partant du bilan présenté supra sur la régulation appliquée lors du premier cycle et la situation concurrentielle observable sur les marchés concernés, l'Autorité développe dans les parties suivantes sa nouvelle analyse des marchés de gros et de détail de la téléphonie fixe.

L'analyse des marchés de la téléphonie fixe effectuée en 2005 avait mis en évidence six marchés de détail pertinents et trois marchés de gros pertinents. L'ensemble de ces marchés pertinents faisait alors partie des marchés susceptibles d'être régulés ex ante tels que définis dans la recommandation sur les marchés pertinents publiée en 2003 par la Commission européenne.

Il convient aujourd'hui, dans le cadre du deuxième cycle d'analyse des marchés, d'analyser à nouveau chacun de ces marchés. Néanmoins, une partie de ces marchés n'apparaît plus dans la nouvelle recommandation de la Commission européenne sur les marchés pertinents en date du 17 décembre 2007. La Commission européenne considère en effet, au vu d'une analyse générique au niveau européen, qu'il n'est plus nécessaire d'exiger que l'ensemble des régulateurs examine la pertinence des marchés de détail des communications et des marchés de gros du transit. Néanmoins le fait que ces marchés ne figurent pas dans la nouvelle recommandation de la Commission européenne ne signifie pas que ces marchés ne peuvent être pertinents sur une base nationale.

L'Autorité analyse dans ce document les marchés reconnus pertinents par la Commission européenne dans sa nouvelle recommandation sur les marchés pertinents. Les marchés en question sont les marchés de détail de l'accès et les marchés de gros du départ d'appel et de la terminaison d'appel.

L'analyse de l'Autorité sur les marchés régulés durant le premier cycle d'analyse des marchés mais ne faisant plus partie des marchés identifiés au niveau européen dans la nouvelle recommandation de la Commission européenne est menée en annexe H du présent document. Lesdits marchés sont les marchés de détail des communications ainsi que les marchés de gros du transit.

I. ― DÉLIMITATION DES MARCHÉS DE LA TÉLÉPHONIE FIXE
DÉFINIS DANS LA NOUVELLE RECOMMANDATION
I-1. Introduction sur la délimitation des marchés

L'exercice de délimitation des marchés a pour but de définir le contour, en termes de services puis du point de vue géographique, des marchés susceptibles d'être régulés par une autorité sectorielle. Cet exercice est, en application des dispositions de la directive européenne « cadre », effectué conformément aux principes issus du droit de la concurrence.

I-1.1. Délimitation des marchés en termes de produits et services

Le périmètre des marchés du point de vue des produits et services repose principalement sur l'analyse des éléments suivants :
― les caractéristiques objectives, le prix et l'usage des services : ces éléments, cités par les « lignes directrices » de la Commission européenne, permettent de définir l'ensemble des services qui peuvent appartenir à un même marché, en particulier sur les marchés de détail ;
― la substituabilité du côté de la demande : deux produits ou services appartiennent à un même marché s'ils sont suffisamment « interchangeables » pour leurs utilisateurs, du point de vue de l'usage qui en est fait, de leurs caractéristiques, de leur tarification, de leurs conditions de distribution, des coûts de « migration » d'un produit vers l'autre, etc. Afin d'apprécier cette notion d'interchangeabilité, l'analyse doit entre autres prouver que la substitution entre les deux produits est rapide et prendre en compte les « coûts d'adaptation » qui en découlent ;
― la substituabilité du côté de l'offre : un produit B peut appartenir au même marché que le produit A en cas de substituabilité du côté de l'offre, c'est-à-dire lorsque les fournisseurs du produit B peuvent commencer à produire le produit A en cas de hausse du prix de marché de ce produit, sans qu'ils aient à subir des coûts importants de modification de leur appareil de production.
Pour établir l'existence d'une substituabilité éventuelle entre services du point de vue de la demande ou de l'offre, l'analyse peut également impliquer la mise en œuvre de la méthode dite du « monopoleur hypothétique », ainsi que le suggèrent les « lignes directrices » de la Commission européenne. Du point de vue de la demande, ce test consiste à étudier qualitativement les effets sur la demande d'une augmentation légère, 5 à 10 % par exemple, mais réelle et durable, du prix pratiqué par un hypothétique monopoleur sur un service donné, de manière à déterminer s'il existe des services considérés comme substituables par les demandeurs, vers lesquels ils seraient susceptibles de s'orienter. Du point de vue de l'offre, il s'agit de savoir si, face à une telle hausse de prix, des entreprises commercialisant d'autres services seraient en mesure de fournir, rapidement et facilement, un service équivalent à celui du monopoleur hypothétique. Ainsi que le mentionnent les « lignes directrices », l'utilité essentielle de cet outil réside dans son caractère conceptuel ; sa mise en œuvre n'implique pas une étude économétrique.

I-1.2. Délimitation des marchés en termes géographiques

Il est rappelé dans les « lignes directrices » susvisées (point 56) que « selon une jurisprudence constante, le marché géographique pertinent peut être défini comme le territoire sur lequel les entreprises concernées engagées dans la fourniture ou la demande des produits ou services sont exposées à des conditions de concurrence similaires ou suffisamment homogènes et qui se distingue des territoires voisins sur lesquels les conditions de concurrence sont sensiblement différentes ».
Concrètement, deux principaux critères permettent de procéder à la délimitation géographique des marchés de communications électroniques : d'une part, le territoire effectivement couvert par les réseaux et, d'autre part, l'existence d'instruments de nature juridique conduisant en pratique à distinguer des zones géographiques ou, au contraire, à considérer que le marché est de dimension nationale.

I-2. Délimitation des marchés de détail de la nouvelle recommandation

Parmi les marchés de détail de la téléphonie fixe, seul le marché de l'accès a été maintenu dans la nouvelle recommandation de la Commission européenne. Cette partie traite de la délimitation de ce marché de détail de l'accès au réseau téléphonique public et de sa subdivision en deux sous-marchés, l'un résidentiel et l'autre professionnel.

I-2.1. Périmètre des marchés de l'accès au réseau téléphonique public

Afin de définir le périmètre des marchés de l'accès en termes de produits et services, sont effectuées différente analyses de substituabilité. Premièrement, l'Autorité montre qu'il n'y a pas substituabilité des services d'accès mobiles avec les services fixes (I-2.1.1). Ensuite, elle classe les offres d'accès au service téléphonique et les offres de communications téléphoniques dans des marchés distincts (I-2.1.2). Puis l'Autorité démontre que les clientèles résidentielle et professionnelle continuent également, en France, de délimiter deux marchés différents (I-2.1.3). Sont ensuite présentés les différents types d'accès (I-2.1.4), afin de permettre l'analyse des substituabilités entre grandes catégories d'accès. Les accès principalement dédiés à la téléphonie et les accès uniquement dédiés à la téléphonie sont substituables (I-2.1.5), les accès principalement dédiés à la téléphonie et ceux dont l'usage principal ne se limite pas à la téléphonie ne le sont pas (I-2.1.6). Les services de capacités ne font pas partie du marché de l'accès au service téléphonique (I-2.1.7), contrairement, enfin, à la composante « accès RTP » (1) associée aux services de capacité (I-2.1.8).

(1) Réseau téléphonique public.

I-2.1.1. Les services d'accès aux réseaux mobiles ne sont pas substituables
aux services d'accès aux réseaux fixes

Un accès mobile est caractérisé par le fait de permettre à l'utilisateur d'y avoir recours indépendamment de sa localisation. Cette fonctionnalité de mobilité conduit par nature à ce que l'utilisateur perçoive ces services comme différents des services « en position déterminée », ou « services fixes ». En outre, le mobile revêt un caractère personnel. En pratique, un foyer, quand bien même certains de ses membres disposeraient d'un téléphone mobile, se dispense rarement d'une ligne téléphonique fixe. L'Autorité constate d'ailleurs en pratique que le nombre d'accès aux services de téléphonie fixe n'a pas réellement diminué du fait de la pénétration des services mobiles. A ce jour, la grande majorité des usagers disposent ainsi à la fois d'un téléphone mobile et d'un accès au service téléphonique fixe. Les accès mobiles ne sont donc pas substituables à leurs équivalents fixes.
On observe néanmoins des effets de substituabilité limités entre les deux types de services. L'Autorité note qu'un usager final peut utiliser un accès mobile sur le lieu où il dispose de son accès fixe, la réciproque étant fausse par définition. Ces comportements découlent notamment des politiques de forfaits quasi-généralisées sur les réseaux mobiles, et du niveau relativement élevé du prix des communications depuis un poste fixe vers un mobile en comparaison de celui des communications d'un mobile vers un autre. Mais cet effet de substituabilité porte en réalité sur les prestations de communications et non sur les prestations d'accès.
L'Autorité remarque également l'apparition d'offres de convergence entre les réseaux fixes et mobiles. Ces offres sont proposées par des acteurs intégrés horizontalement sur les marchés fixe et mobile ou bien par des opérateurs fixe et mobile s'étant entendus pour proposer une offre conjointement. Certains de ces services permettent, lorsque l'on passe un appel avec son terminal mobile depuis chez soi, d'acheminer la communication via un accès Wi-Fi et de bénéficier ainsi des tarifs applicables pour les communications téléphoniques de type voix sur large bande. Un opérateur mobile s'est également positionné de manière à concurrencer ces offres de convergence à partir d'un service purement mobile. La politique commerciale de cet opérateur consiste à offrir ou à vendre à ses clients une option permettant de passer des appels illimités depuis leur terminal mobile lorsqu'ils sont chez eux. Il ne s'agit que d'une offre commerciale puisque techniquement les appels continuent d'être systématiquement acheminés via la boucle locale radio.
L'ensemble de ces nouveaux types d'offres conduit à penser que les services d'accès aux réseaux fixes et mobiles pourraient à long terme constituer un unique marché des services téléphoniques. Mais il ne s'agit à ce jour que de tendances potentielles puisque la très grande majorité des consommateurs continue d'utiliser les services fixes, d'une part, et les services mobiles, d'autre part, de façon distincte et non interchangeable.

I-2.1.2. Les services d'accès et les services de communications constituent des marchés distincts

Du point de vue historique, les prestations d'accès ont toujours été proposées séparément des prestations de communications. Bien qu'aujourd'hui se développent des offres couplant accès et communications, la majorité des clients continue de distinguer l'abonnement des communications dans leurs choix d'achats et dans le contrôle de leur budget.
En outre, le mécanisme de sélection du transporteur, introduit à partir de 1997, repose sur la séparation entre l'accès et les communications et maintient cette distinction. La sélection du transporteur a été mise en œuvre pour développer la concurrence entre les opérateurs fournissant l'acheminement des appels, indépendamment des conditions de concurrence qui pouvaient être observées sur le marché de l'accès au réseau téléphonique public (ci-après dénommé « RTP »). De fait, la souscription à un abonnement de téléphonie fixe et la souscription à un service de communications fixes, appel par appel ou en présélection, sont effectuées auprès d'opérateurs distincts. Sous le coup du développement d'offres de communications fondées sur la sélection du transporteur, l'intensité concurrentielle est sensiblement différente entre les marchés des communications et ceux de l'accès.
Cependant, depuis 2006 et la création de l'offre de vente en gros de l'accès au service téléphonique (ci-après dénommée « VGAST »), les opérateurs alternatifs ont la possibilité de proposer des offres couplant accès et communications aux clients titulaires d'un accès chez France Télécom. De même, France Télécom commercialise une gamme d'offres « Optimale » couplant accès et communications. Ces offres unifiées permettent de simplifier les usages des clients, avec notamment une facture unique au lieu de deux dans le cas de la sélection du transporteur.
A moyen terme, il est possible que les offres couplant accès et communications se généralisent et fusionnent les marchés de l'accès et des communications en un unique marché des services téléphoniques. Mais à ce jour, les offres de sélection du transporteur représentent encore une part très importante des offres de téléphonie des opérateurs alternatifs et la majorité des usagers continuent de distinguer l'achat de l'accès de l'achat des communications.
Pour ce qui concerne les prochaines années, l'Autorité estime donc que les marchés de l'accès et des communications ne sont pas substituables et continuent de constituer des marchés distincts. Cette analyse est conforme à la nouvelle recommandation « marchés pertinents » de la Commission européenne, qui explique dans la note explicative sur sa recommandation : « Telephone services are usually supplied as overall packages of access and usage. Various options and packages may be available to end users depending on their typical usage or calling patterns. Although many end users appear to prefer to purchase both access and outgoing calls from the same undertaking, many others choose alternative undertakings from the one providing access (and the receipt of calls) in order to make some or all of their outgoing calls. An undertaking that attempted to raise the price of outgoing calls above the competitive level would face the prospect of end users substituting alternative service providers. End users can relatively easily choose alternative undertakings by means of short access codes, (carrier selection via contractual or pre-paid means) or by means of carrier pre-selection. Whilst undertakings that provide access compete on the market for outgoing calls, it does not appear to be the case that undertakings supplying outgoing calls via carrier selection or pre-selection would systematically enter the access market in response to a small but significant non-transitory increase in the price of access. Therefore, it is possible to identify separate retail markets for access and outgoing calls. »

I-2.1.3. Les clientèles résidentielle et professionnelle délimitent des marchés distincts

La Commission européenne avait distingué dans ses lignes directrices et dans sa recommandation « marchés pertinents » de 2003, deux types de clientèles : les « abonnés résidentiels » et les « abonnés d'affaires » qui regroupent les professions libérales, les PME et les grandes entreprises. De même, dans sa première décision d'analyse des marchés de la téléphonie fixe, l'Autorité avait estimé que dans le cas français, la segmentation des marchés de détail en fonction des clientèles résidentielle et professionnelle était pertinente d'un point de vue concurrentiel et avait donc défini, d'une part, trois marchés pertinents de détail pour la clientèle résidentielle et, d'autre part, trois marchés pertinents de détail pour la clientèle professionnelle.
Dans sa nouvelle recommandation « marchés pertinents », estimant que les conditions d'accès ne diffèrent en réalité pas substantiellement d'un segment de clientèle à l'autre, la Commission européenne considère dorénavant que les clientèles résidentielle et professionnelle peuvent être regroupées au sein d'un même marché pertinent : « In the initial Recommendation, a distinction was made between residential and non-residential access. However, the experience so far of market analyses and notifications under the Framework Directive has shown that the contractual terms of access in most Member States, do not significantly and systematically differ between residential and non-residential access. Operators do not generally seek to classify different demand categories and do not normally register whether a particular access service is supplied to a residential or non-residential customer, so that collecting separate data for both groups of customers has in practice often appeared to be difficult. From a supply perspective, since similar products (in particular PSTN access lines) are often used by residential and non-residential users, suppliers to non-residential customers could generally divert their supplies to residential customers should prices to residential customers rise, and vice versa. On this basis, the Commission proposes in the draft revised Recommendation to define one single narrowband access market for residential and non-residential customers. » La Commission européenne précise toutefois dans le même document que les Autorités de régulation nationales ont la possibilité de décider, si les circonstances nationales le justifient, de continuer de considérer des marchés distincts pour les clientèles résidentielle et professionnelle : « NRAs may, however, decide on the basis of national circumstances and in line with competition law principles to segment this market further where this would be appropriate. » (2)
L'Autorité considère que la segmentation des marchés de détail entre clientèles résidentielle et non résidentielle demeure pertinente au cas d'espèce de la France. En effet, s'il existe un certain degré de substituabilité notamment en matière de demande, celle-ci n'est pas totale.
Tout d'abord en ce qui concerne les besoins des utilisateurs, les produits d'accès ainsi que les contrats associés à ces produits achetés par la clientèle non résidentielle diffèrent souvent de ceux achetés sur le marché résidentiel. A titre d'exemple, les accès de base (ainsi que les groupements d'accès de base) et les accès primaires (ainsi que les groupements d'accès primaire) sont quasi exclusivement achetés sur le marché non résidentiel. De plus, même si certains accès sont à la fois achetés par la clientèle résidentielle et non résidentielle (par exemple les accès analogiques), les caractéristiques associées à ces produits diffèrent fortement d'un marché à l'autre. Notamment, s'agissant des usagers du marché non résidentiel, les commandes d'accès sont souvent centralisées, les dates de livraison des commandes harmonisées, et en cas de portabilités des numéros, celles-ci se font souvent par bloc de numéros. En outre, ces usagers tendent à solliciter davantage de services associés ou avancés (présentation du nom, transfert d'appel, statistiques d'usage, etc.) et à acheter leurs accès via des appels d'offres (les processus d'achat sur les marchés résidentiels étant en général moins complexes). L'Autorité tient à souligner, toujours concernant les caractéristiques des usages sur les deux marchés de l'accès identifiés, que les clients professionnels présentent une demande nettement supérieure en termes de qualité de service (disponibilité, temps de rétablissement, service après-vente, etc.), une interruption de services pouvant porter préjudice au fonctionnement d'une entreprise, notamment en ce qui concerne la relation avec ses partenaires externes. Enfin, les profils d'usages diffèrent sensiblement sur les deux marchés et les clients professionnels utilisent les services de communications électroniques principalement durant les heures et jours ouvrables, à l'opposé des résidentiels. Les offres de détail achetées par ces deux catégories de client ne sont en conséquence pas identiques (mode de tarification, remises accordées, etc.).
Les besoins spécifiques des clients non résidentiels présentés supra ont un impact important sur la façon dont sont construites les offres sur ces deux marchés mais aussi sur la structure des marchés concernés. Ainsi, du côté de l'offre, on constate qu'à ce jour seuls deux acteurs desservent à la fois les clientèles résidentielle et professionnelle, les autres opérateurs étant positionnés exclusivement sur l'une ou l'autre. Or ces deux opérateurs continuent de développer des offres tarifaires différentes pour chacune d'elles. L'Autorité note également que les canaux de distribution et de commercialisation, et plus généralement les politiques commerciales de ces opérateurs, sont distincts entre les deux clientèles. Ainsi, chaque offre est explicitement destinée soit aux clients résidentiels, soit aux clients professionnels. Certains petits professionnels, dont les usages sont particulièrement proches de ceux des clients résidentiels, peuvent toutefois opter pour des offres conçues pour les résidentiels, mais ce chevauchement entre les deux franges de clientèles identifiées reste marginal.
Enfin, la plus grande complexité des offres destinées au marché non résidentiel impose des contraintes particulières aux opérateurs désirant adresser ce marché. Ces derniers doivent par exemple être en mesure d'offrir des garanties de qualité de service adaptées aux besoins des clients non résidentiels (garanties de temps de rétablissement plus élevés que sur les marchés résidentiels) ou encore collaborer avec des installateurs et intégrateurs pour le déploiement des infrastructures d'accès. A titre illustratif, du fait de la plus grande complexité des offres destinées à la clientèle du marché non résidentiel (et notamment de la qualité de service à fournir), l'utilisation de l'offre de gros de vente en gros de l'accès au service téléphonique (VGAST) a été plus rapide et répandue sur le marché résidentiel. Sur le marché non résidentiel, les opérateurs alternatifs ont estimé nécessaire de procéder au préalable à des expérimentations plus élaborées.
Au vu de ces éléments, l'Autorité estime justifié de segmenter les types de clientèle sur lesquels porte la délimitation des marchés et d'analyser la clientèle résidentielle, d'une part, et la clientèle professionnelle, d'autre part.

(2) Source : Note explicative de la Commission sur sa recommandation en date du 17 décembre 2007.

I-2.1.4. Les différentes prestations d'accès existantes

Avant de déterminer lesquelles font partie du marché pertinent de l'accès au service téléphonique, il convient de décrire l'ensemble des prestations d'accès disponibles sur le marché. Parmi les différentes prestations d'accès, il est possible de distinguer quatre types de produits, définis selon leur rapport avec la téléphonie :
― les accès utilisés exclusivement pour la téléphonie ;
― les accès utilisés principalement pour la téléphonie ;
― les accès dont l'usage principal ne se limite pas à la téléphonie ;
― les accès à des services de capacité ou des réseaux de données, qui peuvent être utilisés pour fournir un accès au réseau téléphonique public.
L'abonnement de base pour une ligne téléphonique fixe, quand il n'est utilisé pour aucun autre service que la téléphonie, correspond de façon évidente à un accès utilisé exclusivement pour la téléphonie.
Mais dès lors que la ligne en question est dégroupée partiellement, son usage n'est plus strictement limité à la téléphonie. En effet, l'abonnement à la ligne téléphonique permet également dans ce cas de souscrire par ailleurs un service d'accès à Internet (3). Néanmoins son usage principal reste le service téléphonique.
Une offre « triple play » en dégroupage total ou ADSL nu en revanche n'est pas utilisée principalement pour la téléphonie puisque ce type d'offre permet à la fois l'accès à Internet, l'accès à un service téléphonique de voix sur large bande et l'accès à un service de télévision sur ADSL. Il s'agit par conséquent d'un exemple d'offre dont l'usage principal ne se limite pas à la téléphonie.
Enfin, certains réseaux privés virtuels ou services de liaisons louées permettent l'accès à un service téléphonique ; ces accès correspondent à la dernière des catégories d'accès listées supra.
Les accès utilisés exclusivement pour la téléphonie font évidemment partie du marché pertinent de l'accès au service téléphonique. Afin de délimiter ce marché, il convient d'analyser la substituabilité de ce type de prestation avec les autres types d'accès au service téléphonique. L'analyse qui suit démontre la substituabilité entre les accès utilisés exclusivement pour la téléphonie et les accès utilisés principalement pour la téléphonie (I-2.1.5), la non-substituabilité entre les accès utilisés principalement pour la téléphonie et les accès dont l'usage principal ne se limite pas à l'accès au service téléphonique (I-2.1.6), la non-substituabilité entre les accès utilisés principalement pour la téléphonie et les accès de données (I-2.1.7) et enfin la substituabilité entre la composante « accès RTP » et les accès principalement téléphoniques dans les offres globales pour les entreprises (I-2.1.8).

(3) L'Autorité insiste sur le fait que cet abonnement ne permet pas directement de bénéficier d'un accès à Internet mais bien de souscrire une offre haut débit qui, elle, permet l'accès à Internet.

I-2.1.5. Les accès utilisés exclusivement pour la téléphonie et les accès
utilisés principalement pour la téléphonie sont substituables

Les offres d'abonnement analogiques de France Télécom permettent à leurs clients de souscrire un accès haut débit à Internet auprès de France Télécom ou d'un autre FAI via le dégroupage partiel ou le bitstream. Bien que ce service soit en nette décroissance, l'ensemble des produits commercialisés aujourd'hui pour donner accès au réseau téléphonique public permet également d'accéder à Internet en bas débit. Les offres d'abonnement analogique ne sont ainsi pas toujours utilisées exclusivement pour accéder au réseau téléphonique. Par ailleurs, l'offre d'accès de base RNIS comprend deux canaux B utilisés principalement pour la voix ainsi qu'un canal D utilisé pour la signalisation et le transport de données.
Même s'ils permettent des usages annexes, tous ces produits sont commercialisés principalement pour permettre d'accéder au service téléphonique et sont vendus dans une gamme de prix qui reflète principalement l'usage de l'accès au service téléphonique. Il existe donc une substituabilité du côté de la demande. Ces produits doivent par conséquent être considérés dans les mêmes marchés, y compris les prestations annexes incluses dans ces offres, dans la mesure où l'ensemble de ces services est commercialisable en bouquet indissociable.
Conformément à l'article L. 32-1-II (13°) du CPCE, l'analyse de l'Autorité se doit de rester technologiquement neutre. Le câblo-opérateur commercialise une offre d'accès exclusivement dédiée à la téléphonie qui fait donc partie du même marché que l'abonnement principal de France Télécom. Par ailleurs, si un opérateur commercialisait un produit d'accès pour la voix fondé sur d'autres technologies que celles utilisées aujourd'hui (analogique, RNIS), par exemple de la voix sur IP sur un accès exploitant la technologie ADSL ou un raccordement en fibre optique, et que ce produit était principalement utilisé pour accéder au réseau téléphonique public, et enfin s'il était vendu dans une même gamme de prix, alors il devrait être inclus dans les mêmes marchés que les autres accès principalement dédiés au service téléphonique.
Dans la suite, on qualifie de « principalement téléphonique » les accès exclusivement ou principalement dédiés au service téléphonique.

I-2.1.6. Les accès utilisés principalement pour la téléphonie
et les accès dont l'usage principal ne se limite pas à la téléphonie ne sont pas substituables

Les produits qui ne sont pas principalement utilisés pour accéder au réseau téléphonique ne peuvent pas être considérés comme substituables aux produits analysés dans la section précédente. Certaines offres d'accès, que le raccordement sous-jacent soit effectué par câble, par paire de cuivre ou par fibre optique, permettent d'accéder au réseau téléphonique mais fournissent de manière conjointe d'autres services tels que l'accès à haut débit au réseau Internet ou l'accès à un bouquet de chaînes de télévision. Dès lors que ces offres ne sont pas choisies par le client final principalement pour la prestation de téléphonie mais aussi, voire principalement, pour leur caractère « multiservice » (notamment l'accès au réseau Internet à haut débit ou à des services audiovisuels), elles ne répondent pas à la même demande que celles destinées principalement à l'accès téléphonique. Il n'existe donc pas de substituabilité du côté de la demande.
En outre, le positionnement et le développement des offres multiservices à haut débit, auxquelles un utilisateur s'abonne pour des services qui peuvent inclure le service téléphonique mais sans en constituer l'élément principal, les distinguent des offres dont cet accès est le principal usage. Le premier élément distinguant les accès principalement téléphonique des autres est le tarif. En effet, le tarif de détail des accès haut débit, s'il a connu une décroissance continue à un débit donné, reste sensiblement plus élevé que celui d'un accès dédié au service téléphonique.
A titre d'exemple, sur le segment résidentiel, les offres les plus vendues par les opérateurs alternatifs sont les offres « triple play » avec téléphonie illimitée en dégroupage total, qui comprennent à la fois l'accès à Internet en haut débit, un service téléphonique sur large bande avec un forfait illimité de communications vers les numéros géographiques métropolitains et certaines destinations internationales, ainsi qu'un bouquet de chaînes de télévision. Or la plupart de ces offres font l'objet d'un abonnement mensuel d'environ 30 €. Ce montant est à mettre en regard des forfaits mensuels associés aux offres d'accès exclusivement dédiées à la téléphonie. A titre d'exemples, l'abonnement mensuel au service téléphonique analogique de France Télécom s'élève à 16 € et ceux de Neuf Cegetel et Télé2 en VGAST sont respectivement de 13,90 € et 14,99 €. Enfin, Numéricable propose une offre couplant accès et communications illimitées vers les postes fixes pour 19,90 € par mois. Ces différences substantielles de niveaux de prix démontrent l'absence de substituabilité de ces différents types d'offres.
Cette analyse est identique pour le marché professionnel : les produits dont l'usage principal n'est pas limité à l'accès au réseau téléphonique ne sont pas substituables à ceux qui sont utilisés principalement pour accéder au réseau téléphonique. Cependant, pour le marché professionnel, il existe des offres de services de capacité qui peuvent être complétées par des offres complémentaires ouvrant l'accès au réseau téléphonique. Ces offres complémentaires doivent alors être considérées comme un accès principalement téléphonique, et être inclues dans le marché.

I-2.1.7. Les services de capacité et les accès à des réseaux de données
ne sont pas substituables aux accès utilisés principalement pour la téléphonie

Les services de capacité regroupent principalement les liaisons louées, quelle que soit leur interface (offre « point à point »), et les offres de services de capacité en architecture « point à multipoints ». Les accès à des réseaux de données regroupent principalement les offres de réseaux d'entreprises (réseaux privés virtuels), les accès à des réseaux de données privées ou publics. Même dans le cas où son débit est comparable à celui d'une ligne téléphonique traditionnelle, un service de capacité ― par exemple une liaison louée analogique ou numérique ― n'est pas substituable à un accès utilisé principalement pour la téléphonie. Les liaisons louées ne permettent que le transport de voix ou de données entre deux points fixes, et ne fournissent pas l'accès au réseau téléphonique ouvert au public. Réciproquement, une liaison louée assure la fourniture d'une capacité de transmission à la fois garantie et dédiée à l'utilisateur, ce qui n'est pas le cas des accès en bande étroite en position déterminée (parmi lesquels seul l'accès numérique offre un débit garanti mais pas dédié). Une liaison louée peut être utilisée comme élément constitutif d'un accès utilisé pour la téléphonie, mais elle n'en est pas un substitut (cf. section suivante).
La situation est identique pour les services de capacité, les accès à des réseaux de données d'entreprise et les accès à des réseaux de données privés ou publics. Il est possible d'adjoindre à chacun de ces services une fonctionnalité qui permet d'accéder au RTP, mais cette fonctionnalité doit alors être considérée comme une composante spécifique (cf. section suivante). Pour ces raisons, il apparaît que les services de capacité et les accès à des réseaux de données ne peuvent être considérés comme substituables aux accès principalement utilisés pour la téléphonie et ne sont donc pas inclus dans le même marché.

I-2.1.8. La composante « accès RTP » associée aux services
de capacité est substituable aux accès principalement téléphoniques

Certains services de capacité proposent une fonctionnalité optionnelle permettant d'accéder au RTP. Ce type d'accès fait actuellement l'objet d'une obligation de sélection du transporteur. Ces options sont clairement distinguables de la prestation de services de capacité, aussi bien pour les opérateurs que pour les clients. Ces options ne sont donc pas soumises au même jeu concurrentiel que les offres de capacités auxquelles elles sont associées, mais bien à celui des accès principalement téléphoniques. Le client peut arbitrer entre l'offre d'accès au RTP proposée en option sur l'offre de service de capacité qu'il souscrit par ailleurs et les autres offres d'accès proposées indépendamment par son opérateur et ses concurrents, en accès direct à l'un de ses sites. Dès lors il apparaît que ces prestations optionnelles d'accès au réseau RTP doivent être considérées comme substituables aux accès principalement téléphoniques.
En revanche, les offres de « service téléphonique tout IP » fondées sur des réseaux privés virtuels se distinguent des offres classiques tant dans le périmètre de la prestation qui inclut une forte composante de services complémentaires d'administration des réseaux IP sous-jacents et de l'ensemble des prestations fournies sur ce réseau, que dans les structures tarifaires qui en découlent. Ces offres de « téléphonie IP » peuvent combiner accès au RTP et fourniture d'un réseau interne de téléphonie. Ces offres ne sont donc pas substituables à un accès principalement téléphonique.

I-2.2. Délimitation géographique des marchés de détail
de l'accès au réseau téléphonique public

Après avoir délimité les marchés de détail de l'accès en termes de produits, il est nécessaire d'établir leur délimitation géographique.
Le groupe France Télécom est présent, tant pour les prestations de détail que pour les prestations de gros, sur tout le territoire d'analyse, qui comprend la métropole, les départements d'outre-mer, et Mayotte, Saint-Martin et Saint-Barthélemy. L'Autorité estime que les conditions de concurrence sont suffisamment proches en métropole, dans les départements d'outre-mer et à Mayotte, Saint-Martin et Saint-Barthélemy pour les intégrer dans les mêmes marchés, dans la mesure où la présence et la pratique d'une politique commerciale, et tarifaire notamment, uniforme sur l'ensemble de ce territoire de l'opérateur France Télécom y structurent le jeu concurrentiel de manière suffisamment homogène.
Par conséquent, la délimitation géographique retenue dans la présente analyse pour les marchés de détail de l'accès correspond à la métropole, aux départements d'outre-mer, et aux collectivités territoriales de Mayotte, Saint-Martin et Saint-Barthélemy.

I-2.3. Commentaires des acteurs sur l'analyse de l'Autorité

Colt et l'AFORST considèrent que le marché pertinent de l'accès devrait être plus large que celui délimité par l'Autorité, en ne se limitant pas aux accès principalement ou exclusivement dédiés à la téléphonie. Colt précise que les offres « triple play » peuvent être comparées par les clients aux offres couplant abonnement et communications sur RTC. France Télécom estime que l'analyse de l'Autorité ne prend pas en compte la pression concurrentielle exercée par les offres haut débit et mobiles sur le marché de l'accès à la téléphonie fixe.
L'Autorité considère que les offres d'accès haut débit incluant un accès VLB ne sont pas substituables à un accès principalement dédié à la téléphonie. En effet, ces offres « multiplay », notablement plus chères que les abonnements téléphoniques seuls, ne constituent pas un substitut pour les clients ne désirant accéder aux autres services (accès à Internet, télévision sur ADSL). Cette analyse conduit à exclure ces offres du marché pertinent de l'accès au service téléphonique. Elle ne conteste pas néanmoins le fait que les offres haut débit incluant un accès VLB puissent, dans une mesure limitée, exercer une pression concurrentielle sur le segment des clients intéressés par les autres services haut débit, sans pour autant remettre en cause la non-substituabilité des offres « multiplay » avec les offres principalement dédiées à la téléphonie.
France Télécom conteste la segmentation effectuée par l'Autorité sur le marché de l'accès au service téléphonique entre le marché résidentiel, d'une part, et le marché non-résidentiel, d'autre part. Elle précise que dans sa nouvelle recommandation sur les marchés pertinents la com mission propose de définir un unique marché de l'accès. Elle estime en outre que le contexte décrit par l'Autorité ne diffère pas dans les autres pays de l'UE.
L'Autorité rappelle que dans sa recommandation la Commission laisse la possibilité aux ARN de maintenir une segmentation entre clientèles résidentielle et non résidentielle lorsque le contexte national le justifie. En l'occurrence, il apparaît à l'Autorité que le marché français de la téléphonie se divise nettement entre le résidentiel et le non-résidentiel, tant du point de vue de l'offre que de la demande. Du côté de la demande, les statistiques d'usages sont très différentes entre les deux segments, de même que la demande en niveau de qualité de service. Du côté de l'offre, il existe une séparation nette entre les offres destinées à la clientèle résidentielle, d'une part, et les offres conçues pour les clients professionnels et entreprises, d'autre part. En outre, chaque type de clientèle achète dans la très grande majorité des cas des produits destinés au segment auquel il appartient. Les clients résidentiels ne souscrivent que très marginalement des offres non résidentielles et les entreprises n'achètent que marginalement des produits conçus à l'intention du segment résidentiel.
Neuf Cegetel propose dans sa contribution une autre délimitation des marchés de l'accès non résidentiel, constituée de quatre segments : les petits professionnels, les PME, les entreprises monosite et les entreprises multisites.
L'Autorité estime que cette sous-segmentation du marché non résidentiel correspond à une approche relevant plus du marketing que d'une véritable segmentation du type de produits offerts et des cond itions d'exercice de la concurrence.

I-2.4. Avis du Conseil de la concurrence

Le Conseil de la concurrence souscrit à l'analyse de l'Autorité et en particulier à la pertinence de la segmentation en deux marchés de l'accès distincts pour les usagers résidentiels, d'une part, et non résidentiels, d'autre part.

I-2.5. Observations de la Commission européenne

La Commission européenne ne formule aucune observation concernant la délimitation des marchés de détail de l'accès.

I-2.6. Conclusion

La délimitation des marchés de détail de l'accès, pour la clientèle résidentielle, d'une part, et pour la clientèle non résidentielle, d'autre part, reste inchangée par rapport à l'analyse effectuée par l'Autorité en 2005. Ces marchés comprennent les offres dédiées principalement ou exclusivement à l'accès au service téléphonique, sur l'ensemble du territoire d'analyse :
― le marché de détail de l'accès au réseau téléphonique public depuis un poste fixe du territoire d'analyse, permettant d'émettre et/ou de recevoir des communications téléphoniques et d'utiliser les services associés à l'accès, pour la clientèle résidentielle. Ce marché est constitué des produits d'accès utilisés par la clientèle résidentielle principalement pour accéder au réseau téléphonique public ;
― le marché de détail de l'accès au réseau téléphonique public depuis un poste fixe du territoire d'analyse, permettant d'émettre et/ou de recevoir des communications téléphoniques et d'utiliser les services associés à l'accès, pour la clientèle professionnelle. Ce marché est constitué des produits d'accès utilisés par la clientèle professionnelle principalement pour accéder au réseau téléphonique public ; en particulier, il inclut les prestations spécifiques des offres de services de capacité destinées aux clients professionnels qui donnent accès au réseau téléphonique public.

I-3. Délimitation des marchés de gros du départ d'appel et de la terminaison d'appel fixe
I-3.1. Préambule relatif aux architectures des réseaux

La première partie de ce document, « Bilan et perspectives », a permis de décrire les évolutions des architectures et des technologies utilisées par les opérateurs fixes. Cette partie se concentre sur l'organisation de l'interconnexion.

I-3.1.1. Architecture des réseaux téléphoniques
Figure 1 : Architecture générique du réseau téléphonique public

Vous pouvez consulter le tableau dans le
JOn° 187 du 12/08/2008 texte numéro 51

Ce schéma présente l'architecture type d'un réseau téléphonique. Le terminal de l'abonné est directement relié à un équipement de commutation ou de routage, chargé d'acheminer l'appel vers son destinataire. Si ce dernier n'est pas raccordé par le même élément de réseau, l'appel est véhiculé, sur un réseau de transit, jusqu'à l'équipement de commutation ou de routage le desservant.

I-3.1.1.1. Cas du réseau téléphonique commuté de France Télécom

Le réseau « historique » de France Télécom est un réseau téléphonique commuté, organisé hiérarchiquement et présenté ci-après. Depuis quelques années, France Télécom a déployé des équipements IP, lui permettant d'utiliser la technologie VoIP pour l'acheminement de la voix (commercialisée sous la marque « Orange Internet » sur le marché résidentiel et « Orange Business Services » sur le marché entreprises) et de proposer des services supplémentaires à des abonnés. Deux réseaux, RTC et IP, coexistent ainsi.
Sur le réseau téléphonique commuté de France Télécom, les commutateurs raccordant les abonnés sont appelés « commutateurs d'abonnés » (CA) ou « commutateurs à autonomie d'acheminement » (CAA).

Figure 2 : Architecture du réseau téléphonique commuté de France Télécom

Vous pouvez consulter le tableau dans le
JOn° 187 du 12/08/2008 texte numéro 51

Un commutateur de transit (CT) raccorde plusieurs commutateurs d'abonnés et achemine le trafic qui leur est destiné ou qu'ils génèrent. La métropole est divisée en 18 zones de transit (ZT), comprenant chacune un commutateur de transit (4) auquel sont connectés plusieurs commutateurs d'abonnés. Les réseaux commutés des autres opérateurs de boucle locale sont souvent d'envergure plus faible que celui de France Télécom, et ne possèdent généralement qu'un seul niveau de commutation, pouvant assurer simultanément des fonctions de transit et de commutation.

(4) En pratique, une zone de transit comprend un ou plusieurs commutateurs de transit doublons, assurant la sécurité de l'acheminement du trafic géré par le commutateur de transit principal.

I-3.1.1.2. Cas des réseaux NGN

Les opérateurs, dont France Télécom, ont déployé également des réseaux s'appuyant sur la technologie de transmission en IP. Ces réseaux, qualifiés de « réseaux de nouvelle génération » (NGN ou « Next Generation Networks ») présentent notamment l'avantage de pouvoir être utilisés pour transporter simultanément des flux de voix et de données à des débits importants sur une unique infrastructure de transport utilisant la technologie IP. De plus, ces réseaux permettent de concentrer et de centraliser les équipements de gestion des appels. En effet, les équipements NGN gèrent généralement un plus grand nombre d'abonnés que les équipements de commutation et ne sont pas organisés de façon pyramidale, chaque équipement étant relié à un ou plusieurs autres équipements de même niveau. L'acheminement des communications peut emprunter plusieurs routes différentes pour relier deux abonnés entre eux, de même que le trafic de signalisation peut emprunter une route différente du trafic de données.
Les réseaux NGN peuvent servir comme réseaux de transit, y compris pour du trafic émis ou reçu par des clients raccordés au réseau téléphonique commuté. Dans ce cas, les appels passent par une passerelle TDM/IP qui convertit le trafic commuté en trafic IP, les interconnexions IP-IP entre deux opérateurs n'étant pas aujourd'hui en œuvre à la connaissance de l'Autorité (sauf à titre expérimental). De plus, pour un nombre croissant d'opérateurs, les réseaux NGN servent à acheminer directement les communications émises ou reçues par les clients finals, à partir d'accès large bande notamment. En particulier, France Télécom commercialise ce type de services sous la marque « Orange Internet » sur le marché résidentiel et « Orange Business Services » sur le marché entreprises.
Au deuxième trimestre 2007, environ 30 % du trafic émis depuis les lignes fixes en France l'ont été depuis des lignes VoIP.
L'interconnexion des réseaux est aujourd'hui toujours réalisée en utilisant la technologie TDM. Les flux IP arrivant à un point d'interconnexion sont convertis systématiquement en flux TDM, préalablement à leur livraison à l'opérateur tiers. Les réseaux NGN et les structures de coûts qui en découlent conduisent généralement les opérateurs à concentrer leurs points d'interconnexion en des points proches des équipements de commande et de gestion des appels et des abonnés.
L'Autorité constate que les opérateurs alternatifs utilisant un réseau NGN ont ainsi concentré leurs architectures d'interconnexion autour d'un nombre de points compris entre 1 et une dizaine. De même, pour les appels à destination de ses abonnés « Orange Internet » qui sont raccordés en VoIP et qui utilisent des numéros non géographiques, France Télécom a mis en place une architecture d'interconnexion resserrée autour de neuf points d'interconnexion (même s'il est possible de livrer ces appels dans tous les centres de transit de France Télécom). A la date du présent document, cette architecture n'était cependant pas en vigueur pour les appels à destination des numéros géographiques sur accès VoIP de France Télécom car les opérateurs alternatifs ne sont pas en mesure de distinguer ces numéros des numéros géographiques sur accès RTC classique.

I-3.1.2. Architecture d'interconnexion

Pour s'interconnecter avec les autres réseaux et permettre à ses abonnés de joindre et d'être joints par les abonnés des autres réseaux, chaque opérateur de boucle locale doit mettre en place une architecture d'interconnexion.
Cette architecture d'interconnexion est généralement calquée sur l'architecture générale du réseau de l'opérateur, dans la mesure où chaque opérateur a intérêt à échanger les appels entrants et sortants de son réseau près de ses équipements de commutation et/ou de routage. L'architecture d'interconnexion la plus pertinente pour un réseau est généralement définie par l'opérateur de ce réseau et peut dépendre de la taille de son réseau, de la localisation géographique de ses clients et de la technologie utilisée dans le réseau. Elle dépend également des contraintes des opérateurs qui souhaitent s'interconnecter et peut évoluer selon les rapports bilatéraux entre opérateurs.

I-3.2. Eléments d'analyse communs à tous les marchés de gros

L'analyse des substituabilités comporte des éléments communs aux marchés du départ d'appel et de la terminaison d'appel. Cette partie montre que les prestations de gros d'acheminement de trafic produites selon différents modes techniques sont substituables (I-3.2.1), puis que les prestations de gros d'acheminement de trafic vocal, de trafic à destination d'Internet bas débit et à destination des services à valeur ajoutée sont substituables (I-3.2.2), que l'origine des communications (résidentiel ou non-résidentiel) ne délimite pas de marchés de gros distincts (I-3.2.3), et enfin que les prestations connexes aux prestations de gros d'acheminement de trafic sont incluses dans le même marché (I-3.2.4).

I-3.2.1. Les prestations de gros d'acheminement de trafic produites
selon différents modes techniques sont substituables

Les opérateurs qui s'échangent aujourd'hui des prestations de gros d'acheminement de trafic se livrent ce trafic en mode commuté sur des interfaces d'interconnexion utilisant principalement des protocoles de signalisation de type « signalisation sémaphore n° 7 ». Avant et après ce point d'interconnexion, les opérateurs acheminent le trafic sur leur réseau.
Les produits inclus dans les marchés de gros analysés ici désignent des prestations d'acheminement de trafic offertes par certains opérateurs pour le compte d'autres opérateurs. Par conséquent, ils sont définis par leur fonction et non par leur mode technique de production, conformément au principe de neutralité technologique. L'Autorité considère à cet égard que la prestation commercialisée ne se définit pas par son mode de production ou par la technologie utilisée, mais par ses caractéristiques visibles pour l'acheteur. Par exemple, dans le cas de la terminaison d'appel fixe, la prestation de terminaison d'un appel vocal vers un numéro spécifique, livré en un point d'interconnexion donné quelle que soit l'interface, dans le cas de la.
En particulier, le fait que le trafic soit transporté, avant et après livraison sur l'interface d'interconnexion, en mode commuté, en mode VoIP ou selon tout autre mode reste neutre sur la définition du produit du point de vue de l'acheteur, qui n'est de toute façon pas en mesure de savoir quelle sera la technologie de transport utilisée par l'opérateur vendeur de la prestation. De fait, en l'état actuel des interconnexions, les appels acheminés en mode ATM (« Asynchronous transfer mode » ou mode de transfert asynchrone) ou VoIP sur les réseaux des opérateurs sont convertis en mode commuté à l'interconnexion. De même, des prestations de gros qui seraient livrées sur de nouvelles interfaces d'interconnexion, et notamment sur des interfaces de type VoIP, et qui permettraient aux opérateurs y ayant recours de proposer sur les marchés de détail des produits similaires à ceux qui s'appuient aujourd'hui sur les prestations de gros existantes analysées dans la présente décision, seront de fait incluses dans les marchés pertinents correspondants.

I-3.2.2. Les prestations de gros d'acheminement de trafic vocal, de trafic
à destination d'Internet bas débit et à destination des services à valeur ajoutée sont substituables

Les marchés de gros analysés ici doivent être délimités de telle sorte à couvrir l'acheminement des communications téléphoniques. Les termes « communications téléphoniques » regroupent, dans le cadre du présent document, tant les communications vocales interpersonnelles que d'autres communications vocales, comme celles consistant à joindre des plates-formes de services avancés (les « services à valeur ajoutée »). En pratique, les prestations de gros fournies par un opérateur pour ce type de trafic permettent également aux opérateurs acheteurs de véhiculer d'autres types de trafic bande étroite, comme, notamment, de l'Internet bas débit (limité à 64 kb/s), ou des communications par télécopie.
L'Autorité estime que les prestations d'acheminement de trafic en gros fournies pour ces différents types de trafic, et plus généralement pour l'ensemble du trafic à destination des numéros du plan national de numérotation, doivent être incluses dans un même marché. En effet, la plupart des opérateurs offrant des prestations de gros d'acheminement de trafic pour l'un de ces types de trafic fournissent également ces prestations pour les autres trafics, et cela en utilisant les mêmes éléments de réseau. Par conséquent, et même si du point de vue de la demande les prestations d'acheminement des différents types de trafic ne sont pas substituables, elles présentent un degré de substituabilité du côté de l'offre qui justifie leur inclusion dans un même marché de produits.

I-3.2.3. Les prestations de gros d'acheminement de trafic
issu des abonnés résidentiels et non résidentiels sont substituables

De même, même si la structure de la demande des clients finals sur le marché de détail est différente pour les communications résidentielles et les communications non résidentielles, la substituabilité du côté de l'offre sur le marché de gros permet également de regrouper les prestations appartenant à ces deux types de clientèle en un seul marché.

I-3.2.4. Les prestations connexes aux prestations d'acheminement
de trafic sont incluses dans le même marché

Les prestations d'acheminement de trafic (départ et terminaison d'appel notamment) ne sont fournies qu'à condition d'avoir mis en place une interconnexion physique et logique des réseaux. Cette interconnexion nécessite le recours à différentes prestations connexes comme la création d'un faisceau, la location d'un espace de colocalisation, la sécurisation de l'interconnexion, etc. En particulier, les prestations d'accès aux sites d'interconnexion et de sécurisation du trafic sont essentielles pour la fourniture des prestations d'acheminement de trafic.
Ces prestations connexes ne font sens que dans l'objectif de recourir aux prestations principales d'acheminement de trafic et, inversement, ces dernières ne sont pas réalisables sans ces prestations connexes. Par conséquent, les marchés de gros d'acheminement de trafic incluent les prestations connexes qui leur sont associées.

I-3.3. Le marché de la terminaison d'appel fixe vers chaque réseau
I-3.3.1. Définition de la terminaison d'appel fixe

La terminaison d'appel fixe désigne les prestations d'acheminement d'appels fournies par un opérateur de boucle locale (OBL) à d'autres opérateurs afin de permettre à ces derniers d'établir, via l'interconnexion de leur réseau au réseau de cet OBL, des communications téléphoniques à destination des abonnés raccordés à cet OBL. Du fait du sens des communications ainsi acheminées, on dit que cet OBL « termine » les appels vers ses abonnés.
Du point de vue de l'opérateur acheteur, une prestation de terminaison d'appel est demandée indépendamment de la technologie employée au sein du réseau de l'opérateur de boucle locale offrant cette prestation : avant et après le point d'interconnexion des réseaux, l'acheminement du trafic est de la seule responsabilité de l'opérateur considéré quant au choix de la solution technologique. L'opérateur de terminaison d'appel offre alors une prestation de terminaison d'appel au niveau d'équipements sur lesquels il est possible de proposer l'interconnexion, et au-delà desquels seul l'opérateur de réseau de l'abonné appelé est capable de terminer l'appel. Ces équipements constituent le goulot d'étranglement structurel, le point le plus « bas » offert par l'opérateur pour livrer l'appel.

