JORF n°0003 du 5 janvier 2011

Des distorsions concurrentielles accentuées par la décorrélation actuelle entre charges de gros et revenus de détail en métropole et à La Réunion
On observe notamment en métropole et à La Réunion un décalage croissant entre les niveaux de charges de terminaison d'appel et les revenus moyens générés par chaque SMS sur le marché de détail, en raison de l'essor des offres d'abondance SMS. Sur ces deux marchés, le chiffre d'affaires moyen par SMS est désormais très proche voire inférieur pour certains opérateurs au coût de gros de la terminaison d'appel SMS.
Aussi relève-t-on que les offres d'abondance en SMS semblent difficilement réplicables par des tiers et sont susceptibles de générer des effets de ciseau dès lors que le revenu moyen afférent à ces offres devient inférieur à la charge de terminaison encourue majorée des coûts additionnels de production du SMS consommé, et abstraction faite du comportement en retour des appelés (taux de rebond).

Vous pouvez consulter le tableau dans le
JOn° 3 du 05/01/2011 texte numéro 88

Evolution du ratio entre chiffres d'affaire SMS et volume global de SMS envoyés depuis 2001 en France. Le trait vertical rouge marque l'instauration de la régulation de la terminaison d'appel SMS. Source : ARCEP, Observatoire des marchés, Enquête trimestrielle

Or il ne semble pas sain que se développent massivement sur les marchés de détail des offres dont l'équilibre économique est construit sur le comportement en retour des destinataires des SMS, entendu comme devant être proche de celui des contacts appelants.
Un frein à l'innovation
Cette dépendance de l'équilibre économique d'offres de détail sur le comportement en retour des appelés peut brider l'innovation, dans la mesure où il désincite les opérateurs à lancer des offres innovantes à taux de rebond faible ou inexistant (par exemple des services de convergence comme Twitter, qui s'appuie dans certains pays comme les Etats-Unis et l'Inde sur l'envoi de SMS). Inversement, il incite les opérateurs à faire converger les profils d'appel de leurs clients avec ceux des clients appelés, et ce alors même que le SMS, notamment par son caractère asynchrone, pourrait générer des usages bien plus innovants.
On relève plus particulièrement que les petits opérateurs prendraient un risque financier important au regard de leur taille dès lors qu'ils souhaiteraient lancer des offres innovantes. En particulier, tout lancement d'une offre de détail engendrant un fort volume de SMS off net rehausse, au moins provisoirement en attendant une éventuelle réplique des concurrents, le besoin en fonds de roulement de l'opérateur la pratiquant (de manière parfaitement exogène).
Ces distorsions de concurrence sont exacerbées en outre-mer, territoires caractérisés par de fortes asymétries de parts de marché, une terminaison d'appel SMS parmi les plus élevées en Europe et la prépondérance des jeunes, avides de SMS, dans la population.
Ainsi, sur l'île de La Réunion, l'Autorité relève que SRR, fort des deux tiers du marché, est le seul opérateur à proposer actuellement de l'abondance SMS sur le segment prépayé, qui constitue le cœur du marché. Orange Réunion et Outremer Telecom, de taille plus modeste, ne semblent pas en mesure de répliquer sur ce segment en raison du niveau actuel de la terminaison d'appel SMS.
Des charges de terminaison d'appel SMS qui font obstacle au plein exercice de la concurrence sur la zone Antilles-Guyane
Sur la zone Antilles-Guyane, le niveau actuel de la terminaison d'appel SMS semble constituer un obstacle au plein exercice de la concurrence au niveau du détail, et notamment à la baisse des prix de détail, et conduit à une sous-performance concurrentielle et économique des marchés de détail sous-jacents.
En l'absence de dynamique commerciale forte en faveur d'offres de détail comprenant des prestations de SMS vendus en abondance, ces offres restent en nombre limité sur le marché, en comparaison de la métropole et de La Réunion. Une baisse de la terminaison d'appel SMS pourrait permettre, comme cela a été le cas en métropole, l'essor de ces offres à des prix attractifs et la levée des contraintes d'usage associées.

