JORF n°0287 du 11 décembre 2007

Chapitre 6 Obligation de contrôle tarifaire

6.1. Les objectifs du contrôle tarifaire

6.1.1. Finalités et modalités de l'encadrement ― sous forme de plafond ― du tarif de la prestation de terminaison d'appel vocal mobile
Ainsi que l'Autorité l'a rappelé, la prestation de terminaison d'appel vocal mobile a un caractère de facilité essentielle, dont le tarif n'est soumis à aucune pression concurrentielle suffisante pour empêcher, en l'absence de régulation, l'opérateur mobile de le fixer à un niveau très élevé. Dès lors, les conditions d'accès à cette prestation doivent être transparentes, objectives, non discriminatoires et permettre aux compétiteurs d'exercer une concurrence effective sur les marchés avals, à travers un processus d'encadrement des niveaux de charge de terminaison d'appel au regard des structures et des niveaux de coûts pertinents, processus qui vise à les orienter à terme vers des références de coûts pertinentes. Le Conseil de la concurrence a d'ailleurs rappelé dans son avis n° 07-A-01 que « s'agissant des remèdes propres au droit de la concurrence, le Conseil a déjà souligné (avis n° 05-A-10 du 11 mai 2005) que le caractère de facilité essentielle de la terminaison d'appel sur les réseaux tiers, pour les opérateurs qui doivent faire aboutir les appels de leurs abonnés, permet d'imposer aux opérateurs de terminer les appels à des conditions transparentes, objectives et non discriminatoires. En ce qui concerne le prix auquel cette prestation doit être fournie, le droit de la concurrence exige qu'il soit orienté vers les coûts supportés par l'opérateur en monopole lorsque celui-ci utilise la même prestation pour faire des offres sur un marché aval sur lequel il est en concurrence avec les opérateurs qui veulent terminer les appels ».
L'encadrement tarifaire des niveaux des terminaisons d'appel que l'Autorité spécifie pour les opérateurs consiste à fixer des plafonds que les tarifs de ces prestations ne doivent pas dépasser. L'Autorité insiste donc sur le fait qu'elle fixe des plafonds tarifaires, qui doivent s'entendre comme des limites supérieures laissant la liberté aux opérateurs de mettre leurs tarifs, sous ces plafonds, au niveau qu'ils jugent pertinent. En particulier, il est de la seule responsabilité de l'opérateur de vérifier que ses structures tarifaires sont cohérentes entre les marchés de gros et les marchés de détail et ne l'expose pas au risque de se voir sanctionner au titre du droit commun de la concurrence pour abus sur un marché de détail connexe de sa position dominante sur le marché de gros.
La majorité des coûts des opérateurs est formée de coûts joints, c'est-à-dire communs à différentes prestations dont celle de terminaison d'appel vocal. Ces coûts sont principalement des coûts de réseau ; le réseau de l'opérateur étant unique et servant à produire de multiples produits. Le concept de coûts pris en compte par l'Autorité pour spécifier les modalités de contrôle tarifaire dépend dès lors directement des choix d'allocation qu'elle arrête pour allouer ces masses de coûts joints à l'ensemble des prestations qui les induisent, en particulier à la terminaison d'appel vocal. Par exemple, les coûts joints de boucle locale radio sont partagés entre les différentes prestations (voix entrante et sortante, SMS et MMS entrants et sortants, autres données entrantes et sortantes) au prorata de l'usage de la ressource radio. L'Autorité tient à souligner que l'imposition de plafonds tarifaires vise simplement à encadrer la part maximum des coûts joints qu'un opérateur peut recouvrer à travers la tarification de la terminaison d'appel voix ― prestation commercialisée en monopole ― ; le reste des coûts devant être recouvré sur l'ensemble des autres prestations (de détail notamment) qu'il offre et pour lequel l'opérateur est libre de sa politique tarifaire. Il n'y a donc pas de risque de non-recouvrement des coûts.
Ainsi que l'Autorité l'a indiqué plus haut, les niveaux des tarifs des terminaisons d'appel de l'ensemble des opérateurs sont soumis à un processus de plafonnement graduel de ces niveaux au regard des structures et des niveaux de coûts de référence pertinents. Les références de coûts retenues aujourd'hui pour tous les opérateurs mobiles identifiés comme puissants sur leurs marchés respectifs de terminaison d'appel, qu'ils soient soumis à une obligation d'orientation vers les coûts ou à une obligation de pratiquer des tarifs non excessifs, sont celles d'un opérateur efficace et non les propres coûts de l'opérateur. Ces références correspondent aux coûts alloués aux appels vocaux entrants, tels que spécifiés dans des décisions n° 2007-0128 et n° 2007-0129 (décisions identiques en matière de prestations de terminaison d'appel vocal mobile).
Pour rappel, la comptabilisation réglementaire des coûts se base sur l'ensemble des coûts de la comptabilité générale et analytique de l'opérateur et alloue l'intégralité des coûts aux différentes prestations selon les principes de causalité, de non-discrimination et d'auditabilité (principes rappelés au chapitre 5).
Les références de coûts d'un opérateur efficace considérées comme pertinentes par l'Autorité (et donc opposables aux opérateurs mobiles) sont aujourd'hui produites sur la base de coûts historiques, c'est-à-dire qu'ils résultent des charges telles qu'elles sont inscrites dans la comptabilité de l'opérateur et, le cas échéant, après certains retraitements (comme le remplacement des frais financiers par la rémunération du capital). En particulier, les actifs figurent avec leur valeur historique selon les règles comptables en vigueur.
Les références de coûts considérées comme pertinentes par l'Autorité sont celles correspondant à un opérateur considéré comme efficace. La notion d'efficacité repose notamment sur des hypothèses de déploiement efficace d'un réseau (par exemple en termes de choix technologiques) ainsi que de niveaux de coûts de déploiement et d'utilisation du réseau efficaces. La notion d'efficacité est également associée à des caractéristiques de l'opérateur en termes de demande moyenne par client et de part de marché détenue. Ainsi, si l'Autorité est susceptible d'apprécier, de manière préalable à la fixation des plafonds relatifs aux tarifs de terminaison d'appel, les références de coûts constatés et donc supportés par un opérateur, l'Autorité se réserve la possibilité de ne pas prendre en compte certains coûts supportés par l'opérateur, qui, bien que dans le périmètre des coûts pertinents, ne correspondraient pas à l'activité d'un opérateur efficace. Elle tient ainsi à ne pas autoriser un opérateur à recouvrer, sur la prestation de terminaison d'appel, des surcoûts dus, en tout ou partie, à des inefficacités (par exemple une absence d'effets d'échelle) de son ressort.
A ce jour, et sans que cela ne préjuge de l'évolution future du périmètre des coûts pertinents pour la prestation de terminaison d'appel, l'Autorité considère que les coûts pertinents correspondent à ceux d'un appel entrant moyen, c'est-à-dire à la moyenne pondérée (par les volumes d'appels) des coûts des communications entrantes intraterritoriales, internationales ou interterritoires abouties ou non abouties, tels que définis dans les décisions n° 2007-0128 et n° 2007-0129.
La notion de coût retenue est une notion de coûts complets, la méthode d'allocation retenue étant une « Fully Distributed Costs » (FDC). Les coûts pertinents incluent donc :
― les coûts de réseau alloués à l'usage à la prestation de terminaison d'appel. Plus particulièrement, ils incluent les coûts de licence 2G et/ou 3G (pour la partie utilisée par la prestation de terminaison d'appel vocal) ou les coûts de messagerie vocale (pour la part utilisée lors du dépôt d'un message, conformément au principe de causalité et dans la mesure où la prestation de terminaison d'appel couvre entre autres les appels entrants aboutissant sur messagerie) ;
― les coûts commerciaux spécifiques, à savoir ceux qui sont directement induits par la prestation de terminaison d'appel vocal mobile (par exemple les coûts d'édition et d'envoi de factures d'interconnexion) ;
― les coûts communs, qui par nature correspondent à une activité utile à l'ensemble des produits (gros et détail compris) et qui ne peuvent être alloués, à l'aide d'une clé d'allocation d'usage, à une ou à des prestations spécifiques. Les coûts communs sont par exemple formés des coûts de siège. Le choix de l'Autorité est de les faire allouer à l'ensemble des prestations au prorata des autres coûts, c'est-à-dire sous la forme d'une majoration proportionnelle aux coûts de réseau et aux coûts commerciaux du service considéré : le principe d'allocation est appelé clé EPMU (Equi-Proportionate Mark-Up).
L'Autorité considère donc en particulier que les coûts suivants sont hors du périmètre des coûts pertinents :
― les coûts commerciaux de détail (même sous la forme d'une éventuelle externalité de réseau) ;
― les coûts de consultation de messagerie vocale ;
― les coûts associés au besoin en fonds de roulement.
En ce qui concerne l'absence de prise en compte des coûts commerciaux de détail (et notamment sous la forme d'une éventuelle externalité de réseau), cette question a fait l'objet d'une argumentation détaillée dans les décisions n° 2004-937, n° 2004-938, n° 2004-939, n° 2005-0112 et n° 2005-0113 du précédent cycle d'analyse de marché. L'Autorise renvoie à ces décisions pour le détail des raisons, avancées alors, justifiant l'exclusion de ces charges et confirme son raisonnement motivé par :
― le respect du principe de neutralité vis-à-vis des opérateurs fixes ;
― la faible justification d'une telle externalité dans un marché mature ;
― la complexité de la mesure d'une telle externalité et son niveau a priori très faible ;
― les risques de distorsion concurrentielle qui résulteraient de sa prise en compte.
Au sujet de l'exclusion des coûts de consultations de messagerie vocale, l'Autorité a noté que la France se distingue en Europe par le fait que cette consultation est gratuite pour l'appelé. Certains opérateurs mobiles affirment donc qu'il faudrait recouvrer les coûts de consultation sur la prestation de terminaison d'appel, donc in fine, sur l'appelant. L'Autorité ne souscrit pas à cette vision, car elle considère que l'utilité de la messagerie vocale est partagée entre l'appelant, qui peut laisser un message, et l'appelé qui peut consulter ce message. D'ailleurs, l'Autorité note que si l'appelé ne trouvait pas d'utilité propre dans le fait d'avoir une messagerie vocale, il pourrait la désactiver. Le fait que l'opérateur propose ce service gratuitement à son client n'induit donc nullement qu'il est légitime de recouvrer les coûts de ce service « gratuit » sur l'appelant. De plus, l'Autorité souligne que l'opérateur de l'appelé bénéficie pleinement de l'image positive associée à cette gratuité (illustrée par la promotion de cette fonctionnalité dans les offres commerciales) et à ce titre, elle ne peut pas considérer que c'est à l'opérateur de l'appelant, qui ne bénéficie pas de cet avantage d'image de marque, de payer pour cette prestation. Enfin, il est utile de rappeler que cette prestation de consultation de la messagerie vocale existe sur le marché fixe et est également proposée de manière gratuite par les opérateurs fixes (ou incluse dans le prix de détail de l'accès), sans que pour autant elle n'ait jamais été incluse dans le périmètre des coûts pertinents de terminaison d'appel fixe. Ainsi, il serait parfaitement incohérent de faire payer aux clients des opérateurs fixes la consultation des messages qu'ils déposent sur les messageries de leurs correspondants mobiles, alors que la réciproque ne serait pas vérifiée.
Dans sa contribution à la consultation publique lancée le 24 juillet 2007, Orange Caraïbes « s'étonne que l'Autorité ne tienne pas compte des coûts de la messagerie vocale » et estime que « l'Autorité pourrait fausser son appréciation en ce qui concerne le coût réseau réel et pénaliser Orange Caraïbes quant à la juste détermination du niveau de TA ».
S'agissant de la prise en compte des coûts de messagerie vocale dans le périmètre des coûts pertinents de terminaison d'appel, l'Autorité considère qu'aucun élément nouveau ne justifie de modifier son analyse. Toutefois, elle indique que, dans le cadre d'un travail d'harmonisation européenne, le périmètre des coûts pertinents retenu par l'Autorité pour la terminaison d'appel pourrait être amené à évoluer en cohérence avec les futurs principes fixés au niveau européen.
En ce qui concerne l'absence de prise en compte du Besoin en Fonds de Roulement (BFR), l'Autorité rappelle que deux des trois opérateurs mobiles métropolitains se déclarent incapables de le mesurer. Orange Caraïbes et SRR ne s'expriment pas sur le sujet. SFR, seul opérateur à demander sa prise en compte, a manqué de précision dans son évaluation, comme cela a été souligné par l'auditeur qui a émis une observation jugeant que « les hypothèses retenues afin de répartir les coûts de rémunération du BFR par activité pourraient être affinées, certains coûts étant susceptibles d'être affectés de manière plus précise sur les activités et/ou sur les différents éléments de réseau » (décision n° 2006-1087 en date du 24 octobre 2006). De plus, si le calcul du BFR est pertinent d'un point de vue financier, l'Autorité émet de sérieux doutes quant à sa pertinence économique.
En effet, sa prise en compte présente la particularité suivante : plus les rémunérations associées aux terminaisons d'appel sont élevées, et donc plus les profits sont élevés, plus les coûts associés au BFR sont importants ; ces coûts étant directement reliés aux délais de paiement des charges de terminaison d'appel et à la rémunération du capital pendant ce délai. Le niveau du tarif de terminaison d'appel semble donc avoir de manière surprenante un effet démultiplicateur sur le coût relatif au BFR qui serait susceptible d'être pris en compte dans le coût pertinent pour la terminaison d'appel. De plus, l'Autorité note que les délais de paiement sont sous le contrôle de l'opérateur qui les négocie dans ses conventions d'interconnexion. Enfin, l'Autorité doute de la pertinence de considérer le BFR pour une activité prise séparément, la vente de terminaison d'appel, sans tenir compte de l'activité d'achat de terminaison d'appel pour laquelle l'opérateur paie également avec un certain délai ses charges d'interconnexion. Le besoin en fonds de roulement devrait être apprécié globalement sur l'ensemble de l'activité « interconnexion » (entendu comme entrante et sortante) de l'opérateur. A cela devrait être ajouté le BFR négatif créé par l'activité de déploiement du réseau.
Par ailleurs, la pertinence économique du BFR dérive du fait qu'une entreprise doit immobiliser des biens intermédiaires (matières premières, produits intermédiaires,...) qui sont directement nécessaires pour la production du bien commercialisé. Le décalage temporel entre le paiement de ses intrants et l'encaissement du produit de la vente du bien commercialisé génère un besoin en fonds de roulement. Au cas d'espèce, la production d'une minute supplémentaire de terminaison d'appel mobile ne nécessite aucun achat d'intrant. La pertinence économique de la prise en compte d'un BFR n'est donc pas établie.
En conclusion, l'Autorité considère que le BFR ne doit pas être pris en compte dans le périmètre des coûts alloués à la prestation de terminaison d'appel.
Comme indiqué au chapitre 5, l'Autorité rappelle que si la méthode retenue à ce jour est une approche en coûts complets, elle considère qu'il pourrait être nécessaire de revisiter à terme ce concept afin d'adopter une méthodologie cohérente utilisée dans la mise en œuvre de la régulation des terminaisons d'appel, qu'il s'agisse de terminaison d'appel fixe ou de terminaison d'appel mobile.

