JORF n°15 du 19 janvier 2005

Arrêté du 4 janvier 2005

Le ministre des solidarités, de la santé et de la famille, le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et de la ruralité, le ministre de l'écologie et du développement durable et le ministre des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat, des professions libérales et de la consommation,

Vu le code de la santé publique, et notamment son article R. 5167 ;

Vu le code rural, et notamment ses articles L. 251-3 à L. 254-2 ;

Vu le code de l'environnement, et notamment le titre IV du livre V et les articles L. 411-1, L. 411-2 et R. 211-15 ;

Vu le décret n° 2002-540 du 18 avril 2002 relatif à la classification des déchets dangereux ;

Vu l'arrêté du 31 juillet 2000 établissant la liste des organismes nuisibles aux végétaux, produits végétaux et autres objets soumis à des mesures de lutte obligatoire ;

Vu l'avis de la commission des produits antiparasitaires en date du 25 juin 2004 ;

Vu l'avis du Conseil national de la protection de la nature en date du 27 octobre 2004 ;

Vu l'avis de la commission d'étude de la toxicité des produits antiparasitaires et des produits assimilés, des matières fertilisantes et des supports de culture en date du 10 novembre 2004 ;

Vu l'avis de la section spécialisée compétente de l'assemblée permanente des chambres d'agriculture en date du 25 octobre 2004,

Article 1

Lorsque, en application de l'article L. 251-3 du code rural, une lutte est conduite pour maîtriser les populations de campagnols terrestres (Arvicola terrestris), elle doit être fondée sur la surveillance de ces populations et sur des méthodes pouvant être combinées entre elles, en particulier des méthodes préventives, comme la modification des pratiques agricoles, sur le piégeage ou sur des mesures favorisant la prédation. Dans ce cadre et sans préjudice des autres moyens de destruction, des préparations contenant de la bromadiolone peuvent être utilisées dans les conditions fixées ci-après.

Article 2

L'utilisation de produits visés à l'article L. 253-1 du code rural, en particulier d'appâts additionnés de bromadiolone, ou d'appâts prêts à l'emploi à base de bromadiolone, est autorisée pour lutter contre le campagnol terrestre, uniquement dans le cadre d'une lutte telle que prévue à l'article 1er du présent arrêté, dont l'exécution est confiée aux groupements de défense contre les organismes nuisibles et à leurs fédérations agréés conformément aux articles L. 252-1 à L. 252-5 du code rural, sous le contrôle de la direction régionale de l'agriculture et de la forêt, service régional de la protection des végétaux.

Article 3

I. - Dans le cadre des luttes contre le campagnol terrestre prévues par l'article L. 251-3 du code rural, les produits visés à l'article L. 253-1 de ce code ne peuvent être délivrés qu'aux groupements de défense contre les organismes nuisibles et à leurs fédérations et aux organismes ou entreprises de dératisation agréés au titre des articles L. 254-1 à L. 254-2 du code rural. Ces produits ne peuvent être utilisés que par ces groupements, fédérations, organismes ou entreprises. Ils doivent avoir été régulièrement autorisés au titre des articles L. 253-1 à L. 253-17 du code rural et leurs conditions d'utilisation prévues par les autorisations doivent être strictement respectées.

Sans préjudice des dispositions réglementaires relatives à l'étiquetage, les produits visés à l'article L. 253-1 du code rural mentionnés dans le présent arrêté doivent être contenus dans des emballages portant la mention : "Réservé aux groupements de défense contre les organismes nuisibles et aux professionnels de la dératisation agréés" en caractères très apparents.

II. - Les préparations contenant de la bromadiolone et destinées à la lutte contre le campagnol terrestre peuvent se présenter sous forme de concentrats ou d'appâts prêts à l'emploi.

Les appâts se présentent sous forme :

- d'appâts humides préparés conformément à l'article 4 du présent arrêté et dosés à 0,01 % de bromadiolone colorée en rouge appliquée sous forme liquide sur des morceaux de carottes à l'état frais dont la grosseur est environ d'un centimètre cube ;

- d'appâts secs prêts à l'emploi colorés en bleu dosant 0,005 % de bromadiolone ;

- d'appâts secs préparés conformément à l'article 4 du présent arrêté et dosés à 0,005 % de bromadiolone colorée en bleu appliquée sous forme liquide sur du blé tendre.

Article 4

Les appâts, secs ou humides, sont préparés, pour chaque campagne d'empoisonnement dans le cadre d'une centrale de fabrication à l'échelle du département ou de la région, par au moins une personne ayant suivi une formation spécifique. Les lieux de préparation font l'objet d'une communication préalable obligatoire au moins 48 heures avant le début de chaque opération de préparation d'appâts à la direction régionale de l'agriculture et de la forêt, service régional de la protection des végétaux.

Article 5

Au moins 72 heures avant les campagnes de traitement, le président du groupement de défense contre les organismes nuisibles, informé le cas échéant au préalable par l'organisme ou l'entreprise de dératisation agréé, envoie un avis de traitement aux maires des communes concernées, ainsi qu'à la direction régionale de l'agriculture et de la forêt, service régional de la protection des végétaux, et à la direction régionale de l'environnement, aux présidents des associations communales de chasse agréées concernées et aux deux interlocuteurs techniques départementaux du réseau SAGIR (Office national de la chasse et de la faune sauvage, fédération départementale des chasseurs).

Cet avis est soit directement affiché par les mairies concernées, soit repris dans un arrêté municipal. Il est porté à la connaissance des habitants au moins 48 heures avant le début des opérations. Il doit comporter les dates de début et de fin des opérations de traitement, les précautions à prendre pour le transport et la pose des appâts. Ces dates de traitement doivent respecter le délai défini au point 5 de l'annexe du présent arrêté.