4.1.3.3. Prise en compte des contributions à la consultation publique de l'automne 2009
relatives aux distorsions concurrentielles liées à l'écart entre les tarifs et les coûts

Sur la situation métropolitaine
Dans leurs réponses respectives à la consultation publique de l'automne 2009, les trois opérateurs mobiles métropolitains sont en désaccord avec l'analyse des problèmes concurrentiels exposée par l'Autorité.
Les trois opérateurs mobiles estiment que le marché de détail métropolitain est dynamique, concurrentiel et en forte croissance, au bénéfice des consommateurs qui profitent d'une baisse des prix des SMS. En particulier, les trois opérateurs rejettent le bilan fait par l'Autorité joint en annexe et mentionnant une stagnation des prix pour les consommateurs occasionnels de SMS.
Sur ce point, l'UFC-Que Choisir estime au contraire, dans sa réponse à la consultation publique de l'automne 2009, que le SMS à l'unité ou en petites quantités reste relativement onéreux, ce qui n'est pas représentatif d'un marché de détail concurrentiel.
Selon les trois opérateurs mobiles métropolitains, le risque de limitation de l'innovation commerciale n'est pas opérant en métropole comme le prouve l'essor des offres d'abondance tous réseaux. Selon Orange France, l'équilibre économique des offres n'est pas lié à la terminaison d'appel SMS du fait de l'égalité des flux entrants et sortants, de même que le développement des usages SMS n'est en rien corrélé au niveau de la terminaison d'appel SMS, comme le montrent les analyses comparatives européennes.
Par ailleurs, les trois opérateurs mobiles métropolitains font valoir que les accords récents de baisse des tarifs de terminaison d'appel SMS en deux étapes auxquels ils sont parvenus rapprochent désormais les prix de gros des coûts sous-jacents, résolvant donc à terme le risque de distorsion concurrentielle s'il en était.
De son côté, l'UFC-Que Choisir estime que des tarifs de terminaison d'appel SMS élevés pénalisent les petits opérateurs, qui sont les plus susceptibles de faire baisser les prix de détail, ainsi que les MVNO, dont les conditions tarifaires d'hébergement intègrent la terminaison d'appel SMS et qui ne semblent pas en mesure de négocier des prix de gros intéressants sur les SMS hors offres d'abondance. De plus, selon l'association, des tarifs de terminaison d'appel SMS élevés peuvent également limiter la marge de manœuvre du nouvel entrant sur le marché de détail, alors même que « les consommateurs attendent beaucoup de son arrivée sur le marché ».
Sur la situation sur la zone Réunion-Mayotte
Les réponses respectives d'Orange Réunion et Outremer Telecom à la consultation publique de l'automne 2009 divergent sur l'analyse des distorsions concurrentielles liées à l'écart entre les tarifs et les coûts, en particulier sur la réplicabilité des offres d'abondance en SMS proposées par SRR à La Réunion.
Orange Réunion estime que le niveau actuel de la terminaison d'appel SMS lui permet de proposer des offres d'abondance dans des conditions satisfaisantes, son choix de ne pas répliquer sur le segment prépayé étant un choix économique et de marketing. Pour l'opérateur, il appartient à SRR et à l'Autorité de la concurrence de s'assurer que ces offres sont réplicables.
Outremer Telecom considère en revanche que l'offre d'abondance de SRR sur le segment prépayé n'est pas réplicable en raison du tarif élevé de terminaison d'appel SMS et de l'asymétrie des parts de marché.
Néanmoins, la nécessité d'une baisse des tarifs de terminaison d'appel SMS est approuvée par l'ensemble des opérateurs mobiles de la zone dans leurs réponses à la consultation publique de l'automne 2009. Orange Réunion estime en particulier qu'elle permettrait d'améliorer la cohérence entre marché de gros et marché de détail.
De son côté, l'UFC-Que Choisir considère qu'une baisse des tarifs de terminaison d'appel SMS sur la zone pourrait impulser une dynamique concurrentielle au bénéfice des consommateurs, les prix à l'unité des SMS étant aujourd'hui particulièrement élevés, sans justification économique.
Sur la situation sur la zone Antilles-Guyane
Si Orange Caraïbe ne relève pas de problème concurrentiel sur le marché antillo-guyanais, Outremer Telecom approuve au contraire l'analyse de l'Autorité selon laquelle l'écart significatif entre le prix de gros et le coût sous-jacent de la terminaison d'appel SMS crée une distorsion de concurrence envers un opérateur souhaitant lancer des offres innovantes engendrant un usage de SMS supérieur aux offres de ses concurrents. Ainsi, Outremer Telecom souligne la vive dégradation de son solde d'interconnexion SMS vis-à-vis d'Orange Caraïbe suite au lancement de ses offres d'abondance en SMS, qui constituent pourtant un outil de différenciation commerciale pour l'opérateur en troisième position sur le marché.
De son côté, l'UFC-Que Choisir relève les prix particulièrement élevés des SMS à l'unité, sans justification économique.
Outremer Telecom et l'UFC-Que Choisir estiment comme l'Autorité qu'une baisse du tarif de la terminaison d'appel SMS entraînerait une dynamique concurrentielle sur le marché antillo-guyanais, au bénéfice des consommateurs.