6.1.2. Deux obligations de contrôle tarifaire possibles relatives
à l'encadrement des niveaux de terminaison d'appel

La directive 2002/19/CE du Parlement européen et du Conseil (directive « Accès ») stipule qu'« un contrôle des prix peut se révéler nécessaire lorsque l'analyse d'un marché donné met en évidence un manque d'efficacité de la concurrence. Les autorités réglementaires nationales peuvent intervenir de manière relativement limitée, par exemple en imposant une obligation concernant la fixation de prix raisonnables pour la sélection de l'opérateur, comme le prévoit la directive 97/33/CE, ou de manière beaucoup plus contraignante, en obligeant, par exemple, les opérateurs à orienter les prix en fonction des coûts afin qu'ils soient entièrement justifiés lorsque la concurrence n'est pas suffisamment vive pour éviter la tarification excessive. »
L'article L. 38-I (4°) du code des postes et des télécommunications électroniques prévoit que l'Autorité peut imposer « de ne pas pratiquer de tarifs excessifs ou d'éviction sur le marché en cause et pratiquer des tarifs reflétant les coûts correspondants ».
Ainsi, l'Autorité note que la totalité des pays de l'Union européenne qui ont notifié leur analyse du marché 16 (soit 26 pays) ont imposé une obligation de contrôle tarifaire à leurs opérateurs consistant à imposer des plafonds tarifaires.
En France, l'Autorité envisage de maintenir les deux types d'obligations de contrôle tarifaire qui sont aujourd'hui imposées aux opérateurs : obligation de pratiquer des tarifs reflétant les coûts associés ou obligation de pratiquer des tarifs non excessifs suivant les cas. Ces deux obligations permettent d'atteindre l'objectif de plafonner les tarifs suivant des modalités et des coûts de mise en œuvre différents qui permettent de prendre en compte les disparités entre opérateurs.
L'obligation de pratiquer des tarifs reflétant les coûts :
Cette obligation d'orientation des prix vers les coûts permet d'éviter que les opérateurs profitent d'une situation monopolistique pour en tirer une rente. La mise en œuvre de cette obligation est associée à l'obligation de comptabilisation des coûts pour permettre à l'Autorité de mettre en place un référentiel de coût d'un opérateur efficace robuste.
Ainsi, cette obligation est prévue dans la directive 2002/19/CE du Parlement européen et du Conseil de l'Union européenne (directive « Accès ») : « Les autorités réglementaires nationales peuvent, conformément aux dispositions de l'article 8, imposer des obligations liées à la récupération des coûts et au contrôle des prix, y compris les obligations concernant l'orientation des prix en fonction des coûts et les obligations concernant les systèmes de comptabilisation des coûts, pour la fourniture de types particuliers d'interconnexion et/ou d'accès, lorsqu'une analyse du marché indique que l'opérateur concerné pourrait, en l'absence de concurrence efficace, maintenir des prix à un niveau excessivement élevé, ou comprimer les prix, au détriment des utilisateurs finals. Les autorités réglementaires nationales tiennent compte des investissements réalisés par l'opérateur et lui permettent une rémunération raisonnable du capital adéquat engagé, compte tenu des risques encourus. »
La majorité des régulateurs de l'Union européenne adoptent cette obligation d'orientation vers les coûts dans le cadre de la régulation du marché de la terminaison d'appel vocal mobile.
L'obligation de pratiquer des tarifs non excessifs :
L'Autorité trouve également justifié de limiter les obligations imposées à certains opérateurs en matière de contrôle des prix à celle de « ne pas pratiquer de tarifs excessifs ».
L'Autorité avait déjà imposé l'obligation de ne pas pratiquer de tarifs excessifs lors de ses précédentes analyses (29), en accord avec la Commission européenne (30).
L'appréciation de la non-excessivité suit une approche similaire pour la terminaison d'appel vocal mobile que pour la terminaison d'appel fixe.
Il est à noter qu'il ne s'agit pas d'une approche dérivant uniquement des caractéristiques propres de l'opérateur, mais qui se fonde aussi sur les risques potentiels de distorsion concurrentielle découlant des différences entre les tarifs des terminaisons d'appel vocal des différents opérateurs. Dès lors, l'Autorité apprécie le caractère non excessif des tarifs de terminaison d'appel vocal mobile entre autres au regard de leurs niveaux absolus, notamment en rapprochant ces valeurs des références de coûts considérées comme pertinentes par l'Autorité pour la fourniture des prestations de gros de terminaison d'appel (cf. 6.1.1), qu'un opérateur dit efficace est amené à supporter. Ainsi que l'Autorité l'a rappelé dans la section précédente, à terme, les prix des charges de terminaison d'appel doivent converger vers les coûts d'un opérateur efficace, et ce indépendamment du type d'obligations de contrôle tarifaire auquel l'opérateur est soumis. Ainsi, les écarts de niveaux admis dans ce présent projet de décision n'ont de légitimité que dans leur caractère transitoire et ne sauraient donc se pérenniser et doivent être appréciés en référence aux autres niveaux tarifaires des opérateurs concurrents.
Concernant ce dernier point, le caractère excessif s'apprécie également au regard des écarts de tarifs de gros qui peuvent ainsi exister entre les différents opérateurs, en particulier entre ceux soumis à une obligation d'orientation vers les coûts et ceux soumis à une obligation de non-excessivité de leurs tarifs de terminaison d'appel vocal mobile. A ce titre, l'Autorité avait estimé dans une décision (31) de règlement de différend entre Neuf Télécom et France Télécom, relative à la fixation d'un prix de terminaison d'appel non excessif, que l'application de la notion de prix non excessifs pouvait se traduire par la nécessité de « limiter l'écart entre le tarif de la terminaison d'appel de Neuf Télécom et celui de France Télécom et donc de fixer le tarif de la prestation de terminaison d'appel de Neuf Télécom en référence à la structure de tarification de France Télécom » de façon à limiter les éventuelles distorsions concurrentielles pouvant exister sur les marchés de détail sous-jacents.

(29) Pour rappel, les opérateurs alors concernés par l'obligation de ne pas pratiquer des prix excessifs étaient Dauphin Télécom, Digicel, Orange Réunion et SPM Télécom depuis début 2005 et Outremer Télécom depuis mi 2007. (30) Cas FR/2004/0120 : terminaison d'appel vocal sur les réseaux mobiles individuels d'outre-mer ― Observations conformément à l'article 7, paragraphe 3, de la directive 2002/21/EC en date du 19 janvier 2005 et cas FR/2007/0596 : terminaison d'appel vocal sur les réseaux mobiles individuels ― Départements français d'outre-mer en date du 15 mars 2007. (31) Décision n° 2006-0551 en date du 30 mai 2006.

6.1.3. La prévisibilité pour le secteur

Les tarifs de terminaison d'appel vocal mobile sont très structurants pour le secteur. En effet, les acheteurs de cette prestation doivent connaître avec un préavis raisonnable ces niveaux pour construire leurs offres de détail. A cet égard, même si les opérateurs ont la possibilité de modifier leurs offres de détail afin de maintenir leur équilibre économique, ces modifications comportent un risque important pour les opérateurs dans la mesure où elles sont particulièrement coûteuses et notamment rendent possible la résiliation sans pénalité par les consommateurs des contrats pour lesquels les conditions contractuelles sont modifiées, conformément à l'article L. 121-84 du code de la consommation (32). Les modifications des conditions générales de vente des contrats déjà en vigueur restent par conséquent délicates à mettre en œuvre dans un marché mobile où l'équilibre économique des offres repose couramment sur des clauses de durée d'engagement minimal. Ces éléments justifient donc un horizon long, pluriannuel, sur lequel les niveaux de terminaison doivent être fixés, ainsi que, le cas échéant, la définition de délais de préavis en cas de modification de gradients horaires par un offreur de terminaison d'appel.
En outre, sur un plan financier, compte tenu du niveau élevé des tarifs de cette prestation, l'impact de ces tarifs sur les vendeurs aussi bien que sur les acheteurs est particulièrement structurant.
L'importance d'une visibilité donnée au secteur à travers une prévisibilité des tarifs de cette prestation s'inscrit de manière pleinement cohérente avec les objectifs assignés à l'Autorité, notamment celui de veiller « à l'exercice au bénéfice des utilisateurs d'une concurrence effective et loyale entre les exploitants de réseau et les fournisseurs de services de communications électroniques ; au développement de [...] l'investissement efficace dans les infrastructures [...] ».
Les acteurs eux-mêmes sont demandeurs d'une telle prévisibilité sur ces tarifs. En effet, ils l'ont fortement sollicité, d'une part, lors d'auditions du collège de l'Autorité dans le cadre de l'exercice de fixation des niveaux de terminaison d'appel du nouveau cycle d'analyse des marchés métropole et DOM et, d'autre part, dans le cadre de leurs réponses à la première consultation publique. Ainsi, Orange Caraïbes, dans sa réponse à cette consultation publique, souligne l'importance de la prévisibilité, et notamment par la « fixation d'un prix plafond, donnant ainsi une visibilité certaine sur l'appréciation du caractère excessif de la charge de terminaison d'appel ».
C'est pourquoi l'Autorité s'attache à donner le maximum de prévisibilité au secteur :
― en définissant des plafonds tarifaires explicites dans le cas de l'obligation de pratiquer des tarifs reflétant les coûts ;
― en explicitant selon l'opérateur la portée de l'obligation de non-excessivité qu'elle impose. L'Autorité rappelle que cet effort de prévisibilité est en parfaite cohérence avec l'avis du Conseil de la concurrence qui souligne qu'« une telle prévisibilité peut être apportée par la régulation ex ante interdisant à des opérateurs de pratiquer des prix excessifs. Par ailleurs, les missions confiées par la loi à l'autorité de régulation sectorielle lui permettent de déterminer un prix non excessif, par référence à des objectifs spécifiques [notamment] à l'article L. 32-1 du CPCE ».
Le Conseil de la concurrence, conscient de cette nécessaire prévisibilité, a d'ailleurs insisté sur la capacité propre de l'Autorité à pouvoir contribuer à cette prévisibilité, capacité dont ne dispose pas le Conseil de la concurrence. Tandis que « l'appréhension par le droit de la concurrence des prix abusivement élevés ne peut se faire qu'au terme d'une analyse ex post et à l'issue d'une procédure contentieuse qui, par nature, offre peu de prévisibilité aux acteurs des marchés concernés », « une telle prévisibilité peut [au contraire] être apportée par la régulation ex ante interdisant à des opérateurs de pratiquer des prix excessifs ».
La majorité des opérateurs, dans leurs contributions à la consultation publique lancée le 24 juillet 2007, estime comme SRR que « l'ARCEP apporte une réponse au manque de visibilité sur l'évolution des terminaisons d'appel en donnant les niveaux pour lesquels les tarifs seraient considérés comme excessifs ».
Seul un opérateur estime que les baisses qui lui sont imposées sont « largement supérieures aux baisses prévisibles lorsqu'il a investi et ce, sans que l'ARCEP n'ait jamais communiqué jusqu'à présent sur ce changement de politique, ce qui remet dès lors totalement en cause les principes de prévisibilité et de sécurité juridique [...] ». L'Autorité tient à souligner à cet égard qu'il s'agit d'une mauvaise interprétation de la notion de prévisibilité qui ne vise pas à répondre aux attentes des opérateurs en matière de régulation tarifaire, mais à donner une visibilité sur les tarifs plafonds applicables aux opérateurs dans le futur.
Par ailleurs, à la suite des remarques de la Commission européenne transmises le 13 septembre 2007 portant sur l'horizon temporel du price cap et auxquelles elle adhère, l'Autorité réduit cet horizon temporel, prévu initialement pour trois ans, à vingt-quatre mois tout en réaffirmant son attachement à donner une prévisibilité maximale aux acteurs (cf. 6.2.3).