Figure 3 : Prestation de terminaison d'appel

Vous pouvez consulter le tableau dans le
JOn° 187 du 12/08/2008 texte numéro 51

I-3.3.2. Opérateurs de boucle locale concernés

Les prestations de terminaison d'appel sont fournies par des opérateurs de boucle locale, c'est-à-dire des opérateurs qui raccordent les utilisateurs finals sur leur réseau, et qui associent à ce service la possibilité pour ces utilisateurs de recevoir une communication téléphonique.
Ainsi, sont concernés l'ensemble des réseaux téléphoniques fixes, quelle que soit leur couverture géographique, utilisant des infrastructures en propre tels que les réseaux cuivrés classiques, les réseaux de câblo-téléphonie, de boucle locale radio, ou les réseaux en fibre optique, mais également les réseaux utilisant la location d'infrastructures d'accès à des tiers pour fournir des accès téléphoniques, tels que les réseaux utilisant des liaisons louées d'accès ou des paires de cuivre dégroupées. De plus, les prestations de terminaison d'appel sont fournies quelle que soit la technologie utilisée pour le raccordement de l'abonné au réseau téléphonique public (accès analogique, accès numérique, accès VoIP, etc.).

I-3.3.3. Analyse de la substituabilité entre les différentes offres de terminaison d'appel fixe

Après avoir donné un sens aux termes de « terminaison d'appel », il est justifié, pour effectuer la délimitation du marché, de partir du marché le plus petit possible, à savoir la terminaison d'un appel vocal à destination d'un numéro spécifique d'un OBL, puis d'examiner quelles prestations doivent également être incluses dans ce marché en fonction de la substituabilité que présentent les autres prestations du côté de la demande et du côté de l'offre.
Concernant la terminaison d'appel fixe, cet examen des degrés de substituabilité conduit à conclure que :
― le marché contient au moins l'ensemble des prestations de terminaison d'appel fixe d'un opérateur sur son réseau (I-3.3.3.1) ;
― les prestations de terminaison d'appel fournies par des opérateurs distincts sont incluses dans des marchés distincts (I-3.3.3.2) ;
― les prestations de terminaison d'appel fixe et de terminaison d'appel mobile d'un opérateur ne sont pas substituables (I-3.3.3.3) ;
― les offres couplant terminaison et transit ne font pas partie du marché (I-3.3.3.4) ;
― les prestations de terminaison d'appel produites selon différents modes techniques sont substituables (voir partie I-3.2 précédemment développée) ;
― les prestations de terminaison d'appel fournies pour du trafic issu d'abonnés résidentiels et d'abonnés non résidentiels sont substituables (voir partie I-3.2 précédemment développée).

I-3.3.3.1. Le marché contient au moins l'ensemble des prestations
de terminaison d'appel fixe d'un opérateur donné

La prestation de terminaison d'appel fixe vendue par un opérateur de boucle locale pour les appels à destination d'un des abonnés raccordés à son réseau n'est pas en soi substituable à la prestation vendue pour les appels à destination d'un autre de ses abonnés. L'Autorité considère néanmoins que ces deux prestations doivent être incluses dans le même marché car, du point de vue de l'offre, elles sont généralement commercialisées de manière homogène et soumises aux mêmes contraintes au regard de leurs conditions de production et du point de vue de la demande, elles font généralement l'objet d'une demande d'interconnexion relative à l'ensemble des numéros fixes d'un opérateur donné.
En particulier, l'Autorité constate que l'attribution de numéros géographiques (01 à 05) ou non géographiques (087B et 09AB) résulte généralement de la politique de l'opérateur ou des souhaits des clients finals mais qu'il n'y a aujourd'hui pas de distinction faite entre les clients utilisant des numéros géographiques et les clients utilisant des numéros non géographiques, certains d'entre eux pouvant même disposer d'un numéro géographique et d'un numéro non géographique pour la même ligne. De plus, lors de la mise en place d'une interconnexion, l'acheteur de terminaison d'appel souhaite généralement pouvoir joindre l'ensemble des numéros fixes, géographiques ou non, de l'opérateur vendeur.
A ce titre, l'analyse de l'Autorité a évolué depuis la dernière analyse menée en 2005. A l'époque, l'Autorité avait notamment considéré, concernant la TA vers les numéros non géographiques qu'il était « trop tôt pour mener une analyse pertinente de l'ensemble des critères de puissance listés par la Commission européenne sur ces prestations, et tout particulièrement l'existence ou non de contre-pouvoirs d'acheteurs sur ces marchés ». En effet, ces numéros venaient de faire leur apparition et l'Autorité ne disposait pas encore d'assez de recul sur les services offerts via ces numéros. Comme le montre l'analyse ci-dessus, les numéros non géographiques sont aujourd'hui utilisés pour les mêmes services et dans les mêmes conditions que les numéros géographiques.
L'Autorité rappelle que les numéros pour lesquels une prestation de terminaison d'appel fixe est fournie sont uniquement les numéros fixes du plan national de numérotation appelés « numéros de communications interpersonnelles » et commençant, à ce jour, par 01, 02, 03, 04, 05 et 09 et, jusqu'au 15 décembre 2008, 087 (5). Le marché de la terminaison d'appel inclut donc toutes les prestations de terminaison vers ces types de numéros et vers toute autre ressource en numérotation susceptible d'être affectée à un usage de communications interpersonnelles en position déterminée impliquant une architecture d'interconnexion directe avec fourniture d'une prestation de terminaison d'appel.
L'acheminement des communications vers les numéros d'accès à des services à valeur ajoutée (à ce jour, numéros commençant par 08 et numéros courts de la forme 10XY, 3BPQ et118XYZ) ne recourt pas à une prestation de terminaison d'appel mais à une prestation de départ d'appel, les communications étant « collectées » par l'opérateur d'arrivée. Il ne peut donc exister de marché de la terminaison d'appel vers ces types de numéros.
L'Autorité considère donc que l'ensemble des prestations de terminaison d'appel fixe fournies par un même opérateur de boucle locale fixe sur son réseau doit être regroupé dans un même marché.

(5) Voir la décision n° 2005-1085 de l'ARCEP en date du 15 décembre 2005 fixant l'utilisation des catégories de numéros du plan national de numérotation.

I-3.3.3.2. Les prestations de terminaison d'appel fournies
par des opérateurs distincts sont incluses dans des marchés distincts

Pour déterminer si les offres d'opérateurs de boucle locale distincts doivent être regroupées ou non dans un même marché, il convient d'examiner les possibilités de substitution entre les prestations de terminaison d'appel offertes sur deux réseaux distincts pour l'acheminement de communications à destination de mêmes clients.
Lorsqu'un opérateur souhaite terminer un appel vers un abonné d'un OBL, il ne dispose d'aucune solution de substitution à la prestation de terminaison d'appel de cet OBL, seul ce dernier étant capable d'acheminer l'appel sur la dernière partie du réseau, jusqu'à son abonné. Il en résulte que les prestations de terminaison d'appel fournies par des opérateurs distincts ne peuvent être considérées comme substituables du point de vue de l'offre.
Cette analyse rejoint d'ailleurs l'analyse de la Commission européenne dans sa recommandation sur les marchés pertinents.

I-3.3.3.3. Les prestations de terminaison d'appel vocal mobile et de terminaison
d'appel fixe d'un même opérateur ne sont pas incluses dans le même marché

Comme indiqué supra, il semble pertinent d'inclure dans le même marché toutes les prestations de terminaison d'appel fixe d'un opérateur pour des raisons d'identité des conditions d'offre et de demande de ces prestations.
A l'inverse, les prestations de terminaison d'appel fixe et de terminaison d'appel mobile d'un opérateur donné ne sont pas substituables. En effet, les ressources en numérotation utilisées pour offrir une prestation de terminaison d'appel mobile sont différentes des ressources utilisées pour la terminaison d'appel fixe. De plus, les architectures d'interconnexion peuvent également différer pour ces deux prestations. Enfin, la nature même du service fourni est différente : un appel à destination d'un client de réseau mobile ne peut se substituer à un appel à destination d'un poste fixe dans la mesure notamment où l'usage des services mobiles et fixes peuvent différer en particulier en situation de mobilité.
Néanmoins, à terme, l'Autorité veillera à accroître la cohérence entre les terminaisons d'appel fixe et mobile.

I-3.3.3.4. Les offres couplant terminaison et transit ne font pas partie du marché

Certaines offres de terminaison d'appel peuvent inclure une prestation supplémentaire de transit. C'est par exemple le cas lorsqu'il est techniquement possible, pour l'opérateur sollicitant la prestation, de s'interconnecter à un équipement A situé à un niveau plus bas du réseau, mais qu'il choisit plutôt de s'interconnecter à un équipement B situé plus haut dans le réseau et de confier l'acheminement de trafic entre B et A à l'opérateur de terminaison.
Pour autant, les opérateurs pourront a priori connaître soit au regard de la localisation de l'abonné appelé ou appelant, soit par une information fournie par l'opérateur appelé (cf. base des numéros portés), l'équipement techniquement et économiquement le plus pertinent sur lequel livrer l'appel à destination dudit abonné. Ils pourront par conséquent choisir de s'interconnecter directement à cet équipement, ou de livrer plutôt l'appel à un niveau supérieur ou simplement à un autre équipement d'interconnexion, sollicitant par là même une prestation supplémentaire de transit.
L'Autorité estime que les offres de terminaison sur un réseau donné incluant le transit vers ce même réseau ne peuvent être considérées comme des substituts à la terminaison d'appel vendue par chacun des opérateurs de boucle locale fixe au niveau des éléments de commutation ou de routage les plus pertinents permettant d'assurer la prestation de terminaison d'appel. Ces offres de « transit + terminaison d'appel » doivent en effet être considérées, dans la segmentation des marchés retenue par l'Autorité, comme un couplage entre deux prestations faisant partie de deux marchés distincts, à savoir le transit, d'une part, et la terminaison d'appel, d'autre part. La pertinence de ce choix de délimitation entre les marchés de la terminaison d'appel et du transit s'explique principalement par le fait que la terminaison d'appel, au contraire du transit, ne peut être fournie que par l'opérateur de boucle locale, ainsi que par les différences significatives de niveaux tarifaires entre les prestations de terminaison d'appel et les prestations de transit incluant la terminaison d'appel.
Par conséquent, les prestations fournies actuellement décrites sous le terme de « terminaison » et qui incluent le transit permettant l'accès à ces prestations de terminaison d'appel au niveau des commutateurs ou routeurs pertinents et, plus généralement, de tout point d'interconnexion pertinent pour la fourniture de cette offre seront réputées comme n'appartenant pas au marché pertinent de la terminaison d'appel mais comme regroupant terminaison d'appel et transit.

I-3.3.3.5. Cas particulier du marché de la terminaison d'appel de France Télécom

Comme pour tous les opérateurs, les prestations de terminaison d'appel fournies par France Télécom sont réalisées au niveau d'équipements sur lesquels il est possible de proposer l'interconnexion, et au-delà desquels seul l'opérateur de réseau de l'abonné appelé est capable de terminer l'appel. Ces équipements constituent le goulot d'étranglement structurel, le point le plus « bas » offert par l'opérateur pour livrer l'appel. Cette définition s'applique aussi bien au réseau commuté qu'au réseau VoIP de France Télécom.
Comme exposé supra, le réseau de France Télécom est historiquement un réseau en mode commuté, organisé de manière hiérarchique avec deux niveaux possibles d'interconnexion.
Compte tenu des démonstrations précédentes, les prestations d'interconnexion de France Télécom au niveau des CT sont considérées comme des prestations couplant terminaison d'appel (pour la partie CA-abonné) et transit (pour la partie CT-CA). Ces prestations ne font pas partie du même marché que la prestation d'interconnexion au niveau des CA. De plus, France Télécom a déployé une architecture d'interconnexion particulière pour les appels à destination des ses abonnés raccordés en VoIP, en définissant un nombre limité de CT comme points d'interconnexion VoIP. Conformément au principe de neutralité technologique de la régulation et aux raisonnements développés ci-dessus, les prestations de terminaison d'appel vers les abonnés VoIP vendues à ces points font partie du même marché que les prestations de terminaison d'appel aux CA vendues pour les abonnés raccordés au réseau commuté de France Télécom.
Au demeurant, ce regroupement est valable pour tout opérateur distinguant plusieurs architectures d'interconnexion pour joindre ses abonnés.

I-3.3.4. Délimitation en termes géographiques

Dans la mesure où le marché de produits a été défini comme étant la terminaison d'appel sur le réseau individuel de chaque opérateur de boucle locale fixe, la dimension géographique du marché de la terminaison d'appel sur ce réseau coïncide avec la couverture géographique du réseau de boucle locale de l'opérateur considéré.

I-3.3.5. Commentaires des acteurs sur l'analyse de l'Autorité

Numéricâble conteste le projet d'analyse des marchés de la terminaison d'appel menée par l'Autorité : l'opérateur estime notamment que la terminaison d'appel vers son propre réseau est substituable à la terminaison d'appel sur le réseau de France Télécom, dès lors qu'un de ses abonnés est généralement raccordé aussi au réseau de France Télécom.
L'Autorité maintient son analyse concernant la non-substituabilité des terminaisons d'appel de deux opérateurs différents. En effet, même dans l'hypothèse où un client disposerait de deux lignes téléphoniques à son domicile, ces deux lignes sont associées à deux numéros de téléphone différents. Par conséquent, un opérateur devant acheminer un appel vers un de ces numéros n'aura pas la possibilité de substituer cet appel par un appel vers l'autre numéro, dans la mesure où il est tenu d'acheminer la communication vers le numéro composé par l'appelant. Les deux terminaisons d'appel ne sont donc pas substituables.
L'AFORST et Colt regrettent l'absence de prise en compte de la qualité de service dans le projet d'analyse des marchés de la terminaison d'appel et demandent une segmentation des marchés en fonction de la qualité de service fournie.
L'Autorité relève qu'à ce jour il n'existe aucun opérateur qui propose deux prestations de terminaison d'appel distinctes selon le niveau de qualité fourni.

I-3.3.6. Avis du Conseil de la concurrence

Le Conseil de la concurrence souscrit à l'analyse de l'Autorité en ce qui concerne la délimitation des marchés de la terminaison d'appel sur chacun des réseaux des opérateurs français.

I-3.3.7. Observations de la Commission européenne

La Commission européenne ne formule aucune observation concernant la délimitation des marchés de la terminaison d'appel fixe.

I-3.3.8. Conclusion

L'Autorité identifie donc un marché de la terminaison d'appel fixe sur chaque réseau individuel de chacun des opérateurs de boucle locale fixe comme étant le marché de gros sur le territoire d'analyse des prestations nécessaires à l'acheminement d'un appel depuis le point d'interconnexion pertinent le plus proche d'un abonné, point au-delà duquel seul l'opérateur de l'abonné appelé peut acheminer l'appel, au point de terminaison du réseau de cet abonné.
La liste des opérateurs de boucle locale fixe pour lesquels un marché de la terminaison d'appel a été identifié est fournie en annexe A du présent document.

I-3.4. Le marché du départ d'appel
I-3.4.1. Définition de la prestation de départ d'appel

Le départ d'appel fixe désigne les prestations d'acheminement d'appels fournies par un opérateur de boucle locale (OBL) à d'autres opérateurs afin de permettre à ces derniers d'établir, via l'interconnexion de leur réseau au réseau de cet OBL, des communications téléphoniques au départ des abonnés raccordés à cet OBL. Du fait du sens des communications ainsi acheminées, on dit de l'opérateur qui achète une telle prestation qu'il « collecte » l'appel. Cela signifie qu'il « récupère » le trafic pour en assurer l'acheminement ultérieur sur son propre réseau (ou éventuellement sur celui d'autres opérateurs auprès desquels il sollicite d'autres prestations de gros).
Un service de départ d'appel est fourni par un opérateur A :
― pour du trafic vocal interpersonnel, pour permettre l'acheminement de l'appel passé depuis une ligne fixe de l'opérateur A ;
― pour du trafic Internet, lorsqu'un utilisateur final bénéficiant d'une ligne fixe d'un opérateur A se connecte à Internet bas débit (offres Internet bas débit) ;
― pour du trafic services à valeur ajoutée, lorsqu'un utilisateur final bénéficiant d'une ligne fixe d'un opérateur A compose le numéro d'une plate-forme de services (en général, un 08 AB, ou un numéro court à 4 chiffres du type 3BPQ).

I-3.4.2. Délimitation en termes de produits et services

Le service de départ d'appel considéré ici est associé à plusieurs services de détail, les communications voix au départ des postes téléphoniques en position déterminée, qu'elles soient locales, nationales, internationales ou à destination des mobiles, les communications vers Internet (accès bas débit) et les communications vers les plates-formes de services à valeur ajoutée. L'Autorité a déjà montré que les prestations de gros sous-jacentes à ces différents trafics sont substituables sur les marchés de gros.
Un opérateur devant collecter un appel au départ d'un abonné d'un opérateur fixe A pourrait théoriquement solliciter une prestation de départ d'appel en plusieurs points d'interconnexion, de niveau hiérarchique plus ou moins élevé dans le réseau, le cas échéant.
En particulier, pour collecter du trafic au départ d'un utilisateur raccordé sur le réseau de l'opérateur A, l'opérateur a le choix entre :
i) L'offre d'interconnexion de l'opérateur A, au niveau du premier équipement pertinent pour l'interconnexion traversé sur le réseau de l'opérateur A ;
ii) L'offre d'interconnexion de l'opérateur A ou d'un opérateur tiers, au niveau d'un équipement pertinent pour l'interconnexion situé ailleurs dans le réseau.
L'Autorité considère que par rapport à l'offre i), l'offre ii) inclut une prestation supplémentaire de transit entre le premier équipement pertinent pour l'interconnexion traversé sur le réseau de l'opérateur de départ et un autre équipement pertinent pour l'interconnexion. Les opérateurs acheteurs de départ d'appel peuvent a priori connaître soit au regard de la localisation de l'abo nné appelant, soit par une information fournie par l'opérateur appelant, l'équipement techniquement et économiquement le plus pertinent offert par l'opérateur départ sur lequel collecter l'appel en provenance dudit abonné. Ils pourront par conséquent choisir de s'interconnecter directement à cet équipement, ou de collecter plutôt l'appel à un niveau supérieur ou simplement à un autre équipement d'interconnexion, sollicitant par là même une prestation supplémentaire de transit.
L'Autorité estime que les offres de départ d'appel incluant le transit au départ de ce même réseau ne peuvent être considérées comme des substituts au départ d'appel vendu au niveau des éléments de commutation ou de routage les plus pertinents pour l'interconnexion et qu'elles offrent seulement un couplage entre deux prestations de deux marchés distincts, à savoir le marché du départ d'appel et le marché du transit.

I-3.4.3. Délimitation en termes géographiques

Pour procéder à la délimitation géographique du marché, il convient de tenir compte du fait que France Télécom exploite entre 95 % et 99 % en volume des accès au service téléphonique et que son réseau couvre la métropole, les départements d'outre-mer et les collectivités d'outre-mer de Mayotte, Saint-Martin et Saint-Barthélemy.
L'Autorité estime par ailleurs que les conditions concurrentielles de la fourniture du départ d'appel sont homogènes sur l'ensemble du territoire d'analyse. En outre, il n'existe pas d'instruments juridiques législatifs ou réglementaires permettant de déterminer des zones géographiques distinctes.
L'Autorité considère donc que le marché géographique du départ d'appel correspond au territoire d'analyse, à savoir la métropole, les départements d'outre-mer et les collectivités d'outre-mer de Mayotte, Saint-Martin et Saint-Barthélemy.

I-3.4.4. Commentaires des acteurs sur l'analyse de l'Autorité

L'ADRT regrette que l'analyse du départ d'appel ne distingue pas le départ d'appel des numéros SVA de celui des communications interpersonnelles. Cet acteur craint notamment que les opérateurs fixes autres que France Télécom ne continuent pas de fournir de prestations de départ d'appel comme ils le font aujourd'hui.
L'Autorité note que la distinction demandée par l'ADRT est contraire à toutes les analyses de marché précédentes de l'Autorité ainsi qu'aux recommandations successives adoptées par la Commission européenne en 2003 et 2007 sur les marchés susceptibles d'être soumis à une régulation ex ante et qu'aux analyses des autres régulateurs européens. Par ailleurs, l'Autorité souligne que le Conseil, dans son avis n° 08-A-11 sur le projet d'analyse des marchés de la téléphonie fixe de l'Autorité, n'a émis aucune observation quant à la délimitation des marchés proposée.
Pour autant, l'Autorité rappelle qu'elle a imposé, par la décision n° 07-0213 du 16 avril 2007, des obligations « symétriques » c'est-à-dire s'appliquant à l'ensemble des acteurs concernés, indépendamment de leur puissance de marché. Les opérateurs de boucle locale doivent notamment faire droit aux demandes raisonnables d'accès et de reversement de la part des fournisseurs de services SVA.

I-3.4.5. Avis du Conseil de la concurrence

Le conseil de la concurrence souscrit à l'analyse de l'Autorité en ce qui concerne la délimitation du marché du départ d'appel.

I-3.4.6. Observations de la Commission européenne

La Commission européenne ne formule aucune observation concernant la délimitation du marché du départ d'appel en position déterminée.

I-3.4.7. Conclusion

L'Autorité identifie donc le marché du départ d'appel comme étant le marché de gros sur le territoire d'analyse des prestations nécessaires à l'acheminement d'un appel téléphonique au départ d'une ligne du réseau téléphonique public fixe, depuis le point de terminaison du réseau jusqu'au premier point d'interconnexion pertinent offert par l'opérateur départ, point en deçà duquel seul l'opérateur de l'abonné appelant peut acheminer l'appel.
Cette délimitation correspond à la délimitation du marché du départ d'appel sur le réseau téléphonique public en position déterminée retenue par la Commission européenne dans sa recommandation.

II. - PERTINENCE DES MARCHÉS POUR UNE RÉGULATION EX ANTE
II-1. Introduction sur la pertinence des marchés

L'article L. 37-1 du code des postes et des communications électroniques dispose que l'Autorité doit définir les marchés pertinents pour l'application d'une régulation ex ante, « au regard notamment des obstacles au développement d'une concurrence effective ». Ainsi, pour estimer la pertinence d'un marché au regard de la régulation sectorielle, il convient de mener une analyse concurrentielle de ce marché.
En application des directives susvisées, la Commission européenne a publié les « lignes directrices » précitées, relatives au processus d'analyse de marché. Elle a également adopté une première recommandation « marchés pertinents » en 2003, définissant une liste de 18 marchés susceptibles d'être pertinents pour une régulation sectorielle, puis une seconde recommandation « marché pertinent » du 17 décembre 2007, dans laquelle elle ramène à 7 le nombre de marchés appartenant à la nouvelle liste. L'Autorité a tenu le plus grand compte de ces documents dans l'élaboration de son analyse de marché.
Pour définir les marchés de la téléphonie fixe pouvant être considérés pertinents pour une régulation sectorielle, les recommandations « marchés pertinents » de 2003 et de 2008 de la Commission européenne préconisaient de démontrer la présence de trois critères :
― la présence de barrières à l'entrée élevées et non provisoires ;
― l'absence d'évolution vers une situation de concurrence effective ;
― l'efficacité insuffisante du droit de la concurrence.
L'Autorité considère, conformément au paragraphe 36 des lignes directrices de la Commission européenne susvisées, que, s'agissant d'un marché recensé par la Commission européenne, il ne lui est pas nécessaire de démontrer à nouveau les éléments qui ont déjà été pris en compte par la Commission européenne dans sa recommandation « marchés pertinents » et sur lesquels l'Autorité porte la même appréciation. La note explicative de la Commission sur la nouvelle recommandation « marchés pertinents » précise en effet : « For those markets listed, the Recommendation creates a presumption for the NRA that the three criteria are met and therefore NRAs do not need to reconsider the three criteria. » Toutefois, conformément à l'article L. 37-1 du CPCE, elle s'attachera, dans le cadre de la présente analyse, à démontrer les obstacles au développement effectif de la concurrence.

II-2. Pertinence des marchés de détail de l'accès
II-2.1. Dans la nouvelle recommandation de la Commission

Le marché de détail de l'accès figure dans la nouvelle recommandation « marchés pertinents » du 17 décembre 2007 en tant que marché susceptible d'être régulé ex ante. Dans sa recommandation, la Commission européenne estime que la seule régulation de gros pouvant influer sur le contexte concurrentiel de ce marché de détail est la régulation des infrastructures d'accès, notamment le dégroupage. Or, concurrencer l'opérateur historique par le dégroupage suppose un déploiement important et nécessite beaucoup de temps et d'investissements. Par ailleurs, en pratique, les opérateurs dégroupeurs ne s'appuient pas sur l'offre de dégroupage pour proposer des offres d'accès bas débit. La régulation appliquée sur les infrastructures ne permet ainsi pas de supprimer les barrières à l'entrée importantes et durables existant sur le marché de l'accès au service téléphonique qui est donc susceptible d'être régulé ex ante.
Dans sa note explicative sur la nouvelle recommandation sur les marchés pertinents, la Commission européenne explique ainsi : « Regarding retail access to the public telephone network at a fixed location, the only wholesale regulation that could impact on competition in this market is the regulation of the wholesale infrastructure access market, which enables new entrants to provide narrowband access services to retail customers. However, exploiting wholesale infrastructure access requires time and significant investments, a large portion of which are sunk. Moreover, new entrants in principle do not lease infrastructure access to provide narrowband access only. Wholesale infrastructure access therefore does not remove the high and non-transitory barriers to enter the retail access market at a fixed location, nor does it make this market tend towards effective competition. Even in combination with the development of other infrastructures such as cable or fibre-to-the-home etc., such a tendency is not observed yet at the European level. Therefore, even in the presence of wholesale regulation, the retail market for access to the public telephone network at a fixed location remains susceptible to ex ante regulation. »
Dès lors que le marché de détail de l'accès fait partie des marchés pertinents de la nouvelle recommandation de la Commission européenne, l'Autorité n'est plus tenue de démontrer sa pertinence pour une régulation ex ante. L'Autorité montre néanmoins dans la partie suivante que l'analyse de la Commission européenne s'applique bien au cas français et que, comme imposé par l'article L. 37-1 du CPCE, l'analyse des obstacles au développement d'une concurrence effective confirme sa pertinence.

II-2.2. Obstacles au développement d'une concurrence effective en France

France Télécom continue de bénéficier en France d'une très grande part de marché sur les accès au service téléphonique, sur le segment résidentiel comme sur celui des non résidentiels.
Sur la clientèle résidentielle, les opérateurs alternatifs ont pu développer des offres d'accès concurrentes grâce au dégroupage, d'une part, et à la vente en gros de l'accès au service téléphonique, d'autre part. Mais les offres en dégroupage sont des offres « multiplay », dont l'usage principal ne se limite pas à la téléphonie et qui ne font donc pas partie du marché de l'accès résidentiel délimité dans la partie I.2. Les seules offres d'accès au service téléphonique alternatives sont donc celles des opérateurs acheteurs de VGAST et une offre du câblo-opérateur qui ne comprend que de la téléphonie. Comme détaillé dans la partie suivante, la part de marché en volume de France Télécom sur le marché résidentiel de l'accès était donc en 2006 supérieure à 99 %. Sans prise en compte des offres basées sur la VGAST, cette part de marché est donc également supérieure à 99 %.
Sur le marché non résidentiel, les opérateurs peuvent proposer des offres d'accès grâce aux offres de gros haut débit de France Télécom (dégroupage, bitstream, etc.), grâce aux offres de services de capacité de France Télécom, grâce à la VGAST et enfin en raccordant leurs clients en propre dès lors que la taille de ceux-ci le permet. Les opérateurs ont ainsi été en mesure de développer davantage la concurrence sur le marché de l'accès non résidentiel. Néanmoins, la mise en œuvre de ces différentes solutions n'est viable que pour une très petite partie des clients. Notamment, le raccordement des plus petits clients n'est pas toujours rentable dans la mesure où il engendre des coûts importants pour des revenus modestes. Ainsi, la part de marché de France Télécom sur le marché de l'accès non résidentiel, qui est détaillé dans la partie suivante, restait en 2006 d'environ 95 %. Cette part de marché est sensiblement la même sans prise en compte des offres de détail fondées sur la VGAST, dont le volume était encore très faible en 2006.
Les marchés de détail de l'accès ne connaissent encore pas une situation de concurrence effective. En outre, la régulation appliquée sur les marchés de gros et pouvant influer sur cette situation concurrentielle (le dégroupage, les services de capacité, etc.) ne suffit pas à permettre à elle seul, et à un horizon raisonnable, l'avènement d'un contexte de concurrence effective. Ces solutions, qui supposent des investissements importants, ne permettent pas aux opérateurs alternatifs de concurrencer France Télécom sur toutes les franges de marché. Pour les clients résidentiels, les opérateurs alternatifs ne proposent ainsi que des offres couplées, destinées aux clients les plus demandeurs de services de communication électronique. Sur les marchés non résidentiels, ils ne sont en mesure de raccorder que les clients ayant de gros volumes ou situés dans les zones les plus denses du territoire. Il ressort donc que les seuls remèdes imposés au titre de la régulation des marchés de gros (6) ne suffisent pas à supprimer d'importantes barrières à l'entrée sur les marchés de détail de l'accès au service téléphonique résidentiels et non résidentiels et qu'il demeure, malgré leur existence, d'importants obstacles au développement d'une situation de concurrence effective. Le seul droit de la concurrence apparaît comme insuffisant pour remédier aux problèmes de concurrence structurels existant sur ce marché.
En conséquence, les marchés de détail de l'accès au service téléphonique sont considérés pertinents pour l'application d'une régulation ex ante.

(6) Ces remèdes ne comprennent pas la vente en gros de l'abonnement au service téléphonique ni la sélection du transporteur.

II-2.3. Avis du Conseil de la concurrence

Le Conseil de la concurrence souscrit à l'analyse de l'Autorité en ce qui concerne la pertinence des marchés de détail de l'accès.

II-2.4. Observations de la Commission européenne

La Commission européenne ne formule aucune observation concernant la pertinence des marchés de détail de l'accès.

II-3. Pertinence des marchés de gros de la terminaison d'appel
II-3.1. Dans la nouvelle recommandation de la Commission

Les marchés de la terminaison d'appel fixe vers chaque réseau individuel figurent dans la nouvelle recommandation « marchés pertinents » du 17 décembre 2007 en tant que marchés susceptibles d'être régulés ex ante.
Dans sa recommandation, la Commission européenne estime que la prestation de terminaison d'appel est la prestation la moins réplicable de celles nécessaires pour fournir des services de communications téléphoniques. De plus, la Commission européenne estime qu'il existe de fortes et durables barrières à l'entrée sur ce marché. En cela, elle a défini ce marché comme pertinent :
« Such alternatives for demand or supply substitution do not appear currently to provide sufficient discipline on call termination at fixed locations or an argument in favour of a wider market definition, so that the relevant market appears to be call termination on individual networks with consequent satisfaction of the first criterion (i.e. high and non-transitory barriers to entry). Each market for call termination on an individual fixed network is a monopolistic market with no tendency towards effective competition, where end-users are unable to systematically set up their own call termination, thus satisfying the second criterion. Effective regulation of termination services moreover requires frequent intervention on a coordinated basis and a detailed cost assessment. Termination rates should also be regulated ex ante in order to provide legal certainty to other operators when setting their retail tariffs, which are inter alia a function of the terminating charge. Competition law is therefore insufficient to address the market failure on this market. » (7)

(7) Source : Note explicative de la Commission sur sa recommandation du 17 décembre 2007.

Dès lors que les marchés de la terminaison d'appel fixe vers chaque réseau individuel font partie des marchés pertinents de la nouvelle recommandation de la Commission européenne, l'Autorité n'est plus tenue de démontrer sa pertinence pour une régulation ex ante. L'Autorité montre néanmoins dans la partie suivante que l'analyse de la Commission européenne s'applique bien au cas français et que, comme imposée par l'article L. 37-1 du CPCE, l'analyse des obstacles au développement d'une concurrence effective confirme sa pertinence.

II-3.2. Obstacles au développement d'une concurrence effective en France

L'Autorité considère que l'analyse des marchés de gros de la terminaison d'appel fixe qui est présentée par la Commission européenne dans sa nouvelle recommandation est pertinente dans le contexte français.
Tout d'abord, de la définition même du marché de la terminaison d'appel fixe vers le réseau d'un opérateur faite supra, seul cet opérateur est en mesure de proposer une prestation sur ce marché.
De plus, pour un opérateur donné, l'achat des prestations de terminaison d'appel de ses concurrents est nécessaire pour garantir à ses utilisateurs la possibilité d'appeler les utilisateurs raccordés à ces réseaux. Inversement, la vente par un opérateur de boucle locale de sa propre prestation de terminaison d'appel à ses concurrents lui est nécessaire s'il souhaite assurer la possibilité pour ses abonnés d'être appelés par les abonnés des autres réseaux.
Ces prestations portent ainsi une importance particulière, d'une part, dans la réalisation des objectifs généraux de l'Autorité définis à l'article L. 32-1 du code des postes et des communications électroniques tels que la possibilité pour les utilisateurs de communiquer librement entre eux quels que soient les réseaux auxquels ils sont raccordés ― objectif dit « d'interopérabilité des réseaux » ―, et, d'autre part, dans la concurrence que se livrent les opérateurs de boucle locale fixe sur le marché de détail sous-jacent des communications, sur lequel la constitution d'offres dépend des conditions de mise à disposition de ces prestations.
L'importance de ces prestations pour le développement de la concurrence n'est toutefois pas limitée à la question de l'absence ou de la fourniture effective de ces prestations, c'est-à-dire finalement à la mise en œuvre technique de l'interconnexion.
En effet, du fait du modèle économique dit du calling party pays (« la partie appelante paye ») qui prévaut pour les appels vers les numéros fixes géographiques ou non géographiques en France, les conditions économiques de la vente de ces prestations influent directement sur les conditions d'exercice de la concurrence entre les opérateurs de boucle locale sur le marché de détail. Dans ce modèle économique, c'est l'opérateur de l'appelant qui se voit facturer l'intégralité des charges liées à l'acheminement des appels par l'opérateur de destination raccordant les abonnés appelés. Ainsi de nombreux tarifs que peuvent offrir les opérateurs de boucle locale sur le marché de détail sont contraints par les charges de terminaison d'appel qui leur sont facturées par les autres opérateurs de boucle locale, qui sont en même temps leurs concurrents directs sur ces mêmes marchés de détail. En augmentant sa terminaison d'appel, un opérateur donné augmente ses revenus d'interconnexion et pénalise les offres de détail de ses concurrents.
Il en résulte qu'il n'existe intrinsèquement pas, ou peu, d'incitation économique pour les opérateurs de boucle locale à fixer leurs charges de terminaison d'appel à des niveaux « concurrentiels », c'est-à-dire à des niveaux qui pourraient être constatés si ces prestations étaient soumises à une concurrence effective.
Pour ces marchés, la régulation sectorielle ex ante dispose d'outils adaptés, comme notamment les obligations tarifaires ou encore la mise en place et le suivi d'obligations comptables. Elle est nécessaire pour qu'une concurrence pérenne puisse se développer sur un terme suffisamment long. Le seul droit de la concurrence apparaît comme insuffisant pour remédier aux problèmes de concurrence structurels existant sur ce marché. Dans ce contexte, et en l'absence de régulation ex ante des prestations de terminaison d'appel, le marché de la terminaison d'appel fixe vers le réseau d'un opérateur présente des obstacles au développement d'une concurrence effective, non seulement sur le marché de la terminaison d'appel lui-même, mais également sur les marchés de détail aval.
Eu égard à l'ensemble de ces éléments et en application de l'article L. 37-1 du CPCE, l'Autorité considère que les marchés de la terminaison d'appel vers chaque réseau individuel tels que définis ci-dessus doivent être déclarés pertinents au titre de la régulation sectorielle des communications électroniques.

II-3.3. Avis du Conseil de la concurrence

Le Conseil de la concurrence souscrit à l'analyse de l'Autorité en ce qui concerne la pertinence des marchés de gros de la terminaison d'appel.

II-3.4. Observations de la Commission européenne

La Commission européenne ne formule aucune observation concernant la pertinence des marchés de la terminaison d'appel fixe.

II-4. Pertinence du marché de gros du départ d'appel
II-4.1. Dans la nouvelle recommandation de la Commission

Le marché du départ d'appel depuis le réseau téléphonique public figure dans la nouvelle recommandation « marchés pertinents » du 17 décembre 2007 en tant que marché susceptible d'être régulé ex ante.
Dans sa recommandation, la Commission européenne estime que l'alternative à l'achat d'une prestation de départ d'appel réside dans l'établissement d'un réseau d'accès alternatif ou l'achat ou la location d'un réseau d'accès existant. La Commission européenne relève que ces deux alternatives demandent un temps et des investissements considérables, dont une large proportion est irrécupérable (8). La Commission européenne estime donc que le marché du départ d'appel fixe présente des barrières à l'entrée élevées et durables et est pertinent pour une régulation ex ante.
Dès lors que le marché du départ d'appel en position déterminée fait partie des marchés pertinents de la nouvelle recommandation de la Commission européenne, l'Autorité n'est plus tenue de démontrer sa pertinence pour une régulation ex ante. L'Autorité montre néanmoins dans la partie suivante que l'analyse de la Commission européenne s'applique bien au cas français et que, comme imposée par l'article L. 37-1 du CPCE, l'analyse des obstacles au développement d'une concurrence effective confirme sa pertinence.

(8) « One direct alternative to the purchase of call origination is to establish an access network (cable, fibre, wireless connection etc.) to the end-user location. Another alternative is to purchase or lease an established network connection to the end-user location (for example through local loop unbundling). Both alternatives entail considerable time and investments, a large proportion of which are sunk. »

II-4.2. Obstacles au développement d'une concurrence effective en France

L'Autorité considère que l'analyse du marché du départ d'appel fixe présentée par la Commission européenne dans sa nouvelle recommandation est pertinente dans le contexte français. En particulier, il convient de constater que le marché du départ d'appel repose essentiellement sur l'infrastructure de la boucle locale de l'opérateur historique, laquelle constitue une facilité essentielle qu'il est très difficile, techniquement et économiquement, de dupliquer. La location même de la boucle locale de France Télécom (via le dégroupage notamment) demande des investissements importants pour les opérateurs sans leur permettre de bénéficier des mêmes économies d'échelle et de densité que celles dont bénéficie l'opérateur historique.
Ce marché présente donc de fortes barrières à l'entrée. Elles ont nécessairement pour effet, en l'absence de régulation ex ante, d'empêcher le développement d'une concurrence effective à l'horizon de la présente analyse, dans la mesure où France Télécom dispose du réseau historique le plus capillaire sur le territoire d'analyse, qui rend l'accès aux clients qu'il raccorde indispensable pour l'activité de tout opérateur de communications électroniques.
Pour ce marché, et comme pour ceux de la terminaison d'appel, la régulation sectorielle ex ante dispose d'outils adaptés, comme notamment les obligations tarifaires ou encore la mise en place et le suivi d'obligations comptables. Elle est nécessaire pour qu'une concurrence pérenne puisse se développer sur un terme suffisamment long. Le seul droit de la concurrence apparaît comme insuffisant pour remédier aux problèmes de concurrence structurels existant sur ce marché.
Eu égard à l'ensemble de ces éléments et en application de l'article L. 37-1 du CPCE, l'Autorité considère que le marché du départ d'appel en position déterminée tels que défini ci-dessus doit être déclaré pertinent pour la régulation sectorielle ex ante des communications électroniques.

II-4.3. Avis du Conseil de la concurrence

Le Conseil de la concurrence souscrit à l'analyse de l'Autorité en ce qui concerne la pertinence du marché de gros du départ d'appel.

II-4.4. Observations de la Commission européenne

La Commission européenne ne formule aucune observation concernant la pertinence du marché du départ d'appel en position déterminée.

III. ― INFLUENCE SIGNIFICATIVE

L'analyse d'un marché pertinent permet d'évaluer le niveau de développement de la concurrence et d'identifier les éventuels opérateurs y disposant d'une influence significative, c'est-à-dire se trouvant dans une situation équivalente à une position dominante au sens du droit de la concurrence.

III-1. Introduction sur l'analyse de l'influence significative sur les marchés pertinents

Aux termes de l'article L. 37-1 du CPCE, « est réputé exercer une influence significative sur un marché du secteur des communications électroniques tout opérateur qui, pris individuellement ou conjointement avec d'autres, se trouve dans une position équivalente à une position dominante lui permettant de se comporter de manière indépendante vis-à-vis de ses concurrents, de ses clients et des consommateurs ». L'analyse des marchés pertinents permet d'identifier les situations d'influence significative.
L'observation des parts de marché des acteurs constitue la première étape de l'analyse de l'existence d'une influence significative. Concernant les parts de marchés, la Commission européenne précise trois chiffres clés :
― au-delà de 40 % de part de marché, il est peu probable qu'une entreprise ne soit pas en situation d'exercer une influence significative ;
― une présence supérieure à 50 % du marché « suffit, sauf circonstances exceptionnelles, à établir l'existence d'une position dominante » ;
― une entreprise ayant au contraire moins de 25 % de part de marché est peu susceptible de se révéler puissante, même si cela n'est pas totalement exclu.
L'analyse des parts de marché, même prospective, ne suffit pas à démontrer l'exercice d'une éventuelle influence significative des acteurs présents sur un marché. Pour une analyse complète du développement de la concurrence sur les marchés pertinents, les « lignes directrices » recommandent en effet de « procéder à une analyse approfondie et exhaustive des caractéristiques économiques du marché pertinent avant de conclure à l'existence d'une puissance sur le marché ». A cet égard, la Commission européenne recommande d'utiliser notamment les critères suivants :
― le contrôle d'une infrastructure qu'il n'est pas facile de dupliquer ;
― les avancées ou la supériorité technologiques ;
― l'absence ou la faible présence de contre-pouvoir des acheteurs ;
― l'accès facile ou privilégié aux marchés des capitaux et aux ressources financières ;
― la diversification des produits et/ou des services ;
― la présence d'économies d'échelle et de gamme ;
― l'intégration verticale ;
― l'existence d'un réseau de distribution et de vente très développé ;
― l'absence de concurrence potentielle ;
― des entraves à l'expansion.

III-2. Influence significative de France Télécom sur les marchés de détail de l'accès

L'Autorité a défini deux marchés de détail pertinents pour une régulation ex ante : les marchés de détail de l'accès au service téléphonique résidentiel, d'une part, et non résidentiel, d'autre part. Sur chacun de ces deux marchés, l'Autorité avait démontré en 2005 que France Télécom exerçait à l'époque une influence significative. Dans cette partie, l'Autorité analyse la nouvelle situation concurrentielle en vigueur sur les marchés de l'accès. Elle analyse dans un premier temps les parts de marchés (III.2.1), puis prend en compte des éléments concurrentiels qualitatifs (III.2.2), avant de conclure sur l'influence significative de France Télécom (III.2.3).

III-2.1. En termes de parts de marchés
III-2.1.1. La taille des marchés pertinents de l'accès
III-2.1.1.1. La taille du marché pertinent de l'accès résidentiel

Le nombre d'accès résidentiels exclusivement ou principalement dédiés à la téléphonie décroît du fait notamment du passage de certains usagers vers des offres de type « triple play » en dégroupage total ou ADSL nu. La baisse est d'environ 9 % entre 2003 et 2006. Selon des estimations, cette tendance s'accélérerait nettement avec une baisse en volumes de 13 % entre 2006 et 2007.

Figure 4 : Evolution du nombre d'accès résidentiels
exclusivement ou principalement dédiés au service téléphonique

Vous pouvez consulter le tableau dans le
JOn° 187 du 12/08/2008 texte numéro 51

Le chiffre d'affaires associé à ces accès résidentiels ne connaît pas la même décroissance. Au contraire, après une légère diminution entre 2003 et 2004, il croît de 2 % entre 2004 et 2005 puis de 3 % entre 2005 et 2006. Cet effet s'explique par les hausses successives appliquées par France Télécom au montant mensuel de son abonnement principal. Celui-ci a en effet été augmenté d'un euro TTC en mars 2005, juillet 2006 et juillet 2007. Ce chiffre d'affaires connaît, selon des estimations provisoires, une décroissance de 7 %, expliquée par une baisse plus importante des volumes (― 13 %).

Figure 5 : Evolution du chiffre d'affaires associé aux accès résidentiels
exclusivement ou principalement dédiés à la téléphonie

Vous pouvez consulter le tableau dans le
JOn° 187 du 12/08/2008 texte numéro 51

III-2.1.1.2. La taille du marché pertinent de l'accès non résidentiel

La taille du marché non résidentiel est mesurée en nombre de canaux dédiés à la voix. Une ligne analogique correspond à un canal, tandis que les accès numériques de base et primaires correspondent respectivement à 2 canaux et 30 canaux au maximum.

Figure 6 : Taille du marché de l'accès non résidentiel au service téléphonique, en nombre de canaux

Vous pouvez consulter le tableau dans le
JOn° 187 du 12/08/2008 texte numéro 51

III-2.1.2. Le fonctionnement des marchés pertinents de l'accès

Les marchés pertinents de détail de l'accès, résidentiel et non résidentiel, ont été définis dans la partie I.2 comme comprenant l'ensemble des accès dédiés exclusivement ou principalement à la téléphonie.

III-2.1.2.1. Sur le segment résidentiel

Sur le marché résidentiel, une partie des offres de communications téléphoniques des opérateurs alternatifs est fondée sur la sélection du transporteur ou la vente en gros de l'accès au service téléphonique. La plupart des autres offres de téléphonie résidentielles sont des offres de VLB fondées sur l'achat de dégroupage total, de dégroupage partiel, d'ADSL nu par l'opérateur alternatif ou encore via le raccordement en fibre optique de l'opérateur. Il existe également l'offre de téléphonie proposée par le câblo-opérateur français. Enfin quelques petits acteurs proposent d'autres types d'offres, mais sur des parcs de tailles négligeables.
Les offres de sélection de transporteur ne constituent pas des offres d'accès puisqu'elles ne sont accessibles qu'aux usagers achetant un accès téléphonique auprès de France Télécom.
La VGAST permet en revanche aux opérateurs de commercialiser des offres couplant accès et communications et constituent en cela des offres concurrentes des offres d'accès de France Télécom. Toutefois dans la VGAST, techniquement, l'accès continue d'être géré par France Télécom. Pour mettre en œuvre des offres fondées sur la VGAST, les opérateurs ne sont pas tenus de déployer d'infrastructures mais doivent seulement bénéficier d'une interconnexion avec l'opérateur historique. Dès lors, si cette offre de gros disparaissait, les opérateurs l'ayant mise en œuvre ne seraient plus en mesure de commercialiser d'offres d'accès auprès de leur clientèle finale. Par ailleurs, la création et la commercialisation de la VGAST ayant été imposées à France Télécom au titre de la régulation des marchés de détail dans le cadre des précédentes analyses des marchés de la téléphonie, il convient d'analyser les parts de marché sans prise en compte de la VGAST et des offres de détail sous-jacentes. Cette approche est en cohérence avec la « modified greenfield approach » présentée par la Commission européenne dans sa nouvelle recommandation « marchés pertinents ».
Parmi les offres d'accès à la téléphonie sur ADSL, celles basées sur du dégroupage partiel ou du bitstream ne sont pas des offres du marché pertinent de l'accès puisqu'elles ne dispensent pas le client de l'achat de l'abonnement auprès de France Télécom. Pour ce qui est de celles fondées sur du dégroupage total ou de l'ADSL nu, comme expliqué dans la partie I.2, il est à noter qu'en pratique elles sont systématiquement composées de plusieurs services. Il s'agit notamment des offres « triple play », couplant accès haut débit à Internet, téléphonie et télévision par Internet. En conséquence, l'usage principal de ces offres ne se limite pas à la téléphonie et elles ne font pas partie du marché pertinent de l'accès.
Les offres de téléphonie de Numericable suivent pour la plupart la même logique de couplage. Toutefois l'opérateur a également proposé par le passé une offre donnant exclusivement accès à la téléphonie. Cette offre fait partie du marché pertinent de l'accès.

III-2.1.2.2. Sur le segment professionnel et entreprises

L'offre est en revanche bien plus variée sur le segment professionnel et entreprises. Il est donc plus complexe de définir une liste d'offres ou de catégories d'offres. Comme sur le marché résidentiel, de nombreuses offres alternatives sont fondées sur la sélection du transporteur et la VGAST analogique et numérique. D'autres sont basées sur l'achat d'offres de gros telles que le dégroupage, DSLE ou des services de capacité. Enfin, certains opérateurs alternatifs raccordent leurs clients en propre, en fibre optique dans la grande majorité des cas.
Comme expliqué dans la partie précédente, la sélection du transporteur ne permet pas d'offrir l'accès et la VGAST, si elle permet la commercialisation de l'accès par les opérateurs alternatifs, n'est cependant pas à prendre en compte pour l'analyse de l'influence significative.
Il convient en revanche de considérer les offres des opérateurs alternatifs fondées sur l'achat de dégroupage, de services de capacité dans la mesure où les offres de gros en question ont été mises en place sur des marchés amont. Il s'agit là encore de l'approche recommandée par la Commission européenne : « In general, the market to be analysed first is that market which is most upstream in the vertical supply chain. Taking into account the ex ante regulation imposed on that market (if any), an assessment should be made as to whether there still is SMP on a forward-looking basis on the related downstream market(s). This methodology has become known as the « modified greenfield approach ». Thus the NRA should work its way along the vertical supply chain until it reaches the stage of the retail market(s). A downstream market should only be subject to direct regulation if competition on that downstream market still exhibits SMP in the presence of wholesale regulation on the related upstream market(s). » (9)
Parmi les offres commercialisées par les opérateurs alternatifs auprès de la clientèle non résidentielle et étant fondées sur une offre de gros large bande, une offre de gros de service de capacité ou via un raccordement en propre, seules font partie du marché pertinent de l'accès celles dont l'usage principal se limite à la téléphonie. L'offre étant très diversifiée, notamment sur le haut de marché où les offres sur mesure sont courantes, l'analyse quantitative du marché est rendue particulièrement complexe.

