Le comité de règlement des différends et des sanctions est saisi par la société ELEC'CHANTIER 44 des faits suivants.
La société ELEC'CHANTIER 44 est une société par actions simplifiée dont l'activité est la distribution d'électricité provisoire sur les chantiers et la gestion des démarches relatives aux demandes de raccordements provisoires et de raccordements définitifs. Elle est mandatée par Mme G. et M. D., demeurant […].
Le 23 janvier 2020, Mme G. et M. D. ont fait l'acquisition d'une parcelle n° 1145, détachée de la parcelle n° 1051, située au […].
Cette parcelle n° 1145 est desservie par un passage commun constitué des parcelles nos 1053 et 1055 dont les demandeurs ont fait l'acquisition de la pleine propriété pour un huitième indivis.
En vertu d'un mandat qui lui a été confié, la société ELEC'CHANTIER 44 a déposé le 26 mai 2020 une demande de raccordement définitif auprès de la société Enedis pour un pavillon neuf isolé.
Par un courrier électronique en date du 8 juin 2020, la société Enedis a communiqué à la société ELEC'CHANTIER 44 le numéro de dossier correspondant à sa demande de raccordement définitif.
Le 16 juin 2020, le gestionnaire du réseau public de distribution d'électricité a réalisé le branchement provisoire de l'installation de consommation des demandeurs.
Par un courrier électronique en date du 2 juillet 2020, et à la suite d'un appel téléphonique avec la société Enedis, la société ELEC'CHANTIER 44 a transmis le permis de construire des demandeurs.
Par un courrier électronique en date du 7 juillet 2020, la société ELEC'CHANTIER 44 a demandé à la société Enedis de lui confirmer la complétude de son dossier.
Lors d'échanges de courriers électroniques les 9 et 10 juillet 2020, la société Enedis a informé la société ELEC'CHANTIER 44 qu'une étude technique était en cours afin de préciser l'emplacement du réseau et analyser les besoins d'une éventuelle extension du réseau.
A la suite d'une demande de la société ELEC'CHANTIER 44 en date du 13 juillet 2020, la société Enedis a répondu par courrier électronique qu'elle n'était pas en mesure de donner une date pour la visite technique du chantier.
Par un courrier électronique en date du 24 juillet 2020, la société ELEC'CHANTIER 44 a demandé à la société Enedis la communication du compte rendu de la visite technique.
Par un courrier électronique en date du 31 juillet 2020, la société Enedis a indiqué qu'une réponse aurait été faite indiquant la solution d'une extension nécessaire.
Par courriers électroniques en date des 4 et 6 août 2020, la société ELEC'CHANTIER 44 a demandé à nouveau à la société Enedis la communication du compte rendu de la visite technique.
Par un courrier électronique en date du 7 août 2020, la société Enedis a expliqué à la société ELEC'CHANTIER 44 qu'une extension du réseau était nécessaire puisque « le C.C.P.I. [coupe-circuit principal individuel] [doit] être implanté en limite de propriété et sur la parcelle à desservir n° B1051p est d'environ 100 mètres. »
Par un courrier en date du 21 septembre 2020, la société ELEC'CHANTIER 44 a demandé à Mme Marianne LAIGNEAU, présidente du directoire de la société Enedis, que lui soit communiquée la position de la direction nationale sur son dossier, étant rappelé que les voisins des demandeurs ont pu bénéficier de branchements de type 2.
Par un courrier en date du 27 octobre 2020, la société Enedis a confirmé qu'un branchement de type 1 correspondait bien à la solution de raccordement de référence et expliqué les raisons pour lesquelles les voisins avaient été raccordés à l'aide de branchements de type 2 au regard de la réglementation en vigueur à l'époque.
C'est dans ces conditions que la société ELEC'CHANITER 44 a saisi le comité de règlement des différends et des sanctions d'une demande de règlement de différend.
Par une saisine, un mémoire en réplique et un mémoire récapitulatif, enregistrés sous le numéro 07-38-21 le 4 mars 2021, le 2 avril 2021 et le 3 mai 2021, la société ELEC'CHANTIER 44, représentée par son dirigeant M. Gwenaël BRANCO, demande au comité de règlement des différends et des sanctions, dans le dernier état de ses écritures, de :
- se déclarer compétent pour statuer sur la demande de règlement du différend qui oppose d'une part M. D. et Mlle G. et d'autre part Enedis Poitou-Charentes ;
- déclarer recevables et fondées la saisine et toutes les prétentions d'ELEC'CHANTIER représentant M. D. et Mlle G. ;
- enjoindre Enedis Poitou-Charentes à respecter ses obligations de service public, conformément au code de l'énergie, au code de bonne conduite et à la documentation technique de référence, et donc à réaliser un branchement de type 2 pour le raccordement de la construction de M. D. et Mlle G.