4.1.4. Problèmes concurrentiels
vis-à-vis des agrégateurs de SMS
4.1.4.1. La terminaison de SMS auprès des trois opérateurs de réseau mobile
est une infrastructure essentielle pour les agrégateurs de SMS

Les agrégateurs de SMS souhaitant fournir des prestations de SMS Push à des clients finaux tels que des éditeurs de services ou des grands comptes se trouvent dans l'obligation d'acquérir des prestations de terminaison de SMS auprès des opérateurs de réseaux mobiles. A cet égard, la terminaison de SMS constitue une infrastructure essentielle pour les agrégateurs en vue de fournir des services sur le marché de détail aux clients finaux.
Notons que, ces clients éditeurs demandant à pouvoir joindre la totalité du parc mobile, les agrégateurs doivent obtenir une offre de terminaison de SMS auprès de chacun des opérateurs mobiles. De plus, toute fonctionnalité technique qui n'est pas proposée par la totalité des opérateurs mobiles est inexploitable.

4.1.4.2. Des risques de distorsion concurrentielle
induits par l'intégration verticale des opérateurs mobiles

Les agrégateurs achètent sur le marché amont une prestation de terminaison de SMS aux opérateurs mobiles afin de proposer sur le marché aval des services de SMS Push de détail à des éditeurs de services, marché sur lequel les opérateurs de réseaux mobiles sont également présents. Un éditeur de services peut en effet contracter avec un agrégateur de SMS ou avec chacun des opérateurs de réseaux mobiles séparément.
Cette situation emporte des risques de distorsion concurrentielle. Les agrégateurs de SMS peuvent être en effet dans l'impossibilité de répliquer par leurs propres moyens des offres de SMS Push de détail commercialisées directement par l'opérateur mobile aux éditeurs de service et s'appuyant sur des éléments techniques maîtrisés par ce dernier.
De manière plus générale, la qualité d'infrastructure essentielle que représente la terminaison d'appel SMS pour les agrégateurs nécessite que les opérateurs de réseau pratiquent envers eux des offres qui soient compatibles avec les conditions qu'ils font en interne aux éditeurs de services. De manière constante et universellement reconnue, la fourniture d'une prestation de terminaison d'appel par un opérateur verticalement intégré sur le marché de détail relève de l'exploitation d'une infrastructure essentielle. A cet égard, les conditions de fourniture de cette prestation doivent se voir opposer le régime d'accès à une infrastructure essentielle, au titre d'une application du droit de la concurrence ou, le cas échéant, d'une régulation ex ante. Ce régime comprend un principe de non-discrimination interne/externe, visant à prévenir les distorsions de concurrence sur le marché de détail sous-jacent, dans la mesure où il impose à l'opérateur bénéficiaire de l'infrastructure essentielle de se fournir l'accès à cette infrastructure dans des conditions identiques à celles qu'il accorde à des tiers. En matière de terminaison d'appel SMS, cela a pour conséquence que l'opérateur intégré doit proposer des offres de détail compatibles avec la prestation, par sa branche amont à sa branche aval, d'une terminaison d'appel SMS dans les mêmes conditions que celles facturées à un agrégateur de SMS.