(9) Source : Note explicative de la Commission sur sa recommandation du 17 décembre 2007.

III-2.1.2.3. Liste des opérateurs d'accès sur les segments résidentiel et non résidentiel

Les principaux acteurs présents sur le marché pertinent de l'accès résidentiel sont :
― France Télécom ;
― Numericable ;
― Neuf Cegetel ;
― FrNet2 ;
― Outremer Telecom.
A la connaissance de l'Autorité, Neuf Cegetel, FrNet2 et Outremer Telecom ne proposent des offres relevant du marché pertinent de l'accès que via la VGAST. Numericable propose, quant à elle, des offres reposant sur ses propres infrastructures câbles.
Les principaux acteurs présents sur le marché pertinent de l'accès non résidentiel sont :
― France Télécom ;
― Neuf Cegetel ;
― Colt ;
― Completel ;
― B3G ;
― Verizon ;
― Hub Télécom ;
― Mediaserv ;
― Outremer Telecom ;
― British Telecom.

III-2.1.3. L'analyse des parts de marché
III-2.1.3.1. Les parts de marché sur le marché de détail de l'accès résidentiel

La part de marché de France Télécom sur le marché résidentiel des accès principalement ou exclusivement dédiés à la téléphonie est supérieure à 99 % pour chaque année entre 2003 et 2006, en volume comme en valeur, et supérieure à 96 % en 2007 en valeur et en volume (10).

(10) Compte tenu des parcs d'accès d'opérateurs alternatifs fondés sur l'offre VGAST.

III-2.1.3.2. Les parts de marché sur le marché de détail de l'accès non résidentiel

La part de marché de France Télécom sur le marché non résidentiel des accès principalement ou exclusivement dédiés à la téléphonie est supérieure à 94 % pour chaque année entre 2003 et 2006, en volume comme en valeur. Selon une estimation provisoire, cette part de marché devrait être supérieure à 92 % en volume en 2007.

III-2.2. Autres facteurs d'analyse
III-2.2.1. Le contrôle d'une infrastructure difficile à dupliquer

Il est très difficile, techniquement et économiquement, de dupliquer le réseau d'accès (boucle locale) de France Télécom. De plus, la présence d'importants coûts irrécupérables, notamment de génie civil et de transmission, a pour effet de limiter l'entrée d'opérateurs concurrents sur ces marchés. A titre d'illustration, l'évaluation du coût de reconstruction à neuf de la boucle locale de France Télécom est de l'ordre de 28 à 30 milliards d'euros (11). C'est pourquoi l'entrée d'opérateurs concurrents sur le marché de l'accès n'est généralement envisagée que dans deux cas principaux : dans les principales zones d'activité économique réunissant suffisamment de demande potentielle pour rentabiliser les investissements nécessaires, ou en ayant recours aux offres de gros de l'opérateur historique.

(11) Consultation publique de l'Autorité sur les méthodes de valorisation de la boucle locale cuivre, avril 2005, page 4.

III-2.2.2. La présence d'importantes économies d'échelle et de gamme

Les produits d'accès au réseau téléphonique public sont caractérisés par d'importants coûts fixes (notamment de génie civil), en particulier en France où la dispersion des habitations est très importante dans certaines zones.
France Télécom bénéficie de fortes économies d'échelle. L'opérateur peut en effet disposer d'un coût moyen de production inférieur à celui d'un autre opérateur grâce à l'importance de son volume de production. Ces économies d'échelle sont identifiables dans l'activité de France Télécom par le nombre très important de clients pour chaque réseau local, qui permet à l'opérateur historique un amortissement particulièrement rapide de ses investissements. A l'inverse, un opérateur souhaitant être compétitif par rapport à l'opérateur historique sur les marchés de l'accès devra limiter ses tarifs de détail, ce qui rendra d'autant plus difficile l'amortissement de ses coûts et la couverture à terme des coûts irrécupérables. Cela augmentera son profil de risque financier en allongeant la période de rentabilisation de ses investissements.
En outre, France Télécom bénéficie d'économies de gamme. L'opérateur peut en effet disposer d'un coût moyen de production inférieur à celui d'un autre opérateur grâce à une gamme de services plus étendue. De fortes économies de gamme sont permises à France Télécom par le partage des coûts fixes du réseau d'accès entre les différents segments de clientèle mais aussi entre les différentes offres de détail et de gros.

III-2.3. Evolution prospective du marché

L'Autorité estime que sans intervention sur ces marchés, et notamment sans l'imposition à France Télécom de proposer une offre de VGAST, la situation concurrentielle et la position de l'opérateur historique ne devraient pas sensiblement évoluer sur les marchés de détail résidentiel et non résidentiel de l'accès au service téléphonique.

III-2.4. Commentaires des acteurs sur l'analyse de l'Autorité

Plusieurs acteurs estiment que France Télécom demeure en position de monopole sur la boucle locale cuivre et bénéficie à ce titre d'une rente élevée sur les prestations d'accès. SFR considère même que la position de France Télécom se renforce sur ce marché.
France Télécom conteste la qualification de son réseau d'accès cuivre d'infrastructure essentielle et estime que les opérateurs mobiles et les opérateurs déployant la fibre ou utilisant le dégroupage ont répliqué ce réseau. Elle précise que ces derniers ne fournissent pas de service d'accès principalement dédié à la téléphonie pour la seule raison que ce marché est fortement en décroissance.
L'Autorité rappelle que la boucle locale cuivre du réseau de France Télécom et les infrastructures de génie civil sous-jacentes constituent une facilité essentielle. Elle souligne premièrement que les opérateurs dégroupeurs n'ont pas répliqué cette facilité mais utilisent celle de l'opérateur historique. En outre, l'Autorité ayant démontré, dans la partie relative à la délimitation des marchés de détail de l'accès, la non-substituabilité des accès fixes et mobiles, elle ne peut considérer que les opérateurs mobiles ont répliqué le réseau d'accès fixe de France Télécom.
France Télécom estime dans sa contribution que l'analyse de l'Autorité néglige la pression concurrentielle exercée par les offres d'accès mobiles et « triple play » sur les marchés traditionnels de la téléphonie fixe. Elle regrette ainsi que l'Autorité ne prenne pas compte la pression exercée par les opérateurs haut débit et mobiles sur les marchés des accès principalement ou exclusivement dédiés à la téléphonie. L'opérateur précise qu'entre 1995 et 2004, le taux d'équipement des foyers en ligne fixe est passé de 97 % à 82 %, sous l'effet du développement de la pénétration des mobiles. Il indique également que selon certaines projections, en 2010, 67 % des accès téléphoniques fixes devraient ne pas être des accès RTC de France Télécom, mais des accès de type VLB.
L'Autorité note que si le taux d'équipement des ménages a connu une baisse entre 1995 et 2004, du fait du développement des offres mobiles, cette pénétration s'est stabilisée depuis. Elle était de 83 % en 2007, soit en légère croissance depuis 2004. En outre, l'Autorité a exclu du marché de l'accès au service téléphonique les offres de type « triple play » ainsi que les accès mobiles, en démontrant que ces offres n'étaient pas substituables aux offres principalement ou exclusivement dédiées à la téléphonie. Ces analyses de substituabilité n'ont pas été directement remises en cause par France Télécom. Dès lors que les offres mobiles et haut débit ont été exclues du marché pertinent de l'accès, elles ne sont pas pertinentes dans l'appréciation de l'influence significative exercée par France Télécom sur ce marché. Enfin, l'Autorité souligne que les évolutions tarifaires des offres d'accès de France Télécom principalement dédiées à la téléphonie ne démontrent pas l'existence d'une pression concurrentielle autre que celle exercée par les offres naissantes fondées sur la VGAST.
France Télécom soutient, par ailleurs, que l'Autorité sous-estime la dynamique concurrentielle sur le marché de l'accès non résidentiel. Elle reconnaît un développement de la VoIP plus tardif que sur le marché résidentiel, mais indique que ces offres sont en essor depuis fin 2006 et demande une analyse prospective de l'Autorité.
L'Autorité rappelle que, selon ses estimations, les communications en VoIP n'ont représenté que 1 % du trafic global sur le segment non résidentiel en 2006. L'analyse prospective de l'Autorité met en évidence un développement certain des offres de VoIP mais dans une mesure ne remettant pas en cause son analyse à l'horizon du présent exercice d'analyse des marchés. Néanmoins, dans le cas où le développement du marché justifierait une révision de la présente analyse, l'Autorité pourra modifier son analyse en cours de cycle.

III-2.5. Avis du Conseil de la concurrence

Le Conseil de la concurrence souscrit à l'analyse de l'Autorité en ce qui concerne l'exercice par France Télécom d'une influence significative sur les marchés de détail de l'accès résidentiel, d'une part, et non résidentiel, d'autre part.

III-2.6. Observations de la Commission européenne

La Commission européenne ne formule aucune observation concernant l'exercice par France Télécom d'une influence significative sur les marchés de détail de l'accès résidentiel, d'une part, et non résidentiel, d'autre part.

III-2.7. Conclusion sur l'influence significative sur les marchés de détail de l'accès

L'Autorité conclut que l'opérateur France Télécom exerce une influence significative sur les marchés de détail de l'accès au réseau téléphonique public depuis un poste fixe du territoire d'analyse, permettant d'émettre et/ou de recevoir des communications téléphoniques et d'utiliser les services associés à l'accès, pour la clientèle résidentielle, d'une part, et pour la clientèle non résidentielle, d'autre part.

III-3. Influence significative sur les marchés de la terminaison d'appel

L'Autorité a défini les marchés de la terminaison d'appel fixe sur chaque réseau individuel de chaque opérateur comme pertinents pour une régulation ex ante. Dans cette partie, l'Autorité analyse la situation concurrentielle en vigueur sur ces marchés de la terminaison d'appel.

III-3.1. Les opérateurs sont en situation de monopole naturel
sur le marché de terminaison d'appel fixe sur leur réseau

Chaque opérateur de boucle locale dispose de 100 % de part de marché sur le marché de la terminaison d'appel sur son propre réseau. En effet, lorsqu'un opérateur souhaite terminer un appel vers un client d'un autre opérateur, il ne dispose d'aucune autre solution de substitution à la prestation de terminaison d'appel de cet opérateur, seul ce dernier étant capable d'acheminer l'appel sur la dernière partie du réseau, jusqu'à son client.
Ainsi, dès lors qu'un opérateur est actif commercialement sur le marché de détail et qu'il a conquis des clients qui sont joignables par des clients d'autres opérateurs, cet opérateur assure bien la fourniture effective de prestations de terminaison d'appel vers ses numéros géographiques et/ou non géographiques fixes et dispose donc d'un pouvoir de marché (de monopole) sur le marché formé par l'ensemble de ces prestations.
Toutefois, il est nécessaire d'évaluer si d'éventuels contre-pouvoirs d'acheteurs peuvent être exercés sur la fourniture des prestations de terminaison d'appel par les OBL afin de déterminer si ces derniers sont effectivement en mesure d'agir indépendamment de leurs concurrents, de leurs clients et, en fin de compte, des utilisateurs finaux.

III-3.2. Analyse des contre-pouvoirs éventuels des acheteurs

L'analyse développée dans cette partie cherche à évaluer les possibilités dont disposent les acheteurs des prestations de terminaison d'appel d'un opérateur de boucle locale donné d'exercer un contre-pouvoir d'achat sur les conditions de la vente de cette prestation, et notamment de s'opposer à une hausse des tarifs des prestations de terminaison d'appel qu'il veut acheter.
Il convient donc, d'une part, d'identifier la nature des contre-pouvoirs potentiels qui pourraient être exercés face à une hausse des tarifs de terminaison d'appel et, d'autre part, d'évaluer si les différents acheteurs du marché sont effectivement en mesure d'utiliser ces contre-pouvoirs.

III-3.2.1. Nature des contre-pouvoirs potentiels

Lorsqu'un OBL augmente ses tarifs de terminaison d'appel, les possibilités dont disposent les acheteurs de s'opposer à cette hausse sont extrêmement limitées puisqu'il n'est pas possible d'accéder à des offres alternatives pour terminer les appels vers les clients de cet OBL.
Les seuls contre-pouvoirs potentiels d'un acheteur sont donc limités à :
― renoncer, ou menacer de renoncer, à l'achat de terminaison d'appel vers les clients de cet OBL ce qui ne permettrait plus aux clients de cet OBL d'être joints par les clients raccordés par l'acheteur. Ceci suppose toutefois, inversement pour l'acheteur, de renoncer à offrir à ses propres clients sur le marché de détail l'acheminement des appels vers cet OBL ;
― augmenter, ou menacer d'augmenter, les tarifs de détail des appels vers cet OBL, de façon à diminuer le volume de trafic acheminé vers cet OBL, et donc à baisser les revenus de terminaison d'appel de ce dernier, ou à le faire paraître sur le marché de détail comme un réseau où il est « cher » d'être appelé, ce qui pourrait en théorie dissuader les utilisateurs finaux de souscrire aux services de cet OBL ou inciter ceux qui y ont déjà souscrit à changer d'opérateur.
A priori, la possibilité dont disposent les acheteurs d'exercer effectivement ces contre-pouvoirs paraît étroitement liée à leur propre position sur le marché de détail. En particulier, le cas particulier des contre-pouvoirs d'acheteur de France Télécom doit être distingué du cas des autres opérateurs.
Par ailleurs, un acheteur de terminaison d'appel pourrait théoriquement bénéficier d'un contre-pouvoir indirect via ses clients, si ceux-ci renoncent à appeler l'opérateur pratiquant une terminaison d'appel élevée. Comme cela a été montré lors de la délimitation des marchés, cette possibilité est très limitée, très aléatoire et dépend de nombreux facteurs. Elle ne saurait donc constituer un contre-pouvoir d'acheteur crédible à une hausse de terminaison d'appel.
Enfin, il convient de distinguer les contre-pouvoirs d'acheteur d'un opérateur vis-à-vis de la terminaison d'appel fixe vers des numéros déjà acheminés de ceux d'un acheteur de la terminaison d'appel fixe sur des numéros qui ne sont pas encore ouverts.

III-3.2.2. Contre-pouvoirs éventuels des autres opérateurs
III-3.2.2.1. Vis-à-vis de la terminaison d'appel de France Télécom

Des contre-pouvoirs d'acheteurs existeraient si les acheteurs de terminaison d'appel avaient la capacité de s'opposer à une hausse éventuelle par France Télécom de ses prix de terminaison d'appel ou de contraindre ceux-ci à une baisse. L'Autorité estime qu'aucun opérateur alternatif n'est en mesure d'exercer un tel contre-pouvoir.
Tout d'abord et comme on l'a vu précédemment lors de la délimitation de marché, il n'existe pas d'alternative effective à l'achat de terminaison d'appel à France Télécom pour l'acheminement des communications jusqu'aux abonnés raccordés à son réseau.
Par ailleurs, compte tenu de l'importance de la taille du parc d'abonnés raccordés au réseau de France Télécom par rapport à celui de ses concurrents, la possibilité théorique dont disposent les opérateurs tiers de menacer de cesser l'achat de terminaison d'appel sur le réseau de France Télécom en cas de hausse significative de ses tarifs n'est pas susceptible d'exercer une contrainte sur les prix de ces prestations. En effet, France Télécom peut supporter dans une certaine mesure, compte tenu de la taille des autres réseaux de boucle locale, les conséquences de l'impossibilité qui en résulterait pour ses abonnés d'être appelés par les utilisateurs de l'un de ces autres réseaux. En revanche, l'impossibilité pour les utilisateurs raccordés à un autre opérateur de téléphonie de joindre les abonnés raccordés au réseau de France Télécom, qui représentent encore la très grande majorité du parc total d'abonnés aux réseaux de téléphonie fixe en France, serait extrêmement pénalisante et compromettrait la viabilité de l'activité commerciale de cet opérateur.
Si France Télécom décide d'augmenter unilatéralement son tarif de terminaison d'appel, les autres opérateurs peuvent répliquer immédiatement en procédant à une hausse du même ordre de manière à équilibrer globalement les flux financiers d'interconnexion entrants et sortants. Une telle réplique, qui pourrait théoriquement constituer un véritable contre-pouvoir d'acheteur sur le marché de gros (en stérilisant les effets de la hausse chez l'opérateur ayant augmenté sa terminaison d'appel le premier), reste cependant difficile à mettre en œuvre quand les volumes de terminaison d'appel en cause ne sont pas symétriques. Or, du fait de la sélection du transporteur et de profils de clientèle spécifiques, la plupart des opérateurs alternatifs présentent un solde d'interconnexion avec France Télécom négatif en volume.
Cette possibilité ne constitue donc pas un contre-pouvoir d'acheteur de nature à influer sur la position d'un opérateur sur sa terminaison d'appel et poserait de plus des problèmes concurrentiels néfastes pour le consommateur final puisqu'elle conduirait à une hausse généralisée des tarifs de gros, entraînant ensuite une hausse injustifiée des tarifs de communications au détail.
Enfin, les services de détail de France Télécom restent les plus gros acheteurs en volume de prestations de terminaison d'appel, ce qui rend très peu probable la perspective d'une pression à la baisse sur les prix de ces offres par le principal acheteur de ce marché.

III-3.2.2.2. Vis-à-vis de la terminaison d'appel des autres opérateurs alternatifs

A la connaissance de l'Autorité, les interconnexions directes entre opérateurs alternatifs ont commencé à se mettre en place de manière importante depuis 2006, avec la croissance des trafics entrants chez ces opérateurs. L'Autorité dispose encore de peu de recul sur les relations entre opérateurs alternatifs concernant l'interconnexion.
Néanmoins, comme cela a été rappelé, dans l'hypothèse où un opérateur déciderait d'augmenter unilatéralement et sensiblement ses tarifs de terminaison d'appel, les autres opérateurs alternatifs pourraient répondre de plusieurs façons :
― renoncer, ou menacer de renoncer, à l'achat de terminaison d'appel vers les clients de cet opérateur ;
― augmenter, ou menacer d'augmenter, les tarifs de détail des appels vers cet opérateur.
Concernant la première possibilité, l'Autorité estime que les opérateurs alternatifs se positionnent sur le marché des communications d'abord en fonction des offres de l'opérateur historique. Or, dans le mesure où France Télécom raccorde aujourd'hui tous les numéros et donc tous les opérateurs, il semble difficile, pour un opérateur alternatif, de proposer une offre plus réduite en termes de destinations joignables par ses clients. Dès lors, l'Autorité estime que la renonciation à l'achat de terminaison d'appel d'un opérateur alternatif ne constitue pas un contre-pouvoir d'acheteur efficace.
Concernant la seconde possibilité, l'Autorité estime qu'il est très difficile pour un opérateur de mettre en œuvre des tarifs de détail différenciés par opérateur, car les offres de détail sont généralement regroupées par destination (tous les numéros géographiques, tous les numéros mobiles, etc.) et les utilisateurs ne souhaitent pas devoir faire des distinctions plus fines, leurs attentes étant pour beaucoup marquées par le besoin de simplification.
Par conséquent, une différenciation tarifaire à la hausse des appels d'un opérateur alternatif A vers un autre opérateur alternatif B suite à l'augmentation des tarifs de terminaison d'appel de ce dernier aurait pour principal effet de mécontenter les abonnés de l'opérateur A par la hausse tarifaire, sans que l'opérateur B ne soit incité à baisser sa terminaison d'appel. En effet, d'une manière générale, les utilisateurs de téléphonie ne sont pas sensibles au prix des appels entrants dans le choix de leur opérateur, et d'autant plus quand seul un opérateur alternatif pratique une différenciation tarifaire.
A ce titre, l'Autorité constate qu'un opérateur, Free, a tenté, en 2006, de mettre en œuvre une différenciation tarifaire au détail pour les appels à destination des numéros et des opérateurs dont il estimait le tarif de terminaison d'appel trop élevé. Concrètement, Free a exclu ces numéros de son forfait « illimité France » vendu à tous ses clients haut débit et mis à disposition de ces derniers un outil permettant de connaître les numéros en question. Quelques semaines après cette annonce, sans que les opérateurs en question aient modifié à la baisse leurs tarifs de gros mais sous la pression de ses clients, Free a été contraint de renoncer à cette distinction, au motif qu'elle entraînait une complexité trop importante pour les clients finals. Cette expérience a confirmé l'impossibilité pratique pour un opérateur alternatif d'agir sur les tarifs de terminaison d'appel des autres opérateurs via sa tarification de détail.
En conséquence, l'Autorité estime que les opérateurs alternatifs ne sont pas en mesure d'exercer un contre-pouvoir d'achat sur les prestations de terminaison d'appel fournies par les autres OBL alternatifs.

III-3.2.3. Contre-pouvoirs éventuels de France Télécom
vis-à-vis de la terminaison d'appel des autres opérateurs alternatifs

France Télécom contrôle plus de 80 % des accès au service téléphonique fournis aux utilisateurs du territoire national. Par conséquent, compte tenu du nombre limité d'utilisateurs raccordés aux réseaux de ses concurrents OBL, France Télécom pourrait en théorie cesser d'offrir à ses clients l'acheminement au détail des communications vers l'un de ces concurrents sans pour autant que sa compétitivité en soit significativement altérée. Inversement, une telle pratique serait extrêmement pénalisante pour l'activité d'un OBL alternatif dans la mesure où il ne serait plus en mesure d'offrir à ses clients ou prospects la possibilité d'être joints par l'immense majorité des abonnés au service téléphonique en France. En l'absence de régulation, une telle pratique, ou la menace d'une telle pratique, pourrait ainsi agir comme un contre-pouvoir effectif empêchant toute hausse des tarifs de terminaison d'appel d'un OBL alternatif.
Cependant, France Télécom est tenue, au titre de ses obligations de fournisseur du service universel (12) d'acheminer les communications issues de ses clients vers l'ensemble des numéros situés sur le territoire national, y compris ceux de ses concurrents. France Télécom ne dispose donc pas de la possibilité de renoncer à l'achat des prestations de terminaison d'appel d'un OBL alternatif, et ainsi d'utiliser ce moyen comme un contre-pouvoir effectif.
Par ailleurs, compte tenu de sa position sur le marché des communications locales et nationales, où sa part de marché demeure très importante, France Télécom dispose en théorie de la possibilité d'appliquer à ses clients des prix particulièrement élevés, de façon excessive et durable, pour les appels vers cet OBL. En l'absence de régulation, une telle pratique, ou la menace d'une telle pratique, pourrait ainsi agir comme un contre-pouvoir effectif face à toute hausse des tarifs de terminaison d'appel de cet OBL.
Cependant, les possibilités dont France Télécom dispose pour fixer ses tarifs de détail indépendamment de ses concurrents et de ses utilisateurs sont encadrées par le droit commun de la concurrence, et en particulier l'interdiction faite aux acteurs économiques d'abuser de leur éventuelle position dominante. De plus, au titre de ses obligations actuelles de fournisseur du service universel, une partie des tarifs de détail pratiqués par France Télécom doivent aujourd'hui être abordables.
Dans l'hypothèse d'une hausse des charges de terminaison d'appel d'un OBL donné, ces dispositions permettraient de vérifier que la hausse correspondante des tarifs de détail vers cet OBL, si elle était justifiée dans son principe, resterait strictement proportionnée à la hausse de ces charges de terminaison d'appel et d'éviter ainsi l'apparition de tout comportement anticoncurrentiel. De plus, en augmentant ses tarifs de détail vers un opérateur en particulier, sans que ses clients puissent facilement identifier les numéros concernés par cette augmentation, France Télécom s'exposerait à un mécontentement de ces derniers et risquerait d'être pénalisée sur les marchés de détail.
En conséquence, l'augmentation des tarifs de détail vers un opérateur dont la terminaison d'appel augmenterait ne semble pas être un contre-pouvoir de nature à modifier la position d'un opérateur alternatif sur sa terminaison d'appel.
Enfin, l'ensemble de cette analyse est confirmé par l'arrêt du Conseil d'Etat en date du 29 décembre 2006 sur le contentieux opposant la société UPC France et l'ARCEP : « Si France Telecom est l'acheteur le plus important sur le même marché, cette société ne dispose pas pour autant, de ce fait, d'un pouvoir lui permettant de contrebalancer celui de la société requérante (UPC France), notamment celui de s'opposer à une hausse des tarifs de terminaison d'appel ; ».

(12) Arrêté du 3 mars 2005 portant désignation de l'opérateur chargé de fournir la composante du service universel prévue au 1° de l'article L. 35-1 du code des postes et des communications électroniques (service téléphonique).

III-3.2.4. Evolution prospective

Les différents éléments d'analyse présentés ci-dessus ne devraient vraisemblablement pas évoluer durant la période d'analyse courant sur les trois prochaines années compte tenu de la position structurellement monopolistique d'un OBL sur le marché de la terminaison d'appel vers son réseau.
En tant que de besoin, par exemple en cas d'évolution significative de la structure du marché, des acteurs ou des technologies disponibles, l'Autorité pourra être amenée à effectuer une nouvelle analyse de ce marché avant la fin de la période envisagée.

III-3.3. Commentaires des acteurs sur l'analyse de l'Autorité

Concernant les contre-pouvoirs d'acheteur sur les prestations de terminaison d'appel, l'AFORST estime que l'analyse proposée ne distingue pas suffisamment les contre-pouvoirs exercés par les opérateurs sur la terminaison d'appel des autres opérateurs en fonction de leur taille. Cet acteur considère notamment qu'il « n'est pas légitime de considérer la situation de France Télécom sur sa propre TA ou vis-à-vis des TA des OBL tiers comme identique à celle des autres opérateurs entre eux ou vis-à-vis de France Télécom ». Numericable considère également que France Télécom dispose d'un contre-pouvoir d'acheteur effectif sur sa terminaison d'appel.
Comme elle le montre dans son analyse, l'Autorité reconnaît que la nature et l'impact des contre-pouvoirs éventuels peuvent varier selon l'opérateur qui les exerce et ses relations avec les autres opérateurs mais, pour autant, elle maintient son analyse qu'il n'existe pas de contre-pouvoir d'acheteur effectif pour la prestation de terminaison d'appel et ce, quelle que soit la taille de l'opérateur vendeur de terminaison d'appel. L'Autorité rappelle de plus qu'elle ne cherche pas à caractériser l'intensité de son influence significative mais son existence.
L'Autorité a constaté encore récemment qu'un opérateur alternatif, de très petite taille (quelques centaines d'abonnés), a pu fixer so n tarif de terminaison d'appel à un niveau significativement supérieur au tarif généralement constaté dans le secteur, sans que les autres opérateurs, y compris France Télécom, ne puissent le dissuader de pratiquer ce tarif.

III-3.4. Avis du Conseil de la concurrence

Le Conseil de la concurrence souscrit à l'analyse de l'Autorité en ce qui concerne l'exercice par chacun des opérateurs de réseaux fixes d'une influence significative sur le marché de la terminaison d'appel sur son réseau.

III-3.5. Observations de la Commission européenne

La Commission européenne ne formule aucune observation concernant l'exercice par chacun des opérateurs de réseaux fixes d'une influence significative sur le marché de la terminaison d'appel sur son réseau.

III-3.6. Conclusion

En conséquence, l'Autorité estime que les opérateurs fixes exercent une influence significative, sur la période couverte par la présente analyse, sur chacun de leur réseau, défini comme marché pertinent dans la section I.

III-4. Influence significative de France Télécom sur le marché de gros du départ d'appel

L'Aut orité a défini le marché du départ d'appel pertinent pour une régulation ex ante et avait démontré en 2005 que France Télécom exerçait à l'époque une influence significative sur ce marché. Dans cette partie, l'Autorité analyse la nouvelle situation concurrentielle en vigueur sur le marché du départ d'appel.

III-4.1. Analyse des parts de marché

Sous l'impulsion du dégroupage, la part de marché de France Télécom sur les prestations de départ d'appel a pour la première fois franchi à la baisse le seuil des 99 % en 2006. Par ailleurs, les déploiements de boucles locales alternatives (raccordements de sites entreprises et déploiement de la fibre optique en zone dense notamment) entraînent également une baisse de la part de marché de France Télécom mais à un rythme extrêmement lent en comparaison de l'effet dû au dégroupage.
Aujourd'hui, les clients d'offres haut débit alternatives aux offres de France Télécom et incluant le service téléphonique utilisent d'autres opérateurs que cette dernière pour acheminer le départ de leurs appels. En revanche, pour les clients demeurant abonnés à un service de sélection du transporteur ou de vente en gros de l'abonnement au service téléphonique, c'est France Télécom qui continue à vendre les prestations de départ d'appel.
Par conséquent, la part de marché de France Télécom sur le marché du départ d'appel, si elle baisse régulièrement depuis 2004, reste encore largement majoritaire, en particulier à cause des prestations de sélection du transporteur et d'accès à Internet bas débit qui représentent toujours des volumes importants et ne sont commercialisées que par France Télécom.
De plus, il convient de noter que bien que les offres de gros des services haut débit permettent aux opérateurs alternatifs de gagner des parts de marché sur le marché du départ d'appel, l'infrastructure reste contrôlée par France Télécom. L'Autorité constate que les opérateurs alternatifs mettent également en place des infrastructures d'accès propres, notamment via le raccordement des abonnés en FTTH, mais ce développement en est pour l'heure à sa phase de lancement et devrait demander un temps et des investissements considérables. Il sera de plus probablement limité aux zones à forte densité dans un premier temps. D'autres opérateurs et, dans certains cas, des collectivités locales, investissent également dans des nouvelles technologies d'accès, comme le WiMax. Là encore, ces projets restent généralement limités à certaines zones géographiques et n'ont généralement pas encore débouché sur des offr es de services opérationnelles.

Figure 7 : Evolution du marché du départ d'appel par produit en volumes (13)

Vous pouvez consulter le tableau dans le
JOn° 187 du 12/08/2008 texte numéro 51

(13) Cf. note de bas de page n° 3.

Figure 8 : Evolution du marché du départ d'appel par produit en valeur

Vous pouvez consulter le tableau dans le
JOn° 187 du 12/08/2008 texte numéro 51

Figure 9 : Parts de marché de France Télécom sur le départ d'appel en volumes (14)

Vous pouvez consulter le tableau dans le
JOn° 187 du 12/08/2008 texte numéro 51

(14) Cf. note de bas de page n° 3.

La part de marché de France Télécom constitue un indicateur important de puissance de marché. Il est toutefois nécessaire de procéder à l'examen des autres critères pour en évaluer la portée.

III-4.2. Contrôle d'infrastructures difficiles à dupliquer

Les parts de marché précédemment exposées illustrent le fait que France Télécom possède encore le contrôle de la grande majorité des infrastructures de boucle locale sur l'ensemble du territoire, infrastructures sur lesquelles reposent en partie les prestations de départ d'appel.
Comme cela a déjà été exposé pour le marché de l'accès, cette infrastructure, qui permet de raccorder les utilisateurs finals, est difficile à dupliquer en l'absence d'économies d'échelle considérables dont ne d isposent pas, à l'heure actuelle, les opérateurs alternatifs, et dont ils ne pourront disposer, à l'horizon de l'analyse, à l'exception des zones de population très denses. A titre d'illustration, le coût de reconstruction à neuf de la boucle locale de France Télécom est évalué de 28 à 30 milliards d'euros (15).
Par ailleurs, France Télécom met à disposition des autres opérateurs ses infrastructures d'accès, notamment via les offres de dégroupage. Cette possibilité permet théoriquement à un opérateur alternatif de concurrencer France Télécom sur le marché du départ d'appel mais demande également un temps et des investissements importants, qui ne pourraient pas être rentabilisés par la seule fourniture de prestations de départ d'appel. De plus, le développement actuel des raccordements directs et de dégroupage reste aujourd'hui limité à certaines zones géographiques et certains segments du marché.
A l'horizon de la présente analyse, l'Autorité considère donc que les infrastructures détenues par France Télécom ne seront pas duplicables par des opérateurs alternatifs.

(15) Consultation publique de l'Autorité sur les méthodes de valorisation de la boucle locale cuivre, avril 2005, page 4.

III-4.3. Economies d'échelle et de gamme

La position de France Télécom sur l'ensemble des marchés de détail de l'accès et des communications lui permet de bénéficier d'économies d 'échelle et de gamme importantes sur le départ d'appel. En effet, l'activité de France Télécom couvre l'ensemble des produits proposés sur le marché des communications électroniques et l'ensemble du territoire national sur lequel elle peut compter sur une densité de clients importante, équilibrée et durable.
Aucun opérateur alternatif présent sur le marché ou nouvel entrant ne pourrait bénéficier d'une structure de coûts équivalente à celle de France Télécom.

III-4.4. Absence de contre-pouvoir d'acheteurs

Pour intervenir sur les marchés de détail des communications, les opérateurs tiers peuvent soit acheter des prestations d'accès à la boucle locale de France Télécom (dégroupage, bitstream), soit s'appuyer sur la prestation de départ d'appel de France Télécom notamment via la sélection du transporteur. En cas de hausse unilatérale de France Télécom sur ses tarifs de départ d'appel, les opérateurs acheteurs ne disposeraient d'aucun contre-pouvoir si ce n'est l'achat de prestations de gros d'accès à la boucle locale de France Télécom, prestations qui demandent un temps et des investissements sans commune mesure avec les conditions d'achat des prestations de départ d'appel. Cette possibilité ne constitue donc pas un contre-pouvoir d'acheteur de nature à influer la position de France Télécom sur le départ d'appel.
Il n'existe donc pas de pouvoir d'achat compensateur susceptible de s'exercer sur les prestations de départ d'appel fournies par France Télécom.

III-4.5. Evolution prospective du marché

D'un point de vue prospectif, la tendance actuelle de progression des parts de marché alternatives sur le marché du départ d'appel devrait se poursuivre au cours du prochain cycle d'analyse de marché, sous l'impulsion du développement des offres de gros d'accès à la boucle locale de France Télécom. Pour autant, cette évolution devrait rester limitée à l'horizon de la présente analyse et la situation du marché du départ d'appel ne devrait donc pas évoluer de façon significative au cours de la période couverte par la présente analyse.

III-4.6. Commentaires des acteurs sur l'analyse de l'Autorité

Les acteurs, dans la consultation publique lancée par l'Autorité sur son projet de décision, n'ont pas exprimé de commentaires remettant directement en cause l'analyse de l'Autorité sur l'influence s ignificative sur le marché du départ d'appel qu'elle a défini.

III-4.7. Avis du Conseil de la concurrence

Le Conseil de la concurrence souscrit à l'analyse de l'Autorité en ce qui concerne l'exercice par France Télécom d'une influence significative sur le marché du départ d'appel en position déterminée.

III-4.8. Observations de la Commission européenne

La Commission européenne ne formule aucune observation concernant l'exercice par France Télécom d'une influence significative sur le marché du départ d'appel en position déterminée.

III-4.9. Conclusion

Au vu des éléments qui précèdent, l'Autorité estime que France Télécom détient une influence significative sur le marché du départ d'appel en position déterminée tel que défini ci-avant sur le territoire d'analyse pour la période d'analyse.

IV. - OBLIGATIONS

L'Autorité ayant délimité des marchés, démontré leur pertinence pour une régulation sectorielle ex ante, puis établi l'existence sur chacun d'eux d'un opérateur exerçant une influence significative, il convient de définir les remèdes à appliquer afin de permettre le développement d'une concurrence effective.
Dans la suite, l'Autorité, dans un souci de lisibilité, s'est attachée à intégrer, le cas échéant, les principaux commentaires des acteurs dans chaque partie visant à définir un remède.

IV-1. Objectifs de l'action réglementaire

Si l'analyse du niveau de développement de la concurrence conclut qu'un marché est effectivement concurrentiel, l'Autorité peut proposer la suppression des éventuelles obligations qui s'y appliquaient jusqu'alors. Dans le cas contraire, l'Autorité impose aux entreprises identifiées comme puissantes les obligations spécifiques appropriées, conformément aux articles L. 38 et L. 38-1 du CPCE. L'imposition de ces obligations doit être établie en tenant compte de la nature des obstacles au développement d'une concurrence effective et proportionnée à la réalisation des objectifs mentionnés à l'article L. 32-1 du CPCE.
Les remèdes disponibles que peut imposer l'Autorité peuvent concerner les marchés de gros (transparence, non-discrimination, séparation comptable, etc.) et les marchés de détail (non-discrimination, contrôle tarifaire, etc.).
Conformément à l'article L. 38-1 du CPCE, l'Autorité privilégie une régulation via les marchés de gros et n'envisage une régulation via les marchés de détail que lorsque l'imposition d'obligations de gros ne suffit pas à atteindre l'objectif poursuivi. Dans cette logique, sont examinées dans les chapitres IV.2, IV.3 et IV.4 les obligations imposées sur les marchés de gros, puis dans le chapitre IV.5, les éléments justifiant la levée de toute obligation sur les marchés de détail.
Par ailleurs, l'article 19 de la directive « service universel » et l'article L. 38.II du CPCE prévoient la possibilité pour l'Autorité d'imposer la sélection du transporteur aux opérateurs exerçant une influence significative sur les marchés de détail de l'accès au service téléphonique. Le code dispose ainsi que « les opérateurs réputés exercer une influence significative sur le marché du raccordement aux réseaux téléphoniques fixes ouverts au public sont tenus de fournir à tout opérateur les prestations d'interconnexion et d'accès nécessaires pour que leurs abonnés puissent, à un tarif raisonnable, présélectionner le service téléphonique au public de cet opérateur et écarter, appel par appel, tout choix de présélection en composant un préfixe court ; les tarifs de ces prestations reflètent les coûts correspondants ». L'expression « marché du raccordement » renvoyant aux marchés de détail de l'accès et la directive « service universel » considérant des obligations sur les marchés de détail, il apparaît que cette obligation est un remède pouvant être imposé au titre de l'influence significative exercée sur lesdits marchés de détail. Néanmoins, s'agissant en pratique d'une offre de gros, l'Autorité traitera la sélection du transporteur dans la partie IV.2 relative aux obligations génériques imposées à France Télécom au niveau des marchés de gros.
L'obligation de vente en gros de l'accès au service téléphonique, répondant rigoureusement aux mêmes considérations, sera é galement traitée dans la partie IV.2 bien qu'étant imposée au titre de l'influence significative exercée sur les marchés de détail.

IV-2. Obligations non tarifaires d'interconnexion et d'accès imposées à France Télécom

L'influence significative qu'exerce France Télécom sur certains marchés de gros et de détail de la téléphonie fixe rend nécessaire l'imposition de remèdes sur ces marchés.
L'Autorité justifie dans cette partie la nécessité et la proportionnalité des obligations non tarifaires qu'elle lui impose, dans le présent document, sur les marchés de gros.
De plus, cette partie identifie les raisons conduisant à imposer à France Télécom des obligations différentes des obligations imposées aux autres opérateurs, qui exercent une influence significative seulement sur le marché de gros de leur terminaison d'appel.
Ces obligations sont imposées à France Télécom pour la durée de validité de cette analyse, sans préjudice de l'éventuel réexamen que l'Autorité pourrait être amenée à anticiper conformément à l'article D. 303 du CPCE.

IV-2.1. Obligation de faire droit aux demandes raisonnables d'accès

Comme cela a été démontré précédemment, France Télécom dispose d'une influence significative sur l'ensemble des marchés pertinents de détail et de gros de la téléphonie fixe identifiés dans la nouvelle recommandation de la Commission européenne, à l'exception des marchés de la terminaison d'appel vers les autres réseaux.
Par conséquent, afin de permettre aux opérateurs d'intervenir dans des conditions équivalentes sur les marchés de détail situés en aval, il est nécessaire d'imposer à France Télécom une obligation de fournir, en réponse aux demandes raisonnables des opérateurs alternatifs, des prestations d'accès, lorsque celles-ci sont relatives aux marchés de gros sur lesquels elle exerce une influence significative, ou nécessaires pour l'exercice, au bénéfice des utilisateurs, d'une concurrence effective et loyale sur les marchés de détail.
D'une manière générale, conformément aux dispositions de l'article L. 38 V du code, le caractère raisonnable d'une demande d'accès formulée par un opérateur devra être apprécié au regard de la proportionnalité entre les contraintes économiques et techniques d'une telle demande pour France Télécom et le bénéfice attendu pour la résolution d'un problème concurrentiel particulier ou plus généralement pour le fonctionnement d'un des marchés de gros ou de détail de la téléphonie fixe.

IV-2.1.1. Obligations générales d'accès

En premier lieu, compte tenu des investissements consentis par les opérateurs pour s'interconnecter sur l'un ou l'autre des équipements d'interconnexion de France Télécom, et en vertu de l'article D. 310 (3°) du CPCE, il est proportionné d'imposer à cette dernière de ne pas retirer un accès déjà accordé à un opérateur, sauf accord préalable expresse de l'Autorité, conformément à l'objectif de développement efficace dans les infrastructures et de compétitivité du secteur mentionné au 3° de l'article L. 32-1 du code précité.
De plus, France Télécom est tenue de fournir les prestations d'accès actuellement fournies, et notamment les prestations de départ d'appel et de terminaison d'appel, basées sur des protocoles de type « signalisation par canal sémaphore CCITT n° 7 » (dit SS7). France Télécom doit également continuer de fournir la prestation d'interconnexion forfaitaire pour l'Internet actuellement fournie. En effet, bien que les volumes de trafic livré pour cette prestation aient baissé, elle représente encore un produit très utilisé par les opérateurs alternatifs (9 milliards de minutes en 2006) et le maintien de cette offre d'interconnexion dans les conditions actuelles est donc indispensable.
Si les prestations d'interconnexion actuellement proposées par France Télécom utilisent uniquement le protocole SS7, l'importance croissante des offres de communications sur accès large bande (30 % du trafic au départ des postes fixes au T2 2007), la convergence des différentes normes utilisées pour la VoIP et les projets de nombreux opérateurs du secteur conduisent l'Autorité à envisager l'apparition de nouvelles architectures d'interconnexion, basées sur des interfaçages en protocole VoIP, au cours de la période analysée ici. Ces nouvelles architectures pourraient ainsi donner lieu à de nouvelles prestations de gros, ayant vocation à compléter ou à se substituer aux prestations fournies actuellement par France Télécom en mode SS7. Plus propices aux gains d'économies d'échelle et permettant de se dispenser d'équipements comme les passerelles de conversion TDM/IP, elles pourraient engendrer un gain d'efficacité pour l'ensemble du secteur. C'est pourquoi, dans un souci de neutralité technologique et afin de ne pas fausser le jeu concurrentiel, il est nécessaire que France Télécom fasse droit aux demandes raisonnables des opérateurs relatives à ces nouvelles architectures d'interconnexion.
Par ailleurs, France Télécom étant une entreprise verticalement intégrée fournissant tout type de prestations de détail et de gros, il est également nécessaire et proportionné, qu'elle présente les prestations qu'elle offre de façon suffisamment claire et détaillée, et qu'elle ne subordonne pas l'octroi d'une prestation à une autre, afin de ne pas conduire les acteurs à payer pour des prestations qui ne leur seraient pas nécessaires.
Enfin, France Télécom devra, conformément à l'article D. 310 (2°), négocier de bonne foi avec les opérateurs qui demandent des prestations d'accès relatives à ces marchés, afin, d'une part, de minimiser les cas de litige et, d'autre part, de ne pas profiter de l'influence significative qu'elle exerce sur ces marchés pour durcir les négociations avec les opérateurs.
Ces obligations sont conformes aux critères fixés par l'article L. 38 V en particulier les a, b et d en ce qu'elles sont aujourd'hui fournies par France Télécom et permettent le développement de la concurrence. Elles sont proportionnées aux objectifs fixés à l'article L. 32-1-II du CPCE précités, en particulier les 2°, 3° et 4°.

IV-2.1.1.1. Prestations d'accès et d'interconnexion associées

Les offres d'accès et d'interconnexion incluent un ensemble de prestations élémentaires dont la fourniture est nécessaire au bon acheminement des communications des opérateurs alternatifs et à leur activité. Ces prestations associées comprennent notamment les prestations de raccordement aux sites d'interconnexion et d'accès et la prestation de reversement.

  1. Raccordement des sites d'interconnexion et d'accès

L'utilisation effective de prestations d'acheminement suppose le raccordement physique des réseaux de communications électroniques entre eux. Ainsi, les offres de gros d'accès au réseau de France Télécom ne peuvent être opérationnelles que si elles sont accompagnées de prestations connexes adaptées, nécessaires à leur utilisation par les opérateurs alternatifs.
L'Autorité estime que les obligations de faire droit aux demandes raisonnables d'accès précitées doivent dès lors s'accompagner d'obligations connexes concernant l'accès aux sites d'interconnexion.
Il est donc nécessaire que l'opérateur historique propose aux opérateurs alternatifs une offre de raccordement de leurs équipements dans ses propres sites. En l'absence d'une telle offre, l'obligation de fournir un accès aux prestations de départ d'appel ou de terminaison d'appel serait vidée de son sens puisque aucun opérateur ne pourrait placer ses équipements de réseau.
France Télécom propose actuellement les solutions de raccordement suivantes :
― une offre de colocalisation qui permet à un opérateur de pouvoir accéder au site de l'opérateur en installant ses équipements de transmission directement dans les locaux de France Télécom. C'est la solution la plus directe pour un opérateur alternatif, mais elle représente des frais d'investissement importants : un tel investissement ne se justifie donc qu'au-delà d'un certain seuil de trafic ;
― une offre de liaisons de raccordement qui permet à un opérateur de pouvoir livrer son trafic de terminaison au niveau de son point de présence, l'acheminement du trafic entre ce point et le point d'interconnexion se faisant sur un lien pris en charge par un opérateur tiers. Elle représente des coûts variables et récurrents et se prête à des volumes de trafic plus faibles. Elle peut être fournie par France Télécom, ou par un autre opérateur colocalisé dans le site de l'opérateur ;
― une offre d'interconnexion en ligne dite « In-Span », qui est une solution intermédiaire où l'interconnexion physique des réseaux se fait non pas dans les locaux de France Télécom mais dans un lieu proche de ce dernier.
Tous ces moyens d'accès sont nécessaires au développement de la concurrence sur les marchés de gros de la téléphonie fixe en ce qu'ils permettent à un opérateur de disposer de plusieurs options dans sa logique de déploiement et de pouvoir se déployer au niveau d'un site d'interconnexion même avec des volumes relativement faibles.
Il est donc nécessaire que France Télécom continue à fournir ces prestations. En effet, leur suppression ou modification aurait pour conséquence de déstabiliser le marché et les plans d'affaire des opérateurs alternatifs. Dans la mesure où ces prestations sont déjà offertes aujourd'hui et sont nécessaires à l'activité des opérateurs tiers, leur imposition répond aux critères de l'article L. 38-V du code, en particulier les a, b, c et d.
De plus, avec le développement du dégroupage, de nombreux sites utilisés pour l'interconnexion sont également utilisés pour l'accès aux équipements de la boucle locale de France Télécom. Plusieurs opérateurs alternatifs ont demandé la possibilité de mutualiser les ressources dédiées à l'interconnexion avec celles dédiées au haut débit. Ces opérateurs souhaitent que soit levée l'interdiction de maintenir des équipements de transmission installés pour la collecte DSL en cas de résiliation des BPN, ce maintien n'entraînant selon eux aucun coût ou complexité technique supplémentaires pour France Télécom. Aujourd'hui, les prestations annexes associées aux deux types de produits de gros font en effet l'objet d'offres distinctes, ce qui conduit parfois les opérateurs à acheter à la fois des espaces pour l'interconnexion et des espaces pour le dégroupage ou le bitstream. L'Autorité estime qu'il est pertinent, pour ce type de site hébergeant plusieurs prestations de gros, et lorsque la configuration du site le permet, que France Télécom tienne compte des demandes des autres opérateurs concernant la mutualisation des espaces loués pour l'interconnexion et pour l'accès à la boucle locale. La mise en œuvre de ce principe relève des négociations entre France Télécom et les opérateurs tiers, au vu des circonstances du cas d'espèce (configuration du site, spécification de la demande, etc.).
Enfin, l'Autorité constate que de nombreux opérateurs utilisent des interconnexions au niveau des centres de transit de France Télécom pour sécuriser les acheminements de trafic qui devraient être livrés aux commutateurs d'abonnés reliés à ces centres de transit. Ce type de dispositif de sécurisation est souhaitable dans la mesure où il garantit l'acheminement et la qualité des communications, comme elle l'avait précisé dans sa décision n° 2000-0030 du 5 janvier 2000 sur un différend entre Télécom Développement et France Télécom.
C'est pourquoi l'Autorité considère que les prestations de raccordement des sites d'interconnexion et d'accès au niveau des centres de transit sont également des offres associées aux prestations d'interconnexion au niveau des commutateurs d'abonnés.
De manière générale, l'Autorité considère que toute offre de sécurisation du trafic pour une prestation d'acheminement de trafic est une prestation associée à cette dernière.
Conformément aux objectifs imposés par l'article L. 32-1-II du code, et en particulier les 2°, 3° et 4°, et en l'absence de mesures moins contraignantes qui permettraient d'atteindre le même but, l'Autorité considère comme proportionné que France Télécom propose au titre de l'article D. 310 (1° et 3°) du code une offre de raccordement des équipements des autres opérateurs, adaptée à chaque type de site, comprenant a minima les trois offres précitées.