La société ELEC'CHANTIER 44 soutient :
- que le CoRDiS est compétent pour examiner la demande de règlement de différend présentée par elle pour le compte de Mme G. et M. D., utilisateurs du réseau, à l'encontre du gestionnaire du réseau public de distribution d'électricité en application de l'article L. 134-19 du code de l'énergie ; que ce différend porte sur une problématique d'accès au réseau public de distribution d'électricité ; qu'en outre, depuis près d'un an, le traitement de la demande de raccordement par la société Enedis se fait de manière non transparente, discriminatoire, dans des conditions contraires au respect de la documentation technique de référence, qu'ainsi Enedis Poitou-Charentes n'assure pas le droit d'accès au réseau public de distribution d'électricité ; que par ailleurs le cas d'espèce présente des caractéristiques identiques et comparables à la situation de Mme et M. J. pour lesquels le CoRDiS a eu à statuer sur la demande de règlement de différend en 2019 ; qu'à ce jour, les demandeurs qui ont aménagé dans leur maison durant le mois d'août 2020 sont raccordés par un branchement provisoire alors que la société Enedis disposait de l'information de la date de leur emménagement ; qu'ils ne demandent pourtant que le raccordement de leur résidence selon les normes en vigueur, à savoir un branchement de type 2 tel que sollicité dans leur demande de raccordement définitif ; qu'aux termes de l'article 31 du code de procédure civile et de l'article L. 134-19 du code de l'énergie et compte tenu de la solution technique définie, confirmée à plusieurs reprises et imposée par la société Enedis, il existe bien un refus d'accès au réseau public de distribution d'électricité et, par ces motifs, qu'elle dispose donc bien d'un intérêt à agir au jour de sa saisine ;
- que la société Enedis a fait preuve d'un défaut d'information, d'objectivité et de transparence puisqu'en premier lieu, il ressort du certificat d'urbanisme délivré au nom de la commune de […] que la société Enedis a indiqué qu'une extension du réseau d'électricité serait nécessaire sur le domaine privé, à la charge du pétitionnaire alors que la parcelle n° B1053 constituant un chemin privé, aucuns travaux d'extension du réseau ne sauraient être réalisés sur celle-ci ; qu'en second lieu, à la demande de la société Enedis, elle a communiqué le 3 juin 2020 le permis de construire manquant puis a reçu le 8 juin 2020 un numéro de dossier confirmant sa bonne réception ; que ce permis de construire est suffisant en l'espèce pour permettre le traitement de la demande de raccordement définitif conformément aux procédures du gestionnaire du réseau public de distribution d'électricité et notamment la procédure Enedis-PRO-RAC_21E, de sorte qu'il n'est pas de la responsabilité de la société Enedis de remettre en cause la validité des actes attestant de la propriété des demandeurs ; que conformément aux procédures, elle a bien transmis lors de sa demande de raccordement l'ensemble des éléments nécessaires prévus par le formulaire, notamment la précision de la longueur de 40 mètres entre l'emplacement du coffret de coupure en limite de propriété et le tableau électrique situé dans l'habitation - cette longueur de 40 mètres expliquant la réalisation d'un branchement de type 2 - et le plan de masse indiquant l'emplacement souhaité du CCPI en limite de propriété mais que, près d'un an après l'envoi de la demande initiale, sa demande n'a toujours pas été traitée correctement par Enedis Poitou-Charentes ; qu'enfin la société Enedis a failli à ses obligations de transparence et de communication puisque malgré trois demandes de sa part, la société Enedis refuse de lui transmettre le compte rendu de la visite technique attestant qu'une extension de réseau public sur le chemin privé serait nécessaire, méconnaissant ainsi les dispositions du code de bonne conduite qui s'appliquent pourtant à l'ensemble des équipes du gestionnaire du réseau public de distribution d'électricité, notamment celles qui prévoient la communication des éléments de réponse pour le traitement des réclamations « dans des délais maitrisés (15 jours) » ainsi que la communication aux demandeurs des « conditions techniques, contractuelles et financières du raccordement, de jalonnement et de suivi des travaux » ;
- que la société Enedis n'a pas respecté son obligation de non-discrimination prévue à l'article L. 121-4 du code de l'énergie et inscrite dans son code de bonne conduite ; qu'en effet en premier lieu en refusant de communiquer le compte rendu de l'étude technique la société Enedis a négligé le droit d'accès au réseau et agit dans des conditions manifestement discriminatoires ; qu'en second lieu malgré les branchements de type 2 réalisés pour les voisins et la demande de Mme G. et M. D., la société Enedis s'obstine à vouloir imposer un branchement de type 1 en invoquant des impératifs de sécurité notamment les potentielles interventions des services de secours alors que les services de secours, s'ils devaient intervenir sur la résidence des demandeurs, le feraient dès l'entrée du chemin privé, à partir du domaine public, et non à l'extrémité de ce chemin privé ; qu'au surplus et aux vues de la situation géographique il est très improbable que cette extension de réseau voulue par la société Enedis ne serve à raccorder in fine une autre construction que celle considérée en l'espèce, que dès lors la réalisation de tels travaux serait contradictoire avec la mission de la société Enedis de gérer le service public « dans les meilleures conditions de sécurité, de qualité, de coûts, de prix et d'efficacité économique, sociale et énergétique » ; que la parcelle n° 1053 est un chemin privé et qu'il n'est donc pas de la responsabilité de la société Enedis de s'approprier la vérification du bon respect de la norme NF C 15-100 applicable en l'espèce ; que le CoRDiS avait déjà dénoncé dans sa décision du 8 octobre 2019 un tel comportement discriminatoire, décision qui a été annulée seulement sur la forme et non sur le fond par la Cour d'appel de Paris ; que par ailleurs elle constate encore une fois la volonté de la société Enedis d'exproprier les utilisateurs de leurs biens en les forçant à signer une convention de servitude pour permettre la réalisation des travaux d'extension du réseau ; que c'est d'ailleurs pour de tels manquements que les époux J. l'ont mandatée aux fins de saisir le CoRDiS d'une demande de sanction à l'encontre de la société Enedis ; que dans de nombreuses autres affaires la société Enedis a tenté de contraindre des demandeurs où leurs voisins à signer des conventions de servitude qui n'étaient pas justifiées, exemples à l'appui ;