(32) Article L. 121-84 du code de la consommation : « Tout projet de modification des conditions contractuelles de fourniture d'un service de communications électroniques est communiqué par le prestataire au consommateur au moins un mois avant son entrée en vigueur, assorti de l'information selon laquelle ce dernier peut, tant qu'il n'a pas expressément accepté les nouvelles conditions, résilier le contrat sans pénalité de résiliation et sans droit à dédommagement, jusque dans un délai de quatre mois après l'entrée en vigueur de la modification. Pour les contrats à durée déterminée ne comportant pas de clause déterminant précisément les hypothèses pouvant entraîner une modification contractuelle ou de clause portant sur la modification du prix, le consommateur peut exiger l'application des conditions initiales jusqu'au terme de la durée contractuelle. Toute offre de fourniture d'un service de communications électroniques s'accompagne d'une information explicite sur les dispositions relatives aux modifications ultérieures des conditions contractuelles. »

6.2. Prestation d'acheminement
du trafic de terminaison
6.2.1. Deux obligations visant un même objectif

Les obligations d'orientation vers les coûts et de ne pas pratiquer un tarif excessif sont deux instruments qui visent le même objectif, celui de pouvoir orienter à terme les tarifs des prestations en cause vers des références de coûts pertinentes.
En effet, comme l'Autorité l'a exposé au chapitre 3, chaque opérateur mobile dispose d'une position de puissance sur son propre marché de terminaison d'appel vocal mobile sur son réseau. L'analyse de la puissance sur ces marchés développée dans ce chapitre a montré que ces prestations sont incontournables pour l'ensemble des opérateurs de communications électroniques souhaitant terminer un appel vers un numéro que l'opérateur considéré a ouvert à l'interconnexion, et que dès lors, ils ne disposent d'aucun contre-pouvoir sur la fixation du tarif de la prestation de terminaison d'appel que l'opérateur offre. C'est dans ce sens que le Conseil de la concurrence a qualifié ces prestations de « facilités essentielles ». C'est ainsi que l'Autorité relève un risque de distorsion concurrentielle découlant de la présence d'un opérateur non régulé sur un marché mobile où opèrent d'autres acteurs eux-mêmes régulés (cf. 4.2.1).
L'Autorité considère que l'absence d'obligation de contrôle tarifaire plafonnant les tarifs de chacun des opérateurs mobile de l'outre-mer est susceptible de permettre à ceux-ci de bénéficier d'une rente liée à leur position monopolistique sur les marchés de gros en cause, ce qui pourrait soulever de nombreux problèmes concurrentiels (cf. chapitre 4) et entraverait notamment l'exercice d'une concurrence effective sur les marchés de détail sous-jacents.
Par ailleurs, l'Autorité estime nécessaire de prendre en compte la taille tant relative qu'absolue des différents acteurs dans le choix de modalité de contrôle tarifaire, i.e. orientation vers les coûts avec obligation comptable versus tarif non excessif. La première modalité permet de mettre en œuvre une régulation plus efficace car elle multiplie notamment les sources de données comptables réglementaires et permet ainsi de mieux estimer la référence de coût efficace applicable à terme à tous les acteurs sur une zone donnée. Néanmoins, une telle modalité de contrôle induit un coût fixe de mise en œuvre pour l'opérateur relativement indépendant de sa taille et donc plus difficile à assumer pour un acteur de petite taille. L'Autorité estime donc proportionné d'imposer cette modalité de contrôle tarifaire aux seuls opérateurs Orange Caraïbes et SRR et d'imposer une obligation de tarif non excessif aux autres opérateurs. Comme exposé ci-avant, cette dernière modalité ne diffère pas dans sa finalité, c'est-à-dire imposer un plafond tarifaire sur la base d'une référence de coût unique d'un opérateur efficace, mais constitue une modalité de mise en œuvre plus souple et mieux adaptée à des opérateurs de taille réduite.
En conséquence, l'Autorité estime, d'une part, que les tarifs des prestations de terminaison d'appel vocal mobile d'Orange Caraïbes et de SRR doivent refléter les coûts correspondants et être soumis à un encadrement tarifaire sous la forme d'un plafond de niveau de terminaison d'appel et, d'autre part, que les tarifs des prestations de terminaison d'appel vocal mobile de Orange Réunion, Dauphin Télécom, Digicel, Outremer Télécom, SPM Télécom et UTS Caraïbes doivent répondre à une obligation de ne pas pratiquer un tarif excessif.

6.2.2. Les référentiels de coûts utilisés par l'Autorité
pour les opérateurs exerçant dans les DOM

Les états de comptabilisation des coûts et de revenus élaborés selon le référentiel de comptabilité réglementaire spécifié par l'Autorité
Ces restitutions réglementaires forment la référence principale de coûts utilisée par l'Autorité dans la mesure où ils constituent une référence de coûts fiable, i.e. la comptabilité sociale de l'entreprise soumise au contrôle des commissaires aux comptes de l'entreprise.
Spécifications du système de comptabilisation des coûts et de restitution des coûts :
La décision n° 2007-0129 en date du 5 avril 2007 est la décision venant spécifier les obligations de comptabilisation et de restitution des coûts, notamment de séparation comptable imposées à Orange Caraïbes et à SRR en raison de leur influence significative sur les marchés de gros des terminaisons d'appels mobiles voix sur leur réseau respectif. C'est cette décision qui leur sera opposable pour la production de leurs comptes relatifs aux exercices 2006 et 2007. Elle complète la décision n° 2005-0960 de l'Autorité en date du 8 décembre 2005 en clarifiant ou amendant des points déjà spécifiés.
Les comptes relatifs à l'exercice 2005 ont, eux, été élaborés conformément aux spécifications définies dans l'annexe A de la décision n° 2005-0960 en date du 8 décembre 2005, à partir du format des fiches de restitution mises en annexe de cette même décision.
Avant l'adoption de la décision n° 2005-0960, ces opérateurs mobiles des DOM transmettaient à l'Autorité des rapports de comptes, selon des modalités et un format définis en annexe de la décision n° 2001-458 en date du 11 mai 2001 portant adoption de lignes directrices relatives aux conditions tarifaires d'interconnexion des opérateurs mobiles puissants sur le marché national de l'interconnexion. Orange Caraïbes et SRR ont ainsi transmis à l'Autorité des rapports de comptes pour les années 2002 et 2003.
Enfin, l'Autorité avait laissé le choix du référentiel réglementaire à ces opérateurs pour l'élaboration des comptes relatifs à l'exercice 2004 entre l'ancien référentiel (décision n° 2001-458) et le cadre tout récemment entré en vigueur (décision n° 2005-960). Orange Caraïbes a fait le choix d'élaborer ses comptes relatifs à l'exercice 2005 conformément à la décision n° 2005-0960, tandis que SRR a fait le choix de les élaborer conformément à la décision n° 2001-458.

Travaux d'audit

Les comptes élaborés en application des obligations de comptabilisation des coûts et de séparation comptable imposées à ces deux opérateurs n'ont pas encore été audités, contrairement à la métropole.

L'analyse comparative au niveau européen
publiée par le GRE

Le Groupe des régulateurs européens publie une comparaison internationale des niveaux de terminaison d'appel sur une base biannuelle
Les membres du Groupe des régulateurs indépendants (GRI) sont invités à participer à cette comparaison :
― l'ensemble des 27 pays membres de l'Union européenne (l'Allemagne, l'Autriche, la Belgique, la Bulgarie, Chypre, le Danemark, l'Espagne, l'Estonie, la Finlande, la France, la Grèce, la Hongrie, l'Irlande, l'Italie, la Lettonie, la Lituanie, le Luxembourg, Malte, les Pays-Bas, la Pologne, le Portugal, la République slovaque, la République tchèque, la Roumanie, le Royaume-Uni, la Slovénie, la Suède) ;
― les trois Etats membres de l'Espace Economique Européen (EEE) que sont l'Islande, le Liechtenstein et la Norvège et qui mettent en œuvre le même cadre réglementaire pour le secteur des communications électroniques que les pays membres de l'Union européenne ;
― la Suisse, seul membre de l'Association Européenne de Libre Echange, non membre de l'EEE, et qui à ce titre ne met pas en œuvre le cadre réglementaire ;
― ainsi que la Croatie, la Turquie, en tant que pays candidats à l'entrée dans l'Union européenne.
La majorité de ces pays a décidé d'imposer une obligation d'orientation des niveaux de terminaison d'appel vers les coûts ou de réguler la terminaison d'appel en référence aux tarifs pratiqués par d'autres pays européens. L'Autorité considère donc que les niveaux de terminaison d'appel correspondant à l'encadrement tarifaire imposé par la majorité des régulateurs constituent, sous réserve de certaines spécificités nationales structurantes, des références de coûts pertinentes. Les éléments de comparaison européenne publiés par le GRE peuvent donc être de nature à éclairer, à travers l'illustration de la mise en œuvre dans les autres pays européens de l'obligation d'orientation des tarifs de terminaison d'appel vers les coûts, les références de coûts relatives aux opérateurs de métropole, qui seront prises en compte dans les décisions de contrôle tarifaire.
Les principales hypothèses de la méthodologie retenue dans le cadre des travaux du GRI sont les suivantes :
― l'analyse comparative a pris comme référence les charges d'interconnexion relatives au trafic fixe vers mobile (qui sont dans certains pays différentes des charges d'interconnexion relatives au trafic mobile vers mobile) ;
― un appel d'une durée de trois minutes a été retenu pour le calcul des niveaux moyens de terminaison d'appel mobile dans chaque pays. Le calcul prend donc en compte l'existence d'éventuelles charges d'établissement d'appel, de crédit temps ou de minute indivisible ;
― le calcul du niveau moyen de terminaison d'appel prend en compte un appel de trois minutes, passé en heures pleines (« peak »), ou en heures creuses (« off peak ») (33). Ce calcul prend en compte le ratio du nombre d'appels passés en heures pleines sur le nombre d'appels passés en heures creuses, communiqué par l'ARN concernée. A défaut, un ratio « peak/off peak » (34) de 1 est appliqué ;
― le niveau moyen de terminaison d'appel calculé au niveau national correspond à la moyenne des niveaux moyens de terminaison d'appel calculée pour chaque opérateur actif dans le pays pondérés par le nombre respectif de clients.
L'ensemble des comparaisons européennes publiées et disponibles sur le site du GRE (à l'adresse suivante : http://irgis.anacom.pt/site/en/) s'appuie sur des informations collectées auprès des différentes ARN concernées.
Les informations transmises par les régulateurs portent quasi systématiquement sur l'encadrement des tarifs de terminaison d'appel tel qu'envisagé par le régulateur. Ainsi, en cas d'appel contre une décision prise par le régulateur à caractère suspensif, comme c'est actuellement le cas en Suède contre les décisions d'encadrement tarifaire des tarifs de terminaison d'appel mobile adoptées par le régulateur PTS, le niveau de terminaison d'appel moyen affiché pour la Suède à travers l'analyse comparative du GRE diffère des tarifs que les opérateurs pratiquent réellement entre eux et qu'ils peuvent fixer librement, en l'absence d'un contrôle tarifaire qui leur soit opposable.

(33) Et éventuellement pendant les week-ends. (34) Ou un ratio « peak, off-peak et weekend » de 50 %, ― 25 %, ― 25 %.

Vous pouvez consulter le tableau dans le
JOn° 287 du 11/12/2007 texte numéro 67

Les taux de change utilisés pour calculer en euros les niveaux de tarifs de terminaison d'appel moyens transmis par les ARN des pays n'ayant pas encore adopté l'euro sont indiqués dans le tableau ci-dessous :

| COUNTRY | 1 EURO = | |------------|-----------| | Bulgaria. |1,9558 BGN | | Cyprus. |0,5715 CYP | | Czech rep. |29,0450 CZK| | Denmark. | 7,46 DKK | | Estonia. |15,6466 EEK| | Hungary. |251,18 HUF | | Iceland. |85,1858 ISK| | Latvia. |0,7028 LVL | | Lithuania. |3,4528 LTL | | Malta. |0,4293 MTL | | Norway. |8,2780 NOK | | Poland. |3,8287 PLN | | Romania. |3,3817 RON | |Slovak Rep. |34,7210 SKK| | Slovenia. |239,64 SIT | | Sweden. |9,0325 SEK | |Switzerland.|1,6146 CHF | | UK. |0,6944 GBP | | Turkey. |1,8135 YTL |

Le positionnement de la France dans cette analyse comparative ne représente bien évidemment pas le cas spécifique des marchés de la terminaison d'appel d'outre-mer qui ne sont pas isolés en tant que tel. Sur la période 2005-2007, les terminaisons d'appel des opérateurs mobiles d'outre-mer soumis à l'obligation d'orientation vers les coûts ont baissé de près de 50 %. Leur positionnement au niveau européen n'a cependant pas évolué significativement et reste parmi les plus chers de toute l'Europe en 2007, sans que cela soit justifié par les structures de coût sous-jacentes.

