JORF n°0216 du 17 septembre 2010

Décision n°2010-0402 du 8 avril 2010

L'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes ci-après dénommée « Autorité »,

Vu la directive 2002/19/CE du Parlement européen et du Conseil du 7 mars 2002 relative à l'accès aux réseaux de communications électroniques et aux ressources associées ainsi qu'à leur interconnexion (directive « accès ») ;

Vu la directive 2002/21/CE du Parlement européen et du Conseil du 7 mars 2002 relative à un cadre réglementaire commun pour les réseaux et services de communications électroniques (directive « cadre ») ;

Vu les lignes directrices 2002/C 165/03 de la Commission des Communautés européennes du 11 juillet 2002 sur l'analyse du marché et l'évaluation de la puissance sur le marché en application du cadre réglementaire communautaire pour les réseaux et les services de communications électroniques (« lignes directrices ») ;

Vu la recommandation C(2007) 5406 de la Commission des communautés européennes du 17 décembre 2007 concernant les marchés pertinents de produits et de services dans le secteur des communications électroniques susceptibles d'être soumis à une réglementation ex ante conformément à la directive 2002/21/CE du Parlement européen et du Conseil relative à un cadre réglementaire commun pour les réseaux et services de communications électroniques (recommandation « marchés pertinents ») ;

Vu la recommandation C(2005) 103/1 de la Commission européenne en date du 21 janvier 2005 relative à la fourniture de lignes louées dans l'Union européenne Partie 1. ― Principales conditions de fourniture en gros de lignes louées ;

Vu la recommandation de la Commission européenne C(2005) 951/2 en date du 29 mars 2005 relative à la fourniture de lignes louées dans l'Union européenne Partie 2. ― Tarification de la fourniture de circuits partiels de lignes louées ;

Vu la loi n° 2004-669 du 9 juillet 2004 relative aux communications électroniques et aux services de communication audiovisuelle, et notamment son article 133 ;

Vu le code des postes et des communications électroniques ci-après dénommé « CPCE », et notamment ses articles L. 36-7, L. 37-1, L. 38, L. 38-1, L. 38-2, D. 301 à D. 315 et D. 369 et suivants ;

Vu l'arrêté du 12 mars 1998 autorisant la société France Télécom, société anonyme, immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Paris sous le numéro 380 129 866, et dont le siège social est situé 6, place d'Alleray, 75505 Paris Cedex 15, à établir et exploiter un réseau de téléphonie ouvert au public et à fournir le service téléphonique au public, ci-après dénommée « France Télécom » ;

Vu la décision n° 2004-376 de l'Autorité en date du 4 mai 2004 se prononçant sur un différend opposant Outremer Télécom à France Télécom ;

Vu la décision n° 2005-834 de l'Autorité en date du 15 décembre 2005 définissant la méthode de valorisation des actifs de la boucle locale cuivre ainsi que la méthode de comptabilisation des coûts applicable au dégroupage total ;

Vu la décision n° 2006-592 de l'Autorité en date du 26 septembre 2006 portant sur la définition des marchés pertinents des services de capacité, la désignation d'opérateurs exerçant une influence significative sur ces marchés et les obligations imposées à ce titre ;

Vu la décision n° 2006-1007 de l'Autorité en date du 7 décembre 2006 portant sur les obligations de comptabilisation des coûts et de séparation comptable imposées à France Télécom ;

Vu la décision n° 2008- 835 de l'Autorité en date du 24 juillet 2008 portant sur la définition du marché pertinent de gros des offres d'accès aux infrastructures physiques constitutives de la boucle locale filaire, sur la désignation d'un opérateur exerçant une influence significative sur ce marché et sur les obligations imposées à cet opérateur sur ce marché ;

Vu la décision n° 2008-836 de l'Autorité en date du 24 juillet 2008 portant sur la définition du marché pertinent de gros des offres haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational, sur la désignation d'un opérateur exerçant une influence significative sur ce marché et sur les obligations imposées à cet opérateur sur ce marché ;

Vu la consultation publique de l'Autorité relative à l'analyse des marchés de services de capacité publiée le 28 avril 2009 et clôturée le 28 mai 2009 ;

Vu les réponses à la consultation publique susvisée, publiées le 18 septembre 2009 ;

Vu la demande d'avis à l'Autorité de la concurrence en date du 18 septembre 2009 ;

Vu l'avis n° 09-A-53 de l'Autorité de la concurrence en date du 30 octobre 2009 ;

Vu la consultation publique de l'Autorité portant sur la définition des marchés pertinents des services de capacité, la désignation d'opérateurs exerçant une influence significative sur ces marchés et les obligations imposées à ce titre, lancée le 16 février 2010 et clôturée le 17 mars 2010 ;

Vu les réponses à cette consultation publique ;

Vu la notification à la Commission européenne et aux autorités réglementaires nationales des autres Etats membres la Communauté européenne en date du 16 février 2010 relative au projet de décision de l'Autorité portant sur la définition des marchés pertinents de services de capacité, la désignation d'opérateurs exerçant une influence significative sur ces marchés et les obligations imposées à ce titre ;

Vu les observations de la Commission européenne en date du 16 mars 2010 ;

Après en avoir délibéré le 8 avril 2010,

PRÉAMBULE

Les articles L. 37-1 à L. 37-3 du code des postes et des communications électroniques (CPCE) disposent qu'il incombe à l'Autorité d'analyser les marchés énumérés par la Commission européenne comme susceptibles d'être pertinents pour une régulation sectorielle, de désigner les entreprises disposant éventuellement d'une influence significative sur ces marchés et, le cas échéant, de définir les obligations ex ante susceptibles de remédier aux problèmes concurrentiels identifiés.
Le premier cycle d'analyse des marchés a conduit l'Autorité à mettre en place un dispositif de régulation sur les marchés des services de capacité pour la période 2006-2009, en vigueur jusqu'au 1er septembre 2009 et centré sur une régulation conjointe des marchés de gros et du marché de détail.
L'Autorité a lancé au printemps 2009 un nouveau cycle d'analyse, couvrant une période prospective de trois ans, en s'appuyant sur la nouvelle recommandation sur les marchés pertinents publiée le 17 décembre 2007 par la Commission européenne. Elle a ainsi soumis à consultation publique un document qui dresse un bilan de la régulation mise en place lors du premier cycle et qui pose aux acteurs la question de l'opportunité de maintenir un dispositif de régulation ex ante sur les différents marchés et le cas échéant sur la mise en œuvre de la régulation ex ante.
L'Autorité a reçu douze réponses à cette consultation, qu'elle a rendues publiques à l'exception des passages couverts par le secret des affaires. L'Autorité a alors soumis pour avis à l'Autorité de la concurrence le 18 septembre 2009 une version amendée de son analyse de marchés, tenant compte de ces réponses.
Après réception de l'avis susvisé de l'Autorité de la concurrence, le 30 octobre 2009, l'ARCEP a amendé son projet de décision portant sur la définition des marchés pertinents des services de capacité, la désignation d'opérateurs exerçant une influence significative sur ces marchés et les obligations imposées à ce titre.
Le projet de décision a été notifié à la Commission européenne ainsi qu'aux autres autorités de régulation nationales (ARN) conformément à l'article L. 37-3 du CPCE. Le document a été concomitamment soumis à consultation publique.

INTRODUCTION
A. ― Le processus d'analyse de marché

L'Autorité rappelle que le processus d'analyse des marchés consiste, conformément aux dispositions des articles L. 37-1 et suivants du CPCE :
― à déterminer la liste des marchés du secteur dont les caractéristiques en termes de développement de la concurrence justifient l'imposition d'un dispositif de régulation spécifique ;
― à désigner, le cas échéant, les opérateurs disposant sur ces marchés d'une influence significative ;
― à fixer les obligations spécifiques, adaptées et proportionnées aux problèmes concurrentiels constatés.
L'analyse menée par l'Autorité vise, en vertu des articles L. 37-1 et suivants du CPCE, à analyser l'état et l'évolution prévisible de la concurrence sur ces marchés et à en déduire les conséquences en termes d'obligations réglementaires.
Dans ce cadre, et conformément aux articles L. 37-3 et D. 301 du même code, l'Autorité recueille l'avis de l'Autorité de la concurrence, soumet son projet de décision à consultation publique et le notifie à la Commission et aux ARN des autres Etats membres.
Au terme d'un premier cycle d'analyse des marchés correspondant au processus décrit ci-dessus, l'Autorité a adopté le 26 septembre 2006 la décision n° 2006-592 et a mis en place une régulation ex ante sur les marché de gros des services de capacité sur le segment terminal et le segment interurbain ainsi que sur le marché de détail. Cette décision est arrivée à échéance le 1er septembre 2009. C'est pourquoi l'Autorité a engagé un deuxième cycle d'analyse des marchés au printemps 2009 sur la base de la nouvelle recommandation sur les marchés pertinents publiée par la Commission européenne le 17 décembre 2007.
L'Autorité mène ici l'analyse du marché de détail des services de capacité ainsi que des marchés de gros des prestations du segment terminal et du segment interurbain de services de capacité, en s'appuyant sur les marchés qu'elle avait délimités comme pertinents au terme du premier cycle de son analyse.

B. ― Durée d'application de la décision

Conformément aux prescriptions de l'article D. 301 du CPCE, l'Autorité peut déclarer un marché pertinent « pour une durée maximale de trois ans ». L'Autorité doit réviser son analyse de sa propre initiative « lorsque l'évolution de ce marché le justifie », ou encore « dès que possible après la modification de la recommandation de la Commission européenne » du 17 décembre 2007 précitée. En outre, en vertu des articles D. 302 et D. 303 du même code, les décisions déterminant l'existence d'une influence significative et imposant aux opérateurs des obligations sont réexaminées dans les mêmes conditions.
La présente analyse porte sur une durée de trois ans. L'Autorité s'est attachée à effectuer une analyse prospective du marché sur cette période et considère que la mise en œuvre d'une régulation de ce marché pendant une durée de trois ans est pertinente, au regard de l'absence d'évolution prévisible vers une situation de concurrence effective.
En tant que de besoin et au vu des évolutions des marchés concernés, l'Autorité pourra être amenée à effectuer une nouvelle analyse avant la fin de la période envisagée et, le cas échéant, procéder à une modification anticipée de la définition des marchés pertinents ou de la désignation des opérateurs exerçant une influence significative en application du troisième alinéa de l'article D. 303 du CPCE.
Par ailleurs, l'Autorité pourra être amenée à modifier, en tant que de besoin, les obligations imposées durant la période de trois ans pour en permettre une mise en œuvre optimale en application du troisième alinéa de l'article D. 303 du CPCE.

C. ― Textes de référence

  1. Les textes européens
    La définition réglementaire des liaisons louées au niveau européen

Le texte européen de référence comportant une définition des liaisons louées est la directive 92/44/CE du Conseil du 5 juin 1992 relative à l'application de la fourniture d'un réseau ouvert aux lignes louées (appelée aussi directive ONP liaisons louées) (1).
Après avoir rappelé dans les considérants que « le concept de lignes louées couvre l'offre de capacités de transmission transparente entre points de terminaison du réseau comme service distinct mais ne couvre pas la commutation sur demande ou l'offre faisant partie d'un service commuté offert au public », les liaisons louées sont définies comme étant « les systèmes de télécommunications fournis dans le contexte de l'établissement, du développement et de l'exploitation du réseau public de télécommunications, qui offrent une capacité de transmission transparente entre les points de terminaison du réseau, à l'exclusion de la commutation sur demande (fonctions de commutation que l'utilisateur peut contrôler dans le cadre de la fourniture de lignes louées) ».
Par ailleurs, le principal organisme de normalisation de référence au niveau européen (2), l'ETSI, donne une définition équivalente dans ses normes sur les liaisons louées (par exemple la norme ETSI EN 300 448 2.1 sur les liaisons louées analogiques 2 fils) : « a leased line is a telecommunication facility provided by a public telecommunication network that provide defined telecommunication characteristics between network termination points and that do not include switching functions that the user can control (e.g. on-demand switching) », que l'on peut traduire par : « une liaison louée est une capacité de transmission fournie par un opérateur de réseau ouvert au public entre points de terminaison du réseau, qui possède des caractéristiques bien définies et qui n'inclut pas de fonction de commutation contrôlée par l'utilisateur (commutation à la demande) ».

(1) Arrêté du 1er décembre 2009 portant désignation de l'opérateur chargé de fournir la composante du service universel prévue au 1° de l'article L. 35-1 du code des postes et des communications électroniques (service téléphonique). (2) Les normes de l'ETSI adoptées par la Commission figurent dans la liste des normes et/ou spécifications pour les réseaux de communications électroniques, les services de communications électroniques et les ressources et services associés (2002/C 331/04).

L'ensemble minimal de liaisons louées

L'ensemble minimal de liaisons louées regroupe les liaisons louées analogiques 2 fils et 4 fils ainsi que les liaisons louées numériques 64 Kbit/s et 2 Mbit/s structurées et non structurées. Sa liste a été arrêtée par la directive 92/44/CE du Conseil du 5 juin 1992.
La fourniture de l'ensemble minimal de liaisons louées (et d'une offre X.25 pour la période de dévolution 2005-2009) est une obligation de service public, en tant que service obligatoire. Sa fourniture est imposée à France Télécom, en tant qu'opérateur en charge de la composante 1° du service universel (3). A ce titre, en application de l'article L. 35 du code des postes et des communications électroniques, leur fourniture doit être assurée dans le respect des principes d'égalité, de continuité et d'adaptabilité (article L. 35 du CPCE), ce qui, selon la jurisprudence relative au principe d'égalité en droit public, se traduit par l'acceptation d'une différenciation géographique des tarifs, limitée à la seule prise en compte d'éléments objectifs, notamment des coûts ; pour ce qui relève des principes de continuité et d'adaptabilité, il appartient à l'opérateur du service téléphonique d'informer ses clients.
Le récent arrêté de désignation qui a reconduit France Télécom dans la prestation du service téléphonique et donc des services obligatoires a maintenu le périmètre des liaisons louées de la précédente période de dévolution (2005-2009). Toutefois, une offre technique ne peut s'abstraire des évolutions technologiques ; aussi, la migration vers des technologies de substitution impactant les clients finaux en termes d'organisation et de fonctionnement de leurs systèmes de d'informations et de coûts, l'ARCEP a jugé, dans son rapport portant sur le Bilan et les perspectives - Position de l'ARCEP sur le service universel (4) qu'un calendrier de la migration permettant aux clients finaux d'anticiper celle-ci était indispensable. Ainsi, le ministre a encadré, dans l'annexe à l'arrêté du 1er décembre 2009 précité (5), l'arrêt des liaisons louées numériques à 64 kbits/s, dont le remplacement par les liaisons louées à 2048 kbits/s est légitime pour répondre aux besoins des clients disposant aujourd'hui du service à 64 kbit/s. France Télécom pourra procéder à l'arrêt anticipé de la prise de commande et à la fermeture technique de ces dernières, dans un délai de trois mois à compter de sa notification par France Télécom, et sauf refus exprès du client au plus tard le 30 juin 2010 et le 31 décembre 2011 . Enfin, il convient de noter que le nouveau cahier des charges de l'opérateur de service téléphonique prévoit la fourniture d'une offre de commutation de données par paquets fondée sur la technologie IP, en remplacement de l'offre reposant sur le protocole international X.25 de la période de dévolution précédente (2005-2009). La pérennité de l'offre Minitel, reposant sur la norme X.25 est donc menacée et l'extinction à venir du service n'est plus à exclure.
Lors de la révision de la recommandation sur les marchés pertinents, les services de la Commission ont estimé qu'il n'y avait plus de besoins justifiant le maintien de l'ensemble minimal de liaisons louées. Les Etat membres, les associations d'acteurs du secteur et les acteurs eux-mêmes y étant favorables, le Comité sur les communications (COCOM) a adopté une décision stipulant que la liste intitulée "Définition de l'ensemble minimal de lignes louées, ainsi que des caractéristiques harmonisées et des normes qui y sont associées” est par la présente supprimée de l'annexe à la décision 2003/548/CE (6).

(3) Arrêté du 1er décembre 2009 portant désignation de l'opérateur chargé de fournir la composante du service universel prévue au 1° de l'article L. 35-1 du code des postes et des communications électroniques (service téléphonique). (4) Remis fin décembre 2008 à la page 34 en 3.4.3 Liaisons louées. (5) Cahier des charges de la société France Télécom chargée de fournir la composante du service universel. (6) Décision de la Commission du 21 décembre 2007 modifiant la décision 2003/548/CE en ce qui concerne la suppression de certains types de lignes louées de l'ensemble minimal de lignes louées ( http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do ?uri=OJ :L :2008 :015 :0032 :0032 :FR :PDF).

Les liaisons louées normalisées par l'ETSI

Les normes ETSI fixent la liste des liaisons louées de manière précise : il s'agit des liaisons louées analogiques (2 fils et 4 fils) et des liaisons louées numériques (du numérique bas débit à quelques kbit/s au 622 Mbit/s) ; la normalisation de ces services par l'ETSI a servi de référence à la Commission européenne lorsqu'elle a défini l'ancien ensemble minimal de liaisons louées défini dans la directive 92/44/CE.
La normalisation de l'ETSI permet de dégager les caractéristiques techniques majeures susceptibles de satisfaire les besoins des clients finaux.
La liste des références pour les lignes louées énumérées de l'ensemble minimal se trouve à l'annexe II de la directive 92/44/CE : les liaisons louées analogiques 2 et 4 fils, les liaisons louées numériques 64 kbit/s et 2 Mbit/s structurées (1920 kbit/s) et non structurées (2048 kbit/s).

| INTERFACES TECHNIQUES
et/ou caractéristiques des services | RÉFÉRENCE | |-----------------------------------------------------------------------|-------------------------------------| |Bande passante vocale de qualité ordinaire 2 fils (signaux analogiques)| ETSI EN 300 448 | |Bande passante vocale de qualité spéciale 2 fils (signaux analogiques) | ETSI EN 300 449 | |Bande passante vocale de qualité ordinaire 4 fils (signaux analogiques)| ETSI EN 300 451 | |Bande passante vocale de qualité spéciale 4 fils (signaux analogiques) | ETSI EN 300 451 | | 64 kbit/s (signaux numériques) |ETSI EN 300 288
ETSI EN 300 289| | 2048 kbit/s ― E1 non structuré (signaux numériques) |ETSI EN 300 418
ETSI EN 300 247| | 2048 kbit/s ― E1 structuré (signaux numériques) |ETSI EN 300 418
ETSI EN 300 419|

Pour les équipements terminaux, les normes associées sont les suivantes :

| INTERFACES TECHNIQUES
et/ou caractéristiques des services | RÉFÉRENCE | |-----------------------------------------------------------------------|---------------| |Bande passante vocale de qualité ordinaire 2 fils (signaux analogiques)|ETSI EN 300 450| |Bande passante vocale de qualité spéciale 2 fils (signaux analogiques) |ETSI EN 300 450| |Bande passante vocale de qualité ordinaire 4 fils (signaux analogiques)|ETSI EN 300 453| |Bande passante vocale de qualité spéciale 4 fils (signaux analogiques) |ETSI EN 300 453| | 64 kbit/s (signaux numériques) |ETSI EN 300 290| | 2048 kbit/s ― E1 non structuré (signaux numériques) |ETSI EN 300 248| | 2048 kbit/s ― E1 structuré (signaux numériques) |ETSI EN 300 420|

Pour les liaisons louées en dehors de l'ensemble minimal :

|INTERFACES TECHNIQUES
et/ou caractéristiques des services| Référence | |---------------------------------------------------------------|-------------------------------------| | N*64 kbit/s (signaux numériques) | ETSI EN 300 766 | | 34 368 kbit/s ― E3 (signaux numériques) |ETSI EN 300 686
ETSI EN 300 687| | 139 264 kbit/s ― E4 (signaux numériques) |ETSI EN 300 686
ETSI EN 300 688|

Pour les équipements terminaux, les normes associées sont les suivantes :

|INTERFACES TECHNIQUES
et/ou caractéristiques des services| RÉFÉRENCE | |---------------------------------------------------------------|---------------| | 34 368 kbit/s ― E3 (signaux numériques) |ETSI EN 300 689| | 139 264 kbit/s ― E4 (signaux numériques) |ETSI EN 300 690|

La recommandation de la Commission européenne
sur les marchés pertinents

Le 17 décembre 2007, la Commission européenne a publié la nouvelle liste des « marchés pertinents », modifiant celle publiée le 11 février 2003.
Dans son ancienne liste, qui comportait dix-huit marchés pertinents, la Commission européenne qualifiait de pertinents trois marchés de services de capacité. Il s'agissait des marchés suivants :
― le marché de détail des services de capacité (ex-marché 7) ;
― le marché de gros des prestations de segment terminal de services de capacité (ex-marché 13) ;
― le marché de gros des prestations de segment interurbain de services de capacité (ex-marché 14).
Dans la liste publiée le 17 décembre 2007, la Commission européenne a retiré le marché de détail et le marché de gros des prestations de segment interurbain de services de capacité pour ne retenir que le marché de gros des prestations de segment terminal de services de capacité (marché 6), consistant en la « fourniture en gros de segments terminaux de lignes louées, quelle que soit la technologie utilisée pour fournir la capacité louée ou réservée ».
Concernant le segment interurbain, dans la notice accompagnant la liste des marchés pertinents, la Commission européenne explique que des réseaux d'infrastructures parallèles ont été déployés dans tous les Etats membres, notamment sur les principales routes interurbaines, conduisant à baisser les barrières à l'entrée. Par ailleurs, la Commission européenne note que dans la majorité des Etats membres, les ARN ont conclu au caractère suffisamment concurrentiel du marché de gros du segment interurbain en raison du nombre important de réseaux alternatifs à celui de l'opérateur historique pour l'acheminement de services de capacité.
Néanmoins, la Commission européenne reconnaît que certaines liaisons peuvent continuer d'être peu concurrentielles, ce qui pourrait conduire certaines ARN à démontrer que le marché de gros des prestations de segment interurbain de services de capacité remplit les trois critères en vu de justifier sa régulation ex ante.
Par ailleurs, concernant le marché de détail, la Commission estime que la mise en œuvre de la régulation sur les marchés de gros devrait conduire à l'existence d'un nombre limité de barrières à l'entrée, et qu'il n'est plus nécessaire de continuer à imposer la fourniture de l'ensemble minimal de liaisons louées.

  1. Les textes français

L'article R. 9 du CPCE dispose que : « On entend par "liaison louée” la mise à disposition par un opérateur d'une capacité de transmission entre des points de terminaison déterminés d'un réseau ouvert au public, au profit d'un utilisateur, à l'exclusion de toute commutation contrôlée par cet utilisateur. »
De ces définitions des textes européens et français, on retiendra qu'une liaison louée est un service de capacité de transmission dédiée à un utilisateur, assurant une transparence aux applications transportées et ne comportant pas de commutation contrôlée par l'utilisateur.

D. ― Typologie des services de capacité par nature technique

Les protocoles utilisés par les communications électroniques peuvent être répartis en sept couches dont les trois premières sont les suivantes :

| 3 | Couche réseau | Commutation dynamique de paquet : IP | |:-:|:-------------:|:----------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------:| | 2 |Couche liaison |Commutation « statique » de paquet : Ethernet (au niveau de l'adresse MAC), Frame Relay, X 25, ATM
Anneau : Token ring
Point-à-point : PPP| | 1 |Couche physique| Transmission de données :
RS-232 (port série PC),
PDH (E1 2 Mbit/s, E3 34 Mbit/s)
SDH (STM-1 155 Mbit/s, STM-64 10 Gbit/s) |

Par analogie avec ce modèle, les services commercialisés par les opérateurs sont dénommés de niveau 1, 2 ou 3 (auquel on a ajouté un niveau « 0 », terminologie employée quelquefois pour désigner les infrastructures physiques passives) :

|SERVICE DE L'OPÉRATEUR| FONCTIONNALITÉS POUR LE CLIENT | |----------------------|--------------------------------------------------| | Services niveau 3 | Multipoint « dynamique » (ex : routage IP) | | Services niveau 2 | Multipoint « statique » (ex : Ethernet, ATM...) | | Services niveau 1 |Transmission « brute », généralement point à point| |Services niveau « 0 » | Support physique ou porteuse |

Chaque niveau de service intègre le ou les niveaux de service inférieur.
Les services de niveau 0 sont, vus du client, des infrastructures passives n'apportant aucun service de transmission. Parmi les services commercialisés, on trouve les paires de cuivre nues, la fibre optique nue, les fourreaux, les fréquences hertziennes. Pour bâtir un service de communication électronique, il faut leur ajouter des équipements actifs de transmission, de commutation et/ou de routage.
Les services de niveau 1 sont, vus du client, composés d'un « tuyau » assurant la transmission et d'un équipement d'extrémité posé par l'opérateur permettant l'interconnexion avec les équipements du client. Ils fournissent une capacité de transmission « brute » entre sites, généralement point à point, caractérisée par un débit et des niveaux de qualité de service donnés. Ils ne gèrent que les paramètres de qualité de service du niveau 1 de la couche OSI.
Parmi les services de niveau 1 commercialisés sur le marché, on trouve les liaisons louées traditionnelles (sur support cuivre, optique ou hertzien), les liaisons Ethernet en point à point (Lan-to-Lan ou interconnexion de deux réseaux locaux distants), les liaisons SAN ou ESCON en point-à-point. Les liaisons Ethernet peuvent être bâties sur des supports en cuivre ou en optique. En revanche, les liaisons SAN ou ESCON sont bâties sur des supports optiques.
Les services de niveau 2, de type réseau privé virtuel (VPN) en ATM ou Ethernet, sont généralement point à multipoint et quelquefois multipoint à multipoint (« any-to-any »). Ils n'incorporent qu'un degré de commutation statique et non la commutation ou le routage dynamique des paquets envoyés par le client : la commutation ne concerne que des « tunnels » ou des capacités virtuelles à l'intérieur du réseau de l'opérateur par des mécanismes de type VC ou VPN ATM ou bien VLAN Ethernet (7). Les services de niveau 2 se présentent, vus du client, comme une somme de liaisons point à point ; aussi, ces services sont classés parmi les services de capacité de transmission du fait de leur proximité avec les services de niveau 1.
Les services de niveau 3, parmi lesquels les services de transmission de données commutées du type X.25 et Frame Relay ainsi que les réseaux privés virtuels IP (RPV IP), incorporent des fonctions de routage intelligent des paquets envoyés par les clients. Ce sont des services plus sophistiqués que les services de capacité de transmission « bruts » ou que les services de niveau 2.

(7) Commutation des adresses MAC des équipements.

E. ― Définitions des notions utilisées dans la présente décision

  1. Territoire d'analyse.
    On entend par « territoire d'analyse » l'ensemble du territoire métropolitain, des départements et régions d'outre-mer ainsi que les collectivités d'outre-mer où les dispositions des articles L. 37-1 et suivants du CPCE s'appliquent.
  2. Complément terrestre.
    On entend par « complément terrestre » le tronçon de liaison louée compris entre la station d'atterrissement d'un câble sous-marin et un point de livraison auquel viennent s'interconnecter les opérateurs acheteurs.
  3. Segment terminal.
    On entend par « segment terminal » le tronçon compris entre le site client et le premier brasseur, soit de liaisons louées, soit ATM dans le cas de services de capacités à interfaces alternatives.
  4. Circuit interurbain.
    On entend par « circuit interurbain » le tronçon entre deux brasseurs qui permet en reliant deux segments terminaux de construire une liaison louée point à point.
  5. Circuit interurbain intraterritorial.
    On entend par « circuit interurbain intraterritorial » un circuit interurbain entre des équipements de réseaux présents sur un même territoire : France métropolitaine, département, région ou collectivité territoriale d'outre-mer.
  6. Circuit interurbain interterritorial.
    On entend par « circuit interurbain interterritorial » un circuit interurbain entre des équipements réseaux présents sur deux territoires au sens de la précédente définition.

I. ― DÉFINITION DES MARCHÉS PERTINENTS

Dans cette partie, l'Autorité conduit trois analyses visant à définir l'ensemble des marchés de services de capacité pertinents pour une régulation sectorielle. L'Autorité procède ainsi successivement pour chaque marché (marché de détail, marché de gros du segment terminal et marchés de gros du segment interurbain) à :
― une définition du marché en termes de produits et services ;
― une délimitation géographique de ces marchés ;
― une analyse visant à conclure sur la pertinence des marchés ainsi définis pour une régulation sectorielle ex ante.

A. ― Délimitation des marchés en termes de produits et services

  1. Principes généraux

La délimitation des marchés du point de vue des services repose sur l'analyse de :
― la substituabilité du côté de la demande : deux produits appartiennent à un même marché s'ils sont suffisamment « interchangeables » (8) pour leurs utilisateurs, notamment du point de vue de l'usage qui est fait des produits et services, de leurs caractéristiques, de leur tarification, de leurs conditions de distribution, des coûts de « migration » d'un produit vers l'autre. Afin d'apprécier cette notion d'interchangeabilité, l'analyse doit entre autres prouver que la substitution entre les deux produits est rapide (9) et doit prendre en compte les « coûts d'adaptation (10) » qui en découlent ;
― la substituabilité du côté de l'offre : la substituabilité du côté de l'offre est caractérisée lorsqu'un opérateur qui n'est pas actuellement présent sur un marché donné est susceptible d'y entrer rapidement en réponse à une augmentation du prix des produits qui y sont vendus.
Pour établir l'existence d'une éventuelle substituabilité du côté de la demande ou de l'offre, l'analyse peut impliquer la mise en œuvre de la méthode dite du « test du monopoleur hypothétique », ainsi que le suggèrent les lignes directrices de la Commission (11). Ce test consiste à étudier les effets qu'aurait sur la demande une augmentation légère mais durable des prix d'un service (5 à 10 %), de manière à déterminer s'il existe des services considérés comme substituables par les demandeurs vers lesquels ils sont susceptibles de s'orienter. Ce test doit être appliqué jusqu'à ce qu'il puisse être établi qu'une augmentation des prix relatifs à l'intérieur des marchés géographiques et de produits définis ne conduira pas les consommateurs à opter pour des substituts directement disponibles ou à s'adresser à des fournisseurs établis sur d'autres territoires. Ainsi que le mentionnent les lignes directrices, l'utilité essentielle de cet outil réside dans son caractère conceptuel, sa mise en œuvre n'impliquant pas une étude économétrique systématique poussée.
Conformément au point 5 des lignes directrices, l'Autorité se référera aux « principes et [aux] méthodes du droit de la concurrence pour définir les marchés qui devront être soumis à une réglementation ex ante ».
Dans ce qui suit, l'Autorité délimite de manière successive, au terme d'une analyse de substituabilité :
― le marché de détail des services de capacité ;
― le marché de gros des prestations du segment terminal des services de capacité ;
― les marchés de gros des prestations du segment interurbain, comprenant les marchés des prestations intraterritoriales et interterritoriales.

(8) Point 51 des lignes directrices 2002/C 165/03 de la Commission des Communautés européennes du 11 juillet 2002. (9) Point 49 de ces lignes directrices. (10) Point 50 de ces lignes directrices. (11) Point 40 de ces lignes directrices.

  1. Le marché de détail des services de capacité

Lors de sa précédente analyse de marché, l'Autorité avait défini le marché de détail en partant de l'ensemble minimal de liaisons louées alors en vigueur et en examinant la substituabilité du côté de la demande et de l'offre de ce segment de marché avec les segments de services les plus « proches ». L'Autorité adopte dans la suite de la présente décision la même démarche que lors de la précédente analyse de marché.
La demande en services de capacité sur le marché de détail provient des besoins des entreprises et des administrations qui ont au moins deux sites et qui échangent entre leurs sites des quantités importantes de services de communications électroniques (principalement de voix et de données).
Ces besoins se convertissent en consommation lorsque trois conditions sont réunies :
― avoir un intérêt économique à acheter un service de capacité plutôt qu'un service à la durée dès que l'on dépasse un certain volume d'échanges : l'achat de liaisons louées pour l'échange de la voix permet de « forfaitiser » la dépense plutôt que de payer à la durée ;
― souhaiter contrôler ou séparer la gestion d'une partie du service (notamment la partie « routage ») : l'achat d'un service de capacités plutôt que de services de transmission de données plus packagés comme les RPV IP qui peuvent rendre les mêmes services peut s'expliquer par la volonté de conserver le contrôle d'une partie du service ;
― acheter sur le marché plutôt que de déployer ses propres infrastructures : certaines des plus grandes entreprises françaises (les entreprises de transport comme la SNCF, les autoroutes, EDF) ont déployé des réseaux propres à une époque où elles trouvaient les tarifs des liaisons louées trop élevés ou parce que les réponses techniques sur le marché ne les satisfaisaient pas. L'ouverture à la concurrence et la diversification des services qui en a découlé renforcent la tendance des entreprises, même les plus importantes, à externaliser leurs besoins de communications entre sites, au moins jusqu'à la couche de transport.