- que la société Enedis n'a pas respecté sa documentation technique de référence, ne permettant pas l'accès au réseau public de distribution d'électricité des demandeurs ; en premier lieu puisque l'arrêté du 22 octobre 1969 qui prévoit l'application obligatoire de la norme NF C 14-100 pour établir l'opération de raccordement de référence a été abrogé par l'arrêté du 3 août 2016, ce qui a été rappelé par le CoRDiS dans sa décision du 8 octobre 2019 et que la société Enedis ne conteste pas, que toutefois cette dernière juge l'application de cette norme nécessaire et la considère comme seule référence technique en la matière ; que c'est en vertu de cette norme que la société Enedis refuse de réaliser un branchement de type 2 puisque la norme en vigueur aujourd'hui prévoit l'implantation du CCPI en limite de la propriété desservie ; que cette dernière mesure correspond à une évolution de la norme en date de février 2008, justifiant que des branchements de type 2 aient pu être effectués pour les voisins des demandeurs avant cette date ; que pour autant le point 8.2 prévoit que dans le cas d'un branchement individuel à puissance limitée type 2, le point de livraison se trouve en dehors des locaux de l'utilisateur, à l'entrée de sa propriété ; que dans ces conditions les demandeurs disposent bien des droits suffisants pour permettre un branchement de type 2 puisqu'ils sont propriétaires indivis de la parcelle traversante ; que la société Enedis ne peut soutenir qu'aucune autre solution techniquement et juridiquement cohérente ne pourrait être proposée si elle n'apporte pas d'informations supplémentaires puisqu'elle a transmis tous les éléments nécessaires conformément aux procédures avec un formulaire de demande de raccordement dûment rempli et mentionnant notamment la longueur de 40 mètres entre l'emplacement du coffret de coupure en limite de propriété et le tableau électrique ; qu'en outre, si la société Enedis tente de justifier le recours à un branchement de type T1 en invoquant le point 3.2.6.2 de la norme qui prévoit que l'appareil général de commande et de protection (AGCP) est placé en général à proximité du CCPI sur la parcelle dont l'utilisateur à l'exclusivité de l'usage, le point 5.1.2 prévoit lui que le « CCPI est placé sur une paroi verticale et accessible depuis le domaine public, sans franchissement d'accès contrôlé » ; qu'ainsi la réalisation d'un branchement de type 1 ne permettrait pas l'accès du CCPI depuis le domaine public ce qui ne permettrait pas de satisfaire à cette exigence de sécurité, et, au surplus, qu'en imposant la réalisation d'une extension du réseau, la société Enedis tente à nouveau d'exproprier indument l'utilisateur puisque ce dernier ne pourrait par exemple plus installer un portail en limite de sa parcelle ;
- qu'en second lieu, la société Enedis a méconnu sa procédure Enedis-PRO-RAC_21E et notamment le point 7 en refusant de transmettre le compte rendu de son étude technique puisque ce dernier précise que l'accueil de la demande de raccordement « comprend la délivrance d'informations générales en réponse aux sollicitations des demandeurs sur les conditions de réalisation et de facturation des raccordements » ; mais également le point 8.1. en refusant la réalisation d'un branchement de type 2 alliant pourtant les impératifs de sécurité et les normes techniques de référence et correspondant à la demande formée lors de la demande de raccordement avec la notification du CCPI sur le plan de masse ; ainsi que le point 5.1 qui prévoit la position du branchement qui, pour les demandeurs, doit être raccordé au réseau existant situé rue […] ; et pour finir les dispositions relatives à l'obligation pour la société Enedis d'étudier une alternative ne correspondant pas à l'opération de raccordement de référence mais qui correspondrait aux choix ou préférences exprimés par le demandeur puisque la société Enedis n'a jamais étudié une autre solution technique que celle qu'elle a présentée ; qu'enfin cette procédure de raccordement dure depuis près d'une année entière mais n'aboutit pas malgré ses actions au niveau local puis au niveau national.
Par trois mémoires en défense et un mémoire récapitulatif, enregistrés le 22 mars 2021, le 15 avril 2021, le 22 avril 2021 et le 3 mai 2021, la société Enedis, représentée par sa présidente du directoire, Mme Marianne LAIGNEAU, et ayant pour avocat Me Anne-Laure-Hélène DES YLOUSES, Cabinet Fieldfisher, demande au comité de règlement des différends et des sanctions, dans le dernier état de ses écritures, de :
- déclarer irrecevable la saisine d'ELEC'CHANTIER pour défaut d'intérêt à agir ;
- in limine litis demander à ELEC'CHANTIER de produire des informations exhaustives sur les droits attachés à la parcelle n° 1053 ;
- à titre principal donner acte à Enedis que la solution de raccordement évoquée correspondait à la solution technique de référence sur la base des informations incomplètes et donc erronées qui lui avaient été transmises par ELEC'CHANTIER ;
- rejeter toutes les demandes, moyens, fins et prétentions d'ELEC'CHANTIER.
La société Enedis soutient :
- tout d'abord qu'elle ne peut répondre aux arguments soulevés par la société ELEC'CHANTIER qui ne sont pas juridiquement rattachés à la demande de raccordement définitif des demandeurs et qui s'apparentent à des griefs qui ont pu être précédemment présentés par la société ELEC'CHANTIER devant le CoRDiS dans le cadre d'une autre procédure engagée en application des articles L. 134-25 et s. du code de l'énergie ;
- à titre liminaire, que la société ELEC'CHANTIER tente de créer une confusion en arguant que la réalisation d'un branchement individuel ne devrait pas donner lieu à la signature d'une convention de servitude contrairement à une extension alors qu'un branchement individuel est une composante du réseau public de distribution d'électricité qui peut faire l'objet d'une servitude légale, d'une convention de servitude d'utilité publique ou d'une déclaration d'utilité publique par l'autorité administrative compétente ; que les deux parcelles nos 1053 et 1145 ne peuvent être considérées comme une même unité foncière au regard de la jurisprudence ; qu'une servitude d'utilité publique sur la parcelle indivise lui permettrait d'intervenir sur ce tronçon pour les besoins du service ; que le fait de bénéficier sur le fonds indivis d'une servitude légale signifie que cette servitude s'imposera à tout nouvel acquéreur du fond, sans que l'alimentation du fond desservi ne puisse être compromise alors que si l'alimentation devient privée, le nouvel acquéreur pourrait rejeter le principe d'une occupation de son terrain ou refuser des interventions d'entretien de l'alimentation privée ; qu'ainsi la solution évoquée par elle est celle qui lui permet de répondre au mieux à ses obligations d'assurer la desserte en électricité et la sécurité du réseau ;
- que la saisine d'ELEC'CHANTIER doit être déclarée irrecevable pour défaut d'intérêt à agir, ce dernier devant être né, actuel, direct et personnel ; qu'en outre, la saisine a été formée en raison d'un prétendu refus de l'accès au réseau qui ne peut être caractérisé puisque les discussions sur les conditions techniques sont toujours en cours et qu'elle n'a envoyé aucune proposition de raccordement ; dès lors la société ELEC'CHANTIER ne peut valablement prétendre qu'une solution technique de raccordement aurait été adoptée et lui aurait été imposée ; qu'au surplus elle a indiqué être disposée à rechercher la solution de raccordement idoine dès lors qu'elle sera en possession de toutes les informations nécessaires ;