4.1.4.3. Des contrats parfois identiques aux contrats proposés
sur le marché de détail à des éditeurs de services

L'Autorité relève que Bouygues Telecom depuis 2007 et Orange France depuis mars 2010 ont lancé des offres de SMS Push de gros dédiées aux acheteurs ayant le statut d'opérateur, qui se distinguent techniquement et/ou contractuellement des offres destinées sur le marché de détail à des éditeurs de services. Cependant, les agrégateurs achètent toujours chez certains opérateurs mobiles les mêmes offres que celles destinées sur le marché de détail à des éditeurs de services. Or ces acteurs peuvent légitimement bénéficier de conditions techniques, tarifaires et contractuelles particulières au regard de leur statut d'opérateur.
L'Autorité note cependant l'annonce récente par SFR, postérieure au lancement de l'analyse de marché, de la disponibilité prochaine d'une offre de terminaison de SMS dédiée aux acheteurs ayant le statut d'opérateur.

4.1.4.4. Une autonomie technique et commerciale fortement contrainte

Que les agrégateurs achètent aux opérateurs mobiles une offre de détail ou une offre de gros dédiée, l'architecture de ces offres, reposant sur une prestation de SMS Push, contraint leur autonomie commerciale, technique et financière sur le marché de détail associé et emporte des risques de distorsions concurrentielles sur ledit marché aval de prestations aux éditeurs de services sur lequel sont également présents les opérateurs mobiles.
En effet, les agrégateurs n'accèdent pas aux prestations de SMS-MT seules. Comme mentionné précédemment, les prestations de SMS Push vont au-delà de la fourniture d'une simple terminaison d'appel SMS correspondant à l'utilisation des ressources radio nécessaires à la réception du SMS par le client final. Le SMS Push joint en effet à cette terminaison la fourniture de prestations de cœur de réseau correspondant au départ technique du SMS. Ainsi, la fourniture de terminaison d'appel SMS est vendue liée à la fourniture d'un accès au SMS-C et l'opérateur mobile conserve l'exclusivité de l'accès à toute information portant de manière plus générale sur le statut du SMS envoyé (reçu ou non...) ou sur le client appelé. En d'autres termes, l'opérateur mobile n'assure pas que la terminaison du message entrant, il conserve une mainmise sur la prestation de départ, de diffusion et de terminaison du SMS non interpersonnel. Les agrégateurs se trouvent dès lors dans une situation de dépendance technique vis-à-vis de l'opérateur de terminaison.
Cette dépendance notamment technique génère par elle-même une faible autonomie commerciale, au sens où l'agrégateur souhaitant procéder à la commercialisation d'une offre de détail impliquant des développements techniques particuliers doit nécessairement communiquer préalablement ses projets à l'opérateur de terminaison.
Si ces principes techniques ne doivent pas nécessairement être remis en question, il importe, d'une part, que la demande éventuelle d'agrégateurs de SMS qui souhaiteraient investir davantage sur le plan technique (en exploitant par exemple leur propre SMS-C) et gagner en autonomie soit entendue (30) et, d'autre part, que les opérateurs mobiles n'exploitent pas leur maîtrise technique de manière indue et fassent droit aux demandes raisonnables des agrégateurs qui permettent le développement de leur activité dans le respect de la déontologie.
Sur ce second point, la situation ne semble pas satisfaisante, comme explicité ci-après.

(30) L'opposition actuelle des opérateurs mobiles, tenant aux problématiques de sécurité des réseaux, d'accès sensible au HLR et de risque de développement du spam, ne doit pas occulter le fait que les opérateurs mobiles permettent pourtant à tous les opérateurs mobiles étrangers d'accéder en SS7 à leur réseau, pour le compte de leurs propres clients en itinérance internationale ou pour le compte des clients de l'opérateur en cause, et qu'un tel accès dans le cadre des agrégateurs de SMS pourrait être encadré déontologiquement.


