Monsieur le Président de la République,
La loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie prévoit dans son article 21-III qu'un certain nombre de compétences parmi lesquelles figurent au 4° « le droit civil, les règles concernant l'état civil et le droit commercial » seront transférées dans les conditions de l'article 26 de cette même loi.
En application de cet article, la loi de pays n° 2012-2 du 20 janvier 2012 relative au transfert à la Nouvelle-Calédonie des compétences de l'Etat en matière de droit civil, des règles concernant l'état civil et du droit commercial prévoit que le transfert des compétences précitées prend effet au 1er juillet 2013 sous réserve notamment de l'adoption d'un arrêté du gouvernement constatant la réalisation des extensions des textes législatifs et réglementaires demandées par la Nouvelle-Calédonie. Si ces conditions ne sont pas remplies le 1er juillet 2013, le transfert prend effet le premier jour du quatrième mois qui suit leur réalisation et au plus tard le 14 mai 2014.
Parmi les vœux exprimés par la Nouvelle-Calédonie figurent les demandes d'extension des dispositions du code civil relatives à la publicité foncière, du code civil et du code de la construction et de l'habitation en matière de vente en l'état futur d'achèvement, des dispositions nécessaires à l'actualisation de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 tendant à l'amélioration de la situation des victimes d'accidents de la circulation et à l'accélération des procédures d'indemnisation, des dispositions du code de la consommation relatives aux clauses abusives ainsi que celles de la loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990 relative à l'exercice sous forme de sociétés des professions libérales soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé et aux sociétés de participations financières des professions libérales. A l'occasion du dernier comité des signataires de l'accord de Nouméa, a été pris l'engagement de procéder à ces extensions en vue d'un transfert de compétences au 1er juillet 2013.
Cette ordonnance est fondée sur l'article 74-1 de la Constitution, qui autorise le Gouvernement à étendre par voie d'ordonnances, avec les adaptations nécessaires, dans les collectivités d'outre-mer et en Nouvelle-Calédonie, dans les matières qui demeurent de la compétence de l'Etat, les dispositions de nature législative en vigueur en métropole ou à adapter les dispositions de nature législative en vigueur à l'organisation particulière de la collectivité concernée.
Sur le fondement de cette habilitation et pour répondre aux vœux ci-dessus exprimés par la Nouvelle-Calédonie, le chapitre Ier du présent projet d'ordonnance se propose d'étendre et d'adapter certaines dispositions du code civil.
L'article 1er étend plusieurs dispositions du code civil dans leur version en vigueur à la date de publication de la présente ordonnance en Nouvelle-Calédonie.
Il s'agit des dispositions relatives aux distances de plantations (articles 671 et 672), aux clauses pénales (articles 1152 et 1231), à la vente de l'immeuble à construire (articles 1601-1 à 1601-4, 1642-1, 1648 et 2380) et à la publicité foncière (articles 2431, 2477 et 2487).
Les articles 2, 3 et 13 adaptent la rédaction de plusieurs dispositions du code civil et abrogent des articles de la loi du 21 ventôse an VII afin que le régime de la publicité foncière en Nouvelle-Calédonie soit le même que celui du territoire hexagonal, qui a vu notamment la suppression du conservateur des hypothèques (ordonnance n° 2010-638 du 10 juin 2010 portant suppression du régime des conservateurs des hypothèques). S'agissant de la substitution de la responsabilité de la Nouvelle-Calédonie à celle du conservateur des hypothèques néocalédonien, il n'y est pas procédé dans le cadre de la présente ordonnance puisque, conformément à l'avis du Conseil d'Etat n° 387-022 du 16 octobre 2012, c'est la loi de pays n° 2012-10 du 30 novembre 2012 instituant une contribution de sécurité immobilière qui y a procédé. Aussi, les dispositions de l'article 2450 du code civil sont adaptées en conséquence. Le projet actualise également la rédaction d'un grand nombre d'articles pour tenir compte des réformes intervenues dans le territoire hexagonal et procède à certaines adaptations (notamment des articles 2426 et 2450 du code civil tenant au fait que les deux décrets de 1955 relatifs à la publicité foncière ne sont pas applicables dans ce territoire mais seulement le senatus consulte du 7 juillet 1856 sur la trancription hypothécaire).
Le chapitre II étend à la Nouvelle-Calédonie, dans le prolongement de l'article 1er, le régime juridique applicable au dispositif de la garantie d'achèvement inhérent aux ventes des immeubles à construire et adapte en conséquence les dispositions du code de la construction et de l'habitation en supprimant notamment des renvois à des dispositions non applicables sur ce territoire.
Le chapitre III modifie l'ordonnance n° 92-1146 du 12 octobre 1992 portant extension et adaptation dans les territoires de la Nouvelle-Calédonie, de la Polynésie française et des îles Wallis et Futuna de certaines dispositions de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 tendant à l'amélioration de la situation des victimes d'accidents de la circulation et à l'accélération des procédures d'indemnisation.