Analyse des coûts de terminaison
d'appel vocal mobile des opérateurs d'outre-mer

Les opérateurs Dauphin Télécom et Outremer Télécom estiment que le niveau de terminaison d'appel s'apprécie au regard des coûts effectivement supportés par les opérateurs.
D'ailleurs, Dauphin Télécom détaille dans sa réponse à la consultation publique lancée le 24 juillet 2007 les différents coûts qu'il supporte (i.e. ouverture de nouvelles agences commerciales, coût de la mise en œuvre de la portabilité des numéros mobiles, etc.). A cet égard, l'Autorité souhaite rappeler à l'opérateur que les coûts qu'il énonce ne sont pas pertinents pour la prestation de terminaison d'appel et sont donc exclus du périmètre de coûts correspondant pris en compte pour la tarification de cette prestation.
De surcroît, Dauphin Télécom souligne que le Conseil de la concurrence et la Commission européenne rappellent « de façon constante que la non-excessivité des terminaisons d'appel des opérateurs mobiles s'évalue en vertu d'une méthode qui doit être fondée sur les coûts effectivement supportés par un opérateur ». L'opérateur Outremer Télécom estime que l'analyse de l'Autorité diverge de celle de la Commission européenne qui, selon l'opérateur, avait estimé, dans le cadre de l'analyse de la terminaison d'appel de cet opérateur que l'asymétrie des niveaux de terminaisons d'appel pourrait être justifiée par « des différences objectives de coûts de réseau » ou encore « des différences de coûts objectifs ».
L'Autorité tient à rappeler à cet égard qu'à terme les terminaisons d'appel de l'ensemble des opérateurs doivent converger vers les références de coûts considérées comme pertinentes par l'Autorité qui sont celles correspondant à un opérateur considéré comme efficace, même si de manière transitoire, l'Autorité peut prendre en compte dans la spécification des obligations tarifaires imposées aux opérateurs les différences de coûts effectivement supportées par les opérateurs découlant, par exemple, de différences d'effets d'échelle. Ainsi qu'elle l'a rappelé en section 6.1.1, l'Autorité se réserve toutefois la possibilité de ne pas prendre en compte certains coûts supportés par l'opérateur qui, bien que dans le périmètre des coûts pertinents, ne correspondraient pas à l'activité d'un opérateur efficace. Elle tient ainsi à ne pas autoriser un opérateur à recouvrer, sur la prestation de terminaison d'appel, des surcoûts dus, pour tout ou partie, à des inefficacités (par exemple une absence d'effets d'échelle) de son ressort. Cette analyse qui consiste à ne prendre en compte les surcoûts liés à l'absence d'effets d'échelle que de manière transitoire est pleinement cohérente avec l'avis de la Commission européenne qui dans ses nombreuses lettres de commentaires rappelle que : « Dans certains cas exceptionnels, une asymétrie pourrait se justifier par des différences objectives de coûts dont l'opérateur concerné n'a pas la maîtrise. Les différences de coûts entre l'exploitation d'un réseau GSM900 et d'un réseau DCS180011 pourraient constituer des motifs valables ou aussi des différences significatives de date d'entrée sur le marché. En outre, le fait qu'un opérateur mobile soit entré sur le marché plus tard et a donc une part de marché plus petite ne peut justifier un tarif de terminaison plus élevé que pour une période transitoire limitée. Le maintien d'un tarif de terminaison plus élevé ne serait pas justifié après une période suffisamment longue pour que l'opérateur s'adapte aux conditions de marché et devienne efficace ; elle pourrait même décourager les petits opérateurs de chercher à accroître leur part de marché. »
Orange Caraïbes rappelle qu'il est nécessaire de prendre en considération les surcoûts liés aux DOM et regrette que « l'Autorité n'ait pas pris en compte dans son processus de décision les surcoûts liés à la situation géographique domienne [...] ».
La Commission européenne est à ce titre consciente de l'éventuelle existence de différences de coûts entre la métropole et les DOM, dans la mesure où « les ORM actifs dans les territoires d'outre-mer français opèrent dans des conditions qui ne sont pas nécessairement comparables à celles de la France métropolitaine ou d'autres Etats membres de l'UE [tout en soulignant] qu'elle est néanmoins convaincue du fait que les principes définis pour une réglementation efficace des TTM s'appliquent également aux territoires d'outre-mer français ».
Suite à la remarque d'Orange Caraïbes, l'Autorité répond qu'elle a utilisé pour son analyse les données disponibles issues de la comptabilité sociale de SRR et d'Orange Caraïbes. Ces données prennent donc déjà en compte ces éventuels surcoûts.
Par ailleurs, l'Autorité indique, qu'elle élaborera un modèle technico-économique pour les zones Antilles-Guyane et Réunion-Mayotte, à l'instar de l'outil développé en métropole. Cet outil lui permettra notamment de modéliser, en prenant en compte les principales spécificités des zones concernées et des opérateurs qui y opèrent un réseau mobile, les structures de coûts sous-jacentes. Il permettra également de mieux identifier les coûts de la terminaison d'appel fournie par un opérateur considéré efficace et ainsi la cible vers laquelle l'ensemble des terminaisons d'appel des opérateurs doivent converger à terme.

6.2.3. Discussion sur le niveau général
des terminaisons d'appel et horizon temporel de l'encadrement

L'article L. 32-1 du CPCE précise les objectifs applicables aux décisions de l'Autorité, dont celles de régulation asymétrique.
Ainsi, les tarifs fixés doivent permettre « l'exercice au bénéfice des utilisateurs d'une concurrence effective et loyale entre les exploitants de réseau et les fournisseurs de services de communications électroniques », et à ce titre ils doivent répondre aux problèmes concurrentiels identifiés par l'Autorité au chapitre 4.
De plus, afin de permettre le « développement de l'emploi, de l'investissement efficace dans les infrastructures, de l'innovation et de la compétitivité dans le secteur des communications électroniques », l'Autorité cherche à offrir la sécurité maximale au secteur et à privilégier des horizons longs lorsque cela est possible.
Au regard des précédents objectifs, des problèmes concurrentiels identifiés et des référentiels de coût (écart de près de 8 cEUR/min entre le prix et la référence de coût en 2005), une baisse significative des niveaux de terminaison d'appel des opérateurs Orange Caraïbes et SRR paraît nécessaire, permettant ainsi de poursuivre la tendance de baisse déjà entamée dans le cycle précédent pour rapprocher ses tarifs des coûts sous-jacents et des références européennes. Dans son avis n° 07-A-05 du 19 juin 2007, le Conseil de la concurrence lui-même considère (point 22) que « la poursuite du mouvement d'orientation des niveaux de charge de terminaison d'appel vers les coûts moyens effectivement supportés par les opérateurs de téléphonie mobile peut donc apparaître comme un moyen de préserver une concurrence sur le marché de détail ».
Dans ses observations transmises le 13 septembre 2007, la Commission européenne soutient également cet objectif et invite l'Autorité « à réévaluer sa mesure concernant ces ORM, à la lumière d'une approche européenne commune, dès que cela aura été établi, et de revoir cette décision, si nécessaire, en vue de réduire les TTM dans les territoires d'outre-mer français de façon plus rapide ».
En effet, si la Commission approuve l'asymétrie des tarifs de terminaison d'appel des opérateurs actifs dans les DOM car elle est « consciente du fait que les ORM actifs dans les territoires d'outre-mer français opèrent dans des conditions qui ne sont pas nécessairement comparables à celles de la France métropolitaine ou d'autres Etats membres de l'UE », elle est néanmoins « convaincue du fait que les principes définis pour une réglementation efficace des TTM (tarifs de terminaisons mobiles) s'appliquent également aux territoires d'outre-mer français ».
La Commission souligne donc que si la réduction de l'horizon temporel est pertinente pour la métropole, elle l'est d'autant plus pour les DOM. Dans le cadre de la décision en métropole, il a été décidé de réduire l'horizon temporel de la baisse appliquée aux niveaux des terminaisons d'appel vocal mobile des opérateurs métropolitains et de ralentir le rythme de convergence de ces terminaisons d'appel vers les coûts, dans l'attente de premiers résultats d'harmonisation accrue en Europe.
L'Autorité partage cette analyse et réduit donc l'horizon temporel pour l'outre-mer à vingt-quatre mois au lieu des trois ans prévus initialement.
Ce choix d'horizon temporel permet d'attendre les premiers résultats d'harmonisation au niveau européen et de mettre en œuvre le modèle technico-économique pour les zones Antilles-Guyane et Réunion-Mayotte (cf. 6.2.2). Enfin, cette durée de vingt-quatre mois permet de répondre au besoin des acteurs de disposer d'une prévisibilité sur l'évolution des charges de terminaison d'appel mobile.
Par conséquent, l'Autorité annoncera dans une décision ultérieure les niveaux de terminaison d'appel pour la période du 1er janvier au 31 décembre 2010. Les niveaux qui seront proposés dans cette décision future dépendront notamment des nouveaux éléments de coûts dont disposera l'Autorité, ainsi que de l'évolution du contexte européen et des progrès, le cas échéant, de l'harmonisation européenne. L'Autorité s'attachera alors à offrir une prévisibilité maximale aux opérateurs.

6.2.4. Cas des opérateurs soumis
à une obligation de non-excessivité

Concernant les opérateurs soumis à une obligation de ne pas pratiquer un tarif excessif, l'Autorité estime qu'il importe que ceux-ci pratiquent à terme des tarifs correspondant à la référence de coût pertinente représentative d'un opérateur efficace et dans l'intervalle pratique des tarifs qui ne soient pas excessivement supérieurs à ceux de leurs concurrents, de façon à ne pas introduire de distorsion concurrentielle dans le fonctionnement des marchés de détail sous-jacents. Il importe en effet que ces opérateurs ne puissent pas pratiquer de subventions croisées sur le marché de détail en accroissant artificiellement l'attractivité de leurs offres aux frais des opérateurs achetant leur terminaison d'appel et au détriment de leurs concurrents. L'excessivité des tarifs d'interconnexion doit donc s'apprécier en premier lieu en référence aux tarifs pratiqués par leurs concurrents, et notamment ceux soumis à une obligation d'orientation vers les coûts. Il est donc nécessaire que ces opérateurs baissent rapidement leurs tarifs en parallèle des baisses imposées aux opérateurs soumis à une obligation d'orientation vers les coûts et, qui plus est, maintiennent un écart non excessif à tout moment ; cet écart devant disparaître à terme.
Cette dernière appréciation ne signifie pas pour autant l'annulation des écarts de manière immédiate. En effet, différents facteurs peuvent justifier des écarts transitoires différents pour chaque acteur donné dans la zone considérée.
Les décalages temporels d'arrivée sur le marché induisent effectivement des différences dans les structures de coûts des acteurs. Mais ils doivent être relativisés au regard du choix de l'entreprise de se lancer commercialement à une date plus ou moins éloignée de la date de délivrance de son autorisation d'utilisation de fréquences. Dans son analyse et pour chaque acteur, l'Autorité a également pris en compte les décalages entre la date de délivrance de l'autorisation d'utilisation de fréquences et celle du déploiement effectif. Par ailleurs, il faut veiller à ce que les conditions d'entrée du nouvel acteur ne remettent pas en cause un fonctionnement du marché basé sur une concurrence par les mérites. Ainsi, la situation dans laquelle le nouvel entrant profite d'une absence de régulation sur le marché de sa terminaison d'appel alors que les terminaisons d'appel de tous ses concurrents sont régulées, participe certes à créer pour cet acteur des conditions favorables d'arrivée sur le marché. Mais cette situation peut permettre au nouvel entrant de se développer sans faire aucun effort concurrentiel particulier : il peut en effet simplement profiter du fait que sa terminaison d'appel échappe à toute régulation pour la fixer à un niveau significativement plus élevé que ceux de ses concurrents, afin de percevoir auprès d'eux et des opérateurs fixes d'importants revenus d'interconnexion ; il pratique en contrepartie des prix très bas au détail afin de conquérir des clients. Il parvient ainsi à faire croître sa part de marché au détail en pratiquant une concurrence non fondée sur les mérites.
Par ailleurs, la forte asymétrie en termes de parts de marché entre les acteurs induit des effets sur le plan concurrentiel. Ainsi, l'opérateur qui bénéficie d'un niveau de terminaison d'appel élevé malgré la croissance soutenue de sa part de marché peut affecter les structures de coûts de ses concurrents et conduire à déstabiliser artificiellement le positionnement des offres de détail mises en place par ses concurrents, par rapport à celles qu'il offre sur le même segment de marché.
Les conditions de fluidité du marché de détail sont également un facteur justifiant des écarts transitoires. Ainsi, on observe notamment que la portabilité simple guichet a été mise en œuvre récemment dans la zone Antilles-Guyane (en avril 2006) et dans la zone Réunion-Mayotte (en juillet 2007).
Enfin, certains acteurs sont actifs sur des territoires de petite taille et/ou de faible population tels que les collectivités d'outre-mer que sont Saint-Martin, Saint-Barthélemy ou Saint-Pierre-et-Miquelon. Les opérateurs concernés par ce point sont Dauphin Télécom, UTS Caraïbes qui exercent leur activité sur les îles de Saint-Martin et Saint-Barthélemy et SPM Télécom qui exercent à Saint-Pierre-et-Miquelon.
La non-excessivité tarifaire doit donc s'apprécier au regard des principes précités s'appliquant différemment selon la date d'entrée de l'opérateur sur le marché, la date de délivrance de l'autorisation d'utilisation de fréquences ou la taille d'exercice de son activité (cf. partie 6.2.9). Il n'en demeure pas moins qu'une diminution significative des niveaux de terminaison d'appel reste nécessaire pour prévenir les problèmes concurrentiels qui découlent du maintien d'un niveau trop élevé au regard des références de coût pertinentes, et notamment du problème concurrentiel lié au développement des offres d'abondance à effet de réseau. Et ce, d'autant plus que les marchés mobiles outre-mer sont caractérisés par des parts de marché très asymétriques (35).
Les opérateurs tels que SRR et Orange Caraïbes estiment que le maintien des asymétries tarifaires est contraire aux recommandations de la Commission européenne.
Ainsi, dans sa contribution à la consultation publique lancée le 24 juillet 2007, Orange Caraïbes considère que « l'objectif de convergence (réduction significative des écarts) des TA envisagé par l'Autorité sur le marché DOM demeure nettement insuffisant ». Cet opérateur souhaite que l'Autorité réévalue les plafonds afin d'atteindre un niveau d'asymétrie raisonnable et non excessif entre opérateurs sur le marché antillo-guyanais.
Quant à SRR, l'opérateur estime, dans sa réponse à la même consultation publique, que la divergence des niveaux de terminaison d'appel est sans fondement et qu'aucune différenciation tarifaire ne devrait plus exister. A ce titre, selon l'opérateur, l'Autorité « envisage de maintenir à l'égard d'Orange Réunion une obligation de contrôle tarifaire selon des modalités plus souples que SRR, maintenant ainsi une asymétrie dans la régulation tarifaire au-delà de la phase transitoire acceptable selon les critères de la Commission ». SRR ajoute également que « la divergence des niveaux de terminaisons d'appel ne trouve pas son fondement dans les textes relatifs à ce projet de décision ; la décision proposée à la Commission européenne devra nécessairement intégrer l'obligation de faire converger ces niveaux de TA sur la période 2008-2010 ».
L'Autorité rappelle que l'appréciation du caractère non excessif des tarifs de terminaison d'appel se fait en valeur absolue mais également en valeur relative (de manière comparée par rapport à la terminaison d'appel de l'opérateur leader dans la zone) et que dès lors, l'alignement des tarifs de terminaison d'appel sur une même cible ne peut se faire que si cette cible correspond effectivement à la référence de coûts d'un opérateur considéré comme efficace.
Par ailleurs, la Commission européenne rejoint l'analyse de l'Autorité en ce que cette dernière met en place des écarts de manière transitoire et en ce que les tarifs de terminaison d'appel des opérateurs autres qu'Orange Caraïbes et SRR « pourraient être orientés vers les coûts, suite à la troisième évaluation globale du marché » (36).
Ainsi, la volonté de l'Autorité est bien de poursuivre la baisse des terminaisons d'appel et de poursuivre une politique de convergence des terminaisons d'appel dans chaque zone. Cette politique de convergence des tarifs de terminaison d'appel ne peut être décorrélée de la baisse des niveaux des tarifs de tous les opérateurs.
Quant à Dauphin Télécom, il considère que « la convergence des charges de terminaisons d'appel qui sont imposées à Dauphin Télécom [...] est de nature à le priver de revenus essentiels à sa survie et d'amoindrir encore plus sa capacité concurrentielle ».
L'Autorité ne vise pas à valider les choix stratégiques des opérateurs et tient à préciser que la différenciation tarifaire n'a pas vocation à perdurer, dès lors que les terminaisons d'appel sont alignées sur le concept de coûts pertinents et qu'elles n'induiront ainsi plus de biais concurrentiel sur le marché de détail en défaveur des opérateurs à plus faibles parts de marché.
L'opérateur Outremer Télécom estime également que « la convergence des charges de terminaisons d'appel aggrave les dysfonctionnements du marché de détail des DOM ultradominés par des opérateurs dégageant des profits exceptionnels et bénéficiant d'effet club considérables ».
L'Autorité rappelle que sa régulation des prestations de gros a pour but d'établir une concurrence pérenne et loyale sur les marchés de détail sans préjuger des marges qui peuvent y être faites. Par ailleurs, ainsi que l'Autorité l'a mis en évidence dans la section 4.2.2, lorsque les parts de marché au détail sont très asymétriques, il est préférable pour des petits opérateurs que l'ensemble des terminaisons d'appel, y compris la leur, soient au niveau des coûts.
Enfin, comme il a été a annoncé précédemment, l'Autorité réexaminera dans une décision future la portée des obligations d'orientation vers les coûts et de non-excessivité imposées aux opérateurs d'outre-mer pour la période allant du 1er janvier au 31 décembre 2010.