Inclusion de l'ensemble minimal et des autres liaisons louées
jusqu'à 2Mbit/s dans le même marché

Du côté de la demande :
Il existe une chaîne de substituabilité continue et forte allant des liaisons louées analogiques aux liaisons louées numériques de 2 Mbit/s, c'est-à-dire entre les liaisons louées de l'ensemble minimal et les autres liaisons louées de moins de 2 Mbit/s.
Entre les liaisons louées analogiques, numériques très bas débit et les liaisons louées numériques 64 kbit/s, la substituabilité de la demande se manifeste par le fait que les acheteurs remplacent leurs liaisons louées analogiques ou numériques très bas débit par des liaisons louées à 64 kbit/s ou au-delà à mesure qu'ils passent à des applications internes plus récentes et plus consommatrices en débits et que le différentiel de prix se réduit entre ces catégories de liaisons.
La substituabilité des liaisons louées numériques de 64 kbit/s à 2 Mbit/s du côté de la demande (montée en débit progressive des acheteurs de 64 kbit/s vers les 2 Mbit/s) résulte des caractéristiques techniques identiques en termes d'interfaces, de qualité de service, de disponibilité géographique et des applications supportées (voix, données, vidéo) entre ces liaisons qui favorisent le passage au niveau supérieur dès que les besoins en débit de l'entreprise augmentent (avec la croissance de l'activité ou des évolutions dans les applications internes) ou que les prix se rapprochent, notamment en raison d'une diminution tarifaire importante de la 2 Mbit/s au cours des dernières années.
Du côté de l'offre :
Jusqu'à 2 Mbit/s, la substituabilité de l'offre résulte du fait que le réseau d'accès est le même (boucle locale de cuivre) ; le cœur de réseau logique utilisé est le même pour fournir les services (par exemple le réseau RTNM des liaisons louées pour l'opérateur historique) ; enfin, des coûts de changements dans les équipements d'extrémités côté client (ETCD) et côté opérateur (ADM et PAM) sur un même site représentent une part limitée du coût total (12).
Les différences de coûts selon les technologies de production des liaisons louées pour passer d'une liaison louée donnée à la liaison louée de débit immédiatement supérieur sont généralement réduites : coûts de remplacement d'équipements terminaux qui restent peu différents et surcoût de brassage dû à un débit supérieur (occupation des ports de sortie du brasseur). La seule différence de coût sensible existante se fait lors du passage d'une liaison louée de 128 kbit/s à une liaison louée de 256 kbit/s du fait de l'utilisation systématique d'une seconde paire de cuivre à partir de ce débit. Cependant, cette différence de coût n'est pas suffisamment importante pour provoquer une véritable rupture dans la chaîne de substituabilité par l'offre pour qui a déjà effectué les investissements en génie civil.

(12) En outre, ce ne sont pas des coûts perdus puisque l'opérateur peut réinstaller les équipements ailleurs jusqu'à la fin de la période d'amortissement, à l'exception peut-être de certains équipements posés dans des produits ne connaissant pas de renouvellement de la demande.

Conclusion :
L'ancien ensemble minimal de liaisons louées est inclus dans un ensemble plus large allant des liaisons louées analogiques aux liaisons louées numériques 2 Mbit/s.

Inclusion des liaisons louées jusqu'à 2 Mbit/s
et des liaisons louées de plus de 2 Mbit/s dans le même marché

Du côté de la demande :
Du côté de la demande des clients, même si nombre d'entre eux ont bridé leurs applications (notamment informatiques) pour demeurer en dessous de 2 Mbit/s (13), les besoins en débits « réels » des entreprises forment un continuum en débit et ne marquent pas une rupture brutale entre 2 et 34 Mbit/s, la liaison à 34 Mbit/s étant le produit technique de débit supérieur le plus proche de la liaison louée 2 Mbit/s. A titre d'exemple, le nombre de circuits voix d'une liaison louée dépend du nombre d'employés des sites reliés et ne passe pas brusquement de 2 Mbit/s à 34 Mbit/s. De même, plutôt que d'utiliser une liaison voix à 2 Mbit/s et plusieurs liaisons de données à 2 Mbit/s séparées, les entreprises, si elles trouvaient les offres adéquates, préfèreraient faire passer tout le trafic entre deux sites sur une même liaison de débit supérieur. On peut d'ailleurs constater que sur le marché des capacités alternatives où l'offre en débits est plus riche, les entreprises optent pour des raccordements à 4, 6, 8, 10, 15, 20 Mbit/s, etc. selon leurs besoins en débits voix et données. Il y a donc une demande latente pour les liaisons louées entre 2 et 34 Mbit/s. De même, la continuité des débits et des offres montre une substituabilité importante entre les offres de débit plus important, 34 Mbit/s, n*34Mbit/s et 155 Mbit/s.

(13) Notamment du fait de différentiels de prix sensibles entre 2 et 34 Mbit/s.

Du côté de l'offre :
Du côté de l'offre, il y a aujourd'hui une rupture entre 2 Mbit/s et 10 Mbit/s, quel que soit le type d'interface : cette rupture dans la substituabilité de l'offre correspond au déploiement d'un réseau d'accès en cuivre pour les débits inférieurs à 8 Mbit/s qui sont réalisables avec quatre canaux 2 Mbit/s et d'un réseau en fibre optique nécessaire pour proposer des offres à plus de 10 Mbit/s.
Néanmoins, comme l'a noté l'Autorité dans sa décision d'analyse de marché du haut débit et du très haut débit n° 2008-835, les coûts de déploiement d'un nouveau réseau d'accès en fibre sont essentiellement liés à la construction des infrastructures de génie civil nécessaires au tirage des câbles en cuivre ou fibre.
Au titre de l'ancien monopole, France Télécom a hérité du réseau de boucle locale cuivre couvrant l'ensemble du territoire, sur lequel sont aujourd'hui fondées les offres DSL et liaisons louées cuivre, ainsi que du réseau d'infrastructures de génie civil dans lequel a été déployée une grande partie de la boucle locale cuivre, notamment dans les zones urbaines et les agglomérations.
Le déploiement de fibre optique pour le raccordement de sites en vue de la fourniture d'offres de services de capacité sur fibre s'effectue également dans des fourreaux de génie civil. Etant en mesure de déployer de la fibre optique dans ses propres fourreaux de génie civil, France Télécom peut ainsi proposer dans un délai raisonnable des offres de services de capacité sur fibre à plus de 10 Mbit/s, ce qui tend à exercer une pression concurrentielle sur ses concurrents en les forçant à être présents sur l'ensemble des offres.
La fourniture de services de capacité de moins de 10 Mbit/s, fondés sur la boucle cuivre, et celle de services de capacité de plus de 10 Mbit/s, fondés sur fibre optique, sont ainsi soumis à des contraintes concurrentielles homogènes.
Pour les débits supérieurs à 10 Mbit/s, la chaîne de substituabilité par l'offre ne présente pas de discontinuité forte car les changements d'équipements ne représentent qu'une part relativement réduite des coûts et les différentiels de prix de ces équipements terminaux ne sont pas suffisants pour provoquer une rupture dans la substituabilité par l'offre.
Conclusion :
Les liaisons louées de détail, tous débits confondus, font partie du même ensemble.

Inclusion des liaisons louées et des services de capacité
avec interfaces alternatives dans le même marché pertinent

Les liaisons louées sont des produits anciens dans le secteur des télécommunications, utilisés largement par les entreprises dès les années 80. Elles ont fait l'objet d'une normalisation de la part de l'ETSI et de l'UIT, notamment au niveau des interfaces, c'est-à-dire des caractéristiques des équipements terminaux (cf. I. ― Introduction). Les services de capacité de transmission avec des interfaces alternatives (ATM, Ethernet, SAN, ESCON, Fibre Channel) sont apparus plus récemment sur le marché de détail en France, à partir de 1997. Ils ont fait l'objet d'une normalisation ou d'une standardisation de leurs caractéristiques techniques au cours des dernières années et évoluent rapidement afin d'incorporer de nouvelles fonctionnalités techniques, généralement pour rapprocher leurs caractéristiques de celles des liaisons louées tout en ajoutant des fonctionnalités supplémentaires par rapport aux liaisons louées traditionnelles. Du fait de ces évolutions, ils sont de plus en plus utilisés par les clients sur le marché de détail comme substitut aux liaisons louées traditionnelles.
Les services de capacité avec interfaces alternatives sont de niveaux 1 et 2 (ATM, Ethernet et liaisons de stockage informatiques de type SAN, ESCON ou Fibre Channel).
Lors du précédent cycle d'analyse de marché, l'Autorité avait noté une migration progressive des liaisons louées, capacités à interfaces traditionnelles, vers des services de capacité avec interfaces alternatives, principalement avec interfaces en Ethernet. L'évolution du marché au cours des dernières années a confirmé le succès des interfaces alternatives, et notamment de l'Ethernet, auprès des clients sur le marché de détail.
Du côté de la demande :
Les liaisons louées sont des capacités de transmission transparentes, bidirectionnelles et symétriques, ce qui signifie que l'utilisateur peut en faire usage pour transporter n'importe quel service de communications électroniques (données, voix, vidéo). Les liaisons louées se présentent généralement sous la forme d'un service point à point ; la normalisation ETSI y fait d'ailleurs explicitement référence. Cependant, au cours des dernières années, des liaisons louées permettant des architectures point à multipoints, voire maillées, sont apparues.
Pour assurer cette transparence vis-à-vis des services, les liaisons louées possèdent un certain nombre de caractéristiques de qualité de service qui ont fait l'objet d'une normalisation (temps de transmission, gigue, débit garanti, temps de rétablissement et interruption maximale de service).
En outre, les liaisons louées traditionnelles possèdent, pour les clients, des caractéristiques techniques et commerciales appréciées : une large gamme de débits, l'absence de limitation technique en termes de longueur (usages locaux, régionaux, nationaux ou internationaux) et, pour les liaisons louées numériques, une supervision par les opérateurs apportant une garantie en termes de rétablissement du service, importante pour les applications les plus critiques.

Les facteurs de substituabilité

Les facteurs importants dans l'arbitrage et la substituabilité entre les liaisons louées et les services de capacité sont d'abord ceux listés par les lignes directrices sur l'analyse du marché 2002/C 165/03 de la Commission européenne :
― les caractéristiques techniques « objectives » : les normes et standards permettant de faire des comparaisons de niveaux de qualité de service objectifs ainsi que les fonctionnalités techniques permettant de transporter différents services de communications électroniques ;
― les niveaux de prix pouvant jouer dans l'adoption de tel ou tel service (à service équivalent ou proche) et les usages sur le marché entendu dans le sens du type de services de communications électroniques transportés (voix, données, accès à internet, vidéo).
En outre, de façon plus macroscopique, deux autres facteurs jouent un rôle important sur ce marché :
― le premier est la disponibilité du service, notamment sur un plan géographique, du fait de la politique d'offre adoptée par les opérateurs : la substituabilité entre deux services peut être freinée par une couverture géographique insuffisante du territoire ;
― le second recouvre l'ensemble des paramètres de nature « organisationnelle » qui peuvent provoquer une certaine inertie dans les usages des entreprises clients à court terme mais s'éroder fortement à moyen ou long terme (par exemple, la qualité de service perçue, l'organisation de l'entreprise pour ses besoins en télécommunications, etc.).

Un rapprochement des caractéristiques techniques entre les deux types de services

Les protocoles de niveau 2, comme ATM ou Ethernet, fonctionnent, contrairement aux liaisons louées, en mode paquet mais disposent également de mécanismes de gestion de la qualité de service, issus du monde de la donnée (latence, gigue, taille de rafale, et taux de perte de paquets). Ces protocoles sont par ailleurs particulièrement adaptés à la mise en œuvre de liaisons point à multipoints.
Sur le plan des caractéristiques techniques, le protocole ATM a été développé pour permettre des services temps réels comme la voix et devait, en théorie, servir à tous les usages. La qualité CBR (débit garanti symétrique) d'ATM est souvent qualifiée de « qualité liaison louée » ou d'« émulation de circuit » : transparence aux applications transportées, symétrie et débit garanti sont proches des liaisons louées normalisées.
En revanche, le protocole Ethernet, issu de l'informatique et utilisé massivement dans les réseaux locaux informatiques, présentait jusqu'à récemment des caractéristiques techniques qui ne permettaient pas d'obtenir la qualité de service des liaisons louées et des limitations en terme de longueur des liaisons possibles. Cependant, au cours des dernières années, les évolutions ont amélioré considérablement les caractéristiques techniques des services de capacité en Ethernet, permettant à la fois une meilleure gestion de la qualité de service et une facilité d'utilisation plus importante.
Les améliorations de niveau de qualité des services de capacité avec interfaces alternatives permettent, en théorie, d'atteindre une qualité de service comparable aux liaisons louées traditionnelles en termes de transparence (capacité à transporter toutes les applications, notamment en temps réel), de garantie de débits, d'étanchéité des flux pour le client et d'absence de limitation en termes de longueur. Elles permettent notamment la prise en charge, dans des conditions aujourd'hui correctes, du transport de la voix sur IP à l'intérieur des réseaux d'opérateurs.
Par ailleurs, les services avec interfaces alternatives (notamment Ethernet) présentent des caractéristiques techniques supplémentaires par rapport aux liaisons louées :
― une plus grande palette de qualité de service et de débits ;
― une solution adaptée aux architectures multi-sites de type réseaux privés virtuels, avec notamment des coûts de mise en œuvre inférieurs, et une plus grande facilité d'utilisation.
Ainsi la substitution des liaisons louées par les services de capacité avec interfaces alternatives auprès des entreprises achetant des offres de services de capacité est actuellement très forte et semble devoir se poursuivre à l'horizon de la présente analyse de marché.
Du côté de l'offre :
Pour un opérateur ayant déployé un réseau d'accès dans la boucle locale, que ce soit en cuivre ou en fibre optique, le passage d'une liaison louée traditionnelle à un service de capacité avec interfaces alternatives pour un même client se fait à un coût réduit (dû au changement d'équipement d'extrémité côté client et côté réseau), les deux services peuvent être fournis sur les mêmes cœurs de réseaux en MPLS, ATM voire SDH.
Sur le segment des services de capacité sur fibre optique, la substituabilité par l'offre est conservée entre services de moins de 155 Mbit/s et services de 1 Gbit/s et plus : malgré des différences de coûts sensibles entre les équipements terminaux (commutateurs ou convertisseurs optiques) de moins de 155 Mbit/s et de 1 Gbit/s et plus, ceux-ci sont bien moindres que les coûts liés au déploiement de réseau d'accès en fibre. Par ailleurs, les équipements terminaux peuvent être installés rapidement et sont réutilisables auprès d'un autre client, ce qui atténue grandement l'impact du passage d'un service à l'autre pour les opérateurs. D'ailleurs, tous les opérateurs fournissant des services de moins de 155 Mbit/s fournissent également des services à débits supérieurs à 1 Gbit/s.
Cela est illustré par deux services de France Télécom SMHD et VPN HD qui proposent, sur des couches SDH ou WDM aussi bien des interfaces liaisons louées (interfaces SDH à 34 et 155 Mbit/s) que des interfaces Fast Ethernet, Giga Ethernet ou de stockage informatiques (SAN, ESCON, Fibre Channel).
Conclusion :
L'ensemble des liaisons louées, tous débits confondus, et des services de capacité avec interfaces alternatives font partie du même ensemble des services de capacité.

Exclusion des réseaux privés virtuels IP du marché pertinent
des services de capacité

Du côté de la demande :
Les réseaux privés virtuels IP (ci-après dénommés « RPV IP ») sont des services de communications électroniques simulant une continuité de réseau IP entre différents sites. Ils sont actuellement en plein essor, notamment en raison du remplacement des anciens contrats de transmission de données commutées en X.25 ou Frame Relay par des contrats de RPV IP. L'autre essor des réseaux privés virtuels IP provient de la substitution des anciens contrats de liaisons louées de détail souscrits par des clients multi-sites en RPV IP. Cette substitution provient de deux phénomènes majeurs : la montée en puissance déjà mentionnée des applications en IP dans les entreprises (remplacement d'anciennes applications informatiques notamment avec l'intranet ou encapsulation des applications informatiques antérieures pour le transport, enfin, convergence voix-donnée avec la voix sur IP) et montée en puissance des capacités avec interfaces alternatives, qui peuvent par ailleurs être fournies sur xDSL, comme support des RPV IP en remplacement des liaisons louées traditionnelles dans le réseau d'accès. Ces facteurs de substituabilité des liaisons louées de détail vers les réseaux privés virtuels IP sont les mêmes que ceux étudiés pour les services de capacité avec interfaces alternatives de détail.
Le principal frein à la substituabilité des liaisons louées et services de capacité avec interfaces alternatives et des réseaux privés virtuels IP est la différence dans le mode d'achat adopté par les entreprises : certaines entreprises ou administrations qui achètent des services de capacité souhaitent séparer la fourniture de capacités (niveau 1 ou 2) de la fonction de routage IP entre équipements actifs installés dans les sites reliés (niveau 3). Cette séparation correspond :
― soit à la volonté de conserver la fonction de routage IP en interne pour mieux la contrôler, notamment pour des considérations de qualité de service : les réticences des clients de liaisons louées attachés à l'aspect garanti, dédié et sécurisé de la bande passante fournie par les liaisons louées, qui sont en train de s'atténuer pour les services ATM ou Ethernet du fait des mécanismes de gestion de la qualité de service au niveau 2 demeurent largement vis-à-vis des RPV IP ;
― soit à la volonté de mettre en concurrence les opérateurs de réseau avec des intégrateurs en constituant un lot séparé de celui de la transmission de données afin d'en retirer un surcroît de concurrence (baisse des prix ou meilleure qualité de service). A l'inverse, l'achat d'un service de réseau privé virtuel IP, plus packagé que la simple capacité de niveau 1 ou 2, est le fait d'entreprises et d'administrations qui externalisent la fonction de routage entre leurs sites auprès d'un opérateur ou d'un intégrateur.
Du côté de l'offre :
Il n'y a pas de substituabilité du côté de l'offre car les intégrateurs qui fournissent les RPV IP n'ont pas de nécessité de posséder un réseau en propre et ne sont donc pas en mesure de fournir des services de capacité.
Conclusion :
Les services de RPV IP ne sont pas substituables aux liaisons louées.

Exclusion des services de transmission de données (X.25 et Frame Relay)
du marché pertinent des services de capacité

Le positionnement concurrentiel des services X.25 et Frame Relay est proche de celui des RPV IP. Il est donc considéré que ces services ne sont pas substituables aux liaisons louées.

Exclusion des services de niveau « 0 » du marché pertinent des services de capacité

Sur le marché de détail, l'achat d'infrastructures physiques passives est très rare et ne présente pas de « substituabilité » avec les services de capacité.
Tout d'abord, la demande potentielle pour des services « support » reste rare et marginale : seules quelques très grandes entreprises ayant des besoins non satisfaits pour des débits très élevés le manifestent.
La demande potentielle est également « restreinte » par une offre rare, que ce soit de la part des gestionnaires d'infrastructures ou de la part des opérateurs. Les gestionnaires d'infrastructures et les opérateurs ne louent pas ces supports (paires de cuivre ou fibre optique) aux clients du marché de détail, sauf exception (collectivités locales notamment) car ils en retirent une valeur ajoutée très faible.
Par ailleurs, les opérateurs refusent que leurs clients retirent les équipements terminaux des services de capacité qu'ils commercialisent pour poser leurs propres équipements sur des paires de cuivre ou des fibres optiques (clauses contractuelles).

  1. Le marché de gros des prestations de segment terminal

Les offres de capacités sur le segment terminal consistent pour un opérateur à raccorder ses points de présence (POP) à deux types de sites :
― des sites de clients finals professionnels, entreprises ou administrations (besoins de demi-circuits) pour leur fournir des services de détail (services de capacité de détail, accès à internet bas et haut débit, voix, X.25, Frame Relay ou RPV IP). Dans ce cas, l'opérateur installera par ses moyens propres ou achètera sur le marché de gros du segment terminal le service de capacité le plus adapté qui servira d'input à la fourniture du service de détail. Il pourra notamment, si cela est techniquement réalisable, mutualiser sur un seul service de capacité (un seul accès) des besoins de plusieurs marchés de détail séparés mais partageant les mêmes services support de niveau 1 ou 2 ;
― des éléments de réseau distants en vue de compléter son propre réseau de collecte ou le réseau de collecte d'un opérateur client.
Dans la recommandation sur les marchés pertinents du 17 décembre 2007 susvisée de la Commission, la fourniture de capacités sur le segment terminal n'est restreinte ni en interfaces ni en débits. Comme cela a été rappelé précédemment, cette recommandation mentionne néanmoins le fait de pouvoir segmenter les marchés selon les débits.
L'Autorité note que France Télécom indique dans sa réponse à la consultation publique considérer que la fourniture d'offres de gros sur le segment terminal destinées à permettre le raccordement d'éléments de réseau ne vise pas directement à permettre la fourniture sur le marché de détail directement sous-jacent de services de capacités destinés à l'utilisateur final, et par là-même s'écarte de l'objectif fondamental de la régulation qui est de remédier à l'absence de concurrence sur le marché de détail.
L'Autorité ne partage pas l'analyse de France Télécom, notamment en ce que la capacité pour les opérateurs à disposer de capacités leur permettant de constituer leur réseau de collecte est une condition nécessaire au développement d'offres concurrentielles sur l'ensemble des marchés de détail, et qu'à ce titre l'exigence de permettre l'utilisation de ces offres pour constituer leur réseau de collecte apparaît légitime et proportionnée.

Séparation entre segment terminal et circuit interurbain

La recommandation de la Commission européenne du 11 février 2003 susvisée indiquait : « Les éléments constitutifs des segments terminaux dépendront de la topologie du réseau propre à chaque Etat membre et seront désignés par l'ARN compétente. » Cette formulation est reprise dans la notice explicative jointe à la recommandation du 17 décembre 2007, qui précise que, sur les marchés de gros, il est possible de distinguer des marchés séparés pour le segment terminal et le circuit interurbain et que la séparation entre ces deux marchés est laissée à l'appréciation des ARN compte tenu des architectures des réseaux :
« At the wholesale level, it is possible to distinguish separate markets, in particular between the terminating segments of a leased circuit (sometimes called local tails or local segments) and the trunk segments. What constitutes a terminating segment will depend on the network topology specific to particular Member States and will be decided upon by the relevant NRA. »
La frontière entre marché de gros des prestations du segment terminal et marché de gros du segment interurbain est définie par rapport à l'architecture de référence du réseau de France Télécom pour la constitution de services de capacité de détail.
Pour le réseau de France Télécom, les nœuds de réseau définissant cette frontière sont l'ensemble des brasseurs (ATM et liaisons louées) utilisés actuellement pour constituer des services de capacité pour compte propre ou dans le cadre de l'interconnexion avec les opérateurs entrants, et qui représentent plusieurs centaines de sites. Ce périmètre est susceptible d'évoluer avec des évolutions technologiques.
Cela conduit aux points de séparation suivants entre les deux marchés :
― pour les liaisons louées : le premier brasseur de liaisons louées ; celui-ci joue un rôle actif pour les liaisons louées jusqu'à 2 Mbit/s (brassage des IT) mais n'est qu'un point d'interconnexion pour les liaisons louées de débits supérieurs (34 et 155 Mbit/s principalement) appelé CFTSA (Centre de France Télécom ouvert aux services d'aboutement) ;
― pour les services de capacité avec interfaces alternatives : le premier brasseur ATM (ou équivalent), aussi appelé SRHD (site de raccordement haut débit) dans les offres de gros de France Télécom.
L'approche retenue pour la délimitation du marché de gros en termes de services s'appuie sur l'analyse faite pour le marché de détail.

Substituabilité entre segments terminaux de liaisons louées à interface traditionnelle
et segments terminaux de liaisons louées à interfaces alternatives

Du côté de la demande :
Dans le passé, les opérateurs achetaient plutôt des segments terminaux à interface traditionnelle pour offrir un service de détail voix ou de liaison louée traditionnelle et des segments terminaux à interface alternative pour offrir un service de détail d'accès à internet ou de liaison louée à interface alternative. Dans le second cas, l'opérateur était néanmoins contraint d'acheter des segments terminaux traditionnels dans les zones où les services à interfaces alternatives n'étaient pas disponibles.
L'évolution des protocoles et l'amélioration de la qualité de service des segments terminaux à interface alternative rendent désormais de plus en plus possible l'utilisation de ces derniers pour un usage mixte, comme cela a été vu précédemment dans la délimitation du marché de détail.
Du côté de l'offre :
La substituabilité de l'offre sur le segment terminal est équivalente à celle sur le marché de détail des liaisons louées.
Conclusion :
Du fait de l'existence d'une forte substituabilité du côté de la demande et de l'offre, les liaisons louées à interfaces traditionnelles et les services de capacité avec interfaces alternatives sont inclus dans le même marché du segment terminal.

Substituabilité entre segments terminaux de moins de 10 Mbit/s et de plus de 10 Mbit/s

Du côté de la demande :
Du côté de la demande, en cas de mutualisation des architectures d'interconnexion entre bas et haut débit, la substituabilité est techniquement très forte (possibilités de mutualiser plusieurs « feuilles » sur un même tronc, que ce soient les liaisons partielles terminales sur les liaisons d'aboutement ou les feuilles DSL-E et Collecte Ethernet Optique Opérateur [CE2O] sur un même tronc).
Dans les faits, au moment de la première analyse de marché en 2006, il était ressorti que les opérateurs entrants étaient encore marqués par leur mode d'entrée sur le marché, ce qui pouvait conduire à une certaine discontinuité dans la substituabilité en débits sur le segment terminal avec une polarisation des opérateurs soit sur des services à moins de 10 Mbit/s, soit sur des services à plus de 10 Mbit/s : les opérateurs ayant déployé des MAN optiques semblaient rester plutôt concentrés sur des services à plus de 10 Mbit/s, notamment Ethernet, et faiblement actifs sur les services de moins de 10 Mbit/s (notamment les RPV IP). A l'inverse, les opérateurs entrés sur le marché en déployant un réseau national semblaient rester concentrés sur des besoins à moins de 10 Mbit/s, notamment les services de transmission de données en Frame Relay ou RPV IP.
Au cours de la période couverte par le premier cycle d'analyse de marché, la situation semble avoir évolué avec la disponibilité d'offres de gros dans tous les segments de débits jusqu'à 100 Mbit/s pour l'offre CE2O et 155 Mbit/s pour les liaisons partielles terminales avec une volonté des opérateurs de couvrir la totalité des segments de marché et de pouvoir adresser la demande de montée en débits des sites sur le territoire et la généralisation de services de type « réseaux privés virtuels ».
Du côté de l'offre :
Du côté de l'offre, il y a aujourd'hui une rupture entre 2 Mbit/s et 10 Mbit/s, quel que soit le type d'interface : cette rupture dans la substituabilité de l'offre correspond au déploiement d'un réseau d'accès en cuivre pour les débits inférieurs à 8 Mbit/s réalisables avec quatre canaux 2 Mbit/s et d'un réseau en fibre optique à partir de 10 Mbit/s.
Néanmoins, comme l'a noté l'Autorité dans sa décision d'analyse de marché du haut débit et du très haut débit n° 08-0835 susvisée, les coûts de déploiement d'un nouveau réseau d'accès en fibre sont essentiellement liés à la construction des infrastructures de génie civil nécessaires au tirage des câbles en cuivre ou fibre.
Ainsi que cela a été présenté précédemment dans l'analyse de substituabilité sur le marché de détail des services de capacité, la fourniture de services de capacité de moins de 10 Mbit/s, fondés sur la boucle cuivre, et celle de services de capacité de plus de 10 Mbit/s, fondés sur fibre optique, sont soumises à des contraintes concurrentielles homogènes.
Pour les débits supérieurs à 10 Mbit/s, la chaîne de substituabilité par l'offre ne présente pas de discontinuité forte car les changements d'équipements ne représentent qu'une part relativement réduite des coûts et les différentiels de prix de ces équipements terminaux ne sont pas suffisants pour provoquer une rupture dans la substituabilité par l'offre.
Conclusion :
La substituabilité de la demande sur le marché de gros des prestations du segment terminal des services de capacité se prolonge entre 2 Mbit/s et les débits supérieurs grâce aux liaisons n*2 Mbit/s sur fibre optique.
Sur le marché de gros, l'ensemble des prestations du segment terminal, tous débits confondus, fait partie du même ensemble.

Exclusion des offres sur DSL

Pour construire leurs offres de détail à destination des entreprises, les opérateurs peuvent être amenés à utiliser des offres sur support DSL afin de raccorder leurs clients, notamment pour la création de réseaux privés virtuels IP ou de la voix.
Du côté de la demande :
Les services sur DSL sont disponibles sur une large partie du territoire, France Télécom ayant équipé l'ensemble des répartiteurs situés en France métropolitaine et dans les départements d'outre-mer. Néanmoins, en raison des caractéristiques techniques du DSL, une partie des entreprises situées trop loin des répartiteurs ne sont pas éligibles aux offres DSL, ou nécessitent la mise en œuvre d'offres multipaires. Par ailleurs, le raccordement par un lien DSL ne semble pas permettre dans la grande majorité des cas de procéder à des augmentations de débit pour le client final. Dès lors, même si l'on observe une migration d'une partie du parc des liaisons louées traditionnelles vers des liaisons DSL, cela semble plus s'expliquer par la facilité de mise en œuvre des réseaux privés virtuels que par une réelle substituabilité entre les services de capacité de type liaisons louées et les services sur DSL.
Du côté de l'offre :
Les opérateurs présents sur le marché de gros des offres DSL activées en tant qu'offreurs sont d'une part France Télécom, via la fourniture des offres « bitstream » de type DSL-E pour le raccordement de sites professionnels, et les opérateurs alternatifs, sur la base du dégroupage de la boucle locale cuivre.
Pour un opérateur ne fournissant aujourd'hui que des offres DSL, et n'ayant à ce titre installé que des équipements DSL, la fourniture d'offre de gros de segment terminal de service de capacité nécessite des investissements conséquents, d'une part en termes d'équipements, et d'autre part en termes de déploiement de nouveaux réseaux de boucle locale dans le cas de la fourniture d'offres de gros de segment terminal sur fibre optique.
Conclusion :
Au final, il semble que la substituabilité entre les offres DSL et les offres de services de capacité ne soit pas avérée. Cette conclusion rejoint celle qui avait été faite dans l'analyse de marché du haut débit et du très haut débit concernant la substituabilité entre les offres activées sur DSL livrées à un niveau infranational et les offres de gros de services de capacité et qui avait conclu à l'absence de substituabilité entre les deux produits.

