JORF n°0174 du 28 juillet 2012

Décision n°2012-0855 du 17 juillet 2012

L'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes,

Vu la directive 2002/20/CE du Parlement européen et du Conseil du 7 mars 2002 modifiée relative à l'autorisation de réseaux et de services de communications électroniques (directive « autorisation ») ;

Vu la directive 2002/21/CE du Parlement européen et du Conseil du 7 mars 2002 modifiée relative à un cadre réglementaire commun pour les réseaux et services de communications électroniques (directive « cadre ») ;

Vu la directive 2002/22/CE du Parlement européen et du Conseil du 7 mars 2002 modifiée concernant le service universel et les droits des utilisateurs au regard des réseaux et services de communications électroniques ;

Vu le code des postes et des communications électroniques, et notamment ses articles L. 36-7, L. 44 et R. 20-44-27 à R. 20-44-33 ;

Vu la décision n° 2005-1084 du 15 décembre 2005 approuvant les règles de gestion du plan national de numérotation ;

Vu la décision n° 2005-1085 du 15 décembre 2005 modifiée fixant l'utilisation des catégories de numéros du plan national de numérotation ;

Vu la décision n° 2009-0406 du 5 mai 2009 relative à l'ouverture de la tranche de numéros commençant par 07 ;

Vu la consultation publique de l'Autorité sur le projet de décision relatif à la réorganisation des tranches de numéros commençant par 06 et 07, lancée le 25 avril 2012 et clôturée le 23 mai 2012 ;

La commission consultative des communications électroniques ayant été consultée le 22 juin 2012 ;

Après en avoir délibéré le 17 juillet 2012,

Cadre réglementaire

Les compétences de l'Autorité sont prévues par les dispositions des articles L. 36-7 et L. 44 du code des postes et des communications électroniques (ci-après « CPCE »).
L'article L. 36-7 (7°) du CPCE dispose que l'Autorité « établit le plan national de numérotation téléphonique, attribue aux opérateurs les ressources en numérotation nécessaires à leur activité dans les conditions prévues à l'article L. 44 et veille à leur bonne utilisation ; (...) ».
Le I de l'article L. 44 du même code prévoit que « Le plan national de numérotation téléphonique est établi par l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes et géré sous son contrôle. Il garantit un accès égal et simple des utilisateurs aux différents réseaux et services de communications électroniques et l'équivalence des formats de numérotation. Il permet, sous réserve de faisabilité technique et économique, aux utilisateurs situés dans d'autres Etats membres de l'Union européenne d'accéder aux numéros non géographiques accessibles sur l'ensemble du territoire national. (...). »

Bilan de la ressource mobile
Le bilan du plan de numérotation mobile fait ressortir une disponibilité
d'uniquement 24 millions de numéros pour la métropole

Le plan de numérotation mobile est constitué de 150 millions de numéros (en Z = 6 et ZA = 75, 76, 77, 78 et 79). Cette ressource est utilisée pour l'attribution de numéros affectés aux utilisateurs finals, de préfixes de portabilité (ZAB = 600) et de codes techniques (ZAB = 653/654/655). Elle est partagée de manière à répondre aux besoins de la métropole et des départements d'outre-mer. Sur ces 150 millions de numéros, 112 millions ont déjà été attribués. Il reste ainsi, à fin mars 2012, un total de 38 millions de numéros disponibles, dont seulement 24 millions pour la métropole.
Il existe par ailleurs une réserve non ouverte de 50 millions de numéros dans la tranche Z = 7 (ZA = 70, 71, 72, 73, 74), dont les modalités d'utilisation ne sont à ce jour pas définies dans le plan national de numérotation.