  1. Prestation de reversement

Dans sa décision de régulation symétrique n° 2007-0213, l'Autorité impose une obligation à tout opérateur départ d'un appel vers un numéro SVA de faire droit aux demandes raisonnables de reversement d'une partie des montants facturés au client final, l'opérateur départ ayant la charge de facturer le client final en son nom propre et de reverser une partie des sommes ainsi facturées à l'exploitant de numéro. Sans accord raisonnable quant à cette prestation de reversement, l'interopérabilité des SVA et leur acheminement de bout en bout peuvent être remis en cause par l'un ou l'autre des acteurs. C'est pourquoi cette obligation est un complément nécessaire à l'obligation d'accessibilité imposée à l'opérateur départ.
Cette obligation imposée aux opérateurs départ, et en particulier à France Télécom, apparaît pleinement conforme aux objectifs poursuivis par l'Autorité, et notamment ceux qui lui sont imposés aux 2°, 4° et 10° de l'article L. 32-1-II du CPCE.
Enfin, l'Autorité l'estime proportionnée en ce qu'elle est indispensable au développement de services sur des numéros SVA du plan national de numérotation, compte tenu des faibles montants que les communications à destination de ces numéros SVA engendrent et de la consommation en règle générale à l'acte de ces services.
La décision n° 2007-0667 a défini le contenu de la prestation de reversement de France Télécom :
« En ce qui concerne France Télécom, la modalité de commercialisation des SVA se traduira contractuellement par la mise à disposition d'une facturation et d'un recouvrement en son nom propre auprès du client final, lesquels s'accompagneront du reversement aux fournisseurs de services d'une partie des sommes facturées à l'utilisateur final appelant, comme cela est déjà le cas pour les services à valeur ajoutée à paliers bas et intermédiaires. Il ne s'agira en aucun cas d'une offre de recouvrement pour compte de tiers.
France Télécom maintiendra par ailleurs, dans le cadre de son offre de reversement, les modalités existantes de fixation des tarifs de détail des SVA. Elle propose ainsi une palette de structures et de niveaux tarifaires respectant les règles de gestion du plan public de numérotation, dans lesquels les fournisseurs de services ou leurs intermédiaires techniques choisissent la structure et le niveau de prix de détail du SVA fourni au départ de la boucle locale de France Télécom qui leur conviennent. Ces modalités de fixation des prix ainsi que les paliers existants ne sont pas amenés à changer du fait de la mise en place de cette offre de reversement.
Quant à la composition de la facture, ci-avant détaillée, dorénavant, pour l'ensemble des appels à destination des SVA, France Télécom inclura les sommes dues par les clients dans le deuxième volet de la facture, le troisième volet disparaissant. Celle-ci comprendra l'ensemble des services gratuits, des services à paliers bas et intermédiaires (dits aussi à coûts partagés), des services à paliers élevés (dits aussi à revenus partagés) et des services de renseignements téléphoniques. France Télécom procédera par conséquent au recouvrement des sommes éventuellement impayées par les clients pour l'ensemble des SVA et non plus pour les seuls SVA à paliers bas ou intermédiaires, comme elle le fait déjà pour ses propres besoins.
Cette offre de reversement sera enfin indépendante du type de réseau utilisé pour acheminer les SVA : elle sera donc disponible sur l'ensemble des lignes offrant un service téléphonique (RTC et VoIP) de la boucle locale fixe de France Télécom. »
La prestation de reversement que doit fournir France Télécom au titre de la présente analyse de marché est identique à celle définie dans la décision n° 2007-0667 susvisée.

IV-2.2. Obligation de non-discrimination

L'article L. 38-I (2°) du CPCE prévoit la possibilité d'imposer aux opérateurs disposant d'une influence significative sur un marché une obligation de non-discrimination.
L'article D. 309 du CPCE précise que l'obligation de non-discrimination fait notamment en sorte que « les opérateurs appliquent des conditions équivalentes dans des circonstances équivalentes aux autres opérateurs fournissant des services équivalents, et qu'ils fournissent aux autres des services et informations dans les mêmes conditions et avec la même qualité que ceux qu'ils assurent pour leurs propres services, ou pour ceux de leurs filiales ou partenaires ».
France Télécom, entreprise intégrée verticalement, intervient sur l'ensemble des marchés de gros d'acheminement de trafic, et sur l'ensemble des marchés de détail sous-jacents, et exerce une influence significative sur une partie de ces marchés de gros et de détail. Il est par conséquent nécessaire de garantir que France Télécom n'avantagera pas ses propres services de détail par les moyens qu'elle leur fournit. Il est de même nécessaire que France Télécom n'avantage pas certains opérateurs, et en particulier ses filiales ou ses partenaires, en leur proposant des offres de gros privilégiées, afin d'exclure ses concurrents les plus directs des marchés de détail et de gros sous-jacents.
Une obligation de non-discrimination est donc imposée à France Télécom sur l'ensemble des marchés de gros où elle exerce une influence significative. Cette obligation s'applique à toutes les prestations d'accès et d'interconnexion, y compris les prestations qui leur sont associées et notamment aux conditions techniques et tarifaires offertes par voie contractuelle, aux contenus et à la qualité des informations fournies dans les processus mis en œuvre pour l'accès et l'interconnexion, aux délais de fourniture des offres de gros, ou encore à la qualité de service offerte.

IV-2.3. Obligation de transparence

L'article L. 38-I (1°) du CPCE prévoit que l'Autorité peut demander à un opérateur disposant d'une influence significative de rendre publiques certaines informations relatives à l'interconnexion et à l'accès.
L'influence significative de France Télécom sur les marchés de gros du départ et de la terminaison d'appel rend les conditions dans lesquelles les opérateurs peuvent s'interconnecter avec elle structurantes pour la viabilité des services qu'ils peuvent proposer.
Il est donc nécessaire que les opérateurs disposent d'une bonne visibilité sur l'architecture technique, économique et tarifaire des offres de gros de France Télécom, afin de garantir l'exercice d'une concurrence effective et loyale dans la fourniture des services de communications électroniques, au bénéfice des utilisateurs, ainsi qu'à l'égalité des conditions de concurrence. Cette obligation est d'autant plus nécessaire dans la perspective de transformation technologique possible du réseau de l'opérateur historique.
Par ailleurs, l'obligation de transparence apparaît indispensable pour permettre le contrôle de l'obligation de non-discrimination, et ainsi permettre aux opérateurs négociant l'accès avec France Télécom de s'appuyer sur des données de référence publiques. L'obligation de transparence imposée à France Télécom est ainsi nécessaire et proportionnée aux objectifs mentionnés à l'article L. 32-1 du code, et notamment à ceux cités aux 2°, 4° et 9° de cet article. En pratique, l'Autorité impose à France Télécom une obligation de transparence au moyen de deux dispositifs.

IV-2.3.2. Conventions d'interconnexion et d'accès

Les conditions inscrites dans les conventions d'interconnexion et d'accès précisent les conditions techniques et tarifaires offertes par les parties. France Télécom devra informer l'ARCEP de la signature de toutes les conventions d'interconnexion et d'accès et de tout avenant à ces conventions qu'elle signe avec des tiers dans un délai de sept jours à compter de la signature du document, lorsque les prestations concernées sont fournies sur les marchés de gros pertinents de la téléphonie fixe, ou qu'elles leur sont associées.
Cette information permettra à l'Autorité de demander le cas échéant à France Télécom de lui transmettre ledit document, en application de l'article L. 34-8 du code des postes et des communications électroniques, afin notamment de lui permettre de contrôler le respect par France Télécom de l'obligation de non-discrimination.

IV-2.3.2. Informations données aux acteurs
bénéficiant de prestations d'accès et d'interconnexion

Par ailleurs, afin de donner la visibilité nécessaire aux acteurs ayant signé avec elle une telle convention d'interconnexion et d'accès, France Télécom devra leur fournir des informations sur les caractéristiques et les évolutions de son réseau, notamment en termes d'architecture, d'interfaces et de dimensionnement.
Conformément aux dispositions de l'article D. 307-III du code, elle devra également informer ces acteurs, dans un préavis raisonnable, de toute évolution de ses conditions techniques et tarifaires des prestations d'interconnexion et d'accès, ainsi que de toute évolution d'architecture de son réseau, en cas de modification de nature à contraindre les opérateurs utilisant une des prestations d'interconnexion et d'accès à modifier ou adapter leurs propres installations. Le délai de préavis suffisant variera selon la nature de l'évolution proposée et ne saurait être inférieur à un mois. En cas d'évolution tarifaire, ce préavis sera de trois mois minimum (sauf en cas de baisse d'un tarif orienté vers les coûts qui pourra être immédiate le cas échéant), et il sera porté à un an en cas d'évolution de nature à contraindre les opérateurs à modifier leurs installations.
Compte tenu des évolutions importantes que France Télécom envisage d'opérer dans son réseau et de l'importance de l'architecture du réseau de France Télécom pour l'ensemble des opérateurs interconnectés, l'Autorité considère que, lors du prochain cycle d'analyse des marchés, il est nécessaire que les opérateurs interconnectés à France Télécom et l'Autorité disposent d'une visibilité suffisante sur ces évolutions.
En période de transition technologique, comme ce sera le cas pour le réseau de France Télécom dans la période d'application de la présente décision, ce préavis est néanmoins insuffisant et il est essentiel que France Télécom fournisse des informations indicatives à plus long terme aux opérateurs interconnectés et à l'Autorité. A ce titre, l'AFORST a demandé une révision du préavis d'information que doit respecter l'opérateur historique avant de procéder à toute évolution pour le faire passer de douze mois à dix-huit mois pour les modifications de nature à contraindre les opérateurs à modifier leurs installations. France Télécom estime pour sa part qu'un tel allongement « aurait pour principale conséquence de fortement limiter la capacité de France Télécom à faire évoluer opérationnellement son réseau ».
Au vu de l'ensemble des commentaires des acteurs, l'Autorité estime in fine pertinent d'imposer à France Télécom l'obligation de communiquer, avant le 31 janvier de chaque année, les prévisions indicatives d'évolution de son réseau sur les trois années suivantes. Les prévisions pour les années deux et trois peuvent être révisées par France Télécom dans des plans triennaux postérieurs. Ces prévisions incluent notamment les fermetures et ouvertures d'équipements à l'interconnexion, la modification des trafics pouvant être collectés ou livrés sur ces équipements. Elles sont communiquées à l'Autorité et aux opérateurs qui ont signé une convention d'interconnexion avec France Télécom, France Télécom pouvant imposer une clause de confidentialité sur ces informations. Ces informations font l'objet d'une présentation annuelle par France Télécom au comité de l'interconnexion et de l'accès.
A l'initiative de France Télécom en cas de révision d'ampleur significative ou à la demande de l'Autorité, une mise à jour de ces prévisions lui est communiquée, entre les dates prévues à l'alinéa précédent.
Cette obligation apparaît essentielle pour permettre aux opérateurs d'anticiper ces évolutions, et ainsi d'avoir une visibilité suffisante de leurs plans d'investissement, condition nécessaire au développement de l'investissement efficace dans les infrastructures.

IV-2.4. Communication pour information

Conformément au cadre réglementaire, l'Autorité entend favoriser une action sur les marchés de gros tout en s'assurant de la réplicabilité des offres de détail de France Télécom. Ainsi, lors des allégements de la régulation en 2006 et 2007 (16), l'Autorité a supprimé la plupart des obligations imposées à France Télécom sur les marchés de détail résidentiels et notamment a mis un terme à l'obligation de communication préalable et à la possibilité de s'opposer à leur commercialisation.
Toutefois, si l'homologation tarifaire avait été mise en place principalement pour vérifier que France Télécom respectait bien ses obligations sur les marchés de détail, celle-ci permettait également la surveillance de plusieurs obligations imposées sur les marchés de gros. En particulier, il est nécessaire de vérifier l'adéquation de la régulation des marchés de l'accès et de l'interconnexion vis-à-vis des évolutions des marchés de détail aval et le respect par France Télécom des obligations de non-discrimination sur les marchés de gros.
Afin donc de s'assurer que France Télécom respecte bien ses obligations de non-discrimination sur les marchés de l'interconnexion et de l'accès (départ d'appel, terminaison d'appel, sélection du transporteur et vente en gros de l'abonnement au service téléphonique), l'Autorité juge nécessaire d'imposer à France Télécom de lui transmettre pour information les offres des marchés de détail aval à ces marchés et prestations régulées par la présente décision, dans un délai raisonnable avant leur mise en œuvre.
L'Autorité estime donc qu'il convient d'imposer l'obligation de communication pour information des offres de détail de communications et d'accès de France Télécom sur les marchés de détail aval des marchés de terminaison d'appel, de départ d'appel et des prestations de sélection du transporteur et de vente en gros de l'abonnement au service téléphonique.
France Télécom estime qu'il n'est pas fondé juridiquement de lui imposer une obligation de communication de ses offres de détail pour information. Elle souligne qu'en conclusion de son analyse des marchés de détail l'Autorité estime que les remèdes imposés au niveau des marchés de gros suffisent et qu'il ne convient pas d'imposer de remèdes directement au niveau des marchés de détail.
L'Autorité indique que l'obligation de communication pour information est imposée à France Télécom au titre de sa puissance sur les marchés de gros du départ d'appel et de la terminaison d'appel et sur les marchés de détail de l'accès en vue de permettre la mise en œuvre effective de ses obligations d'accès et d'interconnexion et non à des fins de régulation des marchés de détail.
Cette obligation ne permettra pas à l'Autorité de s'opposer à la commercialisation d'offres de détail mais permettra de modifier, le cas échéant, sa régulation des offres de gros sous-jacentes pour la mettre en cohérence avec les évolutions des offres de détail. En cas de risque concurrentiel important découlant de la commercialisation d'une offre de détail par France Télécom et indépendamment de la présente décision, l'Autorité peut saisir du problème le Conseil de la concurrence.
Cette obligation est une modalité de mise en œuvre des obligations de non-discrimination et de transparence imposées à France Télécom sur les prestations d'accès et d'interconnexion de la téléphonie fixe au titre de l'article L. 38-I (1° et 2°) du CPCE. Cette obligation, imposée au titre de l'article L. 38 du code des postes et des communications électroniques, est conforme et proportionnée aux objectifs de régulation définis à l'article L. 32-1-II du CPCE, et en particulier ceux visant à garantir l'exercice au bénéfice des utilisateurs d'une concurrence effective et loyale entre les exploitants de réseau et les fournisseurs de services de communications électroniques et l'égalité des conditions de concurrence. L'Autorité pourra préciser, en tant que de besoin, les modalités de mise en œuvre de cette obligation.

(16) Décisions de l'Autorité respectivement n° 2006-0840 et n° 2007-0636.

IV-2.5. Indicateurs de qualité de service

L'Autorité est particulièrement attachée à ce que le développement de la concurrence sur les marchés de la téléphonie fixe améliore l'attractivité des offres de détail, en maintenant notamment une qualité de service élevée dans l'intérêt des consommateurs.
La capacité qu'ont les opérateurs alternatifs de proposer à leurs clients des niveaux de qualité de service satisfaisants (délai de livraison, délai de réparation en cas de panne...) est un paramètre déterminant pour l'établissement d'une concurrence durable sur les marchés de détail.
Si la qualité de service des offres aval commercialisées par les opérateurs alternatifs dépend de la qualité de leurs propres prestations, elle est également fonction de la qualité des offres de gros achetées auprès de France Télécom à partir desquelles elles sont construites. Or, une transparence totale sur les conditions techniques et tarifaires des offres peut ne pas s'avérer suffisante pour assurer l'équivalence des conditions de fourniture des prestations. En particulier, elle ne garantit pas que France Télécom fournisse des offres de gros avec une qualité de service équivalente à celle fournie à ses propres services pour des prestations équivalentes, comme elle doit y veiller conformément à l'obligation de non-discrimination qui lui est imposée.
Ce type de dissymétrie est préjudiciable au fonctionnement du marché, notamment si la qualité de service de l'offre de gros rend impossible la réplication par les opérateurs alternatifs des offres de détail du groupe France Télécom en termes de qualité de service rendu aux clients finals.
En application de l'article D. 307 du code, l'Autorité estime donc nécessaire d'imposer à France Télécom de publier des informations concernant les conditions de fourniture des prestations d'interconnexion.
France Télécom insiste sur le caractère hétérogène des obligations de qualité de service imposées sur les offres de gros fournies par les opérateurs historiques sur le territoire européen. France Télécom dénonce ainsi le caractère plus contraignant des obligations imposées en France qu'ailleurs dans l'Union européenne, et qui la pénaliseraient notablement.
Sans se prononcer sur le bien-fondé du commentaire de France Télécom, l'Autorité rappelle qu'elle a vocation à réguler le seul marché français des communications électroniques et que la demande de France Télécom de baisser les exigences de niveau de qualité de service est incompatible avec les objectifs assignés au régulateur par l'article L. 32-1 du CPCE.
L'Autorité considère donc comme proportionné aux objectifs poursuivis, et notamment à ceux de veiller à l'exercice au bénéfice des utilisateurs d'une concurrence effective et loyale et à la définition de conditions d'accès aux réseaux qui garantissent l'égalité des conditions de concurrence (17), que France Télécom soit astreinte à publier un ensemble d'indicateurs pertinents de qualité de service sur les prestations déterminantes pour la capacité des opérateurs alternatifs à répliquer les offres de détail de France Télécom et permettre ainsi de s'assurer de l'absence de discrimination entre le niveau de services de l'offre de gros et le niveau de services des prestations équivalentes que France Télécom met en œuvre pour son propre compte. L'Autorité précisera le cas échéant par une décision ultérieure la liste des indicateurs pertinents, au regard notamment des indicateurs que France Télécom élabore déjà pour son propre suivi.
Cette liste pourra notamment inclure les indicateurs suivants :
― délais de livraison des accès ;
― délais de mise en service de la présélection ;
― taux d'échec à la livraison ;
― délai de rétablissement après une panne.

(17) Cf. 2° et 4° de l'article L. 32-1 du code des postes et des communications électroniques.

IV-2.6. Sélection et présélection du transporteur
IV-2.6.1. Obligations de fourniture d'une offre de sélection du transporteur

Lors de sa précédente analyse des marchés de la téléphonie fixe, l'Autorité a estimé justifié d'imposer à France Télécom de permettre à ses abonnés de bénéficier de la sélection appel par appel et de la présélection d'un autre opérateur. Cette obligation faisait suite à l'obligation de mise à disposition de ces offres, depuis 1998 pour la sélection appel par appel et 2000 pour la présélection.
Cette obligation est un remède imposé au titre de l'article L. 38-II et de l'influence significative exercée sur les marchés de détail de l'accès au service téléphonique. Néanmoins, s'agissant en pratique d'une offre d'interconnexion, l'Autorité définit cette obligation et ses modalités dans la présente partie.
Comme démontré précédemment par l'Autorité, France Télécom exerce une influence significative sur les marchés de détail de l'accès.
France Télécom estime que la sélection du transporteur ne doit être imposée à France Télécom que lorsqu'elle est subordonnée à un accès VGAST. France Télécom rappelle que l'analyse de l'Autorité la conduit à délimiter le marché pertinent des accès principalement dédiés à la téléphonie, à considérer que France Télécom exerce une influence significative sur ce marché, puis à lui imposer la VGAST ainsi que la sélection du transporteur sur les accès en VGAST. Cet acteur ne conteste pas l'imposition du remède de VGAST, qui implique la sélection du transporteur sur les accès concernés. Il conteste en revanche l'imposition du remède de sélection du transporteur sur les accès n'étant pas en VGAST. Il précise que l'article L. 38-II du CPCE impose à l'Autorité d'établir la puissance de France Télécom sur le marché du « raccordement aux réseaux fixes ouverts au public », lequel diffère du marché pertinent défini par l'Autorité. Selon l'opérateur, sur le marché cité par le CPCE, qui inclut a priori les offres de type « triple play », France Télécom n'est pas puissante. Ainsi, l'analyse de l'Autorité, qui s'attache à démontrer l'influence significative de France Télécom sur le marché de « l'accès au réseau téléphonique public en position déterminée » ne suffit pas à légitimer l'imposition du remède de sélection du transporteur hors VGAST.
Il apparaît au contraire à l'Autorité que chaque accès téléphonique permet à son utilisateur d'accéder à l'ensemble des usagers et donc à tous les réseaux téléphoniques. Le marché du raccordement aux réseaux téléphoniques saurait en conséquence difficilement être différent du marché de l'accès au réseau téléphonique. En outre, l'article L. 38-II du CPCE procède de la directive SU de la Commission, laquelle prévoit l'imposition de la sélection du transporteur aux « entreprises notifiées comme étant puissantes sur le marché du point de vue de la fourniture de raccordements au réseau téléphonique public et de l'utilisation de ce réseau en position déterminée ».
L'Autorité impose donc à France Télécom de fournir, sur l'ensemble du territoire d'analyse, les prestations d'interconnexion et d'accès nécessaires à la sélection du transporteur et à la présélection.

IV-2.6.2. Historique des prestations de sélection du transporteur

En 1998, France Télécom a introduit une prestation de sélection du transporteur qui permettait aux opérateurs alternatifs de proposer une offre de sélection appel par appel aux clients raccordés à son réseau. Cette offre ne comprenait pas les appels locaux ni les appels vers les numéros mobiles et nécessitait que l'utilisateur compose un préfixe (à la place de E = 0) lorsqu'il souhaitait utiliser un autre opérateur que France Télécom pour l'acheminement de ses communications. Ce préfixe de sélection du transporteur, différent d'un opérateur à l'autre, est du type E différent de 0 ou 16XY. Les modalités d'attribution de ces préfixes sont définies dans le cadre de la décision n° 2005-1085 de l'Autorité fixant l'utilisation des catégories de numéros du plan national de numérotation.
Par la suite, France Télécom s'est vu imposer une obligation de fournir une offre de présélection qui permette aux opérateurs alternatifs de proposer l'acheminement de leurs communications aux clients finals sans que ceux-ci aient besoin de modifier le numéro appelé lors de sa composition. L'Autorité a décrit les procédures opérationnelles relatives à la présélection dans sa décision n° 99-0490 en date du 9 juin 1999.
Dans sa décision n° 99-1077 en date du 8 décembre 1999, l'Autorité a précisé les conditions et les délais de mise en œuvre de la sélection du transporteur appel par appel et de la présélection et a notamment inclus les appels à destination des numéros mobiles dans le champ de la sélection du transporteur.
Enfin, notamment du fait du déploiement par les opérateurs alternatifs de leur réseau au niveau des commutateurs d'abonnés de France Télécom, l'Autorité avait estimé en 2001 que la sélection du transporteur devait dorénavant pouvoir être étendue afin d'inclure les appels internes à une zone locale de tri (ZLT), c'est-à-dire les communications locales. Cependant, chaque opérateur de transport devant être en mesure de décider s'il souhaitait proposer une offre sur le marché des communications locales, l'Autorité avait estimé nécessaire de créer une nouvelle modalité de sélection du transporteur incluant les appels locaux, tout en maintenant une modalité les excluant (modalité appelée par la suite modalité « hors ZLT & 09AB »). L'Autorité a précisé ces évolutions dans sa décision n° 2001-0691 en date du 18 juillet 2001. Les opérateurs qui souhaitaient conserver deux modalités distinctes (une incluant les appels locaux et l'autre les excluant) devaient donc se voir attribuer un préfixe de sélection du transporteur supplémentaire.
Dans sa décision n° 2005-571 d'analyse des marchés de la téléphonie fixe en date du 27 septembre 2005, l'Autorité a imposé à France Télécom l'obligation d'offrir une prestation de sélection du transporteur, en application de l'article L. 38-II.

IV-2.6.3. Conditions techniques et tarifaires des prestations d'accès fournies
par France Télécom au titre de la sélection du transporteur

France Télécom exerçant une influence significative sur le marché de l'accès au service téléphonique, elle devra fournir les prestations d'interconnexion et d'accès au titre de la sélection et présélection pour permettre aux clients raccordés au réseau téléphonique public de choisir un autre opérateur pour acheminer leurs appels. Ces prestations doivent être accessibles au niveau de tous les points d'interconnexion pertinents du réseau de France Télécom, c'est-à-dire à la date de la présente décision et sans préjudice d'évolutions futures, à l'ensemble de ses commutateurs d'abonnés ouverts à l'interconnexion. De plus, elle devra offrir une offre de sécurisation de la collecte du trafic, c'est-à-dire, à la date de la présente décision et sans préjudice d'évolutions futures, à ses commutateurs d'abonnés via une offre d'accès à ses commutateurs de transit.
Par ailleurs, il existe aujourd'hui deux modalités de sélection du transporteur : une modalité incluant les communications vers les numéros internationaux, les numéros géographiques non locaux et les numéros mobiles (modalité « hors ZLT & 09AB ») et une modalité incluant ces mêmes communications et les numéros géographiques locaux (situés dans la zone locale de tri de l'appelant).
Les numéros non géographiques fixes commençant par 09AB ne sont pour le moment pas inclus dans le champ de la sélection du transporteur, mais l'Autorité a toujours considéré que ces numéros avaient vocation à faire partie de l'offre de sélection du transporteur, comme elle le précisait déjà lors de l'ouverture de ces numéros dans sa décision n° 2005-1085 en date du 15 décembre 2005, fixant l'utilisation des catégories de numéros du plan national de numérotation (18). Il semble en effet justifié que les opérateurs soient en mesure de prendre en charge ces numéros de communications interpersonnelles afin d'offrir une offre globale à leurs clients.
En revanche, du fait du mode d'interconnexion particulier utilisé pour les numéros de services à valeur ajoutée (08AB, 3BPQ, 118XYZ notamment), les communications vers ces services et les services de données continuent à être systématiquement acheminées par France Télécom et à ce stade l'Autorité ne considère pas que ces numéros aient vocation à entrer dans le champ de la sélection du transporteur.
En prévision de l'inclusion des numéros commençant par 09AB dans le champ de la sélection du transporteur, l'Autorité a mené des travaux multilatéraux avec le secteur (19) et a lancé une consultation publique sur l'évolution des prestations techniques de la sélection du transporteur le 11 avril 2008.
Ces différents travaux ont permis à l'ensemble des parties prenantes de s'exprimer sur l'évolution de la sélection du transporteur ainsi que sur le processus à retenir pour inclure ces numéros.
L'Autorité proposait que la sélection du transporteur évolue pour consister à terme en une unique modalité comprenant l'ensemble des communications interpersonnelles (notamment les numéros de type 09AB). Il ne semble pas à l'Autorité qu'il existe de raisons techniques et économiques justifiant l'existence à terme d'une modalité excluant certains numéros de communications interpersonnelles. En effet, le client final bénéficiera du libre jeu de la concurrence entre France Télécom et les différents opérateurs alternatifs proposant des offres de présélection sur l'ensemble de ses communications. Par ailleurs, le client final aura toujours la possibilité de choisir un autre opérateur pour acheminer ses appels au cas par cas s'il le souhaite, grâce à la sélection appel par appel. Tous les opérateurs alternatifs qui ont répondu à la consultation publique se sont montrés favorables à la définition proposée par l'Autorité pour la nouvelle modalité, y compris les opérateurs utilisant encore la modalité excluant les appels locaux. En outre, cette modalité inclura automatiquement les appels vers de nouvelles ressources en numérotation dédiées à des communications interpersonnelles que l'Autorité pourrait être amenée à ouvrir dans le futur.
En particulier, l'Autorité n'estime donc pas nécessaire que soient maintenues à terme la modalité excluant les appels locaux et la modalité excluant les numéros de type 09AB. En ce qui concerne la modalité excluant les appels locaux, comme elle le rappelle dans sa consultation publique, l'Autorité estime en effet que le maintien actuel de cette modalité dans quelques cas tient plus à des raisons historiques qu'à un réel besoin des opérateurs ou des clients finals.
Lors du comité de l'interconnexion et de l'accès du 12 décembre 2007, France Télécom avait annoncé l'ouverture d'une nouvelle modalité incluant les appels à destination des numéros de la tranche 09AB pour septembre 2008. Dans sa réponse à la consultation publique de l'Autorité, France Télécom estime qu'elle peut s'engager à mettre en place cette modalité au 1er février 2009 et fait valoir des contraintes techniques et opérationnelles sur les développements à effectuer dans son réseau pour créer cette modalité. Afin de permettre à France Télécom d'effectuer les développements nécessaires, l'Autorité estime qu'il est raisonnable que la mise en place de cette modalité soit assurée dans les meilleurs délais et au plus tard le 1er février 2009.

(18) « Comme tous les numéros de communications interpersonnelles, les numéros de la tranche 09 ont vocation à être intégrés dans le champ de la sélection du transporteur. » (19) Notamment, deux réunions multilatérales ont eu lieu dans les locaux de l'Autorité, le 24 janvier 2008 et le 27 février 2008.

IV-2.6.4. Processus de transition entre les modalités

Comme exposé précédemment, les différentes réunions multilatérales avec le secteur ainsi que les réponses à la consultation publique d'avril 2008 de l'Autorité ont montré que France Télécom et les opérateurs alternatifs soutiennent la fermeture à terme des modalités de sélection du transporteur actuelles, à savoir la modalité « hors ZLT & 09AB »et la modalité excluant les appels à destination des numéros de la tranche 09AB (appelée par la suite modalité « hors 09AB »). A terme, il existerait une unique modalité de sélection du transporteur définie comme comprenant l'ensemble des communications interpersonnelles.
Cependant, les opérateurs et leurs clients doivent pouvoir bénéficier de suffisamment de temps pour leur permettre de gérer la transition, tant d'un point de vue opérationnel que du point de vue des aspects contractuels et légaux qui s'imposent à eux.

IV-2.6.4.1. Principes de transition vers la nouvelle modalité

La création de la nouvelle modalité incluant les appels à destination de la tranche 09AB permettra aux opérateurs de proposer à leurs nouveaux clients en sélection du transporteur de choisir d'utiliser cette modalité. Dans le cas général, l'activation d'un client sur cette modalité se fera de manière comparable à ce qui est pratiqué à la date de cette décision pour les anciennes modalités, c'est-à-dire ligne par ligne. Un opérateur sera donc en mesure de proposer à chacun de ses clients, au cas par cas, de les présélectionner sur une des trois modalités prévues.
Cependant, lors des discussions avec le secteur, il est apparu nécessaire de prévoir également des demandes groupées qui permettent aux opérateurs d'activer sur la nouvelle modalité tout ou partie de leurs clients « en masse » et de manière simultanée, afin de mutualiser les opérations à réaliser au niveau du réseau de France Télécom, et ainsi de réduire les coûts induits par opérations. Les opérateurs ont la possibilité de conserver une partie de leurs clients sur les anciennes modalités s'ils le décident. De plus, ces demandes groupées pourront inclure des clients anciennement présélectionnés comme les clients nouvellement présélectionnés.
Dans sa consultation publique, l'Autorité a interrogé les acteurs sur le calendrier et le nombre de demandes groupées nécessaires pour réaliser ces opérations. France Télécom a indiqué qu'elle proposait de procéder en deux étapes, le 1er février 2009 et le 1er octobre 2009. Certains opérateurs alternatifs ont demandé à effectuer une demande groupée par trimestre au cours de l'année 2009. L'Autorité estime que les opérateurs doivent pouvoir disposer de délais et d'un nombre raisonnable de demandes groupées afin de gérer cette transition. Les opérateurs alternatifs et France Télécom devront s'entendre de manière concertée afin de déterminer le nombre de demandes groupées et le calendrier à suivre. Les opérateurs devront veiller, lors de la commercialisation de ces offres, à respecter les dispositions légales applicables, notamment celles du code de la consommation. L'Autorité estime a priori raisonnable de prévoir trois vagues de demandes groupées, dont deux en 2009 et une en 2010, la première ayant lieu dans les meilleurs délais et au plus tard le 1er février 2009, afin de permettre un étalement des demandes groupées suffisant pour tous les opérateurs.
Par ailleurs, étant donné que les opérateurs alternatifs auront la possibilité de conserver une partie de leurs clients sur les anciennes modalités, un opérateur qui souhaiterait utiliser les trois modalités aura besoin de disposer de trois préfixes de sélection du transporteur distincts. Or ce nombre de préfixe est pour le moment limité à deux par opérateurs dans le cadre de la décision n° 2005-1085. L'Autorité estime par conséquent qu'il sera nécessaire de faire évoluer ses règles de gestion afin de permettre aux opérateurs qui en feraient la demande de disposer provisoirement d'un troisième préfixe de sélection du transporteur.
Enfin, ces demandes groupées ayant comme objet la mutualisation des opérations sur le réseau de France Télécom, elles n'induisent pas les mêmes coûts qu'une activation de présélection ligne par ligne comme dans le cas général, et ne doivent donc pas faire l'objet de la même tarification. Par conséquent, France Télécom devra proposer une offre tarifaire forfaitaire par demande groupée.

IV-2.6.4.2. Principes de fermeture des anciennes modalités
a) Principes communs

Les modalités devant être fermées à terme sont la modalité ne comprenant pas les appels locaux (modalité « hors ZLT & 09AB ») et la modalité ne comprenant pas les appels à destination des numéros de la tranche 09AB (modalité « hors 09AB »). L'Autorité n'a reçu aucune réponse à sa consultation publique qui rejette ces fermetures. Il est nécessaire de prévoir une période de transition raisonnable pour permettre aux opérateurs de gérer leur transition vers la nouvelle modalité. Par conséquent, pour chacune des modalités qui doivent être fermées à terme, l'Autorité estime, comme elle l'a proposé dans sa consultation publique, qu'il convient de procéder de la manière suivante :
― une date D1 détermine l'arrêt des commandes d'activation de présélection sur la modalité ;
― une date D2 détermine la fermeture totale de la modalité.
La date D1 d'arrêt d'activation sur les anciennes modalités ne saurait intervenir avant l'ouverture de la nouvelle modalité, qui doit intervenir dans les meilleurs délais et au plus tard le 1er février 2009. Par ailleurs, l'Autorité constate qu'il ressort des réponses des opérateurs à sa consultation publique que les opérateurs alternatifs n'émettent pas d'objection à ce que cet arrêt de commandes intervienne au moment de l'ouverture de la nouvelle modalité, à condition qu'ils bénéficient d'un préavis suffisant. Par conséquent, l'Autorité estime que l'arrêt des commandes sur les modalités « hors ZLT & 09AB » et « hors 09AB » pourrait intervenir peu de temps après la date de la première vague de demandes groupées. L'Autorité juge que le 1er avril 2009 est une date raisonnable pour l'arrêt des activations.
Le choix de la date D2 doit être fait afin de prendre en compte les délais nécessaires pour que tous les clients des opérateurs de sélection du transporteur n'utilisent plus une ancienne modalité. Par conséquent, il apparaît que les dates D2 d'arrêt total de la modalité « hors ZLT & 09AB » et de la modalité « hors 09AB » peuvent différer, notamment à la lumière des critères suivants :
― le nombre d'opérateurs qui utilisent encore la modalité ;
― le nombre de lignes activées sur ces modalités ;
― les difficultés opérationnelles prévues par les opérateurs pour gérer leurs clients.
France Télécom doit informer les opérateurs alternatifs ayant recours à son offre de sélection du transporteur des modifications prévues sur ces modalités (arrêt des commandes, fermeture définitive et création d'une nouvelle modalité) ainsi que du calendrier retenu par l'Autorité, afin que ces opérateurs soient en mesure de gérer leurs propres offres basées sur la sélection du transporteur. Afin de donner un préavis suffisant aux opérateurs alternatifs, France Télécom doit les informer dans les trente jours de la notification de la présente décision.

b) Modalité « hors ZLT & 09AB »

D'après les échanges que l'Autorité a eus avec France Télécom, il n'existe plus à l'heure actuelle qu'un seul opérateur qui utilise la modalité « hors ZLT & 09AB » et pour un nombre très réduit de lignes. Dans sa réponse à la consultation publique de l'Autorité, cet opérateur a estimé qu'il serait en mesure d'effectuer la migration de ses clients sur la nouvelle modalité à condition que le calendrier soit raisonnable, à savoir qu'il soit prévu un échelonnement des demandes groupées par trimestre sur l'année 2009. Sur la base des échanges que l'Autorité a pu avoir avec cet opérateur, une fermeture de la modalité « hors ZLT & 09AB » début 2010 apparaît compatible avec la gestion par l'opérateur de ses clients utilisant cette modalité.
L'Autorité estime donc qu'un arrêt total de la modalité « hors ZLT & 09AB » pourrait intervenir après la dernière vague de demandes groupées effectuée sur la nouvelle modalité et ne saurait avoir lieu avant 2010. Comme exposé précédemment, l'Autorité favorise une approche consistant à effectuer une dernière vague de demandes groupées au cours de l'année 2010. Afin de donner de la lisibilité aux opérateurs ainsi qu'à leurs clients utilisant encore cette modalité, l'Autorité estime que la date de fermeture de cette modalité doit être précisée dans cette décision, alors même que la dernière date de demandes groupées doit être discutée entre les acteurs. L'Autorité estime qu'une fermeture de la modalité « hors ZLT & 09AB » au 1er juin 2010 laisse un délai raisonnable aux opérateurs pour effectuer leurs demandes groupées sur la nouvelle modalité et permet à l'opérateur qui utilise encore la modalité « hors ZLT & 09AB » de gérer son parc clients sans contrevenir aux dispositions légales applicables.

c) Modalité « hors 09AB »

La quasi-totalité des clients de la sélection du transporteur utilise actuellement la modalité « hors 09AB ». Par conséquent, contrairement à la modalité « hors ZLT & 09AB », la totalité des opérateurs est concernée par la fermeture de la modalité « hors 09AB ». Par ailleurs, cette modalité est utilisée par tous les types de clients, résidentiels, acheteurs publics et entreprises. D'après les échanges que l'Autorité a eus avec les opérateurs, il ressort que ces derniers ont estimé être en mesure de gérer la suppression de la modalité « hors 09AB » dans des délais relativement brefs, voire simultanément à l'ouverture de la nouvelle modalité.
Cependant, du fait de l'importance du nombre d'opérateurs et de clients utilisant la modalité « hors 09AB », l'Autorité juge nécessaire de prévoir une période de transition plus longue que pour la modalité « hors ZLT & 09AB », notamment afin de ne pas placer les opérateurs dans la situation de contrevenir aux clauses de leurs contrats ou aux dispositions légales.
L'Autorité estime qu'un délai raisonnable de fermeture de la modalité « hors 09AB » devrait notamment prendre en considération la durée de vie d'un marché public pour un lot de communications téléphoniques. A la suite de discussions avec des acheteurs publics, l'Autorité a pu constater que ce type de contrat n'excédait pas quatre ans. Par ailleurs, un délai de quatre ans semble suffisant pour que les opérateurs gèrent leurs relations contractuelles avec leurs clients résidentiels et leurs clients entreprises suivant les règles applicables. Etant donné qu'aucune activation sur la modalité « hors 09AB » ne pourra intervenir à compter du 1er avril 2009, comme exposé précédemment, il semble donc raisonnable de prévoir que les opérateurs auront eu la possibilité de gérer l'ensemble de leurs clients, notamment les acheteurs publics, au 1er avril 2013. Le 1er avril 2013 peut donc être retenu comme la date de fermeture de la modalité « hors 09AB ».

d) Fermeture anticipée en cas de non-utilisation des modalités

L'Autorité s'est attachée à définir un délai raisonnable pour la fermeture totale des modalités « hors ZLT & 09AB » et « hors 09AB ». Cependant, l'Autorité estime qu'au cas où ces modalités ne seraient plus utilisées par aucun opérateur avant leur date de fermeture programmée, alors il serait légitime que France Télécom puisse fermer ces modalités de manière anticipée et libérer les ressources associées dans son réseau, après information préalable de son intention à l'ensemble des opérateurs utilisateurs de l'offre de sélection du transporteur, recueil de leurs commentaires et après accord de l'Autorité.

IV-2.6.5. Règles applicables à la sélection du transporteur
IV-2.6.5.1. Nombre d'opérateurs pouvant être présélectionnés sur une ligne donnée

Dans sa décision n° 99-1077, l'Autorité avait estimé qu'il convenait de limiter à un le nombre d'opérateurs pouvant être présélectionnés sur une ligne donnée, notamment dans un souci de simplicité et de clarté pour les utilisateurs de la présélection. L'Autorité soulignait que les utilisateurs conservaient la possibilité de recourir à d'autres opérateurs dans le cadre de la sélection appel par appel.
L'Autorité estime que ces conditions sont toujours justifiées et note qu'elles n'ont pas été remises en cause lors de sa consultation publique du 11 avril 2008. L'Autorité juge donc opportun de continuer à limiter à un le nombre d'opérateurs présélectionnés sur une ligne donnée et de permettre à un utilisateur client d'une offre principalement téléphonique de France Télécom de recourir à d'autres opérateurs dans le cadre de la sélection appel par appel.

IV-2.6.5.2. Procédures opérationnelles de la présélection

L'activation de la présélection pour les utilisateurs qui le demandent nécessite la mise en œuvre de procédures d'échanges d'informations et de commandes entre opérateurs et le respect par France Télécom de certaines obligations.

IV-2.6.5.3. Principe du guichet unique

La gestion opérationnelle de la présélection et les échanges d'information entre les opérateurs se trouvent simplifiés si un point de contact unique est identifié au sein de chaque opérateur. France Télécom dispose d'une entité centralisée chargée de la gestion de la présélection qui est le point de contact unique qui est contacté par les entités en charge de la présélection chez les opérateurs. Il est distinct des services commerciaux de France Télécom en relation avec les clients finals, afin de garantir la confidentialité nécessaire au traitement des demandes de présélection.
D'une manière générale, France Télécom doit garantir un traitement des demandes de présélection respectant les dispositions prévues dans le décret n° 1997-188 du 3 mars 1997 relatif à l'interconnexion, en particulier le deuxième alinéa de l'article D. 99-6 : « Les opérateurs disposant d'informations dans le cadre d'une négociation ou de la mise en œuvre d'un accord d'interconnexion ne peuvent les utiliser qu'aux seules fins explicitement prévues lors de leur communication. En particulier, ces informations ne sont pas communiquées à d'autres services, filiales ou partenaires pour lesquels elles pourraient constituer un avantage concurrentiel. »

IV-2.6.5.4. Délais d'activation d'une présélection

Il s'agit du délai entre la réception d'une demande par France Télécom et l'activation de la présélection. L'Autorité estime que ce délai d'activation ne peut excéder 72 heures.

IV-2.6.5.5. Courrier envoyé a posteriori par France Télécom

Dans l'hypothèse où France Télécom déciderait d'envoyer un courrier à ses abonnés ayant demandé la présélection de leur ligne, les principes suivants devraient être respectés :
― le courrier envoyé se limite à informer l'abonné que son service a changé (i.e. que ses communications seront désormais acheminées par un opérateur tiers), et ne devrait pas pouvoir être perçu comme une tentative de récupérer le client, ou de dénigrer les services de l'opérateur présélectionné. En particulier, il ne doit contenir aucune information de nature commerciale (information sur des services offerts par France Télécom, par exemple) ;
― les coûts d'envoi ne sont pas répercutés, directement ou indirectement, sur les opérateurs ;
― conformément aux dispositions de l'article D. 99-6 du code des postes et des communications électroniques, l'envoi du courrier ne doit pas avoir pour conséquence d'informer, directement ou indirectement, les services commerciaux de détail de France Télécom des demandes de présélection des clients ;
― le courrier n'est envoyé qu'après la mise en œuvre effective de la présélection. France Télécom veille en particulier à ce que l'opérateur présélectionné soit informé avant le client de l'activation de la présélection ;
― le courrier ne doit pas contenir le nom de l'opérateur présélectionné car le client final n'est pas nécessairement en contact direct avec cet opérateur, et peut notamment avoir contractualisé avec une société de commercialisation de services. A terme, le courrier pourrait contenir le nom de l'opérateur commercial.

IV-2.6.5.6. Conditions non discriminatoires

Les demandes de présélection ou de modification de présélection doivent être traitées par France Télécom dans des conditions non discriminatoires, notamment en termes de délais et de procédures, conformément aux dispositions du code des postes et télécommunications, en particulier du deuxième paragraphe de l'article D. 99-11.
Afin de respecter ce principe de non-discrimination, il est nécessaire que France Télécom demande et obtienne une preuve de toute demande qui lui est directement adressée par le client afin de supprimer une présélection et bénéficier des services de communication de France Télécom.
En outre, des engagements similaires à ceux pris par les opérateurs présélectionnés doivent s'appliquer à France Télécom :
― conserver la preuve pendant toute la période où la demande du client reste valide, et au moins un an au-delà ;
― transmettre la preuve de la demande du client dans les meilleurs délais, et dans un délai maximal de trois jours, en cas de litige ;
― envoyer systématiquement les preuves des demandes d'annulation de présélection à un opérateur présélectionné qui aurait constaté des irrégularités et obtenu l'accord de l'Autorité.
Par ailleurs, France Télécom doit traiter toutes les demandes relatives à la présélection (activation, modification ou suppression), quelle que soit leur origine, dans des délais équivalents.

IV-2.6.5.7. Modification de ligne

Pour toute modification de ligne n'affectant pas le numéro de ligne, la présélection est maintenue par France Télécom. Lorsque le numéro de ligne est modifié, France Télécom informe sans délai l'opérateur concerné du nouveau numéro de ligne. L'opérateur concerné doit reformuler la demande d'activation de présélection auprès de France Télécom, sans qu'un nouveau mandat soit nécessaire.

IV-2.7. Vente en gros de l'accès au service téléphonique
IV-2.7.1. Contexte

Dans sa décision d'analyse des marchés n° 2005-0571, en application de l'article L. 38 (3°) du CPCE, 1'Autorité a décidé d'imposer à France Télécom « de faire droit aux demandes raisonnables d'accès permettant aux opérateurs alternatifs de proposer des offres compétitives et globales de service téléphonique, englobant une offre d'accès analogique ou numérique de base (lignes isolées ou groupements de lignes) au service téléphonique, et une offre de communications à destination de l'ensemble des numéros du plan national de numérotation ». Cette obligation faisait suite notamment à un engagement pris par France Télécom de proposer une offre de vente en gros de l'accès au service téléphonique.
En 2006, dans sa décision n° 2006-0162, l'Autorité a défini les modalités techniques et tarifaires de l'offre VGAST, qui a été créée la même année.