Les articles 5 à 9 visent à rendre applicables en Nouvelle-Calédonie et dans les îles Wallis et Futuna plusieurs dispositions de la loi du 5 juillet 1985 précitée.
En effet, les dispositions du chapitre II de l'ordonnance n° 92-1146 du 12 octobre 1992 portant extension et adaptation dans les territoires de la Nouvelle-Calédonie, de la Polynésie française et des îles Wallis et Futuna de certaines dispositions de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 précitée limitent l'application des articles 28 à 34 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 relatifs aux recours des tiers payeurs aux dommages occasionnés par un accident de la circulation, alors que ces dispositions sont applicables dans l'Hexagone quelle que soit la nature de l'événement ayant occasionné le dommage.
De même, l'importante réforme de l'article 31 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985, prévoyant des modalités de recours des tiers payeurs plus favorables aux victimes, issue de la loi n° 2006-1640 du 21 décembre 2006 de financement de la sécurité sociale pour 2007, n'est pas applicable à la Nouvelle-Calédonie et aux îles Wallis et Futuna, de sorte qu'y sont toujours en vigueur les modalités de recours antérieures.
Par ailleurs, l'article 7 de l'ordonnance du 12 octobre 1992 a également limité l'application des dispositions de l'article 1153-1 du code civil, modifié par l'article 37 de la loi du 5 juillet 1985 et relatif au taux d'intérêt légal applicable aux condamnations à une indemnité, aux seuls accidents de la circulation. De plus, l'ordonnance se réfère sur ce point aux articles 2270-1 et 2244 du code civil, alors que la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription civile a depuis abrogé le premier et modifié le second, ces modifications ayant d'ailleurs été rendues applicables à la Nouvelle-Calédonie et dans les îles Wallis et Futuna.
Enfin, l'article 8 de l'ordonnance du 12 octobre 1992 limite l'application de l'article 44 de la loi du 5 juillet 1985, relatif à la capitalisation des rentes, à l'indemnisation des seuls accidents de la circulation à la différence, là encore, de l'Hexagone, où l'article 44 est applicable quelle que soit la nature de l'événement ayant occasionné le dommage.
Ainsi, au regard de l'évolution des exigences locales et des réformes législatives intervenues depuis l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 12 octobre 1992, la présente ordonnance a vocation à harmoniser les dispositions applicables, d'une part, dans l'Hexagone et, d'autre part, en Nouvelle-Calédonie et dans les îles Wallis et Futuna chaque fois qu'il n'apparaît plus justifié de maintenir des dispositions spécifiques. Cette harmonisation concerne également le dispositif relatif aux actions en réparation civile de l'Etat et de certaines autres personnes publiques.
A cet égard, il convient de rappeler que le 4° du III de l'article 21 de la loi organique du 19 mars 1999 précitée prévoit que l'Etat est compétent pour légiférer en matière de droit civil jusqu'au transfert de cette compétence à la Nouvelle-Calédonie dans les conditions prévues à l'article 26 de ce texte.
De même, s'agissant des îles Wallis et Futuna, l'article 40 du décret n° 57-811 du 22 juillet 1957 relatif aux attributions de l'assemblée territoriale, du conseil territorial et de l'administrateur supérieur des îles Wallis et Futuna donne compétence à l'Etat pour légiférer en matière de droit civil.
L'Etat est donc compétent pour procéder à l'extension des dispositions de l'ordonnance du 12 octobre 1992, dont l'objet se rattache au droit civil en ce que celles-ci sont toutes relatives aux règles applicables à la réparation du dommage subi par la victime, en Nouvelle-Calédonie et dans les îles Wallis et Futuna.
En revanche, il résulte de l'article 13 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française que ce territoire est compétent en matière d'assurance, de protection sociale et de droit des obligations (l'expression « droits civils » faisant référence au seul titre Ier du livre Ier du code civil). C'est pourquoi la présente ordonnance ne modifie pas l'ordonnance du 12 octobre 1992 s'agissant des règles applicables à ce territoire.
Ainsi, les articles 5 et 6 du projet d'ordonnance divisent le chapitre II de l'ordonnance du 12 octobre 1992 en deux sous-sections, afin de maintenir applicables en Polynésie française les dispositions actuelles, l'article 7 créant une nouvelle sous-section étendant à la Nouvelle-Calédonie et aux îles Wallis et Futuna les règles relatives aux tiers payeurs de la loi du 5 juillet 1985. L'article 8 rend applicable l'article 1153-1 du code civil en Nouvelle-Calédonie et dans les îles Wallis et Futuna et supprime la référence aux articles 2270-1 et 2244 du code civil « tel que [celui-ci] résulte de l'article 37 de la loi du 5 juillet 1985 ». Enfin, l'article 9 étend l'application des dispositions de l'article 44 de la loi du 5 juillet 1985 en Nouvelle-Calédonie et dans les îles Wallis et Futuna.