Tableau 1. ― Bilan de la ressource en numérotation mobile à fin T1 2012

| DESCRIPTION À FIN T1 2012 | QUANTITÉ (EN MILLIONS) | |------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------|------------------------------------------------------------| |Plan de numérotation mobile :
dont numéros dédiés pour attribution en métropole
dont numéros dédiés pour attribution dans les DOM
dont espace dédié aux codes techniques (ZAB = 653/654/655)
dont espace dédié aux préfixes de portabilité (ZAB = 600)|150 :
128
18 (dont réserve 12 M)
3
1| | Numéros attribués :
dont numéros attribués en métropole
dont numéros attribués dans les DOM
dont codes techniques (ZAB = 653/654/655)
dont préfixes de portabilités (ZAB = 600) | 112 :
104
4
3
1 | | Numéros disponibles à l'attribution :
dont numéros disponibles en métropole
dont numéros disponibles dans les DOM | 38 :
24
14 (dont réserve 12 M) |

Tableau 2. ― Bilan de la ressource en numérotation mobile
dans les départements d'outre-mer à fin T4 2011

| | DÉDIÉS |ATTRIBUÉS|DISPONIBLES| |----------|---------|---------|-----------| |Guadeloupe|1 000 000| 950 000 | 50 000 | | Guyane |1 000 000| 460 000 | 540 000 | |Martinique|1 000 000| 850 000 | 150 000 | | Mayotte |1 000 000| 370 000 | 630 000 | |La Réunion|2 000 000|1 310 000| 690 000 |

Les départements de la Guadeloupe et de la Martinique ont respectivement consommé 95 % et 85 % du nombre de numéros qui leur étaient dédiés.

Le maintien du rythme actuel des attributions
présage une saturation des numéros mobiles entre 2016 et 2023

L'Autorité a attribué, en moyenne, sur les cinq dernières années, 7 millions de numéros mobiles par an pour les besoins des utilisateurs finals (hors préfixes de portabilité, de codes techniques, etc.). Sur les deux dernières années (2010-2011), cette moyenne dépasse les 9 millions de numéros. L'année 2012 semble poursuivre cette seconde tendance puisqu'à fin mars, 3 millions de numéros ont déjà été attribués.

Figure 1. ― Synthèse des attributions annuelles de numéros mobiles depuis 2007

Vous pouvez consulter le tableau dans le
JOn° 174 du 28/07/2012 texte numéro 85

L'augmentation significative du nombre de numéros attribués à partir de 2010 s'explique notamment par le développement des opérateurs mobiles virtuels (MVNO) ainsi que par le début du développement des nouveaux usages, dont les communications M2M (voir plus loin).
Si cette tendance se poursuit à un tel rythme, le plan de numérotation mobile métropolitain sera saturé d'ici quatre ans à onze ans selon le rythme d'utilisation de la réserve de 50 millions de numéros.
Une solution durable doit donc être déterminée et mise en œuvre rapidement si l'on souhaite éviter que la saturation du plan de numérotation mobile ne conduise à une augmentation généralisée de la taille des numéros de plan de numérotation français, comme ce fut le cas le 18 octobre 1996 pour le passage de huit chiffres à dix chiffres de tous les numéros de téléphone, ce qui impliquerait au minimum une renumérotation de plus de 60 millions de lignes de téléphonie mobile.
Les résultats des travaux européens et français considèrent le développement des communications M2M et terminaux connectés à l'internet comme un facteur aggravant la saturation du plan de numérotation mobile

Au niveau européen

Un rapport (1) fondé sur différents scénarios de développement du marché M2M établi entre 2008 et 2010 par le groupe de travail Naming and Numbering de la Conférence européenne des postes et des télécommunications (CEPT), auquel a activement participé l'Autorité, met en évidence un risque sérieux de saturation en 2020 du plan de numérotation mobile dans plusieurs marchés en Europe, dont la France, le Danemark, les Pays-Bas, l'Espagne et la Suède. De nombreux pays européens ont lancé des travaux de réflexion sur les évolutions à apporter à leur plan de numérotation et ont pris la décision d'ouvrir une tranche de numéros de longueur étendue pour les communications M2M.

(1) Rapport n° 153 de l'ECC Numbering and Addressing in Machine-to-Machine (M2M) Communications de novembre 2010.