Historique des versions

Version 1

Des distorsions concurrentielles accentuées par la décorrélation actuelle entre charges de gros et revenus de détail en métropole et à La Réunion

On observe notamment en métropole et à La Réunion un décalage croissant entre les niveaux de charges de terminaison d'appel et les revenus moyens générés par chaque SMS sur le marché de détail, en raison de l'essor des offres d'abondance SMS. Sur ces deux marchés, le chiffre d'affaires moyen par SMS est désormais très proche voire inférieur pour certains opérateurs au coût de gros de la terminaison d'appel SMS.

Aussi relève-t-on que les offres d'abondance en SMS semblent difficilement réplicables par des tiers et sont susceptibles de générer des effets de ciseau dès lors que le revenu moyen afférent à ces offres devient inférieur à la charge de terminaison encourue majorée des coûts additionnels de production du SMS consommé, et abstraction faite du comportement en retour des appelés (taux de rebond).

Vous pouvez consulter le tableau dans le

JOn° 3 du 05/01/2011 texte numéro 88

Evolution du ratio entre chiffres d'affaire SMS et volume global de SMS envoyés depuis 2001 en France. Le trait vertical rouge marque l'instauration de la régulation de la terminaison d'appel SMS. Source : ARCEP, Observatoire des marchés, Enquête trimestrielle

Or il ne semble pas sain que se développent massivement sur les marchés de détail des offres dont l'équilibre économique est construit sur le comportement en retour des destinataires des SMS, entendu comme devant être proche de celui des contacts appelants.

Un frein à l'innovation

Cette dépendance de l'équilibre économique d'offres de détail sur le comportement en retour des appelés peut brider l'innovation, dans la mesure où il désincite les opérateurs à lancer des offres innovantes à taux de rebond faible ou inexistant (par exemple des services de convergence comme Twitter, qui s'appuie dans certains pays comme les Etats-Unis et l'Inde sur l'envoi de SMS). Inversement, il incite les opérateurs à faire converger les profils d'appel de leurs clients avec ceux des clients appelés, et ce alors même que le SMS, notamment par son caractère asynchrone, pourrait générer des usages bien plus innovants.

On relève plus particulièrement que les petits opérateurs prendraient un risque financier important au regard de leur taille dès lors qu'ils souhaiteraient lancer des offres innovantes. En particulier, tout lancement d'une offre de détail engendrant un fort volume de SMS off net rehausse, au moins provisoirement en attendant une éventuelle réplique des concurrents, le besoin en fonds de roulement de l'opérateur la pratiquant (de manière parfaitement exogène).

Ces distorsions de concurrence sont exacerbées en outre-mer, territoires caractérisés par de fortes asymétries de parts de marché, une terminaison d'appel SMS parmi les plus élevées en Europe et la prépondérance des jeunes, avides de SMS, dans la population.

Ainsi, sur l'île de La Réunion, l'Autorité relève que SRR, fort des deux tiers du marché, est le seul opérateur à proposer actuellement de l'abondance SMS sur le segment prépayé, qui constitue le cœur du marché. Orange Réunion et Outremer Telecom, de taille plus modeste, ne semblent pas en mesure de répliquer sur ce segment en raison du niveau actuel de la terminaison d'appel SMS.

Des charges de terminaison d'appel SMS qui font obstacle au plein exercice de la concurrence sur la zone Antilles-Guyane

Sur la zone Antilles-Guyane, le niveau actuel de la terminaison d'appel SMS semble constituer un obstacle au plein exercice de la concurrence au niveau du détail, et notamment à la baisse des prix de détail, et conduit à une sous-performance concurrentielle et économique des marchés de détail sous-jacents.

En l'absence de dynamique commerciale forte en faveur d'offres de détail comprenant des prestations de SMS vendus en abondance, ces offres restent en nombre limité sur le marché, en comparaison de la métropole et de La Réunion. Une baisse de la terminaison d'appel SMS pourrait permettre, comme cela a été le cas en métropole, l'essor de ces offres à des prix attractifs et la levée des contraintes d'usage associées.