IV-2.7.2. Nécessité de l'existence d'une offre de vente en gros
de l'accès au service téléphonique

En 2005, l'Autorité avait estimé que l'existence d'une offre de revente de l'abonnement était nécessaire pour deux raisons principales : l'insuffisance des offres de gros de dégroupage et de bitstream régional, d'une part, et la nécessité d'un remède complémentaire à la sélection du transporteur, d'autre part.
Concernant les offres de gros haut débit, il apparaît aujourd'hui que de nombreux opérateurs alternatifs tentent de concurrencer les services de l'opérateur historique en proposant principalement des offres composées de plusieurs services, par exemple les offres « triple play ». Toutefois, l'Autorité a démontré dans la partie relative à la délimitation des marchés que de telles offres n'étaient pas substituables à une offre principalement dédiée à la téléphonie, tel l'abonnement principal de France Télécom. Ainsi, sur le segment résidentiel et le bas de segment professionnel, les opérateurs ne proposant à ce jour pas d'offres principalement dédiées à la téléphonie via l'achat d'offres de gros haut débit, seule l'offre VGAST permet aux opérateurs alternatifs de concurrencer les offres d'abonnement de France Télécom auprès de la clientèle ne désirant pas souscrire d'offres de type « triple play ».
Ensuite, si la sélection du transporteur permet aux opérateurs de concurrencer les offres de communications de France Télécom, le fait pour France Télécom de vendre par ailleurs l'accès constitue un avantage concurrentiel indéniable. En tant qu'opérateur d'accès, France Télécom bénéficie en effet d'un accès privilégié à l'information sur les clients potentiels, ce qui lui facilite la conservation ou la reconquête de clients. De plus, les clients en sélection du transporteur reçoivent forcément au moins deux factures, l'une de France Télécom, les autres des opérateurs sélectionnés, ce qui peut constituer un frein pour certains clients. Enfin, les opérateurs en sélection du transporteur ne sont pas en mesure de proposer des offres couplant accès et communications. Or ce type d'offre semble correspondre à une véritable tendance du marché puisque l'ensemble des opérateurs ayant mis en œuvre la VGAST, ainsi que France Télécom, proposent désormais de tels couplages.
L'offre VGAST a connu une croissance assez importante en 2007, et le parc d'abonnés achetant de la VGAST était supérieur à 700 000 à la fin de l'année.
En conséquence, l'Autorité estime qu'il convient de continuer d'imposer à France Télécom de faire droit aux demandes raisonnables d'accès permettant aux opérateurs alternatifs de proposer des offres compétitives et globales de service téléphonique, englobant une offre d'accès analogique ou numérique de base (lignes isolées ou groupements de lignes) au service téléphonique et une offre de communications à destination de l'ensemble des numéros du plan national de numérotation.
Cette obligation est un remède d'interconnexion et d'accès imposé au titre de l'influence significative exercée par France Télécom sur les marchés de détail de l'accès au service téléphonique et sur le marché de gros du départ d'appel.
La décision n° 2006-0162 prévoit les conditions techniques et tarifaires dans lesquelles France Télécom propose son offre de VGAST. Ces modalités pourront être modifiées par l'Autorité, conformément aux articles D. 303 et D. 310 du CPCE.
Certains opérateurs insistent sur la nécessité de revoir les tarifs de l'offre VGAST à la baisse. Ils souhaitent également, afin d'assurer la réplicabilité de l'ensemble des offres de détail de France Télécom, que plusieurs améliorations soient apportées aux offres de gros disponibles (dégroupage, VGAST, etc.), tant au niveau de la qualité de service que des processus. Neuf Cegetel donne ainsi une liste de plusieurs points d'amélioration précis à apporter à l'offre VGAST.
L'Autorité signale qu'une revue des modalités de la VGAST est en cours afin de poursuivre l'amélioration de la fonctionnalité de l'offre et qu'elle examinera l'ensemble des demandes présentées à cette occasion. La tarification de la VGAST est orientée vers les coûts et est par conséquent analysée au vu des résultats des exercices de comptabilisation des coûts de l'opérateur historique. Néanmoins, l'espace économique existant au niveau de l'offre VGAST analogique étant relativement faible, l'Autorité s'efforcera d'améliorer fonctionnellement l'offre afin de minimiser les coûts additionnels supportés par les opérateurs pour sa mise en œuvre. Par ailleurs, il est de la responsabilité de France Télécom, du fait de son influence significative sur les marchés de la téléphonie fixe, de veiller à ce qu'il existe un espace économique entre ses offres de détail et ses offres de gros.

IV-2.8. Publication d'une offre technique et tarifaire détaillée d'interconnexion
et d'accès dite « Téléphonie fixe »

En application de l'article L. 38-I du CPCE, l'Autorité estime justifié de maintenir l'obligation de publication d'une offre de référence par France Télécom, en application de ses obligations de non-discrimination et de transparence.
Une offre technique et tarifaire ou offre de référence poursuit quatre objectifs :
― concourir à la mise en place de processus transparents, pour limiter la capacité de l'opérateur exerçant une influence significative à déstabiliser ses concurrents ou favoriser ses filiales ;
― donner de la visibilité aux acteurs sur les termes et les conditions dans lesquelles ils s'interconnectent avec l'opérateur sur qui pèse l'obligation ;
― pallier le déficit de pouvoir de négociation des opérateurs acheteurs ;
― permettre l'élaboration d'une offre cohérente de prestations aussi découplées que possible les unes des autres pour permettre à chaque opérateur de n'acheter que les prestations dont il a besoin.
L'offre de référence contribue ainsi grandement à la stabilité du marché, et permet aux opérateurs alternatifs de développer un plan d'affaires et de programmer leurs investissements avec une visibilité suffisante sur des paramètres qui conditionnent fortement leur structure de coûts.
L'Autorité estime donc que cette obligation est nécessaire et proportionnée aux objectifs mentionnés à l'article L. 32-1, notamment aux 2°, 3° et 4°, pour certaines prestations d'interconnexion particulièrement décisives pour les opérateurs, et détaillées en annexe B de la présente décision. Cette obligation doit également porter sur les prestations d'accès associées permettant l'utilisation effective de ces offres par les opérateurs pour proposer des services sur les marchés de détail : les prestations d'accès aux sites d'interconnexion et la prestation de reversement.
Dans un souci de lisibilité, France Télécom constituera une unique offre de référence et a minima pour les prestations d'interconnexion et d'accès aujourd'hui disponibles. Cette offre se décomposera en une partie décrivant notamment les conditions techniques de fourniture de l'offre et une partie tarifaire pour chacune desdites prestations.
Par ailleurs, au regard des mêmes objectifs, et pour les mêmes raisons, l'obligation de publier une offre technique et tarifaire d'accès apparaît nécessaire et proportionnée pour les prestations d'accès relatives à la sélection et la présélection du transporteur ainsi que celles relatives à l'offre de vente en gros de l'accès au service téléphonique.
En application des II et III de l'article D. 307 du code des postes et des communications électroniques, l'Autorité estime justifié que cette offre comprenne, outre les prestations d'accès devant y figurer, les conditions contractuelles types relatives aux tarifs, aux conditions de souscription, aux modalités d'accès à l'offre, les engagements de qualité de services, ainsi que les informations répondant à l'obligation de transparence et de non-discrimination. En particulier, tous les tarifs devront être effectivement inscrits dans l'offre de référence et non uniquement dans les conventions conclues entre les parties.
En outre, il importe que la tarification de certaines prestations « sur devis » ne soit envisagée qu'à titre exceptionnel. Le cas échéant, il reviendra à France Télécom de justifier des contraintes l'empêchant d'établir un tarif fixé à l'avance dans l'offre de référence.
L'Autorité précise en annexe de la présente décision la liste minimale des prestations d'interconnexion et d'accès devant figurer à l'offre, y compris les prestations qui leur sont associées, les informations à publier, le niveau de détail requis et le mode de publication.
Concernant l'offre de VGAST, France Télécom détaillera notamment, dans son offre « Téléphonie fixe », l'ensemble des prestations décrites dans la décision n° 2006-0162, leurs conditions techniques et tarifaires et les processus de commande sous-jacents, dans une partie identifiée à cet effet.
Pour en assurer une diffusion satisfaisante, l'Autorité souhaite que l'offre de référence soit toujours publiée sur un site Internet librement accessible. Certaines informations, concernant notamment la localisation et les caractéristiques d'équipements de réseau et pouvant être qualifiées de sensibles, pourront être mises en annexe, afin d'en limiter la diffusion aux seuls opérateurs.
Enfin, pour des raisons évidentes de protection des investissements réalisés par les opérateurs alternatifs, les évolutions que France Télécom pourrait apporter à son offre de référence « Téléphonie fixe » devront respecter un délai de préavis suffisant selon la nature de l'évolution proposée et qui ne saurait être inférieur à un mois, excepté dans les cas d'évolutions des tarifs à la baisse, pour lesquelles une application immédiate peut être effectuée, le cas échéant. En cas d'évolution tarifaire à la hausse, ce préavis sera de trois mois minimum, et il sera porté à douze mois en cas d'évolution de nature à contraindre les opérateurs à modifier leurs installations, sauf accord mutuel ou si l'Autorité en décide autrement. Cette condition apparaît essentielle pour garantir aux opérateurs une visibilité suffisante sur leurs investissements. Elle est donc adaptée au respect des objectifs d'égalité des conditions de la concurrence fixés à l'article L. 32-1 du code, sans pour autant représenter une charge excessive pour France Télécom.
L'obligation de publication avec préavis pour l'entrée en vigueur des modifications apportées s'entend sauf décision contraire de l'Autorité ou de toute autre autorité ou juridiction habilitée à imposer une telle modification. Certains cas particuliers peuvent en effet nécessiter une mise en œuvre immédiate des évolutions de l'offre. Ce cas peut notamment se rencontrer à la suite d'une décision de règlement de différend ou d'une décision de modification de l'offre de référence. De même, aucun préavis ne sera nécessaire en cas de modification consistant simplement à répercuter une modification, à la hausse ou à la baisse, décidée par un autre opérateur et qui impacte directement une des conditions inscrites à l'offre.

IV-2.9. Observations de la Commission européenne

La Commission européenne ne formule aucune observation sur les obligations non tarifaires imposées à France Télécom.

IV-3. Obligations non tarifaires imposées aux opérateurs puissants sur les marchés
de gros de la terminaison d'appel autres que France Télécom

L'influence significative qu'exerce chaque opérateur alternatif sur le marché de gros de la terminaison d'appel sur son réseau rend nécessaire l'imposition de remèdes sur ces marchés.
L'Autorité justifie dans cette partie la nécessité et la proportionnalité des obligations non tarifaires qu'elle impose à chaque opérateur alternatif : l'obligation de faire droit aux demandes raisonnables d'accès (IV-3.1), l'obligation de non-discrimination (IV-3.2) et l'obligation de transparence (IV-3.3).
Ces obligations sont imposées à chaque opérateur alternatif pour la durée de validité de cette analyse, sans préjudice de l'éventuel réexamen que l'Autorité pourrait être amenée à anticiper conformément à l'article D. 303 du CPCE.

IV-3.1. Obligation de faire droit aux demandes raisonnables d'accès

L'article L. 38-I (3°) du code des postes et des communications électroniques prévoit que l'Autorité peut imposer des obligations de faire droit aux demandes raisonnables d'accès aux opérateurs exerçant une influence significative sur un marché pertinent.
L'Autorité estime nécessaire d'imposer à chaque opérateur fixe déclaré puissant sur au moins un marché pertinent de telles obligations, et en précise la teneur ci-dessous.
D'une manière générale, tout refus de l'opérateur exerçant une influence significative de fournir ces prestations devra être dûment motivé, et les conditions techniques et tarifaires de ces prestations devront être suffisamment détaillées pour faire apparaître les divers éléments propres à répondre à la demande. En particulier, la fourniture d'une prestation d'accès ne doit pas être subordonnée à la fourniture de services, de moyens ou de toute autre ressource, qui ne seraient pas nécessaires à la fourniture de cette prestation.
En premier lieu, compte tenu des investissements consentis par les opérateurs pour se déployer et s'interconnecter sur l'un ou l'autre des réseaux des OBL, et en vertu de l'article D. 310 (3°) du CPCE, il est proportionné d'imposer à chacun des OBL de ne pas retirer un accès déjà accordé à un opérateur, sauf accord préalable exprès de l'Autorité ou du cocontractant concerné, conformément à l'objectif de développement efficace dans les infrastructures et de compétitivité du secteur mentionné au 3° de l'article L. 32-1 du code précité.
De plus, chaque opérateur alternatif réputé exercer une influence significative au titre de la présente analyse est tenu de faire droit à toute demande raisonnable d'accès aux prestations de terminaison d'appel vers l'ensemble de ses numéros. Ces prestations étant déjà fournies aujourd'hui, cette obligation est proportionnée.
Comme cela est prévu par l'article L. 38-I du CPCE, cette obligation s'applique également aux demandes raisonnables de fourniture de prestations connexes permettant le raccordement physique et logique au réseau de l'OBL et nécessaires à l'achat des prestations de terminaison d'appel.
D'une manière générale, les opérateurs déclarés puissants devront faire droit aux demandes raisonnables des opérateurs, lorsque le caractère proportionné de l'obligation qui en découlera aura été vérifié, en conformité avec les dispositions de l'article L. 38-V du code.
Enfin, les opérateurs exerçant une influence significative sur le marché de la terminaison d'appel sur leur propre réseau doivent s'engager sur un niveau satisfaisant de qualité de service des prestations de raccordement physique et logique à leur réseau (20), dans la mesure où la livraison ou la réparation des accès en fonction d'un délai précis constitue une modalité de mise en œuvre concrète de l'obligation de faire droit aux demandes d'accès raisonnables.
Ils devront également, conformément à l'article D. 310 (2°), négocier de bonne foi avec les opérateurs qui demandent des prestations d'accès à leur réseau, afin d'une part de minimiser les cas de litige et d'autre part de ne pas profiter de l'influence significative qu'ils exercent sur leur marché pertinent pour durcir les négociations avec les opérateurs.
Ces obligations sont conformes aux critères fixés par l'article L. 38-V en particulier les a, b et d en ce qu'elles sont aujourd'hui fournies par les OBL et permettent le développement de la concurrence.

(20) On entend par prestations de raccordement physique et logique les prestations liées à la construction des interconnexions, ainsi que celles liées à la mise en service des acheminements de trafic, de leur rétablissement en cas de panne, etc.

IV-3.2. Obligation de non-discrimination

L'article L. 38-I (2°) du CPCE prévoit la possibilité d'imposer une obligation de non-discrimination.
Conformément à l'article D. 309 du code des postes et des communications électroniques, les obligations de non-discrimination font notamment en sorte que les opérateurs appliquent des conditions équivalentes dans des circonstances équivalentes aux autres opérateurs fournissant des services équivalents lorsqu'ils fournissent l'accès et l'interconnexion.
Une différenciation des prestations fournies à différents acheteurs n'est pas nécessairement répréhensible en soi. Par exemple, certaines différenciations tarifaires peuvent être justifiées, dans certains cas motivés, par le fait que les acheteurs ont une consommation différente des mêmes prestations.
Comme le précise le considérant 17 de la directive « Accès », l'application d'une obligation de non-discrimination vise à garantir que les entreprises exerçant une influence significative sur un marché de gros ne faussent pas la concurrence sur un marché de détail, notamment lorsqu'il s'agit d'entreprises intégrées verticalement qui fournissent des services à des entreprises avec lesquelles elles sont en concurrence sur des marchés en aval.
Comme l'a montré l'analyse de la puissance au chapitre précédent, il existe une incitation forte pour les OBL à augmenter leurs charges de terminaison d'appel, incitation d'autant plus forte qu'elles représentent une composante significative des charges supportées par leurs concurrents dans les tarifs qu'ils offrent sur les marchés de détail. L'obligation de non-discrimination vise principalement dans ce cas à éviter que les OBL n'augmentent leurs charges vis-à-vis d'opérateurs acheteurs dont le pouvoir de négociation serait moindre, ou qu'ils n'avantagent leurs partenaires ou leurs filiales en concurrence avec les autres acheteurs de terminaison d'appel. De telles pratiques auraient pour effet de fausser le jeu de la concurrence entre les opérateurs sur les marchés de détail.
Cette obligation s'applique à l'ensemble des prestations des marchés pertinents, y compris aux prestations associées à l'accès que l'opérateur devra fournir. Elle s'applique de plus à la qualité de service offerte pour les prestations d'interconnexion vendues par chaque OBL et pour les prestations équivalentes fournies pour son propre compte ou pour le compte d'une société filiale ou partenaire.
L'Autorité estime ainsi que l'imposition de cette obligation est justifiée et proportionnée, notamment au regard de l'objectif fixé à l'article L. 32-1-II du CPCE de veiller « à l'exercice au bénéfice des utilisateurs d'une concurrence effective et loyale ».

IV-3.3. Obligation de transparence

L'article L. 38-I (1°) du CPCE prévoit que l'Autorité peut imposer à un opérateur exerçant une influence significative des obligations visant à assurer la transparence de ses offres d'accès et d'interconnexion, y compris de rendre publiques certaines informations.
L'imposition de telles obligations pour les prestations de terminaison d'appel des OBL alternatifs permet ainsi d'assurer le respect de l'obligation de non-discrimination ou, en tout état de cause, de dissuader les OBL de mettre en œuvre des pratiques discriminatoires.
Ces obligations doivent en outre permettre de faciliter les négociations en vue de la mise en œuvre de l'interconnexion directe entre opérateurs alternatifs lorsqu'une telle interconnexion s'avère pertinente économiquement. Elles peuvent également permettre d'apporter une transparence accrue sur les conditions financières des offres de transit vers les OBL alternatifs.
Compte tenu de ces objectifs, l'Autorité estime nécessaire d'imposer à tout OBL alternatif les obligations suivantes sur l'ensemble des prestations du marché pertinent de la terminaison d'appel sur lequel il exerce une influence significative, y compris sur les prestations associées à l'accès qu'il devra fournir en vertu de cette influence significative :
― informer l'Autorité de la signature ou de la modification de tout accord d'interconnexion ou d'accès signé avec lui concernant la fourniture de prestations de terminaison d'appel ou de prestations associées, et en particulier des prestations connexes d'accès à ses sites d'interconnexion, dans un délai de sept jours à compter de sa signature ;
― communiquer aux opérateurs ayant signé avec lui une convention d'interconnexion ou d'accès des informations pertinentes sur les caractéristiques de son réseau relatives à la prestation de terminaison d'appel qu'il offre, y compris les prestations associées ;
― informer ces opérateurs, dans un délai de préavis raisonnable, de toute modification des conditions techniques ou tarifaires de ces prestations de terminaison d'appel, y compris les prestations associées, et de toute évolution de nature à contraindre ces derniers à modifier ou adapter leurs installations. Les modalités de communication de ces informations et le niveau de détail requis pourront être précisés par une décision ultérieure de l'Autorité.
Ces obligations sont proportionnées au regard des objectifs fixés à l'article L. 32-1-II du code des postes et des communications électroniques, en particulier ceux visés aux 2°, 4° et 9°.
Par ailleurs, compte tenu de l'état actuel du marché et des contraintes qu'elle ferait peser sur les opérateurs alternatifs, l'Autorité estime qu'il serait disproportionné d'imposer aux OBL alternatifs la publication d'une offre technique et tarifaire de référence.

IV-3.4. Observations de la Commission européenne

La Commission européenne ne formule aucune observation sur les obligations non tarifaires imposées aux opérateurs de réseaux fixes autres que France Télécom.

IV-4. Obligations tarifaires imposées sur les marchés de gros de la terminaison d'appel fixe

L'article L. 38-I (4°) du CPCE prévoit que l'Autorité peut imposer « de ne pas pratiquer de tarifs excessifs ou d'éviction sur le marché en cause et pratiquer des tarifs reflétant les coûts correspondants. »
L'examen de la puissance de marché de France Télécom et des opérateurs alternatifs sur les marchés de gros pertinents a montré que :
― France Télécom dispose d'une position durable de puissance sur les marchés du départ d'appel et de terminaison d'appel fixes sur son réseau ;
― les opérateurs alternatifs disposent d'une position durable de puissance sur les marchés de la terminaison d'appel fixe sur leurs réseaux.
Comme il a été démontré dans la partie sur la pertinence des marchés analysés par la présente décision, les prestations de terminaison d'appel ont une importance commerciale et économique particulière pour ces opérateurs.
En outre, les conditions économiques de la vente de ces prestations influent directement sur les conditions d'exercice de la concurrence entre les opérateurs sur le marché de détail.
Il en résulte qu'il n'existe intrinsèquement pas d'incitation économique pour les opérateurs de boucle locale à fixer leurs charges de terminaison d'appel à des niveaux « concurrentiels », c'est-à-dire à des niveaux qui pourraient être constatés si ces prestations étaient soumises à une concurrence effective.
Il est donc nécessaire d'imposer une régulation tarifaire à tous les opérateurs fixes sur leurs prestations de terminaison d'appel, ainsi que, et de manière cohérente, sur les prestations qui leur sont associées. Si tel n'était pas le cas, les tarifs des prestations associées pourraient être fixés à des niveaux tels qu'ils rendraient sans objet le contrôle tarifaire imposé sur les prestations « de base ».

IV-4.1. Contexte et principes de la régulation de la terminaison d'appel
IV-4.1.1. Spécificités de la prestation de terminaison d'appel

Le service de terminaison d'appel est une prestation de gros très particulière, dont il convient d'analyser les spécificités.
En effet, à ce jour, cette prestation est facturée entièrement à l'opérateur appelant, et donc répercutée au client final appelant, alors même qu'elle bénéficie à la fois au client appelant et au client appelé.
Un appel bénéficie à la fois au client qui initie l'appel, et à celui qui le reçoit. Il est difficile de mesurer le partage de l'utilité entre ces deux acteurs, toutefois, l'influence de l'appelé sur la longueur de l'appel doit être reconnue, celui-ci ayant à tout moment la possibilité de raccrocher, voire même de ne pas décrocher, notamment en faisant usage de la reconnaissance du numéro.
Dans ce contexte, rappelons que la prestation de terminaison d'appel relève d'un marché biface (souvent appelé « two-sided market » dans la littérature économique), l'opérateur de l'appelé ayant la possibilité de recouvrer ses coûts soit par la facturation de l'opérateur de l'appelant, soit par la facturation de son client appelé, ce qui peut être proposé sous une forme forfaitaire, dans l'abonnement par exemple.
De plus, la terminaison d'appel est une prestation d'accès réciproque, aussi appelée « two-way access ». En effet, en première analyse, les opérateurs qui facturent la terminaison d'appel sont également les opérateurs qui achètent la terminaison d'appel. In fine, la facturation entre opérateur de terminaison d'appel est une somme de flux financiers inter-opérateurs équilibrés au niveau du secteur. L'ensemble des coûts de réseaux sont donc in fine recouvrés sur les marchés de détail. Du fait de ces spécificités, une suppression des terminaisons d'appels, i.e. non-paiement des terminaisons dans un régime dit de « bill and keep », pourrait être envisagée au sens ou elle ne remet pas en cause le principe de recouvrement des coûts. Dans une analyse prospective, il s'agira donc d'analyser quel est le niveau optimum du tarif de terminaison d'appel au regard de son efficacité économique.

IV-4.1.2. Position commune du GRE et avis de la Commission
IV-4.1.2.1. La position commune du GRE

Le Groupement des régulateurs européens (GRE) a adopté, le 28 février 2008, une position commune sur les terminaisons d'appel fixe et mobile. Dans ce document, le GRE exprime une volonté commune d'orienter les terminaisons d'appel fixes vers un niveau symétrique, dans chaque pays, entre l'opérateur historique et les opérateurs alternatifs. En particulier, le GRE relève que les raisons qui ont été invoquées par le passé pour justifier des niveaux de terminaison d'appel dissymétriques ne sont plus valables aujourd'hui.
En particulier, le GRE estime que l'utilisation de TA asymétriques comme soutien à l'entrée sur le marché ne se justifie plus, dix ans après l'ouverture à la concurrence et avec le développement des technologies IP et de nouveaux services. Le GRE relève également que les économies d'échelle dont bénéficierait l'opérateur historique ont abouti, par le passé, à fixer des niveaux de TA asymétriques. Le GRE estime aujourd'hui qu'il semble très difficile de prétendre qu'il demeure de telles économies d'échelle dans les réseaux fixes et qu'un opérateur d'implantation locale, utilisant une nouvelle technologie et une architecture optimisée, sera probablement capable d'atteindre très rapidement l'efficacité. Les opérateurs de réseaux fixes sont maîtres de leur déploiement et peuvent choisir la technologie qu'ils estiment la plus efficace pour leurs réseaux.
Les régulateurs européens indiquent également que, dans les réseaux fixes, il n'existe pas de facteurs exogènes pouvant entrainer des coûts plus élevés pour les opérateurs alternatifs.
Par ailleurs, dans son document, le GRE indique qu'une approche qui fixerait la TA aux coûts de chaque opérateur serait contre-efficace : en effet, dans cette hypothèse, un opérateur plus efficace aurait une TA plus basse, ce qui ne bénéficierait qu'à ses concurrents et n'emporterait aucun avantage pour lui-même. A l'inverse, une TA symétrique récompense les opérateurs les plus efficaces.
Enfin, le GRE estime que, pour les pays qui n'ont pas encore mis en œuvre la symétrie, il est nécessaire qu'une période de transition soit aménagée pour atteindre cette symétrie et que, en tout état de cause, cette transition doit être fixée dans le cadre d'une analyse de marché.
En conclusion, le GRE recommande à toutes les autorités de régulation nationale de mettre en œuvre la symétrie des TA le plus vite possible.

IV-4.1.2.2. Les avis de la Commission européenne

A l'occasion de l'analyse des marchés de la terminaison d'appel fixe en Italie, la Commission européenne a indiqué en 2006 qu' « [elle] reconnaît que les nouveaux entrants ne peuvent pas profiter des mêmes économies d'échelle que les opérateurs établis et qu'il peut donc être justifié de leur permettre de pratiquer des tarifs de terminaison plus élevés que ceux de l'opérateur historique. Néanmoins, les nouveaux entrants devraient devenir efficaces dans la durée. Par conséquent, leurs tarifs de terminaison plus élevés ne peuvent être maintenus que pour une période limitée » (21).
Par ailleurs, suite à la demande de la Commission de fournir des éléments plus précis sur le contrôle tarifaire imposé aux opérateurs alternatifs, l'AGCOM a soumis un projet complémentaire sur lequel Mme Reding, membre de la Commission chargée des télécommunications a déclaré : « Je me félicite [que l'AGCOM] ait fermement exprimé son intention de passer à des tarifs de terminaison d'appel réduits et symétriques pour les opérateurs de réseau fixe alternatifs d'ici au 1er juillet 2010. L'orientation en fonction des coûts est un principe important pour garantir une meilleure efficacité économique des tarifs de terminaison d'appel et, partant, une réduction des prix des services aux consommateurs au sein de l'UE. Toutefois, la proposition de l'AGCOM prévoit une période transitoire de deux ans pendant laquelle les tarifs de terminaison d'appel pourront rester fortement asymétriques, s'écartant en cela des décisions prises par les autorités réglementaires d'autres Etats membres » (22).
La Commission européenne a donc affirmé son attachement à la réduction rapide des asymétries de terminaison d'appel dans les réseaux fixes et à l'utilisation d'un référentiel d'efficacité vers les coûts duquel les tarifs de terminaison d'appel doivent être orientés.

(21) Communiqué de presse n° IP/06/685 en date du 29 mai 2006. (22) Communiqué de presse n° IP/08/551 en date du 10 avril 2008.

IV-4.1.3. Les principes fondateurs de l'obligation tarifaire
IV-4.1.3.1. Les objectifs de la régulation

Au cas d'espèce de la terminaison d'appel fixe, la régulation des tarifs de la terminaison d'appel fixe doit poursuivre notamment les objectifs suivants :
― ne pas perturber la tendance générale du marché consistant à passer d'offres de détail tarifées à la minute à des offres péréquées et forfaitaires et/ou innovantes ;
― accompagner la transition technologique engagée par les opérateurs fixes et permettre aux opérateurs de décider de leurs choix et déploiements technologiques dans un contexte réglementaire stable ;
― ne pas inciter ou favoriser les mécanismes de distorsion concurrentielle ;
― inciter à la fourniture efficace des services.

IV-4.1.3.2. La convergence des terminaisons d'appel et les autres principes de régulation
a) La nécessité de fournir une visibilité sur les tarifs de terminaison d'appel

L'Autorité constate que la régulation des terminaisons d'appel fixes a pâti, par le passé, de l'absence de visibilité du secteur sur les niveaux pratiqués. En effet, à plusieurs reprises, les niveaux de terminaison d'appel des opérateurs alternatifs ont varié à la suite de règlements de différends entre opérateurs. Ces variations non planifiées sont, in fine, néfastes pour le bon fonctionnement du marché dans la mesure où les opérateurs acheteurs de terminaison d'appel fixe ne sont pas en mesure de prévoir les charges d'interconnexion qu'ils vont encourir.
Par ailleurs, le cycle d'analyse de marché qui se présente est un cycle durant lequel les opérateurs de réseaux fixes devraient mettre en œuvre, si ce n'est déjà fait, la transition technologique de leurs réseaux vers les technologies IP. L'utilisation des technologies IP revêt une importance d'autant plus forte que les offres des opérateurs ne se limitent pas à un simple service de téléphonie vocale mais l'accompagnent de services d'accès à Internet à haut débit par exemple. Ce positionnement et l'usage de ces technologies concernent aussi bien les opérateurs d'envergure locale que ceux d'envergure nationale.
Cette transition technologique demande des investissements importants, sur plusieurs années, de la part des opérateurs. Dans ce contexte, la prévisibilité sur les tarifs d'interconnexion est d'autant plus nécessaire, afin de réaliser les investissements nécessaires dans un contexte réglementaire connu.
Enfin, l'importance croissante et prospective des parts de marché d'accès opérateurs alternatifs, et donc du poids de leurs terminaisons d'appel, renforce le besoin de visibilité sur toutes les terminaisons d'appel fixes et plus seulement sur la terminaison d'appel de France Télécom.
Parmi les réponses à la consultation publique lancée par l'Autorité le 18 mai 2008, seule la société Colt conteste la nécessité de fournir une visibilité sur les tarifs de terminaison d'appel. Elle estime plus pertinent de maintenir « un recalage plus fréquent des tarifs de la terminaison d'appel de France Télécom, fondé sur des comptes réglementaires séparés publiés trimestriellement, à un scénario écrit d'avance pour les trois ans à venir ». L'Autorité estime que cette solution serait difficile à mettre en œuvre et serait à même d'entraîner des variations rapides et imprévisibles des tarifs de terminaison d'appel, à cause notamment de la transition technologique dans le réseau de France Télécom. Ce mécanisme aurait de plus des conséquences importantes sur les investissements des opérateurs et serait, in fine, néfaste pour le secteur pour ce deuxième cycle.

b) Les risques de distorsion concurrentielle de TA asymétriques

L'Autorité souhaite souligner les risques de distorsion concurrentielle portés par le caractère spécifique de la prestation de terminaison d'appel.
En effet, l'opérateur de destination des appels génère un revenu en vendant des prestations de terminaison d'appel à ses concurrents, qui sont de facto dans l'obligation d'acheter ces prestations, quel qu'en soit le prix, pour permettre à leurs propres clients de pouvoir joindre leurs correspondants sur l'ensemble des réseaux de communications électroniques ouverts au public. L'opérateur appelé se trouve ainsi doublement incité à fixer des tarifs élevés pour la terminaison d'appel : d'une part, parce qu'un tarif élevé lui procure des revenus d'autant plus importants sans dégrader sa propre compétitivité sur les marchés de détail, où s'exerce la concurrence entre opérateurs. D'autre part car un tel tarif dégrade la compétitivité de ses concurrents, puisqu'il vient s'ajouter à la masse de coûts qu'ils supportent pour formuler leurs offres tarifaires sur ces mêmes marchés de détail. La prestation de terminaison d'appel emporte donc des risques importants de distorsion concurrentielle sur les marchés de détail.
Si des écarts de terminaison d'appel étaient maintenus durablement, le risque de distorsion concurrentielle s'en trouverait accru et d'autant plus fortement que ces écarts seraient élevés. De plus, l'importance croissante des volumes de terminaison d'appel des opérateurs alternatifs, sous l'impulsion du dégroupage total, renforce les effets des potentielles distorsions concurrentielles induites par un écart de terminaison d'appel.
Au demeurant, l'Autorité estime que des distorsions concurrentielles peuvent intervenir dans de multiples configurations concurrentielles : un opérateur résidentiel national peut renforcer artificiellement sa compétitivité sur les marchés de détail grâce à une terminaison d'appel supérieure à celle d'un concurrent, mais un opérateur de taille modeste qui cible le marché entreprises sur quelques zones géographiques seulement peut également, sur un segment spécifique du marché, tirer bénéfice d'un écart de terminaison d'appel. Des risques de distorsions concurrentielles existent donc dès que des asymétries de terminaison d'appel persistent et quelle que soit la taille des opérateurs concernés.
Par le passé, l'Autorité a cependant fixé le niveau de la terminaison d'appel des opérateurs alternatifs à un niveau asymétrique pour tenir compte des différences dans leurs structures de coûts avec celle de France Télécom, compte tenu notamment de l'ouverture récente du secteur à la concurrence. Cependant l'Autorité a précisé que ces différences ne pouvaient revêtir qu'un caractère transitoire et que les structures de coûts devaient converger à terme vers celle d'un opérateur efficace. En cas de maintien d'une asymétrie importante et durable des terminaisons d'appel, le risque de distorsion concurrentielle a en effet tendance à se renforcer alors que les raisons qui pourraient justifier l'asymétrie ont par ailleurs tendance à s'estomper (cf. ci-dessous).
France Télécom approuve l'analyse de l'Autorité sur les risques de distorsion concurrentielle. Elle estime notamment que l'asymétrie « donne un mauvais signal d'efficacité », « rend les conditions de concurrence inéquitables » et « conduit à des arbitrages et un tromboning inefficace sur les marchés du transit ».
A l'inverse, Neuf Cegetel constate que, sur sa clientèle entreprise, il n'y a pas de déséquilibre notoire entre trafic sortant et trafic entrant et en conclut qu'elle ne s'appuie pas sur une terminaison d'appel plus élevée pour capter le marché des entreprises recevant beaucoup d'appels entrants. Bouygues Telecom estime que « l'imposition aux opérateurs alternatifs d'un tarif symétrique à celui de France Télécom, sans mise en place d'une période de transition suffisante pour permettre aux opérateurs alternatifs de rentabiliser les investissements, serait a contrario source de distorsion de concurrence pour ces opérateurs, en fixant leurs tarifs à un niveau inférieur à leurs coûts. » L'Autorité maintient cependant son analyse qu'à long terme seule une terminaison d'appel symétrique garantit l'absence de distorsions de concurrence dues à la terminaison d'appel, même si celles-ci n'ont pas été démontrées à ce jour avec les niveaux asymétriques actuels.

c) L'absence de facteurs exogènes justifiant l'asymétrie

Dans une approche prospective, l'Autorité constate que les raisons qui l'ont poussée par le passé à définir des niveaux de terminaison d'appel plus élevés pour les opérateurs alternatifs ont vocation à disparaître.
Le marché des communications électroniques s'est ouvert à la concurrence il y a plus de dix ans. Les effets de retard ou de moindre taille pris en compte par exemple dans le règlement de différends opposant les sociétés France Télécom et Neuf Telecom en 2006 doivent s'estomper avec la fin de la migration de leur réseau vers l'IP et la convergence de leurs structures de coûts vers celle d'un opérateur efficace, et laisser place aux bénéfices des économies d'échelle offertes par cette technologie. De plus, les opérateurs alternatifs fournissent aujourd'hui de nombreux services, parmi lesquels des services de téléphonie : il n'est plus nécessaire de « soutenir » l'activité de ces opérateurs par un différentiel de TA. De même, l'utilisation de tarifs de terminaison d'appel plus élevés pour faciliter l'entrée sur le marché de nouveaux acteurs pouvait trouver sa justification au début de la libéralisation du marché et n'est plus nécessaire maintenant que des concurrents pérennes se sont installés.
Par ailleurs, en s'appuyant sur les opérateurs de dimension nationale présents sur les marchés de l'accès et du transit et selon leur plan d'affaires et de déploiement, les nouveaux entrants peuvent restreindre géographiquement ou par type de clientèle leur pénétration du marché et limiter ainsi les effets de moindres économies d'échelle qui pèsent lors de l'entrée. A l'instar du GRE, l'Autorité estime qu'il n'existe ainsi pas de moindres économies d'échelle d'origine exogène pour les opérateurs fixes. Le choix de certains opérateurs alternatifs d'adresser un marché et/ou une zone géographique qui entraîne des moindres économies d'échelle sur le long terme ne constitue pas un facteur exogène de déséquilibre, dans la mesure où ce choix résulte uniquement de la stratégie de l'opérateur. L'Autorité constate d'ailleurs que sur tous les segments des marchés de détail de la téléphonie fixe, il existe des opérateurs de toute taille et de tout type d'empreinte géographique (local, régional, national, international).
L'Autorité considère également que la convergence de France Télécom et des opérateurs alternatifs vers les mêmes technologies devrait renforcer les similitudes dans les structures de coûts entre les opérateurs. Ces nouvelles technologies retenues aujourd'hui à l'entrée sur le marché des communications électroniques réduisent notamment les coûts de pénétration du marché et les différences d'économies d'échelle qui pouvaient être constatées par le passé en technologie commutée et ne justifient pas l'introduction d'asymétries, mêmes transitoires, des terminaisons d'appel des nouveaux entrants avec celles des acteurs déjà en place (France Télécom ou les autres opérateurs alternatifs).
Enfin, l'Autorité estime que les différences d'architecture d'interconnexion entre les opérateurs ne justifient pas des tarifs de terminaison d'appel différents : les opérateurs définissent l'architecture d'interconnexion qui leur est la plus adaptée, compte tenu de leur activité, des technologies utilisées et des besoins propres de l'opérateur qui souhaite s'interconnecter. L'Autorité constate en particulier la plus grande concentration des fonctions de gestion des appels dans les réseaux IP que dans les réseaux RTC et s'attend donc à des évolutions importantes des architectures d'interconnexion de certains opérateurs, évolutions qui sont laissées à l'appréciation de ces derniers.
De même, l'Autorité ne distingue pas différents niveaux de TA selon la technologie employée : d'une part, la TA est une prestation fonctionnelle fournie indépendamment de la technologie du point de vue de l'acheteur, d'autre part, en cas de cohabitation de deux technologies dans le réseau d'un opérateur, seule la technologie la plus efficace fournit un signal économique pertinent et il n'est pas légitime de rémunérer les choix technologiques moins efficaces de l'opérateur. En corollaire, la tarification de la TA ne doit pas subir de manière significative les éventuelles externalités négatives qu'induirait un opérateur par son changement de technologie. Il n'est pas non plus pertinent de distinguer la régulation de la TA selon la ressource de numérotation (i.e. sur numéros géographiques et sur numéros non géographiques), dans la mesure où l'utilisation de chaque type de numéro n'est pas liée à des utilisations différentes ou des spécificités fonctionnelles, mais soumise à des conditions de concurrence homogènes. Enfin, l'Autorité n'estime pas pertinent de différencier les niveaux de TA selon le niveau de qualité fourni : il n'existe pas aujourd'hui de différenciation de ce type pour les terminaisons d'appel.
La société France Télécom soutient l'analyse de l'Autorité quant à l'absence de facteurs exogènes pouvant justifier des asymétries de terminaison d'appel.
Les opérateurs alternatifs identifient pour leur part plusieurs facteurs exogènes qu'ils considèrent pertinents. Neuf Cegetel estime que les éléments suivants doivent être pris en compte : les durées d'engagement chez France Télécom, les délais de résiliation chez France Télécom, les programmes de fidélisation de France Télécom, le manque de compatibilité des matériels et l'existence d'un réseau dense et historique d'agences commerciales. L'Autorité constate que les pratiques mentionnées par Neuf Cegetel ne sont pas spécifiques à France Télécom et que la fluidité du marché de détail fixe ne justifie pas des écarts de terminaison d'appel.
Neuf Cegetel considère de plus que les opérateurs alternatifs ne peuvent pas atteindre les mêmes effets d'échelle que France Télécom. L'Autorité rappelle que, en accord avec la position commune du GRE, elle estime qu'il n'existe pas d'effets d'économie d'échelle caractérisés sur la fourniture de la prestation de terminaison d'appel fixe.
Neuf Cegetel identifie également certains « switching costs », comme l'accès privilégié à l'information sur les clients potentiels ou la promotion facilitée. Bouygues Telecom rejoint Neuf Cegetel sur ce point en estimant que France Télécom dispose de données précises sur l'ensemble des clients raccordés à son réseau et peut, par conséquent, mieux cibler sa prospection et son investissement que les opérateurs alternatifs. L'Autorité reconnaît l'existence, dans certains cas, d'informations plus précises de France Télécom concernant certains clients et sera attentive à ce que l'accès à ces informations ne constitue pas une distorsion de concurrence aux dépens des autres opérateurs. Pour autant, l'Autorité ne considère pas que cet argument justifie des asymétries de terminaison d'appel à long terme.
Bouygues Telecom estime de plus que la nature même du marché résidentiel entraîne d'importants coûts fixes qui obligent les opérateurs « à rechercher une couverture nationale afin de maximiser les volumes produits ». Elle ajoute qu'« aucun acteur sur ce marché n'a pu se limiter à une stratégie locale » et que cette situation conduit à des moindres économies d'échelle par rapport à France Télécom. L'AFORST estime également qu'il existe des économies d'échelle du fait que France Télécom dispose de beaucoup plus de clients à chaque NRA que n'importe quel opérateur alternatif. Comme elle le mentionne supra, l'Autorité constate qu'il existe des acteurs de toute taille sur le marché résidentiel, y compris des acteurs locaux. A titre d'exemple, l'opérateur France Citévision dessert uniquement la région d'Amiens avec des offres « triple-play » pour le marché résidentiel. De plus, il est certain qu'il existe des effets d'échelle au démarrage d'une activité, quand la base de clientèle est encore trop faible pour rentabiliser les investissements consentis ou quand certains équipements d'ancienne technologie ne supportent plus suffisamment de clients, mais ces effets ne proviennent pas d'une source exogène et ne sauraient donc justifier une asymétrie de terminaison d'appel. En particulier, le taux d'occupation d'un NRA par un opérateur dépend de l'efficacité de son action sur les marchés de détail et n'est pas destinée à rester faible sine die.
Par ailleurs, l'AFORST estime comme exogène l'ancienneté des équipements TDM qui ne seraient pas amortis pour les opérateurs alternatifs et le seraient pour France Télécom. Cet argument, relié à l'argument de la date d'entrée sur le marché, a justifié les asymétries passées mais n'est pas pertinent à long terme.
Enfin, l'AFORST et Bouygues Telecom abordent la question des différences d'architecture d'interconnexion. Sur ce dernier point, Bouygues Télécom estime que « les niveaux de raccordement et le nombre de points de raccordement dans le réseau de France Télécom (de l'ordre de 400) ne sont en rien comparables à ceux observés dans les réseaux des opérateurs alternatifs (quelques points), ce qui engendre des différences de coût d'accès à la prestation de terminaison d'appel ». Comme indiqué ci-dessus, l'Autorité précise qu'elle n'entend pas définir quelles sont les architectures d'interconnexion des opérateurs et que celles-ci sont définies par les opérateurs dans le cadre de l'obligation de faire droit aux demandes raisonnables d'interconnexion.

d) Autres problèmes posés par la TA

Outre les éléments indiqués ci-dessus, il convient de rappeler que l'existence de plusieurs niveaux de terminaison d'appel fixe comporte plusieurs inconvénients pour le fonctionnement du marché, dont entre autres :
― la prise en compte des coûts opposés par chaque opérateur n'inciterait pas les opérateurs alternatifs à l'efficacité dans la fourniture de la prestation de TA car un opérateur inefficace verra sa TA recouvrer l'ensemble de ses coûts ;
― la définition de niveaux de TA différenciés conduit à l'illisibilité des charges d'interconnexion qu'un opérateur peut prévoir d'encourir, ce qui peut avoir un effet sur les stratégies d'investissements des opérateurs ;
― à long terme, le maintien d'asymétries de TA favorise durablement certains opérateurs par rapport à d'autres, ce qui entrave le fonctionnement normal du marché.
A l'inverse, une terminaison d'appel symétrique permet de récompenser l'efficacité des opérateurs dans la fourniture de cette prestation : si l'opérateur encourt des coûts qu'il estime supérieurs au tarif de terminaison d'appel, il est incité à augmenter son efficacité pour réduire cet écart et si l'opérateur encourt des coûts inférieurs, il tire bénéfice de l'écart entre ses coûts et le tarif fixé.

e) Les principes de régulation de la terminaison d'appel

Compte tenu des éléments ci-dessus, l'Autorité estime que la régulation tarifaire des terminaisons d'appel doit engager un mouvement de convergence des terminaisons d'appel fixe entre elles et mettre fin, à terme, aux asymétries constatées par le passé. Ce mouvement est cohérent avec les préconisations de la Commission européenne, qui demande aux régulateurs nationaux de poursuivre cet objectif de symétrie des terminaisons d'appel fixes ainsi qu'avec la position commune du GRE.
Pour la période couverte par la présente analyse, et pour répondre aux objectifs précisés supra, l'Autorité a défini quatre principes fondateurs pour la régulation tarifaire des terminaisons d'appel fixe :
― une visibilité sur trois ans sur les tarifs de terminaison d'appel doit être donnée au secteur : cette visibilité permettra la constitution d'offres de détail innovantes et compétitives (le maintien d'une incertitude sur les tarifs de gros pourrait conduire les opérateurs à reporter ce risque sur les utilisateurs finals) et fournira un environnement réglementaire stable aux opérateurs pour engager ou poursuivre leur transition technologique ;
― la dissymétrie entre les terminaisons d'appel fixe ne peut perdurer indéfiniment, notamment pour éviter les risques de distorsion concurrentielle ;
― la constitution de rente sur la terminaison d'appel doit être évitée, et en particulier, la terminaison d'appel ne doit pas être utilisée pour financer des services qui ne bénéficient qu'au seul client appelé, d'autant plus si ces services ne concernent pas uniquement la fourniture d'une prestation de voix. La terminaison d'appel rémunère uniquement la prestation consistant à terminer un appel téléphonique sur un réseau fixe selon un périmètre de coûts pertinents normé (excluant notamment les charges d'accès) ;
― les externalités négatives significatives engendrées par les évolutions techniques de l'opérateur vendeur doivent être évitées. En particulier, le choix d'un opérateur de déployer un réseau NGN relève uniquement de sa stratégie et ne doit pas avoir d'impact significatif sur les prestations de gros fournies aux autres opérateurs. De plus, le déploiement des réseaux NGN permet aux opérateurs d'offrir de nouveaux services aux utilisateurs, qui ne doivent pas être rémunérés par les revenus d'interconnexion voix.

IV-4.1.4. L'outil de régulation des terminaisons d'appel :
l'obligation de contrôle tarifaire pluriannuel

L'Autorité estime que les tarifs de terminaison d'appel doivent faire l'objet d'un contrôle tarifaire pluriannuel pour répondre à l'objectif de visibilité.
En effet, la période couverte par la présente analyse est une période de transition pour les opérateurs. D'un point de vue technologique, la plupart des opérateurs ont engagé, voire pour certains terminé, la migration de leurs réseaux existants vers la technologie de transmission IP.
Cette évolution entraîne des investissements importants de la part des opérateurs. De plus, pour le cas particulier de France Télécom, le déploiement d'un réseau IP est lié à l'évolution du réseau historique commuté, avec notamment, a priori, un mouvement de concentration des commutateurs d'abonnés. Par ailleurs, avec cette nouvelle technologie, les réseaux des opérateurs, et en particulier celui de France Télécom, permettent d'acheminer les données de nouveaux services, comme la télévision ou l'accès à Internet. Ces nouveaux services utilisent, avec la voix, certains équipements de réseau en commun et il convient d'estimer l'allocation des coûts de ces équipements à chaque service.
L'Autorité estime qu'à l'issue de la période d'analyse la grande majorité des réseaux seront opérés en technologie IP et qu'une nouvelle méthodologie d'allocation des coûts pourra avoir été définie, le cas échéant. Dans l'intervalle, le cycle d'analyse de marchés 2008-2011 ne doit pas perturber les investissements des opérateurs et fournir suffisamment de visibilité sur les prestations d'interconnexion achetées et vendues entre opérateurs.
Par conséquent, il semble approprié de définir dans la présente décision les niveaux de terminaison d'appel de l'ensemble des opérateurs fixes pour préserver l'équilibre et le développement du secteur, en lui apportant une stabilité et une prévisibilité tarifaires. Ce contrôle prend la forme de plafonds que les tarifs de terminaison d'appel ne doivent pas dépasser.