- qu'au regard du choix de la société ELEC'CHANTIER d'indiquer que sa demande de raccordement était relative au raccordement d'un pavillon neuf isolé et de ne pas mentionner l'existence de droits d'indivis, la solution de raccordement évoquée par elle est conforme à la réglementation en vigueur compte tenu des informations dont elle dispose s'agissant de l'état d'enclave de la parcelle n° 1145, en effet en matière de parcelles enclavées ne disposant pas d'un accès direct au domaine public, la norme NF C 14-100 prévoit que le coffret contenant le coupe-circuit principal individuel (CCPI) et la dérivation individuelle doivent se trouver sur la parcelle à desservir et non pas sur la parcelle appartenant à un tiers pour des impératifs de sécurité et de bon fonctionnement du réseau ; que la norme NF C 14-100 est la seule norme permettant de répondre aux objectifs de sécurité tels que posés par l'arrêté du 3 août 2016 portant réglementation des installations électriques des bâtiments d'habitation et qu'il pose, pour toutes les installations électriques conçues selon cette norme, un principe de présomption de conformité aux objectifs qu'il a fixés ; qu'en outre, d'une part, la société ELEC'CHANTIER affirme que la norme NF C 15-100 est applicable alors que l'arrêté précité lui confère un caractère non obligatoire et que, d'autre part, le caractère non obligatoire de la norme NF C 14-100 ne suffit pas à l'écarter dès lors qu'il s'agit de la seule norme connue et pertinente en vigueur, ce que la société ELEC'CHANTIER reconnait sur son site internet ; qu'ainsi, étant la seule norme de référence en vigueur, elle est de facto la norme applicable au cas d'espèce ; qu'enfin, elle ne pouvait donc pas proposer de placer le coffret de raccordement sur le chemin privé appartenant à la famille A. puisque le parcours d'une dérivation individuelle ne peut pas empiéter sur une parcelle autre que celle à desservir ;
- que c'est volontairement que la société ELEC'CHANTIER n'a pas indiqué lors de la demande de raccordement que les demandeurs disposaient de droits indivis sur la parcelle n° 1053 ; que le plan de masse fourni lors de la demande de raccordement fait apparaître une servitude de passage sur le chemin privé et non des droits indivis ; que le constat de l'existence d'une servitude de droit privé entre particuliers à laquelle elle n'est pas partie lui interdit d'intervenir en cas d'incident sur le câble de raccordement sauf à ce qu'une convention de servitude d'utilité publique soit signée pour lui permettre de répondre à toutes les contraintes qui pèsent sur elle dans l'exercice de ses missions ; qu'affirmer que cette solution poserait des problèmes d'exploitation est faux dans la mesure où cette solution lui permet précisément d'intervenir sur le branchement jusqu'au CCPI ; que le permis de construire transmis lors de la demande de raccordement ne porte que sur la parcelle à construire et non sur la parcelle n° 1053 ; que par ailleurs la société ELEC'CHANTIER persiste à refuser de lui communiquer des informations claires et instrumentalise le dossier pour faire valider une solution de raccordement qui ne serait pas conforme à la réglementation technique en vigueur ; que c'est à cette fin qu'elle invoque la décision n° 05-38-19 du CoRDiS qui a pourtant été annulée dans toutes ses dispositions par un arrêt de la Cour d'appel de Paris en date du 14 janvier 2021 ; qu'en outre, il avait été relevé à tort dans cette affaire que la parcelle devant être raccordée était enclavée alors que les demandeurs disposaient de droits indivis sur la parcelle desservant la parcelle à raccorder, ce que la société ELEC'CHANTIER a toujours refusé de confirmer ; que la société ELEC'CHANTIER instrumentalise également ce dossier en exigeant la réalisation de sa solution de raccordement qui lui permettrait de réaliser une installation intérieure particulièrement importante aux frais de M. D. et Mme G. puisque leur installation intérieure, avec un branchement de type 2, relèverait cette fois de la norme NF C 15-100 et nécessiterait une liaison d'environ 100 mètres entre le coffret et la maison, installation qui ne serait plus alors sous sa responsabilité et s'ajouterait au coût du raccordement préconisé par cette dernière ; qu'elle n'a appris qu'au stade de la saisine du CoRDiS l'existence des droits indivis des demandeurs, lesquels, s'ils étaient confirmés, la conduirait à réaliser une nouvelle analyse afin de proposer une solution de raccordement idoine, techniquement et juridiquement cohérente et conforme à la réglementation en vigueur ; qu'ainsi l'accès au réseau des demandeurs est parfaitement garanti puisque le dossier de raccordement est toujours en cours d'instruction ;
- que les voisins des demandeurs ont pu bénéficier de raccordements de type 2 conformes à la norme NF C 14-100 en vigueur à l'époque puisque les habitations concernées ont été bâties à partir de permis de construire délivrés avant février 2008, date à laquelle la norme a été modifiée obligeant désormais l'implantation de tout coffret sur la parcelle à alimenter en limite de propriété ;
- qu'en agissant de la sorte, la société ELEC'CHANTIER méconnaît ses obligations de mandataire telles qu'elles résultent de l'article 1993 du code civil et notamment son obligation de rendre compte de sa gestion ;
- qu'il résulte de tout ce qui précède que, d'une part, il est demandé au CoRDiS de donner acte que la solution de raccordement proposée par elle correspondait à la solution technique de référence sur la base des informations incomplètes transmises par la société ELEC'CHANTIER et, d'autre part, qu'il est demandé au CoRDiS de solliciter la communication de l'acte de vente notarié des demandeurs dans lequel l'étendue des servitudes et des droits indivis doit avoir été prévue et plus généralement de toute information probante qui permettrait de clarifier la situation des parcelles nos 1145 et 1053 ;
- qu'enfin, elle est disposée à rechercher la solution de raccordement idoine techniquement et juridiquement cohérente et conforme à la réglementation en vigueur dans la mesure où des informations exhaustives lui seraient communiquées, les informations contenues dans l'attestation notariée transmise par les demandeurs étant insuffisantes pour être probantes, ne permettant pas notamment de savoir si les demandeurs sont propriétaires indivis minoritaires ou majoritaires de cette parcelle et si les demandeurs sont seuls propriétaires indivis chacun pour une partie de la parcelle n° 1053 ou si les membres de la famille A. sont eux aussi toujours propriétaires indivis ; que par ailleurs la société ELEC'CHANTIER entretient une confusion en soutenant d'une part que la parcelle n° 1053 constitue un chemin privé sur lequel ne peuvent être réalisés des travaux d'extension du réseau public et, d'autre part, en affirmant que cette même parcelle appartient en indivision aux demandeurs ; qu'enfin elle n'exclut pas par principe la réalisation d'un raccordement de type 2 dès lors que celui-ci est conforme à la norme NF C 14-100 et que dans l'éventualité où une nouvelle analyse permettrait de conclure qu'il s'agit de l'opération de raccordement de référence, alors ce serait la solution retenue par elle, conformément aux dispositions de l'arrêté du 28 août 2007.