4.1.3.3. Prise en compte des contributions à la consultation publique de l'automne 2009

relatives aux distorsions concurrentielles liées à l'écart entre les tarifs et les coûts

Sur la situation métropolitaine

Dans leurs réponses respectives à la consultation publique de l'automne 2009, les trois opérateurs mobiles métropolitains sont en désaccord avec l'analyse des problèmes concurrentiels exposée par l'Autorité.

Les trois opérateurs mobiles estiment que le marché de détail métropolitain est dynamique, concurrentiel et en forte croissance, au bénéfice des consommateurs qui profitent d'une baisse des prix des SMS. En particulier, les trois opérateurs rejettent le bilan fait par l'Autorité joint en annexe et mentionnant une stagnation des prix pour les consommateurs occasionnels de SMS.

Sur ce point, l'UFC-Que Choisir estime au contraire, dans sa réponse à la consultation publique de l'automne 2009, que le SMS à l'unité ou en petites quantités reste relativement onéreux, ce qui n'est pas représentatif d'un marché de détail concurrentiel.

Selon les trois opérateurs mobiles métropolitains, le risque de limitation de l'innovation commerciale n'est pas opérant en métropole comme le prouve l'essor des offres d'abondance tous réseaux. Selon Orange France, l'équilibre économique des offres n'est pas lié à la terminaison d'appel SMS du fait de l'égalité des flux entrants et sortants, de même que le développement des usages SMS n'est en rien corrélé au niveau de la terminaison d'appel SMS, comme le montrent les analyses comparatives européennes.

Par ailleurs, les trois opérateurs mobiles métropolitains font valoir que les accords récents de baisse des tarifs de terminaison d'appel SMS en deux étapes auxquels ils sont parvenus rapprochent désormais les prix de gros des coûts sous-jacents, résolvant donc à terme le risque de distorsion concurrentielle s'il en était.

De son côté, l'UFC-Que Choisir estime que des tarifs de terminaison d'appel SMS élevés pénalisent les petits opérateurs, qui sont les plus susceptibles de faire baisser les prix de détail, ainsi que les MVNO, dont les conditions tarifaires d'hébergement intègrent la terminaison d'appel SMS et qui ne semblent pas en mesure de négocier des prix de gros intéressants sur les SMS hors offres d'abondance. De plus, selon l'association, des tarifs de terminaison d'appel SMS élevés peuvent également limiter la marge de manœuvre du nouvel entrant sur le marché de détail, alors même que « les consommateurs attendent beaucoup de son arrivée sur le marché ».

Sur la situation sur la zone Réunion-Mayotte

Les réponses respectives d'Orange Réunion et Outremer Telecom à la consultation publique de l'automne 2009 divergent sur l'analyse des distorsions concurrentielles liées à l'écart entre les tarifs et les coûts, en particulier sur la réplicabilité des offres d'abondance en SMS proposées par SRR à La Réunion.

Orange Réunion estime que le niveau actuel de la terminaison d'appel SMS lui permet de proposer des offres d'abondance dans des conditions satisfaisantes, son choix de ne pas répliquer sur le segment prépayé étant un choix économique et de marketing. Pour l'opérateur, il appartient à SRR et à l'Autorité de la concurrence de s'assurer que ces offres sont réplicables.

Outremer Telecom considère en revanche que l'offre d'abondance de SRR sur le segment prépayé n'est pas réplicable en raison du tarif élevé de terminaison d'appel SMS et de l'asymétrie des parts de marché.

Néanmoins, la nécessité d'une baisse des tarifs de terminaison d'appel SMS est approuvée par l'ensemble des opérateurs mobiles de la zone dans leurs réponses à la consultation publique de l'automne 2009. Orange Réunion estime en particulier qu'elle permettrait d'améliorer la cohérence entre marché de gros et marché de détail.

De son côté, l'UFC-Que Choisir considère qu'une baisse des tarifs de terminaison d'appel SMS sur la zone pourrait impulser une dynamique concurrentielle au bénéfice des consommateurs, les prix à l'unité des SMS étant aujourd'hui particulièrement élevés, sans justification économique.