IV-4.1.5. La référence des coûts d'un opérateur efficace

Les références de coûts que l'Autorité retient pour tous les opérateurs identifiés comme puissants sur leurs marchés respectifs de terminaison d'appel fixe, qu'ils soient soumis à une obligation d'orientation vers les coûts ou à une obligation de pratiquer des tarifs non excessifs, sont celles d'un opérateur efficace et non les coûts propres de l'opérateur.
La formation des références de coûts d'un opérateur efficace repose sur une notion d'efficacité basée notamment sur des hypothèses de déploiement efficace d'un réseau (par exemple en termes de choix technologiques) ainsi que de niveaux de coûts de déploiement et d'utilisation du réseau efficaces.
Par ailleurs, l'Autorité retient pour les prestations de terminaison d'appel une approche dans laquelle les coûts des éléments de réseaux indépendants du trafic ne sont pas pris en compte. A ce titre, les coûts du segment d'accès (de l'abonné à l'URA dans le cas d'un réseau RTC) sont exclus de la tarification de la terminaison et du départ d'appel. Par ailleurs, pour les éléments de réseaux dont le dimensionnement est dépendant du trafic et dont les coûts sont donc potentiellement pertinents pour la terminaison d'appel, l'Autorité adopte une approche de « coûts complets distribués ». Les coûts pertinents incluent donc notamment :
― les coûts de réseau alloués à l'usage à la prestation de terminaison d'appel. Ces coûts excluent donc les coûts des éléments de réseau dédiés à l'utilisateur appelé (segment d'accès) qui doivent être recouvrés par des produits de détail vendus à cet utilisateur. A titre d'exemple, et dans l'approche retenue par le passé, le périmètre des coûts pertinents qui avait été retenu pour la terminaison d'appel sur un réseau RTC recouvrait le lien URA-CA, les coûts de commutation dans le CA et la moitié des coûts des URA (partie mutualisée) ;
― les éventuels coûts de support spécifiques à la fourniture de la prestation de terminaison d'appel vocal ;
― les coûts commerciaux spécifiques à savoir ceux qui sont directement induits par la prestation de terminaison d'appel vocal ;
― les coûts communs, qui par nature correspondent à une activité utile à l'ensemble des produits (gros et détail compris) et qui ne peuvent être alloués, à l'aide d'une clé d'allocation d'usage, à une ou des prestations spécifiques. Les coûts communs sont par exemple formés des coûts de siège. Le choix de l'Autorité est de les faire allouer à l'ensemble des prestations au prorata des autres coûts, c'est-à-dire sous la forme d'une majoration proportionnelle aux coûts de réseau et aux coûts commerciaux du service considéré.
L'Autorité souligne que pour la fourniture de la prestation de terminaison d'appel, la majorité des coûts des opérateurs est formée de coûts joints, c'est-à-dire communs à différentes prestations dont celle de terminaison d'appel. Ces coûts sont principalement des coûts de réseau ; le réseau de l'opérateur étant unique et servant à produire de multiples produits. Le concept de coûts pris en compte par l'Autorité pour spécifier les modalités de contrôle tarifaire dépend dès lors directement des choix d'allocation qu'elle arrête pour allouer ces masses de coûts joints à l'ensemble des prestations qui les induisent, en particulier à la terminaison d'appel vocal. Par exemple, les coûts joints des infrastructures de transmission des opérateurs offrant des services double ou triple-play sont partagés entre les différentes prestations (voix entrante et sortante, Internet, TV, etc.).
L'Autorité tient donc à souligner que l'imposition de plafonds tarifaires vise simplement à encadrer la part maximum des coûts joints qu'un opérateur peut recouvrer à travers la tarification de la terminaison d'appel voix ― prestation commercialisée en monopole ― ; le reste des coûts devant être recouvré sur l'ensemble des autres prestations (de détail notamment) qu'il offre et pour lequel l'opérateur est libre de sa politique tarifaire. Il n'y a donc pas de risque de non-recouvrement des coûts.
L'Autorité rappelle enfin que si la méthode retenue à ce jour est une approche en coûts complets, elle considère qu'il pourrait être nécessaire de réexaminer à terme ce concept, et potentiellement par des travaux lancés au cours du prochain cycle, afin d'adopter une méthodologie de tarification la plus en adéquation avec les spécificités des prestations de terminaison d'appel et cohérente dans la mise en œuvre de la régulation des terminaisons d'appel, qu'il s'agisse de terminaison d'appel fixe ou de terminaison d'appel mobile. En particulier, la pertinence de prendre en compte les coûts communs dans le cas d'une prestation réciproque (« two-way access ») pourrait être réexaminée ainsi que l'opportunité de retenir une approche incrémentale plus prononcée en matière de coûts. En vue des travaux futurs sur la tarification de l'interconnexion, l'Autorité portera une attention particulière aux éléments qui pourraient concerner ce sujet dans la recommandation que la Commission européenne a annoncé vouloir prendre sur le sujet.
Si les réponses souscrivent au principe d'efficacité défendu par l'Autorité, les opérateurs adoptent des visions différentes de l'efficacité économique d'un opérateur.
France Télécom estime que « les tarifs définis dans l'encadrement tarifaire doivent refléter les coûts d'un opérateur efficace délivrant les services réellement rendus de 2008 à 2011 sur le territoire national ». Elle précise que ces services sont « le service d'accès principalement ou exclusivement téléphonique ». L'Autorité souscrit à l'objectif d'évaluer les coûts d'un opérateur efficace fournissant un service de terminaison d'appel fixe mais n'est pas en mesure de connaître l'ensemble des services qui seront « réellement » rendus de 2008 à 2011 et estime que le fait que France Télécom fournisse un service principalement ou exclusivement téléphonique à un grand nombre de clients ne justifie pas un traitement différencié en termes de terminaison d'appel et ne modifie pas l'objectif d'efficacité poursuivi. La référence d'efficacité prise par l'Autorité constitue donc la meilleure référence possible compte tenu de l'ensemble des éléments de coûts connus de l'Autorité, y compris les éléments de coûts prévisionnels fournis par France Télécom.
Par ailleurs, France Télécom souhaite que l'Autorité « soit beaucoup plus explicite sur le fait que l'écart entre les tarifs et les coûts devra être recouvré sur des prestations de détail et de gros [soulignement par France Télécom] » et que « les réaffectations de coûts proposées par l'ARCEP affecteront donc nécessairement d'autres produits de gros, notamment d'accès ». L'Autorité estime que cette question est pertinente à long terme, si une approche incrémentale pour les coûts affectables à la terminaison d'appel est adoptée. A court terme et avec les méthodes de coûts utilisées à ce jour, cette question n'est cependant pas d'actualité. De plus, dans l'hypothèse où l'utilisation de certains éléments de réseau pour les appels entrants n'était pas couverte par la terminaison d'appel fixe et en respectant le principe de causalité, France Télécom a la possibilité de recouvrer ces coûts par d'autres produits, au premier rang desquels ses produits de détail. Ce mécanisme n'implique pas nécessairement une augmentation des tarifs de détail au sens où ces tarifs de détail sont d'ores et déjà supérieurs aux coûts sous-jacents. Par ailleurs, il n'existe pas de principe selon lequel un élément de réseau utilisé par plusieurs produits devait être valorisé de la même façon, comme le montre le fait que la boucle locale, quand elle est utilisée simultanément par des produits bas débit et des produits haut débit, fait porter l'ensemble de ses coûts sur les produits bas débit.
La société Bouygues Telecom relève que « le niveau de part de marché de France Télécom à plus de 70 % ne peut être considéré comme le niveau efficace de référence alors que ce niveau ne peut être atteint que par un acteur sur ce marché ». Elle estime donc que la régulation doit, d'une part, définir une terminaison d'appel générique correspondant à un seuil de part de marché (20-25 %) et qui s'appliquerait à tous les opérateurs de taille inférieure à ce seuil et, d'autre part, orienter la terminaison d'appel des opérateurs de taille supérieure à ce seuil vers les coûts d'un opérateur efficace de la même taille qu'eux. Outre la difficulté de mise en œuvre d'un tel mécanisme, l'Autorité considère que cette approche suppose l'existence de spécificités applicables à chaque opérateur fixe, conduisant à un tarif de terminaison d'appel différent pour chaque opérateur de taille supérieure au seuil. Or, l'Autorité considère qu'il n'est pas établi qu'il existe des facteurs exogènes pouvant justifier des asymétries de terminaison d'appel et que l'existence de différences de terminaison d'appel emporte des risques de distorsion concurrentielle. De plus, l'Autorité maintient son analyse que, dans la mesure où le tarif de cette prestation ne rémunère pas les éléments du réseau d'accès, l'efficacité d'un opérateur fixe pour produire une prestation de terminaison d'appel ne dépend qu'accessoirement de sa taille.

IV-4.2. Les références de coûts disponibles
pour déterminer les coûts d'un opérateur efficace
IV-4.2.1. Coûts constatés par le passé

La première source à la disposition de l'Autorité pour évaluer les coûts d'un opérateur efficace se trouve dans les modèles de coûts réglementaires construits sur les données comptables constatées par le passé.
En effet, compte tenu du progrès technologique et de l'amélioration constante de leur efficacité recherchée par les entreprises, les coûts d'un opérateur efficace ne sont, a priori, pas voués à augmenter au cours du temps. Par conséquent, les coûts encourus par un opérateur donné à une date donnée représentent, théoriquement et hors circonstances exceptionnelles relatives à des facteurs exogènes, un majorant des coûts d'un opérateur efficace à partir de cette date.
L'obligation de séparation comptable imposée à France Télécom a conduit à la mise en place d'un modèle de comptabilisation des coûts pour chaque prestation, audité par un cabinet indépendant, qui permet de fournir une évaluation raisonnablement précise des coûts encourus par France Télécom pour fournir la prestation de terminaison d'appel. Les dernières données obtenues par ce processus portent sur l'exercice 2006. L'Autorité a accès à des informations détaillées mais soumises au secret des affaires sur les différents comptes d'exploitation produit de France Télécom et est donc en mesure d'estimer les coûts encourus par France Télécom pour fournir la prestation de terminaison d'appel. Elle s'appuie notamment sur ces éléments afin d'estimer les évolutions qui ont pu et pourront affecter le niveau de la terminaison d'appel de référence (23).
France Télécom estime que cette référence doit être écartée, notamment parce qu'en 2006 le réseau ne servait que des clients RTC. Elle considère également qu'il « n'est pas raisonnable, d'un strict point de vue économique, de ne pas chercher à projeter des données 2006 en tenant compte de divers paramètres tels que l'inflation, la déformation de la demande, le progrès technique ». L'Autorité rappelle que la régulation de la terminaison d'appel respecte le principe de la neutralité technologique et cherche à définir le niveau de la terminaison d'appel efficace, indépendamment de la technologie. Elle ne peut donc retenir le premier point de France Télécom. Concernant le second point, l'Autorité indique que le niveau constaté pour la terminaison d'appel en 2006 ne constitue pas l'unique référence qu'elle compte utiliser pour définir le niveau de la terminaison d'appel efficace mais uniquement un signal d'efficacité a maxima pour la fourniture de la terminaison d'appel.

(23) A ce titre, les comptes de séparation comptable pour l'année 2006, publiés par France Télécom fin 2007, fournissent une indication des coûts que France Télécom a encourus pour la fourniture de sa prestation de terminaison d'appel. Il convient néanmoins de nuancer les résultats fournis par ces comptes dans la mesure où le compte de séparation comptable d'une part regroupe la fourniture interne et la fourniture externe, d'autre part regroupe plusieurs prestations relatives à l'interconnexion (terminaison d'appel proprement dite, prestations de colocalisation, prestations de lignes de raccordement, etc.).

IV-4.2.2. Modèle de comptabilisation des coûts de France Télécom
IV-4.2.2.1. Principes de fonctionnement du modèle

Afin de vérifier que France Télécom satisfait à ses obligations réglementaires sur les tarifs de ses prestations, France Télécom a développé dès 1991 un modèle de déversement et de comptabilisation des coûts réglementaires (24) qui permet notamment d'évaluer les coûts des différents produits réglementaires. Ce modèle a depuis été adapté et doit respecter les dispositions de la décision de l'Autorité n° 2006-1007 en date du 7 décembre 2006 portant sur les obligations de comptabilisation des coûts et de séparation comptable imposées à France Télécom.

(24) Modélisation descendante aussi appelée « top-down ».

Un modèle de déversement et de comptabilisation des coûts réglementaires

La description du modèle de France Télécom est publique et disponible sur son site Internet (25). L'évaluation des coûts est faite à partir de la comptabilité de France Télécom (patrimoniale et analytique) ainsi que des unités d'œuvre constatées par les différentes directions fonctionnelles. En particulier, dans le document décrivant son modèle, France Télécom précise que « la démarche utilisée consiste à partir du total de l'entreprise, ce qui assure le bouclage par construction avec les comptes sociaux, puis à répartir chaque activité, chaque type d'équipement en fonction de l'usage mesuré, sans discrimination ».
Le système de comptabilisation des coûts procède en deux étapes principales :
― une étape de préparation de la base de coûts qui consiste à extraire les coûts des bases de comptabilité analytique et patrimoniale de France Télécom et à les agréger sur 1 000 activités élémentaires (« précurseurs ») environ ;
― une deuxième étape de modélisation des coûts qui consiste à répartir ces activités sur les différents produits de France Télécom. Le déversement s'effectue en cascade en affectant successivement les coûts de support, les coûts commerciaux et les coûts de réseau. Ces déversements doivent s'effectuer suivant des clés d'allocation pertinentes, c'est-à-dire suivant des principes de causalité et de non-discrimination. Une dernière sous-étape permet de prendre en compte l'autoconsommation, i.e. la consommation réciproque des différents produits.

(25) http://www.francetelecom.com/fr_FR/groupe/reseau/documentation/.

Figure 10 : Schéma du système de comptabilisation des coûts mis en œuvre par France Télécom

Vous pouvez consulter le tableau dans le
JOn° 187 du 12/08/2008 texte numéro 51

Dans l'étape de modélisation, les coûts sont déversés de la manière suivante :
― les activités de support déversent leurs coûts directement sur les produits ou sur des activités commerciales ou réseau ;
― les activités commerciales déversent leurs coûts directement sur les produits ;
― les activités réseaux déversent leurs coûts directement sur les produits.
Les activités supports prennent notamment en compte les coûts suivants :
― les coûts communs qui sont des coûts causés par l'ensemble des activités sans qu'un lien de causalité puisse être identifié ;
― les services nationaux de soutien ;
― les bâtiments, qui sont divisés entre bâtiments techniques (dont le coût peut être alloué directement à des activités et produits spécifiques) et bâtiments non techniques ;
― l'informatique. Une partie importante du traitement des coûts du SI a eu lieu dans l'étape de préparation de la base de coûts en affectant les coûts de chaque application aux activités élémentaires concernées ;
― la recherche et développement ;
― la formation ;
― l'approvisionnement ;
― les véhicules ;
― la logistique ;
― le support.
Les activités réseaux reposent sur une modélisation « par couches » du réseau de France Télécom :
― les coûts sont alloués en cascade entre les différentes couches, la couche la plus basse étant le génie civil et la couche la plus haute les produits commerciaux ;
― les coûts proviennent à la fois des activités élémentaires identifiées à la fin de la préparation de la base de coûts et des déversements effectués depuis les activités support ;
― la cascade des coûts sur les différentes couches s'effectue à l'aide de la détermination de facteurs d'usage qui représentent la consommation d'une couche en éléments de couches inférieures.

Un modèle fondé sur des coûts de remplacement

Dans l'étape de préparation de la base de coûts, le modèle permet de choisir la méthode retenue pour valoriser les actifs de France Télécom. En particulier, la comptabilité de France Télécom retrace les coûts historiques encourus par l'opérateur, mais il est également demandé à France Télécom de retraiter ces coûts afin d'obtenir les coûts réglementaires tels que définis dans les décisions de l'Autorité. Les coûts de patrimoine hors réseau sont comptabilisés en coûts historiques mais l'Autorité a imposé à France Télécom de valoriser son réseau général en coûts de remplacement en filière, c'est-à-dire en fonction d'une chronique d'investissement théorique de remplacement à neuf de son réseau dans le respect du principe d'efficacité.
Concrètement, la méthode des coûts de remplacement consiste à estimer les coûts de France Télécom en se référant aux coûts d'achat des équipements à l'année étudiée.
Une partie du réseau de France Télécom étant qualifiée de facilité essentielle non susceptible d'être dupliquée, certains actifs du réseau, comme les câbles ou le génie civil de la boucle locale, sont valorisés en coûts courants économiques (26).

(26) Cf. décision n° 2005-0834 de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes en date du 15 décembre 2005 définissant la méthode de valorisation des actifs de la boucle locale cuivre ainsi que la méthode de comptabilisation des coûts applicable au dégroupage total.

IV-4.2.2.2. Evolution du modèle dans une approche prospective

Afin de fournir des informations sur les coûts que pourrait encourir France Télécom au cours du prochain cycle d'analyse des marchés, France Télécom a présenté à l'Autorité des éléments de coûts prospectifs fondés sur la mise en application de ce modèle avec une topologie de réseau et des paramètres de demande mis à jour.
Ce travail complète la présentation des comptes prévisionnels non audités à ce jour pour 2008 en fournissant des éléments de coûts pour l'ensemble du deuxième cycle (2008-2011).
Les éléments apportés par France Télécom ne présentent pas les mêmes garanties que les données constatées et auditées ou même que les données prévisionnelles auditées mais fournissent une bonne estimation de l'évolution que l'on peut attendre des coûts de la terminaison d'appel sur le réseau de France Télécom.

IV-4.2.2.3. Limites du modèle pour établir le niveau d'une terminaison d'appel efficace

Le modèle de comptabilisation des coûts de France Télécom présente un certain nombre de limites identifiées par l'Autorité et auxquelles France Télécom a souhaité répondre dans sa contribution à la consultation publique. L'Autorité estime que les limites de ce modèle sont potentiellement de deux natures :
― tout d'abord sur la fiabilité des prévisions des coûts qui seront encourus par France Télécom ;
― ensuite, sur le fait que certains choix de France Télécom peuvent être induits par d'autres considérations que la recherche d'une terminaison d'appel efficace, en particulier au moment d'une transition technologique. Par conséquent, même dans le cas où ces prévisions de coûts seraient fiables, il n'est pas certain a priori que le niveau de terminaison d'appel de France Télécom reflète le niveau de la terminaison d'appel d'un opérateur efficace.

IV-4.2.2.4. Sur la fiabilité des prévisions de coûts encourus par France Télécom

En premier lieu, l'Autorité considère que le modèle de France Télécom fait face à certaines limites inhérentes à toute modélisation prospective, en particulier :
― le modèle de France Télécom est en constante évolution, notamment afin d'améliorer la pertinence des clés d'allocation retenues pour affecter les coûts aux différents produits. Cette évolution permanente rend impossible l'utilisation de ce modèle comme unique référence pour des évaluations prospectives sur plusieurs années, du fait du manque de visibilité sur les évolutions qui lui seront apportées ;
― ensuite, le modèle de France Télécom permet de calculer des coûts constatés, mais également des coûts prévisionnels. La fiabilité des coûts prévisionnels est donc fortement dépendante de la fiabilité des prévisions réalisées par France Télécom (en particulier sur l'évolution des volumes [27]), du nombre des équipements et des coûts unitaires prévisionnels).
Dans sa réponse, France Télécom estime à juste titre que ces limites sont inhérentes à toute modélisation prospective. France Télécom en conclut qu'elles ne sauraient donc constituer une critique du modèle de coûts prévisionnels de France Télécom. L'Autorité ne conteste pas le fait que certaines limites sont intrinsèques à toute modélisation prospective, et reconnaît que ces mêmes limites s'appliquent au cas du modèle technico-économique présenté dans la suite de cette décision. L'Autorité insiste uniquement sur le fait que ces évaluations ne peuvent avoir le même degré de confiance qu'un modèle de coûts constatés et audités car les coûts prévisionnels sont dépendants d'hypothèses qui pourraient évoluer dans le futur.
De plus, l'Autorité note que France Télécom lui a présenté un certain nombre de tests de sensibilité du modèle, qui démontrent qu'une variation de certaines hypothèses conduirait à des résultats sensiblement différents pour le coût de la terminaison d'appel sur son réseau.
Enfin, l'Autorité a pu noter lors du dernier exercice de comptabilisation des coûts (réalisé en 2007) que les coûts constatés 2006 pour les prestations de départ d'appel et de terminaison d'appel se sont révélés inférieurs aux coûts prévisionnels calculés fin 2005.

(27) Les prévisions de trafic sont par nature aléatoires car notamment dépendantes des comportements d'usage des consommateurs et de la nature même de leur consommation (voix, données, etc.) et diffèrent en cela des prévisions qui peuvent être construites sur les parcs d'accès.

IV-4.2.2.5. Sur les limites du modèle de coûts prévisionnels de France Télécom
pour déterminer le niveau de terminaison d'appel d'un opérateur efficace
Un modèle fondé sur un réseau de type RTC

Le modèle de France Télécom se base sur le réseau réellement exploité par France Télécom, en particulier sur son réseau de type RTC, et ne prend pas en compte des ruptures technologiques qui modifieraient la structure de ce réseau, en particulier le passage à un réseau NGN pur.
En particulier, France Télécom modélise un certain nombre d'équipements en coûts de remplacement alors que ceux-ci ne sont en réalité jamais remplacés. L'évaluation des coûts de ces équipements est fondée sur des estimations de prix datant de plusieurs années et sur lesquels les effets de la pression concurrentielle et du progrès technique ne peuvent plus être confrontés à la réalité actuelle du marché des équipements, qui se concentre sur les équipements de nouvelle génération.
France Télécom estime qu'elle a présenté à l'Autorité une variante de son modèle qui évalue « les effets du remplacement à moyen terme de la technologie de commutation RTC par une technologie IP ». L'Autorité note cependant que France Télécom n'a pas pu ou n'a pas souhaité prendre en compte les coûts opérationnels estimés résultant de l'exploitation d'un réseau NGN, mais a utilisé les coûts opérationnels prévisionnels de son réseau de type RTC. La variante présentée par France Télécom ne consiste donc pas stricto sensu en l'évaluation des coûts d'une terminaison d'appel sur un réseau de type NGN.
France Télécom estime que son modèle démontre que les coûts unitaires d'un cœur de réseau IP sont proches de ceux de la technologie RTC alors que cette proximité est précisément due au fait que France Télécom continue à prendre en compte les coûts de la technologie RTC dans la variante de sa modélisation.

Un modèle fondé sur la structure du réseau de France Télécom

Le modèle de France Télécom est construit à partir de la structure de France Télécom et est donc le reflet de cette structure. Les coûts réglementaires obtenus par le modèle ne peuvent être, par nature, qu'un majorant des coûts encourus par un opérateur efficace.
France Télécom met en avant le fait qu'elle fait face à des contraintes opérationnelles pour mettre en place un réseau NGN et conclut que la migration vers un cœur de réseau NGN « n'aura donc pas d'effet sur la structure d'interconnexion et d'exploitation de France Télécom avant le début du 3e cycle d'analyse de marché ». France Télécom fait état de plusieurs types de contraintes, qui, selon elle, imposeraient à l'Autorité de prendre en compte uniquement l'état réel de son réseau et non d'un réseau de remplacement le plus efficace :
― des contraintes de développement pour recréer les services existants dans un environnement NGN (Numeris, liaisons louées, sélection du transporteur hors zone locale de tri, etc.). Cependant, l'Autorité estime que l'efficacité économique requiert de faire supporter à ces services les surcoûts ou coûts d'opportunité encourus par France Télécom pour les recréer dans un environnement NGN, non à la prestation de terminaison d'appel ;
― des contraintes réglementaires et contractuelles qui imposent à France Télécom de proposer une offre d'interconnexion à chacun de ses commutateurs d'abonnés. France Télécom ne montre pas en quoi cette obligation impacterait à la hausse le coût de la fourniture d'une prestation de terminaison d'appel. Dans sa réponse, l'AFORST met au contraire en avant le fait que la structure d'interconnexion de France Télécom à tous ses commutateurs d'abonné serait défavorable aux opérateurs alternatifs du fait du nombre élevé de points d'interconnexion ;
― des contraintes qualifiées d'« opérationnelles » par France Télécom, par exemple sur les délais de prévenance du démontage des commutateurs d'abonnés. Il est en effet justifié que ces délais réglementaires soient pris en compte dans la tarification de la terminaison d'appel. Cependant, le nombre de CAA nécessaires sur le réseau de France Télécom est avant tout dépendant de la quantité de trafic écoulé sur le réseau de France Télécom, ce qui est une donnée qu'il est possible d'anticiper. France Télécom a d'ailleurs mis en avant à différentes reprises la solidité de ses prévisions de trafic et s'accorde pour dire que celles-ci sont cohérentes avec les prévisions de trafic retenues par l'Autorité (28). Par conséquent, France Télécom est en grande partie capable de planifier à l'avance les modifications nécessaires de son réseau et les délais de prévenance sur le démontage des commutateurs d'abonnés ne peuvent avoir qu'un impact négligeable sur ses décisions de modification d'architecture.

(28) « A la connaissance de France Télécom, il ne semble pas que les écarts de prévision entre son modèle de trafic et celui de l'Autorité soient tels que cela pourrait induire des différences significatives. »

Un modèle qui fait supporter des coûts de transition
à la prestation de terminaison d'appel

Les éléments de comptabilisation des coûts présentés par France Télécom sont un élément pour estimer a maxima la valeur d'une prestation de terminaison d'appel efficace. Cependant, ces coûts s'éloignent de la valeur d'efficacité et perdent donc de leur pertinence dans le contexte d'une transition technologique. En effet, le passage d'un réseau cœur de type RTC à un réseau cœur de type NGN n'induit pas de modification significative dans la nature du service de terminaison d'appel rendu aux opérateurs alternatifs, mais induit des coûts de transition pour France Télécom. Comme l'Autorité le rappelle dans ses principes sur la tarification de la terminaison d'appel, il serait inefficace économiquement que les coûts de cette transition puissent être répercutés sur une prestation, la terminaison d'appel, et le client final qui n'en tirent pas de bénéfices car cela engendrerait une externalité négative significative pour les opérateurs tiers. Or, plusieurs éléments tendent à montrer que certaines hypothèses retenues par France Télécom pourraient conduire à répercuter une partie de ses coûts de transition sur la prestation de terminaison d'appel.
France Télécom affirme en effet dans sa réponse qu'« il existe un point d'arbitrage entre réaliser cette opération [la migration] au plus tôt et devoir migrer un nombre considérable de clients POTS, ou attendre que ce nombre soit réduit et subir des coûts d'exploitation plus élevés pendant une période plus longue ». Il apparaît donc que France Télécom cherche à déterminer le point d'arbitrage qui lui permette de minimiser ses coûts de migration, démarche dont l'Autorité ne conteste d'ailleurs pas la rationalité. Cependant, la minimisation de ses coûts de migration par France Télécom ne coïncide pas nécessairement avec la détermination de la migration qui minimise les coûts de fourniture d'une prestation de terminaison d'appel. Ainsi, France Télécom a intérêt à attendre un point d'arbitrage qui lui permette de subir les coûts de migration minimaux et, dans l'intervalle, à recouvrer une partie de ses coûts, notamment d'exploitation, grâce à la terminaison d'appel, sur un réseau qui n'est pourtant pas le plus efficace pour fournir cette prestation. Or s'il est légitime que France Télécom détermine le calendrier de sa migration, il demeure que certains coûts de migration encourus par France Télécom sont dus à sa décision de minimiser ses coûts de migration et ne devraient par conséquent pas pouvoir être répercutés sur la terminaison d'appel. Dans le cas contraire, cela reviendrait à transférer une partie des coûts de migration de France Télécom sous la forme de coûts d'exploitation de réseau et à les répercuter sur les opérateurs alternatifs, ce qui constituerait une externalité négative significative pour les opérateurs alternatifs.
Par ailleurs, d'après le modèle de France Télécom et comme France Télécom le rappelle, la hausse des coûts unitaires de la terminaison d'appel voix sur le réseau de type RTC de France Télécom est due à la baisse des volumes de communication sur ce réseau. Or la baisse du trafic sur le réseau de type RTC de France Télécom est au moins en partie due à l'action de France Télécom sur les marchés de détail, car France Télécom acquiert sur des offres « ADSL nu » d'Orange Internet des clients qui utilisaient précédemment le réseau de type RTC de France Télécom. Cet effet de substitution entre les réseaux est notamment visible d'après les prévisions de trafic fournies par France Télécom à l'Autorité. L'Autorité estime que France Télécom ne saurait être fondée à recouvrer auprès des opérateurs tiers achetant ses prestations de terminaison d'appel des coûts qui sont dus à ses propres choix sur les marchés de détail, car cela remettrait notamment en cause l'établissement d'une concurrence durable et loyale entre les opérateurs sur les marchés de détail.

IV-4.2.2.6. Résultats fournis par le modèle de France Télécom

France Télécom a communiqué formellement les résultats de ses modélisations à l'Autorité par un courrier daté du 6 juin 2008. Les éléments transmis à l'Autorité sont soumis au secret des affaires, mais comme France Télécom l'affirme dans sa réponse à la consultation publique, France Télécom prévoit une hausse de ses coûts unitaires pour fournir la prestation de terminaison d'appel.
Comme indiqué précédemment, l'utilisation du modèle de coût de France Télécom afin d'évaluer les coûts prévisionnels de la terminaison d'appel voix ne peut être considérée comme suffisante pour déterminer le niveau de coût efficace pour fournir cette prestation. En particulier, ce modèle prend en compte des coûts de technologies RTC qui ne sont pas les technologies disponibles les plus efficaces, est le reflet de la structure historique de France Télécom et pourrait inclure des coûts de migration, du fait de la transition technologique, qui constitueraient une externalité négative significative pour les opérateurs tiers.
Par ailleurs, l'AFORST a développé un modèle de coûts descendant qui prévoit une baisse des coûts unitaires de France Télécom sur la période 2005-2011, notamment du fait de la prise en compte des coûts des technologies disponibles les plus efficaces. Bien que l'Autorité considère que le modèle de France Télécom prend en compte des hypothèses plus conformes à son réseau réel, l'Autorité prend note que le modèle descendant du réseau de France Télécom développé par l'AFORST prévoit une baisse des coûts de terminaison d'appel en dépit d'une baisse des volumes de trafic sur le réseau de France Télécom.
Compte tenu de l'ensemble des limites identifiées, les données prospectives que pourrait fournir le modèle de comptabilisation des coûts de France Télécom fournissent un signal pour l'évaluation des coûts d'un opérateur efficace qui doit être pris en compte avec précaution et confronté à d'autres éléments de coûts à la disposition de l'Autorité. Ce modèle ne saurait être le modèle unique retenu par l'Autorité pour l'évaluation des coûts de la prestation de terminaison d'appel fournie par un opérateur efficace, mais bien une des références disponibles.

IV-4.2.3. Modèles de coûts technico-économiques à la disposition de l'Autorité
IV-4.2.3.1. Modèle NGN pur
Organisation du modèle

En 2006, l'Autorité a fait réaliser par le cabinet Tera un modèle technico-économique d'un réseau NGN qui supporte à la fois des services de voix et de données. Ce modèle permet de déterminer le coût de construction et d'exploitation d'un réseau NGN en fonction de paramètres d'entrée sur les volumes (voix et données) que celui-ci doit transporter. En particulier, ce modèle permet de déterminer les coûts d'interconnexion (à la minute et au débit) correspondant à la prestation de terminaison d'appel voix. Ce coût peut-être évalué suivant plusieurs hypothèses :
― suivant le nombre de niveaux d'interconnexion retenus pour la voix (niveaux local, régional ou national) ;
― suivant la clé d'allocation retenue pour allouer les coûts joints aux différents services du réseau. Le modèle permet d'allouer les coûts joints en fonction de la capacité (débit) utilisée par le service ou en fonction d'un critère économique de coalition entre les différents services (valeur de Shapley-Shubik).
Le modèle s'articule en plusieurs étapes :
― une étape sur la demande qui synthétise l'évolution prospective de la demande au cours des prochaines années ;
― une étape sur la topologie du réseau qui permet de retenir l'architecture du réseau NGN la plus efficace (critère de dimensionnement du réseau, nombre de points d'interconnexions, etc.). Le dimensionnement du réseau est dépendant des paramètres de demande et est calculé grâce au modèle ;
― une étape sur les coûts qui permet d'évaluer les coûts des meilleurs équipements disponibles pour la construction du réseau, ainsi que des différentes prestations nécessaires (par exemple génie civil), ainsi que le coût d'exploitation. L'amortissement de ces coûts est calculé en utilisant un taux de dépréciation évalué d'après un taux de progrès technique exogène au modèle ;
― enfin une étape finale qui utilise les éléments de demande, de topologie du réseau et des coûts d'investissement et de maintenance, et qui permet de calculer les coûts induits par la fourniture de la voix, en particulier à la prestation de terminaison d'appel voix.
Ces différentes étapes du modèle ont été notamment établies grâce à des entretiens menés avec France Télécom, des opérateurs alternatifs et des équipementiers.
Le volet de demande du modèle différencie les différents services supportés par le réseau NGN dans différentes catégories :
― 4 services sont retenus : voix, Internet, TV et VoD ;
― l'utilisation par des clients résidentiels ou entreprise est distinguée ;
― le volume (en minutes) de trafic voix est différencié suivant le type de trafic sur le réseau (appels on-net, appels locaux, transit, etc.) ;
― le taux de pénétration des différents services doit être évalué ;
― etc.
L'étape du modèle sur la topologie du réseau définit l'architecture suivant les paramètres suivants :
― la technologie retenue pour construire le réseau NGN (fibres optiques, routeurs, etc.) ;
― la construction des boucles et le positionnement des équipements de commutation et de contrôle sur le réseau ;
― les bâtiments nécessaires pour héberger les équipements.
Outre les caractéristiques topologiques du réseau (soumises au secret des affaires), les principales hypothèses sont les suivantes :
― le réseau défini est un réseau pré-IMS, utilisé pour les trafics de téléphonie fixe (voix), Internet, VoD et TV ;
― le trafic mobile n'est pas transporté sur ce réseau ;
― l'interconnexion avec les autres réseaux s'effectue directement en mode IP (aucun équipement supplémentaire n'est nécessaire pour effectuer une conversion des flux entre deux réseaux s'interconnectant).
L'étape sur les coûts permet d'évaluer les coûts unitaires des différents éléments nécessaires au réseau, en investissement et exploitation, suivant la meilleure technologie disponible pour construire le réseau. Ces différents paramètres de coûts peuvent être modifiés en entrée du modèle.
Le calcul des coûts de construction et d'exploitation du réseau NGN s'effectue de la manière suivante :
― les volumes de demande (voix et données) permettent de déterminer un débit nécessaire supporté par chaque élément du réseau grâce à des matrices de routage en fonction de la topologie retenue (différents trafics n'utilisant pas les mêmes éléments du réseau) ;
― parallèlement, les coûts sont affectés aux différents éléments du réseau suivant la topologie retenue et le dimensionnement nécessaire pour satisfaire la demande.
A la suite de cette première étape, le coût de chaque élément du réseau (transport ou commutation) est évalué. Il reste à allouer ces coûts aux différents services qui utilisent le réseau NGN. Les coûts joints doivent être alloués suivant une clé d'allocation pertinente :
― une première méthode consiste à retenir le débit comme la clé d'allocation pertinente puisqu'il s'agit de l'inducteur de coût pertinent pour le dimensionnement du réseau ;
― cependant, une telle allocation peut ne pas être soutenable car certains services peuvent être moins chers à fournir grâce à des technologies alternatives et bénéficier d'effet, de mutualisation seulement dans le cas où ils supportent une part plus faible des coûts joints. Le modèle permet d'attribuer également les coûts suivant une clé de Shapley-Shubik pour pallier ce problème. Cette méthode présente cependant certains inconvénients, notamment parce qu'il est nécessaire d'évaluer les coûts de production des différents services suivant les autres technologies disponibles. Par ailleurs, comme le fait remarquer l'AFORST dans sa réponse à la consultation publique, le choix des services pris en compte doit être discuté et impacte sensiblement les résultats fournis par le modèle (29).
A la suite de cette étape, les coûts des différents éléments de réseau sont alloués aux différents services modélisés (voix, Internet, TV, VoD), en particulier la prestation de terminaison d'appel voix :
― la prestation de terminaison d'appel voix est reconstituée d'après les éléments de réseau utilisés pour la fournir ;
― le coût de cette prestation est évaluée dans un premier temps à la capacité (au débit) car il s'agit du paramètre dimensionnant pour le réseau ;
― une allocation des coûts à la minute peut ensuite être effectuée.

(29) « Elle [la méthode de Shapley-Shubik] nécessite de déterminer le nombre de services, ce qui peut s'avérer être assez complexe et sujet à discussion, notamment entre services de gros et de détail, particuliers et entreprises... La situation avec quatre services (voix, Internet, TV et VoD) présentée par l'ARCEP est simplificatrice. Ce paramètre est par ailleurs à forte sensibilité sur le résultat » (contribution AFORST).

Limites du modèle

L'Autorité remarque que le modèle présente un certain nombre de limites :
― en premier lieu, ce modèle fait face aux mêmes limites inhérentes à toute modélisation prospective que celles identifiées pour le modèle de France Télécom. Par conséquent, un certain nombre de paramètres d'entrée devront être ajustés au cours du temps pour confirmer les hypothèses et les résultats. Les travaux réalisés avec le secteur sur les volumétries prospectives permettent de disposer d'un degré de confiance minimum suffisant ;
― ensuite, la topologie retenue pour le réseau est tributaire de l'état de la technologie au moment où l'étude a été menée. Par exemple, le nombre de routeurs (et leur coût) nécessaires pour écouler un certain trafic pourrait être amené à évoluer ;
― de plus, d'une manière plus générale, l'Autorité note qu'il s'agit d'une modélisation qui est par nature simplificatrice et ne prend pas en compte l'exhaustivité des facteurs de la constitution et opération d'un réseau. En particulier, certains paramètres d'entrée du modèle comme les coûts d'exploitation et de support ne sont pas issus d'une prise en compte détaillée des différents facteurs les composant, mais d'une estimation globale. Ces estimations proviennent de discussions avec le secteur et le modèle retient le plus possible des hypothèses conservatrices qui tendent à surévaluer les facteurs de coûts du réseau. Toutefois, ce modèle permet seulement de déterminer un « ordre de grandeur » pour ce qui constitue un signal d'efficacité de la terminaison d'appel voix, notamment parce qu'il est probable qu'il soit surefficace à l'horizon de ce deuxième cycle ;
― enfin, France Télécom fait part d'un nombre de critiques sur ce modèle dans sa réponse à la consultation publique de l'Autorité. L'Autorité souscrit aux critiques faites par France Télécom sur le caractère simplificateur de ce modèle. Contrairement à France Télécom, l'Autorité n'en déduit pas que ce modèle doit être entièrement écarté mais reconnaît qu'il ne saurait constituer une référence unique et définitive pour évaluer les coûts de terminaison d'appel d'un opérateur efficace.
L'Autorité conclut donc que ce modèle n'est pas à ce stade suffisant pour fonder seul la fixation du niveau de coût et qu'il convient de prendre en compte les autres informations sur le niveau des coûts disponibles, notamment le modèle de comptabilisation des coûts de France Télécom, les informations fournies par tout autre opérateur et les comparaisons internationales.
L'Autorité souhaite souligner que ce modèle ne peut être rendu public du fait de la confidentialité des données recueillies pour établir les hypothèses et paramètres du modèle, ces données portant notamment sur les stratégies possibles de déploiement que les interlocuteurs du cabinet Tera ont pu évoquer et préciser. La topologie retenue pour le réseau s'appuie ainsi, et principalement, sur les évolutions envisagées par France Télécom, dont de nombreux éléments sont couverts par le secret des affaires. Pour les mêmes raisons, le modèle de comptabilité réglementaire de France Télécom n'a pas été rendu public. Cependant, les opérateurs ont eu la possibilité de réagir sur les hypothèses formulées pour la constitution du modèle ainsi que sur un certain nombre de paramètres d'entrée (notamment sur l'évolution de la demande).
France Télécom et Neuf Cegetel regrettent de ne pas avoir pu disposer de l'ensemble du modèle. L'Autorité précise que les informations qu'elle communique doivent à la fois vérifier le principe de transparence et respecter le secret des affaires, comme le précise l'article D. 295-II du CPCE. C'est pourquoi elle a rendu public les méthodes et principes de modélisation retenus mais pas les éléments détaillés du modèle, qui relèvent du secret des affaires.

Résultats du modèle NGN pur

Ce modèle produit des coûts de terminaison d'appel compris, selon les hypothèses retenues, entre 0,10 et 0,35 centime d'euro par minute à la fin du deuxième cycle d'analyse des marchés (dit cycle 2) en prenant en compte des hypothèses conservatrices dans le modèle. En particulier, les résultats sont fortement dépendants de la méthode retenue pour l'allocation des coûts joints (au débit ou suivant une approche Shapley-Shubik dans le modèle décrit précédemment). A ce stade, l'Autorité n'estime pas possible de retenir une méthode d'allocation des coûts joints à l'exclusion des autres et se doit par conséquent de prendre en considération les différents résultats au regard des objectifs poursuivis.

IV-4.2.3.2. Modèle voix RTC - données NGN

Par ailleurs, le cabinet Tera avait développé en 2001 un modèle technico-économique RTC pour l'Autorité ; les travaux de développement de ce modèle avaient par ailleurs impliqué le secteur. Ce modèle a été mis à jour en 2006 et permet de calculer le coût des prestations de terminaison d'appel voix en utilisant une démarche de construction similaire à la modélisation NGN pur, avec comme différence notable que les services TV, VoD et Internet (excepté Internet bas débit) sont supportés par le réseau NGN alors que le service voix est entièrement supporté par le réseau de type RTC.
L'Autorité est consciente que ce modèle est virtuel au sens où aucun client de ce réseau n'est abonné à un service de VLB contrairement à la situation actuelle et future. Cependant, ce modèle a l'avantage de permettre de déterminer le coût que la prestation de terminaison d'appel voix aurait en l'absence d'une migration du service voix du RTC vers un réseau de type NGN, migration effectuée à l'initiative de l'opérateur. En effet, la migration du service voix de RTC vers NGN n'est efficace économiquement que si le coût du service voix est inférieur en NGN. Cela est en particulier vrai pour les clients qui migrent du réseau RTC vers le réseau NGN, comme France Télécom le reconnaît dans sa réponse (30). Cela est également vrai pour les clients qui sont nativement en NGN, car la décision de migration du cœur de réseau est à l'initiative de l'opérateur. Le coût de la terminaison d'appel voix sur RTC permet donc de donner un majorant du coût de terminaison d'appel voix NGN. Les mêmes limites que pour le cas du modèle technico-économique NGN s'appliquent à ce modèle.
Ce modèle produit un coût de terminaison d'appel de l'ordre de 0,30 centime d'euros par minute en fin de cycle 2 pour lequel une marge d'erreur raisonnable doit également être prise en compte. Par ailleurs, et de même que pour la modélisation NGN pur, les résultats obtenus fournissent probablement une estimation sur-efficace des coûts pour offrir cette prestation de terminaison d'appel à l'horizon de ce deuxième cycle.

(30) « Par ailleurs, France Télécom partage l'analyse de l'Autorité selon laquelle "la migration du service voix de RTC vers NGN n'est efficace économiquement que si le coût du service voix est inférieur en NGN”, mais tient à rappeler que le choix de migration des clients RTC vers un réseau NGN ne concerne... que les clients du réseau RTC. »

IV-4.2.4. Benchmark européen

L'étude des pratiques des autres régulateurs européens en termes de régulation des TA fixes fournit enfin des indications sur le niveau raisonnable de terminaison d'appel.

IV-4.2.4.1. XIIIe rapport de la Commission européenne

Le XIIIe rapport de la Commission européenne, publié en 2007, fournit un comparatif des niveaux de terminaison d'appel de l'opérateur historique au niveau local dans les différents pays de l'Union.

Figure 11 : Tarif de terminaison d'appel local de l'opérateur historique
calculé par la Commission européenne (figure 86 du XIIIe rapport)

Vous pouvez consulter le tableau dans le
JOn° 187 du 12/08/2008 texte numéro 51

Comme le montrent les notes de bas de page du graphique, la comparaison des terminaisons d'appel est difficile et doit être faite avec précaution.
En premier lieu, le niveau indiqué pour la France est calculé selon une méthode différente de celle r etenue par l'ARCEP : elle exclut notamment la composante BPN du calcul. Or, c'est bien un tarif moyennant les composantes charge d'établissement d'appel, minute et BPN qui sert de référence tarifaire au secteur en France.
Ensuite, pour certains pays européens (Espagne notamment), l'interconnexion voix peut être réalisée de manière forfaitaire, ce qui rend les tarifs difficilement comparables avec des tarifs à la minute.
Enfin, le niveau de terminaison d'appel pratiqué pour l'opérateur historique dépend en grande partie de l'avancée de la libéralisation du secteur. A ce titre, il est notable que seuls trois pays nouveaux entrants dans l'Union (Chypre, Estonie et Pologne) figurent dans la première moitié du graphique. Par ailleurs, certains pays connaissent une situation particulière (par exemple, la Finlande compte 38 opérateurs historiques).

IV-4.2.4.2. Focus sur quelques pays de taille comparable à la France

Si le niveau identifié pour France Télécom est inférieur à la moyenne européenne calculée par la Commission européenne en 2007, il faut cependant noter qu'il est supérieur au niveau des trois pays de taille comparable à la sienne (Royaume-Uni [31], Italie et Allemagne).
L'Autorité a analysé plus précisément les niveaux de terminaison d'appel local de quatre autres pays européens : Italie, Espagne, Allemagne et Royaume-Uni. Les tarifs présentés ci-dessous excluent les BPN pour faciliter la comparaison. C'est pourquoi le niveau indiqué pour la France est inférieur au niveau retenu comme référence sectorielle (0,493 5 centime d'euro par minute).

| c€/min | MOYENNE
hors BPN (32) |HEURES PLEINES
(appel de 200 s)|HEURES CREUSES
1 (200 s)|HEURES CREUSES
2 (200 s)| CAPACITÉ | |------------|--------------------------------|-------------------------------------|------------------------------|------------------------------|------------| | Allemagne. | 0,46 | 0,52 | 0,36 | ― | ― | | Espagne. |0,56 (min)
0,33 (capacité)| 0,67 | 0,4 | ― |1 326 €/mois| | Italie. | 0,33 | 0,39 | 0,26 | ― | ― | |Royaume-Uni.| 0,23 | 0,31 | 0,14 (soir) | 0,11 (week-end) | ― | | France. | 0,39 | 0,47 | 0,30 (soir et week-end) | 0,20 (nuit) | ― |

(31) NB : pour le Royaume-Uni, le chiffre fourni par la Commission européenne est erroné ; en 2007, le tarif de terminaison d'appel local de BT en heures pleines était de 0,243 pennies/min, soit environ 0,31 centime d'euro par minute. (32) Cas d'un appel de 200 secondes ; pondération 60 % heures pleines et 40 % heures creuses pour l'Italie et l'Espagne, 20 % soir et 20 % week-end pour le Royaume-Uni, 35 % soir et week-end et 5 % nuit pour la France ; le prix à la capacité pour l'Espagne est tiré de la réponse de la CMT au questionnaire de l'ECTA en 2007.

Parmi ces pays, l'Italie et le Royaume-Uni ont imposé un encadrement tarifaire pluriannuel sur les tarifs de terminaison d'appel local de l'opérateur historique. Par ailleurs, il convient de noter que la décision n° 251/08/CONS de l'AGCOM en date du 14 mai 2008 ne concerne pas la terminaison d'appel local de Telecom Italia mais uniquement le tarif d'interconnexion au niveau des commutateurs de transit, fixé à un niveau de 0,57 centime d'euro par minute en 2010 (contre 0,74 centime d'euro en 2008). Le niveau de la terminaison d'appel de Telecom Italia au niveau du commutateur d'abonné est défini dans la décision n° 417/06/CONS du 28 juin 2006.
Cette comparaison montre que le niveau de la terminaison d'appel local de France Télécom n'est pas significativement différent de celui d'autres opérateurs historiques en Europe et se situe dans la fourchette haute des cinq opérateurs analysés ici.
Si le benchmark européen des niveaux de terminaison d'appel fournit des indications sur les pratiques à travers l'Europe, il convient de ne pas s'en servir comme source première et unique de régulation pour la terminaison d'appel fixe et de prendre en compte les spécificités de chaque pays.

IV-4.2.5. Perspectives

Les éléments de coûts fondés principalement sur les technologies RTC seront amenés, dans les prochaines années, à perdre toute pertinence au profit des éléments de coûts fondés sur les technologies IP. L'ensemble des opérateurs, y compris France Télécom, ont commencé leur phase de transition technologique.
L'Autorité envisage en cela de construire, durant le deuxième cycle d'analyse des marchés, un modèle d'opérateur efficace utilisant principalement les technologies NGN qui permettra de définir les niveaux de terminaison d'appel des opérateurs fixes pour le cycle suivant. Ce modèle rejoint le modèle technico-économique NGN développé ci-dessus et devrait, a priori, fournir des niveaux de terminaison d'appel plus faibles que les niveaux actuels grâce aux gains d'efficacité que le déploiement des réseaux NGN offre sur le long terme. Les coûts de transmission devraient décroître avec la mutualisation des liens avec d'autres applications (Internet, TV, etc.) ; les coûts de commutation/routage devraient également décroître avec les capacités accrues des équipements et la baisse de leur coût unitaire (déjà constatée par l'Autorité à l'occasion de la mise à jour du modèle technico-économique en 2007).
L'Autorité souligne par ailleurs qu'il ne lui semble pas possible de construire un modèle technico-économique suffisamment robuste pour la période spécifique de transition technologique d'un réseau RTC à un réseau NGN et qui fonderait seul l'obligation de contrôle tarifaire. Les modélisations que l'Autorité décrit précédemment sont les références qu'elle estime être les plus pertinentes pour estimer le signal d'efficacité qui doit fonder le contrôle tarifaire au cours du prochain cycle.
Par ailleurs, comme l'Autorité l'a rappelé supra, le coût de la prestation de terminaison d'appel comporte notamment des coûts de transmission, i.e. des coûts joints qui sont supportés par de nombreux produits (voix entrante et sortante, Internet, TV, etc.).
C'est pourquoi il convient de souligner que la référence actuelle de coûts de la terminaison d'appel fixe est une référence de coûts complets distribués, avec un service dédié, l'abonnement, qui couvre les coûts de l'accès. Dans le futur, cette référence de coûts et les méthodologies d'allocation de ces coûts pourraient être amenées à évoluer de façon conjointe avec la référence de coûts et les méthodologies utilisées pour la terminaison d'appel mobile, afin de garantir que, dans un contexte de convergence croissante entre services fixe s et mobiles, la régulation suit bien le principe de neutralité technologique pour favoriser le développement de la technologie la plus efficace.