Par une décision du 2 avril 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 3 mai 2021 à 12 heures.
Par courriers électroniques du 26 avril 2021, les parties ont accepté le principe de participer à la séance publique au moyen d'une communication électronique.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'énergie, notamment ses articles L. 134-19 et suivants et R. 134-7 et suivants ;
- l'arrêté du 28 août 2007 fixant les principes de calcul de la contribution mentionnée aux articles 4 et 18 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité ;
- l'arrêté du 3 août 2016 portant réglementation des installations électriques des bâtiments d'habitation ;
- la délibération n° 2019-275 de la Commission de régulation de l'énergie du 12 décembre 2019 portant décision sur les règles d'élaboration des procédures de traitement des demandes de raccordement aux réseaux publics de distribution d'électricité et le suivi de leur mise en œuvre ;
- la procédure de traitement des demandes de raccordement d'une installation individuelle de consommation ou de consommation et de production simultanée en BT de puissance inférieure ou égale à 36 kVA au réseau public de distribution géré par Enedis - identifiée (Enedis-PRO-RAC_21E) ;
- la décision du 13 février 2019 portant adoption du règlement intérieur du comité de règlement des différends et des sanctions de la Commission de régulation de l'énergie ;
- la décision du 8 mars 2021 du président du comité de règlement des différends et des sanctions de la Commission de régulation de l'énergie, relative à la désignation d'un rapporteur pour l'instruction de la demande de règlement de différend enregistrée sous le numéro 07-38-21.
Les parties ayant été régulièrement convoquées à la séance publique, qui s'est tenue par visio-conférence le 10 mai 2021, du comité de règlement des différends et des sanctions, composé de M. Thierry TUOT, président, Mme Henriette CHAUBON, M. Henri de LAROSIERE de CHAMPEU, membres, en présence de :
M. Emmanuel RODRIGUEZ, directeur adjoint de la direction des affaires juridiques et représentant le directeur général empêché ;
M. Martial FOURNIER de SAINT JEAN, rapporteur ;
Mme V. B., représentant la société ELEC'CHANTIER 44 ;
Les représentants de la société Enedis, assistés de Me Anne-Laure-Hélène DES YLOUSES,
Les parties ayant été informées qu'à tout moment, le président du comité peut décider de lever la séance pour qu'elle soit prorogée à une date ultérieure en cas de difficulté matérielle, notamment liée à la capacité de connexion de l'un des participants, ne permettant pas le déroulement normal de la séance.
L'ensemble des parties ayant confirmé la bonne qualité de la liaison électronique et avoir été informé des modalités de convocation à la séance publique.
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Martial FOURNIER de SAINT JEAN, présentant les moyens et les conclusions des parties ;
- les observations de Mme V. B., pour la société ELEC'CHANTIER 44, cette dernière persiste dans ses moyens et conclusions ;
- les observations de Me Anne-Laure-Hélène DES YLOUSES et M. C. D., pour la société Enedis, cette dernière persiste dans ses moyens et conclusions. La société Enedis ajoute, d'une part, que le compte rendu de l'étude technique réalisée au mois de juillet 2020 sur le site des demandeurs ne pouvait être communiqué à la société ELEC'CHANTIER 44 sans l'accord du Syndicat département d'électrification et équipement rural de la Charente-Maritime et, d'autre part, que la distance entre le domaine public rue […] et le fond de la parcelle à desservir est trop importante pour garantir la qualité de la distribution d'électricité sans extension du réseau public.
Le comité de règlement des différends et des sanctions en ayant délibéré après que les parties, le rapporteur, le public et les agents des services se sont retirés.
Sur la question de la recevabilité de la saisine de la société ELEC'CHANTIER 44
- Aux termes de l'article L. 134-19 du code de l'énergie : « Le comité de règlement des différends et des sanctions peut être saisi en cas de différend : / 1° Entre les gestionnaires et les utilisateurs des réseaux publics de transport ou de distribution d'électricité ou de réseaux fermés de distribution d'électricité ; […] Ces différends portent sur l'accès auxdits réseaux, ouvrages et installations ou à leur utilisation, notamment en cas de refus d'accès ou de désaccord sur la conclusion, l'interprétation ou l'exécution des contrats mentionnés aux articles L. 111-91 à L. 111-94, L. 111-97, L. 321-11 et L. 321-12, ou des contrats relatifs aux opérations de transport et de stockage géologique de dioxyde de carbone mentionnés à l'article L. 229-49 du code de l'environnement. […] »
- Aux termes du point 8.1 de la procédure Enedis-PRO-RAC_21E : « […] L'emplacement du coupe-circuit principal individuel (CCPI) situé en limite de parcelle est déterminé en fonction des indications portées sur le plan de masse joint au permis de construire (à défaut de permis de construire, sur indication du Demandeur), de l'emplacement du réseau existant et des contraintes techniques liées au raccordement. »
- Il est constant que la société Enedis a la qualité de gestionnaire du réseau public de distribution d'électricité et que la société ELEC'CHANTIER 44 représente Mme G. et M. D., qui l'ont mandatée, en leur qualité d'utilisateurs de ce réseau.