Tableau 3. ― Synthèse des décisions adoptées en Europe relatives
à l'allocation de ressources en numérotation pour les communications M2M

| | SOLUTION RETENUE |DATE DE DÉCISION|DÉLAI DE MISE EN ŒUVRE| |--------|-----------------------------|----------------|----------------------| | Suède |Tranche étendue à 13 chiffres| Février 2005 | Immédiat | |Pays-Bas|Tranche étendue à 13 chiffres| Décembre 2011 | 15 mois | |Norvège |Tranche étendue à 12 chiffres| 2009 | 24 mois | |Danemark|Tranche étendue à 12 chiffres| Mai 2011 | 24 mois | |Espagne |Tranche étendue à 13 chiffres| Avril 2010 | 24 mois |

Au niveau national

A la suite des résultats des travaux de la CEPT, l'Autorité a engagé, dès l'été 2010, des échanges avec les principaux acteurs (opérateurs, intégrateurs, clients) du M2M afin de mieux appréhender ce marché, de comprendre les implications d'un tel développement sur les ressources du plan de numérotation et, en particulier, d'évaluer la capacité du plan à répondre aux futurs besoins de communications (téléphonie, M2M, accès à l'internet pour terminaux connectés, tablettes et clés 3G,...).
En complément, une étude externe réalisée pour l'Autorité par l'IDATE en 2011 a permis d'affiner les prévisions sur le marché français et de confirmer le risque de saturation entre 2016 et 2023 de la ressource en numérotation mobile. L'objet de l'étude était double :
― d'une part, comprendre le marché des communications M2M et ses besoins en termes d'offres, de connectivité, de volumétries, de numéros ;
― d'autre part, évaluer les solutions envisageables permettant de palier le risque de saturation.
Cette étude a identifié, outre une très forte croissance du marché des communications M2M, une forte croissance du marché de l'accès à l'internet mobile pour les terminaux connectés.

Présentation du marché des communications M2M

Le développement des usages de l'internet et des réseaux de télécommunications, notamment cellulaires, va désormais bien au-delà des usages traditionnels (voix/SMS) de la téléphonie mobile et favorise le développement des communications dites « data » ou d'échanges de données. Ces communications permettent à des équipements industriels tels que des compteurs électriques ou des distributeurs automatiques d'être reliés en permanence au système d'information de l'entreprise qui les exploite. On parle dans ce cas de communications « machine à machine » ou « M2M ».

Définition des communications M2M

Les communications « machine à machine » ou « M2M » consistent en la mise en relation de machines ou d'objets intelligents, ou entre un objet intelligent et une personne, avec un système d'information via des réseaux de communications mobiles généralement sans intervention humaine.
Dans le cadre de ces applications, ce n'est pas tant une solution de communication qui est recherchée mais une solution à un ou plusieurs besoins fonctionnels spécifiques prédéfinis. Par exemple, dans le cadre de la télérelève de compteurs, il s'agit de connaître la consommation mesurée par ledit compteur.

Fonctionnement du M2M et segments de marché

L'architecture d'une solution M2M repose essentiellement sur la mise en place de la machine dont on souhaite obtenir ou vers laquelle on souhaite envoyer des informations, de son module qui contient la carte SIM, du réseau de communications qui permet d'assurer le transport des données et du système d'information qui les traite. Cette solution est mise en œuvre via un ou plusieurs acteurs comme l'opérateur de communications électroniques, le fabricant de modules et l'intégrateur de services.
Les applications M2M touchent de nombreux marchés de masse tels que l'énergie (télérelève de compteurs, gestion de la production, etc.), le transport (logistique, gestion de flotte, écotaxe, système d'urgence, transport intelligent, etc.), l'électronique grand public (avertisseurs de radars, livres numériques, consoles portables connectées, etc.), l'industrie (gestion et maintenance des équipements et bâtiments), la sécurité (vidéosurveillance et alarme), le commerce (terminaux de paiement) et à l'avenir potentiellement celui de la santé (suivi de patients, pacemakers connectés, etc.).