(35) Au 31 mars 2007, pour la zone Antilles-Guyane, Orange Caraïbes avait 58 % de part de marché et SRR, pour la zone Réunion-Mayotte, avait 71 % de part de marché (données SIM-source ARCEP). (36) CAS FR/2007/0669 : terminaison d'appel de gros sur les réseaux mobiles individuels ― France métropolitaine et territoires d'outre-mer.

6.2.5. Discussion sur le contrôle
tarifaire relatif aux BPN

Il convient de noter tout d'abord que plusieurs opérateurs ― Outremer Télécom, Dauphin Télécom, UTS Caraïbes et Saint-Pierre et Miquelon Télécom (SPM Télécom) ― utilisent une structure tarifaire sans composante relative au BPN. Cette pratique est courante chez des opérateurs de taille réduite. L'Autorité prend en compte cette différence de structure dans son appréciation du niveau des charges de terminaison d'appel à la minute.
Concernant les opérateurs ― SRR, Orange Caraïbes, Orange Réunion et Digicel ― qui mettent en œuvre un tarif de Bloc Primaire Numérique (BPN), l'Autorité note que ces tarifs ont baissé durant la période 2005-2008, mais demeurent néanmoins encore élevés et supérieurs à ceux pratiqués par les opérateurs fixes sans justification.
L'Autorité ne dispose pas de référence de coûts précise sur les BPN des opérateurs mobiles, et choisit donc de se référer aux tarifs pratiqués par France Télécom sur son réseau fixe. A ce jour, ces prestations sont, par ailleurs, beaucoup moins structurantes que les prestations de terminaison d'appel sur le marché de l'interconnexion mobile, dans la mesure où elles représentent moins de 2 % des revenus directs d'interconnexion des opérateurs mobiles.

6.2.6. Discussion sur les modalités
du contrôle tarifaire

Interdiction de proposer une structure de tarification comportant un crédit temps :
L'Autorité estime que la structure de tarification de la charge de terminaison d'appel doit respecter le principe selon lequel un opérateur demandeur ne paie une prestation d'interconnexion ou d'accès qu'en fonction du service rendu. Or le système de crédit temps qui conduit à ce que, par exemple, un appel de 60 secondes soit facturé au même prix qu'un appel d'une seconde, ne répond pas à cette exigence. En application de l'article D. 311 II, l'Autorité impose donc à l'ensemble des opérateurs concernés par la présente décision l'interdiction de pratiquer une structure de tarification pour leur prestation de terminaison d'appel qui comporterait un crédit temps.
Cette obligation est proportionnée aux objectifs de régulation et en particulier ceux prévus à l'article L. 32-1 II 2° et 4° du CPCE.
A l'heure actuelle, plus aucune structure tarifaire des opérateurs d'outre-mer ne comporte un crédit temps.
Non-excessivité des charges d'établissement d'appel (CEA) :
Dans certaines circonstances, il peut être pertinent d'introduire une structure tarifaire non linéaire avec une charge d'établissement d'appel et un prix à la minute décompté à la première seconde. C'est notamment le cas lorsque le nombre d'appels constitue un inducteur de coût pertinent en plus de l'inducteur relatif à la durée des appels.
Néanmoins, l'Autorité estime que l'opérateur de terminaison d'appel doit fixer une charge d'établissement d'appel en cohérence avec la structure de coûts relative à sa terminaison d'appel vocal, et en particulier les coûts qu'il supporte et qui ont pour inducteur principal le nombre d'appels plutôt que le volume de trafic de terminaison. En veillant à une telle cohérence, l'opérateur de terminaison respecte le principe selon lequel un opérateur demandeur ne paie une prestation d'interconnexion ou d'accès qu'en fonction du service rendu. Ainsi, une structure tarifaire qui inclurait une CEA sans rapport avec les références connues dans l'industrie serait incompatible avec l'obligation de ne pas pratiquer de tarif excessif ou avec l'obligation d'orientation vers les coûts.
En pratique, on constate que dans une très large majorité des Etats membres de l'UE, il n'existe pas de charge d'établissement d'appel. En effet, seuls la Belgique et l'Espagne (37) ont des CEA qui n'excèdent pas 0,05 euro (à l'exception de l'opérateur espagnol Amena qui a une CEA à 0,12 euro).
Les opérateurs métropolitains, Orange Caraïbes, Orange Réunion, UTS Caraïbes, SPM Télécom et SRR n'appliquent pas de charge d'établissement d'appel. On constate également qu'en matière de terminaison d'appel fixe, il existe une unique référence de charge d'établissement d'appel, inférieure à 0,1 c/appel. Dans les marchés outre-mer, on observe que seuls les opérateurs Digicel, Dauphin Télécom et Outremer Télécom maintiennent des charges d'établissement d'appel à un niveau particulièrement élevé.
La persistance de charges d'établissement d'appel à un niveau tarifaire élevé induit des effets pervers car, d'une part, cette charge d'établissement d'appel facturée par appel n'est pas réciproque entre opérateurs et, d'autre part, cette charge d'établissement d'appel n'incite pas à une meilleure qualité de service car sa facturation est indépendante de la durée de l'appel.
En outre, pour Orange Caraïbes dans sa réponse à première la consultation publique, « l'obligation de passage à une structure tarifaire sans crédit temps a incité la plupart des opérateurs de la zone Antilles-Guyane à adopter une structure tarifaire avec une charge d'établissement d'appel élevée, et ce, afin de minimiser l'impact de cette mesure sur leur revenu. En effet, la mise en place de charge d'établissement d'appel élevée a des effets comparables à celle d'une structure tarifaire avec un crédit temps, puisqu'elle s'applique à tous les appels, indépendamment de la durée de l'appel, agissant ainsi comme un palier de facturation ».
Il est donc nécessaire que les opérateurs mobiles Digicel, Dauphin Télécom et Outremer Télécom suppriment ou diminuent de manière très significative leur charges d'établissement d'appel à un niveau proche de la seule référence existante en France à savoir moins de 0,1 c/appel sans gradient horaire. Ainsi, l'Autorité considère qu'à l'horizon du 1er janvier 2009, les charges d'établissement d'appel devront être au plus égales à 0,2 c/appel.
Si Orange Caraïbes, dans sa réponse à la consultation publique lancée le 24 juillet 2007, approuve l'approche de l'Autorité, il n'en est pas de même pour certains opérateurs tels que Dauphin Télécom qui estime que « toute comparaison avec les coûts encourus dans le cadre de la CEA fixe apparaît erronée compte tenu de la différence d'architecture entre les réseaux fixe et mobile ».
L'Autorité apprécie effectivement la non-excessivité de la CEA au regard de la pratique en France des opérateurs de la téléphonie fixe, mais aussi au regard de celle de la téléphonie mobile et également au regard de la pratique européenne en la matière. Or il s'avère que l'ensemble de ces éléments montrent que les niveaux des CEA actuels sont effectivement incompatibles avec l'obligation de ne pas pratiquer de tarif excessif ou avec l'obligation d'orientation vers les coûts, et que l'Autorité est contrainte d'imposer aux opérateurs présentant encore une structure tarifaire avec une CEA une réduction drastique du niveau, voire une suppression pure et simple, des CEA.
Mesure du prix moyen à la minute pour des structures tarifaires non linéaires :
Le cycle d'analyse précédent montre l'importance de retenir des modalités de contrôle tarifaire pertinentes selon les marchés considérés car elles peuvent introduire au final un biais important. En effet, pour rendre comparables des tarifs ayant des structures différentes (avec ou sans crédit temps, avec ou sans charge d'établissement d'appel), l'Autorité a calculé des prix moyens par minute en utilisant des statistiques d'appel. Si la statistique retenue s'écarte trop des caractéristiques réelles des distributions d'appel, une divergence peut apparaître entre le prix moyen estimé par l'Autorité et le prix moyen réel.
Pour rappel, les tarifs moyens de terminaison d'appel peuvent être calculés selon plusieurs méthodes :
― pour l'Autorité, les tarifs sont calculés avec la loi Weibull utilisée pour le contrôle tarifaire avec une durée moyenne 100 secondes et répartition 75 % ― 25 % des appels entre heures pleines (HP) et heures creuses (HC) ;
― pour les comparaisons internationales (par exemple celles de la Commission européenne), les tarifs de terminaison d'appel sont calculés en prenant compte seulement des heures pleines (HP) et en considérant que la durée d'un appel moyen est de 180 secondes.
Dans la réponse d'un opérateur à la première consultation publique soumise au secret des affaires, l'opérateur estime qu'« il est indispensable que pour la fixation du niveau des obligations tarifaires envisagées pour les opérateurs de la zone Réunion-Mayotte, l'Autorité prenne en compte les profils de consommation réels de la zone concernée et non comme par le passé ceux appliqués en métropole, qui ne permettent pas de juger convenablement de la réalité des baisses imposées aux opérateurs ».
Pour Orange Caraïbes, « il est indispensable que pour la fixation du niveau des obligations tarifaires envisagées pour les opérateurs de la zone Antilles-Guyane, l'Autorité prenne en compte les profils de consommation réels de la zone concernée et non le profil de référence métropolitain, qui ne permet pas de juger convenablement de la réalité des baisses imposées aux opérateurs.
En effet, les critères reflétant la réalité du marché antillo-guyanais et ses particularités d'usage ne sont pas pris en compte dans les décisions actuelles de l'Autorité, dans lesquelles les prix moyens sont calculés selon la loi statistique de Weibull.
De plus, il est important de noter que cette méthode ne tient que partiellement compte de la charge d'établissement d'appel, appliquée actuellement par la plupart des opérateurs de la zone (Digicel, Outremer Télécom, Dauphin Télécom). En effet, avec une structure tarifaire incluant une charge d'appel, le prix moyen dépend du volume d'appels, ce paramètre n'étant pas pris en compte par la loi de Weibull ».
Orange Caraïbes réitère sa position dans sa réponse à la seconde consultation publique.
Ainsi, en prenant le cas d'un opérateur tel que Dauphin Télécom qui usait jusqu'en 2004 de crédit temps et qui a, à l'heure actuelle, une charge d'établissement d'appel élevée, l'Autorité observe un niveau de prix moyen de terminaison d'appel variant de 20 à 30 %. Ainsi, pour le premier trimestre 2007, la différence de tarifs entre le prix moyen mesuré avec une durée moyenne de 100 secondes et celui mesuré avec une durée moyenne de 60 secondes est de 20 % et elle est de 36 % si l'on retient des durées moyennes respectives de 180 secondes et 60 secondes.

Vous pouvez consulter le tableau dans le
JOn° 287 du 11/12/2007 texte numéro 67

Il faut préciser que la durée moyenne des appels entrants varie selon les opérateurs de destinations, selon que les appels sont issus de réseaux fixe ou mobile. La durée moyenne de 100 secondes est une référence issue du marché métropolitain. Or, pour l'outre-mer, la durée moyenne d'un appel entrant mobile est plus proche de 60 secondes.
L'Autorité considère donc que les tarifs peuvent être calculés en retenant la même loi statistique de Weibull mais avec un paramètre de durée moyenne d'appel de 60 secondes (cf. annexe B). L'Autorité retiendra donc cette durée moyenne plus proche de la réalité pour mesurer et apprécier les prix moyens à la minute outre-mer.

(37) La Norvège et l'Islande, Etats membres de l'EEE (Espace économique européen), pratiquent également des CEA qui n'excèdent pas respectivement 0,027 et 0,008 euro.