Exclusion des offres physiques passives des marchés

Les offres d'infrastructures physiques passives (niveau « 0 ») de gros ne sont pas soumises aux mêmes contraintes concurrentielles que les offres activées de gros de segment terminal de services de capacité.
Les infrastructures physiques passives support au marché de gros du segment terminal se situent en amont de ce marché, et les transactions concernant ces infrastructures sont courantes (paire de cuivre nue via le dégroupage total ou mise à disposition de fréquences via le dégroupage partiel, location de fibres noires, location de fourreaux).
Lorsque c'est possible, l'achat d'infrastructures est souvent préféré par les opérateurs à l'achat de services de capacité ; il y a d'ailleurs une demande non satisfaite pour des offres d'infrastructures passives (notamment la location de fourreaux ou de fibre noire), qui se reporte sur les services de capacité.
Les offres de gros de segment terminal de services de capacité sont quant à elles des offres plus intégrées, dans lesquelles les opérateurs clients utilisent des accès du réseau d'un autre opérateur. Les opérateurs clients sont ainsi soumis aux choix techniques de l'opérateur qui les leur propose et ont une latitude plus limitée à se différencier.
L'Autorité considère donc, au titre de la présente analyse, que ces offres ne font pas partie du marché du segment terminal (avec une substituabilité avec les services de niveau 1 ou 2) mais plutôt des éléments de l'arbitrage entre faire ou acheter « make or buy ».
En revanche, la mise à disposition d'infrastructures passives peut constituer un remède sur les marchés pertinents analysés pour permettre aux opérateurs de construire leur raccordement en propre, comme l'avait d'ailleurs noté l'Autorité de la concurrence dans son avis 06-A-10 sur la précédente analyse de marché des services de capacité menée par l'Autorité pour la période 2006-2009.

Absence des services de niveau 3 sur le segment terminal

Sur le marché de détail, l'analyse menée a écarté les services de niveau 3 du marché des services de capacité, notamment parce que, côté demande, les clients ne substituaient pas les services de niveau 3 et les offres de capacité.
De la même manière, sur le marché de gros du segment terminal, les opérateurs n'achètent pas de services de transmission de données. Il n'y a donc pas de question de substituabilité avec les services de capacité à examiner à l'horizon de la présente analyse.

  1. Le marché de gros des prestations du segment interurbain

Pour les opérateurs entrants sur le marché fixe vendant des services de capacité concurrents de France Télécom, les nœuds de réseau principaux intervenant dans le circuit interurbain sont leurs points de présence à l'intérieur des agglomérations, mentionnés précédemment et qui représentent la séparation entre marchés du segment terminal et du segment interurbain. Il convient d'ajouter à ces points les nœuds d'échange de trafic où plusieurs opérateurs s'interconnectent facilement par simple aboutement de leurs équipements. Ces nœuds supplémentaires à inclure dans le circuit interurbain sont les « carrier hotels » et les nœuds d'échange de trafic Internet qui jouent le rôle de « POPs mutualisés ».

Le marché de gros des prestations du segment interurbain intraterritorial

Compte tenu des analyses conduites précédemment pour les marchés de gros du segment terminal et le marché de détail, le marché de gros des prestations du segment interurbain en termes de services comprend tous les services de capacité de transmission (de niveau 1 ou 2), quels que soient leurs débits et leurs interfaces entre les brasseurs du réseau de France Télécom (brasseurs ATM et liaisons louées) permettant de constituer des liaisons louées, notamment de détail, en complément des produits du segment terminal. Figurent également dans le marché les services de capacité commercialisés entre les points de présence des opérateurs, y compris sur les boucles optiques qu'ils ont déployées à l'intérieur des agglomérations pour raccorder les nœuds du réseau de France Télécom et des autres opérateurs dans le cadre de l'interconnexion.
De même que dans les analyses précédemment menées, les services de gros de niveau 3 (et au-dessus) commercialisés sur les mêmes éléments de réseau physique que les services de niveau 1 ou 2 comme les services commutés (voix ou accès à Internet commutés) ou de transit IP ne font pas partie du marché du circuit interurbain.
Enfin, les infrastructures passives support (fibre optique, fourreaux) ne peuvent pas être incluses dans le marché du circuit interurbain pour les mêmes raisons que celles développées pour le segment terminal.

Le marché de gros des prestations du segment interurbain interterritorial

Hormis les différences structurelles découlant de leurs définitions respectives (cf. E. ― Définitions des notions utilisées dans la présente décision), le périmètre fonctionnel du marché de gros du segment interurbain interterritorial est le même que celui énoncé au paragraphe précédent pour le marché de gros du segment interurbain intraterritorial. Ces différences structurelles entraînent cependant certaines spécificités importantes.
La demande sur le circuit interurbain entre la métropole et les départements d'outre-mer, d'une part, et entre départements d'outre-mer (notamment les axes Guadeloupe-Martinique-Guyane), d'autre part, provient des opérateurs fixes et mobiles actifs sur ces régions.
Pour fournir leurs prestations de communications électroniques et interconnecter leurs réseaux à l'Internet mondial, ces opérateurs achètent des capacités de transport sur le circuit interurbain entre leurs points de présence outre-mer et un point de présence en métropole (généralement en région parisienne pour les opérateurs nouveaux entrants).
Par ailleurs, pour fournir leurs prestations de communications électroniques entre les départements d'outre-mer, les opérateurs achètent des capacités de transport sur le circuit interurbain entre leur point de présence dans le premier département et leur point de présence dans le second département.
Plusieurs solutions techniques sont disponibles pour véhiculer le trafic : les liaisons satellitaires ou les câbles sous-marins.
Cependant, les liaisons satellitaires n'ont pas un degré de substituabilité suffisant par rapport aux câbles sous-marins et ne peuvent représenter une alternative au transport par câbles sous-marins. Elles souffrent de défauts importants :
― une qualité de service bien moindre (notamment au niveau du temps de latence) qui dégrade le service à des niveaux peu acceptables pour les applications en temps réel ;
― un coût au Mbit/s bien supérieur à celui du câble (lorsque celui-ci est tarifé à proximité des coûts) ;
― une difficulté à obtenir facilement des capacités importantes supplémentaires.
Aussi, l'usage des liaisons satellitaires se fait généralement à des fins de sécurisation ou lorsque les câbles sont proposés à des prix de monopole (cellophane fallacy). Il en est de même des faisceaux hertziens entre deux îles ou entre une île et le continent, plus vulnérables encore aux conditions climatiques que le satellite.
Par ailleurs, la nécessité de disposer d'une sécurisation (c'est-à-dire d'avoir un deuxième circuit de transport indépendant du premier, typiquement un second câble sous-marin), notamment parce que le risque de coupure des câbles est grand (principalement à proximité des zones terrestres), conduit généralement les clients opérateurs à rechercher deux voies de transmission, ce qui avantage le contrôle d'une infrastructure.
Du fait du parcours des câbles sous-marins entre la métropole et les départements de la Martinique, de la Guadeloupe et de la Guyane, une partie des achats de capacités entre deux départements d'outre-mer sert à transporter un trafic entre un département d'outre-mer et la métropole (ainsi pour les câbles ECFS qui participent au réseau de câbles sous-marins qui relie la Guadeloupe et la Martinique à la métropole, de même pour le câble Americas II qui participe au lien entre les deux départements des Antilles et la Guyane à la métropole).
Compte tenu du tracé des câbles sous-marins existants, l'Autorité estime que certaines prestations ne doivent pas faire l'objet de marchés spécifiques. En effet, au vu des informations dont elle dispose, il apparaît qu'une prestation de circuit interurbain entre un territoire 1, situé sur l'océan Indien (Réunion), et un territoire 2, situé de l'autre côté de l'océan Atlantique (Guadeloupe, Martinique ou Guyane), se découperait en théorie en une prestation de circuit interurbain entre le territoire 1 et la métropole et une prestation de circuit interurbain entre la métropole et le territoire 2. De même, il n'existe pas de câble sous-marin desservant Saint-Pierre-et-Miquelon et Mayotte.
Les prestations pertinentes sur le marché de gros du circuit interurbain sont donc celles qui relient chacun des quatre départements d'outre-mer à la métropole ainsi que celles qui relient les départements de la zone Antilles-Guyane entre eux.
L'Autorité pourra être amenée à revoir son analyse en tant que de besoin en cas de déploiement de nouveaux câbles.

B. ― Délimitation géographique des marchés

  1. Principes généraux

Il est rappelé au point 56 des lignes directrices susvisées que, « selon une jurisprudence constante, le marché géographique pertinent peut être défini comme le territoire sur lequel les entreprises concernées sont engagées dans la fourniture ou la demande des produits ou services pertinents, où elles sont exposées à des conditions de concurrence similaires ou suffisamment homogènes et qui se distingue des territoires voisins sur lesquels les conditions de concurrence sont sensiblement différentes ».
La Commission précise au point 59 des lignes directrices susvisées que dans le secteur des communications électroniques, la portée géographique du marché pertinent est traditionnellement déterminée par référence à deux critères principaux qui permettent de procéder à la délimitation géographique des marchés de communications électroniques : le territoire couvert par les réseaux, d'une part, et l'existence d'instruments de nature juridique conduisant à distinguer telle ou telle zone géographique ou, au contraire, à considérer que le marché est de dimension nationale, d'autre part.
En se référant aux lignes directrices de la Commission, il conviendra de déterminer si des opérateurs qui ne sont pas encore présents sur une zone géographique donnée, mais le sont sur une autre zone géographique, feront le choix d'y entrer à court terme en cas d'augmentation des prix relatifs. Dans ce cas, la définition du marché doit être étendue à la zone sur laquelle ces opérateurs ne sont pas encore présents.

  1. Le marché de détail

Lors de la délimitation du marché de détail des services de capacité en termes de services, l'Autorité a conclu à ce que le marché comprenait l'ensemble des offres de services de capacité, quels que soient leurs interfaces et leurs débits.
Il convient tout d'abord de noter que France Télécom est présente sur la quasi-totalité du territoire national. Certains produits sont proposés de façon identique sur l'ensemble du territoire (par exemple les liaisons louées Transfix). D'autres ne sont disponibles que dans les zones les plus denses (par exemple VPN HD ou Ethernet Link).
Les opérateurs alternatifs ne couvrent aujourd'hui par leurs réseaux propres que quelques agglomérations, mais peuvent proposer des services de détail sur une grande partie du territoire en utilisant les offres de gros de l'opérateur historique. Là encore, la couverture des opérateurs alternatifs s'étend, notamment au regard de l'implication des collectivités publiques en termes d'équipement des zones d'activités.
Il n'existe donc pas de critères objectifs permettant de délimiter plusieurs zones géographiques en fonction de la couverture des réseaux. La délimitation d'un marché géographique pertinent englobant le périmètre effectivement déployé des réseaux des opérateurs n'aurait pas de sens dans le cadre de la régulation sectorielle ex ante car le périmètre des réseaux est relativement mouvant et changeant, ce qui nécessiterait une révision permanente de la délimitation des marchés et une insécurité juridique pour le marché.
L'Autorité estime par ailleurs qu'une segmentation géographique trop fine des marchés de capacité aurait également pour conséquence d'opérer une distinction arbitraire entre les différentes zones géographiques et de figer le marché.
Enfin, le cadre juridique étant le même sur l'ensemble du territoire, il n'existe pas de critère justifiant une distinction de zones géographiques en fonction de différences de réglementation.
Il convient au surplus de constater qu'en raison du caractère « multisite » des entreprises achetant des services de capacité, il ne semble pas possible de définir un niveau de concurrence « local ». En effet, dans une zone géographique donnée, la concurrence dépendra du nombre d'opérateurs en mesure d'adresser les sites des clients dans la zone, mais aussi du niveau de concurrence sur les autres sites des clients. Ainsi, il semble que le marché de détail des services de capacité est national, recouvrant l'ensemble du territoire métropolitain, des départements et régions d'outre-mer, ainsi que les collectivités d'outre-mer où les dispositions des articles L. 37-1 et suivants du CPCE s'appliquent.

  1. Le marché de gros des prestations du segment terminal

Lors de la délimitation du marché de gros des prestations du segment terminal en termes de services, l'Autorité a conclu à ce que le marché comprenait l'ensemble des offres de gros de services de capacité, quels que soient leurs interfaces et leurs débits.
Pour les mêmes raisons que celles développées sur l'analyse du périmètre géographique du marché de détail des services de capacité, l'Autorité estime, notamment en raison du caractère « multisite » et de la nécessaire ubiquité des opérateurs sur les marchés de gros, c'est-à-dire leur capacité à couvrir l'ensemble du territoire afin d'adresser leurs clients sur le marché de détail des services de capacité, que le marché de gros des prestations du segment terminal est un marché national, s'entendant comme l'ensemble du territoire métropolitain, des départements et régions d'outre-mer, ainsi que les collectivités d'outre-mer où les dispositions des articles L. 37-1 et suivants du CPCE s'appliquent.

  1. Le marché de gros des prestations du segment interurbain

D'un point de vue géographique, il convient de définir en premier lieu le marché du circuit interurbain intraterritorial sur l'ensemble du territoire national.
En second lieu, sont également définis les marchés interterritoriaux suivants :
― métropole-Martinique ;
― métropole-Guadeloupe ;
― métropole-Guyane ;
― métropole-Réunion ;
― Martinique-Guyane ;
― Martinique-Guadeloupe ;
― Guadeloupe-Guyane.
L'analyse de la pertinence des marchés des prestations du segment interurbain interterritorial proposera toutefois de distinguer les routes transatlantiques, d'une part, de celles vers l'océan Indien, d'autre part, possédant des caractéristiques concurrentielles suffisamment homogènes pour en permettre une analyse conjointe.

C. ― Pertinence des marchés pour la régulation

  1. Principes généraux

Dans l'analyse qui suit, sont examinés, sur les marchés de services précédemment délimités, les trois critères suivants, définis par la Commission européenne dans sa recommandation du 17 décembre 2009 susvisée :
― existence de « barrières élevées et non provisoires à l'entrée, qu'elles soient de nature structurelle, légale ou réglementaire » ;
― prise en compte des seuls marchés dont la « structure ne présage pas d'évolution vers une situation de concurrence effective au cours de la période visée » ;
― « incapacité du droit de la concurrence à remédier à lui seul à la ou aux défaillances concernées du marché » (14).
La vérification du test des trois critères est un prérequis indispensable à la mise en œuvre d'une régulation ex ante sur ce marché, dès lors qu'il ne figure plus dans la recommandation de la Commission européenne en date du 17 décembre 2007 susvisée, ce qui est le cas des marchés de gros des prestations du segment interurbain et du marché de détail. Néanmoins, dans ce qui suit, l'Autorité conduira ce test sur l'ensemble des marchés identifiés précédemment, y compris le marché de gros des prestations du segment terminal.

(14) Article 2 de la recommandation.

  1. Le marché de détail

La recommandation de la Commission européenne concernant les marchés pertinents de produits et services dans le secteur des communications électroniques n'a pas recensé au titre des marchés pertinents le marché de détail.

Barrières à l'entrée

En première approche, l'entrée sur ce marché nécessite un coût d'investissement important, en particulier parce qu'il est impossible, techniquement et économiquement, de dupliquer non seulement la boucle locale mais aussi le réseau de desserte interrépartiteur de France Télécom. Le niveau des investissements nécessaires des opérateurs comparés aux revenus procurés par les services reste une barrière économique à l'entrée très élevée, notamment pour les opérateurs qui ne sont présents que sur un seul marché professionnel.
Par ailleurs, France Télécom, en sa qualité d'opérateur historique, dispose de nombreux avantages. Tout d'abord, il bénéficie d'importantes économies d'échelle et de gamme grâce à l'importance de ses volumes de production. Il dispose également d'une gamme de services plus étendue que celle des opérateurs alternatifs.
Enfin, le marché des services de capacité est caractérisé par des coûts de changement d'opérateurs très élevés qui poussent les entreprises à réaliser des lots importants, d'une durée assez longue, et à réduire le nombre de fournisseurs pour ce type de services, tendances qui favorisent l'opérateur en place. Par conséquent, les opérateurs en place, et en particulier l'opérateur historique, disposent de conditions plus favorables que les éventuels nouveaux entrants.
Néanmoins, l'introduction des offres de gros du segment terminal de services de capacité, d'une part, et le développement du dégroupage et du bitstream professionnel, d'autre part, permettent aux opérateurs d'adresser à moindres coûts le marché de détail. De même, le déploiement d'infrastructures optiques en propre permet d'accéder aux sites des clients pour leur fournir des services de plus de 10 Mbit/s, même s'il se limite aux principales zones d'activités économiques réunissant suffisamment de demande potentielle pour rentabiliser les investissements.
La mise en œuvre d'obligations adaptées sur les marchés de gros sous-jacents tend à abaisser les barrières à l'entrée sur le marché de détail des services de capacité. Celles-ci demeurent néanmoins élevées, notamment sur la fourniture de services de capacité sur cuivre.

Absence d'évolution vers une situation de concurrence effective

A ce stade, l'Autorité constate que les parts de marchés des opérateurs ont peu évolué durant le dernier cycle d'analyse de marché. Néanmoins, cette évolution est plus significative sur certains segments de marchés.
Ainsi, il semble que, dans les zones où les opérateurs sont présents avec des infrastructures en propre depuis assez longtemps, ceux-ci sont en mesure de proposer des offres attractives avec notamment un niveau élevé de qualité de service. Par ailleurs, l'appétence croissante des entreprises pour les offres en Ethernet, qui peuvent être livrées en DSL pour les débits les plus faibles, semblent offrir aux opérateurs entrants la possibilité de proposer des offres attractives. Cela traduit un mouvement de fond, s'inscrivant dans la durée, qui apparaît en tout état de cause assuré sur le long terme.

Insuffisance du droit de la concurrence
pour remédier aux problèmes de concurrence constatés

Il convient de rappeler que l'Autorité se doit de privilégier la régulation des marchés de gros pour permettre une concurrence effective sur les marchés de détail situés en aval.
Le marché de détail des services de capacité, comme l'ensemble des marchés « entreprises » est caractérisé par une certaine opacité, en raison du mode de contractualisation, qui permet une négociation entre les parties mais aussi en raison de la possibilité donnée aux acteurs de proposer des offres sur mesure. En effet, le caractère « multisite » des clients conduit les opérateurs à formuler des offres qui peuvent s'appuyer sur un ensemble de produits techniques différents (support DSL, support liaisons louées, en propre ou par le biais d'offres de gros), rendant la comparaison des offres difficile, voire conduisant à la formulation d'offres sur mesure.
En particulier, France Télécom, compte tenu, d'une part, de son statut privilégié d'ancien monopole et, d'autre part, de l'influence significative qu'elle exerce sur les différents marchés de gros amont, est en mesure de mettre en œuvre des pratiques ciblées sur le marché de détail des services de capacité, par le biais de négociations et d'offres sur mesure purement tarifaires, c'est-à-dire non fondées sur l'adaptation spécifique des offres de gros existantes à une problématique technique bien identifiée.
Sans obligations supplémentaires sur les marchés de gros, le droit de la concurrence n'est pas nécessairement le mieux outillé pour traiter ce genre de spécificités et garantir une concurrence effective sur le marché de détail. Compte tenu des difficultés à accéder aux informations pertinentes nécessaires à l'instruction et des délais particulièrement longs qui en découlent, les procédures devant l'Autorité de la concurrence ne sont pas toujours adaptées à l'urgence des situations. Il peut lui être difficile par exemple d'appréhender, en l'absence d'obligations spécifiques sur les marchés de gros, en particulier à l'occasion d'une demande d'intervention en mesures conservatoires, une seule offre sur mesure qui, sans nécessairement être prédatrice, pourrait avoir pour effet d'évincer les concurrents potentiels en raison de l'impossibilité de réplicabilité de cette offre.
A ce titre, lors du premier cycle d'analyse des marchés des services de capacité, l'Autorité avait interdit à France Télécom, en tant qu'opérateur exerçant une influence significative sur le marché de détail des services de capacité, de proposer des offres sur mesure purement tarifaires sur le marché de détail des services de capacité, qui ne seraient pas justifiées par des critères techniques permettant de répondre à une demande spécifique.
A l'occasion du nouveau cycle d'analyse des marchés, l'Autorité estime nécessaire d'analyser l'évolution de cette situation au regard, d'une part, du développement progressif de la concurrence sur le marché de détail des services de capacité, notamment pour les accès produits sur fibre optique, et, d'autre part, de la mise en œuvre d'une régulation adaptée sur les marchés de gros amont. Avec la levée de l'interdiction pour France Télécom de proposer des offres sur mesure purement tarifaires, le risque de pratiques discriminatoires sur le marché de détail, visant à évincer les opérateurs concurrents, et qui ne sauraient être traitées par le droit de la concurrence dans un calendrier satisfaisant en l'absence de remèdes adaptés imposés sur les marchés de gros, reste néanmoins avéré.
Dans cette optique, la mise en place d'un dispositif de surveillance adapté sur les marchés de gros, à travers la communication par France Télécom, pour ses principales offres sur mesure, des « briques » de base du marché de gros utilisées pour la constituer, dans le cadre de la régulation du marché de gros amont du segment terminal de service de capacité, en vue d'accompagner la levée de la régulation du marché de détail des services de capacité, semble particulièrement adaptée.
En outre, la mise en œuvre d'obligations sur les marchés de gros en vue d'assurer une réplicabilité des offres de détail, notamment des offres sur mesure, et une surveillance des espaces économiques qui pourraient ne pas être appréhendés par le seul droit de la concurrence, semble pouvoir conduire à une situation dans laquelle le droit de la concurrence sera en mesure de sanctionner les agissements anticoncurrentiels qui pourraient intervenir sur le marché de détail.
Dans son avis en date du 30 octobre 2009, l'Autorité de la concurrence note à ce titre qu'une « obligation d'information, postérieurement à la remise de l'offre, permettrait à l'ARCEP de disposer des informations relatives aux offres sur mesure faites par l'opérateur historique, sur ce marché traditionnellement caractérisé par une forte opacité », ce qui pourra « faciliter l'examen de ces pratiques par l'Autorité [de la concurrence]. »

  1. Le marché de gros des prestations du segment terminal

La recommandation de la Commission européenne du 17 décembre 2007 recense au titre des marchés pertinents le marché de gros des prestations de segment terminal en tant que sixième marché.
Elle a ainsi estimé qu'il existait sur ces marchés des obstacles à une concurrence effective tels qu'une régulation ex ante pourrait être considérée comme nécessaire.

Barrières à l'entrée

Il existe sur le marché de gros des prestations de segment terminal de fortes barrières à l'entrée, notamment en raison d'une infrastructure d'accès aux sites finaux difficile à dupliquer de manière économiquement raisonnable et des effets d'échelle importants qui sont susceptibles de conduire un opérateur disposant d'une forte part de marché à exercer une influence significative sur ce marché.
Ainsi France Télécom est le seul à disposer d'une boucle locale lui permettant de couvrir l'ensemble du territoire pour offrir des prestations de gros sur cuivre et, pour une part importante des entreprises, sur fibre.
France Télécom fait remarquer dans sa réponse à la consultation publique que les offres combinées des marchés 4 et 5, relatifs respectivement aux infrastructures physiques constitutives de la boucle locale filaire et aux offres d'accès haut débit activées livrées au niveau régional, permettent selon lui de répliquer ses offres de détail de services de capacités fournis sur support cuivre, et qu'il n'existerait ainsi pas de barrières à l'entrée sur le marché de gros du segment terminal.
L'Autorité maintient cependant son analyse car il existe des différences significatives entre les services de capacité et les produits des marchés 4 et 5. En effet, les services de capacité offrent une couverture géographique plus étendue, des niveaux de qualité de service plus élevés que les offres de dégroupage et de bitstream, ce qui a justifié la définition d'un marché distinct.

Absence d'évolution vers une situation de concurrence effective
à horizon de la présente analyse

Cette situation de concurrence est peu susceptible d'évolution du fait du maintien des barrières à l'entrée structurelles, notamment en raison du contrôle du réseau d'accès cuivre par un unique opérateur qui revêt le caractère d'infrastructure essentielle, et qu'il n'est pas envisageable de répliquer économiquement pour concurrencer France Télécom sur le segment du marché de gros des prestations du segment terminal.
Par ailleurs, il apparaît que le déploiement d'infrastructures alternatives pour les réseaux de boucle locale optique a été relativement limité au cours de la période couverte par la précédente décision d'analyse de marché, et que cette situation, qui semble pour le moment limité aux zones les plus denses en entreprises, n'est que peu susceptible d'évolution au cours des trois prochaines années.

Insuffisance du droit de la concurrence pour remédier seul
aux problèmes de concurrence constatés

Dans ces conditions, l'ouverture de ce marché n'est possible que par l'intervention d'une régulation ex ante, qui dispose d'outils adaptés pour réguler l'accès, y compris au plan tarifaire, sur un terme suffisamment long pour qu'une concurrence pérenne puisse se développer. Ces outils spécifiques à la régulation ex ante sont notamment la publication d'une offre de référence, des obligations concernant le niveau tarifaire des offres ou encore la mise en place et le suivi d'obligations comptables et d'audit des coûts. Le seul droit de la concurrence apparaît donc comme insuffisant pour remédier aux problèmes de concurrence structurels existant sur ce marché.

  1. Le marché de gros des prestations du segment interurbain

La recommandation de la Commission européenne susvisée n'a pas recensé au titre des marchés pertinents le marché de gros des prestations de segment interurbain.
Néanmoins, la recommandation indique que la situation pourrait différer selon les pays et que les ARN pourraient être amenées à considérer que la régulation sur les marchés de gros sur certains circuits interurbains est encore nécessaire :
« Individual NRAs may be in a position to demonstrate that trunk segments of leased lines continue to fulfill the three criteria and are susceptible to ex ante regulation. Whilst it might be considered that competition law can address the failure on such thin routes, it is unrealistic to rely solely on competition law for as long as the number of unduplicated trunk routes in a country remains high, considering the general costing and pricing principles that would have to be applied throughout the network. »
Dans ce qui suit, l'Autorité analyse la pertinence de chacun des marchés de services identifiés précédemment sur le marché des prestations de gros sur le segment interurbain :
― le marché intraterritorial sur le territoire national (c'est-à-dire en métropole, dans les départements et collectivités d'outre-mer) ;
― les marchés interterritoriaux suivants :
― métropole-Martinique ;
― métropole-Guadeloupe ;
― métropole-Guyane ;
― métropole-Réunion ;
― Martinique-Guyane ;
― Martinique-Guadeloupe.

Le marché de gros des prestations du segment interurbain intraterritorial

Au cours des trois années passées et la mise en œuvre de la régulation des offres de gros de prestation du segment interurbain, les opérateurs s'approvisionnant sur le marché de gros des prestations du segment terminal ont pris livraison des offres de gros de France Télécom dans les centres France Télécom ouverts aux services d'aboutement pour les liaisons partielles terminales et les sites de raccordements haut débit pour les offres de collecte optique opérateur.
Pour ce faire, les opérateurs alternatifs ont majoritairement utilisé leurs réseaux de collecte, déployés pour le raccordement de leurs boucles locales optiques, pour les besoins du dégroupage et le raccordement des points de livraison DSL de France Télécom (sites raccordement haut débit également), ainsi que pour la téléphonie fixe.
Certains opérateurs alternatifs se positionnent par ailleurs sur le marché de gros des prestations du segment interurbain des services de capacité et semblent en mesure de fournir des prestations sur le marché de gros des prestations de segment interurbain intraterritorial.
Par ailleurs, les barrières à l'entrée sur le marché de gros des prestations du segment interurbain semblent limitées en raison de la disponibilité de capacités passives sur les principales routes, le long des autoroutes par exemple. Même si les services supports ne font pas partie des marchés définis précédemment, leur utilisation, notamment sur le segment de la collecte et des routes interurbaines, se justifie pleinement pour un opérateur nouvel entrant désirant construire un réseau de collecte national. C'est d'ailleurs à partir de ces services supports déployés par les grandes industries de réseau, d'électricité, autoroutière et ferroviaire, que la plupart des opérateurs alternatifs ont déployé des capacités interurbaines ces dernières années.
En outre, certaines collectivités locales ont mené ces dernières années, notamment par le biais de délégations de service public, des projets de déploiements de réseaux de collecte en fibre optique sur leurs territoires, visant à raccorder les NRA (nœuds de raccordement abonnés, sièges des répartiteurs) du réseau de boucle locale cuivre ainsi qu'à desservir les zones d'activité.
Il ressort dès lors que la disponibilité d'offres alternatives à celles de France Télécom et le recours à des infrastructures passives disponibles ont permis d'abaisser significativement les barrières à l'entrée sur le marché de gros des prestations du segment interurbain intraterritorial. Il ne semble donc pas justifié de continuer à considérer que la régulation ex ante est nécessaire.
Dans son avis en date du 30 octobre 2009, l'Autorité de la concurrence invite l'Autorité à « prendre en compte dans son analyse la spécificité éventuelle » du segment entre le continent et la Corse dans la mesure où la levée de la régulation sur le marché de gros du segment interurbain interterritorial soulève « la question de l'éventuel besoin d'une régulation ex ante sur le câble sous-marin entre le continent et l'île ».
Selon les éléments dont l'Autorité a connaissance, la Corse est aujourd'hui desservie depuis le continent par trois câbles sous-marins :
― le câble CC4, établi en 1992 entre Cannes et l'Ile-Rousse, dont France Télécom est le propriétaire et l'exploitant ;
― le câble CC5, établi en 1995 entre Toulon et Ajaccio, dont France Télécom est le propriétaire et l'exploitant ;
― un câble, propriété de la direction générale de l'armement (DGA) et d'Alcatel, établi entre Menton et Bastia, et initialement réservé à des usages militaires, sur lequel la collectivité territoriale de Corse a acquis trois paires de fibre en décembre 2006. La collectivité territoriale a lancé au début du mois d'octobre 2009 un appel d'offres pour une délégation de service public visant à l'exploitation de ces paires de fibres pour permettre la fourniture de services de capacité à l'ensemble des opérateurs.
Dans l'attente de la mise en œuvre de la délégation de service public, France Télécom est aujourd'hui le seul opérateur en mesure d'offrir des capacités sous-marines entre le continent et la Corse sur la base de câbles déployés avant l'ouverture des marchés à la concurrence. Les offres de France Télécom sont structurées soit sous forme de longueur d'onde à 2,5 Gbit/s, soit sous forme de services de capacité à 155 Mbit/s. Plusieurs opérateurs tiers sont ainsi clients de France Télécom.
Il apparaît que les opérateurs nationaux sont tous présents en Corse avec les mêmes offres de détail que celles proposées sur le continent. Sur le marché de détail du haut débit, les opérateurs alternatifs sont ainsi en mesure de desservir l'île de deux façons : soit via l'offre de Bitstream qui peut être livrée sur le continent selon des modalités tarifaires strictement identiques à la desserte du continent par cette même offre, soit via le dégroupage, ce qui nécessite alors de disposer de capacités sous-marines. Cependant le tarif annuel proposé par France Télécom pour une liaison sous-marine continent-Corse s'avère plus élevé, à structure équivalente, à ce qui est pratiqué pour une liaison intraterritoriale sur le continent, de l'ordre de deux fois plus cher. Actuellement, seul SFR propose ainsi des offres de détail haut débit fondées sur le dégroupage, en plus du délégataire Corsica Haut Débit.
Il ressort de ce qui précède que les contraintes relatives à l'acquisition d'une liaison entre la Corse et le continent sont essentiellement d'ordre économiques. Les coûts et les délais de construction d'un câble sous-marin sont considérables et constituent une barrière certaine à l'entrée. Seule France Télécom possède à ce jour ses propres câbles et est en mesure de proposer des services de capacité. Ainsi, l'Autorité de la concurrence souligne dans son avis que « France Télécom est actuellement le seul offreur sur le marché de gros, tant pour les capacités sous-marines que pour les prestations de complément terrestre » et que « ce monopole pourrait s'appréhender comme une barrière à l'entrée ».
Néanmoins, une analyse prospective invite à prendre en considération l'émergence prochaine de nouvelles offres de services de capacité entre la Corse et le continent que proposera le délégataire de la Collectivité territoriale de Corse en charge de l'exploitation des fibres acquises sur le câble DGA. Comme le souligne l'avis d'appel public à la concurrence publié, un des principaux objectifs de cette délégation de service public est de « contribuer à un baisse significative des coûts des liens Corse-continent ». Dès lors, ces nouvelles offres devraient être de nature à faire naître, au cours du nouveau cycle d'analyse, une concurrence animée sur le marché des services de capacité entre la Corse et le continent.
Compte tenu de ces éléments, l'Autorité estime qu'il n'est plus nécessaire d'envisager la régulation des services de capacités entre la Corse et le continent.
L'allégement de la régulation étant largement lié à l'émergence prochaine de nouvelles offres concurrentes du délégataire de la collectivité territoriale de Corse, l'Autorité maintiendra une surveillance étroite de ce marché tant que celles-là ne seront pas effectivement proposées aux opérateurs. Durant cette période antérieure à l'émergence des offres du délégataire, l'Autorité veillera attentivement à ce que France Télécom n'abuse pas de sa puissance sur ce marché. Si l'Autorité devait constater des pratiques susceptibles d'être qualifiées d'abusives, elle pourrait saisir l'Autorité de la concurrence, le cas échéant dans le cadre d'une procédure d'urgence, pour y mettre fin et demander la sanction de la pratique illicite.
SFR souligne dans sa réponse à la consultation publique que Corsica Haut Débit, délégataire actuel de la collectivité territoriale de Corse, étant une filiale de France Télécom, le développement d'une concurrence n'est selon elle pas garanti sur le marché de gros du segment interurbain intraterritorial. SFR ajoute qu'elle souhaiterait en particulier voir se développer une concurrence effective sur les offres de débit 10 Gbit/s qui sont les plus adaptées aux besoins des opérateurs.
Dans la mesure où le développement d'une concurrence effective va dans le sens des intérêts de la collectivité et que celle-ci assume le pilotage de la délégation de service public, avec les moyens de contrôle que lui apporte ce type de montage juridique, l'Autorité estime que ce lien avec France Télécom ne représente pas un obstacle au développement d'une telle concurrence et que la collectivité veillera à ce qu'aucun dysfonctionnement ne l'entrave. De plus, il apparaîtra normal que la collectivité impose à son délégataire de proposer une large gamme d'offres à même de satisfaire les besoins des différentes catégories opérateurs, dans leur diversité.