Au regard des besoins fonctionnels des communications M2M,
il est légitime de privilégier l'usage du réseau mobile comme technologie d'accès

Les besoins fonctionnels des applications M2M varient en fonction des applications métiers et impliquent par conséquent des solutions relativement différentes et souvent sur mesure, toutefois le réseau mobile est la technologie d'accès privilégiée aussi bien pour les applications mobiles que pour de nombreuses applications fixes.
S'agissant des applications utilisées, par exemple, dans l'automobile et le transport, seul le réseau mobile permet de répondre aux besoins de connectivité permanente en situation de mobilité nationale, voire d'itinérance internationale.
S'agissant des applications fixes telles que celles utilisées pour gérer un parc d'imprimantes ou de photocopieurs, pour les terminaux de paiement ou bien encore pour des distributeurs de friandises, il y a, outre la question de facilité et de rapidité de déploiement de la solution mobile, un enjeu économique. En effet, le développement des technologies sans fil a permis d'envisager des applications auparavant impossibles à mettre en œuvre économiquement autant en raison du câblage trop couteux des machines que du coût de l'abonnement téléphonique.
L'utilisation des réseaux mobiles comme technologie d'accès pour les applications M2M est donc incontournable et est porteur de gains de productivité et de qualité de service pour les entreprises qui utiliseront ces applications.
De plus, les réseaux mobiles permettent d'utiliser tous les services de communications disponibles tels que la « data », la téléphonie, le SMS. Même si la transmission de données constitue la base de la communication M2M, la voix et le SMS peuvent être utilisés dans certains cas pour « réveiller » les machines en veille et ainsi optimiser leur autonomie.

Le marché du M2M représentait 3,5 millions de cartes SIM à fin 2011,
il pourrait être multiplié par près de 10 en 2020
Le marché actuel en volume

Bien qu'encore relativement restreint par rapport aux autres marchés des communications électroniques, le marché français des communications M2M connaît un développement rapide. Il représente d'ailleurs le segment des communications mobiles qui affiche le plus fort taux de croissance. En effet, d'après l'observatoire trimestriel des marchés de l'Autorité, le nombre de cartes SIM affectées à ce type de communications a connu une hausse d'environ 70 % en 2009 et en 2010. Cette tendance s'est ralentie en 2011 avec près de 3 354 000 cartes SIM M2M actives à fin 2011 (2), soit une hausse d'environ 28 % sur un an.
Les fortes volumétries observées sur ce marché s'expliquent par son caractère relativement récent mais également par le fait que les applications M2M sont souvent des applications de masse (gestion de flottes, télémétrie, etc.).

(2) Source : Observatoire des marchés des communications électroniques en France, services mobiles, quatrième trimestre 2011 (provisoires), tableau de bord métropole.

Les prévisions pour l'avenir

L'ensemble du secteur s'entend sur un potentiel très important et une croissance soutenue pour les années à venir.
L'OCDE, pour qui le M2M représente la pierre angulaire de « l'internet des objets », indique dans son rapport Machine-to-Machine Communications - Connecting Billion of Devices, publié en janvier 2012, un potentiel de milliards d'objets du quotidien connectés à travers le monde (voitures, appareils photos numériques, cadres photos numériques, livres numériques, réfrigérateurs, compteurs électriques, télévisions, etc.). Elle y évoque également un équipementier télécom qui estime, quant à lui, à 50 milliards le nombre d'objets connectés dans le monde d'ici à 2020.
L'IDATE, qui constate une croissance de ce marché depuis plus de cinq ans dans les pays les plus avancés en Europe sur un rythme de croisière d'à peu près 30 % par an en volume, confirme, dans l'étude réalisée pour l'Autorité en 2011, que cette tendance devrait se poursuivre pour les prochaines années. Pour le marché français, cela constitue une augmentation du parc actif M2M de 33,5 millions de cartes SIM actives (à mettre en regard des 24 millions de numéros actuellement disponibles en métropole) entre 2010 et 2020.
Les principaux segments de marché des applications M2M en termes de volume sont l'automobile, l'électronique grand public (ci-après EGP), le transport, la gestion de l'énergie et l'industrie.
A titre d'illustration, dans le domaine automobile, on peut mentionner le système d'appels d'urgence embarqué « eCall », promu par la Commission européenne, qui pourrait être mis en œuvre dès 2015 et impliquerait que 30 millions de véhicules soient équipés d'une carte SIM au niveau national, et plus de 200 millions au niveau européen. Par ailleurs, dans le domaine de l'énergie, la mise en place de certaines mesures, notamment législatives (3), relatives à l'information et de gestion de la production nécessitent le recours aux solutions M2M.
Le segment de l'EGP (systèmes GPS délivrant des informations sur le trafic et la météorologie, les avertisseurs de zones dangereuses, les livres et cadres photos numériques, les consoles de jeux connectées, etc.) qui, contrairement aux applications traditionnelles du M2M, est basé sur un mode de distribution au grand public intégré dans une offre globale sans facturation supplémentaire (par exemple, les avertisseurs de radars), atteint une massification significative beaucoup plus rapidement.