Sur la situation sur la zone Antilles-Guyane

Si Orange Caraïbe ne relève pas de problème concurrentiel sur le marché antillo-guyanais, Outremer Telecom approuve au contraire l'analyse de l'Autorité selon laquelle l'écart significatif entre le prix de gros et le coût sous-jacent de la terminaison d'appel SMS crée une distorsion de concurrence envers un opérateur souhaitant lancer des offres innovantes engendrant un usage de SMS supérieur aux offres de ses concurrents. Ainsi, Outremer Telecom souligne la vive dégradation de son solde d'interconnexion SMS vis-à-vis d'Orange Caraïbe suite au lancement de ses offres d'abondance en SMS, qui constituent pourtant un outil de différenciation commerciale pour l'opérateur en troisième position sur le marché.

De son côté, l'UFC-Que Choisir relève les prix particulièrement élevés des SMS à l'unité, sans justification économique.

Outremer Telecom et l'UFC-Que Choisir estiment comme l'Autorité qu'une baisse du tarif de la terminaison d'appel SMS entraînerait une dynamique concurrentielle sur le marché antillo-guyanais, au bénéfice des consommateurs.

4.1.4. Problèmes concurrentiels

vis-à-vis des agrégateurs de SMS

4.1.4.1. La terminaison de SMS auprès des trois opérateurs de réseau mobile

est une infrastructure essentielle pour les agrégateurs de SMS

Les agrégateurs de SMS souhaitant fournir des prestations de SMS Push à des clients finaux tels que des éditeurs de services ou des grands comptes se trouvent dans l'obligation d'acquérir des prestations de terminaison de SMS auprès des opérateurs de réseaux mobiles. A cet égard, la terminaison de SMS constitue une infrastructure essentielle pour les agrégateurs en vue de fournir des services sur le marché de détail aux clients finaux.

Notons que, ces clients éditeurs demandant à pouvoir joindre la totalité du parc mobile, les agrégateurs doivent obtenir une offre de terminaison de SMS auprès de chacun des opérateurs mobiles. De plus, toute fonctionnalité technique qui n'est pas proposée par la totalité des opérateurs mobiles est inexploitable.

4.1.4.2. Des risques de distorsion concurrentielle

induits par l'intégration verticale des opérateurs mobiles

Les agrégateurs achètent sur le marché amont une prestation de terminaison de SMS aux opérateurs mobiles afin de proposer sur le marché aval des services de SMS Push de détail à des éditeurs de services, marché sur lequel les opérateurs de réseaux mobiles sont également présents. Un éditeur de services peut en effet contracter avec un agrégateur de SMS ou avec chacun des opérateurs de réseaux mobiles séparément.

Cette situation emporte des risques de distorsion concurrentielle. Les agrégateurs de SMS peuvent être en effet dans l'impossibilité de répliquer par leurs propres moyens des offres de SMS Push de détail commercialisées directement par l'opérateur mobile aux éditeurs de service et s'appuyant sur des éléments techniques maîtrisés par ce dernier.

De manière plus générale, la qualité d'infrastructure essentielle que représente la terminaison d'appel SMS pour les agrégateurs nécessite que les opérateurs de réseau pratiquent envers eux des offres qui soient compatibles avec les conditions qu'ils font en interne aux éditeurs de services. De manière constante et universellement reconnue, la fourniture d'une prestation de terminaison d'appel par un opérateur verticalement intégré sur le marché de détail relève de l'exploitation d'une infrastructure essentielle. A cet égard, les conditions de fourniture de cette prestation doivent se voir opposer le régime d'accès à une infrastructure essentielle, au titre d'une application du droit de la concurrence ou, le cas échéant, d'une régulation ex ante. Ce régime comprend un principe de non-discrimination interne/externe, visant à prévenir les distorsions de concurrence sur le marché de détail sous-jacent, dans la mesure où il impose à l'opérateur bénéficiaire de l'infrastructure essentielle de se fournir l'accès à cette infrastructure dans des conditions identiques à celles qu'il accorde à des tiers. En matière de terminaison d'appel SMS, cela a pour conséquence que l'opérateur intégré doit proposer des offres de détail compatibles avec la prestation, par sa branche amont à sa branche aval, d'une terminaison d'appel SMS dans les mêmes conditions que celles facturées à un agrégateur de SMS.