Le marché de gros des prestations de segment interurbain interterritorial métropole-Martinique,
métropole-Guadeloupe et Martinique-Guadeloupe

Lors du premier cycle d'analyse de marché des services de capacité, l'Autorité avait noté l'existence de :
― deux câbles sous-marins desservent la Martinique (le câble Americas II et le câble ECFS). Concernant ces deux câbles, France Télécom est membre du consortium et possède un monopole d'entrée dans les stations d'atterrissement (partie terrestre) et sur les « compléments terrestres » en Martinique ;
― un unique câble sous-marin pour relier la métropole et la Guadeloupe (le câble ECFS). Concernant ce câble, France Télécom est membre du consortium et possède un monopole d'entrée dans les stations d'atterrissement (partie terrestre) et sur les « compléments terrestres » en Guadeloupe.
Durant la période couverte par le précédent cycle d'analyse de marché des services de capacité, la desserte en câble sous-marin de la Martinique et de la Guadeloupe a significativement été modifiée. En effet, deux câbles ont été ouverts commercialement au second semestre 2007. Il s'agit des câbles Middle Carribean Network (MCN) et Global Carribean Network (GCN) desservant respectivement la Martinique et la Guadeloupe.
GCN, premier des deux câbles mis en service qui relie Porto-Rico à la Guadeloupe, a été déployé dans le cadre de la délégation de service public lancée par la région. Ce câble, dont le coût s'élève à 21,9 millions d'euros (75 % d'aide du Fonds européen de développement régional et 25 % de fonds provenant du groupe Loret), fait l'objet d'une concession de vingt ans. Ce câble a été prolongé vers la Martinique par le câble MCN dans le cadre d'un projet porté par le Groupe Loret, le conseil régional de la Martinique et le programme INTERREG III B de la Commission européenne, dont la part de financement public est de 50 %.
Dans les deux départements, l'accès à ces nouveaux câbles sous-marins est facilité par la possibilité aux opérateurs clients d'être hébergés directement au sein des stations d'atterrissement. Pour les autres câbles existants, les opérateurs alternatifs sont obligés de s'interconnecter avec France Télécom dans des centres ouverts aux services d'aboutement et d'acheter la prestation de complément terrestre qui relie ces centres aux stations d'atterrissement.
Par ailleurs, sur ces deux câbles, les opérateurs alternatifs bénéficient à la fois du jeu concurrentiel existant entre les différents opérateurs, membres du consortium, qui commercialisent des services de capacité sur Americas II et ECFS, et de la possibilité d'acheter de la capacité sous forme d'IRU. Dès lors, il semble que les barrières à l'entrée sur le marché de gros des prestations de segment interurbain entre la métropole et les DOM de la zone caribéenne ont significativement diminué et ne justifient plus le maintien de la régulation ex ante de France Télécom sur ces marchés.
Toutefois, même si la régulation ex ante asymétrique n'apparaît plus de nature à y remédier, des difficultés concurrentielles demeurent dans cette zone.
A ce titre, l'Autorité de la concurrence indique dans son avis n° 09-A-53 susvisée que son instruction a permis de mettre en évidence « les difficultés rencontrées par les fournisseurs d'accès à Internet non intégrés à l'un des deux groupes, Loret et France Télécom », notamment « lors de la négociation de capacités supplémentaires ». Elle précise également dans ce même avis que « l'opérateur Free, déjà présent en métropole sur le marché de détail de l'accès à Internet, a confirmé que la question du coût des capacités sur les câbles sous-marins était l'un des principaux obstacles au lancement de ses services dans les départements d'outre-mer ».
Outremer Télécom souligne également dans sa réponse à la consultation publique que l'arrivée d'un deuxième câble n'a de son point de vue pas substantiellement modifié la situation concurrentielle car les tarifs restent très élevés et quasi identiques chez les deux offreurs, sans adéquation avec les tarifs pratiqués par les autres opérateurs de câbles sous-marins aux Caraïbes.
Consciente des imperfections du fonctionnement de ce marché, qui sans justifier une régulation sectorielle, est susceptible de distordre le jeu concurrentiel sur les marchés aval, l'ARCEP le maintiendra sous une surveillance étroite. La levée de la régulation tarifaire imposée à France Télécom pourrait contribuer à animer la concurrence sur ce marché. Néanmoins, l'absence d'animation concurrentielle et le constat de prix élevés en comparaison avec ceux de liaisons sous-marines, notamment locales, comparables, pourrait conduire l'Autorité à saisir l'Autorité de la concurrence pour enquêter sur les comportements des différents acteurs du marché et, le cas échéant, demander les mesures et sanctions qui s'imposeront alors.

Le marché de gros des prestations de segment interurbain interterritorial métropole-Réunion

Entre la métropole et La Réunion, il n'existe qu'un seul câble sous-marin (le câble SAFE, ou plus précisément, l'assemblage SAT3-WASC-SAFE). Sur ce câble, France Télécom est membre du consortium et possède un monopole d'entrée dans les stations d'atterrissement (partie terrestre) et sur les « compléments terrestres ».
Barrières à l'entrée :
Il n'existait pas de marché de gros entre la métropole et La Réunion avant l'intervention de l'Autorité pour deux décisions de règlement de différends n° 2004-375 et n° 2004-376 sur les conditions d'accès au câble SAFE. France Télécom était jusqu'alors en situation de monopole sur le circuit interurbain entre la métropole et La Réunion et vendait aux clients des liaisons louées du catalogue de détail, éventuellement remisées, à des niveaux de l'ordre de 16 800 € le Mbit/s/mois environ, ce qui lui procurait une marge importante (coût estimé à 900 € le Mbit/s pour 2004).
Pour pouvoir commercialiser des capacités entre la métropole et La Réunion, les autres membres du consortium devaient acheter un demi-circuit à France Télécom en plus du « complément terrestre ». La situation concurrentielle n'avait ainsi pas évolué jusqu'au milieu de l'année 2008.
A partir de cette date, l'arrêt du monopole de commercialisation des capacités sur le câble SAFE a conduit les opérateurs alternatifs qui achetaient précédemment des capacités auprès de France Télécom dans le cadre de l'offre de gros de liaison louée de transport à engager des discussions commerciales avec d'autres membres du consortium disposant de capacités disponibles. Cela a conduit deux des principaux opérateurs alternatifs présents sur le marché fixe à acheter des capacités sous forme d'IRU.
Néanmoins, l'accès au câble reste sous le contrôle de France Télécom. En effet, la possibilité d'hébergement au sein de la station d'atterrissement n'étant pas possible pour les opérateurs alternatifs. Ceux-ci doivent donc s'interconnecter à un des deux centres ouverts aux services d'aboutement (au Port ou à Saint-Denis), et acheter une prestation de complément terrestre.
Ainsi, même si l'achat de capacités par les opérateurs alternatifs a été facilitée depuis l'ouverture du monopole de commercialisation, de nombreuses barrières à l'entrée subsistent, notamment au regard du goulet d'étranglement que constitue le complément terrestre que l'ensemble des opérateurs sont contraints de commander.
Absence d'évolution vers une situation de concurrence effective :
Compte tenu du fait qu'il n'existe pas de réelle alternative à l'utilisation des câbles sous-marins pour la desserte de La Réunion, à tout le moins en ce qui concerne la prestation de complément terrestre, la mise en place d'une situation de concurrence effective semble devoir passer par l'arrivée d'un nouveau câble sous-marin.
A ce stade, aucun nouveau raccordement de l'île de La Réunion aux grands réseaux internationaux n'est prévu, même si plusieurs initiatives ont vu le jour récemment. On peut noter à ce sujet le projet Ravenal du conseil régional de La Réunion : le conseil régional a lancé un appel à intérêts pour un raccordement de l'île à Madagascar dont une partie pourrait faire l'objet d'un financement par les fonds européens de développement régionaux. Si ce projet venait à aboutir, une prolongation du câble déployé vers le futur câble EASSy, qui longera l'Afrique de l'Est via le canal du Mozambique pourrait être envisagée.
Par ailleurs, France Télécom envisage dans le cadre du projet LION de relier La Réunion à la côte est de l'Afrique et ainsi de permettre un nouvel accès pour La Réunion aux câbles transcontinentaux tels les projets de câbles EASSy ou SEACOM.
Compte tenu de l'avancé de ces projets, il ne semble pas qu'à l'horizon de l'analyse de marché, la situation puisse significativement changer. Néanmoins, dans le cas contraire, l'Autorité pourrait réviser son analyse de manière anticipée si nécessaire.
Insuffisance du droit de la concurrence pour remédier aux problèmes de concurrence constatés :
L'accès au câble sous-marin SAFE dans des conditions économiques suffisamment satisfaisantes a été rendu possible par la mise en œuvre de l'offre de liaison louée de transport, imposée au terme de la décision de règlement de différends 04-376 susvisée. Compte tenu des enjeux économiques pour les opérateurs alternatifs, et notamment au vu du fait que le câble SAFE est l'unique câble permettant la desserte de l'île, auquel France Télécom contrôle l'accès, il ne semble pas que le seul droit de la concurrence suffise pour remédier aux problèmes de concurrence constatés, notamment à l'accès au complément terrestre.
L'Autorité, au vu du résultat du test des trois critères estime donc que le marché de gros des prestations de segment interurbain interterritorial métropole-Réunion est pertinent pour la régulation ex ante.

Le marché de gros des prestations de segment interurbain
interterritorial métropole-Guyane et Martinique-Guyane

Barrières à l'entrée :
La desserte de la Guyane en câble sous-marins n'a pas évolué depuis la précédente analyse de marché. Il existe un unique câble, Americas II, qui dessert la Guyane, et également la Martinique. Sur ce câble, France Télécom est membre du consortium et possède un monopole d'entrée dans les stations d'atterrissement (partie terrestre) et sur le « complément terrestre ». De ce fait, les barrières à l'entrée sont importantes pour l'accès au câble en lui-même et sont renforcées par la moindre concurrence des membres du consortium pour offrir des capacités sur le câble.
Absence d'évolution vers une situation de concurrence effective :
Compte tenu du fait qu'il n'existe pas de réelle alternative à l'utilisation des câbles sous-marins pour la desserte de la Guyane, à tout le moins en ce qui concerne la prestation de complément terrestre, la mise en place d'une situation de concurrence effective semble devoir passer par l'arrivée d'un nouveau câble sous-marin.
A l'heure actuelle, les seuls projets de déploiement qui pourraient concerner la Guyane pourraient intervenir dans le cadre du prolongement du câble Global Carribean Network, sous le nom South Carribean Fibre (SCF). Néanmoins, compte tenu des délais de mise en œuvre du projet et de déploiement, il ne semble pas vraisemblable que la situation évolue à l'horizon de l'analyse de marché.
Insuffisance du droit de la concurrence pour remédier seul aux problèmes de concurrence constatés :
Compte tenu des enjeux économiques pour les opérateurs alternatifs, et notamment du fait que le câble Americas II est l'unique câble permettant la desserte de la Guyane, auquel France Télécom contrôle l'accès, il ne semble pas que le seul droit de la concurrence suffise à remédier aux problèmes de concurrence constatés, notamment pour l'accès au complément terrestre.
L'Autorité, au vu du résultat du test des trois critères, estime donc que les marché de gros des prestations de segment interurbain interterritorial métropole-Guyane et Martinique-Guyane sont pertinents pour la régulation ex ante.

II. ― DÉSIGNATION D'UN OPÉRATEUR EXERÇANT UNE INFLUENCE SIGNIFICATIVE
A. ― Principes généraux relatifs à la détermination des conditions
caractérisant une situation d'influence significative

Il découle de l'article 14 de la directive-cadre et du point 5 des lignes directrices publiées par la Commission européenne que les autorités réglementaires nationales ne doivent intervenir pour imposer des obligations aux entreprises que dans la mesure où elles considèrent que les marchés envisagés ne sont pas en situation de concurrence réelle, essentiellement en raison du fait que ces entreprises ont acquis « une position équivalente à une position dominante » au sens de l'article 82 du traité CE.
En droit interne, l'article L. 37-1 du code des postes et des communications électroniques dispose qu'« est réputé exercer une influence significative sur un marché du secteur des communications électroniques tout opérateur qui, pris individuellement ou conjointement avec d'autres, se trouve dans une position équivalente à une position dominante lui permettant de se comporter de manière indépendante vis-à-vis de ses concurrents, de ses clients et des consommateurs ».
Il est précisé au point 5 des lignes directrices susvisées que la Commission et les autorités réglementaires nationales doivent « se fonder sur les principes et les méthodes du droit de la concurrence pour définir les marchés qui devront être soumis à une réglementation ex ante et apprécier la puissance des entreprises sur ces marchés ».
Ainsi, l'Autorité relève que la part de marché d'une entreprise constitue un critère essentiel, bien que non exclusif, de l'évaluation de la puissance d'un acteur. Notamment, d'après une jurisprudence constante (15), la présence de parts de marchés très élevées ― supérieures à 50 % ― suffit, sauf circonstances exceptionnelles, à établir l'existence d'une position dominante. Par ailleurs, l'évolution des parts de marchés de l'entreprise et de ses concurrents sur une période de temps appropriée, constitue un critère supplémentaire en vue d'établir l'influence significative d'un opérateur donné.
En outre, il est rappelé au point 78 des lignes directrices susmentionnées que « l'existence d'une position dominante ne saurait être établie sur le seul fait qu'une entreprise détient d'importantes parts de marché ». En outre, la Commission précise dans ses lignes directrices que l'évaluation de l'influence exercée par un acteur sur le marché se fait sur la base d'une analyse prospective.
L'Autorité pourra ainsi tenir compte dans son analyse de plusieurs critères complémentaires d'ordre qualitatif, comme :
― la taille de l'entreprise ;
― le contrôle d'une infrastructure qu'il n'est pas facile de dupliquer ;
― les avancées ou la supériorité technologiques ;
― l'absence ou la faible présence de contre-pouvoir des acheteurs ;
― la diversification des produits ou des services ;
― l'intégration verticale de l'entreprise ;
― la présence d'économies de gamme ou d'échelle ;
― l'absence de concurrence potentielle ;
― l'existence d'une concurrence par les prix ;
― d'autres critères tels que l'accès privilégié aux marchés des capitaux.

(15) Point 75 des lignes directrices.

B. ― Analyse de puissance sur le marché de gros des prestations du segment terminal

Deux types d'indicateurs, quantitatifs et qualitatifs, permettent de caractériser l'état de la concurrence et d'évaluer l'influence exercée par les différents acteurs positionnés sur le marché analysé.

  1. Les acteurs
    L'opérateur historique

Sur le segment terminal, France Télécom dispose d'abord d'un réseau d'accès en cuivre pour les débits inférieurs à 10 Mbit/s qui couvre la demande en termes de haut débit, services de capacité et téléphonie sur tout le territoire, les zones non rentables ayant été couvertes dans le cadre de la fourniture du service universel. Il a également développé un réseau d'accès pour les débits supérieurs à 10 Mbit/s, qui ne couvre pas la totalité du territoire mais qui se développe rapidement avec la montée en débits des sites clients : déployé en plusieurs phases, il couvre actuellement 170 zones géographiques dans lesquelles France Télécom est en mesure de raccorder les sites à l'intérieur de ces communes en l'espace de 4 à 8 semaines à la demande.
Les services commercialisés par France Télécom sur le segment terminal sont :
― des liaisons louées achetées par les opérateurs à son catalogue de détail (liaisons louées numériques à plus de 64 kbit/s jusqu'à 155 Mbit/s) ;
― l'offre de référence LPT sur le segment terminal (de 64 kbit/s à 155 Mbit/s également) ;
― l'offre DSL-E en offre de gros ;
― des services de capacité avec interfaces alternatives commercialisées dans son catalogue de détail (à la fois des offres point-à-point d'interconnexion de réseaux locaux comme Inter LAN 1.0 ou 2.0 avec interface Ethernet ou des offres point-à-multipoints comme Multi LAN HD en ATM ou SMHD, toutes interfaces confondes) ;
― l'offre « CE2O » avec interface Ethernet depuis le mois d'octobre 2005.
France Télécom a également développé une offre spécifique pour les opérateurs mobiles sur le segment terminal, l'offre AIRCOM, qui vise à leur permettre de raccorder leurs BTS capillaires à leurs BSC.

Les opérateurs alternatifs

Les opérateurs alternatifs ne couvrent qu'une faible partie de la demande actuelle et potentielle par leurs raccordements en propre. Ils sont donc peu vendeurs de services sur le segment terminal et principalement acheteurs de capacités sur le segment terminal.
Sur le segment de marché du segment terminal à moins de 10 Mbit/s, les opérateurs qui se fondent sur le dégroupage total pour le raccordement de sites entreprises sont en mesure de fournir, sur une partie restreinte du territoire, des capacités dans le segment terminal à moins de 10 Mbit/s aux autres opérateurs qui ne dégroupent pas encore.
Sur le segment de marché du segment terminal à plus de 10 Mbit/s, les opérateurs qui ont déployé des réseaux d'accès métropolitains optiques sont en mesure de fournir des capacités (également à 2 Mbit/s et n*2 Mbit/s sur les sites déjà raccordés), sur les zones d'emprise où ils sont déployés.
En outre, SFR a développé une activité de revente de liaisons louées d'interconnexion « pour compte de tiers » à des opérateurs moins déployés en profitant des différences de tarifs entre liaisons louées d'interconnexion locales et régionales (jusqu'à 2 Mbit/s et n*2 Mbit/s principalement, mais aussi à plus de 10 Mbit/s).

  1. Indicateurs quantitatifs

Le marché de gros des prestations du segment terminal des services est constitué à la fois des offres sur cuivre et des offres sur support optique.
Pour l'ensemble des offres sur cuivre, France Télécom est le seul opérateur à même de fournir ces prestations. Ainsi, France Télécom dispose d'une part de marché supérieur à 99 % sur ce segment du marché de gros des prestations du segment terminal, qui représentait 17 000 accès en 2008.

Vous pouvez consulter le tableau dans le
JOn° 216 du 17/09/2010 texte numéro 65

Pour les offres sur fibre optique, France Télécom propose les offres de liaisons partielles terminales haut débit, à interface traditionnelle, à 34 Mbit/s et 155 Mbit/s ainsi que les offres de collecte Ethernet optique opérateur (CE2O) pour des débits allant de 6 Mbit/s à 100 Mbit/s.
Au cours de la période couverte par l'analyse de marché, les parcs respectifs de ces deux offres ont évolué de la manière suivante :

Vous pouvez consulter le tableau dans le
JOn° 216 du 17/09/2010 texte numéro 65

Par ailleurs, d'autres opérateurs ayant déployé leurs boucles locales optiques proposent des offres activées, soit sur les marchés de gros des services de capacité, soit en revendant directement des offres de détail. Avec les éléments dont dispose l'Autorité, les achats d'offres de gros de segment terminal de services de capacité représentent 3 600 accès très haut débit environ, dont la moitié est vendue par France Télécom.

  1. Indicateurs qualitatifs
    Contrôle d'une infrastructure difficilement duplicable

Sur le segment de marché des services de moins de 10 Mbit/s :
France Télécom est propriétaire d'une infrastructure d'accès aux clients sur le segment terminal très difficile à dupliquer de manière rentable, utilisée notamment pour fournir des services de capacité de détail avec des débits inférieurs à 10 Mbit/s : il s'agit de l'ensemble du réseau d'accès en cuivre. C'est une barrière à l'entrée économique structurelle, durable, que les opérateurs concurrents ne peuvent dupliquer de manière rentable sur l'ensemble du territoire.
Sur le segment de marché des services de plus de 10 Mbit/s :
France Télécom est propriétaire d'une infrastructure d'accès aux clients sur le segment terminal difficile à dupliquer de manière rentable, utilisée notamment pour fournir des services de capacité de détail avec des débits supérieurs à 10 Mbit/s : il s'agit de l'ensemble de ses boucles locales optiques sur le territoire et de son infrastructure de génie civil. Pour les opérateurs alternatifs, le déploiement de boucles de collecte optique intra-agglomérations puis de boucles métropolitaines de raccordement des sites en optique représente une barrière à l'entrée économique structurelle, durable.
Depuis l'année 2001, les déploiements de nouvelles boucles métropolitaines optiques d'opérateurs alternatifs raccordant des sites d'entreprise ont ralenti en France en dehors des initiatives publiques ; les opérateurs privés se limitent à raccorder des sites très proches de leur boucle pour densifier la couverture des zones.

Présence d'importantes économies d'échelle et de gamme

Les économies d'échelle et de gamme explicitées sur le marché de détail sont transposables sur les marchés du segment terminal. En particulier, France Télécom a des volumes de production bien supérieurs à ceux de ses concurrents. En outre, France Télécom bénéficie d'économies de gamme supérieures à ses concurrents : le partage des coûts fixes du réseau d'accès se fait sur une gamme plus étendue d'offres de détail et de gros.

Avantages du précurseur

Les opérateurs acheteurs de produits sur le marché de gros des prestations du segment terminal sont souvent prioritairement clients de France Télécom et encourent un coût de changement d'opérateur élevé.
En effet, la souscription à une offre de référence suppose des volumes de commande importants sur un même nœud de livraison afin de couvrir les coûts fixes liés à l'achat de prestations connexes entre son point de présence et le brasseur de France Télécom (que ce soit les liaisons d'aboutement (LA) de l'architecture d'interconnexion de liaisons louées ou les troncs de TDSL ou de CE2O) ainsi que les coûts internes financiers et humains dans le processus de mise en place de l'interconnexion avec France Télécom (mobilisation d'équipes de techniciens, tests techniques, coûts de système d'information).
Une fois ces coûts fixes engagés, l'opérateur a intérêt à concentrer le plus grand nombre possible de LPT ou de feuilles DSL-E ou CE2O sur le brasseur où il est raccordé pour optimiser les économies d'échelle procurées par l'architecture d'interconnexion avec France Télécom. Ensuite il est naturellement réticent à changer d'opérateur sur une zone donnée.

  1. Conclusion sur l'influence significative sur le marché de gros du segment terminal

France Télécom dispose d'une influence significative sur le marché de gros du segment terminal.

C. ― Analyse de puissance sur le marché de gros des prestations
de segment interurbain interterritorial de et vers La Réunion et la Guyane

Les câbles sous-marins sont des infrastructures particulièrement coûteuses, et donc difficiles à dupliquer. A titre d'illustration, on pourra retenir les ordres de grandeur suivants :
― un investissement initial de l'ordre de 650 millions de dollars américains (16) ;
― des coûts d'exploitation annuels avoisinant 10 % de l'investissement initial ;
― des charges indirectes s'élevant à près de 20 % du total des amortissements annuels.
France Télécom détient des intérêts économiques dans chacune des infrastructures desservant La Réunion et la Guyane, et a bénéficié d'une exclusivité de commercialisation.
De plus, les capacités allouées aux membres des consortiums le sont à des tarifs fortement dégressifs avec la quantité retenue. Ainsi, sur le câble SAFE, il était possible au moment de la constitution du consortium d'acquérir une capacité faible, ce qui permettait l'entrée dans le consortium de nombreux opérateurs. Mais cette capacité était vendue à un prix très supérieur à celui dont bénéficie France Télécom en tant qu'investisseur principal. Cet élément illustre donc les économies d'échelle et de gammes dont France Télécom bénéficie au cas d'espèce.
Les barrières à l'entrée sur ce marché sont donc très fortes. Il n'est en effet pas possible économiquement, pour un opérateur, d'envisager seul la construction d'un nouveau câble sous-marin qui, en tout état de cause, nécessiterait plusieurs années. Par ailleurs, la participation à un consortium n'est possible qu'à la date de sa constitution, de telle sorte qu'un nouvel entrant sur le marché n'a pas la possibilité de se joindre à un consortium existant.
Comme le suggère l'Autorité de la concurrence dans son avis n° 09-A-53 susvisé, il semble nécessaire d'introduire dans l'analyse la distinction entre la partie sous-marine et la partie terrestre.
En effet, l'Autorité de la concurrence souligne que « la pression concurrentielle s'exerçant, pour la partie sous-marine, sur France Télécom en tant que membre des consortia exploitant des câbles sous-marins pour lesquels il ne dispose d'aucun monopole de commercialisation, ne paraît pas pouvoir être appréciée de la même manière que la pression concurrentielle qui s'exerce sur France Télécom en tant qu'opérateur disposant d'un monopole sur l'atterrissement et le complément terrestre de ces mêmes câbles dans les départements d'outre-mer ».

(16) Ainsi, France Télécom aurait dépensé 96 millions de dollars dans le câble SAFE, ce qui représente 15 % des coûts (cf. décision n° 04-374 précitée).

Le complément terrestre

Pour le « complément terrestre », en l'absence de régulation, France Télécom peut exercer un pouvoir de monopole tarifaire quasi absolu lorsqu'il est le seul à pénétrer dans la station d'atterrissement, que ce soit par le biais d'un monopole conféré par les droits de propriété et les accords de consortium (spécifiant un monopole d'un opérateur sur la station d'atterrissement) ou d'un monopole de fait lorsque l'entrée dans une station d'atterrissement et la fourniture de « complément terrestre » représente une barrière à l'entrée économique structurelle pour de petits opérateurs clients ou des opérateurs sur le câble qui n'ont pas intérêt à investir sur un territoire aux perspectives insuffisantes pour eux.
A l'échelle d'un territoire, qui peut être desservi par plusieurs câbles ou plusieurs boucles d'un même câble, le pouvoir de marché de l'opérateur qui a le monopole sur le « complément terrestre » reste entier s'il a le monopole sur toutes les stations d'atterrissement (cas dans les départements d'outre-mer). En revanche, le pouvoir de marché conféré par le monopole sur la pénétration dans une station d'atterrissement peut devenir pratiquement nul s'il existe plusieurs entrées sur le territoire que l'opérateur ne contrôle pas : ce serait le cas par exemple sur les routes transatlantiques entre les Etats-Unis et la métropole où l'existence de routes (câbles en l'occurrence) passant par le Royaume-Uni ou l'Espagne rend théoriquement nul le monopole de France Télécom sur la pénétration dans la station d'atterrissement en Bretagne.

Le câble sous-marin

Pour la partie du transport sous-marin, le pouvoir de marché dépend de la situation sur les câbles :
― il est très important sur les câbles où l'opérateur commercialise des demi-circuits à ses concurrents (grâce à un monopole sur l'atterrissement), dont il fixe unilatéralement les tarifs, et des circuits complets pour son propre compte ; il est alors en mesure de mettre en œuvre un effet de ciseau entre les deux tarifs pour évincer ses concurrents ;
― il est plus réduit sur les câbles sous-marins où l'opérateur est en concurrence pour des circuits complets. Le degré de concurrence sur un câble donné entre les membres d'un consortium augmente fortement avec le nombre de concurrents réellement actifs sur la route, et est une fonction croissante de la capacité de réserve disponible (à la fois la capacité propre à chaque opérateur et la capacité libre), ce qui est généralement le cas sur les câbles les plus récents ; l'effet joue bien sûr en sens inverse si le nombre de concurrents sur la route est faible et la capacité disponible réduite pour l'ensemble des acteurs. Dans ce cas, le pouvoir de marché des opérateurs vendeurs augmente étant donné que, écoulant en priorité le trafic de leurs propres services, ils fixent un tarif augmentant parallèlement à la réduction de la capacité marginale restante sur le câble ; des comportements anticoncurrentiels peuvent même s'observer entre acteurs bridant la capacité disponible pour conserver des prix élevés sur le marché libre ;
― enfin, le pouvoir de marché sur la partie strictement sous-marine peut se réduire sensiblement en cas de duplication de câbles sur une route donnée avec au moins un câble ayant de nombreux acteurs, avec beaucoup de capacités disponibles (cas sur les câbles transatlantiques).

  1. Le marché de gros des prestations de segment interurbain interterritorial métropole-Réunion

France Télécom est le seul opérateur actif sur les marchés de services en France à être membre du consortium du seul câble reliant aujourd'hui la Métropole à La Réunion (SAFE). S'il a conservé jusqu'au début de l'année 2008 une exclusivité, au moins de fait, pour la commercialisation de capacités sur ce câble, d'autres membres du consortium sont aujourd'hui en mesure de proposer aux opérateurs alternatifs réunionnais des offres de capacité concurrentes de celles de l'opérateur historique. L'Autorité de la concurrence souligne dans son avis que « chaque opérateur membre du consortium (tels que [...] les opérateurs Belgacom et Malaysia Telecom pour le câble SAFE) est en mesure de vendre de la capacité aux opérateurs fixes et mobiles actifs [...] ». Dans les faits, la grande majorité des opérateurs alternatifs réunionnais ont conclu des accords d'achat d'IRU sur le câble SAFE avec d'autres membres du consortium. Ainsi les ventes de capacité sur le câble SAFE par France Télécom aux opérateurs alternatifs réunionnais sont désormais sensiblement inférieures à celles réalisées par d'autres membres du consortium.
En revanche, concernant les prestations de complément terrestre à La Réunion, les opérateurs alternatifs ne disposent aujourd'hui d'aucune autre solution technique que de recourir aux offres de France Télécom, puisqu'ils ne peuvent récupérer directement leur trafic dans la station d'atterrissement du câble, aucune solution d'hébergement n'étant envisagée. Aujourd'hui, seule France Télécom est techniquement en mesure de proposer une offre permettant d'acheminer le trafic entre la station d'atterrissement du câble et un point de livraison (permettant l'interconnexion avec les réseaux des opérateurs alternatifs) puisqu'elle a seule accès à la station d'atterrissement du câble SAFE. Ainsi, comme le souligne l'Autorité de la concurrence dans son avis, « en pratique, les opérateurs de communications électroniques qui achètent des capacités sous-marines à un autre membre du consortium sur l'un de ces trois câbles sous-marins doivent tout de même acheter, en plus, la prestation de complément terrestre à France Télécom ». Son contrôle exclusif sur le complément terrestre pourrait par ailleurs permettre à France Télécom de renforcer abusivement sa position sur le segment sous-marin par effet de levier ; les deux prestations de « capacité sur le câble » et de « complément terrestre » étant sans valeur si elles ne sont pas associées l'une à l'autre.
Dès lors, l'Autorité estime que France Télécom dispose d'une influence significative sur le marché de gros des prestations de segment interurbain interterritorial métropole-Réunion.