- En outre, il ressort de l'instruction du dossier, d'une part, que la société ELEC'CHANTIER 44 demande au comité d'enjoindre à la société Enedis de réaliser un branchement de type 2 pour le raccordement de la construction des demandeurs dont l'emplacement du CCPI peut se déduire des indications transmises par les demandeurs sur le plan de masse fourni lors de leur dépôt du formulaire de demande de raccordement définitif. D'autre part, il ressort également des pièces du dossier que si aucune proposition de raccordement n'a encore été adressée aux demandeurs, les représentants en région de la société Enedis ont toutefois confirmé par écrit à plusieurs reprises que la seule solution technique retenue était un branchement de type 1, et que cette société demande au comité de lui donner acte que la solution exposée par elle correspond à la solution technique de référence en l'état des informations dont elle dispose.
- Par la suite, il y a lieu pour le comité de règlement des différends et des sanctions de constater que le différend qui lui est soumis porte sur la solution technique de raccordement formellement exposée par la société Enedis à ce stade, laquelle a pour conséquence in fine de définir les conditions techniques et financières de l'accès au réseau public de distribution d'électricité.
- Il s'ensuit que la société ELEC'CHANTIER 44 dispose bien d'un intérêt pour agir au jour de sa saisine et que le CoRDiS est compétent pour connaître de la demande de règlement du présent différend.
Sur les demandes d'informations exhaustives sur les droits attachés à la parcelle n° 1053 - La société Enedis soutient que la société ELEC'CHANTIER 44 a volontairement refusé d'indiquer lors de la demande de raccordement que les demandeurs disposaient de droits indivis sur la parcelle n° 1053 et qu'elle persiste à refuser de communiquer des informations sur les droits associés à ladite parcelle. Par conséquent, la société Enedis demande au CoRDiS de demander à la société ELEC'CHANTIER 44 de produire des informations exhaustives sur les droits attachés à la parcelle n° 1053.
- D'une part, il ne ressort ni du formulaire de demande de raccordement définitif généré par la société Enedis et complété par la société ELEC'CHANTIER 44 ni des procédures du gestionnaire du réseau public de distribution d'électricité que le demandeur est tenu de produire des informations sur ses éventuels droits attachés à une parcelle traversée en amont de la parcelle desservie. En outre, il ne ressort pas non plus des pièces du dossier que la société Enedis a cherché à obtenir de telles informations auprès de la société ELEC'CHANTIER 44 lors du traitement de la demande de raccordement.
- D'autre part, les pouvoirs d'instruction du CoRDiS sont destinés à lui procurer des informations qui lui paraissent utiles dans le cadre de son appréciation du différend et de la solution à lui donner. Il incombe néanmoins à la société Enedis, dans le cadre de sa mission d'instruction d'une demande de raccordement, de solliciter du demandeur les informations complémentaires dont elle estime avoir besoin. Cette instruction ne saurait être considérée comme suspendue à compter de la saisine du CoRDiS et il appartient bien à la société Enedis de demander ces informations selon ses propres procédures. Dès lors, la société Enedis ne saurait se prévaloir d'une demande auprès du comité, notamment par la voie d'une demande de mesure d'instruction que le rapporteur devrait proposer aux membres du comité, pour justifier qu'elle n'ait pas entrepris les démarches lui incombant pour obtenir les informations qu'elle estime nécessaires pour l'élaboration d'une solution technique.
- Par ailleurs, le comité estime que les informations figurant dans l'attestation notariée en date du 23 janvier 2020 transmise par la société ELEC'CHANTIER 44 sont suffisantes pour lui permettre de se prononcer sur la présente demande de règlement de différend.
- Dès lors, il n'y a pas lieu pour le comité d'enjoindre à la société ELEC'CHANTIER 44 de transmettre à la société Enedis de telles informations.
Sur le déroulement de l'instruction par la société Enedis de la demande de raccordement de Mme G. et M. D. - La société ELEC'CHANTIER 44 soutient qu'en refusant de lui communiquer le compte rendu de la visite technique attestant qu'une extension de réseau public sur le chemin privé serait nécessaire, et ce malgré trois demandes de sa part, la société Enedis a agi de manière manifestement discriminatoire et failli à ses obligations de transparence et de communication.
- Aux termes de l'article L. 121-4 du code de l'énergie : « I. - La mission de développement et d'exploitation des réseaux publics de transport et de distribution d'électricité consiste à assurer : / […] 2° Le raccordement et l'accès, dans des conditions non discriminatoires, aux réseaux publics de transport et de distribution. » En outre, aux termes de l'article L. 322-8 du code de l'énergie : « Sans préjudice des dispositions du sixième alinéa du I de l'article L. 2224-31 du code général des collectivités territoriales, un gestionnaire de réseau de distribution d'électricité est, dans sa zone de desserte exclusive, notamment chargé, dans le cadre des cahiers des charges de concession et des règlements de service des régies : / […] 4° D'assurer, dans des conditions objectives, transparentes et non discriminatoires, l'accès à ces réseaux ; / 5° De fournir aux utilisateurs des réseaux les informations nécessaires à un accès efficace aux réseaux, sous réserve des informations protégées par des dispositions législatives ou réglementaires, notamment en évaluant l'incidence sur le réseau des projets qui lui sont soumis en matière d'insertion des énergies renouvelables, de déploiement des dispositifs de charge pour les véhicules électriques et hybrides rechargeables, d'aménagement urbain et de planification énergétique ; […] ».
- Aux termes du point 8 de la procédure Enedis-PRO-RAC_21E : « La Proposition De Raccordement est adressée au Demandeur ou au tiers mandaté. Elle comprend les éléments techniques et les éléments financiers de la prestation, le cas échéant avec des réserves, ainsi qu'un échéancier prévisionnel de réalisation des travaux et de préparation de la mise en service. » En outre, aux termes du point 8.2.1 de la procédure Enedis-PRO-RAC_21E : « La Proposition De Raccordement transmise au Demandeur comprend la solution de raccordement retenue pour répondre à sa demande et précise les conditions techniques auxquelles doit satisfaire l'Installation en vue de son raccordement au Réseau Public de Distribution. »
- En application des dispositions du point 8.1 de la procédure Enedis-PRO-RAC_21E une étude électrique de raccordement est réalisée par le gestionnaire du réseau public de distribution d'électricité afin d'élaborer la proposition de raccordement.