Ensuite, le chapitre IV de l'ordonnance étend à la Nouvelle-Calédonie les dispositions nécessaires à l'actualisation de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, et ce conformément au vœu exprimé par la Nouvelle-Calédonie. L'ordonnance actualise la rédaction d'un grand nombre d'articles pour tenir compte des réformes intervenues sur le territoire hexagonal et adapte notamment les articles 25 et 26 de la loi du 10 juillet 1965 pour écarter certaines dispositions non applicables ou sans objet en Nouvelle-Calédonie.
L'article 10 crée à cette fin un article 47-1 qui rend applicable à la Nouvelle-Calédonie la loi du 10 juillet 1965, à l'exception des articles 24-2, 24-4, 24-6, 26-3, 46-1 et 47, en y ajoutant des dispositions particulières qui définissent les conditions d'application de cette législation.
La liste des dérogations nécessaires à l'application de ce dispositif en Nouvelle-Calédonie consiste en l'adaptation des dispositions suivantes :
― articles 6-1, 12 et 13, pour prendre en considération la non-application en Nouvelle-Calédonie du fichier immobilier au sens du décret du 24 janvier 1955 ;
― article 8-1, créé par la loi n° 2009-323 du 25 mars 2009 de mobilisation pour le logement et de lutte contre l'exclusion, relatif au droit de priorité des copropriétaires sur l'acquisition d'un lot de stationnement dans les immeubles dont le permis de construire a été délivré conformément à un plan local d'urbanisme, par le remplacement de la notion de « plan local d'urbanisme », inexistante en Nouvelle-Calédonie, par celle de « plan d'urbanisme directeur » ;
― article 9, modifié par la loi n° 2009-526 du 12 mai 2009 de simplification et de clarification du droit et d'allégement des procédures, relatif à la jouissance des parties privatives, avec la mise en cohérence de la non-extension des g et i à la Nouvelle-Calédonie, en raison notamment de la non-existence d'obligation de diagnostic énergétique sur le territoire ;
― article 10 relatif à la participation aux charges collectives, en ce qu'est prise en compte la date d'extension du dernier alinéa pour son entrée en vigueur en Nouvelle-Calédonie ;
― article 10-1 pour tenir compte de la non-application en Nouvelle-Calédonie du g de l'article 25 ;
― article 14-3, pour prendre en considération la non-application en Nouvelle-Calédonie de la loi n° 98-261 du 6 avril 1998 portant réforme de la réglementation comptable et adaptation du régime de la publicité foncière ;
― article 16-1 relatif à la répartition entre copropriétaires des sommes résultant de la cession de parties communes, en raison de la non-application à la Nouvelle-Calédonie des dispositions de l'article 12-3 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;
― article 18 sur les obligations du syndic, pour tenir compte de la compétence de la Nouvelle-Calédonie en matière de professions réglementées ;
― article 25 pour prendre en considération la non-existence d'obligation de diagnostic énergétique sur le territoire, les compétences de la Nouvelle-Calédonie et des provinces en matière de normes de construction et d'habitation des logements, en matière de télécommunication ou encore de la non-application sur ce territoire des dispositions de l'article L. 126-1-1 du code de la construction et de l'habitation ;
― article 26, modifié par la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement, afin de mettre en cohérence la non-extension des g et i de l'article 25 précités et de prendre en considération la non-application en Nouvelle-Calédonie de la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains ;
― article 29 pour prendre en considération la compétence de la Nouvelle-Calédonie en matière de sociétés d'attribution ;
― articles 29-1 A, 29-1 B, 29-1 et 29-5 pour adapter aux spécificités locales l'information des autorités compétentes en cas de copropriété en difficulté ;
― article 35 pour prendre en considération les compétences locales de la Nouvelle-Calédonie en matière d'urbanisme, les dispositions de l'article L. 211-1 du code de l'urbanisme relatif au droit de préemption urbain n'ayant pas d'équivalence en Nouvelle-Calédonie ;
― article 41-1 pour prendre en considération la compétence locale en matière d'activité sociale et médico-sociale ;
― article 45-1 pour tenir compte de la non-application des dispositions de l'article L. 111-6-2 du code de la construction et de l'habitation, le diagnostic technique n'existant pas en Nouvelle-Calédonie ;
― articles 11, 17, 18-2, 19, 19-2, 20, 23, 29-1 A, 29-1 B, 29-1, 29-2, 29-4, 30, 34 et 42 en raison de l'organisation judiciaire du territoire.
Enfin, le chapitre V du présent projet d'ordonnance étend à la Nouvelle-Calédonie le titre IV de la loi du 31 décembre 1990 précitée relatif aux sociétés de participations financières de professions libérales qui ont pour objet la détention de parts ou d'actions de sociétés d'exercice libéral ainsi que la participation de tout groupement de droit étranger. Elles peuvent être constituées entre des personnes physiques ou morales qui exercent une ou plusieurs professions libérales soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé.
Tel est l'objet de la présente ordonnance que nous avons l'honneur de soumettre à votre approbation.
Veuillez agréer, Monsieur le Président, l'assurance de notre profond respect.
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