  1. Le marché de gros des prestations de segment interurbain interterritorial métropole-Guyane

France Télécom est le seul opérateur actif sur les marchés de services en France à être membre du consortium du câble reliant aujourd'hui la Guyane à la métropole (Americas II). Néanmoins, d'autres opérateurs membre du consortium du câble proposent aujourd'hui des services de capacités aux opérateurs alternatifs de la zone Antilles-Guyane. L'Autorité de la concurrence souligne dans son avis que « chaque opérateur membre du consortium (tels que l'Américain AT&T ou le Britannique Cable & Wireless pour les câbles déployés dans les Caraïbes, [...]) est en mesure de vendre de la capacité aux opérateurs fixes et mobiles actifs dans les départements d'outre-mer ». En pratique, une majorité des opérateurs alternatifs souscrivent aujourd'hui des offres de capacité sur le câble Americas II à des membres du consortium du câble différents de France Télécom. Cette possibilité de choisir entre différentes offres des membres du consortium permet aux opérateurs alternatifs de la zone de bénéficier de solutions concurrentielles à celle proposée par France Télécom. A ce jour, la majorité des capacités utilisés par les opérateurs alternatifs de la zone sont commercialisées par d'autres membres du consortium que France Télécom, qui dispose par ailleurs de capacités limités sur ce câble.
En revanche, concernant les prestations de complément terrestre du câble Americas II en Guyane, les opérateurs alternatifs n'ont aujourd'hui aucune autre solution technique que de recourir aux offres de France Télécom, puisqu'ils ne peuvent se connecter directement dans la station d'atterrissement du câble, aucune solution d'hébergement n'étant envisagée. Aujourd'hui, seule France Télécom est techniquement en mesure de proposer une offre permettant d'acheminer le trafic entre la station d'atterrissement du câble et point de livraison (permettant l'interconnexion avec les réseaux des opérateurs alternatifs) puisqu'elle a seule accès à la station d'atterrissement du câble Americas II. Ainsi, comme le souligne l'Autorité de la concurrence dans son avis, « en pratique, les opérateurs de communications électroniques qui achètent des capacités sous-marines à un autre membre du consortium sur l'un de ces trois câbles sous-marins doivent tout de même acheter, en plus, la prestation de complément terrestre à France Télécom ». Son contrôle exclusif sur le complément terrestre pourrait par ailleurs permettre à France Télécom de renforcer abusivement sa position sur le segment sous-marin par effet de levier ; les deux prestations de « capacité sur le câble » et de « complément terrestre » étant sans valeur si elles ne sont pas associées l'une à l'autre.
Dès lors, l'Autorité estime que France Télécom dispose d'une influence significative sur le marché de gros des prestations de segment interurbain interterritorial métropole-Guyane.

  1. Le marché de gros des prestations de segment interurbain interterritorial Martinique-Guyane

Seul le câble Americas II relie à ce jour les territoires de la Martinique et de la Guyane. Comme il a été exposé au point précédent, si France Télécom est le seul opérateur actif sur les marchés de services en France à être membre du consortium, les autres membres du consortium peuvent proposer des offres de capacités sur ce câble aux opérateurs alternatifs de la zone.
En revanche, concernant les prestations de complément terrestre du câble Americas II en Guyane et en Martinique, les opérateurs alternatifs n'ont aujourd'hui aucune autre solution technique que de recourir aux offres de France Télécom (voir supra).
Dès lors, l'Autorité estime que France Télécom dispose d'une influence significative sur le marché de gros des prestations de segment interurbain interterritorial Martinique-Guyane.

III. ― OBLIGATIONS IMPOSÉES À L'OPÉRATEUR
EXERÇANT UNE INFLUENCE SIGNIFICATIVE

Dans cette partie, l'Autorité présente les obligations qu'il paraît nécessaire et proportionné d'imposer à France Télécom sur les marchés de gros des prestations du segment terminal, d'une part, et du segment interurbain vers La Réunion et la Guyane, d'autre part.

A. ― Principes généraux relatifs à la détermination des obligations imposées à l'opérateur
exerçant une influence significative sur un marché

Conformément à l'article 16 de la directive-cadre, lorsqu'une autorité de régulation nationale a identifié un opérateur exerçant une influence significative sur un marché pertinent, celle-ci est tenue de lui imposer des mesures réglementaires spécifiques visées aux articles 9 à 13 de la directive « accès ». Ces obligations sont les suivantes :
― obligations de transparence ;
― obligations de non-discrimination ;
― obligations relatives à la séparation comptable ;
― obligations relatives à l'accès à des ressources spécifiques et à leur utilisation ;
― contrôle des prix et obligations relatives au système de comptabilisation des coûts.
Conformément au considérant 14 de la même directive, il s'agit d'un ensemble maximal d'obligations pouvant être imposées aux entreprises.
L'article 8 de la directive « accès » prévoit également que les obligations imposées sont fondées sur la nature du problème constaté, proportionnées et justifiées au regard des objectifs énoncés dans l'article 8 de la directive « cadre ».
Par ailleurs, le paragraphe 118 des lignes directrices indique qu'un projet de mesure est considéré comme compatible avec le principe de proportionnalité si la mesure à prendre poursuit un but légitime et si les moyens employés sont à la fois nécessaires et aussi peu contraignants que possible.
L'article L. 38-1 du CPCE prévoit que « les opérateurs réputés exercer une influence significative sur un marché du secteur des communications électroniques peuvent se voir imposer, en matière d'interconnexion et d'accès, une ou plusieurs des obligations [...], proportionnées à la réalisation des objectifs mentionnés à l'article L. 32-1 ».
Il s'agit des obligations suivantes :
― rendre publiques des informations concernant l'interconnexion ou l'accès, notamment publier une offre technique et tarifaire détaillée d'interconnexion ou d'accès lorsqu'ils sont soumis à des obligations de non-discrimination ;
― fournir des prestations d'interconnexion ou d'accès dans des conditions non discriminatoires ;
― faire droit aux demandes raisonnables d'accès à des éléments de réseau ou à des moyens qui y sont associés ;
― ne pas pratiquer de tarifs excessifs ou d'éviction sur le marché en cause et pratiquer des tarifs reflétant les coûts correspondants ;
― isoler sur le plan comptable certaines activités en matière d'interconnexion ou d'accès.
S'agissant de l'accès, l'Autorité peut imposer à un opérateur réputé exercer une influence significative de faire droit aux demandes raisonnables notamment lorsqu'elle considère qu'un refus ou des propositions déraisonnables empêcheraient l'émergence d'un marché de détail concurrentiel durable ou risqueraient d'être préjudiciables aux utilisateurs finals.
Dans ce cadre, l'Autorité peut préciser les contours de l'obligation de faire droit aux demandes raisonnables d'accès en imposant certains des mécanismes spécifiques qui figurent notamment à l'article D. 310 du CPCE.
En outre, lorsque l'Autorité apprécie le caractère proportionné des obligations d'accès qu'elle est susceptible d'imposer, elle veille notamment à prendre en compte les critères d'analyse suivants mentionnés à l'article L. 38-V du code des postes et des communications électroniques :
a) La viabilité technique et économique de l'utilisation ou de la mise en place de ressources concurrentes, compte tenu du rythme auquel le marché évolue et de la nature et du type d'interconnexion et d'accès concerné ;
b) Le degré de faisabilité de la fourniture d'accès proposée, compte tenu de la capacité disponible ;
c) L'investissement initial réalisé par le propriétaire des ressources, sans négliger les risques inhérents à l'investissement ;
d) La nécessité de préserver la concurrence à long terme ;
e) Le cas échéant, les éventuels droits de propriété intellectuelle pertinents ;
f) La fourniture de services paneuropéens.
En toute hypothèse et quelles que soient les obligations qui peuvent être imposées, celles-ci doivent être proportionnées aux objectifs généraux fixés à l'article L. 32-1 du code des postes et des communications électroniques, à savoir :
« 1° A la fourniture et au financement de l'ensemble des composantes du service public des communications électroniques ;
2° A l'exercice au bénéfice des utilisateurs d'une concurrence effective et loyale entre les exploitants de réseau et les fournisseurs de services de communications électroniques ;
3° Au développement de l'emploi, de l'investissement efficace dans les infrastructures, de l'innovation et de la compétitivité dans le secteur des communications électroniques ;
4° A la définition de conditions d'accès aux réseaux ouverts au public et d'interconnexion de ces réseaux qui garantissent la possibilité pour tous les utilisateurs de communiquer librement et l'égalité des conditions de la concurrence ;
5° Au respect par les opérateurs de communications électroniques du secret des correspondances et du principe de neutralité au regard du contenu des messages transmis, ainsi que de la protection des données à caractère personnel ;
6° Au respect, par les exploitants de réseau et les fournisseurs de services de communications électroniques de l'ordre public et des obligations de défense et de sécurité publique ;
7° A la prise en compte de l'intérêt des territoires et des utilisateurs, notamment handicapés, dans l'accès aux services et aux équipements ;
8° Au développement de l'utilisation partagée entre opérateurs des installations mentionnées aux articles L. 47 et L. 48 ;
9° A l'absence de discrimination, dans des circonstances analogues, dans le traitement des opérateurs ;
10° A la mise en place et au développement de réseaux et de services et à l'interopérabilité des services au niveau européen ;
11° A l'utilisation et à la gestion efficaces des fréquences radioélectriques et des ressources de numérotation ;
12° A un niveau élevé de protection des consommateurs, grâce notamment à la fourniture d'informations claires, notamment par la transparence des tarifs et des conditions d'utilisation des services de communications électroniques accessibles au public ;
13° Au respect de la plus grande neutralité possible, d'un point de vue technologique, des mesures qu'ils prennent ;
14° A l'intégrité et la sécurité des réseaux de communications électroniques ouverts au public. »
Compte tenu de la situation concurrentielle observée pour les offres de gros de services de capacité, l'Autorité est amenée à imposer plusieurs obligations à France Télécom, sur chacun des marchés pertinents décrit précédemment :
― le marché de gros des prestations du segment terminal ;
― les trois marchés de gros des prestations du segment interurbain interterritorial : métropole-Réunion, métropole-Guyane et Martinique-Guyane.

B. ― Les obligations sur le marché de gros des prestations du segment terminal

  1. Obligation de faire droit aux demandes raisonnables d'accès

L'article L. 38-I (3°) du CPCE prévoit que l'ARCEP peut imposer des obligations d'accès à un opérateur disposant d'une influence significative sur un marché pertinent. Conformément à l'article D. 310 du CPCE, elles peuvent notamment prendre la forme d'une obligation de faire droit aux demandes raisonnables à des tiers l'accès à des éléments ou ressources de réseau spécifiques, de négocier de bonne foi avec les opérateurs ou encore de ne pas retirer un accès déjà accordé.

Obligations générales

Comme cela a été démontré précédemment, France Télécom dispose d'une influence significative sur le marché de gros des prestations du segment terminal des services de capacité. L'analyse a également montré qu'il disposait d'un réseau capillaire très étendu qui peut difficilement être dupliqué par un opérateur alternatif.
Par conséquent, afin de permettre aux opérateurs d'intervenir dans des conditions équivalentes sur les marchés de détail situés en aval, il est nécessaire d'imposer à France Télécom une obligation de fournir, en réponse aux demandes raisonnables des opérateurs alternatifs, des prestations d'accès, lorsque celles-ci sont relatives au marché de gros sur lequel elle exerce une influence significative, ou nécessaires pour l'exercice, au bénéfice des utilisateurs, d'une concurrence effective et loyale sur les marchés de détail.
D'une manière générale, conformément aux dispositions de l'article L. 38-V du CPCE, le caractère raisonnable d'une demande d'accès formulée par un opérateur devra être apprécié au regard de la proportionnalité entre les contraintes économiques et techniques d'une telle demande pour France Télécom et le bénéfice attendu pour la résolution d'un problème concurrentiel particulier, ou plus généralement pour le bon fonctionnement des marchés de gros ou de détail aval.
Dans les zones où France Télécom n'est ni propriétaire ni gestionnaire de la boucle locale (zones aéroportuaires de Paris par exemple), une demande d'accès à ces réseaux formulée auprès de France Télécom ne saurait être considérée comme raisonnable. France Télécom n'est donc pas soumise sur ces zones à l'obligation de fournir les offres de gros d'accès qui seront discutées plus tard.
De plus, France Télécom étant une entreprise verticalement intégrée fournissant tous types de prestations de détail et de gros, il est également nécessaire et proportionné, au regard notamment des objectifs de développement efficace dans les infrastructures et des objectifs de compétitivité du secteur mentionné au 3° de l'article L. 32-1 du CPCE, qu'elle présente les prestations qu'elle offre de façon suffisamment claire et détaillée, et qu'elle ne subordonne pas l'octroi d'une prestation à une autre, afin de ne pas conduire les acteurs à payer pour des prestations qui ne leur seraient pas nécessaires.
Enfin, France Télécom devra, conformément à l'article D. 310 (2°) du CPCE, négocier de bonne foi avec les opérateurs qui demandent des prestations d'accès relatives à ce marché, afin, d'une part, de minimiser les cas de litige et, d'autre part, de ne pas profiter de l'influence significative qu'elle exerce sur ce marché pour faire obstruction dans les négociations avec les opérateurs. Tout refus d'accès ou restriction dans les conditions d'usages pour les opérateurs tiers devra ainsi être motivé.
Ces obligations sont conformes aux critères fixés par l'article L. 38-V en particulier les a, b et d en ce qu'elles sont aujourd'hui fournies par France Télécom et permettent le développement de la concurrence. Elles sont proportionnées aux objectifs fixés à l'article L. 32-1-II du CPCE précités, en particulier les 2°, 3° et 4°.

Maintien des prestations existantes

En premier lieu, compte tenu des investissements consentis par les opérateurs pour s'interconnecter sur l'un ou l'autre des brasseurs de France Télécom (brasseurs de liaisons louées ou brasseurs ATM) afin d'acheter des offres de gros, et en vertu de l'article D. 310 (3°) du CPCE, il est proportionné d'imposer à cette dernière de ne pas retirer un accès déjà accordé à un opérateur, sauf accord préalable expresse de l'Autorité ou de l'opérateur concerné, conformément à l'objectif de développement efficace dans les infrastructures et de compétitivité du secteur mentionné au 3° de l'article L. 32-1 du CPCE.
Par ailleurs, France Télécom fournit aujourd'hui les offres de gros du segment terminal suivantes dans son offre de référence de services de capacité :
― les offres de liaisons louées partielles terminales « LPT » jusqu'à 2 Mbit/s (avec les prestations connexes associées, notamment les liaisons d'aboutement (LA) et la colocalisation) ;
― les « LPT » THD de 34 et 155 Mbit/s (avec les prestations connexes associées) ;
― l'offre de capacité avec interface Ethernet en fibre optique (CE2O) entre 6 et 100 Mbit/s (avec les prestations connexes associées).
En outre, France Télécom commercialise également une offre d'accès aux opérateurs mobiles sur le marché de gros des prestations du segment terminal : l'offre de capacité dénommée « AIRCOM », avec interface ATM et Ethernet sur supports xDSL pour les débits inférieurs à 6 Mbit/s et fibre optique au-delà, vendue aux opérateurs mobiles pour raccorder leurs BTS à leurs MSC (Mobile Switching Center).
Il semble tout d'abord justifié et proportionné d'imposer à France Télécom le maintien de l'ensemble de ces prestations actuellement offertes, et en fonction desquelles les opérateurs ont d'ores et déjà bâti leurs architectures techniques.
Les besoins des opérateurs entrants pour effectuer une réplicabilité raisonnable des offres de détail de services de capacité de France Télécom portent sur des « briques de base », dotées des interfaces principales (liaisons louées, Ethernet, ATM), dans le segment terminal. Ces « briques de base » doivent comporter notamment les niveaux et la granularité de débits, des fonctionnalités techniques, des engagements de qualité de service, des remises pour des économies de coûts similaires ou supérieures aux offres de détail de services de capacité.
Par ailleurs, afin de préserver également la concurrence entre opérateurs (que ce soit les opérateurs mobiles, les opérateurs fixes ou les intégrateurs de services), l'Autorité estime que les « briques de base » doivent incorporer également les caractéristiques techniques et commerciales nécessaires pour concurrencer les offres spécifiques faites par France Télécom à ces opérateurs pour leurs besoins de constitution de réseau de collecte.
Il convient de noter que cette obligation ne saurait faire obstacle au droit de France Télécom de faire évoluer l'architecture de son réseau dès lors que cette évolution est légitime et que les opérateurs tiers ont été informés dans des délais raisonnables des évolutions envisagées, des conséquences sur les prestations que France Télécom commercialise à leur intention et des éventuelles solutions alternatives disponibles. L'ensemble de ce processus devant s'inscrire dans le respect des obligations de transparence et de non-discrimination (cf. infra).

Nécessité de fournir l'offre LPT

Afin de répondre à l'objectif de réplicabilité des offres de détail de liaisons louées de France Télécom exposé ci avant, et eu égard à la puissance de France Télécom sur les marchés de gros et aux obstacles au développement de la concurrence identifiés précédemment, l'Autorité estime justifié d'imposer à France Télécom de continuer à fournir l'offre actuelle de LPT sur interfaces liaisons louées.
En l'absence de l'obligation de fournir des LPT aux opérateurs alternatifs, France Télécom pourrait contraindre dans une large mesure leur intervention sur l'ensemble des marchés, et notamment sur une large partie du territoire pour laquelle les LPT sont les seules offres de gros du segment terminal des services de capacité disponibles.
La fourniture de cette offre, actuellement au catalogue, est raisonnable (accès aux brasseurs de France Télécom) et répond techniquement au problème concurrentiel d'accès aux sites clients dans la quasi-totalité des configurations : elle demeure le principal moyen à court et moyen terme d'assurer une réplicabilité des offres de détail de liaison louée et de voir se développer la concurrence sur cette fraction du marché de détail.
Pour assurer à l'avenir une réplicabilité raisonnable des offres de détail de liaisons louées de France Télécom, il convient de garantir la réplicabilité technique de ces offres par les liaisons partielles terminales.
L'offre de gros de liaison partielle terminale actuellement proposée au catalogue a fait l'objet d'évolutions constantes depuis la première analyse de marché des services de capacité.
Cela a notamment conduit France Télécom à fournir des LPT THD avec VC (canaux virtuels) de 2 et 34 Mbit/s sur SDH sur l'ensemble de ces raccordements optiques. Dans le cas des LPT THD avec VC de 2 et 34 Mbit/s, il s'agit de services ayant fait l'objet d'une normalisation par l'ETSI et qui avaient fait l'objet de demandes de la part des opérateurs alternatifs au moment de la première analyse de marché.
France Télécom a également enrichi son offre de fonctionnalités techniques supplémentaires, notamment la double adduction, et des garanties de qualité de service adaptées à la demande des opérateurs (par exemple, la prestation de « SAV proactif » est dorénavant une option des garanties de temps de rétablissement pour les offres LPT).
Plus généralement, toutes les futures fonctionnalités, en termes de débits, niveaux de qualité de service, intégrées à ses offres de détail devront également être intégrées à l'offre de LPT.
Pour assurer un suivi de cette réplicabilité, l'offre enrichie de LPT THD devra rester incorporée dans l'offre de référence de France Télécom.
Eu égard à l'ensemble de ces éléments, et dans la mesure où elle fournit déjà actuellement la prestation de LPT ainsi spécifiée nécessaire au développement de la concurrence et indispensable au maintien des opérateurs alternatifs sur ces marchés, cette obligation est conforme à l'article L. 38-V (a, b et d).
En conséquence, l'obligation de fournir des prestations de LPT ainsi spécifiée, imposée à France Télécom, est proportionnée aux objectifs mentionnés à l'article L. 32-1 du CPCE. Elle est notamment nécessaire à l'exercice au bénéfice des utilisateurs d'une concurrence effective et loyale entre les exploitants de réseau et les fournisseurs de services de communications électroniques (2°), au développement de l'investissement efficace dans les infrastructures de l'innovation et de la compétitivité dans le secteur des communications électroniques (3°), et garantit l'égalité des conditions de concurrence et la possibilité pour tous les utilisateurs de communiquer librement (4°). Cette obligation, conforme à l'article D. 310 (1°) du CPCE, constitue le seul moyen permettant de répondre aux problèmes de concurrence démontrés ci avant.

Absence de nécessité d'une nouvelle offre de services de capacité
avec interfaces alternatives pour les débits inférieurs à 10 Mbit/s

En dehors de l'offre CE2O, qui est disponible à des débits supérieurs à 6 Mbit/s, France Télécom ne propose pas d'autres prestations du segment terminal des services de capacité sur le marché de gros.
Néanmoins, France Télécom commercialise l'offre de gros DSL-E utilisée jusqu'à présent par les opérateurs sur le segment terminal, initialement conçue pour fournir l'accès à internet aux entreprises, et imposée dans le cadre de la décision n° 2008-0835 portant sur l'analyse du marché 5 des offres de gros haut débit activées livrées au niveau infranational.
Cette offre paraît répondre actuellement aux besoins de réplicabilité des offres de détail de capacité avec interfaces alternatives de France Télécom, pour les débits inférieurs à 10 Mbit/s, ainsi que des autres offres de détail comme les VPN IP et la fourniture de voix sur IP, par exemple grâce à des interfaces Ethernet avec des débits appropriés et l'aspect symétrique et à son architecture tronc-feuilles, similaire à celle « liaison partielle terminale ― liaison d'aboutement » et caractéristique des « briques de base » dont les opérateurs ont besoin.
Suite à l'obligation, rappelée ci avant, imposée à France Télécom de publier une offre de référence pour les offres de gros haut débit activées livrées au niveau infranational, l'Autorité estime que, tant que cette offre de référence sur le marché du haut débit répond aux besoins de réplicabilité sur les marchés de services de capacité de détail ainsi que sur les autres marchés de détail comme les RPV IP, les besoins d'offres d'accès des opérateurs concurrents de France Télécom sur le segment terminal avec interfaces alternatives pourront être traités prioritairement par cette offre.
Il n'est donc pas nécessaire d'imposer à ce stade une offre d'accès spécifique au titre de la présente analyse. Cependant, l'Autorité examinera la nécessité d'introduire d'autres offres avec interfaces alternatives sur le segment terminal, en tant que de besoin pour assurer une réplicabilité raisonnable des offres de détail de France Télécom sur le segment terminal.

Nécessité de fournir l'offre de service de capacité CE2O
avec interfaces alternatives de débits supérieurs à 10 Mbit/s

Afin de répondre à l'objectif de réplicabilité raisonnable des offres de détail de capacités avec interfaces alternatives de France Télécom de plus de 10 Mbit/s, et eu égard à la puissance de France Télécom sur les marchés de gros et aux obstacles au développement de la concurrence identifiés, l'Autorité estime justifié d'imposer à France Télécom de continuer à fournir l'offre actuelle de collecte Ethernet optique opérateur (CE2O), avec des interfaces Ethernet et ATM sur un réseau de transport ATM, telle qu'introduite en 2005 par France Télécom.
En effet, cette offre répond aux besoins de réplicabilité des offres de détail de France Télécom.
En l'absence de l'obligation de fournir l'offre CE2O aux opérateurs alternatifs, France Télécom pourrait contraindre dans une large mesure leur intervention sur l'ensemble des marchés, en raison de sa couverture en fibre optique très largement supérieure à celle des opérateurs alternatifs.
Eu égard à l'ensemble de ces éléments, et dans la mesure où elle fournit déjà actuellement cette offre nécessaire au développement de la concurrence et indispensable au maintien des opérateurs alternatifs sur ces marchés, cette obligation est conforme à l'article L. 38-V (a, b et d) du CPCE.
En conséquence, l'obligation de fournir l'offre CE2O ainsi spécifiée, imposée à France Télécom, est proportionnée aux objectifs mentionnés à l'article L. 32-1 du code des postes et des communications électroniques. Elle est notamment nécessaire à l'exercice au bénéfice des utilisateurs d'une concurrence effective et loyale entre les exploitants de réseau et les fournisseurs de services de communications électroniques (2°), au développement de l'investissement efficace dans les infrastructures de l'innovation et de la compétitivité dans le secteur des communications électroniques (3°), et garantit l'égalité des conditions de concurrence et la possibilité pour tous les utilisateurs de communiquer librement (4°). Cette obligation, conforme à l'article D. 310 (1°) du CPCE, constitue le seul moyen permettant de répondre aux problèmes de concurrence démontrés ci-avant.

Adaptation des offres de gros aux évolutions des technologies de réseau

L'offre de gros CE2O actuellement proposée par France Télécom est une offre de collecte Ethernet transportée sur la technologie ATM qui permet notamment aux opérateurs alternatifs de proposer des services d'interconnexion de réseaux locaux d'entreprise.
Bien qu'encore largement répandue dans les cœurs de réseau, notamment pour l'ADSL, la technologie ATM est cependant progressivement remplacée par d'autres technologies plus efficaces et moins complexes à mettre en œuvre.
Compte tenu des progrès techniques en cours dans les technologies de réseau, France Télécom pourrait être amenée, au cours des prochaines années, à faire évoluer à terme son cœur de réseau, et notamment à démanteler son réseau de collecte ATM.
Dans ces circonstances, il convient que France Télécom soit en mesure d'assurer une offre de gros équivalente à l'offre CE2O à destination des opérateurs alternatifs, qui tienne compte des spécificités des services proposés à la clientèle entreprise sur le marché de détail. France Télécom devra envisager des conditions de migration qui, en termes de calendrier, de délais d'information et de mise en œuvre, seront en phase avec les singularités du marché entreprise et notamment l'existence de contrats pluriannuels sur le marché de détail aval.
Dans son avis en date du 30 octobre 2009, l'Autorité de la concurrence indique à ce titre que « les représentants de la société France Télécom ont confirmé, lors de la séance, qu'ils continueront de proposer ces offres [fondées sur le réseau ATM] jusqu'au terme de la présente régulation, soit 2012 ».
L'Autorité note néanmoins que France Télécom, ainsi qu'elle l'indique dans sa réponse à la consultation publique, estime nécessaire de développer rapidement des offres de substitution aux offres support des services de capacité à interfaces alternatives (proposées aujourd'hui via le réseau ATM) qui seraient fondées sur le réseau de collecte IP/MPLS, et indique qu'elle sera en mesure de faire des propositions d'offres de gros de niveau 2 en Ethernet.
L'Autorité souhaite à ce titre que les modalités d'évolution et de migration de telles offres de gros soient discutées dans le cadre des groupes de travail multilatéraux sous l'égide de l'Autorité, afin de préparer les évolutions inéluctables des architectures de réseau après 2012.
Opérateur de gros puissant, présent également sur le marché de détail, France Télécom devra en effet veiller à respecter le principe de non-discrimination et de transparence dans la conception et la mise en œuvre de ses nouvelles offres. France Télécom devra mettre à disposition des opérateurs de détail les mêmes informations préalables, les mêmes conditions et les mêmes tarifs qu'elle utilise en interne pour adresser la clientèle entreprise sur le marché de détail.
En tout état de cause, il apparaît raisonnable et proportionné que France Télécom ne puisse envisager la fermeture technique ou commerciale de l'offre CE2O dans une zone donnée que si elle est en mesure de proposer, à compter de cette fermeture et avec un préavis raisonnable, une offre alternative permettant d'adresser le marche de détail sous-jacent avec des garanties et fonctionnalités équivalentes à l'offre CE2O et s'il existe une offre de migration techniquement et financièrement raisonnable pour les opérateurs alternatifs clients de cette offre.

Raccordement d'éléments de réseau au moyen des offres de gros du segment terminal

Au cours de la période couverte par la présente analyse de marché, il semble probable que les opérateurs mobiles, qui achètent actuellement l'offre de gros AIRCOM, viennent à demander à France Télécom d'utiliser les offres de gros de services de capacité LPT et CE2O, ainsi que les offres de gros de dégroupage ou de bitstream, pour raccorder leurs éléments de réseau.
En effet, au cours de la période couverte par la précédente analyse, SFR, par le rachat de Neuf-Cegetel, et Bouygues Télécom sont entrés sur les marchés de gros d'accès fixe, et plus particulièrement sur le marché de gros des prestations du segment terminal afin de proposer des offres fibre de détail aux entreprises à qui ils fournissaient déjà des services mobiles. Le groupe Iliad devrait par ailleurs entrer sur le marché mobile suite à l'attribution des fréquences à Free mobile.
La plupart de ces opérateurs sont présents sur un grand nombre de points de livraison des offres de gros de services de capacité et disposent d'un réseau de collecte adapté pour l'acheminement des données de leurs stations BTS vers leurs éléments de réseaux situés en amont, notamment les MSC mobiles.
L'offre de gros AIRCOM ne permet pas à ces acteurs de valoriser leurs infrastructures de réseaux fixes capillaires contrairement au groupe France Télécom/Orange. L'offre AIRCOM est en effet soit livrée par France Télécom au niveau de nœuds de son réseau de collecte situés significativement plus en amont des nœuds qui sont aujourd'hui raccordés par ces opérateurs mobile, soit fournie sous forme de liaisons complètes, correspondant à deux liaisons partielles terminales reliées par un circuit interurbain, permettant de raccorder une BTS à n'importe quel point du territoire et pas uniquement à un CFTSA, et donc tarifées en tant que telles, à un prix supérieur à une simple liaison partielle terminale.
Il apparaît pourtant que l'offre de gros AIRCOM repose techniquement sur des offres de gros disponibles, soit de services de capacité (sur support cuivre ou fibre optique), soit DSL. Le groupe France Telecom/Orange utilise d'ailleurs ces briques élémentaires pour ses besoins internes de raccordement en propre de ses BTS.
A ce titre, il semble légitime que les opérateurs mobile tiers puissent avoir accès sur le marché de gros à ces mêmes briques élémentaires afin de raccorder leurs BTS. L'accès à ces offres de gros élémentaires pourrait en particulier leur permettre de bénéficier des mêmes processus que les offres de gros régulées.
L'Autorité note que France Télécom indique, dans sa réponse à la consultation publique, être prête à étudier une évolution de la livraison des flux AIRCOM sur un niveau plus bas dans son réseau, sous réserve d'un volume de sites radio à raccorder suffisant sur ce niveau.
L'Autorité maintient néanmoins que les opérateurs mobiles puissent avoir accès aux différentes offres de gros, sans avoir à souscrire à l'offre commerciale AIRCOM. La possibilité pour les opérateurs alternatifs d'avoir accès à ces briques élémentaires constitue en effet la meilleure garantie en termes de mutualisation des processus et de respect du principe de non-discrimination.
A la vue des éléments présentés, la demande des opérateurs d'utiliser les offres de gros de services de capacité ou des offres de dégroupage ou de bitstream pour le raccordement d'éléments de réseaux, et notamment les stations de base mobiles, semble, prima facie, constituer une demande raisonnable d'accès. Concernant spécifiquement les offres de gros de services de capacités, couvertes par la présente analyse de marché, France Télécom est invitée à répondre favorablement à cette demande notamment au vu du 9° du D. 310 du code.
L'Autorité indique qu'elle conduira la même analyse explicite concernant le raccordement d'éléments de réseau à l'occasion de la révision prochaine de l'analyse des marchés 4 et 5, relatifs respectivement aux infrastructures physiques constitutives de la boucle locale filaire et aux offres d'accès haut débit activées livrées au niveau régional.
Dans un souci d'efficacité technique et opérationnelle, il apparaît raisonnable et proportionné que France Télécom propose a priori à ce titre les mêmes processus que ceux des offres de gros existantes de segment terminal de services de capacité. Par ailleurs, France Télécom devra scrupuleusement respecter le principe de non-discrimination dans la détermination de la structure et des niveaux tarifaires de ces offres de gros, que ce soit entre les opérateurs tiers ou entre les opérateurs tiers et elle-même.