Possibilité d'introduire des gradients horaires :
L'Autorité considère également que l'introduction de différenciation tarifaire entre heures pleines et heures creuses peut dans certaines circonstances être justifiée économiquement pour tenir compte des coûts incrémentaux induits par le trafic à l'heure chargée.
L'Autorité note toutefois que la structure tarifaire de la prestation de terminaison d'appel mobile a un impact énorme sur l'ensemble des acteurs du secteur. Ainsi, la rentabilité d'offres de détail d'opérateurs, voire de concurrents directs, pourrait être remise en cause par l'évolution de la structure tarifaire de la terminaison d'appel mobile d'un opérateur donné qui viserait spécifiquement à augmenter les tarifs de plages horaires pendant lesquelles le trafic des offres de ses concurrents se concentre. La modification contractuelle d'offres de détail étant extrêmement difficile voire impossible à réaliser, certains acheteurs de la prestation de terminaison d'appel pourraient ne pas se trouver en mesure de mettre leurs tarifs de détail en adéquation avec ces nouvelles structures de prix, ce qui comporte des risques de rentabilité de certaines offres. Plus généralement, la latitude de chaque opérateur en matière de détermination des gradients horaires de ses charges de terminaison peut être exploitée abusivement afin de générer une insécurité financière et une surcharge de travail administratif à ses concurrents. Au-delà de la problématique contractuelle pour un opérateur à faire évoluer ses offres de détail de façon à s'adapter aux évolutions de structures tarifaires sur le marché de gros, l'introduction par un opérateur d'une différenciation tarifaire de sa terminaison d'appel peut également être de nature à remettre en cause la licéité de certaines de ses offres de détail. En effet ses offres peuvent en certaines circonstances devenir illicites et donc condamnables par le droit commun de la concurrence si, en restant inchangées, elles ne prennent pas en compte, dans leur tarification, les tarifs de gros désormais opposables aux acheteurs externes de terminaison d'appel mais aussi à l'opérateur lui-même, au titre de la non-discrimination interne à laquelle il est soumis.
Compte tenu de ces éléments, l'Autorité considère qu'un changement de structure tarifaire de la prestation de terminaison d'appel vocal mobile (en particulier l'introduction d'une différenciation tarifaire selon la plage horaire) ne saurait être mis en place sans une large concertation du secteur et des délais de préavis raisonnables permettant à l'ensemble des acheteurs d'anticiper ce changement.
De plus, comme l'Autorité l'a déjà souligné, le plafond tarifaire est à ce jour fixé significativement au-dessus des coûts moyens réellement supportés par les opérateurs mobiles. Elle considère donc que le niveau du plafond peut être imposé non plus à un prix de terminaison d'appel moyen, comme cela l'a été dans le passé, mais au tarif de terminaison d'appel en heures pleines. Dans le cas où un opérateur mobile considère qu'une modulation horaire de sa charge de terminaison d'appel serait une incitation efficace pour que les opérateurs répartissent plus efficacement la livraison du trafic au point d'interconnexion, l'Autorité invite cet opérateur à fixer pour les heures creuses un tarif inférieur au plafond tarifaire maximum qu'elle lui aura imposé sur son tarif heure pleine.
Dans l'hypothèse où un opérateur souhaiterait introduire une modulation tarifaire qui impliquerait une hausse de son prix maximal, l'Autorité examinera cette demande après concertation avec les opérateurs impactés pour évaluer la pertinence des éléments suivants :
― les plages horaires qui correspondent aux heures chargées ;
― les poids relatifs des tarifs heures pleines/heures creuses ;
― le préavis raisonnable à respecter avant d'introduire une différenciation tarifaire.
Elle veillera par ailleurs à ce que l'introduction d'une telle différenciation sur le marché soit, ainsi que certains acteurs l'ont également évoqué, cohérente avec le principe de causalité et d'orientation vers les coûts.
Enfin, elle ne pourra que rappeler la nécessité de respecter l'obligation de non-discrimination à laquelle les opérateurs sont soumis et les risques juridiques encourus s'il était constaté que cette obligation n'était pas respectée.

6.2.7. Impact des baisses de terminaison d'appel mobile
sur les marchés de détail de la téléphonie fixe

Les opérateurs fixes (non intégrés) pourraient tirer des bénéfices d'une baisse significative des tarifs de terminaison d'appel vocal mobile pour plusieurs raisons. Cette baisse pourrait conduire à limiter considérablement les déséquilibres et transferts de valeur des consommateurs fixes vers les opérateurs mobiles et, in fine, vers les consommateurs mobiles dans la mesure où les marchés de détail mobiles sont suffisamment concurrentiels, ainsi que les distorsions pouvant impacter in fine les choix des consommateurs, ce qui serait susceptible de stimuler les usages des clients des opérateurs fixes.
S'agissant de la clientèle résidentielle, au départ des accès RTC, il est observé que, par le passé, la répercussion des baisses de terminaison d'appel a été bonne en raison d'une très forte intensité concurrentielle sur ce marché. En effet, France Télécom répercute les baisses de terminaison d'appel sur son tarif de base de détail, et ses concurrents suivent les baisses de tarif initiées par France Télécom. A terme, il n'est cependant pas évident que ces répercussions continuent à être aussi systématiques. En effet, en application de l'encadrement tarifaire pluriannuel de l'offre de communication de service universel, France Télécom est dans l'obligation de transmettre l'intégralité du bénéfice des baisses de terminaison d'appel mobile à ses clients non pas exclusivement via des baisses des tarifs des appels vers les numéros mobiles mais aussi via des baisses des appels vers les numéros fixes. Ainsi, le jeu concurrentiel qui s'exerce sur le marché de la téléphonie fixe assurera la transmission du bénéfice de la baisse des charges de terminaison d'appel à l'ensemble des opérateurs et à leurs clients au travers des tarifs tant fixe vers mobile que fixe vers fixe.
S'agissant de la clientèle résidentielle au départ des accès voix sur large bande, l'analyse des répercussions est peu pertinente dans le cas de l'outre-mer. En effet, ces offres n'ont pas encore connu le même développement qu'en métropole.
La clientèle professionnelle, quant à elle, achète des communications sur un marché à forte intensité concurrentielle. Les politiques d'achat télécoms sont optimisées (appels d'offres par paquets ou par lots) et induisent une vraie concurrence, notamment sur chacune des composantes tarifaires. Les clients professionnels ont donc dans le passé toujours bénéficié de répercussions sur les tarifs de détail relatifs aux offres qu'ils achètent de baisses de terminaison d'appel mobile et, dans la mesure où aucun affaiblissement de l'intensité concurrentielle existant sur ce marché n'est attendu, cette situation devrait continuer à être observée dans le futur.
En ce qui concerne les consommateurs mobiles, les répercussions sont moins claires. A court ou à moyen terme, certains opérateurs défendent la théorie du waterbed effect, dont la traduction littérale est « effet lit à eau ». Le principe est le suivant : les opérateurs mobiles bénéficient de deux sources de revenus, les revenus de gros (principalement les revenus de terminaison d'appel vocal) et les revenus de détail. Sous certaines hypothèses portant sur les conditions de concurrence sur le marché de détail, ce principe théorique avance que, si l'on baisse les revenus de gros, l'opérateur devra, pour compenser, augmenter ses revenus de détail. En pratique, des visions très divergentes s'affrontent sur la réalité et l'importance de cet effet. Le Conseil a attiré l'attention de l'Autorité sur cette question dans son avis : « Le Conseil attire toutefois l'attention de l'ARCEP sur le rôle joué par les terminaisons d'appel dans l'équilibre économique d'un marché biface comme celui de la téléphonie mobile et notamment sur les liens entre, d'une part, le niveau des terminaisons d'appel et l'intensité de la concurrence sur la subvention des terminaux, d'autre part, le prix des abonnements et celui des communications. L'analyse des incitations des opérateurs par la littérature économique récente montre qu'il existe des cas dans lesquels une terminaison d'appel trop faible réduit la concurrence sur les marchés de détail (cf. Gans et King, 2001). » L'ARCEP note avec intérêt cette question mais comprend que les avis sur la réalité de cet effet sont aujourd'hui très partagés. L'UFC Que Choisir indique ainsi « qu'un grand nombre d'acteurs doute de son existence ». L'Autorité note que, dans la mesure où cet effet existerait, il s'agirait d'un transfert entre consommateurs du fixe et consommateurs du mobile : une baisse des tarifs de gros est susceptible d'avoir des effets négatifs sur les tarifs de détail mobiles mais grâce à la baisse des charges supportées par les opérateurs fixes, elle entraînerait réciproquement des effets bénéfiques pour les consommateurs du fixe. Ainsi, globalement, cet effet ne serait donc pas préjudiciable aux consommateurs du secteur. A titre incident, l'Autorité rappelle que le waterbed effect est observé sous certaines hypothèses portant sur les conditions de concurrence sur le marché de détail, et que notamment l'amplitude de cet effet est directement reliée aux niveaux absolus des prix de détail par rapport au niveau d'un prix qui serait observé sur un marché concurrentiel. L'Autorité considère donc que l'observation effective d'un waterbed effect sur les marchés de détail mobile outre-mer n'est pas acquise.
A plus long terme, le fait que les problèmes concurrentiels entre opérateurs mobiles, d'une part, et entre opérateurs mobiles et fixes, d'autre part, soient limités permet d'assurer un meilleur environnement concurrentiel, qui aura des effets bénéfiques pour l'ensemble des consommateurs.
Concernant l'impact du niveau de la terminaison d'appel sur le fixe, l'opérateur fixe MEDIASERV souligne des spécificités propres aux DOM. En effet, il estime qu'« en raison d'un effet de proximité évident, ce sont les opérateurs d'outre-mer (fixes et mobiles) qui sont principalement concernés par le prix de la terminaison des appels à destination des mobiles des opérateurs d'outre-mer : le poids relatif de la terminaison d'appel d'outre-mer dans le poste des charges d'interconnexion d'un opérateur d'outre-mer est substantiellement plus important pour un opérateur comme MEDIASERV que pour un opérateur fixe ou mobile de métropole. En conséquence, ce sont les opérateurs d'outre-mer qui seront le plus affectés par la mesure de régulation projetée, laquelle aura in fine pour conséquence de nuire à l'ensemble du secteur dans les départements d'outre-mer et par ricochet au consommateur de ces régions ».
L'Autorité estime qu'effectivement, indépendamment du profil des appels entrants des opérateurs mobiles, l'impact des terminaisons d'appel sur les opérateurs fixes est d'autant plus important que les niveaux des TA sont élevés. En conséquence, elle estime que sa politique volontariste de baisse des terminaisons d'appel répond à ce fait.

6.2.8. Encadrement tarifaire s'appliquant
à Orange Caraïbes et SRR

Pour l'ensemble des raisons exposées précédemment, l'Autorité estime nécessaire d'imposer à Orange Caraïbes l'encadrement tarifaire suivant :
― à compter du 1er janvier 2008, le prix maximal de la terminaison d'appel d'Orange Caraïbes n'excède pas 11 centimes d'euro par minute et le prix annuel d'un bloc primaire numérique (BPN) n'excède pas 3 600 EUR ;
― à compter du 1er janvier 2009, le prix maximal de la terminaison d'appel d'Orange Caraïbes n'excède pas 8,7 centimes d'euro par minute et le prix annuel d'un bloc primaire numérique (BPN) n'excède pas 3 500 EUR.
Pour l'ensemble des raisons exposées précédemment, l'Autorité estime nécessaire d'imposer à SRR l'encadrement tarifaire suivant :
― à compter du 1er janvier 2008, le prix maximal de la terminaison d'appel de SRR n'excède pas 10,5 centimes d'euro par minute et le prix annuel d'un bloc primaire numérique (BPN) n'excède pas 3 800 EUR ;
― à compter du 1er janvier 2009, le prix maximal de la terminaison d'appel de SRR n'excède pas 8,5 centimes d'euro par minute et le prix annuel d'un bloc primaire numérique (BPN) n'excède pas 3 600 EUR.