Article 6

Les appâts doivent être introduits sous terre soit déposés directement à l'aide d'une canne - sonde dans les galeries de campagnols terrestres, soit introduits à plus de douze centimètres de profondeur dans des galeries creusées lors du traitement à l'aide d'une charrue - taupe à soc creux. En aucun cas les appâts ne doivent être déposés sur le sol. Les opérations de lutte doivent avoir lieu de jour uniquement et sur sols non gelés.

Lors des traitements à la charrue, le débit de celle-ci à l'étalonnage ne doit pas excéder :

20 kg à l'hectare, soit 1 kg de blé pour 100 mètres de raie ;

40 kg à l'hectare, soit 2 kg de carottes pour 100 mètres de raie.

Lors des traitements avec une charrue, les appâts sont déposés dans les portions de galeries croisant celles des campagnols terrestres, uniquement dans les sols permettant la réalisation de ces galeries. Ces galeries doivent être refermées afin que les appâts ne soient pas accessibles de l'extérieur.

Lors des traitements avec une canne-sonde, 2 à 3 points par unité de 20 m2 sont traités, avec un dépôt d'environ 30 g de blé, ou 60 g de carotte par point. Les appâts ne doivent pas être accessibles de l'extérieur.

Article 7

I. - La direction régionale de l'agriculture et de la forêt, service régional de la protection des végétaux, en collaboration avec les organisations professionnelles agricoles, met en oeuvre un réseau d'observation sur les campagnols terrestres et diffuse des messages d'avertissements agricoles sur l'évolution des populations de campagnols terrestres et sur les méthodes de lutte, préconisant notamment l'attitude à tenir en matière de lutte raisonnée.

II. - Le préfet de région peut mettre en place un groupe régional d'experts chargé de donner des avis sur la lutte mise en oeuvre contre le campagnol terrestre. Sa création est obligatoire pour mettre en oeuvre la procédure dérogatoire prévue au point 4 de l'annexe du présent arrêté. L'animation de ce groupe est confiée à la direction régionale de l'agriculture et de la forêt et à la direction régionale de l'environnement.

III. - Les traitements à la bromadiolone sont autorisés tant que le niveau de densité relative de campagnols terrestres ne dépasse pas le seuil défini à l'annexe du présent arrêté. Ces traitements doivent être réalisés le plus tôt possible, dès que les premiers indices de présence de campagnol terrestre apparaissent et que les conditions techniques de réalisation le permettent.

Article 8

Un arrêté préfectoral pris en application de l'article 4 de l'arrêté du 31 juillet 2000 susvisé peut notamment :

- définir l'organisation de la lutte dans le département ;

- définir des zones d'encadrement des agriculteurs et de soutien technique en leur faveur, dans le but d'aider à y promouvoir la précocité des luttes contre les campagnols terrestres lorsqu'ils n'y sont présents qu'à de très basses densités ;

- définir des zones d'interdiction d'emploi de la bromadiolone ;

- préciser les modalités d'information de la population.

Article 9

Le port de gants étanches est obligatoire pendant toute la durée des opérations de préparation et de manipulation des appâts, de destruction des emballages les ayant contenus, de nettoyage des récipients et autres matériels utilisés, et de ramassage et de destruction des animaux empoisonnés.

Article 10

I. - La bromadiolone et les appâts non utilisés, les emballages ayant été en contact avec la bromadiolone ainsi que les eaux de rinçage doivent être éliminés conformément aux dispositions du titre IV du livre V du code de l'environnement.

II. - Les autres récipients ayant été en contact avec la bromadiolone doivent être soigneusement nettoyés et en aucun cas ne doivent être utilisés pour transporter ou détenir des denrées destinées à l'alimentation humaine ou animale.

III. - Toute parcelle traitée doit être surveillée par l'agriculteur :

- pendant la réalisation du traitement, de manière à s'assurer que les appâts sont correctement enfouis ;

- tout au long des trois semaines suivantes, de façon à procéder dans toute la mesure du possible au ramassage des animaux empoisonnés.

Article 11

Les groupements de défense contre les organismes nuisibles et leurs fédérations, les organismes et entreprises de dératisation agréés doivent assurer la traçabilité des produits visés à l'article L. 253-1 du code rural utilisés dans le cadre de la lutte contre le campagnol terrestre. En particulier, dans le cadre de la lutte avec des produits à base de bromadiolone, doit être tenu à disposition des agents chargés du contrôle mentionnés à l'article L. 253-14 du code rural un registre comportant au moins les informations datées suivantes :

- pour chaque centrale de fabrication : les quantités de concentrat reçues, les quantités d'appâts fabriquées et livrées, avec indication du destinataire ;

- pour chaque destinataire : les quantités d'appâts reçues, les quantités d'appâts utilisées, avec indication du lieu de traitement et de l'exploitant concerné.

Article 12

Les dispositions du présent arrêté sont applicables jusqu'au 31 janvier 2007.

Article 13

La directrice générale de l'alimentation, le directeur général de la santé, le directeur de la prévention des pollutions et des risques, le directeur de la nature et des paysages, le directeur général de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent arrêté, qui sera publié au Journal officiel de la République française.

Le ministre de l'agriculture, de l'alimentation de la pêche et de la ruralité,

Pour le ministre et par délégation :

La directrice générale de l'alimentation,

S. Villers.

Le ministre des solidarités, de la santé et de la famille,

Pour le ministre et par délégation :

Par empêchement du directeur général de la santé :

Le chef de service,

Y. Coquin.

Le ministre de l'écologie et du développement durable,

Pour le ministre et par délégation :

La directrice du cabinet,

M.-C. Daveu.

Le ministre des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat, des professions libérales et de la consommation,

Pour le ministre et par délégation :

Le directeur général de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes,

G. Cerutti.