Prestations d'accès et d'interconnexion associées

Pour assurer leur activité d'acheminement de communications électroniques de bout en bout, les opérateurs alternatifs doivent acheter des prestations d'accès et d'interconnexion. Par conséquent, les offres d'accès et d'interconnexion incluent un ensemble de prestations élémentaires dont la fourniture est nécessaire au bon acheminement des communications des opérateurs alternatifs et à leur activité. Ces prestations associées comprennent notamment les prestations de raccordement aux sites d'interconnexion et d'accès.
France Télécom doit en particulier proposer une offre de colocalisation adaptée sur les sites brasseur des offres susmentionnées ainsi qu'une offre de liaison entre ces sites brasseurs et les points de présence des opérateurs (offre liaison d'aboutement (LA) pour les LPT).
La suppression ou la modification de ces offres aurait pour conséquence de déstabiliser le marché et les plans d'affaires des opérateurs alternatifs. Dans la mesure où ces prestations sont déjà offertes aujourd'hui et sont nécessaires à l'activité des opérateurs tiers, leur imposition répond aux critères de l'article L. 38-V du code, en particulier les a, b, c et d.
Conformément aux objectifs imposés par l'article L. 32-1-II du code, et en particulier les 2°, 3° et 4°, et en l'absence de mesures moins contraignantes qui permettraient d'atteindre le même but, l'Autorité considère comme proportionné que France Télécom propose au titre de l'article D. 310 (1° et 3°) du CPCE, une offre de colocalisation adaptée sur les sites brasseurs des offres susmentionnées et une offre de liaison entre ces sites brasseurs et les points de présence des opérateurs, avec une granularité de débit adaptée.

Offres d'accès au génie civil

Les investissements qu'a à consentir un opérateur pour le déploiement d'un réseau très haut débit correspondent essentiellement aux coûts d'établissement d'une nouvelle boucle locale dans l'accès, jusqu'aux entreprises desservies.
Le génie civil représente le principal poste de coût de construction d'une nouvelle boucle locale en zone urbaine. Le génie civil correspond aux conduites souterraines ― les fourreaux ― et aux chambres souterraines dans lesquelles l'opérateur tire ses câbles de fibre optique.
Dans ce contexte, l'équation économique du très haut débit professionnel semble assez difficile en dehors des zones où la densité d'entreprises est suffisamment importante. Il convient également de mentionner les difficultés opérationnelles liées au déploiement d'une nouvelle boucle locale (obtention des permissions de voirie, etc.) et les incertitudes sur les revenus supplémentaires qu'apporte la couverture d'une nouvelle zone liés au déploiement de nouvelles forces de vente.
Pour un opérateur qui souhaite déployer une nouvelle boucle locale en fibre optique, la possibilité d'accéder à des infrastructures de génie civil existantes pour y tirer ses câbles de fibre optique change considérablement l'équation économique.
Dans le cadre de l'analyse de marché de haut débit et très haut débit, l'Autorité a imposé, dans la décision n° 2008-0836 susvisée, à France Télécom une obligation générale d'accès à ses infrastructures de génie civil. Cette obligation est valable pour tout déploiement d'une boucle locale optique. S'agissant plus particulièrement du marché résidentiel, l'Autorité a imposé la formulation par France Télécom d'une offre d'accès à ses fourreaux. France Télécom doit à ce titre publier une offre de référence d'accès à ses infrastructures de génie civil pour les déploiements résidentiels.
Concernant les déploiements alternatifs de fibre optique pour le raccordement de sites entreprises, les opérateurs professionnels procèdent aujourd'hui selon deux modalités. Soit ils décident de construire en propre leurs infrastructures de génie civil en vue d'y tirer leur fibre optique, soit ils ont recours aux offres de génie civil proposées par France Télécom, mais qui ne font pas l'objet à ce jour d'une offre de référence :
― l'offre LGC (liaisons de génie civil) DPR (domaine public routier) est une offre d'accès au génie civil proposée par France Télécom pour répondre à l'article L. 47 du CPCE sur la mutualisation des infrastructures de génie civil sur le domaine public routier ;
― l'offre LGC (liaisons de génie civil) ZAC (zone d'aménagement concerté) est proposée par France Télécom depuis 2007 dans les zones d'aménagement concerté dans lesquelles elle a bénéficié d'une rétrocession du génie civil construit par l'aménageur ou la collectivité, ce que reflète le tarif de cette offre.
Les processus de ces offres se révèlent néanmoins assez inefficaces en pratique, notamment en ce qui concerne la fourniture d'informations préalables, le processus de commandes, l'hébergement d'équipements dans les chambres et la désaturation. De nombreux décalages existent ainsi aujourd'hui entre ces deux offres, LGC DPR et LGC ZAC, et l'offre d'accès au génie civil pour les déploiements résidentiels.
L'Autorité constate que l'offre d'accès au génie civil pour les déploiements résidentiels a fait l'objet de nombreuses évolutions sur les plans techniques et opérationnels depuis que la première version proposée par France Télécom aux opérateurs alternatifs début 2008 et permet aux opérateurs alternatifs résidentiels d'envisager leurs déploiements de boucle locale optique dans des conditions satisfaisantes.
A ce titre, l'Autorité estime raisonnable que les offres d'accès au génie civil de France Télécom utilisées aujourd'hui par les opérateurs professionnels, LGC DPR et LGC ZAC, puissent bénéficier des évolutions nécessaires, notamment sur le plan opérationnel, pour permettre également le déploiement de fibre optique par les opérateurs professionnels dans des conditions satisfaisantes.
L'Autorité note que, suite à des engagements formulés dans sa réponse à la consultation publique, France Télécom a annoncé lors de la réunion multilatérale « DSL entreprises et services de capacité » du 22 septembre 2009, la mise en place d'une nouvelle offre d'accès à ses fourreaux pour le raccordement des entreprises en fibre optique, calquée sur l'offre de fourreaux résidentielle. Cette offre inclura notamment l'accès aux adductions des immeubles, la fourniture d'informations préalables, la possibilité pour les opérateurs de mener eux-mêmes leurs études terrain.
L'Autorité considère qu'il convient désormais de discuter la mise en œuvre opérationnelle de cette offre dans un cadre multilatéral. L'Autorité souhaite en outre que France Télécom puisse s'engager sur un calendrier permettant la mise en place de l'offre au premier trimestre 2010.

Autres demandes raisonnables d'accès

Au-delà des prestations d'accès et d'interconnexion précédemment mentionnées, un certain nombre de prestations d'accès complémentaires et de moyens associés à l'accès peut être nécessaire pour rendre l'accès au réseau de France Télécom effectif, dans des conditions économiquement viables.
D'une manière générale, France Télécom doit faire droit aux demandes des opérateurs jugées raisonnables, lorsque le caractère proportionné de l'obligation qui en découlera a été vérifié, en conformité avec les dispositions de l'article L. 38-V du CPCE.
France Télécom devra ainsi, conformément aux objectifs mentionnés à l'article L. 32-1, et notamment celui de veiller au développement de l'interopérabilité des services au niveau européen, faire droit aux demandes raisonnables d'accès visant à solliciter des services spécifiques nécessaires pour garantir aux utilisateurs l'interopérabilité des services de bout en bout, y compris en ce qui concerne les moyens destinés aux services de réseaux intelligents.
De même, et en vertu de l'objectif visé au 2° du même article, France Télécom doit faire droit aux demandes raisonnables d'accès à des systèmes d'assistance opérationnelle ou à des systèmes logiciels similaires nécessaires pour garantir l'existence d'une concurrence loyale dans la fourniture des services.
Par ailleurs, et pour ne pas limiter l'apparition de nouveaux standards techniques sur les marchés de gros, France Télécom doit, conformément à l'article D. 310 (7°) du CPCE, permettre aux opérateurs d'avoir accès aux interfaces techniques, protocoles ou autres technologies clés qui revêtent une importance essentielle, notamment pour l'interopérabilité des services ou des services de réseaux virtuels, conformément au 5° de l'article D. 310 du code précité.
Enfin, en cas de demande jugée raisonnable aux vues des objectifs mentionnés à l'article L. 32-1, France Télécom devra offrir des services particuliers en gros en vue de leur revente à des tiers, sur les marchés de gros ou de détail, conformément à l'article D. 310 (4°) du code.
Au cours de la période couverte par le précédent cycle d'analyse de marché, France Télécom a été amenée à répondre favorablement aux demandes des opérateurs alternatifs concernant la mutualisation des troncs pour les offres de gros de prestations du segment terminal et la mise en œuvre de processus de double encapsulation pour l'offre CE2O.
Ces demandes apparaissent a priori raisonnables dans leurs principes, notamment au vu des 1°, 4°, 6°, 7° et 9° de l'article D. 310 du code.

  1. Obligation de non-discrimination
    Obligations générales

L'article L. 38-I (2°) du CPCE prévoit que « les opérateurs réputés exercer une influence significative sur un marché du secteur des communications électroniques peuvent se voir imposer (...) [de] fournir des prestations d'interconnexion ou d'accès dans des conditions non discriminatoires ».
L'article D. 309 du code précise que les obligations de non-discrimination font notamment en sorte que « les opérateurs appliquent des conditions équivalentes dans des circonstances équivalentes aux autres opérateurs fournissant des services équivalents, et qu'ils fournissent aux autres des services et informations dans les mêmes conditions et avec la même qualité que ceux qu'ils assurent pour leurs propres services, ou pour ceux de leurs filiales ou partenaires ».
France Télécom, entreprise intégrée verticalement, intervient sur l'ensemble des marchés de gros d'acheminement de trafic, et sur l'ensemble des marchés de détail aval.
Il est par conséquent nécessaire de garantir que France Télécom n'avantagera pas ses propres services de détail par les moyens qu'elle leur fournit.
Il est de même nécessaire que France Télécom n'avantage pas certains opérateurs, et en particulier ses filiales ou ses partenaires, en leur proposant des offres de gros privilégiées, afin d'exclure ses concurrents les plus directs des marchés de détail et de gros sous-jacents.
Seule une obligation de non-discrimination imposée à France Télécom sur l'ensemble des marchés de gros où elle exerce une influence significative est ainsi à même de garantir l'exercice au bénéfice des utilisateurs d'une concurrence effective et loyale entre les exploitants de réseau et les fournisseurs de services de communications électroniques, objectif mentionné au 2° de l'article L. 32-1 du CPCE.
Cette obligation s'applique notamment aux conditions techniques et tarifaires offertes par voie contractuelle, aux contenus et à la qualité des informations fournies dans les processus mis en œuvre pour l'accès et l'interconnexion, aux délais de fourniture des offres de gros, ou encore à la qualité de service offerte.
D'une manière plus générale, l'obligation de non-discrimination concerne toutes les prestations d'accès fournies par l'opérateur aux opérateurs tiers sur les marchés de gros pertinents, y compris les prestations qui leur sont associées.
Sur le plan des caractéristiques techniques, lorsque France Télécom introduit des évolutions dans ses offres de détail en aval (implémentation de normes, de débits, de nouvelles zones géographiques de disponibilité par exemple), elle est tenue de le faire au préalable sur les marchés de gros en adaptant ses offres d'accès ou d'interconnexion, que les prestations soient ou non incluses dans les offres de référence, dans un délai raisonnable, et en tout état de cause au minimum un mois, préalablement à leur introduction au niveau du détail en informant l'Autorité et les opérateurs entrants de ces évolutions.
Sur le plan des remises tarifaires, si des remises tarifaires sont accordées sur les offres de détail en vertu d'économies de coûts hors remises aux volumes et à la durée (remises pour des offres en faisceau, pour des raccordements spécifiques, pour des souscriptions à des GTR, etc.) qui sont réalisées pareillement sur les offres de détail ou de gros, les offres de gros doivent en bénéficier dans un délai raisonnable, et en tout état de cause au minimum un mois, avant les offres de détail, avec information de l'Autorité et des opérateurs tiers.
Enfin, l'obligation de non-discrimination se comprend également entre l'offre de référence et les autres offres d'accès ou d'interconnexion du même marché : ainsi, lorsque des caractéristiques techniques, des niveaux de qualité de service et des remises spécifiques (hors remises aux volumes ou à la durée) sont accordées aux autres offres du type AIRCOM ou VPN HD sur le marché du segment terminal (ou toute autre à venir), les prestations incluses dans les offres de référence doivent également en bénéficier.
Cette obligation est ainsi justifiée et proportionnée au regard des objectifs de régulation définis à l'article L. 32-1 du CPCE. Elle est notamment nécessaire à l'exercice au bénéfice des utilisateurs d'une concurrence effective et loyale entre les exploitants de réseau et les fournisseurs de services de communications électroniques (2°), au développement de l'investissement efficace dans les infrastructures de l'innovation et de la compétitivité dans le secteur des communications électroniques (3°), et garantit l'égalité des conditions de concurrence et la possibilité pour tous les utilisateurs de communiquer librement (4°). Cette obligation, conforme à l'article D. 309 du code, constitue le seul moyen permettant de répondre aux problèmes de concurrence démontrés ci avant.

Indicateurs et niveaux de qualité de service

Ce point sera traité dans la partie suivante intitulée « qualité de service ».

  1. Obligation de transparence

L'article L. 38-I (1°) du code précité énonce que « les opérateurs réputés exercer une influence significative sur un marché du secteur des communications électroniques peuvent se voir imposer, (...) [de] rendre publiques des informations concernant l'interconnexion ou l'accès, (...) ; ».
En d'autres termes, l'opérateur puissant peut se voir imposer, en application de cet article, de fournir l'accès et l'interconnexion dans des conditions transparentes.
Conformément à l'article D. 307-I du code, la transparence consiste ainsi en la mise à disposition de l'ensemble des opérateurs d'informations concernant les processus d'accès et d'interconnexion, qu'il s'agisse d'informations comptables, d'indicateurs de qualité de service, de spécifications techniques, ou d'informations plus générales sur les modalités de fourniture des prestations ou sur les tarifs.
L'influence significative de France Télécom sur l'ensemble des marchés de gros rend les conditions dans lesquelles les opérateurs peuvent accéder aux prestations de France Télécom ou s'interconnecter avec elle structurantes pour la viabilité des services qu'ils peuvent proposer.
Il est donc nécessaire que les opérateurs disposent d'une bonne visibilité sur l'architecture technique, économique et tarifaire des offres de gros de France Télécom, afin de garantir l'exercice d'une concurrence effective et loyale dans la fourniture des services de communications électroniques, au bénéfice des utilisateurs, ainsi qu'à l'égalité des conditions de concurrence.
Par ailleurs, l'obligation de transparence apparaît indispensable pour permettre le contrôle de l'obligation de non-discrimination et ainsi permettre aux opérateurs négociant l'accès avec France Télécom de s'appuyer sur des données de référence publiques.
L'obligation de transparence imposée à France Télécom est ainsi nécessaire et proportionnée aux objectifs mentionnés à l'article L. 32-1 du code, et notamment à ceux cités aux 2° et 4° de cet article.
En pratique, l'Autorité impose à France Télécom une obligation de transparence au moyen de deux dispositifs.

Conventions d'interconnexion et d'accès

Les conditions inscrites dans les conventions d'interconnexion et d'accès précisent les conditions techniques et tarifaires offertes par les parties.
France Télécom devra par conséquent informer l'Autorité de la signature de toutes les conventions d'interconnexion et d'accès et de tout avenant à ces conventions qu'elle signe avec des tiers dans un délai de dix jours à compter de la signature du document, lorsque les prestations concernées sont fournies sur le marchés de gros des prestations du segment terminal des services de capacité.
Cette information permettra à l'Autorité de demander, le cas échéant, à France Télécom de lui transmettre ledit document, en application de l'article L. 34-8 du CPCE, afin notamment de lui permettre de contrôler le respect par France Télécom de l'obligation de non-discrimination.

Informations données aux acteurs bénéficiant de prestations d'accès et d'interconnexion

En outre, afin de donner un maximum de visibilité aux acteurs ayant signé avec elle une telle convention d'interconnexion et d'accès, France Télécom devra leur fournir des informations sur les caractéristiques de son réseau, notamment en termes d'architecture, d'interfaces et de dimensionnement (France Télécom doit mettre à la disposition des opérateurs concurrents des informations concernant les zones de brassage, l'éventuelle saturation des nœuds d'interconnexion et le chemin technique parcouru par les solutions de remplacement, notamment pour les offres de sécurisation). Elle en informera également l'Autorité.
Conformément aux dispositions de l'article D. 307-III du code, France Télécom devra également informer ces acteurs, avec un préavis raisonnable, de toute évolution de ses conditions techniques et tarifaires des prestations d'accès, ainsi que de toute évolution d'architecture de son réseau, en cas d'évolution de nature à contraindre les opérateurs utilisant une des prestations d'accès à modifier ou adapter leurs propres installations.
Pour les prestations qui devront être intégrées dans l'offre de référence imposée ci-après, France Télécom devra respecter le préavis défini précédemment. Pour les autres prestations, elle devra respecter un préavis raisonnable.
Cette obligation apparaît essentielle pour permettre aux opérateurs d'anticiper ces évolutions, et ainsi d'avoir une visibilité suffisante de leurs plans d'investissement, condition nécessaire au développement de l'investissement efficace dans les infrastructures. Les modalités de publication de ces informations et le niveau de détail requis pourront être précisés par une décision ultérieure de l'Autorité, en tant que de besoin.
En particulier, compte tenu des évolutions inéluctables des réseaux ATM qui pourraient amener France Télécom à faire évoluer à terme son architecture de réseau de manière unilatérale, et des facteurs de complexité inhérents à cette évolution, il importe que les opérateurs alternatifs clients de l'offre de gros CE2O de France Télécom, fondée sur la technologie ATM, puissent être prévenus avec un délai suffisant de l'arrêt de la commercialisation de l'offre CE2O dans une zone donnée. La suffisance de ce délai doit s'apprécier au regard des pratiques constatées sur le marché de détail sous-jacent et notamment être en phase avec les durées, souvent pluriannuelles, des contrats conclus avec les entreprises et les délais opérationnels nécessaires aux éventuelles adaptations des réseaux existants.
A ce titre, un délai minimum de prévenance de 36 mois avant la fermeture technique de l'offre CE2O dans une zone donnée apparaît a priori nécessaire au regard de l'impact sur les opérateurs alternatifs clients de l'offre en termes d'adaptation opérationnelle et technique.
France Télécom peut être amenée à anticiper la fermeture commerciale de l'offre CE2O, dès lors qu'une offre alternative est disponible et répond aux besoins légitimes des opérateurs alternatifs en termes de fonctionnalité technique et opérationnelle. Un délai minimum de prévenance de 12 mois apparaît a priori nécessaire, sous réserve qu'une telle offre alternative est disponible.
Par ailleurs, il semble raisonnable que France Télécom puisse, une fois l'an, au cours du premier comité de l'interconnexion et de l'accès, préciser les chantiers en cours sur les évolutions de ses réseaux utilisés dans le cadre des services de capacité, afin de prévenir suffisamment à l'avance les opérateurs clients de ses offres des évolutions nécessaires à entreprendre de leur côté.

Communication pour information

Conformément au cadre réglementaire, l'Autorité entend privilégier son intervention sur les seuls marchés de gros tout en s'assurant de l'adéquation des offres d'accès régulés aux évolutions du marché de détail et notamment à la réplicabilité des offres de détail de France Télécom. Par la présente décision, l'Autorité lève la régulation du marché de détail des services de capacité.
Si les obligations précédemment imposées à France Télécom permettait à titre principal à l'Autorité de vérifier le respect de l'obligation de non-discrimination sur le marché de détail, celle-ci permettait également à titre accessoire de vérifier le respect de plusieurs obligations imposées sur le marché de gros du segment terminal. En particulier, il est nécessaire de vérifier l'adéquation de la régulation du marché de gros du segment terminal vis à vis des évolutions des marchés de détail aval et le respect par France Télécom de l'obligation de non-discrimination.
L'Autorité juge nécessaire d'imposer à France Télécom de lui transmettre pour information ses offres génériques (description des prestations commercialisées, documentation contractuelle et technique, grille tarifaire) commercialisées par défaut sur les marchés de détail aval afin de s'assurer du bon respect par l'opérateur de l'obligation de non discrimination sur le marché de gros du segment terminal. Cette obligation vise par ailleurs à modifier, le cas échéant, sa régulation du marché de gros du segment terminal pour la mettre en cohérence avec les évolutions des offres de détail.
Cette obligation n'ayant pas pour objet de permettre à l'Autorité de s'opposer à la commercialisation d'une nouvelle offre de détail ou à la modification d'une offre existante, il est proportionnée de demander à France Télécom de communiquer ces informations postérieurement à leur prise d'effet sur le marché de détail deux fois par an au 30 juin et au 31 décembre mais dans un délai maximum d'un mois.
Cette obligation est une modalité de mise en œuvre des obligations de non-discrimination et de transparence imposées à France Télécom au titre de l'article L. 38-I (1° et 2°) du CPCE. Cette obligation, imposée au titre de l'article L. 38 du CPCE, est conforme et proportionnée aux objectifs de régulation définis à l'article L. 32-1-II du CPCE, et en particulier ceux visant à garantir l'exercice au bénéfice des utilisateurs d'une concurrence effective et loyale entre les exploitants de réseau et les fournisseurs de services de communications électroniques et l'égalité des conditions de concurrence.

  1. Publication d'une offre de référence technique et tarifaire d'accès
    Obligation générique

Conformément à l'article D. 307-II du CPCE, « Sans préjudice de l'article D. 308, lorsqu'un opérateur exerçant une influence significative sur un marché du secteur des communications électroniques est soumis à une obligation de non-discrimination en application de l'article D. 309, l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes peut imposer à cet opérateur de publier une offre technique et tarifaire d'interconnexion ou d'accès ».
L'existence et la publication d'une offre de référence répond à plusieurs objectifs : elle pallie la faiblesse du pouvoir de négociation bilatérale des opérateurs clients de l'offre avec France Télécom, elle permet d'assurer la non-discrimination dans le traitement des opérateurs alternatifs, elle apporte de la visibilité et de la stabilité aux opérateurs dans l'élaboration de leurs plans de développement, enfin elle permet de découpler les prestations de sorte qu'un opérateur n'a à payer que ce dont il a besoin.
Pour les prestations de gros du segment terminal des services de capacité, la conjonction de la puissance de France Télécom, de l'absence de réplicabilité d'infrastructures essentielles détenues par France Télécom, de l'intégration verticale de l'opérateur historique et de son rôle sur les marchés aval, rend peu probable le fait que les opérateurs concurrents de France Télécom sur les marchés aval disposent d'un pouvoir de négociation suffisant pour obtenir des offres adaptées sur le marché de gros des prestation du segment terminal.
Par ailleurs, pour les opérateurs ayant recours à ces offres, les reversements directs à France Télécom représentent une proportion importante de leur chiffre d'affaires, et apparaissent donc comme déterminants dans leur budget. Les opérateurs alternatifs ont donc besoin, lors de l'élaboration de leurs plans d'affaires et de leurs stratégies techniques et commerciales, de disposer d'une bonne visibilité sur les conditions techniques et tarifaires proposées par France Télécom.
Enfin, le recours à une offre de référence publique permet d'assurer un traitement non discriminatoire entre les différents opérateurs clients de l'offre.
Ainsi, l'Autorité estime nécessaire d'imposer à France Télécom de publier une offre de référence technique et tarifaire détaillant les offres de gros de prestations du segment terminal visées dans la partie « Obligation de faire droit aux demandes raisonnables d'accès », c'est-à-dire les offres LA/LPT bas et haut débit et l'offre CE2O. France Télécom devra étendre le périmètre de l'offre de référence pour inclure les autres produits de gros de services de capacité à interface alternative avec des débits différents ou des caractéristiques différentes permettant de répliquer les principales offres de détail de France Télécom de services de capacité.
L'Autorité considère que cette obligation constitue une garantie en vue d'assurer, notamment, l'égalité des conditions de la concurrence sur le marché considéré. Elle est proportionnée aux objectifs de l'article L. 32-1-II du code et en particulier aux 3°, 4° et 9°, en ce qu'elle constitue le minimum nécessaire qui doive être imposé à France Télécom pour les atteindre.

Eléments des offres de référence

Conformément au II de l'article D. 307 du CPCE, l'offre de référence devra être « suffisamment détaillée pour que l'opérateur demandeur ne paye que l'utilisation des moyens strictement liés à la prestation demandée ».
En application des II et III de l'article D. 307 précité, l'Autorité estime justifié que cette offre comprenne, outre les prestations devant y figurer, les conditions contractuelles types relatives aux tarifs, aux conditions de souscription, aux modalités d'accès à l'offre, les engagements de qualité de services ainsi que les informations répondant à l'obligation de transparence et de non-discrimination définies dans la présente décision. En particulier, tous les tarifs devront être effectivement inscrits dans l'offre de référence et non uniquement dans les conventions conclues entre les parties.
En outre, il importe que la tarification de certaines prestations « sur devis » ne soit envisagée qu'à titre exceptionnel. Le cas échéant, il reviendra à France Télécom de justifier des contraintes l'empêchant d'établir un tarif fixé à l'avance dans l'offre de référence.
Les prestations y figurant seront clairement détaillées et accompagnées des modalités de fourniture, des conditions techniques et tarifaires correspondant à ces offres ainsi qu'aux prestations qui leur sont associées.
Pour en assurer une diffusion satisfaisante, l'Autorité souhaite que l'offre de référence soit publiée sur un site internet librement accessible. Certaines informations, concernant notamment la localisation et les caractéristiques d'équipements de réseau et pouvant être qualifiées de sensibles, pourront être mises en annexe, afin d'en limiter la diffusion aux seuls opérateurs.

Evolution de l'offre de référence

France Télécom pourra être amenée à faire évoluer au cours du temps son offre de référence. Cependant, toute évolution unilatérale sans information préalable serait préjudiciable pour le secteur. Elle peut en effet remettre en question la politique commerciale d'un opérateur, et donc nécessiter un certain préavis avant de pouvoir être prise en compte. Sur le plan technique, elle peut impacter le plan de déploiement des opérateurs, ou nécessiter des adaptations longues à mettre en œuvre. Il est donc nécessaire que France Télécom publie avec un préavis suffisant toute évolution de l'une des offres de référence.
Ce préavis doit permettre à l'Autorité de s'assurer, le cas échéant, du respect des obligations portant sur les conditions tarifaires et techniques des offres. Il a aussi pour finalité de permettre à l'ensemble du secteur de répercuter ces évolutions sur les prix de détail dès leur application, de mettre en œuvre les solutions techniques correspondantes et, le cas échéant, d'adapter leurs processus opérationnels. De manière générale, au regard des délais de mise en œuvre des politiques de marketing et des délais de commande et de mise en place d'équipements techniques, un préavis de trois mois paraît adapté pour que les opérateurs soient en mesure d'utiliser effectivement les nouvelles modalités d'une offre de gros.
En pratique, ce délai, déjà imposé dans le cadre du précédent cycle d'analyse de marché, est apparu excessif lorsque la modification conduit à une baisse tarifaire d'une des prestations de l'offre de référence. Dans ces cas précis, un préavis plus court, d'un mois, paraît davantage adapté, un préavis de trois mois n'apparaissant pas alors nécessaire aux objectifs poursuivis.
Ainsi, sur le fondement des dispositions de l'article D. 307-III du CPCE, l'Autorité considère qu'au regard du fonctionnement actuel du marché, une durée de trois mois de préavis (ramené à un mois dans le cas d'une baisse tarifaire) est adaptée au respect des objectifs d'égalité des conditions de la concurrence, sans pour autant représenter une charge excessive pour France Télécom.
Lorsque ces évolutions contraignent l'opérateur alternatif à modifier ou à adapter ses propres installations, France Télécom devra respecter un délai d'un an conformément aux dispositions de l'article D. 99-7 du code des postes et des communications électroniques.
L'obligation de publication avec préavis s'entend sauf décision contraire de l'Autorité. Certains cas particuliers peuvent en effet nécessiter une mise en œuvre immédiate des évolutions des offres. Ce cas peut notamment se rencontrer à la suite d'une décision de règlement de litige ou d'une décision de modification d'une offre de référence.
Notamment, s'agissant de la première offre de référence publiée conformément à la présente décision, il n'y a pas lieu d'observer le préavis de trois mois susmentionné entre sa publication et son entrée en vigueur, et ce afin d'assurer au secteur une mise en œuvre des obligations telles que détaillées dans la présente décision aussi rapide que possible.
Il apparaît cependant raisonnable de laisser à France Télécom jusqu'à un mois à la suite de l'entrée en vigueur de la présente analyse de marché pour publier une offre de référence qui y soit conforme. Ce délai apparaît suffisant au regard du fait que des offres de gros sont déjà en vigueur ou en cours d'élaboration, qu'une offre de référence existe d'ores et déjà en application des précédentes décisions d'analyse des marchés des services de capacité et que France Télécom a pris connaissance du maintien de cette obligation durant le processus d'analyse des marchés et de consultation du secteur, en amont de l'entrée en vigueur de la présente décision.

  1. Obligations de contrôle tarifaires

L'article L. 38-I du CPCE, en son 4°, qu'il peut être imposé aux opérateurs « réputés exercer une influence significative sur un marché du secteur des communications électroniques » de « ne pas pratiquer de tarifs excessifs ou d'éviction sur le marché en cause et de pratiquer des tarifs reflétant les coûts correspondants ».
L'Autorité souligne que, conformément au cadre réglementaire des communications électroniques et comme l'y avait invité l'Autorité de la concurrence dans son avis du 12 mai 2006 sur le premier cycle d'analyse des marchés des services de capacité, les prestations différentes d'un même marché peuvent être soumises à des obligations distinctes.

Prestations du segment terminal dont le débit est inférieur à 10 Mbit/s

L'analyse de la puissance de France Télécom sur ce segment de marché a montré que ces prestations sont incontournables pour l'ensemble des opérateurs de communications électroniques en France, qui ne disposent dès lors d'aucun contrepouvoir sur la latitude de fixation des tarifs de France Télécom.
France Télécom est en position quasi-monopolistique sur ce marché en raison du contrôle de la boucle locale cuivre utilisée pour fournir la grande majorité des prestations dont le débit est inférieur à 10 Mbit/s. Malgré l'existence d'offres sur fibre dans cette gamme de débit, mais qui ne permettent pas une rentabilité suffisante à elles seules, France Télécom pourrait fixer les tarifs de ces prestations indépendamment de toute pression concurrentielle au désavantage de ses concurrents sur les marchés aval et, in fine, des consommateurs.
L'Autorité note que l'absence d'obligation de reflet des coûts permettrait à France Télécom de bénéficier d'une rente liée à sa puissance importante sur ce segment de marché. Une telle rente fausserait les conditions de développement d'une concurrence équitable sur les marchés aval.
L'obligation de reflet des coûts sur ce segment de marché de gros sur lequel France Télécom dispose d'une infrastructure essentielle et largement amortie permet de réduire la possibilité d'étendre l'influence significative sur les marchés aval et de maximiser le surplus social.
L'Autorité estime donc que les tarifs des prestations dont le débit est inférieur à 10 Mbit/s doivent refléter les coûts. En l'absence de mesure moins contraignante qui permettrait de prévenir toute distorsion de concurrence, cette obligation est proportionnée aux objectifs de l'article L. 32-1-II du code et, en particulier, à l'exercice « d'une concurrence effective et loyale », au développement de la compétitivité ou encore à « l'égalité des conditions de concurrence ». Cette obligation concerne toutes les prestations du marché pertinent du segment terminal inférieur à 10 Mbit/s, et notamment les éléments de l'offre technique et tarifaire « Liaisons louées d'interconnexion - interface classique », à l'exclusion du segment de marché supérieur à 10 Mbit/s.

Prestations du segment terminal dont le débit est supérieur à 10 Mbit/s

L'analyse de la puissance a montré l'influence significative qu'exerce France Télécom sur ce segment du marché de gros du segment terminal. En particulier, France Télécom sera encore en mesure durant les prochaines années de se comporter, sur ce marché, indépendamment de ses clients et de ses concurrents, grâce notamment aux avantages structurels dont elle bénéficie.
L'analyse a néanmoins permis de constater le développement par les opérateurs alternatifs de leurs propres infrastructures en réseaux d'accès métropolitains dans les principales villes. Les opérateurs proposant de telles alternatives ont dû consentir de lourds investissements pour déployer les infrastructures capillaires nécessaires.
Sur cette partie du marché du segment terminal, une régulation pertinente doit ainsi concilier une réplicabilité raisonnable des offres de détail de France Télécom sur le plan technique (architecture, interfaces, capillarité) et tarifaire, en apportant une gamme de « briques de base », et le souci de ne pas freiner l'ensemble des opérateurs (France Télécom et les opérateurs alternatifs) dans leur déploiement en cours dans l'optique (boucles locales et réseau de desserte).
Conformément à l'objectif de développement efficace dans les infrastructures, mentionné au 3° du II de l'article L. 32-1, l'Autorité estime qu'il est nécessaire et proportionné, afin, d'une part, de ne pas nuire aux investissements déjà consentis et, d'autre part, de maintenir une incitation suffisante pour les opérateurs à déployer leurs propres infrastructures plus bas dans le réseau, d'interdire à France Télécom de fixer une tarification d'éviction de ses prestations pour l'ensemble des prestations du marché de gros du segment terminal des services de capacité de débit supérieur à 10 Mbit/s par rapport aux prestations correspondantes proposées par les opérateurs alternatifs sur leurs propres infrastructures en réseaux d'accès métropolitains en fibre optique.