6.2.9. Appréciation de la portée de l'obligation
de non-excessivité

Digicel :
Digicel (ex-Bouygues Telecom Caraïbe depuis 2006) a ouvert commercialement en 2001, il a une part de marché de 27 % contre 58 % pour Orange Caraïbes pour la zone Antilles-Guyane à la fin du premier trimestre 2007. Il est à noter que la part de marché de Digicel sur le seul département de la Guyane est de 13 % tandis qu'Outremer Télécom, le troisième entrant, a une part de marché de 24,5 %.
Pour l'ensemble des raisons exposées précédemment, et compte tenu des niveaux tarifaires actuels, des dates d'attribution des ressources en fréquences, de la date d'entrée sur le marché de Digicel et de l'encadrement tarifaire imposé à Orange Caraïbes, l'Autorité estime que (i) l'écart actuel entre la terminaison d'appel de Digicel et celle d'Orange Caraïbes, opérateur avec lequel il est en concurrence directe, doit être réduit rapidement, et que (ii) la charge d'établissement d'appel doit être significativement réduite, ce afin de préserver les conditions d'exercice d'une concurrence loyale sur les marchés de détail sous-jacents.
L'Autorité estime en conséquence que pour respecter l'obligation de non-excessivité le tarif de terminaison d'appel de Digicel devrait respecter les conditions suivantes :
― à compter du 1er janvier 2008, le prix maximal de la terminaison d'appel de Digicel n'excède pas 16 centimes d'euro par minute et le prix annuel d'un bloc primaire numérique (BPN) n'excède pas 3 800 EUR ;
― à compter du 1er janvier 2009, le prix maximal de la terminaison d'appel de Digicel n'excède pas 12,2 centimes d'euro par minute et le prix annuel d'un bloc primaire numérique (BPN) n'excède pas 3 600 EUR.
Orange Réunion :
Orange Réunion s'est lancé commercialement sur le département de la Réunion en 2000 et a lancé son activité à Mayotte le premier trimestre 2007.
L'opérateur a une part de marché de 32 % à la fin du premier trimestre 2007 contre 68 % pour SRR sur la seule île de la Réunion.
Selon SRR, Orange Réunion dispose d'une part de marché comparable à celle de SFR en métropole et fait partie du groupe Orange, en tirant un adossement à des opérateurs importants ainsi que des avantages concurrentiels, notamment au regard du réseau de distribution mutualisé entre les différentes sociétés du groupe Orange et de la présence de la marque sur les segments de marché de la téléphonie fixe et de l'internet. Néanmoins, ces raisons sont sans rapport avec la situation prévalant sur le marché de gros de la terminaison d'appel mobile.
Pour l'ensemble des raisons exposées précédemment, et compte tenu des niveaux tarifaires actuels, des dates d'attribution des ressources en fréquences, des dates d'entrée sur le marché de la Réunion puis de Mayotte d'Orange Réunion et de l'encadrement tarifaire imposé à SRR, l'Autorité estime que l'écart actuel entre la terminaison d'appel d'Orange Réunion et celle de SRR opérateur avec lequel il est en concurrence directe doit être réduit progressivement, ce afin de préserver les conditions d'exercice d'une concurrence loyale sur les marchés de détail sous-jacents.
L'Autorité estime en conséquence que pour respecter l'obligation de non-excessivité le tarif de terminaison d'appel d'Orange Réunion devrait respecter les conditions suivantes :
― à compter du 1er janvier 2008, le prix maximal de la terminaison d'appel d'Orange Réunion n'excède pas 13 centimes d'euro par minute et le prix annuel d'un bloc primaire numérique (BPN) n'excède pas 5 000 EUR ;
― à compter du 1er janvier 2009, le prix maximal de la terminaison d'appel d'Orange Réunion n'excède pas 11 centimes d'euro par minute et le prix annuel d'un bloc primaire numérique (BPN) n'excède pas 4 200 EUR.
Dans sa réponse à la consultation publique lancée le 24 juillet 2007, SRR estime que « l'asymétrie des obligations incombant à SRR et à Orange Réunion n'est pas justifiée [...] Il est tout à fait injustifié de ne pas imposer des plafonds tarifaires à Orange Réunion [...] ». L'Autorité considère que, pour chaque opérateur soumis à une obligation de non-excessivité, la portée de cette obligation a été suffisamment spécifiée dans la présente décision, notamment dans les valeurs de tarifs de TA au-delà desquelles l'Autorité considérerait que ces tarifs sont excessifs.
Outremer Télécom :
Outremer Télécom, sous le nom de marque « Only », a lancé son activité en décembre 2004 en Guyane, puis dans les départements de la Guadeloupe et de la Martinique en décembre 2005, à Mayotte en décembre 2006 et à la Réunion à la fin du premier trimestre 2007. Néanmoins, Outremer Télécom a obtenu sa première autorisation de fréquences en 2001 pour l'ensemble de ces zones.
Il est le troisième entrant dans les départements de la Guyane, de la Guadeloupe (hors zone de Saint-Martin et Saint-Barthélemy), de la Martinique et de la Réunion et il est deuxième entrant sur l'île de Mayotte.
Outremer Télécom a une part de marché globale sur la zone Antilles-Guyane de 13 % au 31 mars 2007. Mais cette part de marché varie selon le département concerné. En effet, si on regarde sa part de marché pour le seul département de la Guyane, où Outremer Télécom s'est lancé en décembre 2004, on observe que l'opérateur a une part de 24,5 % au premier trimestre 2007 contre 13 % pour le deuxième entrant Digicel. Sur l'ensemble des départements de la Guadeloupe et de la Martinique, où Outremer Télécom s'est lancé en décembre 2005, on observe que l'opérateur a une part de marché de 11 % contre 30 % pour Digicel. Sur la zone Réunion-Mayotte, Outremer Télécom a une part de marché de 1 % au 31 mars 2007 et sur l'île de Mayotte l'opérateur a une part de marché de 8 % après un trimestre d'activité.
Si Outremer Télécom est entré tardivement sur les différents marchés précités alors qu'il disposait depuis longtemps des autorisations d'utilisation de fréquences, avec une extension pour Mayotte en juillet 2006, cela est essentiellement du fait de la stratégie de l'opérateur.
Concernant l'impact de l'attribution de fréquences dans l'évaluation de la terminaison d'appel d'Outremer Télécom, l'opérateur estime qu' « il n'a été en mesure de déployer son réseau dans des conditions raisonnables en terme de spectre de fréquences qu'en juillet 2005 ». Outremer Télécom estime avoir une situation comparable à celle de Bouygues Telecom concernant notamment une attribution initiale déficiente de fréquences. Toutefois, l'Autorité souhaite préciser que la comparaison en l'espèce de ces deux opérateurs est inappropriée car Bouygues Telecom a, dès l'obtention de ses fréquences, entamé son déploiement, ce qui n'a pas été le cas d'Outremer Télécom.
En outre, l'obligation de couverture de population imposée à Outremer Télécom n'a pas été en l'espèce une barrière à l'entrée pour l'opérateur puisqu'il a rempli ses obligations de couverture et les a dépassées avant même les dates butoirs fixées par l'Autorité.
Ainsi, le réseau de l'opérateur a couvert très rapidement en Guyane 89 % de la population avec une couverture territoriale s'étendant principalement sur l'ensemble de la zone côtière où la population est concentrée.
En Martinique, le réseau de l'opérateur a couvert, dès son ouverture, 91 % de la population martiniquaise pour un taux de couverture territoriale de 97 % et, en Guadeloupe, 97 % de la population est couverte pour un taux de couverture de territoire de 91 %.
Concernant la zone de Mayotte, Outremer Télécom estime couvrir 97 % de la zone (38), après moins de deux trimestres de lancement de son activité sur l'île.

(38) Source : site web d'Outremer Télécom http://www.only.fr/offres/mobile/couv.php.

Pour l'ensemble des raisons exposées précédemment, et compte tenu des niveaux tarifaires actuels, de l'absence de tarification au BPN, des dates d'attribution des ressources en fréquences, des dates d'entrée sur les marchés de la Guyane, de la Martinique, de la Guadeloupe, de la Mayotte et enfin à la Réunion d'Outremer Télécom et de l'encadrement tarifaire imposé à SRR et Orange Caraïbes, l'Autorité estime que l'écart actuel entre la terminaison d'appel d'Outremer Télécom, d'une part, et de SRR, Orange Caraïbes, Digicel et Orange Réunion, d'autre part, opérateurs avec lesquels il est en concurrence directe, doit être réduit rapidement, et ce afin de préserver les conditions d'exercice d'une concurrence loyale sur les marchés de détail sous-jacents.
L'Autorité estime en conséquence que pour respecter l'obligation de non-excessivité le tarif de terminaison d'appel d'Outremer Télécom devrait respecter les conditions suivantes :
En Guyane :
― à compter du 1er janvier 2008, le prix maximal de la terminaison d'appel d'Outremer Télécom n'excède pas 19,2 centimes d'euro par minute ;
― à compter du 1er janvier 2009, le prix maximal de la terminaison d'appel d'Outremer Télécom n'excède pas 13,7 centimes d'euro par minute.
En Martinique et en Guadeloupe :
― à compter du 1er janvier 2008, le prix maximal de la terminaison d'appel d'Outremer Télécom n'excède pas 22,9 centimes d'euro par minute ;
― à compter du 1er janvier 2009, le prix maximal de la terminaison d'appel d'Outremer Télécom n'excède pas 15,7 centimes d'euro par minute.
A la Réunion et à Mayotte :
― à compter du 1er janvier 2008, le prix maximal de la terminaison d'appel d'Outremer Télécom n'excède pas 27,2 centimes d'euro par minute ;
― à compter du 1er janvier 2009, le prix maximal de la terminaison d'appel d'Outremer Télécom n'excède pas 17,5 centimes d'euro par minute.
Si Outremer Télécom décidait de modifier sa structure tarifaire pour introduire une tarification du BPN, aujourd'hui inexistante, les niveaux de non-excessivité relatifs aux tarifs de la prestation d'acheminement du trafic devraient être revus à la baisse.
Dauphin Télécom :
Dauphin Télécom est actif commercialement depuis juillet 2003 avec un réseau à la norme DECT, puis GSM, sur les îles Saint-Martin et Saint-Barthélemy. En extrapolant les données dont elle dispose, l'Autorité estime que la part de marché de Dauphin Télécom est de l'ordre de 15 %.
Une approche différenciée de la non-excessivité peut se justifier car Dauphin Télécom a une autorisation de fréquences seulement pour les îles Saint-Martin et Saint-Barthélemy, limitant ainsi l'exercice de son activité à ces territoires. Cet opérateur ne bénéficie donc pas des mêmes économies d'échelle que ses concurrents. Toutefois, cela ne permet pas non plus de justifier le maintien d'un niveau trop élevé de terminaison d'appel au regard des principes de régulation de la terminaison d'appel mobile (cf. section 6.1).
Pour l'ensemble des raisons exposées précédemment, et compte tenu des niveaux tarifaires actuels, de l'absence de tarification au BPN, des dates d'attribution des ressources en fréquence, des dates d'entrée sur les marchés de Saint-Martin et Saint-Barthélemy et de l'encadrement tarifaire imposé à Orange Caraïbes, l'Autorité estime que l'écart actuel entre la terminaison d'appel de Dauphin Télécom, d'une part, et celle d'Orange Caraïbes, d'autre part, opérateur avec lequel il est en concurrence directe, doit être réduit rapidement, et ce afin de préserver les conditions d'exercice d'une concurrence loyale sur les marchés de détail sous-jacents.
L'Autorité estime en conséquence que pour respecter l'obligation de non-excessivité le tarif de terminaison d'appel de Dauphin Télécom devrait respecter les conditions suivantes :
― à compter du 1er janvier 2008, le prix maximal de la terminaison d'appel de Dauphin Télécom n'excède pas 24,9 centimes d'euro par minute ;
― à compter du 1er janvier 2009, le prix maximal de la terminaison d'appel de Dauphin Télécom n'excède pas 16,7 centimes d'euro par minute.
Si Dauphin Télécom décidait de modifier sa structure tarifaire pour introduire une tarification du BPN, aujourd'hui inexistante, les niveaux de non-excessivité relatifs aux tarifs de la prestation d'acheminement du trafic devraient être revus à la baisse.
Dans sa réponse à la consultation publique lancée le 24 juillet 2007, Dauphin Télécom indique être dans « l'incapacité de savoir, et éventuellement de faire valoir des corrections, le niveau de BPN pris en compte par l'ARCEP et la façon dont il est répercuté dans le niveau de terminaison d'appel ».
Sur ce point, l'Autorité rappelle que, de manière générale, un BPN est composé en moyenne de 2,6 millions de minutes pour une année et précise qu'elle a, pour les opérateurs ne facturant pas les BPN, bien pris en compte cette non-facturation dans la fixation des valeurs au-delà desquelles les tarifs de TA seraient excessifs (cf. partie 6.2.5).
Enfin, Dauphin Télécom estime qu'en matière d'attribution de fréquences « l'Autorité ne semble pas avoir tenu compte des différences objectives de coûts que Dauphin Télécom a supportées lors du lancement de son activité pour des causes similaires à Bouygues Telecom ». Cela étant dit, l'Autorité tient à souligner qu'elle a bien noté les particularités de l'opérateur, telles que l'attribution tardive des fréquences GSM 900, qui ont été prises en compte dans son analyse.
UTS Caraïbes :
UTS Caraïbes (ex-Tel Cell) est actif commercialement depuis juin 2006 sur Saint-Martin. Il a moins de mille clients sur cette seule île.
Pour l'ensemble des raisons exposées précédemment, et compte tenu des niveaux tarifaires actuels, de l'absence de tarification au BPN, des dates d'attribution des ressources en fréquences, des dates d'entrée sur les marché de Saint-Martin et Saint-Barthélemy et de l'encadrement tarifaire imposé à Orange Caraïbes, l'Autorité estime que l'écart actuel entre la terminaison d'appel d'UTS Caraïbes, d'une part, et celle d'Orange Caraïbes, d'autre part, opérateur avec lequel il est en concurrence directe, doit être réduit, et ce afin de préserver les conditions d'exercice d'une concurrence loyale sur les marchés de détail sous-jacents.
L'Autorité estime en conséquence que pour respecter l'obligation de non-excessivité le tarif de terminaison d'appel d'UTS Caraïbes devrait respecter les conditions suivantes :
― à compter du 1er janvier 2008, le prix maximal de la terminaison d'appel d'UTS Caraïbes n'excède pas 25,9 centimes d'euro par minute ;
― à compter du 1er janvier 2009, le prix maximal de la terminaison d'appel d'UTS Caraïbes n'excède pas 17,7 centimes d'euro par minute.
Si UTS Caraïbes décidait de modifier sa structure tarifaire pour introduire une tarification du BPN, aujourd'hui inexistante, les niveaux de non-excessivité relatifs aux tarifs de la prestation d'acheminement du trafic devraient être revus à la baisse.
SPM Télécom :
SPM Télécom constitue un cas unique d'opérateur intégré sur les activités de téléphonie fixe, téléphonie mobile, fournisseur d'accès à internet et de diffusion audiovisuelle par câble exerçant son activité en monopole. Le risque d'introduire une distorsion concurrentielle du fait d'un niveau trop élevé de terminaison d'appel mobile sur les marchés de détail où SPM Télécom exerce seul est donc inexistant. SPM Télécom commercialise sa prestation de terminaison d'appel mobile au seul opérateur France Télécom, qui est par ailleurs son actionnaire majoritaire. Le nombre d'abonnés mobiles de SPM Télécom se situe autour de 2 800 et la population totale de Saint-Pierre-et-Miquelon est d'environ 7 000 habitants.
Le tarif de terminaison d'appel mobile de SPM Télécom n'impacte donc que la formation des prix de détail des appels à destination de ses abonnés mobiles et en provenance d'autres territoires (métropole et pays tiers).
Compte tenu de ces particularités, l'Autorité n'est pas en mesure d'expliciter la portée de l'obligation de non-excessivité dans l'attente de discussions plus approfondies avec la société. Néanmoins, l'Autorité invite toute partie intéressée à s'exprimer sur le sujet.

6.3. Prestations d'accès aux sites

Pour les mêmes raisons que celles évoquées au début de la section 6.2, l'Autorité estime que les obligations d'orientation vers les coûts et de non-excessivité des tarifs sont deux modalités permettant la convergence à terme des tarifs de terminaison d'appel vers les coûts d'un opérateur efficace. En cohérence avec les obligations de contrôle tarifaire envisagées pour les prestations d'acheminement du trafic de terminaison, l'Autorité impose, pour les prestations connexes d'accès aux sites d'interconnexion, une obligation de pratique des tarifs reflétant les coûts correspondants à Orange Caraïbes et SRR, et une obligation de ne pas pratiquer des tarifs excessifs à Orange Réunion, Dauphin Télécom, Digicel, Outremer Télécom, SPM Télécom et UTS Caraïbes.

