JORF n°0003 du 5 janvier 2011

4.1.3.2. Des distorsions concurrentielles en cas de déséquilibres
des flux d'interconnexion SMS, qui freinent l'innovation

L'écart significatif entre les tarifs de terminaison d'appel SMS et les coûts sous-jacents défavorise les opérateurs lorsqu'ils supportent un solde d'interconnexion SMS négatif, en accroissant indûment leurs coûts. Cet écart emporte un risque de distorsion concurrentielle, par le transfert de marge auquel il conduit de l'opérateur présentant des offres de détail induisant une consommation plus élevée vers ses concurrents. L'Autorité détaille ce point ci-après.
Des soldes d'interconnexion SMS faibles en volume mais sensibles aux offres de détail des opérateurs
En première analyse, les soldes d'interconnexion SMS entre opérateurs mobiles pris deux à deux sont par nature équilibrés en volume. Il n'y aurait donc pas de risque de solde d'interconnexion très négatif en volume à cet égard. Les opérateurs seraient de ce fait insensibles au niveau de la charge de terminaison d'appel SMS et aux risques concurrentiels s'y attachant.
Cet équilibre macroscopique des échanges de SMS tiendrait au fait que les consommateurs adopteraient un comportement consistant à renvoyer un SMS de réponse à tout SMS reçu.
L'Autorité constate effectivement que les soldes d'interconnexion SMS en volume des opérateurs mobiles français restent réduits au niveau macroscopique (28), notamment en comparaison de la voix.
Cependant, d'un point de vue microscopique (c'est-à-dire sur chaque offre d'un opérateur prise individuellement), il existe des différences de comportements selon la catégorie de consommateurs, le segment de clientèle ou l'offre considérés. Or un opérateur appréhende très souvent offre de détail par offre de détail les flux d'interconnexion résultant des trafics entrant et sortant.
Ainsi, l'Autorité constate que le taux de rebond d'un SMS (29) est très proche de 1 chez les jeunes disposant d'offres d'abondance en SMS, ceux-ci communiquant avec des abonnés mobiles au même profil de consommation et utilisant souvent le SMS comme un service de messagerie instantanée. Cependant, ce comportement ne saurait être généralisé à l'ensemble des classes d'usagers.
D'autre part, l'équilibre des soldes d'interconnexion SMS en volumes apparaît en tout état de cause conditionné au fait que ces opérateurs disposent concomitamment d'offres similaires. Or rien ne garantit de constater cet équilibre en flux offre par offre, dans la mesure où peuvent apparaître des comportements différenciés selon les offres ou entre consommateurs à profil distinct.
En métropole, l'Autorité relève ainsi que les soldes d'interconnexion en volume présentent une volatilité croissante sur la période 2006-2008. Cette volatilité s'explique notamment par l'explosion des usages constatée depuis 2006 sur le marché de détail métropolitain. Cette hausse marquée des volumes consommés déséquilibre de manière significative les soldes d'interconnexion entre opérateurs dès lors que les clients des opérateurs respectifs n'ont pas les mêmes niveaux d'usages d'un opérateur à un autre. Un tel cas de figure se rencontre notamment lorsque les opérateurs lancent des offres d'abondance de manière décalée dans le temps, ou que leurs offres respectives génèrent des niveaux de consommation distincts, par exemple par le biais des profils de consommation de leurs clients ou par les caractéristiques des offres.
Ainsi, le fait que Bouygues Telecom ait lancé des offres d'abondance SMS all-net dès fin 2006 (gammes Universal Music Mobile et avantages jeunes sur l'ensemble de ses offres) sans équivalent commercial concomitant chez Orange France et SFR a fortement dégradé son solde d'interconnexion en volume en 2007 par rapport à 2006. La commercialisation d'offres d'abondance SMS all-net par SFR à partir de Noël 2007 (gamme Illimythics et forfaits bloqués) a permis de redresser le solde d'interconnexion SMS en volume entre SFR et Bouygues Telecom en 2008. Cependant, le solde d'interconnexion SMS en volume entre SFR et Orange France s'est fortement dégradé sur la période, Orange France n'ayant répliqué que tardivement (au second semestre 2008 avec les gammes Origami, les forfaits bloqués Zap et M6 Mobile).
L'impact de ce décalage commercial en matière d'offres d'abondance s'est observé également à La Réunion, où SRR a fortement dégradé son solde d'interconnexion SMS vis-à-vis des autres opérateurs en lançant les nouvelles offres NRJ Mobile au printemps 2008.
En conclusion, les soldes d'interconnexion SMS en volume sont sensibles au caractère homogène ou non des offres sur le marché de détail sous-jacent.
L'écart significatif entre la terminaison d'appel SMS et les coûts sous-jacents est ainsi de nature à créer une distorsion de concurrence envers un opérateur souhaitant lancer des offres innovantes créant un usage de SMS sortant supérieur à celui de ses concurrents.
Aujourd'hui, l'Autorité estime que les offres d'abondance commercialisées sur tous les territoires (métropole, Réunion, Antilles-Guyane) ne sont pas encore totalement homogènes entre opérateurs, en termes de contraintes associées à l'usage SMS (all-net à certaines tranches horaires, all-net 24h/24) ou de segments de clientèle touchés (prépayé, postpayé). Dès lors, les soldes d'interconnexion SMS en volume entre opérateurs devraient rester volatiles dans les prochains mois dans un processus de convergence progressive des offres actuellement proposées sur le marché.

(28) C'est-à-dire sur l'ensemble des offres de l'opérateur. (29) Le taux de rebond d'un SMS est défini comme la probabilité de recevoir un SMS en retour pour un SMS envoyé.