(3) Par exemple, l'article 4 de la loi du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité prévoit que « les gestionnaires des réseaux publics de transport et de distribution d'électricité mettent en œuvre des dispositifs permettant aux fournisseurs de proposer à leurs clients des prix différents suivant les périodes de l'année ou de la journée et incitant les utilisateurs des réseaux à limiter leur consommation pendant les périodes où la consommation de l'ensemble des consommateurs est la plus élevée ». Cela implique le déploiement de compteurs intelligents et l'intégration de cartes SIM au sein de concentrateurs (entre 700 000 et 1 million).

Tableau 4. ― Evolution du parc M2M
(en millions de cartes SIM)

Vous pouvez consulter le tableau dans le
JOn° 174 du 28/07/2012 texte numéro 85

D'autres applications sont également susceptibles de contribuer au développement du marché M2M, notamment dans le domaine de la santé (téléassistance, pacemakers connectés, bracelets Alzheimer, etc.) et de la maintenance des bâtiments et des équipements industriels.
Tous ces marchés de masse, considérés comme des relais de croissance majeurs pour les opérateurs de communications électroniques, stimulent les volumes de ventes de cartes SIM M2M, sont très consommateurs en ressources de numérotation et tendent à confirmer les estimations d'une forte croissance des besoins pour les années à venir.

Présentation du marché des terminaux connectés
et de l'accès à l'internet

Les terminaux connectés à l'internet (ci-après « terminaux connectés ») désignent, dans le cadre de cette décision, les équipements électroniques, généralement mobiles, dont l'objet est exclusivement une connexion à l'internet, sans besoin fonctionnel prédéfini. Les équipements électroniques permettant des communications vocales ou SMS sont en dehors de cette définition et rentrent dans le périmètre des terminaux de téléphonie mobile « traditionnels ». L'accès mobile n'étant utilisé que pour accéder à l'internet, le numéro de téléphone mobile n'est jamais utilisé. La structure de ce numéro ne constitue donc pas un élément clé dans le cadre de ces communications.
En France, le marché des terminaux connectés (cartes SIM internet exclusives) comptait 3,124 millions de cartes SIM (4) à fin 2011, soit une augmentation de 15 % sur un an. En 2020, la France devrait compter près de 9 millions de cartes SIM actives pour ces terminaux.
Le segment principal des terminaux connectés est essentiellement celui des tablettes. A ce jour, les terminaux connectés utilisent essentiellement une connectivité wi-fi comme technologie d'accès à l'internet, et l'usage du réseau mobile constitue une solution complémentaire pour environ 20 % des équipements vendus. Le mobile permet en effet de se connecter en permanence au réseau quel que soit l'endroit où le terminal se trouve alors que le wi-fi nécessite, pour fonctionner, d'être à proximité de la station de base qui émet.
Le taux d'équipement en connectivité mobile est fortement dépendant des tarifs des offres d'accès à l'internet mobile. Une baisse des prix liée à une évolution de la situation concurrentielle et au développement des réseaux 4G constitue un élément difficilement prévisible mais qui, s'il advenait, serait susceptible d'accroître fortement le besoin par rapport aux prévisions actuelles.

(4) UIT : Union internationale des télécommunications.