6.4. Observations des autorités réglementaires nationales
et de la Commission européenne

Aucune autorité réglementaire nationale n'a transmis d'observation à l'Autorité.
La Commission européenne a transmis le 13 septembre 2007 ses observations à l'Autorité en spécifiant pour l'outre-mer que : « l'ARCEP a l'intention de mettre en œuvre l'orientation des coûts d'Orange Caraïbes et de SRR au cours d'une période de transition qui mènera à une réduction de leurs TTM [tarifs de terminaison d'appel], qui passera ainsi à 0,065 EUR en 2010. Les TTM des autres ORM [opérateurs de réseaux mobiles] actifs dans les territoires d'outre-mer français pourraient être orientés vers les coûts, suite à la troisième évaluation globale du marché. »
La Commission approuve l'asymétrie des tarifs de terminaison d'appel des opérateurs actifs dans les territoires d'outre-mer français car elle est « consciente du fait que les ORM actifs dans les territoires d'outre-mer français opèrent dans des conditions qui ne sont pas nécessairement comparables à celles de la France métropolitaine ou d'autres Etats membres de l'UE ».
Toutefois, la Commission est « convaincue du fait que les principes définis pour une réglementation efficace des TTM s'appliquent également aux territoires d'outre-mer français. Par conséquent, la Commission invite l'ARCEP à réévaluer sa mesure concernant ces ORM à la lumière d'une approche européenne commune, dès que cela aura été établi, et de revoir cette décision, si nécessaire, en vue de réduire les TTM dans les territoires d'outre-mer français de façon plus rapide ».
Par ces motifs, décide :

Définition des marchés pertinents de gros

Article 1

Est déclaré pertinent le marché de gros de la terminaison d'appel vocal mobile sur le réseau de la Société réunionnaise du radiotéléphone (SRR), société anonyme, immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Saint-Denis-de-la-Réunion sous le numéro B 393 551 007 et dont le siège social est situé 21, rue Pierre-Aubert, 97490 Sainte-Clotilde. Ce marché comprend la prestation de terminaison d'appel vocal à destination des numéros mobiles ouverts à l'interconnexion sur le réseau de l'opérateur mobile.

Article 2

Est déclaré pertinent le marché de gros de la terminaison d'appel vocal mobile sur le réseau d'Orange Caraïbes, société anonyme à conseil d'administration, immatriculée au registre du commerce et des sociétés sous le numéro 379 984 891 RCS Nanterre et dont le siège social est situé 1, avenue Nelson-Mandela, 94110 Arcueil. Ce marché comprend la prestation de terminaison d'appel vocal à destination des numéros mobiles ouverts à l'interconnexion sur le réseau de l'opérateur mobile.

Article 3

Est déclaré pertinent le marché de gros de la terminaison d'appel vocal mobile sur le réseau d'Orange Réunion, société anonyme, immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Saint-Denis-de-la-Réunion sous le numéro 432 495 802 et dont le siège social est situé 35, boulevard du Chaudron, 97490 Sainte-Clotilde. Ce marché comprend la prestation de terminaison d'appel vocal à destination des numéros mobiles ouverts à l'interconnexion sur le réseau de l'opérateur mobile.

Article 4

Est déclaré pertinent le marché de gros de la terminaison d'appel vocal mobile sur le réseau de Digicel Antilles Française Guyane (Digicel), société anonyme à conseil d'administration, immatriculée sous le numéro 431 416 288 et dont le siège social est situé Oasis Bois Rouge, 97224 Ducos. Ce marché comprend la prestation de terminaison d'appel vocal à destination des numéros mobiles ouverts à l'interconnexion sur le réseau de l'opérateur mobile.

Article 5

Est déclaré pertinent le marché de gros de la terminaison d'appel vocal mobile sur le réseau de Dauphin Télécom, société par actions simplifiée, immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Basse-Terre sous le numéro B 419 964 010 et dont le siège social est situé 12, rue de la République-Mari, 97150 Saint-Martin. Ce marché comprend la prestation de terminaison d'appel vocal à destination des numéros mobiles ouverts à l'interconnexion sur le réseau de l'opérateur mobile.

Article 6

Est déclaré pertinent le marché de gros de la terminaison d'appel vocal mobile sur le réseau de United Telecommunications SCE Caraïbes (UTS Caraïbes), société à responsabilité limitée, immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Basse-Terre sous le numéro B 429 039 225 et dont le siège social est situé 30, Spring Hills, Marigot, 97150 Saint-Martin. Ce marché comprend la prestation de terminaison d'appel vocal à destination des numéros mobiles ouverts à l'interconnexion sur le réseau de l'opérateur mobile.

Article 7

Est déclaré pertinent le marché de gros de la terminaison d'appel vocal mobile sur le réseau d'Outremer Télécom, société anonyme à conseil d'administration, immatriculée sous le numéro 479 197 287 et dont le siège social est situé 14, boulevard Poissonnière, 75009 Paris. Ce marché comprend la prestation de terminaison d'appel vocal à destination des numéros mobiles ouverts à l'interconnexion sur le réseau de l'opérateur mobile.

Article 8

Est déclaré pertinent le marché de gros de la terminaison d'appel vocal mobile sur le réseau de Saint-Pierre-et-Miquelon Télécom (SPM Télécom), SAS, immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Saint-Pierre-et-Miquelon sous le numéro B 423 583 640 et dont le siège social est situé 5 bis, rue Lebailly, 97500 Saint-Pierre-et-Miquelon. Ce marché comprend la prestation de terminaison d'appel vocal à destination des numéros mobiles ouverts à l'interconnexion sur le réseau de l'opérateur mobile.

Influence significative sur les marchés pertinents de gros
de la terminaison d'appel vocal mobile

Article 9

La Société réunionnaise du radiotéléphone (SRR) est réputée exercer une influence significative sur le marché de gros de la terminaison d'appel vocal mobile sur son réseau.

Article 10

Orange Caraïbes est réputée exercer une influence significative sur le marché de gros de la terminaison d'appel vocal mobile sur son réseau.

Article 11

Orange Réunion est réputée exercer une influence significative sur le marché de gros de la terminaison d'appel vocal mobile sur son réseau.

Article 12

Dauphin Télécom est réputée exercer une influence significative sur le marché de gros de la terminaison d'appel vocal mobile sur son réseau.

Article 13

Digicel est réputée exercer une influence significative sur le marché de gros de la terminaison d'appel vocal mobile sur son réseau.

Article 14

Outremer Télécom est réputée exercer une influence significative sur le marché de gros de la terminaison d'appel vocal mobile sur son réseau.

Article 15

UTS Caraïbes est réputée exercer une influence significative sur le marché de gros de la terminaison d'appel vocal mobile sur son réseau.

Article 16

SPM Télécom est réputée exercer une influence significative sur le marché de gros de la terminaison d'appel vocal mobile sur son réseau.

Obligations imposées à ce titre

Article 17

Les opérateurs exerçant une influence significative sur les marchés pertinents de gros et désignés aux articles 9 à 16 font droit à toute demande raisonnable de prestations d'accès et d'interconnexion relatives à la terminaison d'appel vocal mobile sur son réseau.

Article 18

Les opérateurs désignés aux articles 9 à 16 offrent leurs prestations d'accès et d'interconnexion relatives à la terminaison d'appel vocal mobile sur leur réseau dans des conditions non discriminatoires.

Article 19

Les opérateurs désignés aux articles 9 à 16 sont soumis à une obligation de transparence.
A ce titre, chaque opérateur informe ses clients respectifs de terminaison d'appel vocal mobile des évolutions des conditions techniques et tarifaires en respectant des délais de préavis raisonnables et en tout état de cause dans un délai de deux mois minimum.
Les principaux tarifs des prestations d'accès et d'interconnexion relatives à la terminaison d'appel vocal mobile sont publiés sur le site internet de l'opérateur concerné.
Les opérateurs concernés informent l'Autorité de la signature d'une nouvelle convention d'interconnexion ou d'un avenant à une convention existante dans un délai de sept jours à compter de la signature du document.

Article 20

Orange Caraïbes est soumis à une obligation de séparation comptable et une obligation relative à la comptabilisation des coûts des prestations d'accès et d'interconnexion relatives à la terminaison d'appel vocal mobile.
Les modalités de ces obligations sont définies par des décisions prises séparément par l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes. La décision définissant actuellement les règles et les formats des restitutions comptables en vigueur est la décision n° 2007-0129.

Article 21

SRR est soumis à une obligation de séparation comptable et une obligation relative à la comptabilisation des coûts des prestations d'accès et d'interconnexion relatives à la terminaison d'appel vocal mobile.
Les modalités de ces obligations sont définies par des décisions prises séparément par l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes. La décision définissant actuellement les règles et les formats des restitutions comptables en vigueur est la décision n° 2007-0129.

Article 22

Orange Caraïbes est soumis à l'obligation de pratiquer, pour ses prestations de terminaison d'appel vocal mobile, des tarifs reflétant les coûts correspondants. A ce titre, l'opérateur respecte un encadrement tarifaire pluriannuel concernant ses prestations de terminaison d'appel vocal mobile.
Orange Caraïbes offre des prestations d'accès aux sites relatives à la terminaison d'appel vocal mobile à des tarifs reflétant les coûts correspondants.

Article 23

SRR est soumis à l'obligation de pratiquer, pour ses prestations de terminaison d'appel vocal mobile des tarifs reflétant les coûts correspondants. A ce titre, l'opérateur respecte un encadrement tarifaire pluriannuel concernant ses prestations de terminaison d'appel vocal.
SRR offre des prestations d'accès aux sites relatives à la terminaison d'appel vocal mobile à des tarifs reflétant les coûts correspondants.

Article 24

Orange Caraïbes met en œuvre des tarifs de terminaison d'appel vocal mobile tels que, à compter du 1er janvier 2008 et jusqu'au 31 décembre 2008, le tarif maximum d'une terminaison d'appel vocal mobile n'excède pas 11 centimes d'euro par minute en 2008 et le prix annuel d'un bloc primaire numérique (BPN) n'excède pas 3 600 €.
L'opérateur met en œuvre des tarifs de terminaison d'appel vocal mobile tels que, à compter du 1er janvier 2009 et jusqu'au 31 décembre 2009, le prix maximum d'une terminaison d'appel vocal mobile n'excède pas 8,7 centimes d'euro par minute en 2009 et le prix annuel d'un BPN n'excède pas 3 500 €.

Article 25

SRR met en œuvre des tarifs de terminaison d'appel vocal mobile tels que, à compter du 1er janvier 2008 et jusqu'au 31 décembre 2008, le prix maximum d'une terminaison d'appel vocal mobile n'excède pas 10,5 centimes d'euro par minute en 2008 et le prix annuel d'un bloc primaire numérique (BPN) n'excède pas 3 800 €.
SRR met en œuvre des tarifs de terminaison d'appel vocal mobile tels que à compter du 1er janvier 2009 et jusqu'au 31 décembre 2009, le prix maximum d'une terminaison d'appel vocal mobile n'excède pas 8,5 centimes d'euro par minute en 2009 et le prix annuel d'un BPN n'excède pas 3 600 €.

Article 26

Dauphin Télécom est soumise à l'obligation de ne pas pratiquer, pour ses prestations de terminaison d'appel vocal mobile, des tarifs excessifs.
Dauphin Télécom est soumise à l'obligation de ne pas pratiquer, pour ses prestations d'accès aux sites relatives à la terminaison d'appel vocal mobile, des tarifs excessifs.

Article 27

Digicel est soumise à l'obligation de ne pas pratiquer, pour ses prestations de terminaison d'appel vocal mobile, des tarifs excessifs.
Digicel est soumise à l'obligation de ne pas pratiquer, pour ses prestations d'accès aux sites relatives à la terminaison d'appel vocal mobile, des tarifs excessifs.

Article 28

Orange Réunion est soumise à l'obligation de ne pas pratiquer, pour ses prestations de terminaison d'appel vocal mobile, des tarifs excessifs.
Orange Réunion est soumise à l'obligation de ne pas pratiquer, pour ses prestations d'accès aux sites relatives à la terminaison d'appel vocal mobile, des tarifs excessifs.

Article 29

Outremer Télécom est soumise à l'obligation de ne pas pratiquer, pour ses prestations de terminaison d'appel vocal mobile, des tarifs excessifs.
Outremer Télécom est soumise à l'obligation de ne pas pratiquer, pour ses prestations d'accès aux sites relatives à la terminaison d'appel vocal mobile, des prix excessifs.

Article 30

UTS Caraïbes est soumise à l'obligation de ne pas pratiquer, pour ses prestations de terminaison d'appel vocal mobile, des prix excessifs.
UTS Caraïbes est soumise à l'obligation de ne pas pratiquer, pour ses prestations d'accès aux sites relatives à la terminaison d'appel vocal mobile, des prix excessifs.

Article 31

SPM Télécom est soumise à l'obligation de ne pas pratiquer, pour ses prestations de terminaison d'appel vocal mobile, des prix excessifs.
SPM Télécom est soumise à l'obligation de ne pas pratiquer, pour ses prestations d'accès aux sites relatives à la terminaison d'appel vocal mobile, des prix excessifs.

Durée de validité et exécution

Article 32

La présente décision s'applique à compter du 1er janvier 2008 et pour une durée de trois ans, sans préjudice d'un éventuel réexamen anticipé, conformément aux dispositions des articles D. 301 à D. 303 du code des postes et des communications électroniques.

Article 33

Le directeur général de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes est chargé de l'application de la présente décision. Il notifiera aux sociétés Orange Caraïbes, SRR, Dauphin Télécom, Digicel, Orange Réunion, Outremer Télécom, UTS Caraïbes, SPM Télécom cette décision ainsi que, le cas échéant, les annexes soumises au secret des affaires les concernant. La présente décision et ses annexes, à l'exclusion des parties couvertes par le secret des affaires, seront publiées au Journal officiel de la République française.

A N N E X E A