IV-4.2.6. Conclusion

L'Autorité a présenté supra l'ensemble des éléments à sa disposition afin de déterminer le coût de la fourniture d'une terminaison d'appel efficace. Ces éléments illustrent la difficulté de définir des coûts prospectifs pour une prestation principalement composée de coûts joints et soumise à des évolutions technologiques importantes. La définition des coûts d'un opérateur efficace doit réconcilier les différentes sources de coûts contradictoires dont l'Autorité dispose.
A ce titre, les résultats de l'exercice de séparation comptable et de comptabilisation des coûts mené en 2006 fournissent une indication connue, auditée et fiable des coûts d'un des opérateurs du secteur pour fournir la prestation de terminaison d'appel et, par conséquent, un majorant des coûts d'un opérateur efficace, selon une méthodologie de coûts complets distribués. De plus, ces niveaux sont en accord avec les niveaux de terminaison d'appel local constatés dans plusieurs pays européens, en particulier en Espagne, en Italie et au Royaume-Uni.
Par ailleurs, les résultats de la modélisation des coûts prospectifs fournie par France Télécom pour la période 2008-2012 montrent une croissance du coût unitaire de la terminaison d'appel. Si l'Autorité reconnaît que la transition technologique du cœur de réseau de France Télécom, conjuguée à la baisse des volumes acheminés sur ce réseau, peut entraîner la comptabilisation de coûts de transition par France Télécom, ceux-ci ne doivent pas être répercutés sur la prestation de terminaison d'appel, qui ne bénéficie a priori pas de cette transition. Dans ce contexte, la hausse du tarif unitaire calculée par le modèle de France Télécom ne semble pas compatible avec, d'une part, les autres références dont dispose l'Autorité et, d'autre part, les évolutions attendues des coûts de fourniture de la prestation de terminaison d'appel d'un opérateur efficace induites notamment par la mise en œuvre des technologies IP. L'Autorité constate par ailleurs que les encadrements tarifaires pluriannuels qu'elle a étudiés dans d'autres pays européens (Royaume-Uni, Italie) sont toujours orientés à la baisse.
Enfin, la modélisation technico-économique effectuée par l'Autorité des coûts d'un opérateur utilisant uniquement un réseau NGN permet de disposer d'une première évaluation du niveau de terminaison d'appel symétrique une fois la transition technologique achevée. Si cette évaluation correspond à une modélisation pertinente d'un opérateur efficace, notamment en termes de dimensionnement de réseau et d'architecture d'interconnexion, les résultats devront être affinés à l'aide de données plus précises sur l'organisation d'un réseau NGN, les prix des équipements à maturité, la méthode retenue pour l'allocation des coûts joints, ou la manière dont une interconnexion en mode IP peut être envisagée. Néanmoins, les résultats fournis par cette modélisation sont inférieurs, voire très inférieurs, au tarif actuel pratiqué par France Télécom. En première analyse, l'Autorité estime donc que les coûts de terminaison d'appel d'un opérateur efficace utilisant la technologie NGN seront inférieurs à ce tarif.
En l'absence d'éléments plus précis sur les niveaux futurs de terminaison d'appel sur des réseaux NGN, l'évolution faite dans le prochain cycle doit être compatible avec les futurs travaux menés sur ce sujet et ne pas préempter les résultats qui en seront tirés. S'il est donc légitime d'envisager une baisse de la terminaison d'appel d'un opérateur efficace sous l'effet du progrès technique et des gains d'efficacité, il convient de limiter cette baisse aux éléments de coûts connus de l'Autorité.

IV-4.3. Obligations tarifaires imposées à France Télécom
sur les marchés de gros de la terminaison d'appel fixe
IV-4.3.1. Obligation d'orientation vers les coûts des tarifs des prestations de terminaison d'appel

L'examen de la puissance de marché de France Télécom sur les marchés de gros pertinents a montré que France Télécom dispose d'une position durable de puissance sur le marché de la terminaison d'appel vers son réseau. De plus, il a été montré que cette prestation est incontournable pour l'ensemble des opérateurs de communications électroniques en France, qui ne disposent dès lors d'aucun contre-pouvoir sur la latitude de fixation des tarifs dont dispose France Télécom. L'Autorité a également montré que France Télécom était puissante sur les marchés pertinents de détail de l'accès et le marché de gros du départ d'appel. Enfin, France Télécom est une entreprise verticalement intégrée qui intervient sur l'ensemble des marchés de détail de la téléphonie fixe et jouit sur ces marchés d'une position de leader (cf. partie « Bilan et perspective »).
L'Autorité note que l'absence d'obligation d'orientation vers les coûts pourrait permettre à France Télécom de bénéficier d'une rente liée à son monopole sur sa terminaison d'appel et sa position dominante sur le départ d'appel. Une telle rente fausserait les conditions de développement d'une concurrence équitable sur les marchés.
L'Autorité estime donc que les tarifs des prestations de terminaison d'appel de France Télécom doivent refléter les coûts. En l'absence de mesure moins contraignante qui permettrait de prévenir toute distorsion de concurrence, cette obligation est proportionnée aux objectifs de l'article L. 32-1-II du code et en particulier à l'exercice « d'une concurrence effective et loyale », au développement de la compétitivité ou encore à « l'égalité des conditions de concurrence ». Cette obligation concerne donc notamment tous les éléments de l'offre technique et tarifaire « Accès, interconnexion et service téléphonique » relatifs aux prestations de terminaison d'appel.
Dans ses décisions de régulation précédentes, l'Autorité avait imposé une obligation d'orientation vers les coûts par laquelle France Télécom était obligée de fixer des tarifs qui reflètent les coûts qu'elle avait encourus. A ce titre et en application de l'article D. 311 du CPCE, l'Autorité pouvait demander à France Télécom de justifier intégralement ses tarifs et, si nécessaire, en exiger l'adaptation.
L'obligation imposée à France Télécom pour le cycle de trois ans consécutif à l'adoption de la présente décision est également une obligation de « pratiquer des tarifs reflétant les coûts correspondants », conformément à l'article L. 38 (4°) du CPCE, mais sa modalité d'application prend dorénavant la forme d'un encadrement pluriannuel des tarifs, comme le prévoit l'article D. 311 du CPCE.
De plus, en application de ce même article D. 311 (33), la référence de coûts retenue pour définir cet encadrement pluriannuel des tarifs est celle des coûts d'un opérateur efficace.

(33) « L'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes veille à ce que les méthodes retenues prom euvent l'efficacité économique, favorisent une concurrence durable et optimisent les avantages pour le consommateur. »

IV-4.3.2. L'encadrement pluriannuel des tarifs de terminaison d'appel de France Télécom
IV-4.3.2.1. Définition de l'encadrement

La définition de l'encadrement tarifaire pluriannuel des tarifs de terminaison d'appel de France Télécom dépend de l'évaluation qui peut être faite des coûts d'un opérateur efficace, car ces tarifs sont orientés vers les coûts d'un opérateur efficace.
L'Autorité a présenté supra l'ensemble des éléments de coûts à sa disposition afin de déterminer le niveau de terminaison d'appel d'un opérateur efficace, suivant une méthodologie de coûts complets distribués. L'Autorité a montré pourquoi elle considérait que le niveau de terminaison d'appel de France Télécom en 2006 est a priori un majorant du niveau de la terminaison d'appel d'un opérateur efficace et les raisons pour lesquelles les coûts prospectifs fournis par le modèle de France Télécom ne sont pas pertinents pour être le point de référence de cette terminaison d'appel. Le modèle technico-économique utilisé par l'Autorité confirme qu'à plus long terme les coûts de fourniture de la terminaison d'appel devraient être significativement inférieurs aux tarifs actuels. Cependant, du fait d'un certain nombre d'incertitudes sur ce modèle, l'Autorité estime prématuré de retenir le niveau d'une terminaison d'appel efficace directement à partir des résultats fournis par ce modèle.
Par conséquent, le niveau que l'Autorité définit pour les coûts d'un opérateur efficace tient compte de l'ensemble de ces éléments ainsi que des éléments fournis par l'analyse des pratiques dans les autres pays européens. En particulier, l'Autorité estime qu'un opérateur efficace améliore constamment sa structure de coûts et qu'il est pertinent d'envisager que le service de terminaison d'appel puisse porter une partie de ces gains d'efficacité. A tout le moins, le niveau de la terminaison d'appel d'un opérateur efficace en 2011 est inférieur aux coûts constatés et audités pour 2006.
Pour autant, compte tenu des éléments apportés par France Télécom et des incertitudes sur le niveau de la terminaison d'appel d'un opérateur NGN, la baisse imposée ne doit pas excéder un certain niveau. Elle doit notamment continuer de rémunérer suffisamment France Télécom pour l'exploitation de son réseau.
Enfin, l'Autorité a pris en compte l'évolution prospective de la demande, des technologies et du niveau général des prix, notamment dans les modélisations qu'elle a retenues. En cas d'évolution du contexte économique exogène des terminaisons d'appel (évolution de la fiscalité ou choc macroéconomique par exemple) de nature à remettre en question les niveaux de terminaison d'appel fixés par la présente décision, l'Autorité se réserve la possibilité de revoir ces niveaux.

IV-4.3.2.2. Paramètres de l'encadrement

L'Autorité a interrogé les acteurs sur les paramètres de définition de la terminaison d'appel dans sa consultation sur les référentiels de coûts et autres éléments pertinents pour la mise en œuvre des obligations de contrôle tarifaire des prestations de terminaison d'appel et de départ d'appel sur les réseaux fixes. Les questions portaient notamment sur la nécessité ou non de préciser l'ensemble des composantes du tarif de terminaison d'appel de France Télécom ou seulement un prix moyen calculé à partir d'un panier prédéfini par l'Autorité. L'Autorité interrogeait également le secteur sur la notion de gradient horaire et sur l'importance de la composante capacité (BPN).
L'Autorité rappelle à ce propos qu'elle n'a jamais imposé la structure actuelle du tarif de terminaison d'appel de France Télécom, qui était définie par cette dernière dans le cadre de son offre de référence.
Concernant la définition d'un prix moyen, Bouygues Telecom et l'AFORST privilégient le maintien de la spécification des différentes composantes de la terminaison d'appel. Colt ne demande pas de changement de la structure tarifaire de la terminaison d'appel de France Télécom. A l'inverse, France Télécom estime que la structure d'encadrement tarifaire tirée de la décision n° 2006-0551 pour la terminaison d'appel de Neuf Telecom, c'est-à-dire la fixation d'un tarif plafond moyen, serait bien adaptée.
Par ailleurs, l'AFORST, Neuf Cegetel et Bouygues Telecom sont favorables à la suppression progressive du gradient horaire et de la charge d'établissement d'appel.
L'Autorité souscrit au point de vue de France Télécom et ne souhaite pas définir strictement les différentes composantes de la terminaison d'appel de France Télécom. Pour définir le panier moyen, il semble pertinent, dans un souci de comparabilité et de continuité, de se rapporter à la pratique adoptée notamment dans les décisions passées d'approbation de l'offre technique et tarifaire d'interconnexion de France Télécom et dans les décisions de règlement de différends, et c'est pourquoi l'Autorité considère qu'il convient de retenir les paramètres suivants à titre conventionnel :

|Remplissage de la partie fixe (min. par BPN et par an)| 2 600 000 | |:----------------------------------------------------:|:----------:| | Durée moyenne des appels |200 secondes| | Répartition du trafic : heures pleines | 60 % | | Répartition du trafic : heures creuses | 35 % | | Répartition du trafic : heures bleu-nuit | 5 % |

Les plages horaires d'application du tarif réduit (en heures creuses) retenues sont les suivantes : du lundi au vendredi, de 7 heures à 8 heures et de 19 heures à 22 heures, et les samedis, dimanches et jours fériés, de 7 heures à 22 heures. Les plages horaires d'application du tarif bleu-nuit sont de 22 heures, chaque jour, à 7 heures du jour suivant. Lorsque les plages horaires diffèrent, les pondérations sont déduites de la définition précédente au pro rata temporis (exemple : la plage horaire de 4 heures à 7 heures, soit trois heures sur les neuf heures en tarif bleu-nuit, est pondérée à 1/3 × 5 % soit 1,67 %).
Le tarif moyen inclut donc notamment les prestations de fourniture d'un bloc primaire numérique (BPN).
Les tarifs indiqués dans la section suivante doivent donc être compris comme des tarifs moyens en application des paramètres ci-dessus.
Par ailleurs, compte tenu de la pratique historique du tarif de terminaison d'appel de France Télécom, il convient d'éviter un changement imprévu et significatif de la pondération de chaque composante. A ce titre, l'Autorité impose à France Télécom l'obligation de lui notifier tout changement des poids relatifs de chaque composante de la terminaison d'appel de France Télécom, au moins trois mois avant le changement envisagé. A ce jour, l'Autorité rappelle que le tarif de terminaison d'appel de France Télécom comporte 7 composantes : BPN, charge d'établissement d'appel et prix à la minute en heures pleines, charge d'établissement d'appel et prix à la minute en heures creuses, charge d'établissement d'appel et prix à la minute en heures bleu-nuit.
Enfin, concernant l'éventualité d'une offre d'interconnexion à la capacité pour la voix, les réponses à la consultation publique (AFORST, Bouygues Telecom) se limitent à envisager la création d'une offre complémentaire à l'offre actuelle. L'Autorité pourra étudier à l'avenir, en concertation avec le secteur, l'éventualité d'une telle offre.

IV-4.3.2.3. Conclusion

Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, le prix moyen par minute des tarifs récurrents de terminaison d'appel de France Télécom ne devront pas excéder les niveaux moyens suivants :
0,45 centime d'euro par minute à compter du 1er octobre 2008 ;
0,425 centime d'euro par minute à compter du 1er octobre 2009 ;
0,4 centime d'euro par minute à compter du 1er octobre 2010.
Cette évolution correspond à une baisse par rapport au tarif en vigueur précédemment de 8,8 % en 2008, de 5,6 % en 2009 et de 5,9 % en 2010. Les modalités précises d'encadrement et de calcul de cette moyenne sont précisées dans la section IV-4.3.2.2.

IV-4.3.3. Obligation d'orientation vers les coûts des tarifs
des prestations de sélection du transporteur

En application de l'article L. 38-II du CPCE, France Télécom doit fournir les prestations nécessaires à la sélection du transporteur à des tarifs reflétant les coûts correspondants.

IV-4.4. Obligations tarifaires imposées à France Télécom
sur le marché de gros du départ d'appel fixe
IV-4.4.1. Obligation d'orientation vers les coûts des tarifs des prestations de départ d'appel

L'examen de la puissance de marché de France Télécom a montré que France Télécom dispose d'une position durable de puissance sur le marché du départ d'appel en position déterminée. De plus, il a été montré que cette prestation est incontournable pour les opérateurs de communications électroniques en France, qui ne disposent dès lors d'aucun contre-pouvoir sur la latitude de fixation des tarifs dont dispose France Télécom. L'Autorité a également montré que France Télécom était puissante sur les marchés pertinents de détail de l'accès et le marché de gros de la terminaison d'appel vers son réseau. Enfin, France Télécom est une entreprise verticalement intégrée qui intervient sur l'ensemble des marchés de détail de la téléphonie fixe et jouit sur ces marchés d'une position dominante (cf. partie « Bilan et perspectives », annexe G).
France Télécom estime que le départ d'appel ne devrait pas être orienté vers les coûts pour la sélection du transporteur hors VGAST et, concernant le départ d'appel vers les numéros SVA, que l'obligation d'interdiction des tarifs excessifs est plus adaptée que celle d'orientation vers les coûts. France Télécom rappelle que l'Autorité a décidé d'imposer une interdiction de tarifs excessifs pour les reversements liés aux numéros SVA et estime que ce remède serait également adapté, proportionné et cohérent avec les décisions antérieures, pour les prestations de départ d'appel vers les numéros SVA.
A l'inverse, l'ADRT demande que l'obligation d'orientation vers les coûts soit appliquée aux prestations connexes aux prestations d'interconnexion, et notamment à la prestation de reversement.
L'Autorité souligne tout d'abord que la prestation de départ d'appel objet de la présente analyse est une prestation d'interconnexion qui est fournie dans des conditions identiques pour les différents types de trafic (sélection du transporteur, Internet commuté ou services à valeur ajoutée). Dans ces conditions, il est logique que les obligations tarifaires imposées à France Télécom sur la prestation de départ d'appel soient homogènes, quel que soit le produit pour lequel cette prestation est sollicitée. L'Autorité note de plus que l'absence d'obligation d'orientation vers les coûts pourrait permettre à France Télécom de bénéficier d'une rente liée à sa position dominante sur le départ d'appel et à sa position sur l'ensemble des marchés de détail de la téléphonie fixe. Une telle rente fausserait les conditions de développement d'une concurrence équitable sur les marchés.
L'Autorité estime donc que les tarifs des prestations de départ d'appel de France Télécom doivent refléter les coûts. En l'absence de mesure moins contraignante qui permettrait de prévenir toute distorsion de concurrence, cette obligation est proportionnée aux objectifs de l'article L. 32-1-II du code et en particulier à l'exercice « d'une concurrence effective et loyale », au développement de la compétitivité ou encore à « l'égalité des conditions de concurrence ». Cette obligation concerne donc notamment tous les éléments de l'offre technique et tarifaire « Accès, interconnexion et service téléphonique » relatifs aux prestations de départ d'appel.

IV-4.4.2. Modalité de l'obligation d'orientation vers les coûts du départ d'appel

L'Autorité rappelle qu'aujourd'hui, les prestations de départ d'appel et de terminaison d'appel régulées sont soumises à la même régulation et facturées de manière identique par France Télécom (à l'exception de l'existence de majorations et de la possibilité de demander une interconnexion forfaitaire pour l'Internet bas débit).
Cependant, compte tenu des caractéristiques respectives des prestations de départ d'appel et de terminaison d'appel, l'Autorité estime pertinent de distinguer, pour le prochain cycle, la régulation de ces deux prestations.
France Télécom estime ainsi que « la prestation de départ d'appel, en particulier de sélection du transporteur, est une prestation fondamentalement asymétrique, produite majoritairement sur le réseau RTC [et que] son coût moyen est donc substantiellement supérieur au coût de terminaison d'appel ».
A l'inverse, Neuf Cegetel, Colt et l'AFORTS sont opposées à une régulation tarifaire différente du départ d'appel et de la terminaison d'appel. L'Aforst, en particulier, estime qu'une telle distinction contredirait le principe de neutralité technologique et ferait bénéficier France Télécom d'une rente sur des actifs déjà amortis si une référence de coûts RTC était retenue. Neuf Cegetel ne souhaite pas que l'Autorité accorde un « premium » sur le départ d'appel en le régulant par une obligation de non-excessivité. Enfin, Colt ne voit « aucune raison de différencier les tarifs de départ d'appel de ceux de terminaison d'appel ».
Bouygues Telecom distingue le départ d'appel selon qu'il est utilisé pour l'accès aux services à valeur ajoutée, auquel cas la tarification du départ d'appel doit « refléter un juste partage de la valeur du client » ou pour la sélection du transporteur. Dans ce deuxième cas, si la méthodologie d'allocation des coûts est une approche en coûts complets, Bouygues Telecom ne voit pas de raison de distinguer les tarifs de départ et de terminaison d'appel. En revanche, Bouygues Telecom estime que si une méthodologie ne prenant en compte que les coûts variables était retenue pour la terminaison d'appel, il serait nécessaire de prendre en compte le fait que le tarif de départ d'appel doit « intégrer une part de coûts fixes devant être recouvrés par l'opérateur de boucle locale ».
L'Autorité considère en effet que la prestation de terminaison d'appel relève du principe de l'accès réciproque (« two-way access ») : deux opérateurs s'achètent et se vendent mutuellement des prestations de terminaison d'appel. De plus, cette prestation, si elle est facturée à l'opérateur appelant, bénéficie également à l'utilisateur appelé (marché « biface »). A l'opposé, la prestation de départ d'appel n'est pas une prestation réciproque et ne profite, a priori, qu'à l'opérateur acheteur. Ces spécificités des prestations de départ d'appel par rapport à la terminaison d'appel appellent un traitement différencié. Ces différences pourraient effectivement être renforcées dans une vision prospective où l'approche de comptabilisation des coûts serait modifiée en matière de terminaison d'appel.
Par ailleurs, pour les produits de sélection du transporteur et d'Internet bas débit, les prestations de départ d'appel fournies par France Télécom sont aujourd'hui fondées sur des technologies RTC, sans préjudice des évolutions possibles ultérieures et, par conséquent, pour ces prestations, les références de coûts fondées sur des technologies RTC peuvent apparaître pertinentes pour définir le niveau d'un départ d'appel. Pour autant, pour le départ d'appel comme pour la terminaison d'appel, il est illégitime que les opérateurs acheteurs payent pour les inefficacités de l'opérateur vendeur et chaque prestation doit donc prendre pour référence les coûts qu'encourrait un opérateur efficace.
Enfin, si France Télécom devait encourir une baisse des volumes de terminaison d'appel qu'elle vend, les volumes de départ d'appel, pour leur part, s'effondrent brutalement depuis 2004 sous l'effet de l'abandon de l'Internet bas débit et du recul de la sélection du transporteur. Cette évolution très rapide des volumes rend difficile de prévoir les évolutions pertinentes de la tarification du départ d'appel.
C'est pourquoi l'Autorité n'impose pas d'encadrement tarifaire pluriannuel des tarifs de départ d'appel. Pour autant, le fait d'utiliser des modalités de régulation différentes n'implique pas automatiquement une différenciation tarifaire entre terminaison d'appel et départ d'appel de France Télécom.
Conformément à l'article D. 311 du CPCE, France Télécom devra donc « justifier intégralement [ses] tarifs » de départ d'appel.

IV-4.4.3. Obligation d'orientation vers les coûts des tarifs
des prestations d'interconnexion forfaitaire pour l'Internet

L'Autorité rappelle que France Télécom est tenue d'offrir des prestations d'interconnexion forfaitaire pour l'Internet au niveau des points d'interconnexion pertinents ouverts à l'interconnexion (à la date de la décision, les commutateurs d'abonnés).
L'Autorité a justifié et motivé l'imposition d'un contrôle tarifaire sur les prestations de départ d'appel, sous la forme d'une obligation de reflet des coûts.
Cette obligation concerne l'ensemble des prestations d'interconnexion pour l'accès à Internet, qu'elles soient commercialisées à la minute ou au forfait.
Par conséquent, l'Autorité estime justifié, et proportionné aux objectifs de l'article L. 32-1-II du code et en particulier à l'exercice « d'une concurrence effective et loyale », au développement de la compétitivité ou encore à « l'égalité des conditions de concurrence », d'imposer à France Télécom l'obligation de fixer des tarifs d'interconnexion forfaitaire pour l'Internet reflétant les coûts correspondants sous réserve du respect par France Télécom de son obligation de ne pas pratiquer des tarifs d'éviction.

IV-4.5. Contrôle des tarifs des prestations associées
aux prestations d'interconnexion de France Télécom
IV-4.5.1. Obligation d'orientation vers les coûts des prestations associées
de raccordements des sites d'interconnexion et d'accès

Un contrôle tarifaire doit être imposé sur les tarifs des prestations qui sont associées aux prestations d'interconnexion, et de manière cohérente au contrôle tarifaire de ces mêmes prestations. Si tel n'était pas le cas, les tarifs des prestations associées pourraient être fixés à des niveaux tels qu'ils rendraient sans objet le contrôle tarifaire imposé sur les prestations « de base ».
S'agissant plus particulièrement des prestations d'accès aux sites d'interconnexion et d'accès, l'Autorité estime raisonnable que l'opérateur acheteur ne paie qu'à hauteur des ressources utilisées.
A ce titre, la prestation de colocalisation revêt un caractère essentiel pour les opérateurs souhaitant s'interconnecter avec France Télécom, car ceux-ci sont dans l'obligation d'acheter cette prestation pour joindre les abonnés de France Télécom. En effet, les offres de liaisons d'interconnexion des opérateurs alternatifs s'appuient, au niveau le plus bas dans le réseau, sur une prestation de colocalisation achetée par l'opérateur alternatif vendant la liaison d'interconnexion.
L'Autorité constate en revanche que les prestations de liaisons de raccordement (LR) de France Télécom sont réplicables par les opérateurs alternatifs raccordés en colocalisation aux points d'interconnexion de France Télécom sous forme d'offres de liaisons d'interconnexion (LI). L'Autorité constate notamment que l'offre de colocalisation est disponible sur l'ensemble des points d'interconnexion de France Télécom et en particulier à tous les commutateurs d'abonnés. Ces offres de LI exercent une pression concurrentielle suffisante et « complète » (en ce qu'elles peuvent être offertes pour tous les points) sur la fixation du niveau des tarifs de LR de France Télécom. L'Autorité estime donc que, pour ces prestations, l'orientation des tarifs vers les coûts peut être remplacée par l'interdiction de pratiquer des tarifs excessifs ou évictifs.
France Télécom indique que, comme tous les sites d'interconnexion de France Télécom sont colocalisables, il n'y a pas lieu de distinguer la régulation des prestations de LR et d'« in-span ». L'offre d'interconnexion en ligne (dite « in-span ») offerte par France Télécom est donc réplicable par les opérateurs ayant souscrit des offres de colocalisation auprès de France Télécom. Même si ces offres d'« in-span » sont peu répandues sur le marché, il n'est plus nécessaire de maintenir une obligation d'orientation vers les coûts pour ces prestations. L'Autorité impose donc également une interdiction de pratiquer des tarifs excessifs ou évictifs sur les offres d'« in-span ».
Enfin, pour répondre à l'obligation de France Télécom de proposer une offre de sécurisation de l'acheminement des flux aux points d'interconnexion (CA notamment), celle-ci doit proposer une offre de raccordement à tous les sites d'interconnexion et d'accès utilisés (entre autres) pour la sécurisation sur laquelle pèsent les mêmes obligations que sur l'offre de raccordement aux points d'interconnexion pertinents pour les prestations d'interconnexion. En particulier, pour la sécurisation des CA, France Télécom doit proposer une offre de raccordement à tous les sites d'interconnexion et d'accès de niveau hiérarchique supérieur (centres de transit).
L'Autorité, au regard des mêmes objectifs que ceux poursuivis pour les prestations de départ d'appel et de terminaison d'appel, impose donc à France Télécom l'obligation de fixer des tarifs reflétant les coûts pour ces prestations associées, à l'exception de l'offre de liaison de raccordement et de l'offre d'« in-span » pour lesquelles elle impose l'interdiction de pratiquer des tarifs excessifs ou évictifs.

IV-4.5.2. Interdiction de pratiquer des tarifs excessifs pour la prestation de reversement

L'Autorité a précisé dans sa décision n° 2007-0213 de régulation symétrique en date du 16 avril 2007 que la commercialisation des SVA repose sur une règle de reversement qui détermine un partage raisonnable de la rémunération entre l'opérateur de boucle locale fixe et l'exploitant du numéro SVA.
Un niveau de partage raisonnable s'entend comme un partage reflétant le fait que le service est fourni à l'appelant conjointement par l'opérateur départ et par l'éditeur de contenu. Il est donc le fruit d'une négociation entre les parties et doit constituer une répartition juste de la valeur ajoutée.
L'ADRT conteste l'imposition de l'obligation d'interdiction de pratiquer des tarifs excessifs pour la prestation associée de reversement et souhaite que cette prestation soit orientée vers les coûts.
Selon l'Autorité, une obligation de pratiquer des tarifs orientés vers les coûts serait peu appropriée compte tenu des prestations variées, de nature essentiellement commerciale, qui, au-delà du simple acheminement d'une communication électronique en départ d'appel vers des numéros de SVA sont celles attachées aux modalités de commercialisation (i.e. facturation, encaissement, recouvrement, publication des tarifs associés à sa grille tarifaire, relation clientèle dont la gestion des réclamations et reversement d'une partie des sommes perçues à l'exploitant du numéro SVA).
A l'inverse, compte tenu de la coopération nécessaire entre l'OBL et le fournisseur de service pour délivrer les services à valeur ajoutée, il apparaît peu justifié de contraindre seulement l'une des parties à cette coopération par l'obligation de fournir sa participation à des prix « orientés vers les coûts ».
Comme dans sa décision de régulation asymétrique n° 2007-0667 en date du 6 septembre 2007, l'Autorité estime donc qu'il est proportionné d'imposer à France Télécom une obligation de pratiquer des tarifs non excessifs sur les taux de rétention de sa prestation de reversement complétant l'obligation de tarifs raisonnables imposée par la décision n° 2007-0213 aux offres de reversement des opérateurs départ pour les communications à destination des SVA. Ainsi ce tarif, qui doit refléter équitablement l'apport de chaque acteur dans la création de valeur ajoutée, ne doit pas être excessif dans le cas de France Télécom, du fait de sa situation particulière.
De plus, comme elle l'avait fait en 2007, l'Autorité considère que le caractère non excessif peut être notamment évalué à l'aune du niveau des taux habituellement appliqués sur le marché français mais également de comparaisons internationales pour des prestations comparables mais que cette dernière possibilité est considérablement limitée par l'existence de fortes adhérences aux contextes juridiques et économiques nationaux (5), qui rend difficile et limite la pertinence des comparaisons internationales. Une entreprise telle que France Télécom qui exerce une influence significative sur le marché de gros du départ d'appel et sur les marchés de détail de l'accès, est réputée pratiquer des tarifs excessifs notamment lorsqu'elle utilise sa puissance de marché pour élever ses prix significativement au-dessus de ses coûts sans rapport avec sa contribution dans la création de valeur ajoutée liée à la commercialisation des SVA. Les profits dégagés sont alors supérieurs à ce qui serait attendu sur un marché concurrentiel et permettent la constitution d'une rente pour l'opérateur puissant, au détriment de l'utilisateur final ou de la concurrence sur d'autres marchés.
Cette obligation est donc proportionnée aux objectifs de l'article L. 32-1-II du CPCE et en particulier à l'exercice « d'une concurrence effective et loyale », au développement de la compétitivité ou encore à « l'égalité des conditions de concurrence ».

IV-4.6. Obligations comptables imposées à France Télécom

L'obligation d'orientation des tarifs vers les coûts d'un opérateur efficace imposée à France Télécom permet d'éviter qu'elle profite d'une situation monopolistique sur la terminaison d'appel et dominante sur le départ d'appel pour en tirer une rente. La mise en œuvre de cette obligation est associée à l'imposition de l'obligation de comptabilisation des coûts, qui après spécification des règles, permet à l'Autorité de développer un référentiel de coûts robuste de France Télécom et, en se dotant d'un outil de modélisation complémentaire, d'apprécier son efficacité.
En effet, l'article L. 38-I (5°) du code des postes et des communications électroniques précise que « les opérateurs réputés exercer une influence significative sur un marché du secteur des télécommunications électroniques peuvent se voir imposer, [...] [d'] isoler sur le plan comptable certaines activités en matière d'interconnexion ou d'accès, ou tenir une comptabilité des services et des activités qui permette de vérifier le respect des obligations imposées au titre du présent article ».
Le caractère intégré et le positionnement de France Télécom sur les marchés des communications électroniques peuvent se traduire par des distorsions discriminatoires sur les marchés de gros et de détail, qui peuvent être mis sous surveillance grâce notamment à l'imposition sur les marchés de gros d'une obligation de séparation comptable.
L'obligation de séparation comptable est proportionnée aux objectifs fixés à l'article L. 32-1 du code des postes et des communications électroniques, et en particulier les 2°, 3° et 4°. Cette obligation constitue le minimum nécessaire pour s'assurer notamment de l'absence de subventions croisées.
Les modalités de mise en œuvre de l'obligation de séparation comptable ont été précisées dans la décision n° 2006-1007 en date du 7 décembre 2006 portant sur les obligations de comptabilisation des coûts et de séparation comptable imposées à France Télécom. L'Autorité estime qu'il convient de maintenir les dispositions prévues par la décision n° 2006-1007 concernant les marchés de la téléphonie fixe sur la période d'application de la présente décision, sans préjudice de toute décision ultérieure.
Au titre des obligations de séparation comptable et de comptabilisation des coûts imposées au niveau des marchés de l'accès et de l'interconnexion, la décision n° 2006-1007 impose à France Télécom de produire des comptes relatifs aux marchés de détail situés en aval, c'est-à-dire les marchés de détail de l'accès et les marchés de détail des communications. L'Autorité explicite les modalités de ces restitutions dans la section IV-5.2.2.2 du présent document.
Par ailleurs, la décision n° 2007-0667 en date du 6 septembre 2007 a étendu les obligations de séparation comptable et de comptabilisation des coûts pesant sur France Télécom à son offre de reversement, laquelle constitue une prestation associée aux prestations du marché du départ d'appel, déjà soumis à cette obligation. Cette extension demeure justifiée et proportionnée dans le cadre de la présente analyse de marché.

IV-4.7. Obligations imposées aux autres opérateurs
que France Télécom sur le marché de gros de la terminaison d'appel fixe
IV-4.7.1. Interdiction de pratiquer des tarifs excessifs
pour les prestations de terminaison d'appel

L'article 13 de la directive « Accès » ainsi que l'article L. 38-I (4°) du CPCE prévoient que l'Autorité peut imposer à un opérateur disposant d'une influence significative différentes obligations visant à assurer le contrôle des prix des offres d'accès et d'interconnexion, y compris l'obligation pour les tarifs de refléter les coûts.
Comme cela a été démontré précédemment, les prestations de terminaison d'appel fixe vers les réseaux alternatifs ont une importance particulière du fait des risques de distorsion concurrentielle qu'elles emportent et des volumes croissants terminant sur les réseaux alternatifs.
Il est donc nécessaire d'imposer une régulation tarifaire aux opérateurs alternatifs sur leurs prestations de terminaison d'appel, ainsi que, et de manière cohérente, sur les prestations qui leur sont associées. Si tel n'était pas le cas, les tarifs des prestations associées pourraient être fixés à des niveaux tels qu'ils rendraient sans objet le contrôle tarifaire imposé sur les prestations « de base ».
L'Autorité estime toutefois justifié de limiter les obligations imposées aux opérateurs fixes de boucle locale alternatifs en matière de contrôle des prix à celle de « ne pas pratiquer de tarifs excessifs ». Elle distingue ainsi la régulation de l'opérateur historique France Télécom sur le marché de sa terminaison d'appel fixe par rapport à celle imposée aux OBL.
En effet, même si la concurrence sur les accès par les alternatifs se développe, à l'horizon de la présente analyse, la part de marché d'accès de France Télécom reste très supérieure à celle de tous ses concurrents. Ainsi, le poids de la terminaison d'appel d'un tel opérateur sur le modèle économique des opérateurs tiers, et notamment sur celui de France Télécom, reste encore relativement limité.
De plus, l'imposition d'une obligation d'orientation vers les coûts aurait un caractère disproportionné pour les opérateurs alternatifs compte tenu des obligations comptables qui y seraient associées.
Ainsi l'Autorité estime-t-elle que, concernant la terminaison d'appel d'un opérateur alternatif, un tarif ne reflétant pas les coûts, mais soumis à une obligation de non-excessivité, ne pourrait contraindre la capacité des opérateurs tiers à proposer des offres globales compétitives.
L'Autorité estime donc proportionné aux objectifs de concurrence loyale et effective recherchés de différencier les obligations tarifaires imposées à France Télécom de celles imposées aux opérateurs alternatifs, en imposant à France Télécom de fixer des tarifs reflétant les coûts, tout en limitant la contrainte tarifaire des opérateurs alternatifs à une interdiction de fixer des tarifs excessifs.
En conséquence, l'Autorité impose aux opérateurs de boucle locale alternatifs en matière de contrôle des tarifs l'obligation de ne pas pratiquer de tarifs excessifs. Elle est proportionnée aux objectifs fixés à l'article L. 32-1-II précités et en particulier les 2°, 3° et 4°.

IV-4.7.2. Modalité du contrôle tarifaire des tarifs d'interconnexion des opérateurs alternatifs
IV-4.7.2.1. Définition du contrôle

Comme l'Autorité l'a indiqué supra, il est nécessaire de mettre en œuvre une réduction des écarts existants sur le tarif des terminaisons d'appel fixe. L'imposition d'une interdiction de pratiquer des tarifs excessifs pour la terminaison d'appel des opérateurs alternatifs permet de mettre en œuvre ce principe.
En effet, l'appréciation de la non-excessivité d'un tarif de TA doit tenir compte :
― des coûts pertinents d'un opérateur efficace pour la fourniture de la prestation de TA ;
― de l'écart entre ce tarif et les tarifs pratiqués par les autres opérateurs et en particulier France Télécom (dont la prestation de TA est orientée vers les coûts d'un opérateur efficace) et des risques de distorsion concurrentielle que cet écart implique ;
― des effets de cet écart sur les marchés de détail, notamment pour les consommateurs.
Les éléments de coûts que l'Autorité retiendra pour apprécier le caractère non excessif de la terminaison d'appel des alternatifs sont les mêmes que les éléments retenus pour déterminer l'encadrement pluriannuel des tarifs de la terminaison d'appel de France Télécom. En effet, en application de l'article D. 311 du CPCE, « l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes veille à ce que les méthodes retenues [pour la tarification et la comptabilisation des coûts] promeuvent l'efficacité économique, [...] ». La référence de coûts d'un opérateur efficace définie pour déterminer l'encadrement tarifaire pluriannuel de la terminaison d'appel de France Télécom est donc également la référence de coûts pertinente pour les opérateurs alternatifs. Cette référence est pertinente pour les opérateurs alternatifs de portée nationale comme pour les opérateurs alternatifs qui ciblent un marché de détail et/ou une zone géographique particulière car, comme l'Autorité l'a indiqué, ces paramètres ne constituent pas des éléments justifiant des asymétries différenciées et de long terme.
Par ailleurs, la non-excessivité d'un tarif de terminaison se fonde aussi sur les risques potentiels de distorsion découlant des différences entre les tarifs des terminaisons d'appel des différents opérateurs. Des distorsions dues à un écart trop important entre deux terminaisons d'appel peuvent notamment affecter le bon fonctionnement de certains marchés de détail.
Enfin, des écarts de terminaison d'appel trop importants peuvent entraîner d'autres problèmes sur les marchés de détail, comme la différenciation des tarifs de détail en fonction de la TA pratiquée par l'opérateur de destination, ce qui dégrade la lisibilité des tarifs pour les consommateurs.
L'Autorité a toujours tenu compte de l'ensemble de ces éléments pour fixer les niveaux de terminaisons d'appel des opérateurs sur lesquels pesait une interdiction de pratiquer des tarifs excessifs mais les raisons qui ont justifié des asymétries de TA par le passé (date d'entrée sur le marché et prise en compte de risques supplémentaires pour les opérateurs alternatifs notamment) perdent de leur pertinence avec le temps alors que les problèmes concurrentiels créés par les écarts de TA demeurent. C'est pourquoi l'Autorité a toujours indiqué que les écarts de tarifs de terminaison d'appel qu'elle autorisait les opérateurs alternatifs à pratiquer ne l'étaient que de manière transitoire. Cette transition doit maintenant être définie pour faire converger les TA des opérateurs alternatifs vers le niveau de la terminaison d'appel d'un opérateur efficace. L'opérateur historique étant soumis à une obligation d'orientation vers les coûts d'un opérateur efficace, il en découle que l'écart de terminaison d'appel entre opérateurs alternatifs et historique doit disparaître à l'issue d'une période de transition de quelques années et que les niveaux s'égalisent sur celui d'un tel opérateur efficace.
En ce sens, l'appréciation de la non-excessivité suit une approche similaire tant pour la terminaison d'appel vocal mobile que pour la terminaison d'appel fixe.
L'Autorité constate que la plupart des acteurs (34) reconnaissent que la symétrie des terminaisons d'appel doit, à terme, être atteinte. En particulier, l'Autorité relève que l'AFORTS affirme que les effets qu'elle a identifiés pour justifier le maintien d'une asymétrie transitoire « sont naturellement destinés à s'amoindrir dans le temps ».
L'Autorité constate que la grande majorité des opérateurs alternatifs pratiquent aujourd'hui une terminaison d'appel à 1,088 centime d'euro par minute, soit le tarif plafond défini dans le cadre du règlement de différend ayant opposé les sociétés France Télécom et Neuf Telecom (35) en 2006. Ce tarif, défini au cas d'espèce en 2006, n'a presque pas évolué depuis (1,11 centime d'euro par minute jusqu'au 31 décembre 2006 également selon la décision de règlement de différend, 1,088 centime d'euro par minute du 1er janvier 2007 au 1er septembre 2008) alors que le tarif de France Télécom baissait d'environ 10 % au 1er janvier 2008 à 0,49 centime d'euro par minute.
En cela, l'Autorité estime que les tarifs de terminaison d'appel des opérateurs alternatifs doivent baisser dans un délai rapproché en application de la présente décision.
A ce sujet, France Télécom estime que l'Autorité « devrait établir des niveaux de terminaison d'appel symétriques dès le premier jour de l'entrée en vigueur de l'analyse de marché » compte tenu des effets d'une terminaison d'appel asymétrique sur le marché. A l'inverse, l'AFORTS et Neuf Cegetel évaluent à six ans la période à l'issue de laquelle la symétrie des terminaisons d'appel doit être achevée. Cette durée est, selon l'AFORTS, « cohérente avec d'une part l'amortissement des équipements, et d'autre part l'atteinte de véritables effets d'échelle par les opérateurs alternatifs ».
L'Autorité estime qu'il n'est pas pertinent que l'écart entre la terminaison d'appel de France Télécom et celle des alternatifs soit annulé de façon immédiate. En effet, les facteurs qui ont justifié une asymétrie des terminaisons d'appel (et notamment la date d'entrée sur le marché ou la prise en compte de risques supplémentaires pour les opérateurs alternatifs) ne disparaissent pas à l'occasion de l'analyse des marchés de l'Autorité : une période de transition doit être définie. D'ores et déjà, une baisse au début du cycle permettra de réduire les risques de distorsion concurrentielle et de limiter les éventuelles rentes perçues par les opérateurs alternatifs. De plus, il est nécessaire de donner aux opérateurs suffisamment de visibilité sur leurs revenus et charges d'interconnexion et de ne pas remettre en cause leurs stratégies d'investissement.

(34) Parmi les réponses à la consultation publique sur les référentiels de coûts et autres éléments pertinents pour la mise en œuvre des obligations de contrôle tarifaire des prestations de terminaison d'appel et de départ d'appel sur les réseaux fixes, seule celle de Bouygues Telecom conteste l'objectif de symétrie tout en adhérant au principe d'efficacité retenu par l'Autorité. (35) Décision n° 2006-0551 de l'ARCEP en date du 30 mai 2006 se prononçant sur un différend opposant les sociétés France Télécom et Neuf Telecom.

IV-4.7.2.2. Paramètres du contrôle

Comme pour la terminaison d'appel de France Télécom, l'Autorité a interrogé le secteur, dans sa consultation publique, sur les paramètres de définition des terminaisons d'appel des opérateurs alternatifs. Il ressort de cette consultation que les opérateurs privilégient une approche par prix moyen. L'Autorité estime donc que les tarifs définis dans la section suivante s'entendent comme des prix moyens selon un panier identique au panier utilisé pour la terminaison d'appel de France Télécom et défini dans la section IV-4.3.2.2.

IV-4.7.2.3. Conclusion

Au vu de l'ensemble des éléments exposés précédemment, pour respecter l'obligation de non excessivité, le tarif de terminaison d'appel d'un opérateur alternatif devrait respecter les conditions suivantes :
― à compter du 1er octobre 2008, le prix moyen de la terminaison d'appel d'un opérateur alternatif ne devrait pas excéder 0,9 centime d'euro par minute ;
― à compter du 1er octobre 2009, le prix moyen de la terminaison d'appel d'un opérateur alternatif ne devrait pas excéder 0,7 centime d'euro par minute ;
― à compter du 1er octobre 2010, le prix moyen de la terminaison d'appel d'un opérateur alternatif ne devrait pas excéder 0,5 centime d'euro par minute ;
Ces évolutions représenteraient des baisses respectives de 17,3 % (36), 22,2 % et 28,6 %.
De plus, à l'issue du cycle d'analyse de marchés, l'écart entre la terminaison d'appel de France Télécom et celle des alternatifs serait de 0,1 centime d'euro, soit un montant six fois inférieur à l'écart actuel.

(36) Par rapport au prix généralement pratiqué aujourd'hui de 1,088 centime d'euro par minute.

IV-4.8. Observations de la Commission européenne

La Commission européenne invite l'ARCEP à prendre en compte dans ses décisions futures l'approche commune qui sera définie à l'échelon européen concernant la comptabilisation des coûts d'un opérateur efficace et la mise en œuvre de la symétrie des terminaisons d'appel.

IV-5. Obligations sur les marchés de détail de l'accès

Dans l'esprit du nouveau cadre européen et conformément au I de l'article L. 38-1, l'Autorité privilégie une régulation via les marchés de gros. Seul le caractère insuffisant ou le délai nécessaire à son efficacité peuvent conduire l'Autorité à envisager une régulation spécifique des marchés de détail pour atteindre l'objectif poursuivi.
La recommandation « marchés pertinents » de la Commission européenne et l'article 17 de la directive « service universel » prévoient ainsi que des obligations peuvent être imposées à une entreprise puissante sur un marché de détail si les obligations imposées en conformité avec la directive « accès » et les dispositions relatives à la sélection du transporteur ne permettent pas de réaliser les objectifs poursuivis par la régulation, contrainte transposée par l'article L. 38-1 du CPCE. Dans sa nouvelle recommandation, la Commission européenne précise : « Retail regulation can only be justified if, with all regulatory remedies in place on wholesale markets including Carrier Selection and Carrier Pre-Selection, (including wholesale line rental where appropriate), there remains a lack of effective competition at the retail level ».
Après un court rappel du contexte concurrentiel et des remèdes appliqués sur les marchés de gros (IV-5.1), l'Autorité présente et justifie le nouveau dispositif réglementaire appliqué aux marchés de détail de l'accès résidentiel (IV-5.2) et non résidentiel (IV-5.3).

IV-5.1. Contexte concurrentiel et remèdes imposés sur les marchés amont

Le nouveau contexte concurrentiel en vigueur sur les marchés de la téléphonie fixe a été décrit dans la partie « Bilan et perspectives ». Depuis 2005, et la précédente analyse de ces marchés, la situation a nettement évolué. D'une part les parts de marché des opérateurs alternatifs proposant des offres basées sur la sélection du transporteur, la VGAST ou encore le raccordement direct pour la clientèle non résidentielle ont continué de croître. D'autre part, le marché a connu l'apparition puis la croissance des offres d'accès comprenant des services de voix sur large bande qui, bien que celles-ci ne constituent pas de réels substituts aux offres d'accès principalement dédiées à la téléphonie, exercent une pression concurrentielle sur les offres de téléphonie classique.
Parallèlement à cette évolution des marchés de détail, les offres de gros ont gagné en maturité. L'offre de VGAST a été crée en 2006. Les autres offres de gros, telles que le dégroupage et la sélection du transporteur, ont pu être ajustées et leur fonctionnement, bien qu'il continue de faire l'objet de travaux réguliers, peut globalement être considéré comme satisfaisant.
L'Autorité a estimé, lors de l'analyse de la pertinence des marchés de détail de l'accès que lesdits marchés devaient être régulés ex ante étant donné que, toute régulation de la téléphonie fixe mise à part, il continuait d'exister des barrières importantes à leurs entrées. Puis, au vu de la situation sur ces marchés, l'Autorité a imposé à France Télécom de continuer de commercialiser les offres de gros de VGAST et de sélection du transporteur. Or, l'Autorité considère que l'existence de ces remèdes de gros, et en particulier de l'offre VGAST a pour effet de rendre faibles les barrières à l'entrée des marchés de l'accès. Dès lors, il ne semble plus justifié ni proportionné d'imposer des obligations supplémentaires à France Télécom directement sur ces marchés de détail. Afin d'appuyer davantage encore le bien-fondé de la suppression des autres remèdes de détail, l'Autorité explique infra pourquoi chaque obligation n'est plus nécessaire.
Par ailleurs, l'Autorité a imposé à France Télécom, sur les marchés de gros, une obligation de communication pour information des offres de détail d'accès et de communications de France Télécom. Cette obligation est appliquée afin de permettre à l'Autorité de continuer de vérifier que les offres de gros disponibles sont bien adaptées au marché, au vu des offres commercialisées sur les marchés de détail.

IV-5.2. Marché résidentiel de l'accès au service téléphonique

Sur les marchés résidentiels, les remèdes définis dans la décision n° 2005-0571 ont été revus avant la fin du premier cycle d'analyse des marchés. Une première décision d'allégement de la régulation est intervenue en septembre 2006 (37), retirant la plupart des obligations imposées sur les marchés de détail des communications. Une seconde décision a été adoptée l'année suivante (38) pour supprimer les mêmes obligations sur les marchés de détail de l'accès.
L'Autorité présente dans un premier temps les obligations ayant fait l'objet d'une suppression anticipée (a), puis celles qui ont continué d'être imposées jusqu'au terme du premier cycle d'analyse des marchés (b).

(37) Décision n° 2006-0840 de l'Autorité en date du 28 septembre 2006. (38) Décision n° 2007-0636 de l'Autorité en date du 26 juillet 2007.

IV-5.2.1. Les obligations supprimées au cours du premier cycle d'analyse des marchés

L'interdiction de pratiquer des couplages abusifs, l'interdiction de pratiquer des tarifs excessifs, l'interdiction de pratiquer des tarifs d'éviction ainsi que l'obligation de communication préalable ont été supprimées au cours du premier cycle d'analyse des marchés sur les marchés résidentiels des communications puis de l'accès.