Conséquences sur la numérotation
La disponibilité actuelle en numéros mobiles
en métropole ne pourra répondre en l'état aux futures demandes

La numérotation constitue une ressource essentielle au bon développement du marché des communications électroniques. Les choix en matière d'allocation des ressources doivent permettre de répondre à l'ensemble des demandes dans des conditions objectives, non discriminatoires et pérennes, ce qui impose à l'Autorité de prévenir toute saturation susceptible de bloquer le marché.
Au vu du potentiel de croissance du marché des communications M2M, et dans une moindre mesure de celui des terminaux connectés, la disponibilité actuelle en numéros mobiles ne pourra répondre en l'état à toutes les demandes avec une date de saturation du plan de numérotation mobile métropolitain estimée entre 2016 et 2023.
En effet, les prévisions de l'IDATE indiquent une augmentation du nombre de cartes SIM M2M et terminaux connectés de l'ordre de 33,5 millions entre fin 2011 et 2020. A ces besoins, s'ajoute la hausse du nombre de cartes SIM liée à la croissance de la téléphonie mobile (voix et SMS). Avec une hypothèse de croissance de 1,5 % par an sur cette même période, cela représente une hausse de presque 15 millions de numéros.
Ainsi en 2020, près de 49 millions de numéros mobiles supplémentaires seraient nécessaires pour répondre à toutes les demandes alors que la disponibilité actuelle n'est que de 24 millions pour la métropole.

L'attribution d'un numéro de téléphone mobile pour les communications M2M
et les terminaux connectés est incontournable à moyen terme

Les réseaux mobiles sont constitués d'équipements de plusieurs générations (2G, 3G et bientôt 4G) provenant souvent de constructeurs différents ; ils sont conçus pour utiliser des solutions normées et standardisées afin de favoriser l'interopérabilité entre les équipements des différents constructeurs et les réseaux des différents opérateurs.
En l'état des technologies de réseau mobile actuelles, les normes 3GPP (GSM/UMTS) déployées au niveau mondial chez les opérateurs mobiles ainsi que les dernières versions adoptées mais non encore déployées prévoient qu'à chaque ligne mobile, est affecté un numéro de téléphone mobile (ci-après « MS-ISDN ») compatible avec le standard E 164 de l'UIT UIT (5) (plan de numérotage des télécommunications publiques internationales).
De plus, le numéro MS-ISDN est également utilisé par les opérateurs de communications électroniques comme l'identifiant principal de ligne dans leurs systèmes d'information, de facturation et de gestion d'abonnés.
Pour ces raisons, la contrainte d'associer un MS-ISDN à chaque ligne mobile devrait perdurer pendant de nombreuses années, le temps qu'une solution d'adressage alternative soit normalisée et déployée de manière généralisée pour que l'adressage E. 164 puisse être définitivement abandonné. Ce qui ne devrait pas se produire avant dix à quinze ans minimum.

(5) Union internationale des télécommunications.

La solution retenue devra être basée sur une évolution du format du numéro dans le respect
du standard E. 164 afin de garantir la compatibilité avec les équipements de réseaux existants

Comme indiqué ci-dessus, les contraintes techniques des réseaux mobiles imposent que toute solution visant à prévenir le risque de pénurie des ressources mobiles à moyen terme devra nécessairement respecter le standard E. 164 afin de permettre les interconnexions et l'itinérance nationale et internationale.
La seule solution envisageable dans ces conditions consiste en une augmentation du nombre de chiffres d'une tranche spécifique de numéros, sachant que le standard E. 164 permet de porter ce nombre à 14 en métropole et à 13 pour l'outre-mer (préfixe national « 0 » inclus) du fait de la longueur différente du code pays de la métropole et de celui des départements d'outre-mer.
La création de tranches de numéros de longueur étendue à 14 chiffres ouvre une ressource de 10 milliards de numéros par ouverture de tranche « ZAB », qui réduit ainsi le risque de pénurie.
Cette tranche « ZAB » de longueur étendue pourrait être choisie soit dans les zones (« Z ») habituellement allouées aux numéros fixes (Z = 1-5,9) soit dans celles habituellement allouées aux numéros mobiles (Z = 6,7). Le choix d'une tranche de la forme 7AB est privilégiée en ce que :
― l'utilisation d'une tranche de numéros issue des zones fixes (Z = 1-5,9) dans des réseaux mobiles impliquera une analyse des numéros plus complexe par l'ensemble des opérateurs nationaux et internationaux pour router les appels aux bons points d'interconnexion ;
― la moitié des tranches de la zone 7 (ZA = 70 à 74) n'est actuellement pas définie dans le plan national de numérotation et est donc disponible pour de nouveaux usages.