  1. Qualité de service

La capacité qu'ont les opérateurs alternatifs à proposer des niveaux de qualité de service satisfaisants (délai de livraison, délai de réparation en cas de panne...) est un paramètre déterminant de leur offre et donc du choix des clients entreprises.
Si la qualité de service des offres aval commercialisées par les opérateurs alternatifs dépend en partie de la qualité de leurs propres prestations, elle est également fonction de la qualité des offres de gros achetées auprès de France Télécom à partir desquelles elles sont construites. Une situation dans laquelle France Télécom bénéficierait au niveau du détail d'une qualité de service meilleure que celle qu'elle assure aux opérateurs alternatifs tendrait à biaiser le choix des entreprises et à distordre la concurrence sur le marché de détail.
Dans ces circonstances, les opérateurs alternatifs ont des besoins légitimes en termes de qualité de service qui peuvent être résumés par les deux points suivants :
― les niveaux de qualité de service (par exemple délais de livraison, de réparation, délai de fourniture d'informations, délais d'études) annoncés dans les offres de gros et leurs options de garantie de temps de rétablissement doivent être compatibles avec les niveaux de qualité et les délais de déploiements des réseaux à très haut débit requis sur le marché de détail, en particulier en comparaison de ceux de France Télécom. Cet objectif correspond notamment à l'obligation de non-discrimination à laquelle est soumise France Télécom. Il est essentiel pour les opérateurs alternatifs de pouvoir concurrencer les offres de détail professionnelles du groupe France Télécom non seulement par une réplicabilité technique et tarifaire, mais aussi par des engagements de qualité de service comparables ;
― les niveaux de qualité annoncés dans les offres de gros doivent autant que possible être respectés par France Télécom, afin que les opérateurs alternatifs aient suffisamment de visibilité et puissent s'engager eux-mêmes sur des niveaux de qualité de service auprès de leurs clients.
Il est souhaitable de donner une incitation à l'efficacité des processus mis en place par France Télécom et de vérifier, en application des dispositions prévues à l'article D. 309 du code des postes et des communications électroniques, que les niveaux de qualité de service de l'offre de gros sont non discriminatoires par rapport à ce que France Télécom propose pour ses propres services sur les marchés aval. Cela implique que l'opérateur historique mesure et publie mensuellement des indicateurs de qualité de service pour l'ensemble de ses offres de gros, ainsi que pour les offres aval correspondantes sur un périmètre technique équivalent.
En application de l'article D. 309 du code, l'Autorité peut en effet imposer à France Télécom de publier des informations concernant les conditions de fourniture des prestations d'accès.
La publication d'indicateurs de niveau de service s'analyse comme une obligation proportionnée pour France Télécom. La réalisation de mesures et la publication périodique de plusieurs indicateurs de suivi constitue en effet une pratique très courante et constitue la mesure la moins contraignante pour France Télécom de s'assurer de l'absence de pratiques discriminatoires et de permettre, notamment au client final, d'apprécier les responsabilités de France Télécom, d'une part, et de l'opérateur alternatif, d'autre part, dans la qualité de service des offres de détail.
Pour les offres de services de capacité actuellement disponibles, une liste d'indicateurs, mesurés et publiés mensuellement par France Télécom, existe d'ores et déjà pour les offres actuelles. Ces indicateurs constituent une base pertinente de mesures pour le présent marché et les offres aval correspondantes. Pour tenir compte des évolutions du marché et de l'apparition de nouvelles offres de gros ou de détail, ils pourront toutefois faire l'objet de modifications ponctuelles, après consultation par l'Autorité de France Télécom et des opérateurs clients des offres de gros, au regard notamment des indicateurs que France Télécom élabore déjà pour son propre suivi.
A minima, il semble souhaitable que soient traités dans ces indicateurs la livraison des accès et le traitement des pannes pour les différentes offres de gros proposées et les offres aval correspondantes.
Par ailleurs, l'Autorité apportera une attention particulière à ce que les offres de temps de rétablissement garanti proposées par France Télécom soient pleinement effectives techniquement, c'est-à-dire conduise à un taux satisfaisant de relève des accès dans le délai garanti. En effet, ces délais inscrits dans l'offre sont ceux sur la base desquels les opérateurs alternatifs s'engagent auprès de leurs clients finaux sur le marché de détail. La simple pénalité prévue par les offres de garantie de temps de rétablissement sur les marchés ne saurait être une réponse satisfaisante si elle ne constitue pas une incitation suffisante au respect par France Télécom des délais annoncés.

  1. Obligations de comptabilisation des coûts et de séparation comptable

Les obligations de comptabilisation des coûts et de séparation comptable sont des remèdes distincts que peut imposer l'Autorité à un opérateur déclaré puissant sur un marché donné au terme des analyses de marché menées selon la procédure déclinée dans l'article 16 de la directive-cadre.
L'obligation de comptabilisation des coûts est prévue par l'article 13 de la directive « accès », incluant également les obligations liées à la récupération des coûts, au contrôle des prix et à l'orientation des prix en fonction des coûts. L'objectif de l'imposition de ces obligations est d'éviter que l'opérateur concerné, « en l'absence de concurrence efficace, ne maintienne des prix à un niveau excessivement élevé, ou ne comprime les prix, au détriment des utilisateurs finals ».
L'article L. 38-I (5°) du CPCE précise que « les opérateurs réputés exercer une influence significative sur un marché du secteur des communications électroniques peuvent se voir imposer (...) [d'] isoler sur le plan comptable certaines activités en matière d'interconnexion ou d'accès, ou tenir une comptabilité des services et des activités qui permette de vérifier le respect des obligations imposées au titre du présent article ».
A ce titre, l'Autorité estime donc proportionné et justifié d'imposer à France Télécom une obligation de comptabilisation des coûts pour vérifier le respect des obligations tarifaires imposées à France Télécom sur le marché de gros des prestations du segment terminal au titre de la présente analyse.
L'article 11 de la directive « accès » prévoit que l'Autorité peut « imposer des obligations de séparation comptable en ce qui concerne certaines activités dans le domaine de l'interconnexion et/ou de l'accès », et ce dans l'objectif de contribuer à la vérification du respect des obligations de transparence et de non-discrimination. En particulier, l'Autorité peut « obliger une entreprise intégrée verticalement à rendre ses prix de gros et ses prix de transferts internes transparents, entre autres pour garantir le respect de l'obligation de non-discrimination prévue à l'article 10 ou, en cas de nécessité, pour empêcher des subventions croisées abusives ».
A ce titre, l'Autorité peut « spécifier le format et les méthodologies comptables à utiliser » et « exiger que les documents comptables, y compris les données concernant les recettes provenant de tiers, lui soient fournis si elle en fait la demande ».
Le caractère intégré et le positionnement de France Télécom sur les marchés de détail et de gros des services de capacité peuvent se traduire par des distorsions discriminatoires sur les marchés de gros. Ces distorsions éventuelles peuvent être mises sous surveillance grâce notamment à l'imposition d'une obligation de séparation comptable.
L'obligation de séparation comptable est justifiée étant donné la nécessité de détecter l'apparition de comportements discriminatoires et/ou de subventions croisées abusives entre le marché de gros et le marché de détail aval.
L'obligation de séparation comptable est proportionnée aux objectifs fixés à l'article L. 32-1 du CPCE, et en particulier les 2°, 3° et 4°. Cette obligation constitue le minimum nécessaire pour s'assurer notamment de l'absence de subventions croisées abusives et du respect de l'obligation de non-discrimination.
Par ailleurs, compte tenu de la levée des obligations sur le marché de détail des services de capacité, il convient de vérifier que l'activité aval de France Télécom ne s'approvisionne pas dans des conditions plus favorables que ses concurrents sur le marché de gros, en particulier lors de la formulation d'offres sur mesure sur le marché de détail. L'obligation de séparation comptable, notamment en ce qu'elle implique la transmission à l'Autorité des protocoles de cession interne, permet en effet de vérifier que toute offre sur mesure proposée par France Télécom sur le marché de détail est réplicable à partir de ses propres offres de gros par ses concurrents.
C'est pourquoi l'Autorité estime justifié et proportionné d'imposer à France Télécom une obligation de séparation comptable sur le marché de gros des prestations du segment terminal des services de capacité.
Au cas d'espèce, il peut notamment sembler justifié de mettre en place un dispositif de surveillance adapté, au travers de restitutions comptables ciblées pour chaque offre sur mesure de France Télécom, dans le cadre de la régulation du marché de gros amont du segment terminal de service de capacité. L'Autorité estime que cette mesure, ciblée sur l'articulation entre offres de gros et offres de détail et imposée au titre de la surveillance du marché de gros, n'est pas contradictoire avec la levée de la régulation du marché de détail qu'elle vise au contraire à accompagner.
Un tel dispositif de restitution comptable ciblée suppose que soit définie au préalable une valeur minimale seuil afin que l'attention de l'Autorité puisse se concentrer sur les offres sur mesure qui dépassent ce montant seuil.
Ainsi, pour chaque offre sur mesure constituée pour tout ou partie en aval du marché de gros du segment terminal, France Télécom établira et tiendra à disposition de l'Autorité un « protocole de cession interne » indiquant quelles « briques de base » techniques et tarifaires disponibles sur les marchés de gros elle utilise pour élaborer l'offre sur mesure concernée.
En particulier, France Télécom transmettra à l'Autorité chaque trimestre, pour chaque contrat d'un montant total supérieur à 100 000 € HT ayant été signé au cours du trimestre précédent et intégrant une offre sur mesure proposée en aval du marché de gros du segment terminal, un descriptif technique et tarifaire de l'offre sur mesure et de la manière dont elle est constituée à partir des « briques de base » techniques et tarifaires disponibles sur le marché de gros, accompagné du protocole de cession interne correspondant à cette offre. Le montant total de chaque contrat devra être évalué en tenant compte de la partie liée au réseau, incluant notamment les prestations d'accès et de collecte, mais également de la partie prestations de service.
L'Autorité considère que le seuil de 100 000 € HT est représentatif des offres à destination des entreprises communément contractualisées sur les marchés de détails en aval du marché de gros du segment terminal. L'Autorité estime que cette restitution particulière pour les contrats les plus importants n'est pas disproportionnée, au vu des éléments dont elle dispose concernant la capacité de traitement de France Télécom.
En fin d'année, l'ensemble des protocoles de cession internes correspondant aux offres sur mesure proposées par France Télécom sur le marché de détail, indépendamment de leur montant, sera agrégé et fera l'objet d'une restitution comptable dans le cadre des restitutions annuelles pour le compte de détail de services de capacité situé en aval du marché de gros régulé du segment terminal, au titre de la séparation comptable.
Les modalités de mise en œuvre des obligations de séparation comptable et de comptabilisation des coûts ont été précisées dans la décision n° 2006-1007 en date du 7 décembre 2006, dont les dispositions s'appliqueront sur la période d'application de la présente décision. L'Autorité ajoute, dans cette même décision, qu'il est envisageable qu'elle ait à modifier, au cours de la période de validité de la décision, des paramètres relatifs aux modalités des obligations comptables qui y sont décrites. Elle précise que de telles modifications, qu'elle spécifiera, ne remettront pas en cause les principes et la structure des obligations comptables décrits et imposés au titre de la décision n° 2006-1007. C'est dans cette perspective que s'inscrit la transmission d'un compte séparé précisant les coûts spécifiques aux offres sur mesure. La présente décision précise ainsi l'application de la décision n° 2006-1007 pour le cas particulier des offres sur mesure. Une décision complémentaire pourra être adoptée par l'Autorité en tant que de besoin.
Dans son avis en date du 30 octobre 2009, l'Autorité de la concurrence note que « la proposition de l'ARCEP d'imposer à France Télécom une obligation d'information relative aux offres sur mesure est notamment destinée à répondre aux inquiétudes exprimées par le Conseil dans son avis n° 06-A-10 » et indique que « lorsque des pratiques potentiellement anticoncurrentielles seraient identifiées par l'ARCEP sur la base de ces informations, son président serait alors en mesure de saisir l'Autorité de la concurrence des offres sur mesure litigieuses, conformément aux dispositions de l'article L. 36-10 du CPCE ». C'est bien ainsi que l'ARCEP entend appliquer la présente obligation.

C. ― Les obligations sur les marchés de gros des prestations du segment
interurbain métropole-Réunion, métropole-Guyane et Martinique-Guyane

Si France Télécom dispose d'une influence significative sur les marchés de gros des prestations des segments interurbains métropole-Réunion, métropole-Guyane et Martinique-Guyane, il apparaît que cette influence provient essentiellement de son contrôle exclusif des prestations de complément terrestre. Dans ce contexte, il apparaît suffisant et proportionné de concentrer les obligations imposées à l'opérateur sur ces seules prestations de complément terrestre.

  1. Obligation de faire droit aux demandes raisonnables d'accès aux infrastructures
    permettant de prendre livraison d'une capacité sur les câbles sous-marins (complément terrestre)

L'article L. 38-I (3°) du CPCE prévoit que l'ARCEP peut imposer des obligations d'accès à un opérateur disposant d'une influence significative sur un marché pertinent. Conformément à l'article D. 310 du code, elles peuvent notamment prendre la forme d'une obligation d'accorder à des tiers l'accès à des éléments ou ressources de réseau spécifiques, de négocier de bonne foi avec les opérateurs ou encore de ne pas retirer un accès déjà accordé.
Comme cela a été démontré précédemment :
― France Télécom dispose d'une influence significative sur le marché de gros des prestations du segment interurbain métropole-Réunion ;
― France Télécom dispose d'une influence significative sur les marchés de gros des prestations du segment interurbain métropole-Guyane et Martinique-Guyane.
Les opérateurs alternatifs présents à La Réunion ou en Guyane étant désormais en mesure d'acheter des prestations de capacité sous-marine auprès des membres, autres que France Télécom, des consortia respectifs des câbles SAFE ou Americas II, il convient que ces opérateurs alternatifs puissent disposer de prestations de complément terrestre satisfaisantes pour acheminer les trafics depuis les différentes stations d'atterrissement, où se fait l'extraction, jusqu'à leurs propres réseaux.
Il apparaît dès lors nécessaire d'imposer à France Télécom l'obligation de faire droit aux demandes raisonnables des opérateurs alternatifs relatives aux prestations de complément terrestres pour les câbles susmentionnés à La Réunion, en Guyane et à la Martinique.
D'une manière générale, le caractère raisonnable d'une demande d'accès formulée par un opérateur devra être apprécié au regard de la proportionnalité entre les contraintes économiques et techniques pour France Télécom résultant d'une telle demande et le bénéfice attendu au regard des objectifs mentionnés à l'article L. 32-1 du code, notamment sur le plan concurrentiel.

Obligations générales

Compte tenu de l'importance que revêt l'accès aux câbles sous-marins pour les opérateurs ayant une activité dans les départements d'outre-mer, et en vertu de l'article D. 310 (3°) du CPCE, il est proportionné d'imposer à France Télécom de ne pas retirer un accès déjà accordé à un opérateur, sauf accord préalable exprès de l'Autorité ou de l'opérateur concerné, conformément à l'objectif de développement efficace dans les infrastructures et de compétitivité du secteur mentionné au 3° de l'article L. 32-1 du code précité.
De plus, France Télécom étant une entreprise verticalement intégrée fournissant tout type de prestations de détail et de gros, il est également nécessaire et proportionné, au regard notamment des objectifs de développement efficace dans les infrastructures et de compétitivité du secteur mentionné au 3° de l'article L. 32-1 du code précité, que France Télécom présente les prestations qu'elle offre de façon suffisamment claire et détaillée, et qu'elle ne subordonne pas l'octroi d'une prestation à une autre, afin de ne pas conduire les acteurs à payer pour des prestations qui ne leur seraient pas nécessaires.
Enfin, France Télécom devra, conformément à l'article D. 310 (2°), négocier de bonne foi avec les opérateurs qui demandent des prestations d'accès relatives à ces marchés afin, d'une part, de minimiser les cas de litige et, d'autre part, de ne pas profiter de l'influence significative qu'elle exerce sur ces marchés pour faire obstruction dans les négociations avec les opérateurs. Tout refus d'accès ou restriction dans les conditions d'usages pour les opérateurs tiers devra ainsi être motivé.
Ces obligations sont conformes aux critères fixés par l'article L. 38 V, en particulier les a, b et d, en ce qu'elles sont aujourd'hui fournies par France Télécom et permettent le développement de la concurrence. Elles sont proportionnées aux objectifs fixés à l'article L. 32-1-II du CPCE précités, en particulier les 2°, 3° et 4°.

Maintien des offres existantes de complément terrestre

France Télécom propose aujourd'hui à La Réunion une prestation de complément terrestre pour le câble SAFE, sous forme de capacité, permettant de raccorder la liaison sous-marine à un point de présence opérateurs. Cette prestation, inscrite dans l'offre de référence, est dissociée de l'offre de liaison louée de transit et se présente sous la forme d'un abonnement annuel résiliable sans pénalité. France Télécom propose également depuis mars 2009 à La Réunion une offre spécifique permettant de relier via un déport fibre optique la station d'atterrissement du câble SAFE au répartiteur optique du NRA de Saint-Paul, situé au niveau du même terrain que la station d'atterrissement, où sont présents les opérateurs alternatifs au titre du dégroupage.
Pour le câble Americas II, France Télécom propose aujourd'hui une prestation de complément terrestre, sous forme de capacité, en Guyane et à la Martinique.
Eu égard à la puissance de France Télécom sur les marchés de gros considérés, l'Autorité estime justifié d'imposer à France Télécom de continuer à fournir ces prestations. Le maintien de ces offres est en effet indispensable pour la pérennité des activités des opérateurs alternatifs. Il est notamment nécessaire à l'exercice, au bénéfice des utilisateurs, d'une concurrence effective et loyale entre les exploitants de réseau et les fournisseurs de services de communications électroniques, au développement de l'investissement efficace dans les infrastructures, de l'innovation et de la compétitivité dans le secteur des communications électroniques. Il garantit en outre l'égalité des conditions de concurrence et la possibilité pour tous les utilisateurs de communiquer librement, objectifs cités à l'article L. 32-1-II (2°, 3° et 4°) du CPCE.
La suppression ou modification de ces offres aurait en outre pour conséquence de déstabiliser le marché et les plans d'affaires des opérateurs alternatifs. Dans la mesure où ces prestations sont déjà offertes aujourd'hui et sont nécessaires à l'activité des opérateurs tiers, leur imposition répond aux critères de l'article L. 38-V du code, en particulier les a, b, c et d.
Il convient de noter que cette obligation ne saurait faire obstacle au droit de France Télécom de faire évoluer l'architecture de son réseau dès lors que cette évolution est légitime et que les opérateurs tiers ont été informés dans des délais raisonnables des évolutions envisagées, des conséquences sur les prestations que France Télécom commercialise à leur intention et des éventuelles solutions alternatives disponibles. L'ensemble de ce processus devant s'inscrire dans le respect des obligations de transparence et de non-discrimination (cf. infra).

Prestation de complément terrestre sous forme de déport fibre optique

Il apparaît que France Télécom ne propose pas aujourd'hui la prestation de complément terrestre sous forme de déport fibre optique pour le câble Americas II. Un opérateur alternatif souhaitant acheminer du trafic sous-marin depuis la station d'atterrissement doit donc à ce jour souscrire à l'offre de prestation de complément terrestre sous forme de capacité, livrée au niveau d'un point de présence opérateurs.
Or il est envisageable qu'un opérateur alternatif ait déployé son propre réseau de collecte fibre optique jusqu'à un point situé au niveau du même terrain ou dans le même bâtiment que la station d'atterrissement, par exemple pour dégrouper un éventuel NRA qui se trouverait dans l'environnement immédiat de la station. A ce titre, il apparaît légitime que l'opérateur puisse utiliser ses propres infrastructures optiques dans la mesure du possible. Cela suppose alors que France Télécom propose, comme elle a pu le faire à La Réunion, une prestation de complément terrestre sous forme de déport fibre optique pour le câble Americas II en Guyane et à la Martinique.
Conformément aux objectifs imposés par l'article L. 32-1-II du code, et en particulier les 2°, 3° et 4°, et en l'absence de mesures moins contraignantes qui permettraient d'atteindre le même but, l'Autorité considère comme proportionné que France Télécom propose au titre de l'article D. 310 (1° et 3°) du code, une prestation de complément terrestre ― à La Réunion pour le câble SAFE, en Guyane et à la Martinique pour le câble Americas II ― se présentant soit sous forme de capacité, avec une granularité de débit adapté, entre la station d'atterrissement et un point de présence opérateurs, soit sous forme de déport fibre optique entre la station d'atterrissement et le répartiteur optique du NRA le plus proche.
Dans sa réponse à la consultation publique, France Télécom conteste l'obligation de fournir cette offre de déport optique, estimant qu'il s'agit d'une offre passive de fibre noire, ne relevant pas des marchés considérés dans la présente analyse de marché, au contraire du complément terrestre, qui est un service de capacité. L'Autorité considère pour sa part que cette offre de déport optique constitue une prestation annexe à l'accès aux câbles sous-marins et donc s'apparente à un substitut à une offre de colocalisation. Elle constitue donc un remède adéquat, ainsi qu'exposé précédemment au chapitre « Exclusion des offres physiques passives des marchés ».

  1. Obligation de non-discrimination sur le complément terrestre

L'article L. 38-I (2°) du CPCE prévoit que « les opérateurs réputés exercer une influence significative sur un marché du secteur des communications électroniques peuvent se voir imposer (...) [de] fournir des prestations d'interconnexion ou d'accès dans des conditions non discriminatoires ».
L'article D. 309 du CPCE précise que les obligations de non-discrimination font notamment en sorte que « les opérateurs appliquent des conditions équivalentes dans des circonstances équivalentes aux autres opérateurs fournissant des services équivalents, et qu'ils fournissent aux autres des services et informations dans les mêmes conditions et avec la même qualité que ceux qu'ils assurent pour leurs propres services, ou pour ceux de leurs filiales ou partenaires ».
France Télécom étant une entreprise intégrée verticalement, il apparaît nécessaire de garantir que France Télécom n'avantagera pas ses propres services sur les marchés de détail par les moyens qu'elle leur fournit. Il est de même nécessaire que France Télécom n'avantage pas certains opérateurs, et en particulier ses filiales ou ses partenaires, en leur proposant des offres de gros privilégiées, afin d'exclure ses concurrents les plus directs des marchés de détail et de gros sous-jacents.
Seule une obligation de non-discrimination imposée à France Télécom sur les marchés de gros où elle exerce une influence significative est ainsi à même de garantir l'exercice au bénéfice des utilisateurs d'une concurrence effective et loyale entre les exploitants de réseau et les fournisseurs de services de communications électroniques, objectif mentionné au 2° de l'article L. 32-1 du CPCE.
Limitée ici aux prestations de complément terrestre, cette obligation s'applique notamment aux conditions techniques et tarifaires offertes par voie contractuelle, aux contenus et à la qualité des informations fournies dans les processus mis en œuvre pour l'accès et l'interconnexion, aux délais de fourniture des offres de gros, ou encore à la qualité de service offerte.
Cette obligation est ainsi justifiée et proportionnée au regard des objectifs de régulation définis à l'article L. 32-1 du CPCE. Elle est en effet notamment nécessaire à l'exercice, au bénéfice des utilisateurs, d'une concurrence effective et loyale entre les exploitants de réseau et les fournisseurs de services de communications électroniques (2°), au développement de l'investissement efficace dans les infrastructures de l'innovation et de la compétitivité dans le secteur des communications électroniques (3°). Elle garantit l'égalité des conditions de concurrence et la possibilité pour tous les utilisateurs de communiquer librement (4°). Cette obligation, conforme à l'article D. 309 du CPCE, constitue le seul moyen permettant de répondre aux problèmes de concurrence démontrés ci-avant.

  1. Obligation de transparence sur le complément terrestre

L'article L. 38-I (1°) du code précité énonce que « les opérateurs réputés exercer une influence significative sur un marché du secteur des communications électroniques peuvent se voir imposer (...) [de] rendre publiques des informations concernant l'interconnexion ou l'accès (...) ; ».
En d'autres termes, l'opérateur exerçant une influence significative peut se voir imposer, en application de cet article, de fournir l'accès et l'interconnexion dans des conditions transparentes.
Conformément à l'article D. 307-I du CPCE, la transparence consiste ainsi en la mise à disposition de l'ensemble des opérateurs d'informations concernant les processus d'accès et d'interconnexion, qu'il s'agisse d'informations comptables, d'indicateurs de qualité de service, de spécifications techniques ou d'informations plus générales sur les modalités de fourniture des prestations ou sur les tarifs.
L'influence significative de France Télécom sur les marchés de gros considérés rend les conditions dans lesquelles les opérateurs peuvent accéder aux prestations de France Télécom ou s'interconnecter avec elle structurantes pour la viabilité des services qu'ils peuvent proposer.
Il est donc nécessaire que les opérateurs disposent d'une bonne visibilité sur l'architecture technique, économique et tarifaire des offres de gros de France Télécom, afin de garantir l'exercice d'une concurrence effective et loyale dans la fourniture des services de communications électroniques, au bénéfice des utilisateurs, ainsi qu'à l'égalité des conditions de concurrence.
Par ailleurs, l'obligation de transparence apparaît indispensable pour permettre le contrôle de l'obligation de non-discrimination, et ainsi permettre aux opérateurs négociant l'accès avec France Télécom de s'appuyer sur des données de référence publiques.
L'obligation de transparence imposée à France Télécom est ainsi nécessaire et proportionnée aux objectifs mentionnés à l'article L. 32-1 du code, et notamment à ceux cités au 2° et 4° de cet article.
En pratique, l'Autorité impose à France Télécom une obligation de transparence au moyen de deux dispositifs.

Conventions d'accès au complément terrestre

Les conditions inscrites dans les conventions d'accès au complément terrestre précisent les conditions techniques et tarifaires offertes par les parties.
France Télécom devra par conséquent informer l'Autorité de la signature de toutes les conventions d'accès correspondantes et de tout avenant à ces conventions qu'elle signe avec des tiers dans un délai de dix jours à compter de la signature du document, lorsque les prestations concernées sont fournies au titre de l'accès au complément terrestre sur les marchés de gros de prestations du segment interurbain métropole-Réunion, métropole-Guyane et Martinique-Guyane.
Cette information permettra à l'Autorité de demander le cas échéant à France Télécom de lui transmettre ledit document, en application de l'article L. 34-8 du CPCE, afin notamment de lui permettre de contrôler le respect par France Télécom de l'obligation de non-discrimination.

Informations données aux acteurs bénéficiant de prestations d'accès et d'interconnexion

Afin de donner un maximum de visibilité aux acteurs ayant signé avec elle une telle convention d'accès, France Télécom devra leur fournir des informations sur les caractéristiques de son réseau, notamment en termes d'architecture, d'interfaces et de dimensionnement. Elle en informera également l'Autorité.
Conformément aux dispositions de l'article D. 307-III du code, France Télécom devra également informer ces acteurs, dans un préavis raisonnable, de toute évolution de ses conditions techniques et tarifaires des prestations d'accès, ainsi que de toute évolution d'architecture de son réseau, en cas d'évolution de nature à contraindre les opérateurs utilisant une des prestations d'accès à modifier ou adapter leurs propres installations.
Pour les prestations qui devront être intégrées dans l'offre de référence imposée ci-après, France Télécom devra respecter le préavis défini dans la partie IV-C-4. Pour les autres prestations, elle devra respecter un préavis raisonnable.
Cette obligation apparaît essentielle pour permettre aux opérateurs d'anticiper ces évolutions, et ainsi d'avoir une visibilité suffisante de leurs plans d'investissement, condition nécessaire au développement de l'investissement efficace dans les infrastructures. Les modalités de publication de ces informations et le niveau de détail requis pourront être précisés par une décision ultérieure de l'Autorité, en tant que de besoin.
Il apparaît par ailleurs raisonnable que France Télécom puisse, une fois l'an, au cours du premier comité de l'interconnexion et de l'accès, préciser les chantiers en cours sur les évolutions de ses réseaux utilisés dans le cadre de l'accès au complément terrestre sur les câbles concernés, afin de prévenir suffisamment à l'avance les opérateurs clients de ses offres des évolutions nécessaires à entreprendre de leur côté.

  1. Publication d'une offre de référence technique et tarifaire
    d'accès concernant les prestations de complément terrestre
    Obligation générique

Conformément à l'article D. 307-II du CPCE, « sans préjudice de l'article D. 308, lorsqu'un opérateur exerçant une influence significative sur un marché du secteur des communications électroniques est soumis à une obligation de non-discrimination en application de l'article D. 309, l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes peut imposer à cet opérateur de publier une offre technique et tarifaire d'interconnexion ou d'accès. »
L'existence et la publication d'une offre de référence par France Télécom répond à plusieurs objectifs : elle pallie la faiblesse du pouvoir de négociation bilatérale des opérateurs clients de l'offre avec France Télécom ; elle permet d'assurer la non-discrimination dans le traitement des opérateurs alternatifs ; elle apporte de la visibilité et de la stabilité aux opérateurs dans l'élaboration de leurs plans de développement ; enfin, elle permet de découpler les prestations de sorte qu'un opérateur n'a à payer que ce dont il a besoin.
Pour les prestations de gros d'accès au complément terrestre sur le segment interurbain interterritorial des services de capacité, la conjonction de la puissance de France Télécom, de l'absence de réplicabilité d'infrastructures essentielles détenues par France Télécom, de l'intégration verticale de l'opérateur historique et de son rôle sur les marchés aval rend peu probable le fait que les opérateurs concurrents de France Télécom sur les marchés aval disposent d'un pouvoir de négociation suffisant pour obtenir des offres adaptées sur la prestation de complément terrestre sur les marchés de gros des prestations du segment interurbain concernés.
Par ailleurs, pour les opérateurs ayant recours à ces offres, les reversements directs à France Télécom représentent une proportion importante de leur chiffre d'affaires, et apparaissent donc comme déterminants dans leur budget. Les opérateurs alternatifs ont donc besoin, lors de l'élaboration de leurs plans d'affaires et de leurs stratégies techniques et commerciales, de disposer d'une bonne visibilité sur les conditions techniques et tarifaires proposées par France Télécom.
Enfin, le recours à une offre de référence publique permet d'assurer un traitement non discriminatoire entre les différents opérateurs clients de l'offre.
Ainsi, l'Autorité estime nécessaire d'imposer à France Télécom de publier une offre de référence technique et tarifaire détaillant ses offres de gros de prestations de complément terrestre pour les trois routes sous-marines correspondantes.
L'Autorité considère que cette obligation constitue une garantie en vue d'assurer, notamment, l'égalité des conditions de la concurrence sur le marché considéré. Elle est proportionnée aux objectifs de l'article L. 32-1-II du CPCE, et en particulier aux 3°, 4° et 9°, en ce qu'elle constitue le minimum nécessaire qui doive être imposé à France Télécom pour les atteindre.