4.1.4.3. Des contrats parfois identiques aux contrats proposés

sur le marché de détail à des éditeurs de services

L'Autorité relève que Bouygues Telecom depuis 2007 et Orange France depuis mars 2010 ont lancé des offres de SMS Push de gros dédiées aux acheteurs ayant le statut d'opérateur, qui se distinguent techniquement et/ou contractuellement des offres destinées sur le marché de détail à des éditeurs de services. Cependant, les agrégateurs achètent toujours chez certains opérateurs mobiles les mêmes offres que celles destinées sur le marché de détail à des éditeurs de services. Or ces acteurs peuvent légitimement bénéficier de conditions techniques, tarifaires et contractuelles particulières au regard de leur statut d'opérateur.

L'Autorité note cependant l'annonce récente par SFR, postérieure au lancement de l'analyse de marché, de la disponibilité prochaine d'une offre de terminaison de SMS dédiée aux acheteurs ayant le statut d'opérateur.

4.1.4.4. Une autonomie technique et commerciale fortement contrainte

Que les agrégateurs achètent aux opérateurs mobiles une offre de détail ou une offre de gros dédiée, l'architecture de ces offres, reposant sur une prestation de SMS Push, contraint leur autonomie commerciale, technique et financière sur le marché de détail associé et emporte des risques de distorsions concurrentielles sur ledit marché aval de prestations aux éditeurs de services sur lequel sont également présents les opérateurs mobiles.

En effet, les agrégateurs n'accèdent pas aux prestations de SMS-MT seules. Comme mentionné précédemment, les prestations de SMS Push vont au-delà de la fourniture d'une simple terminaison d'appel SMS correspondant à l'utilisation des ressources radio nécessaires à la réception du SMS par le client final. Le SMS Push joint en effet à cette terminaison la fourniture de prestations de cœur de réseau correspondant au départ technique du SMS. Ainsi, la fourniture de terminaison d'appel SMS est vendue liée à la fourniture d'un accès au SMS-C et l'opérateur mobile conserve l'exclusivité de l'accès à toute information portant de manière plus générale sur le statut du SMS envoyé (reçu ou non...) ou sur le client appelé. En d'autres termes, l'opérateur mobile n'assure pas que la terminaison du message entrant, il conserve une mainmise sur la prestation de départ, de diffusion et de terminaison du SMS non interpersonnel. Les agrégateurs se trouvent dès lors dans une situation de dépendance technique vis-à-vis de l'opérateur de terminaison.

Cette dépendance notamment technique génère par elle-même une faible autonomie commerciale, au sens où l'agrégateur souhaitant procéder à la commercialisation d'une offre de détail impliquant des développements techniques particuliers doit nécessairement communiquer préalablement ses projets à l'opérateur de terminaison.

Si ces principes techniques ne doivent pas nécessairement être remis en question, il importe, d'une part, que la demande éventuelle d'agrégateurs de SMS qui souhaiteraient investir davantage sur le plan technique (en exploitant par exemple leur propre SMS-C) et gagner en autonomie soit entendue (30) et, d'autre part, que les opérateurs mobiles n'exploitent pas leur maîtrise technique de manière indue et fassent droit aux demandes raisonnables des agrégateurs qui permettent le développement de leur activité dans le respect de la déontologie.

Sur ce second point, la situation ne semble pas satisfaisante, comme explicité ci-après.

(30) L'opposition actuelle des opérateurs mobiles, tenant aux problématiques de sécurité des réseaux, d'accès sensible au HLR et de risque de développement du spam, ne doit pas occulter le fait que les opérateurs mobiles permettent pourtant à tous les opérateurs mobiles étrangers d'accéder en SS7 à leur réseau, pour le compte de leurs propres clients en itinérance internationale ou pour le compte des clients de l'opérateur en cause, et qu'un tel accès dans le cadre des agrégateurs de SMS pourrait être encadré déontologiquement.