Les principaux impacts du changement de numérotation
seront essentiellement liés aux systèmes d'information

Un changement de numérotation impacte essentiellement les opérateurs de réseaux mobiles qui demandent aujourd'hui des numéros en 07 pour les applications M2M et les terminaux connectés et, dans une moindre mesure, les fournisseurs de services M2M, les intégrateurs de services et, éventuellement, les clients finaux.
S'agissant des impacts pour les opérateurs de réseaux mobiles, la solution proposée respectant le standard E.164, avec lesquels sont compatibles les équipements de réseaux existants, ne devrait impliquer que des modifications limitées du paramétrage de ces équipements (déclaration des blocs dans les HLR, MSC, SMSC, mise à jour de tables de routage). En revanche, des modifications impliquant des développements informatiques seront nécessaires pour mettre à jour les systèmes d'information de facturation et de gestion d'abonnés pour étendre de 10 à 14 le nombre de chiffres des numéros.
Outre l'impact sur leurs réseaux et leurs systèmes d'informations, les opérateurs et les équipementiers consultés ont souligné dans leur réponse à la consultation publique l'impact de ce changement de numérotation sur l'ensemble de l'écosystème M2M, notamment les industriels fabriquant les modules M2M, les intégrateurs et fournisseurs de services M2M ainsi que les clients finaux, dont les délais de mise en œuvre varient en fonction de contraintes propres (cycles de l'ordre de cinq ans dans l'industrie, cycles décisionnels longs des clients, etc.). Les opérateurs et les équipementiers concernés plaident pour la prise en compte de ces contraintes techniques et industrielles.

Solution retenue

Il ressort des éléments exposés ci-dessus qu'une solution durable doit être déterminée et mise en œuvre rapidement afin d'éviter une saturation du plan de numérotation mobile et une augmentation généralisée de la taille des numéros du plan de numérotation français.
A compter de l'entrée en vigueur de la décision :
En métropole, compte tenu du nombre de numéros mobiles encore disponibles (24 millions à fin mars 2012) et du rythme d'attribution au cours des deux dernières années (plus de 9 millions par an), il est raisonnable d'ouvrir à titre préventif deux tranches ZAB à 10 chiffres (soit 20 millions de numéros) pour les besoins mobiles des trois prochaines années, à savoir les tranches commençant par 073 et 074 de la réserve non ouverte.
Outre-mer, étant donné le nombre de numéros mobiles disponibles dans les départements de la Guadeloupe (50 000 numéros) et de la Martinique (150 000 numéros), il convient d'ouvrir respectivement les tranches commençant par 0691 et 0697 actuellement en réserve et destinées à répondre aux besoins de ces départements.
Par ailleurs, il convient d'ouvrir une tranche de numéros mobiles de longueur étendue à 14 chiffres commençant par 0700, qui a vocation à être notamment utilisée pour les communications M2M.
A compter du 1er janvier 2016 :
Il convient de restreindre aux services suivants, à partir du 1er janvier 2016, l'utilisation en métropole des numéros mobiles à 10 chiffres :
― les services téléphoniques au public, de radiomessagerie ou de SMS/MMS dont le souscripteur est joignable sans aucune restriction par tout utilisateur d'un service téléphonique au public ou de SMS/MMS ;
― les services d'accès à l'internet.
Ces conditions d'affectation excluent notamment services de communications « machine à machine » (ou « M2M ») tels que :
― les applications auxquelles seules des machines parfaitement identifiées ou des techniciens habilités sont susceptibles d'accéder (ex. : télérelève de compteurs, gestion de flotte, etc.) ;
― les applications domotiques qui s'adressent spécifiquement à un foyer ;
― les différents systèmes de « eCall » pour lesquels il est prévu que les appelants autorisés sont constitués des seules équipes de secours et des personnels des sociétés d'assistance accréditées.
Outre-mer, au regard de la disponibilité des numéros mobiles à 10 chiffres, il n'apparaît pas justifié, à ce stade, de restreindre les conditions d'utilisation de ces numéros.
Plusieurs contributions à la consultation publique ainsi que les avis formulés lors de la commission consultative des communications électroniques du 22 juin 2012 ont demandé à ce que les terminaux connectés puissent continuer à se voir attribuer des numéros dans la tranche mobile à 10 chiffres et ne soient pas obligés d'utiliser des numéros à 14 chiffres. Les acteurs qui se sont exprimés estiment en effet que le risque de saturation de cette tranche par ces terminaux n'est pas suffisamment avéré au regard des investissements qui seraient nécessaires pour imposer une bascule vers la tranche à 14 chiffres. Ainsi, l'Autorité a décidé de maintenir la possibilité d'utiliser la tranche mobile des numéros à 10 chiffres pour les terminaux connectés. Toutefois, elle place l'usage de ces terminaux sous surveillance spéciale et renforce les informations à transmettre dans le cadre du rapport annuel d'utilisation des numéros afin de réévaluer régulièrement leur impact sur le risque de saturation des numéros mobiles à 10 chiffres. En fonction de l'évolution de cette utilisation et des risques avérés de saturation, l'Autorité pourrait être amenée, le cas échéant, à réviser sa décision.
Par ailleurs, plusieurs opérateurs membres de la commission consultative des communications électroniques ont exprimé le souhait de bénéficier d'un régime dérogatoire, portant sur l'usage des numéros mobiles à 10 chiffres pour les extensions de lignes des projets M2M déjà déployés. En effet, la mise en place de numéros à 14 chiffres impliquerait pour les clients des coûts (modification de SI), voire des problèmes techniques (reconfiguration d'un parc déployé), qui n'auraient pas pu être pris en compte à l'origine du projet du fait de l'évolution du cadre réglementaire. Une contribution indique à cet effet que la durée moyenne d'un projet M2M est d'environ cinq ans.
Au vu de ces commentaires, il apparaît proportionné que les clients qui auront signé, au plus tard le 30 juin 2013, un contrat avec un opérateur mobile portant sur la fourniture de communications M2M puissent bénéficier d'un régime dérogatoire leur permettant de se faire affecter des numéros mobiles à 10 chiffres jusqu'au 30 juin 2018. En effet, les clients signant des contrats à compter du 1er juillet 2013 seront à même de prendre en compte les formats de numérotation à 10 et 14 chiffres dans les spécifications techniques de leurs développements informatiques.
Afin de limiter l'impact de cette dérogation sur la disponibilité de la ressource, le nombre total de numéros mobiles à 10 chiffres pouvant être affecté par chaque opérateur ne devra pas excéder 1 000 000 de numéros.
Les modalités de mise en œuvre de ces dispositions sont précisées à l'annexe I de la présente décision.
Décide :