IV-5.2.1.1. L'interdiction de pratiquer des couplages abusifs

La décision n° 2005-0571 stipulait que le lien de couplage entre deux offres pouvait être d'ordre tarifaire, contractuel ou technique ; il renvoie aux ventes liées désignant l'association d'une offre en monopole ou en quasi-monopole et d'une offre concurrentielle, avec un rabais éventuel. Un couplage n'est pas abusif en soi, il le devient s'il ne comporte aucune justification objective, s'il constitue un obstacle à la commercialisation d'offres concurrentes, ou s'il porte atteinte aux intérêts des clients. Un couplage abusif peut conduire à limiter la demande dont peuvent bénéficier les concurrents, ou à augmenter le coût de l'entrée sur le marché, ce qui peut la rendre impossible.
Sur les marchés de détail de la téléphonie fixe, la vente liée de l'accès au réseau téléphonique public et des communications fixes qui y sont associées a longtemps constitué le risque majeur de couplage abusif par France Télécom. Depuis la création de la VGAST, qui donne la possibilité aux opérateurs alternatifs de répliquer ce type d'offre, ce couplage n'est plus abusif dès lors que son niveau tarifaire permet à un opérateur alternatif efficace de le répliquer en recouvrant ses coûts. Or, le droit commun de la concurrence ne permet pas à France Télécom de commercialiser une offre de détail couplant accès et communications qui n'est pas réplicable économiquement par un opérateur alternatif efficace achetant la VGAST. Les opérateurs seraient donc en droit de saisir le Conseil de la concurrence de la création d'une telle offre.
L'Autorité estime donc qu'il n'est pas nécessaire d'imposer à nouveau à France Télécom l'interdiction de pratiquer des couplages abusifs sur le marché de détail résidentiel de l'accès.

IV-5.2.1.2. L'interdiction de pratiquer des tarifs excessifs

Une entreprise est réputée pratiquer des tarifs excessifs notamment lorsqu'elle utilise sa puissance de marché pour élever ses prix significativement au-dessus de ses coûts, ou des coûts d'un opérateur efficace. Les profits dégagés sont alors supérieurs à ce qui serait attendu sur un marché concurrentiel et permettent la constitution d'une rente pour l'opérateur puissant, au détriment de l'utilisateur final ou de la concurrence sur d'autres marchés.
Le risque actuel que France Télécom pratique des tarifs excessifs apparaît faible. La pression concurrentielle croissante sur le marché des services téléphoniques résidentiels diminue fortement le risque d'une tarification excessive par France Télécom sur ce marché. L'existence des offres de gros de sélection du transporteur et de VGAST permettent aux opérateurs alternatifs de proposer leurs offres à l'ensemble des usagers qui ne sont donc plus captifs de l'opérateur historique.
Par ailleurs, sur le marché résidentiel, l'ensemble de prestations relevant du service universel, et notamment le tarif de l'abonnement principal, constitue un plafond pour les tarifs de France Télécom. Or, sur les prestations relevant du service universel, France Télécom est tenue, d'après l'article L. 35-1 du CPCE, de fournir à tous « un service téléphonique de qualité à un prix abordable ».
L'obligation pour France Télécom de ne pas pratiquer de tarifs excessifs peut donc ne pas être à nouveau imposée sur le marché résidentiel de l'accès.

IV-5.2.1.3. L'interdiction de pratiquer des tarifs d'éviction

Une prestation peut être considérée commercialisée à des tarifs d'éviction lorsqu'elle n'est pas réplicable économiquement par des concurrents aussi efficaces que l'opérateur puissant ou par des concurrents raisonnablement efficaces. Les concurrents d'un opérateur pratiquant des prix d'éviction sont victimes d'un effet de ciseaux tarifaire par lequel les coûts des prestations de gros sous-tendant la fourniture d'une prestation de détail sont trop élevés pour maintenir un espace économique viable ; ils sont alors expulsés du marché de détail, ou maintenus hors de ce marché.
L'Autorité a publié en mars 2006 une modélisation des coûts de fourniture des communications téléphoniques par un opérateur alternatif efficace. Ce modèle, qui comprend à ce jour les appels locaux, interurbains et vers les mobiles métropolitains, sera complété et régulièrement mis à jour compte tenu des évolutions du secteur par l'Autorité. Les concurrents de France Télécom pourront s'appuyer sur cette modélisation et sur les tarifs de la VGAST pour juger du niveau de ses tarifs pour les offres couplant accès et communications et saisir le Conseil de la concurrence dans le cas où l'opérateur historique proposerait des tarifs engendrant un effet de ciseaux tarifaire.
L'imposition à France Télécom d'une interdiction de pratiquer des tarifs d'éviction peut donc être supprimée sur les marchés de détail des accès au service téléphonique résidentiel.

IV-5.2.1.4. L'obligation de communication préalable

Dans la décision n° 2005-0571, France Télécom a été soumise à une obligation de communication préalable de ses tarifs. Les tarifs des prestations comprises dans le champ de l'article 29 de la décision n° 2005-0571 étaient soumis à communication préalable selon les dispositions dudit article.
Dans la présente décision, l'Autorité a en effet estimé que « la simple imposition de l'obligation de non-discrimination et des interdictions de couplages abusifs, de prix excessifs et de prix d'éviction n'est pas suffisante pour que ces obligations soient systématiquement mises en œuvre par France Télécom. En l'absence d'une procédure de communication préalable, il est probable que France Télécom commercialiserait des prestations qui pourraient ne pas respecter les obligations imposées par l'Autorité, et qu'il faudrait attendre l'issue d'une procédure de sanction pour que France Télécom retire ou modifie ces offres, au détriment des acteurs du secteur et des consommateurs. »
Dès lors que les interdictions de couplages abusifs, de prix excessifs et de prix d'éviction ont été levées sur les marchés résidentiels des communications électroniques et l'Autorité ayant publié une modélisation des coûts d'un opérateur alternatif efficace pour la fourniture de communications, la communication préalable des tarifs des prestations relevant de ces marchés n'était plus justifiée, et ce d'autant que le droit commun de la concurrence continue de s'appliquer.
Puisque les obligations dont la communication préalable servait à vérifier le respect ne sont plus imposées à France Télécom, il n'est pas justifié d'imposer à nouveau la communication préalable à France Télécom.

IV-5.2.2. Les obligations n'ayant pas été supprimées
au cours du premier cycle d'analyse des marchés

Dans les décisions qu'elle a adoptées en 2006 puis 2007 afin d'alléger la régulation appliquée aux marchés de détail résidentiels, l'Autorité a estimé qu'il convenait de maintenir l'interdiction des pratiques discriminatoires ainsi que l'obligation de comptabilisation des activités et services de détail.

IV-5.2.2.1. La proscription de pratiques discriminatoires

L'Autorité rappelait dans sa décision n° 2005-0571 qu'il existait à l'époque un risque de pratiques discriminatoires sur les marchés des communications fixes, où l'opérateur historique a détenu initialement une position de monopole. En effet, la position de l'opérateur historique sur le marché pouvait être menacée tout d'abord par les actions des concurrents qui ciblent les clients les plus rentables et/ou les plus disponibles pour changer d'opérateur. En réponse, l'opérateur puissant pouvait alors recourir à des pratiques discriminatoires pour exercer une politique de fidélisation de sa clientèle, particulièrement ciblée sur ces catégories de clients, et de la même manière avoir une politique particulièrement ciblée de reconquête des clients perdus.
L'Autorité a estimé lors des allégements de la régulation des marchés de détail résidentiels qu'il convenait de maintenir l'obligation de non-discrimination, en précisant que la pertinence de ce maintien serait réexaminée.
L'Autorité considère aujourd'hui qu'il convient de supprimer cette obligation. En effet, les risques auxquels répondent un tel remède sont d'une part des tarifs très bas dans les zones où la concurrence est la plus forte et d'autre part des tarifs rehaussés dans les zones où la clientèle est la plus captive. Or, France Télécom ne peut pratiquer des tarifs trop agressifs dans les zones où la concurrence est le plus intense sans contrevenir au droit commun de la concurrence qui interdit la mise en œuvre de tarifs d'éviction. Par ailleurs, dans le cas où France Télécom déciderait d'augmenter sensiblement les tarifs de ses prestations, l'ensemble des clients, y compris les clients les plus captifs, auraient la possibilité de migrer vers les offres des opérateurs alternatifs, notamment celles en sélection du transporteur ou en VGAST qui sont accessibles à tous. Enfin, sur le marché résidentiel, le service universel garantit l'existence d'un service téléphonique à des tarifs abordables.
L'imposition à France Télécom de l'interdiction de pratiquer des discriminations peut donc être supprimée sur les marchés de détail de l'accès au service téléphonique résidentiel.

IV-5.2.2.2. L'obligation de comptabilisation des activités et services

L'obligation de comptabilisation des activités et services est définie par l'article L. 38-1 du CPCE comme une obligation visant à permettre de vérifier le respect des autres obligations imposées au titre dudit article. L'Autorité ayant décidé supra de ne plus imposer d'autre obligation à France Télécom sur les marchés de détail au titre de cet article, l'imposition de cette obligation n'est plus justifiée. Ainsi, l'article 27 de la décision n° 2006-1007 de l'Autorité relative à la séparation comptable et aux obligations de comptabilisation des coûts ne s'appliquera plus à France Télécom sur les marchés de détail de l'accès.
Néanmoins, l'Autorité rappelle que les articles 18 et 20 de la décision n° 2006-1007 continuent de s'appliquer, au titre de l'obligation de séparation comptable qui demeure sur les marchés de l'accès et de l'interconnexion, et imposent notamment à France Télécom de produire certaines restitutions concernant les marchés de détail, lesquelles sont destinées à vérifier que les obligations imposées sur les marchés de gros amont sont effectivement mises en œuvre. Il est en particulier nécessaire de s'assurer que des offres de détail en aval de marchés de gros sur lesquels une obligation de séparation comptable a été imposée sont effectivement établies en recourant aux protocoles pertinents.
Ainsi, l'article 18 de la décision n° 2006-1007 impose à France Télécom « de produire un compte séparé et un état du capital immobilisé par marché de gros où l'obligation de séparation comptable s'applique et par marché de détail où France Télécom a été déclarée puissante [...] ». France Télécom est par conséquent tenue, au titre des obligations de séparation comptable, de continuer de publier des comptes séparés correspondant à chaque gamme d'offre incluse dans chacun des deux marchés de détail de l'accès.
Par ailleurs, l'article 20 de la même décision précise que « lorsque des offres de détail de France Télécom reposent sur des protocoles d'approvisionnement en offres de gros sans toutefois appartenir à un marché de détail pertinent défini par les analyses de marché de l'Autorité et sur lequel France Télécom aurait été déclarée puissante, celle-ci doit produire un compte séparé et un état du capital immobilisé selon un périmètre permettant de vérifier le respect de l'obligation de non-discrimination et l'absence de subventions croisées abusives et cohérent avec les principes du droit de la concurrence ». L'Autorité note donc que dans le cas où elle déclarerait les marchés de détail des communications non pertinents pour l'application d'une régulation ex ante, France Télécom serait tout de même encore dans l'obligation de lui fournir des comptes séparés relatifs aux prestations de ces marchés, selon des périmètres cohérents avec les principes du droit de la concurrence. En pratique, l'Autorité estime qu'il conviendrait d'effectuer cet exercice sur une partition de l'ensemble des offres de détail de communications semblable à celle définit lors du premier cycle d'analyse des marchés : un marché des communications nationales et un marché des communications internationales, pour la clientèle résidentielle d'une part et la clientèle non résidentielle d'autre part. Les restitutions établies au titre de l'article 20 ne donnent pas lieu à publication, contrairement à celles prévues par l'article 18 de la décision n° 2006-1007.
L'Autorité a indiqué dans la partie IV-4.4.5 qu'elle prolongeait l'application de la décision n° 2006-1007 aux marchés de la téléphonie fixe jusqu'à la fin de sa période de validité, c'est-à-dire jusqu'au 1er septembre 2009.

IV-5.3. Marché non résidentiel de l'accès au service téléphonique

Au cours du premier cycle d'analyse des marchés, l'Autorité a décidé de n'appliquer d'allégement qu'à la régulation des marchés de détail résidentiels. La régulation des marchés non résidentiels a été prolongée du fait de l'enjeu de la qualité de service sur ces marchés.

IV-5.3.1. L'enjeu de la qualité de service

En 2006 puis 2007, l'Autorité a décidé de n'appliquer ses allégements de la régulation des marchés de détail qu'aux seuls marchés résidentiels. Cette décision était motivée principalement par le fait que la question de la qualité de service des offres de gros constitue un enjeu particulièrement important sur les offres professionnelles. Il est en effet essentiel pour les opérateurs alternatifs de pouvoir concurrencer les offres de détail professionnelles d'Orange Business Services non seulement aux niveaux technique et tarifaire, mais aussi sur des engagements de qualité de service, qui peuvent constituer des éléments discriminants lors des procédures d'appels d'offres.
L'Autorité a dressé un bilan de la qualité de service des offres de gros de France Télécom pour le haut débit, les services de capacité et la sélection du transporteur. Il en ressort que des difficultés opérationnelles ont été régulièrement soulevées par les opérateurs alternatifs ces dernières années, lors de réunions multilatérales tenues sous l'égide de l'Autorité. Dans ce cadre, plusieurs évolutions ont été mises en œuvre par France Télécom, comme la mise en service hotline, l'ouverture de prestations de garanties de temps de rétablissement (GTR) en 4 heures, 7 jours sur 7 et 24 heures sur 24 en DSL Entreprises et dégroupage, ou encore la mise en place de forfaits pour la construction et les désaturations mono et multi-paires.
Par ailleurs, plusieurs points d'amélioration font actuellement l'objet d'expérimentations ou d'études de la part de France Télécom :
― le développement d'un outil permettant aux opérateurs d'identifier rapidement si un site est fibré ou non dans le cadre des commandes des offres de gros de services de capacités ;
― l'accès à venir pour les opérateurs alternatifs, via l'outil « e-RDV », au planning de charges des techniciens France Télécom, tant en dégroupage qu'en DSL Entreprises, permettant à la fois, une plus grande fiabilité de la prise de rendez-vous en construction de ligne, mais aussi une plus grande autonomie de l'opérateur dans sa relation avec le client ;
― la réduction des reports de rendez-vous client de responsabilité France Télécom pour la livraison des accès ;
― la mise en œuvre des expertises dès réception d'une signalisation transmise à tort (STT), expérimentée sur les accès en dégroupage avec GTR à compter du 3 mars 2008 ;
― l'ouverture d'une GTR « J + 1 » pour des accès DSL en zone non dégroupée afin de permettre aux opérateurs alternatifs de proposer des offres DSL avec un certain niveau de garantie de qualité de service aux plus petites entreprises, y compris en zones non dégroupées. Le produit technique que pourrait être amené à proposé France Télécom est encore à l'étude.
Au-delà de ces points d'amélioration, l'Autorité a par ailleurs imposé à France Télécom, dans ses décisions n° 2008-0835 et n° 2008-0836 en date du 24 juillet 2008 et relatives à l'analyse des marchés de gros du haut débit et du très haut débit, les obligations suivantes :
― la publication d'indicateurs de qualité de service pertinents pour les offres de gros d'accès dé groupé et d'accès haut débit activés sur DSL livrées au niveau infranational et les offres aval correspondantes du groupe France Télécom, afin d'assurer l'efficacité des processus mis en place et de vérifier que les niveaux de qualité de service effectifs des offres de gros sont non discriminatoires par rapport à ce que France Télécom propose pour ses propres services sur les marchés aval ;
― la transmission à l'Autorité, trois mois après la publication au Journal officiel de la décision n° 2008-0836 puis sur demande de l'Autorité, de la description précise des processus de qualité de service (commande-livraison, d'une part, et traitement des pannes, d'autre part) mis en œuvre par France Télécom pour son propre compte pour les offres haut débit commercialisées sur le marché de détail ;
― l'inscription à ses offres de référence d'un engagement de niveau de service et d'un mécanisme incitatif à son respect n'induisant pas de contraintes excessives sur les opérateurs clients des offres de France Télécom, afin que ces niveaux soient garantis pour les opérateurs.
Ce dernier point pourra concrètement se traduire par la mise en place d'un système effectif d'incitations financières, sous la forme d'un mécanisme de pénalités versées aux opérateurs alternatifs en cas de délais excessifs, y compris pour le traitement des pannes et le respect des délais d'expertises.
Compte tenu de ces éléments, l'Autorité estime que les niveaux de qualité de service disponibles sur les marchés de gros seront globalement satisfaisants à brève échéance. Sous réserve de la réalisation des avancées mentionnées supra, l'enjeu de la qualité de service n'apparaît plus comme un frein à la dérégulation des marchés de détail professionnels de l'accès.

IV-5.3.2. Dérégulation complète

L'ensemble des considérations développées supra par l'Autorité pour justifier la levée des obligations sur le marché de détail de l'accès résidentiel s'applique également aux marchés de détail de l'accès non résidentiels. Il convient donc d'en tirer les mêmes conclusions et de lever les obligations sur le marché non résidentiel également.

IV-5.4. Commentaires des acteurs sur l'analyse de l'Autorité

France Télécom se félicite de cette dérégulation et en particulier de la suppression complète, envisagée par l'Autorité, de l'obligation de communication préalable des offres de détail de France Télécom.
L'AFORST, Telecom Italia, Neuf Cegetel et SFR signalent au contraire le caractère précoce de la dérégulation envisagée par l'Autorité et estiment qu'elle engendre des risques importants. L'AFORST estime ainsi que la part de marché de France Télécom est trop grande pour que l'Autorité puisse engager une dérégulation des marchés de détail non résidentiels. Sur ces marchés, Bouygues Telecom, Neuf Cegetel et l'AFORST appellent en outre l'Autorité à introduire avant toute dérégulation une meilleure qualité de service des offres de gros sous-jacentes de France Télécom. Concernant les risques associés à la dérégulation envisagée par l'Autorité, SFR précise qu'il sera difficile, pour les opérateurs alternatifs de repérer les offres non réplicables de France Télécom. Elle soutient qu'il est ainsi nécessaire de maintenir un contrôle ex ante des offres de détail de l'opérateur historique et de porter une surveillance accrue sur ses offres sur mesure. Dans le même sens, l'AFORST demande le maintien des interdictions de couplage abusif et de discrimination. Elle sollicite par ailleurs la mise en place d'une procédure de suspension des offres de détail de France Télécom non réplicables par les concurrents. Enfin, Neuf Cegetel demande le maintien des obligations portant actuellement sur les marchés de détail et notamment l'obligation de notification des marchés supérieurs à un certain montant et l'obligation de tenir une comptabilité séparée et publiée de l'activité sur ces marchés de détail.
Par ailleurs, Neuf Cegetel estime que le Conseil trouve prématurée la levée des contraintes réglementaires sur le marché de détail des accès car il considèrerait que l'ensemble des offres d'accès « tant sur les marché de gros que de détail, relève plus efficacement d'une régulation ex ante ».
L'Autorité signale qu'elle continuera de surveiller activement les marchés de détail de la téléphonie fixe après leur dérégulation, notamment afin de calibrer efficacement sa régulation des marchés de gros amont. Par ailleurs, les obligations de séparation comptable et de comptabilisation des coûts continueront de s'appliquer et permettront de vérifier la réplicabilité de l'activité de détail de France Télécom. Elles permettront notamment d'isoler les éléments comptables relatifs aux activités de détail sur les marchés aval aux marchés de gros régulés sur lesquels porte une obligation de comptabilisation des coûts et de séparation comptable. Enfin, l'Autorité rappelle que si les obligations ex ante ne s'appliquent plus à France Télécom, le droit commun de la concurrence continuera de lui être opposable et préviendra, ou sanctionnera le cas échéant, par exemple d'éventuels couplages abusifs. Les opérateurs, ou l'Autorité elle-même, seront en mesure de saisir le Conseil d'éventuelles pratiques anticoncurrentielles de l'opérateur historique. L'imposition de sanction et, pour les cas pertinents, de mesures conservatoires permettront de répondre aux attentes des contributeurs. Concernant la citation du Conseil de la concurrence faite par Neuf Cegetel, l'Autorité souligne que dans le paragraphe en question, le Conseil précise que « le droit d'accès des opérateurs alternatifs à l'infrastructure essentielle que constitue la boucle locale pourrait être imposé par le droit commun de la concurrence mais qu'en revanche, la fixation, pour ces offres, de prix adapté en fonction des coûts de l'opérateur historique et du prix de l'ensemble de ces autres offres, tant sur les marchés de gros que de détail, relève plus efficacement d'une régulation ex ante ».
Comme présenté dans son analyse, l'Autorité constate des améliorations des processus et de la qualité de service disponibles au sein des offres de gros de France Télécom. Par ailleurs, ces sujets font l'objet de groupes de travaux multilatéraux au sein desquels sont discutées les différentes évolutions sollicitées par les opérateurs alternatifs. Sous réserve de la bonne poursuite des travaux en cours, l'enjeu de la qualité de service n'apparaît donc plus comme un frein à la dérégulation des marchés de détail professionnels de l'accès.

IV-5.5. Observations de la Commission européenne

La Commission européenne ne formule aucune observation sur l'analyse de l'Autorité relative aux obligations sur les marchés de détail de l'accès.

IV-5.6. Conclusion

L'Autorité a imposé à France Télécom, au titre de sa position sur les marchés de détail de l'accès au service téléphonique, de continuer de proposer des offres de sélection de transporteur et de VGAST. Elle estime que ces remèdes ainsi que l'ensemble de la régulation appliquée au niveau des marchés de l'accès et de l'interconnexion suffisent et qu'il ne convient pas d'imposer d'obligations à France Télécom directement sur les marchés de détail de l'accès au service téléphonique.
Décide :

Article 1

Dans le cadre de la présente décision d'analyse des marchés de la téléphonie fixe, sont utilisées les définitions suivantes :

  1. Territoire d'analyse. On entend par « territoire d'analyse » le territoire métropolitain, les départements d'outre-mer et les collectivités territoriales d'outre-mer de Mayotte, Saint-Martin et Saint-Barthélemy.
  2. Réseau téléphonique public. On entend par « réseau téléphonique public » l'ensemble des réseaux de communications électroniques utilisés pour fournir le service téléphonique au public défini par le 7 de l'article L. 32 du code des postes et des communications électroniques.
  3. Poste fixe. On entend par « poste fixe » tout équipement terminal, connecté à un point de terminaison d'un réseau ouvert au public en position déterminée et permettant d'accéder au service téléphonique, à l'exclusion des publiphones.
  4. Services associés à l'accès. On entend par « services associés à l'accès » les fonctionnalités complémentaires à la fourniture d'un accès qui sont mises à la disposition des utilisateurs d'un poste fixe pour gérer leurs communications. Elles comprennent notamment le signal d'appel, l'affichage du numéro ou du nom des appelants, le renvoi d'appels, le rappel du dernier appelant, la restriction de la présentation du numéro, le double appel, la conférence téléphonique, la messagerie vocale, le répertoire téléphonique, le suivi de consommation, la restriction d'appels, la sélection directe à l'arrivée.

Marchés pertinents
Définition et pertinence des marchés de détail

Article 2

Est déclaré pertinent le marché de détail de l'accès au réseau téléphonique public depuis un poste fixe du territoire d'analyse, permettant d'émettre et/ou de recevoir des communications téléphoniques et d'utiliser les services associés à l'accès, pour la clientèle résidentielle. Ce marché est constitué des produits d'accès commercialisés à destination de la clientèle résidentielle principalement pour accéder au réseau téléphonique public ainsi que des services associés à l'accès.

Article 3

Est déclaré pertinent le marché de détail de l'accès au réseau téléphonique public depuis un poste fixe du territoire d'analyse, permettant d'émettre et/ou de recevoir des communications téléphoniques et d'utiliser les services associés à l'accès, pour la clientèle non résidentielle. Ce marché est constitué des produits d'accès commercialisés à destination de la clientèle non résidentielle principalement pour accéder au réseau téléphonique public ainsi que des services associés à l'accès. Il inclut notamment les prestations spécifiques donnant principalement accès au réseau téléphonique public, contenues dans les offres de services de capacité destinées aux clients non résidentiels.

Définition et pertinence des marchés d'interconnexion et d'accès

Article 4

Est déclaré pertinent le marché de gros des prestations de départ d'appel fournies sur des accès en position déterminée, sur le territoire d'analyse. Ce marché est composé des prestations nécessaires à l'acheminement d'un appel téléphonique au départ d'une ligne du réseau téléphonique public fixe, depuis le point de terminaison du réseau jusqu'au premier point d'interconnexion pertinent offert par l'opérateur départ, point en-deçà duquel seul l'opérateur de l'abonné appelant peut acheminer l'appel. Ce marché inclut les prestations connexes d'accès aux sites d'interconnexion et de sécurisation du trafic.

Article 5

Sont déclarés pertinents les marché de gros des prestations de terminaison d'appel en position déterminée à destination du réseau de chacun des opérateurs de boucle locale figurant en annexe A. Ces marchés sont composés des prestations nécessaires à l'acheminement d'un appel depuis le point d'interconnexion pertinent le plus proche d'un abonné, point au-delà duquel seul l'opérateur de l'abonné appelé peut acheminer l'appel, au point de terminaison du réseau de cet abonné. Ces marchés incluent les prestations connexes d'accès aux sites d'interconnexion et de sécurisation du trafic.

Durée de validité

Influence significative
Désignation de l'opérateur exerçant une influence significative
sur les marchés pertinents de détail

Article 7

La société France Télécom est réputée exercer une influence significative sur les marchés de détail définis aux articles 2 et 3.

Désignation de l'opérateur exerçant une influence significative
sur le marché pertinent de gros du départ d'appel

Article 8

La société France Télécom est réputée exercer une influence significative sur le marché de gros du départ d'appel définis à l'article 4.

Désignation des opérateurs exerçant une influence significative
sur les marchés pertinents de la terminaison d'appel

Article 9

Les opérateurs de boucle locale figurant en annexe A de la présente décision sont réputés exercer une influence significative sur le marché de gros des prestations de terminaison d'appel qu'ils fournissent sur leur réseau, et définis à l'article 1.

Durée de validité

Obligations imposées à France Télécom sur les marchés de l'accès et de l'interconnexion
Obligation de faire droit aux demandes raisonnables d'accès

Article 11

France Télécom est tenue de faire droit aux demandes raisonnables d'accès à des éléments de réseau ou à des moyens qui y sont associés, et relatives aux prestations des marchés pertinents définis aux articles 4 et 5, ou nécessaires à l'exercice, au bénéfice des utilisateurs, d'une concurrence effective et loyale sur les marchés de détail aval.
A ce titre, lorsque la demande est raisonnable et relative aux prestations des marchés pertinents définis aux articles 4 et 5, ou aux prestations qui leur sont associées, France Télécom est notamment tenue de :
― négocier de bonne foi avec les opérateurs qui demandent un accès ;
― ne pas retirer à un opérateur un accès déjà accordé, sauf accord préalable de l'Autorité ou de l'opérateur tiers concerné ;
― offrir des services particuliers en gros en vue de leur revente à des tiers ;
― accorder un accès ouvert aux interfaces techniques, protocoles ou autres technologies qui revêtent une importance essentielle pour l'interopérabilité des services ou des services de réseaux virtuels ;
― fournir une possibilité de colocalisation ou d'autres formes de partage de moyens ou ressources, y compris le partage des gaines, des bâtiments ou des pylônes ;
― fournir les services spécifiques nécessaires pour garantir aux utilisateurs l'interopérabilité des services de bout en bout, notamment en ce qui concerne les moyens relatifs aux services de réseaux intelligents ;
― fournir l'accès à des systèmes d'assistance opérationnelle ou à des systèmes logiciels similaires.
Tout refus de France Télécom de fournir ces prestations doit être dûment motivé.
Les conditions techniques et tarifaires des prestations d'accès fournies par France Télécom doivent être suffisamment détaillées pour faire apparaître les divers éléments propres à répondre à la demande. En particulier, la fourniture d'une prestation d'accès ne doit pas être subordonnée à la fourniture de services, de moyens ou de toute autre ressource, qui ne seraient pas nécessaires à la fourniture de cette prestation.
France Télécom doit s'engager, sur les prestations de raccordement physique et logique à son réseau, sur un niveau satisfaisant de qualité de service et proposer des mécanismes incitatifs à son respect.
France Télécom doit maintenir les offres d'accès qu'elle fournit actuellement telles que décrites en annexe B de la présente décision. Ces offres comprennent notamment des offres de départ d'appel, de terminaison d'appel et d'accès à des prestations associées telles que notamment des prestations de raccordement aux sites et de reversement.

Obligation de non-discrimination

Article 12

France Télécom doit fournir l'ensemble des prestations d'accès relatives aux marchés pertinents visés aux articles 4 et 5, y compris les prestations qui leur sont associées, dans des conditions non discriminatoires.
A ce titre, France Télécom applique des conditions équivalentes dans des circonstances équivalentes aux autres opérateurs fournissant des services équivalents et elle fournit aux autres opérateurs des services et informations dans les mêmes conditions et avec la même qualité que ceux qu'elle assure pour ses propres services, ou pour ceux de ses filiales ou partenaires.

Obligation de transparence

Article 13

France Télécom est soumise à une obligation de transparence sur l'ensemble des marchés pertinents visés aux articles 4 et 5, y compris sur les prestations qui leur sont associées.
A ce titre, France Télécom informe l'Autorité notamment de la signature de toute nouvelle convention d'accès et d'interconnexion à laquelle elle est partie, ou de tout avenant à une telle convention, dans un délai de sept jours à compter de sa signature.
France Télécom doit notamment communiquer aux opérateurs ayant signé avec elle une convention d'accès et d'interconnexion ou négociant avec elle la signature d'une telle convention des informations sur les caractéristiques de son réseau. Les modalités de publication de ces informations et le niveau de détail requis pourront être précisés par une décision ultérieure de l'Autorité.
France Télécom doit notamment informer, dans un délai de préavis raisonnable, les opérateurs bénéficiant de prestations d'interconnexion à son réseau et l'Autorité :
― des évolutions des conditions techniques et tarifaires de ses prestations d'interconnexion ;
― des évolutions d'architecture de son réseau, en cas d'évolution de nature à contraindre les opérateurs utilisant une des prestations d'interconnexion à modifier ou adapter leurs propres installations et réseaux.
France Télécom doit notamment communiquer, avant le 31 janvier de chaque année, les prévisions indicatives d'évolution de son réseau sur les trois années suivantes. Les prévisions pour les années deux et trois peuvent être révisées par France Télécom dans des plans triennaux postérieurs. Ces prévisions incluent notamment les fermetures et ouvertures d'équipements à l'interconnexion, la modification des trafics pouvant être collectés ou livrés sur ces équipements. Elles sont communiquées à l'Autorité et aux opérateurs qui ont signé une convention d'interconnexion avec France Télécom, France Télécom pouvant imposer une clause de confidentialité sur ces informations. Ces informations font l'objet d'une présentation par France Télécom au comité de l'interconnexion et de l'accès.
A l'initiative de France Télécom en cas de révision d'ampleur significative ou à la demande de l'Autorité, une mise à jour de ces prévisions lui est communiquée.

Indicateurs de qualité de service

Article 14

Au titre des obligations de transparence et de non-discrimination, France Télécom doit mesurer et publier un ensemble d'indicateurs de qualité de service relatifs aux marchés pertinents définis aux articles 4 et 5. Cette obligation pourra être précisée ultérieurement par l'Autorité.

Sélection et présélection du transporteur

Article 15

En application des articles L. 38-II, et D. 313 du code des postes et des communications électroniques, France Télécom est tenue de fournir à tout opérateur qui en fait la demande les prestations d'accès et d'interconnexion nécessaires pour que ses abonnés ayant souscrit à une offre d'accès incluse dans les marchés définis aux articles 2 et 3 puissent présélectionner le service téléphonique au public de cet opérateur et écarter, appel par appel, tout choix de présélection en composant un préfixe court.
Les modalités de cette offre et les obligations de France Télécom sont précisées en annexe C.

Vente en gros de l'accès au service téléphonique

Article 16

France Télécom est tenue de fournir à tout opérateur qui en fait la demande les prestations d'accès et d'interconnexion nécessaires pour que les utilisateurs raccordés à son réseau puissent souscrire aux offres de service téléphonique au public de cet opérateur, sur des accès analogiques (lignes isolées ou groupements de lignes) ou des accès numériques (accès de base ou groupements d'accès de base) à la norme RNIS. L'opérateur devra pouvoir proposer une offre incluant l'acheminement des communications et les prestations de raccordement et d'accès au réseau téléphonique public.
Les modalités de cette offre et les obligations de France Télécom sont précisées par la décision n° 2006-0162 de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes en date du 4 mai 2006 spécifiant les modalités techniques et tarifaires de l'offre de vente en gros de l'accès au service téléphonique sans préjudice de décisions ultérieures de l'Autorité pouvant modifier ou préciser ses modalités.

Communication pour information des offres de détail

Article 17

Au titre des obligations de transparence et de non-discrimination et afin d'en apprécier le respect, France Télécom transmet à l'Autorité, pour information, huit jours avant leur commercialisation, la description technique, tarifaire et contractuelle de ses offres de détail sur les marchés aval aux marchés de l'interconnexion et de l'accès définis aux articles 4 et 5 et aux prestations définies aux articles 15 et 16.

Offre de référence « Téléphonie fixe »

Article 18

France Télécom publie une offre technique et tarifaire d'accès et d'interconnexion détaillée selon les modalités définies en annexe B de la présente décision et, en ce qui concerne l'offre de vente en gros de l'accès au service téléphonique, définies dans la décision n° 2006-162 précitée. Cette offre inclut notamment des engagements de niveau de qualité de service et des mécanismes incitatifs à leur respect.

Contrôle des tarifs

Article 19

France Télécom doit pratiquer des tarifs reflétant les coûts correspondants sur l'ensemble des prestations relatives aux marchés pertinents définis aux articles 4 et 5, qui sont inscrites à l'offre technique et tarifaire mentionnée à l'article 18.
L'obligation de pratiquer des tarifs reflétant les coûts correspondants est également imposée sur les prestations associées. France Télécom devra notamment pratiquer des tarifs reflétant les coûts correspondants sur la prestation de raccordement et de sécurisation à l'ensemble de ses sites d'interconnexion mentionnée à l'annexe B.
Par exception, France Télécom est tenue de ne pas pratiquer des tarifs excessifs sur la prestation de reversement associée aux prestations relatives au marché pertinent défini à l'article 4. De même, France Télécom est tenue de ne pas pratiquer des tarifs excessifs sur la prestation de liaison de raccordement et sur la prestation d'interconnexion en ligne (« in-span ») associées aux prestations relatives aux marchés pertinents définis aux articles 4 et 5.

Article 20

Au titre de l'obligation d'orientation vers les coûts imposée à l'article 19, les tarifs récurrents des prestations de terminaison d'appel de France Télécom sont soumis à un encadrement tarifaire pluriannuel, tel que :
― à compter du 1er octobre 2008, le prix moyen par minute d'une terminaison d'appel fixe n'excède pas 0,45 centime d'euros par minute ;
― à compter du 1er octobre 2009, le prix moyen par minute d'une terminaison d'appel fixe n'excède pas 0,425 centime d'euros par minute ;
― à compte du 1er octobre 2010, le prix moyen par minute d'une terminaison d'appel fixe n'excède pas 0,4 centime d'euros par minute.
Les modalités précises de cet encadrement annuel sont définies dans l'annexe D.

Obligations comptables

Article 21

France Télécom est soumise à une obligation de séparation comptable et à une obligation relative à la comptabilisation des coûts de l'ensemble des prestations d'accès et d'interconnexion relatives aux marchés pertinents définis aux articles 4 et 5, y compris sur la prestation de reversement associée aux prestations relatives au marché pertinent visé à l'article 4.
Les modalités de cette obligation ont été définies dans la décision n° 2006-1007 de l'Autorité en date du 7 décembre 2006. Les dispositions prévues par cette décision concernant les marchés de la téléphonie fixe sont maintenues sur la période d'application de la présente décision, sans préjudice de toute décision ultérieure.

Durée de validité

Article 22

Les obligations figurant aux articles 11 à 21 de la présente décision sont imposées à France Télécom pour une durée de trois ans à compter de la publication de la présente décision au Journal officiel de la République française, sans préjudice d'un éventuel réexamen anticipé, conformément aux dispositions de l'article D. 303 du code des postes et des communications électroniques.

Obligations imposées aux opérateurs autres que France Télécom exerçant une influence significative
sur les marchés pertinents de la terminaison d'appel
Obligations d'accès et d'interconnexion

Article 23

Chaque opérateur autre que France Télécom figurant dans la liste prévue en annexe A de la présente décision est tenu de faire droit aux demandes raisonnables d'accès à des éléments de réseau ou à des moyens qui y sont associés, relatives aux prestations du marché de gros visé à l'article 5.
A ce titre, lorsque la demande est raisonnable et relative aux prestations du marché de gros visé à l'article 5, ou aux prestations qui leur sont associées, l'opérateur :
― de négocier de bonne foi avec les opérateurs qui demandent un accès ;
― de ne pas retirer à un opérateur un accès déjà accordé, sauf accord préalable de l'Autorité ou de l'opérateur tiers concerné ;
― d'accorder un accès ouvert aux interfaces techniques, protocoles ou autres technologies qui revêtent une importance essentielle pour l'interopérabilité des services ou des services de réseaux virtuels ;
― de fournir une offre de raccordement à son réseau, permettant une utilisation effective des prestations relatives au marché de gros susmentionné.
Tout refus de l'opérateur exerçant une influence significative de fournir ces prestations doit être dûment motivé.
Les conditions techniques et tarifaires des prestations d'accès fournies par l'opérateur exerçant une influence significative sur un marché de gros doivent être suffisamment détaillées pour faire apparaître les divers éléments propres à répondre à la demande. En particulier, la fourniture d'une prestation d'accès ne doit pas être subordonnée à la fourniture de services, de moyens ou de toute autre ressource, qui ne seraient pas nécessaires à la fourniture de cette prestation.
L'opérateur exerçant une influence significative doit s'engager sur un niveau satisfaisant de qualité de service des prestations de raccordement physique et logique à leur réseau et de mise en service des prestations offertes sur le marché fournies au titre du présent article.

Obligation de non-discrimination

Article 24

Chaque opérateur autre que France Télécom figurant dans la liste prévue en annexe A de la présente décision doit fournir les prestations d'accès incluses dans le marché de gros visé à l'article 5, y compris les prestations d'accès qui leur sont associées, dans des conditions non discriminatoires.

Obligation de transparence

Article 25

Chaque opérateur autre que France Télécom figurant dans la liste prévue en annexe A de la présente décision est soumis à une obligation de transparence sur l'ensemble des prestations relatives au marché de gros visé à l'article 5, y compris sur les prestations d'accès qui leur sont associées.
A ce titre, chacun de ces opérateurs doit notamment :
― informer l'Autorité de la signature de toute nouvelle convention d'accès ou d'interconnexion relative au marché mentionné au premier alinéa à laquelle il est partie, ou de tout avenant à une telle convention, dans un délai de sept jours à compter de sa signature ;
― communiquer, aux opérateurs ayant signé avec lui une convention d'accès et d'interconnexion ou négociant avec lui la signature d'une telle convention relative au marché mentionné au premier alinéa, des informations sur les caractéristiques de son réseau relatives à la prestation du marché de gros visé à l'article 5, y compris les prestations associées. Les modalités de cette communication et le niveau de détail requis pourront être précisés par une décision ultérieure de l'Autorité ;
― informer, dans un délai de préavis raisonnable, les opérateurs bénéficiant de prestations d'interconnexion à son réseau et l'Autorité :
― des évolutions des conditions techniques et tarifaires de ses prestations d'interconnexion relatives au marché de gros susmentionné ;
― des évolutions d'architecture de son réseau relatives au marché de gros susmentionné, en cas d'évolution de nature à contraindre les opérateurs utilisant une des prestations d'interconnexion à modifier ou adapter leurs propres installations.

Obligation de ne pas pratiquer de tarifs excessifs

Article 26

Chaque opérateur autre que France Télécom figurant dans la liste prévue en annexe A de la présente décision se voit interdit de pratiquer des tarifs excessifs sur l'ensemble des prestations relatives au marché de gros visé à l'article 5, y compris sur les prestations d'accès qui leur sont associées. Les niveaux de terminaison d'appel figurant en annexe E pourront servir de référence pour l'interdiction de pratiquer des tarifs excessifs.

Durée de validité des obligations imposées aux opérateurs
exerçant une influence significative sur les marchés pertinents

Article 27

Les obligations figurant aux articles 23 à 26 de la présente décision sont imposées à chaque opérateur autre que France Télécom exerçant une influence significative sur le marché qui le concerne tel que défini à l'article 5, pour une durée de trois ans à compter de la publication de la présente décision au Journal officiel de la République française, sans préjudice d'un éventuel réexamen anticipé, conformément aux dispositions de l'article D. 303 du code des postes et des communications électroniques.

Article 28

Le directeur général de l'Autorité est chargé de l'application de la présente décision. Il notifiera aux opérateurs réputés exercés une influence significative cette décision et ses annexes. Cette décision et ses annexes seront publiées au Journal officiel de la République française.

TABLE DES MATIÈRES

I. ― Délimitation des marchés de la téléphonie fixe définis dans la nouvelle recommandation.
I-1. Introduction sur la délimitation des marchés.
I-1.1. Délimitation des marchés en termes de produits et services.
I-1.2. Délimitation des marchés en termes géographiques.
I-2. Délimitation des marchés de détail de la nouvelle recommandation.
I-2.1. Périmètre des marchés de l'accès au réseau, téléphonique public.
I-2.2. Délimitation géographique des marchés de détail de l'accès au réseau téléphonique public.
I-2.3. Commentaires des acteurs sur l'analyse de l'Autorité.
I-2.4. Avis du Conseil de la concurrence.
I-2.5. Observations de la Commission européenne.
I-2.6. Conclusion.
I-3. Délimitation des marchés de gros du départ d'appel et de la terminaison d'appel fixe.
I-3.1. Préambule relatif aux architectures des réseaux.
I-3.2. Eléments d'analyse communs à tous les marchés de gros.
I-3.3. Le marché de la terminaison d'appel fixe vers chaque réseau.
I-3.4. Le marché du départ d'appel.
II. ― Pertinence des marchés pour une régulation ex ante.
II-1. Introduction sur la pertinence des marchés.
II-2. Pertinence des marchés de détail de l'accès.
II-2.1. Dans la nouvelle recommandation de la Commission.
II-2.2. Obstacles au développement d'une concurrence effective en France.
II-2.3. Avis du Conseil de la concurrence.
II-2.4. Observations de la Commission européenne.
II-3. Pertinence des marchés de gros de la terminaison d'appel.
II-3.1. Dans la nouvelle recommandation de la Commission.
II-3.2. Obstacles au développement d'une concurrence effective en France.
II-3.3. Avis du Conseil de la concurrence.
II-3.4. Observations de la Commission européenne.
II-4. Pertinence du marché de gros du départ d'appel.
II-4.1. Dans la nouvelle recommandation de la Commission.
II-4.2. Obstacles au développement d'une concurrence effective en France.
II-4.3. Avis du Conseil de la concurrence.
II-4.4. Observations de la Commission européenne.
III. ― Influence significative.
III-1. Introduction sur l'analyse de l'influence significative sur les marchés pertinents.
III-2. Influence significative de France Télécom sur les marchés de détail de l'accès.
III-2.1. En termes de part de marchés.
III-2.2. Autres facteurs d'analyse.
III-2.3. Evolution prospective du marché.
III-2.4. Commentaires des acteurs sur l'analyse de l'Autorité.
III-2.5. Avis du Conseil de la concurrence.
III-2.6. Observations de la Commission européenne.
III-2.7. Conclusion sur l'influence significative sur les marchés de détail de l'accès.
III-3. Influence significative sur les marchés de la terminaison d'appel.
III-3.1. Les opérateurs sont en situation de monopole naturel sur le marché de terminaison d'appel fixe sur leur réseau.
III-3.2. Analyse des contre-pouvoirs éventuels des acheteurs.
III-3.3. Commentaires des acteurs sur l'analyse de l'Autorité.
III-3.4. Avis du Conseil de la concurrence.
III-3.5. Observations de la Commission européenne.
III-3.6. Conclusion.
III-4. Influence significative de France Télécom sur le marché de gros du départ d'appel.
III-4.1. Analyse des parts de marché.
III-4.2. Contrôle d'infrastructures difficiles à dupliquer.
III-4.3. Economies d'échelle et de gamme.
III-4.4. Absence de contre-pouvoir d'acheteurs.
III-4.5. Evolution prospective du marché.
III-4.6. Commentaires des acteurs sur l'analyse de l'Autorité.
III-4.7. Avis du Conseil de la concurrence.
III-4.8. Observations de la Commission européenne.
III-4.9. Conclusion.
IV. ― Obligations.
IV-1. Objectifs de l'action réglementaire.
IV-2. Obligations non tarifaires d'interconnexion et d'accès imposées à France Télécom.
IV-2.1. Obligation de faire droit aux demandes raisonnables d'accès.
IV-2.2. Obligation de non-discrimination.
IV-2.3. Obligation de transparence.
IV-2.4. Communication pour information.
IV-2.5. Indicateurs de qualité de service.
IV-2.6. Sélection et présélection du transporteur.
IV-2.7. Vente en gros de l'accès au service téléphonique.
IV-2.8. Publication d'une offre technique et tarifaire détaillée d'interconnexion et d'accès dite « Téléphonie fixe ».
IV-2.9. Observations de la Commission européenne.
IV-3. Obligations non tarifaires imposées aux opérateurs puissants sur les marchés de gros de la terminaison d'appel, autres que France Télécom.
IV-3.1. Obligation de faire droit aux demandes raisonnables d'accès.
IV-3.2. Obligation de non-discrimination.
IV-3.3. Obligation de transparence.
IV-3.4. Observations de la Commission européenne.
IV-4. Obligations tarifaires imposées sur les marchés de gros de la terminaison d'appel fixe.
IV-4.1. Contexte et principes de la régulation de la terminaison d'appel.
IV-4.2. Les références de coûts disponibles pour déterminer les coûts d'un opérateur efficace.
IV-4.3. Obligations tarifaires imposées à France Télécom sur les marchés de gros de la terminaison d'appel fixe.
IV-4.4. Obligations tarifaires imposées à France Télécom sur le marché de gros du départ d'appel fixe.
IV-4.5. Contrôle des tarifs des prestations associées aux prestations d'interconnexion de France Télécom.
IV-4.6. Obligations comptables imposées à France Télécom.
IV-4.7. Obligations imposées aux autres opérateurs que France Télécom sur le marché de gros de la terminaison d'appel fixe.
IV-4.8. Observations de la Commission européenne.
IV-5. Obligations sur les marchés de détail de l'accès.
IV-5.1. Contexte concurrentiel et remèdes imposés sur les marchés amont.
IV-5.2. Marché résidentiel de l'accès au service téléphonique.
IV-5.3. Marché non résidentiel de l'accès au service téléphonique.
IV-5.4. Commentaires des acteurs sur l'analyse de l'Autorité.
IV-5.5. Observations de la Commission européenne.
IV-5.6. Conclusion.

TABLE DES FIGURES

Figure 1. Architecture générique du réseau téléphonique public.
Figure 2. Architecture du réseau téléphonique commuté de France Télécom.
Figure 3. Prestation de terminaison d'appel.
Figure 4. Evolution du nombre d'accès résidentiels exclusivement ou principalement dédiés au service téléphonique.
Figure 5. Evolution du chiffre d'affaires associé aux accès résidentiels exclusivement ou principalement dédiés à la téléphonie.
Figure 6. Taille du marché de l'accès non résidentiel au service téléphonique, en nombre de canaux.
Figure 7. Evolution du marché du départ d'appel par produit en volumes.
Figure 8. Evolution du marché du départ d'appel par produit en valeur.
Figure 9. Parts de marché de France Télécom sur le départ d'appel en volumes.
Figure 10. Schéma du système de comptabilisation des coûts mis en œuvre par France Télécom.
Figure 11. Tarif de terminaison d'appel locale de l'opérateur historique calculé par la Commission européenne (figure 86 du XIIIe rapport).

TABLE DES ANNEXES

Annexe A. Liste des opérateurs de boucle locale concernés par la présente décision.
Annexe B. Liste minimale des éléments devant figurer dans l'offre technique et tarifaire d'interconnexion et d'accès, et conditions d'évolution de l'offre, mentionnée à l'article 18.
Annexe C. Modalités de l'offre de sélection du transporteur de France Télécom.
Annexe D. Modalités de l'encadrement tarifaire pluriannuel des prestations de départ d'appel et de terminaison d'appel de France Télécom.
Annexe E. Tarifs de terminaison d'appel pour les opérateurs alternatifs.
Annexe F. Glossaire.
Annexe G. Bilan et perspectives.
Annexe H. Analyse des marchés de détail des communications et des marchés de gros du transit.

Fait à Paris, le 29 juillet 2008.

Le président,

P. Champsaur