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Version 1

4.1.3.2. Des distorsions concurrentielles en cas de déséquilibres

des flux d'interconnexion SMS, qui freinent l'innovation

L'écart significatif entre les tarifs de terminaison d'appel SMS et les coûts sous-jacents défavorise les opérateurs lorsqu'ils supportent un solde d'interconnexion SMS négatif, en accroissant indûment leurs coûts. Cet écart emporte un risque de distorsion concurrentielle, par le transfert de marge auquel il conduit de l'opérateur présentant des offres de détail induisant une consommation plus élevée vers ses concurrents. L'Autorité détaille ce point ci-après.

Des soldes d'interconnexion SMS faibles en volume mais sensibles aux offres de détail des opérateurs

En première analyse, les soldes d'interconnexion SMS entre opérateurs mobiles pris deux à deux sont par nature équilibrés en volume. Il n'y aurait donc pas de risque de solde d'interconnexion très négatif en volume à cet égard. Les opérateurs seraient de ce fait insensibles au niveau de la charge de terminaison d'appel SMS et aux risques concurrentiels s'y attachant.

Cet équilibre macroscopique des échanges de SMS tiendrait au fait que les consommateurs adopteraient un comportement consistant à renvoyer un SMS de réponse à tout SMS reçu.

L'Autorité constate effectivement que les soldes d'interconnexion SMS en volume des opérateurs mobiles français restent réduits au niveau macroscopique (28), notamment en comparaison de la voix.

Cependant, d'un point de vue microscopique (c'est-à-dire sur chaque offre d'un opérateur prise individuellement), il existe des différences de comportements selon la catégorie de consommateurs, le segment de clientèle ou l'offre considérés. Or un opérateur appréhende très souvent offre de détail par offre de détail les flux d'interconnexion résultant des trafics entrant et sortant.

Ainsi, l'Autorité constate que le taux de rebond d'un SMS (29) est très proche de 1 chez les jeunes disposant d'offres d'abondance en SMS, ceux-ci communiquant avec des abonnés mobiles au même profil de consommation et utilisant souvent le SMS comme un service de messagerie instantanée. Cependant, ce comportement ne saurait être généralisé à l'ensemble des classes d'usagers.

D'autre part, l'équilibre des soldes d'interconnexion SMS en volumes apparaît en tout état de cause conditionné au fait que ces opérateurs disposent concomitamment d'offres similaires. Or rien ne garantit de constater cet équilibre en flux offre par offre, dans la mesure où peuvent apparaître des comportements différenciés selon les offres ou entre consommateurs à profil distinct.

En métropole, l'Autorité relève ainsi que les soldes d'interconnexion en volume présentent une volatilité croissante sur la période 2006-2008. Cette volatilité s'explique notamment par l'explosion des usages constatée depuis 2006 sur le marché de détail métropolitain. Cette hausse marquée des volumes consommés déséquilibre de manière significative les soldes d'interconnexion entre opérateurs dès lors que les clients des opérateurs respectifs n'ont pas les mêmes niveaux d'usages d'un opérateur à un autre. Un tel cas de figure se rencontre notamment lorsque les opérateurs lancent des offres d'abondance de manière décalée dans le temps, ou que leurs offres respectives génèrent des niveaux de consommation distincts, par exemple par le biais des profils de consommation de leurs clients ou par les caractéristiques des offres.

Ainsi, le fait que Bouygues Telecom ait lancé des offres d'abondance SMS all-net dès fin 2006 (gammes Universal Music Mobile et avantages jeunes sur l'ensemble de ses offres) sans équivalent commercial concomitant chez Orange France et SFR a fortement dégradé son solde d'interconnexion en volume en 2007 par rapport à 2006. La commercialisation d'offres d'abondance SMS all-net par SFR à partir de Noël 2007 (gamme Illimythics et forfaits bloqués) a permis de redresser le solde d'interconnexion SMS en volume entre SFR et Bouygues Telecom en 2008. Cependant, le solde d'interconnexion SMS en volume entre SFR et Orange France s'est fortement dégradé sur la période, Orange France n'ayant répliqué que tardivement (au second semestre 2008 avec les gammes Origami, les forfaits bloqués Zap et M6 Mobile).

L'impact de ce décalage commercial en matière d'offres d'abondance s'est observé également à La Réunion, où SRR a fortement dégradé son solde d'interconnexion SMS vis-à-vis des autres opérateurs en lançant les nouvelles offres NRJ Mobile au printemps 2008.

En conclusion, les soldes d'interconnexion SMS en volume sont sensibles au caractère homogène ou non des offres sur le marché de détail sous-jacent.

L'écart significatif entre la terminaison d'appel SMS et les coûts sous-jacents est ainsi de nature à créer une distorsion de concurrence envers un opérateur souhaitant lancer des offres innovantes créant un usage de SMS sortant supérieur à celui de ses concurrents.

Aujourd'hui, l'Autorité estime que les offres d'abondance commercialisées sur tous les territoires (métropole, Réunion, Antilles-Guyane) ne sont pas encore totalement homogènes entre opérateurs, en termes de contraintes associées à l'usage SMS (all-net à certaines tranches horaires, all-net 24h/24) ou de segments de clientèle touchés (prépayé, postpayé). Dès lors, les soldes d'interconnexion SMS en volume entre opérateurs devraient rester volatiles dans les prochains mois dans un processus de convergence progressive des offres actuellement proposées sur le marché.

(28) C'est-à-dire sur l'ensemble des offres de l'opérateur. (29) Le taux de rebond d'un SMS est défini comme la probabilité de recevoir un SMS en retour pour un SMS envoyé.