Article 1

Dans l'annexe de la décision n° 2005-1085 susvisée, dans la partie : « 1. Les numéros de communications interpersonnelles », la section : « Numéros mobiles (Z = 6 ou ZA = 75, 76, 77, 78, 79) » est remplacée par « Numéros mobiles à 10 chiffres (Z = 6 ou ZA = 73, 74, 75, 76, 77, 78, 79) », dont le contenu est indiqué à l'annexe I de la présente décision.

Article 2

Dans l'annexe de la décision n° 2005-1085 susvisée, dans la partie : « 1. Les numéros de communications interpersonnelles », est insérée entre les sections « Numéros mobiles à 10 chiffres (Z = 6 ou ZA = 75, 76, 77, 78, 79) » et « Numéros non géographiques (Z = 9) » une section « Les numéros mobiles de longueur étendue (ZAB = 700) », dont le contenu est indiqué à l'annexe II de la présente décision.

Article 3

L'annexe II de la décision n° 2005-1085 susvisée intitulée : « Liste des blocs de numéros mobiles utilisés dans les territoires autres que la France métropolitaine à la date de la présente décision » est abrogée.

Article 4

Les attributaires de ressources en numérotation commençant par 06 et 07 pour la métropole doivent fournir, au format électronique, avant le 31 janvier de chaque année, les informations d'utilisation figurant à l'annexe III de la présente décision, au 31 décembre de l'année précédente.

Article 5

Le directeur des services fixe et mobile et des relations avec les consommateurs de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes est chargé de l'exécution de la présente décision, qui sera publiée au Journal officiel de la République française.

Fait à Paris, le 17 juillet 2012.

Pour l'Autorité de régulation

des communications électroniques et des postes :

Le président,

J.-L. Silicani