- Au surplus, le point 2.3.1 de la délibération n° 2019-275 de la Commission de régulation de l'énergie du 12 décembre 2019 portant décision sur les règles d'élaboration des procédures de traitement des demandes de raccordement aux réseaux publics de distribution d'électricité et le suivi de leur mise en œuvre précise également que : « La proposition technique et financière présente les résultats de l'étude de raccordement et la solution technique envisagée pour répondre à la demande de raccordement. »
- Il résulte de la procédure de la société Enedis que les résultats de l'étude électrique de raccordement réalisée par le gestionnaire du réseau public de distribution d'électricité sont transmis dans la proposition de raccordement qui est notifiée au demandeur du raccordement.
- Toutefois, aux termes de son code de bonne conduite, la société Enedis : « publie et communique auprès de ses clients et des autres acteurs du marché les informations utiles pour leur prise de décision et le suivi du traitement de leurs demandes. » et s'engage à communiquer « des éléments de réponse dans des délais maitrisés (15 jours) » dans le cadre des réclamations.
- Ainsi, le respect de la procédure du gestionnaire du réseau public de distribution d'électricité telle qu'elle a été rappelée au point 17 de la présente décision ne saurait faire obstacle à ce que la société Enedis communique des informations sur la solution technique qu'elle entend mettre en œuvre dès lors qu'elle est invitée à le faire par le demandeur du raccordement, dans la mesure où elle a déjà informé ce dernier de la nécessité de réaliser une extension du réseau et, a fortiori, de la solution technique qui serait retenue et qu'elle n'a pas été à même de notifier sa proposition de raccordement dans des délais maitrisés. Au surplus, la circonstance que les conditions de dialogue entre les demandeurs et la société Enedis se seraient dégradées et que la société ELEC'CHANTIER 44 ait formée de nombreuses saisines devant le CoRDiS est sans incidence sur le devoir du gestionnaire du réseau public de distribution d'électricité de continuer à instruire les demandes dont il est saisi et d'y donner la suite la plus rapide.
- Au surplus, le comité constate que la demande de communication du résultat de l'étude technique n'a toujours pas été satisfaite par la société Enedis alors même que cette dernière a confirmé la solution technique retenue par la voix de son représentant en région par courrier du 27 octobre 2020.
- Il résulte de ce qui précède qu'en refusant de donner suite aux demandes répétées de la société ELEC'CHANTIER 44 de transmission du résultat de son étude technique, la société Enedis a méconnu ses obligations d'information et de transparence.
Sur les obligations de traitement non discriminatoires par la société Enedis de la demande de raccordement de Mme G. et M. D. - La société ELEC'CHANTIER 44 soutient que la société Enedis opère des pratiques manifestement discriminatoires et commet un abus de position dominante en refusant de satisfaire la demande de raccordement définitif des demandeurs près d'une année après le dépôt de cette demande et en maintenant le choix de la réalisation d'une extension. Elle soutient par ailleurs que les voisins des demandeurs ont bénéficié de branchements de type 2 alors que la société Enedis refuse désormais une telle solution technique pour le raccordement de Mme G. et M. D. en raison de l'évolution des dispositions de la norme NF C 14-100.
- Aux termes du point 7.2.2 de la procédure Enedis-PRO-RAC_21E : « L'examen de complétude consiste à vérifier que le formulaire de demande de raccordement est dûment rempli et qu'il est accompagné de tous les documents demandés. / Lorsque le projet est soumis à une autorisation d'urbanisme, une copie de ladite autorisation, du certificat de permis tacite ou du certificat de non-opposition, est à joindre à la demande. / Le cas échéant, un échange avec le Demandeur peut être nécessaire à Enedis pour préciser et qualifier le besoin réel. / Le Demandeur s'engage à avertir Enedis de tout événement remettant en cause la validité des informations communiquées et des documents transmis, et notamment en cas de retrait ou annulation de l'autorisation administrative visée ci-dessus. A défaut, la Proposition De Raccordement devient caduque. »
- Aux termes du point 7.2.3 de la procédure Enedis-PRO-RAC_21E : « Suite aux vérifications visées aux deux paragraphes précédents, lorsque la demande de raccordement est recevable et complète elle est qualifiée. / La date de qualification de la demande est fixée à la date de réception du dossier par l'agence de raccordement compétente lorsque celui-ci est complet ou à la date de réception de la dernière pièce manquante. / Enedis confirme par courrier électronique ou postal au Demandeur que son dossier est complet, ainsi que la date de qualification de sa demande, le numéro de son dossier et le délai d'envoi de la Proposition De Raccordement. »
- Aux termes du point 8.2.3 de la procédure Enedis-PRO-RAC_21E : « A compter de la date de qualification de la demande, le délai de transmission au Demandeur de la Proposition De Raccordement […] ne dépassera pas :
- dix jours ouvrés lorsque le raccordement ne comprend que la création d'ouvrages de branchement ;
- six semaines lorsque le raccordement comprend la création d'une extension BT ;
- trois mois dans les autres cas.
De plus pour chaque demande de raccordement, le délai maximum de transmission de la Proposition De Raccordement peut être diminué d'un certain nombre de jours, représentatif d'un éventuel retard d'Enedis lors de la vérification de la complétude de la demande, déterminé selon les modalités suivantes :
- si la demande initiale est complète, le délai maximal de transmission de la Proposition De Raccordement n'est en aucun cas affecté ;
- si la demande initiale n'est pas complète :
- et si Enedis sollicite les informations ou les pièces manquantes auprès du Demandeur du raccordement dans un délai de quinze jours calendaires, le délai maximal de transmission de la Proposition De Raccordement n'est pas affecté ;
- et si ce même délai excède quinze jours calendaires, le délai maximal de transmission de la Proposition De Raccordement est réduit d'un nombre de jours égal à la différence entre la date d'envoi de la demande d'information ou des pièces complémentaires et la date de réception par Enedis de la demande de raccordement, retranchée de quinze jours. »
- Il ressort de l'instruction du dossier que la société Enedis a, par un courrier électronique en date du 8 juin 2020, communiqué à la société ELEC'CHANTIER 44 le numéro de dossier correspondant à sa demande de raccordement définitif ; que par un courrier électronique en date du 2 juillet 2020, et à la suite d'un appel téléphonique avec la société Enedis, la société ELEC'CHANTIER 44 a transmis le permis de construire des demandeurs ; qu'enfin, par un courrier électronique en date du 7 juillet 2020, la société ELEC'CHANTIER 44 a demandé à la société Enedis de lui confirmer la complétude de son dossier, demande qui semble être restée sans réponse.