Eléments des offres de référence

Conformément au II de l'article D. 307 du code des postes et des communications électroniques, l'offre de référence devra être « suffisamment détaillée pour que l'opérateur demandeur ne paye que l'utilisation des moyens strictement liés à la prestation demandée ».
En application des II et III de l'article D. 307 précité, l'Autorité estime justifié que cette offre comprenne, outre les prestations devant y figurer, les conditions contractuelles types relatives aux tarifs, aux conditions de souscription, aux modalités d'accès à l'offre ainsi que les informations répondant à l'obligation de transparence et de non-discrimination définies dans la présente décision. En particulier, tous les tarifs devront être effectivement inscrits dans l'offre de référence et non uniquement dans les conventions conclues entre les parties.
En outre, il importe que la tarification de certaines prestations « sur devis » ne soit envisagée qu'à titre exceptionnel. Le cas échéant, il reviendra à France Télécom de justifier des contraintes l'empêchant d'établir un tarif fixé à l'avance dans l'offre de référence.
Les prestations y figurant seront clairement détaillées et accompagnées des modalités de fourniture, des conditions techniques et tarifaires correspondant à ces offres ainsi qu'aux prestations qui leur sont associées.
Pour en assurer une diffusion satisfaisante, l'Autorité souhaite que l'offre de référence soit publiée sur un site internet librement accessible. Certaines informations, concernant notamment la localisation et les caractéristiques d'équipements de réseau et pouvant être qualifiées de sensibles, pourront être mises en annexe, afin d'en limiter la diffusion aux seuls opérateurs.

Evolution de l'offre de référence

France Télécom pourra être amenée à faire évoluer au cours du temps son offre de référence. Cependant, toute évolution unilatérale sans information préalable serait préjudiciable pour le secteur. Elle peut en effet remettre en question la politique commerciale d'un opérateur, et donc nécessiter un certain préavis avant de pouvoir être prise en compte. Sur le plan technique, elle peut impacter le plan de déploiement des opérateurs, ou nécessiter des adaptations longues à mettre en œuvre. Il est donc nécessaire que France Télécom publie avec un préavis suffisant toute évolution de l'une des offres de référence.
Ce préavis doit permettre à l'Autorité de s'assurer, le cas échéant, du respect des obligations portant sur les conditions tarifaires et techniques des offres. Il a aussi pour finalité de permettre à l'ensemble du secteur de répercuter ces évolutions sur les prix de détail dès leur application, de mettre en œuvre les solutions techniques correspondantes et, le cas échéant, d'adapter leurs processus opérationnels. De manière générale, au regard des délais de mise en œuvre des politiques de marketing et des délais de commande et de mise en place d'équipements techniques, un préavis de trois mois paraît adapté pour que les opérateurs soient en mesure d'utiliser effectivement les nouvelles modalités d'une offre de gros.
En pratique, ce délai, déjà imposé dans le cadre du précédent cycle d'analyse de marché, est apparu excessif lorsque la modification conduit à une baisse tarifaire d'une des prestations de l'offre de référence. Dans ces cas précis, un préavis plus court, d'un mois, paraît davantage adapté, un préavis de trois mois n'apparaissant pas alors nécessaire aux objectifs poursuivis.
Ainsi, sur le fondement des dispositions de l'article D. 307-III du code des postes et des communications électroniques, l'Autorité considère que au regard du fonctionnement actuel du marché, une durée de trois mois de préavis (ramenée à un mois dans le cas d'une baisse tarifaire) est adaptée au respect des objectifs d'égalité des conditions de la concurrence, sans pour autant représenter une charge excessive pour France Télécom.
Lorsque ces évolutions contraignent l'opérateur alternatif à modifier ou à adapter ses propres installations, France Télécom devra respecter un délai d'un an conformément aux dispositions de l'article D. 99-7 du code des postes et des communications électroniques.
L'obligation de publication avec préavis s'entend sauf décision contraire de l'Autorité. Certains cas particuliers peuvent en effet nécessiter une mise en œuvre immédiate des évolutions des offres. Ce cas peut notamment se rencontrer à la suite d'une décision de règlement de litige ou d'une décision de modification d'une offre de référence.
Notamment, s'agissant de la première offre de référence publiée conformément à la présente décision, il n'y a pas lieu d'observer le préavis de trois mois susmentionné entre sa publication et son entrée en vigueur, et ce afin d'assurer au secteur une mise en œuvre des obligations telles que détaillées dans la présente décision aussi rapide que possible.
Il apparaît cependant raisonnable de laisser à France Télécom jusqu'à un mois à partir de l'entrée en vigueur de la présente analyse pour publier une offre de référence qui y soit conforme. Ce délai apparaît suffisant au regard du fait que des offres de gros sont déjà en vigueur ou en cours d'élaboration, qu'une offre de référence existe d'ores et déjà en application des précédentes décisions d'analyse des marchés des services de capacité et que France Télécom a pris connaissance du maintien de cette obligation durant le processus d'analyse des marchés et de consultation du secteur, en amont de l'entrée en vigueur de la présente décision.

  1. Obligations de contrôle tarifaire

L'article L. 38-I du code précité précise, en son 4°, qu'il peut être imposé aux opérateurs « réputés exercer une influence significative sur un marché du secteur des communications électroniques » de « ne pas pratiquer de tarifs excessifs ou d'éviction sur le marché en cause et de pratiquer des tarifs reflétant les coûts correspondants ».
L'analyse de la puissance sur les marchés de gros des prestations du segment interurbain interterritorial métropole-Réunion, métropole-Guyane et Martinique-Guyane a montré l'influence significative qu'exerce France Télécom sur ces marchés, au travers essentiellement de son contrôle exclusif des prestations de complément terrestre. L'analyse a notamment permis de constater le développement d'offres alternatives par les opérateurs membres des différents consortia exploitant les câbles sous-marins.
Pour les prestations de « complément terrestre » pour l'accès au câble SAFE à La Réunion et au câble Americas II en Guyane et à la Martinique, pour lesquelles France Télécom est puissante et le demeurera jusqu'à l'horizon de la présente analyse, France Télécom est en mesure de fixer les tarifs de ces prestations indépendamment de toute pression concurrentielle au désavantage de ses concurrents sur les marchés aval et, in fine, des consommateurs
Afin de garantir l'égalité des conditions de concurrence, de veiller à l'exercice au bénéfice des utilisateurs d'une concurrence effective et loyale et au développement de l'investissement efficace dans les infrastructures, conformément aux objectifs cités au 2°, 3° et 4° de l'article L. 32-1-II précité, l'Autorité estime nécessaire et proportionné d'imposer à France Télécom une obligation de reflet des coûts pour les prestations de complément terrestre à La Réunion pour le câble SAFE, en Guyane et à la Martinique pour le câble Americas II.

  1. Obligations de comptabilisation des coûts

L'obligation de comptabilisation des coûts est un remède que peut imposer l'Autorité à un opérateur déclaré puissant sur un marché donné au terme des analyses de marché menées selon la procédure déclinée dans l'article 16 de la directive-cadre.
L'obligation de comptabilisation des coûts est prévue par l'article 13 de la directive-accès, incluant également les obligations liées à la récupération des coûts, au contrôle des prix et à l'orientation des prix en fonction des coûts. L'objectif de l'imposition de ces obligations est d'éviter que l'opérateur concerné, « en l'absence de concurrence efficace, ne maintienne des prix à un niveau excessivement élevé, ou ne comprime les prix, au détriment des utilisateurs finals ».
L'article L. 38-I (5°) du code des postes et des communications électroniques précise que « les opérateurs réputés exercer une influence significative sur un marché du secteur des communications électroniques peuvent se voir imposer (...) [de] tenir une comptabilité des services et des activités qui permette de vérifier le respect des obligations imposées au titre du présent article ».
A ce titre, l'Autorité estime donc proportionné et justifié d'imposer à France Telecom une obligation de comptabilisation des coûts de l'ensemble des prestations de complément terrestre des marchés de gros des prestations de segment interurbain interterritorial sur lesquels elle exerce une influence significative (métropole-Réunion, métropole-Guyane et Martinique-Guyane) pour vérifier le respect des obligations tarifaires imposées à France Télécom sur ces marchés au titre de la présente analyse.
Les modalités de mise en œuvre de l'obligation de comptabilisation des coûts ont été précisées dans la décision n° 2006-1007 en date du 7 décembre 2006, dont les dispositions s'appliqueront sur la période d'application de la présente décision. Le cas échéant, une nouvelle décision pourra compléter la décision n° 2006-1007.

IV. - AVIS DE L'AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE

Conformément à l'article L. 37-1 du CPCE, l'Autorité a sollicité le 18 septembre 2009 l'avis de l'Autorité de la concurrence sur la définition de marché et la désignation des opérateurs exerçant une influence significative sur le marché des services de capacité.
A la suite de cette saisine, l'Autorité de la concurrence a rendu le 30 octobre 2009 l'avis n° 09-A-53 susvisé.

A. ― Sur la levée de la régulation ex ante
sur le marché de détail des services de capacité

En premier lieu, l'Autorité de la concurrence constate que, « depuis la précédente analyse de marché, les barrières à l'entrée sur le marché de détail, restées élevées du fait notamment de la détention par France Télécom de la boucle locale cuivre, ont toutefois diminué avec l'introduction d'offres de gros » et rappelle que ces offres (LA/LPT et CE2O), « qui ont vocation à servir de briques de base pour permettre aux opérateurs de construire des offres de service sur le marché de détail aval, n'étaient pas encore pleinement opérationnelles en 2006 ».
En deuxième lieu, l'Autorité de la concurrence note que « l'essor sur le marché de gros des accès en DSL et l'évolution des usages vers les services de capacité à interface alternative se sont confirmés sur la période 2006-2009, ce qui conforte la situation des opérateurs alternatifs sur le marché de détail ».
En troisième lieu, l'Autorité de la concurrence relève que « le déploiement par les opérateurs alternatifs de boucles locales optiques permet aux concurrents de France Télécom de répondre en propre, ou via la boucle locale optique d'un autre opérateur, à la demande des entreprises ».
En dernier lieu, l'Autorité de la concurrence précise, concernant l'accès aux fourreaux de génie civil de France Télécom, que « la régulation du marché de gros proposée par l'ARCEP dans sa nouvelle analyse va amener à rapprocher les conditions de l'offre d'accès au génie civil de France Télécom pour le déploiement de boucles locales optiques par les opérateurs professionnels s'adressant aux entreprises (offres LGC DPR et LGC ZAC) de celles déjà mises en place pour le marché résidentiel » et que ce rapprochement « devrait permettre aux opérateurs professionnels visant le marché des entreprises de déployer leurs boucles locales optiques dans de meilleures conditions ».
En conclusion, l'Autorité de la concurrence considère que « les concurrents de France Télécom sont désormais, par le déploiement d'infrastructures en propre et l'utilisation des offres de gros sous le contrôle de l'ARCEP, en mesure de concurrencer France Télécom dans des conditions satisfaisantes » et que « cette évolution vers une situation de concurrence effective sur le marché de détail est susceptible de justifier à elle seule la suppression du marché de détail de la liste des marchés régulables ».

B. ― Sur l'imposition d'une obligation d'information relative aux offres sur mesure

En premier lieu, l'Autorité de la concurrence note que, « d'une manière générale, la régulation dans le secteur des communications électroniques relève du régime de l'exception par rapport au droit commun de la concurrence » et rappelle que, dans le premier avis rendu sur les analyses de marchés pertinents (avis n° 04-A-17 du 14 octobre 2004), le Conseil avait noté que le rapprochement opéré entre le droit commun sectoriel et le droit de la concurrence par le cadre communautaire de 2002 « constitue une nouvelle étape dans un processus dont l'objectif de long terme doit rester la suppression de toute régulation ex ante. Dans la période intermédiaire (...), les nouvelles procédures mises en place devraient permettre de réserver une telle régulation aux situations dans lesquelles les obstacles à la concurrence seraient tels que le droit de la concurrence en lui-même, sans le recours à une régulation ex ante, ne serait pas suffisamment efficace ». Aussi pour l'Autorité de la concurrence, « cette régulation n'a donc pas vocation à se maintenir au-delà de ce qui apparaît nécessaire, en particulier sur les marchés de détail ».
En deuxième lieu, l'Autorité de la concurrence note que « la proposition de l'ARCEP d'imposer à France Télécom une obligation d'information relative aux offres sur mesure est notamment destinée à répondre aux inquiétudes exprimées par le Conseil dans son avis n° 06-A-10 » et que « l'évolution du marché de détail vers une situation de concurrence effective, nécessairement progressive, justifie qu'une attention soutenue continue à être portée quant à la réplicabilité des offres de détail de France Télécom par les opérateurs alternatifs ».
En ce qui concerne la proportionnalité et l'efficacité de cette obligation, l'Autorité de la concurrence relève toutefois que « France Télécom estime que l'obligation de communication préalable de ses offres sur mesure est susceptible de défavoriser l'opérateur par rapport à ses concurrents, sur un marché "Entreprises” où les négociations sont généralement menées jusqu'au dernier moment avec les acheteurs ».
L'Autorité de la concurrence estime ainsi que « la transmission de l'offre sur mesure au moins huit jours avant sa remise au client ne semble pas justifiée, en ce qu'elle paraît relever d'un contrôle tarifaire préalable sur le marché de détail » et qu'une telle obligation de communication préalable « [lui paraît] disproportionnée par rapport aux objectifs poursuivis par la régulation ». L'Autorité de la concurrence note cependant qu'une « obligation d'information, postérieurement à la remise de l'offre, permettrait à l'ARCEP de disposer des informations relatives aux offres sur mesure faites par l'opérateur historique, sur ce marché traditionnellement caractérisé par une forte opacité ». L'ARCEP a modifié son projet de décision initial en ce sens.
En outre, l'Autorité de la concurrence considère que, « lorsque des pratiques potentiellement anticoncurrentielles seraient identifiées par l'ARCEP sur la base de ces informations, son président serait alors en mesure de saisir l'Autorité de la concurrence des offres sur mesure litigieuses, conformément aux dispositions de l'article L. 36-10 du CPCE » et que « les documents recueillis par l'ARCEP auprès de France Télécom au titre de l'obligation d'information relative aux offres sur mesure pourront faciliter l'examen de ces pratiques par l'Autorité ». Pour l'Autorité de la concurrence, « ce mécanisme est, en outre, de nature à inciter l'opérateur historique à discipliner son comportement ».
L'Autorité de la concurrence rappelle que « le contrôle par le droit de la concurrence ex post de la réplicabilité des offres de détail de France Télécom sur le marché des services de capacité, et notamment de ses offres sur mesure, nécessite une expertise approfondie » et considère ainsi que « cette obligation faciliterait l'examen par l'Autorité de la réplicabilité de ces offres par les concurrents de l'opérateur historique ».
Dans ces conditions, l'Autorité de la concurrence « émet un avis favorable à la proposition de l'ARCEP de lever la régulation du marché de détail des services de capacité, et les obligations correspondantes ». L'Autorité de la concurrence considère à ce titre que « l'imposition à France Télécom d'une obligation complémentaire d'information à l'ARCEP sur ses offres sur mesure permettra d'accompagner la levée du dispositif ex ante en facilitant la mise en œuvre du droit ex post qui s'y substitue ».

C. ― Sur la régulation des câbles sous-marins

En premier lieu, l'Autorité de la concurrence note, concernant la proposition de l'ARCEP de lever la régulation sur les câbles entre la métropole et les Antilles et de maintenir la régulation pour les câbles sous-marins desservant la Guyane et La Réunion, que « l'examen des contraintes concurrentielles s'exerçant sur le marché de gros des câbles sous-marins ne saurait se limiter à la comptabilisation des différents câbles desservant les territoires ultra-marins, et nécessite une appréciation de la concurrence effective, tant sur la partie sous-marine des câbles que sur la partie terrestre ».
L'Autorité de la concurrence considère ainsi que « la pression concurrentielle s'exerçant, pour la partie sous-marine, sur France Télécom en tant que membre des consortia exploitant des câbles sous-marins pour lesquels il ne dispose d'aucun monopole de commercialisation, ne paraît pas pouvoir être appréciée de la même manière que la pression concurrentielle qui s'exerce sur France Télécom en tant qu'opérateur disposant d'un monopole sur l'atterrissement et le complément terrestre de ces mêmes câbles dans les départements d'outre-mer » et note que « dans le premier cas, France Télécom ne paraît pas exercer une influence significative, alors que dans le second cas son influence est significative ». L'ARCEP a modifié en ce sens la partie de son projet de décision initial relative à l'influence significative exercée par France Télécom.
En deuxième lieu, l'Autorité de la concurrence note, concernant la diminution des barrières à l'entrée en Guadeloupe et en Martinique consécutive aux déploiements des câbles du groupe Loret, que, « si l'établissement d'une infrastructure concurrente peut être un facteur pro-concurrentiel, il convient cependant d'examiner la pression concurrentielle, non seulement potentielle mais aussi effective, exercée par GCN et MCN sur France Télécom ».
A ce titre, l'Autorité de la concurrence indique que « les informations recueillies [...] lors de l'instruction ont mis en évidence les difficultés rencontrées par les fournisseurs d'accès à internet non intégrés à l'un des deux groupes, Loret et France Télécom », notamment « lors de la négociation de capacités supplémentaires, et ce dans un contexte de montée en débit et de développement des usages sur les marchés antillais ». En outre, l'Autorité de la concurrence souligne que « l'opérateur Free, déjà présent en métropole sur le marché de détail de l'accès à internet, a confirmé que la question du coût des capacités sur les câbles sous-marins était l'un des principaux obstacles au lancement de ses services dans les départements d'outre-mer ».
L'Autorité de la concurrence invite ainsi l'ARCEP à « faire le point sur les conditions d'accès aux capacités sous-marines des acteurs des Antilles et d'envisager le cas échéant des voies d'amélioration » dans le cadre du rapport sur le développement du secteur des communications électroniques dans les départements et régions d'outre-mer, que lui ont demandé le Gouvernement et le législateur.
Dans ces conditions, l'Autorité de la concurrence relève que « le maintien de la régulation de la partie sous-marine semble quelque peu artificiel dès lors que France Télécom ne possède pas de monopole de commercialisation sur les capacités sous-marines » et qu'une « régulation ex ante est en revanche justifiée en ce qui concerne les prestations de complément terrestre, pour lesquelles France Télécom conserve un fort pouvoir de marché lorsqu'il est membre d'un consortium et dispose à ce titre d'un monopole sur l'atterrissement ». L'Autorité de la concurrence invite ainsi l'ARCEP « à revenir sur la situation particulière des Antilles à l'occasion du rapport que cette dernière doit rendre au Gouvernement avant la fin de l'année ». L'ARCEP a précisé son projet de décision initial en ce sens.
Par ailleurs, concernant le cas particulier de la Corse, l'Autorité de la concurrence note que « France Télécom est actuellement le seul offreur sur le marché de gros, tant pour les capacités sous-marines que pour les prestations de complément terrestre » et que « ce monopole pourrait s'appréhender comme une barrière à l'entrée ». L'Autorité de la concurrence indique à cet effet que « la société SFR est ainsi, à ce jour, le seul fournisseur d'accès à internet à avoir dégroupé les NRA (nœuds de raccordement d'abonnés) de France Télécom sur l'île, les autres opérateurs achetant à l'opérateur historique son offre de bitstream » et que « plusieurs opérateurs ont confirmé, lors de l'instruction, que la présence d'un seul opérateur dégroupeur sur l'île s'expliquait notamment par le coût des capacités entre le continent et la Corse ».
L'Autorité de la concurrence invite ainsi l'ARCEP « à prendre en compte dans son analyse la spécificité éventuelle de ce segment [...] dans l'attente de l'ouverture commerciale d'un second câble, qui semble envisagée dans le cadre d'une délégation de service public lancée par la collectivité territoriale de Corse ». L'ARCEP a précisé son projet de décision initial sur ce point.

V. - OBSERVATIONS DE LA COMMISSION EUROPÉENNE

Conformément à l'article L. 37-3 du CPCE, l'Autorité a notifié le 16 février 2010 à la Commission européenne et aux autorités réglementaires nationales des autres Etats membres de la Communauté européenne son projet de décision portant sur la définition des marchés pertinents de services de capacité, la désignation d'opérateurs exerçant une influence significative sur ces marchés et les obligations imposées à ce titre.
Au regard du projet de décision notifié et des informations supplémentaires fournies par l'ARCEP en réponse aux demandes de la Commission européenne le 3 mars 2010, cette dernière n'a formulé aucune observation sur l'analyse de l'Autorité.
Décide :

Article 1

Dans le cadre de l'analyse des marchés de services de capacité, sont utilisées les définitions suivantes :
― territoire d'analyse. On entend par « territoire d'analyse » l'ensemble du territoire métropolitain, des départements et régions d'outre-mer, ainsi que les collectivités d'outre-mer où les dispositions des articles L. 37-1 et suivants du CPCE s'appliquent ;
― complément terrestre. On entend par « complément terrestre » le tronçon de liaison louée compris entre la station d'atterrissement d'un câble sous-marin et un point de livraison auquel viennent s'interconnecter les opérateurs acheteurs ;
― segment terminal. On entend par « segment terminal » le tronçon compris entre le site client et le premier brasseur, soit de liaisons louées, soit ATM dans le cas de services de capacités à interfaces alternatives ;
― circuit interurbain. On entend par « circuit interurbain » le tronçon entre deux brasseurs qui permet, en reliant deux segments terminaux, de construire une liaison louée point à point ;
― circuit interurbain intraterritorial. On entend par « circuit interurbain intraterritorial » un circuit interurbain entre des équipements réseaux présents sur un même territoire : France métropolitaine, département ou collectivité territoriale d'outre-mer ;
― circuit interurbain interterritorial. On entend par « circuit interurbain interterritorial » un circuit interurbain entre des équipements réseaux présents sur deux territoires au sens de la précédente définition.

Définition des marchés pertinents

Article 2

Est déclaré pertinent le marché de gros des prestations de segment terminal de services de capacité sur le territoire d'analyse. Il comprend les interfaces classiques et les interfaces alternatives. Il exclut les services support et de transmission ainsi que les offres d'accès large bande livrées au niveau régional.

Article 3

Sont déclarés pertinents les marchés de gros des prestations de transit interterritorial suivants :
― le marché de gros des prestations de circuit interurbain interterritorial entre la métropole et la Guyane ;
― le marché de gros des prestations de circuit interurbain interterritorial entre la métropole et La Réunion ;
― le marché de gros des prestations de circuit interurbain interterritorial entre la Martinique et la Guyane.
Le circuit interurbain interterritorial exclut les services de transmission de données et les services support.

Existence d'un opérateur exerçant une influence significative

Article 4

La société France Télécom exerce une influence significative sur le marché de gros des prestations de segment terminal de services de capacité défini à l'article 2.

Article 5

La société France Télécom exerce une influence significative sur le marché de gros des prestations de segment interurbain interterritorial entre la métropole et La Réunion.
La société France Télécom exerce une influence significative sur le marché de gros des prestations de segment interurbain interterritorial entre la métropole et la Guyane.
La société France Télécom exerce une influence significative sur le marché de gros des prestations de segment interurbain interterritorial entre la Martinique et la Guyane.

Obligations imposées à l'opérateur puissant sur les marchés de gros
Obligation de faire droit aux demandes raisonnables d'accès

Article 6

France Télécom est tenue de faire droit aux demandes raisonnables d'accès à des éléments de réseau ou à des moyens qui y sont associés et relatives aux prestations du marché pertinent défini à l'article 2 et aux prestations de complément terrestre des marchés de gros des prestations de segment interurbain interterritorial sur lesquels elle exerce une influence significative conformément à l'article 5.
A ce titre, lorsque la demande est raisonnable et relative aux prestations des marchés pertinents précités, ou aux prestations qui leur sont associées, France Télécom est notamment tenue :
― de négocier de bonne foi avec les opérateurs qui demandent un accès ;
― de ne pas retirer à un opérateur un accès déjà accordé, sauf accord préalable de l'Autorité ou de l'opérateur tiers concerné ;
― d'offrir des services particuliers en gros en vue de leur revente à des tiers ;
― d'accorder un accès ouvert aux interfaces techniques, protocoles ou autres technologies-clés qui revêtent une importance essentielle pour l'interopérabilité des services ou des services de réseaux virtuels ;
― de permettre le raccordement d'éléments de réseau au moyen des offres de gros de prestations de segment terminal ;
― de fournir une possibilité de colocalisation ou d'autres formes de partage des moyens, y compris le partage des gaines, des bâtiments ou des pylônes ;
― de fournir les services spécifiques nécessaires pour garantir aux utilisateurs l'interopérabilité des services de bout en bout, notamment en ce qui concerne les moyens destinés aux services de réseaux intelligents ;
― de fournir l'accès à des systèmes d'assistance opérationnelle ou à des systèmes logiciels similaires, nécessaires pour garantir l'existence d'une concurrence loyale dans la fourniture des services.
Tout refus de France Télécom doit être dûment motivé.
Les conditions techniques et tarifaires des prestations d'accès fournies par France Télécom doivent être suffisamment détaillées pour faire apparaître les divers éléments propres à répondre à la demande. En particulier, la fourniture d'une prestation d'accès ne doit pas être subordonnée à la fourniture de services, de moyens ou de toute autre ressource, qui ne seraient pas nécessaires à la fourniture de cette prestation.
France Télécom s'engage, sur les prestations de raccordement physique et logique à son réseau, sur un niveau satisfaisant de qualité de service et à proposer un mécanisme incitatif à son respect.
France Télécom maintient les offres d'accès au réseau qu'elle fournit actuellement, à savoir les liaisons louées partielles LPT locales et régionales, l'offre CE2O, les liaisons d'aboutement et les services de colocalisation.

Obligation de non-discrimination

Article 7

France Télécom fournit, dans des conditions non discriminatoires, l'ensemble des prestations d'accès relatives au marché pertinent défini à l'article 2 et des prestations de complément terrestre des marchés de gros des prestations de segment interurbain interterritorial sur lesquels elle exerce une influence significative conformément à l'article 5.

Obligation de transparence

Article 8

France Télécom est soumise à une obligation de transparence sur l'ensemble des prestations d'accès relatives au marché pertinent défini à l'article 2, y compris sur les prestations qui leur sont associées, et sur l'ensemble des prestations de complément terrestre des marchés de gros des prestations de segment interurbain interterritorial sur lesquels elle exerce une influence significative conformément à l'article 5.
A ce titre, France Télécom informe l'Autorité notamment de la signature de toute nouvelle convention d'accès et d'interconnexion pour laquelle elle est partie, ou de tout avenant à une telle convention, dans un délai de dix jours à compter de la signature du document.
France Télécom communique, notamment aux opérateurs ayant signé avec elle une convention d'accès et d'interconnexion ou négociant avec elle la signature d'une telle convention, ainsi qu'à l'Autorité, des informations sur les caractéristiques de son réseau. Les modalités de publication de ces informations et le niveau de détail requis pourront être précisés par une décision ultérieure de l'Autorité, en tant que de besoin.
France Télécom informe, dans un délai de préavis raisonnable, défini pour les prestations inscrites à l'offre de référence en annexe A, les opérateurs bénéficiant d'une prestation d'interconnexion à son réseau et l'Autorité :
― des évolutions des conditions techniques et tarifaires de ses prestations d'interconnexion ;
― des évolutions d'architecture de son réseau, en cas d'évolution de nature à contraindre les opérateurs utilisant une des prestations d'interconnexion à modifier ou adapter leurs propres installations.
Ces informations font une fois par an l'objet d'une présentation par France Télécom au comité de l'interconnexion et de l'accès.
France Télécom transmet une fois par semestre pour information à l'Autorité ses offres génériques commercialisées par défaut sur les marchés de détail aval.

Indicateurs de qualité de service

Article 9

Au titre des obligations de transparence et de non-discrimination, France Télécom mesure et publie un ensemble d'indicateurs de qualité de service mensuels relatifs au marché pertinent défini à l'article 2 et aux prestations de complément terrestre des marchés de gros des prestations de segment interurbain interterritorial sur lesquels exerce une influence significative conformément à l'article 5. En tant que de besoin, cette obligation pourra être précisée par une décision complémentaire ultérieure.

Offre de référence « Services de capacité »

Article 10

France Télécom publie une offre technique et tarifaire d'accès et d'interconnexion relative au marché pertinent défini à l'article 2 et aux prestations de complément terrestre des marchés de gros des prestations de segment interurbain interterritorial sur lesquels elle exerce une influence significative conformément à l'article 5. Cette offre comporte une partie sur les offres de liaisons louées partielles terminales normalisées par l'ETSI, une partie sur les offres de liaisons louées partielles terminales à interfaces alternatives (dont Ethernet), une partie sur les prestations de complément terrestre ainsi qu'une partie sur les offres de colocalisation et de raccordement distant associées à ces prestations.
Cette offre décrit l'ensemble de ces prestations et leurs modalités de façon détaillée en précisant au minimum les éléments listés en annexe à la présente décision.
Cette offre doit notamment inclure un engagement de niveau de qualité de service et un mécanisme incitatif à son respect, qui n'induise pas de contraintes excessives sur les opérateurs clients de l'offre de France Télécom.

Article 12

France Télécom transmet à l'Autorité les conventions d'accès relatives au marché pertinent défini à l'article 2 et aux prestations de complément terrestre des marchés de gros des prestations de segment interurbain interterritorial sur lesquels elle exerce une influence significative conformément à l'article 5, ainsi que les avenants correspondants, dans les dix jours suivant leur conclusion.

Contrôle des tarifs

Article 13

France Télécom pratique des tarifs reflétant les coûts correspondants pour les prestations de débit inférieur à 10 Mbit/s incluses dans le marché de gros du segment terminal défini à l'article 2 et pour les prestations de complément terrestre des marchés de gros des prestations de segment interurbain interterritorial sur lesquels elle est réputée exercer une influence significative conformément à l'article 5.
France Télécom ne doit pas pratiquer de tarifs d'éviction pour les prestations de débit supérieur à 10 Mbit/s incluses dans le marché de gros du segment terminal défini à l'article 2.

Obligations comptables

Article 14

France Télécom est soumise à une obligation de séparation comptable et à une obligation de comptabilisation des coûts de l'ensemble des prestations d'accès et d'interconnexion relatives au marché pertinent défini à l'article 2. France Télécom est soumise à une obligation de comptabilisation des coûts de l'ensemble des prestations de complément terrestre des marchés de gros des prestations de segment interurbain interterritorial sur lesquels elle exerce une influence significative conformément à l'article 5. En tant que de besoin, ces obligations feront l'objet d'une décision complémentaire ultérieure.
Pour chaque offre sur mesure constituée pour tout ou partie en aval du marché pertinent défini à l'article 2, France Télécom établit et tient à disposition de l'Autorité un protocole de cession interne indiquant les offres disponibles sur les marchés de gros utilisées afin d'élaborer l'offre sur mesure correspondante.
En particulier, France Télécom transmet chaque trimestre, pour chaque contrat d'un montant total, évalué en intégrant notamment la partie liée au réseau et la partie prestation de services, supérieur à 100 000 € HT ayant été signé au cours du trimestre précédent et intégrant une offre sur mesure proposée en aval du marché de gros du segment terminal, un descriptif technique et tarifaire de l'offre sur mesure et de la manière dont elle est constituée à partir des offres disponibles sur le marché de gros ainsi que le protocole de cession interne correspondant à cette offre.
L'ensemble des protocoles correspondant aux offres sur mesure proposées par France Télécom sur le marché de détail, indépendamment de leur montant, est agrégé et fait l'objet d'une restitution comptable dans le cadre des restitutions annuelles pour le compte de détail de services de capacité situé en aval du marché de gros régulé du segment terminal, au titre de la séparation comptable.

Mise en application

Article 15

La présente décision s'applique à compter de sa notification à France Télécom et pour une durée de trois ans à compter du jour de sa publication au Journal officiel de la République française, sans préjudice d'un éventuel réexamen anticipé dans les conditions fixées par les dispositions de l'article D. 301 à D. 303 du code des postes et des communications électroniques.
S'agissant de l'obligation de proposer une offre technique et tarifaire détaillée d'accès au titre de l'article 10 de la présente décision, France Télécom devra publier cette offre au plus tard un mois après l'entrée en vigueur de la présente analyse de marché.

Article 16

Le directeur général de l'Autorité est chargé de l'application de la présente décision. Il notifiera à France Télécom cette décision et son annexe, qui seront publiées au Journal officiel de la République française.

Fait à Paris, le 8 avril 2010.

Le président,

J.-L. Silicani