- Au regard des pièces versées au dossier, le comité constate que la demande de raccordement définitif formée le 26 mai 2020 par la société ELEC'CHANTIER 44 n'a jamais été qualifiée et que la complétude de son dossier n'a pas été confirmée, sans que de nouvelles demandes de pièces supplémentaires n'aient été formulées par la société Enedis après le 2 juillet 2020.
- Dès lors, il y a lieu pour le comité de constater que la société Enedis n'a donné aucune suite à la demande de raccordement définitif de la société ELEC'CHANTIER 44 en ne qualifiant pas la demande conformément à ses procédures et en ne transmettant aucune proposition de raccordement.
- Par ailleurs, en ce qui concerne le raccordement des habitations des voisins par des branchements de type 2, il ressort du courrier du 27 octobre 2021 adressé par la société Enedis à la société ELEC'CHANTIER 44 que les voisins des demandeurs ont pu bénéficier de raccordements de type 2 conformes à la norme NF C 14-100 alors en vigueur puisque les habitations concernées ont été bâties à partir de permis de construire délivrés avant février 2008, date à laquelle la norme a été modifiée, ce que ne conteste pas la société ELEC'CHANTIER 44. En outre, le dossier ne permet pas d'établir que les caractéristiques techniques des raccordements des habitations des voisins sont identiques avec le raccordement des demandeurs. Il s'ensuit que le comité ne peut tenir compte de ces autres raccordements pour se prononcer sur la présente demande de règlement de différend.
- Il résulte de ce qui précède que la société Enedis a opéré un traitement discriminatoire de la demande de raccordement définitif de la société ELEC'CHANTIER 44 en faisant perdurer jusqu'à ce jour des manquements à ses procédures et en ne traitant pas la demande de raccordement qui lui a été adressée.
Sur la solution technique évoquée dans le courrier de la société Enedis en date du 27 octobre 2021 - En premier lieu, comme constaté au point 28 de la présente décision, la société Enedis n'a transmis aucune proposition de raccordement à la société ELEC'CHANTIER 44. En outre, il ne ressort pas des pièces versées au dossier qu'elle aurait transmis au demandeur des éléments d'ordre technique et financier au soutien de sa solution de raccordement.
- Dès lors, la société Enedis n'était pas fondée à exposer à plusieurs reprises à la société ELEC'CHANTIER 44 que la solution technique retenue par elle correspondait à la solution de raccordement de référence.
- Par ailleurs, la société Enedis n'a pas non plus transmis ces éléments devant le comité, ne le mettant pas en mesure de se prononcer sur sa demande qu'il soit donné acte que sa solution de raccordement correspondait à la solution technique de référence.
- En second lieu, aux termes de l'article L. 342-6 du code de l'énergie : « La part des coûts de branchement et d'extension des réseaux non couverts par les tarifs d'utilisation des réseaux publics peut faire l'objet de la contribution due par le redevable défini à l'article L. 342-7 ou par les redevables définis à l'article L. 342-11. La contribution est versée au maître d'ouvrage des travaux, qu'il s'agisse d'un gestionnaire de réseau, d'une collectivité territoriale, d'un établissement public de coopération intercommunale ou d'un syndicat mixte. »
- Aux termes de l'article L. 342-11 du code de l'énergie : « La contribution prévue à l'article L. 342-6 pour le raccordement des consommateurs au réseau de distribution est versée, dans des conditions, notamment de délais, fixées par les cahiers des charges des concessions ou les règlements de service des régies ou, à défaut, par décret en Conseil d'Etat, par les redevables mentionnés aux 1°, 2°, 3°, 4° et 5° suivants : / 1° Lorsque l'extension est rendue nécessaire par une opération ayant fait l'objet d'un permis de construire, d'un permis d'aménager ou d'une décision de non-opposition à une déclaration préalable, située en dehors d'une zone d'aménagement concerté et ne donnant pas lieu à la participation spécifique pour la réalisation d'équipements publics exceptionnels ou à la participation pour voirie et réseaux mentionnées à l'article L. 332-6-1 du code de l'urbanisme, la contribution correspondant aux équipements mentionnés au troisième alinéa de l'article L. 332-15 du code de l'urbanisme est versée par le bénéficiaire du permis ou de la décision de non-opposition. / La part de contribution correspondant à l'extension située hors du terrain d'assiette de l'opération reste due par la commune ou l'établissement public de coopération intercommunale compétent pour la perception des participations d'urbanisme. »
- Aux termes de l'article 1er de l'arrêté du 28 août 2007 fixant les principes de calcul de la contribution mentionnée aux articles 4 et 18 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité : « Pour l'application du présent arrêté, une opération de raccordement est un ensemble de travaux sur le réseau public de distribution et, le cas échéant, sur les réseaux publics d'électricité auquel ce dernier est interconnecté : (i) nécessaire et suffisant pour satisfaire l'évacuation ou l'alimentation en énergie électrique des installations du demandeur à la puissance de raccordement demandée ; (ii) qui emprunte un tracé techniquement et administrativement réalisable, en conformité avec les dispositions du cahier des charges de la concession ou du règlement de service de la régie ; (iii) et conforme au référentiel technique publié par le gestionnaire du réseau public de distribution. L'opération de raccordement de référence représente l'opération de raccordement qui minimise la somme des coûts de réalisation des ouvrages de raccordement énumérés aux articles 1er et 2 du décret du 28 août 2007 susvisé, calculé à partir du barème mentionné à l'article 2. » En outre, aux termes de l'article 5 de l'arrêté du 28 août 2007 précédemment mentionné, « […] Les dispositions des deux alinéas précédents ne s'opposent pas à ce que le gestionnaire du réseau de distribution réalise une opération de raccordement différente de l'opération de raccordement de référence. Si le gestionnaire du réseau de distribution la réalise à son initiative, il prend à sa charge tous les surcoûts qui pourraient en résulter. S'il la réalise à la demande de l'utilisateur qui demande à être raccordé, ce dernier prend à sa charge tous les surcoûts éventuels. »
- Aux termes de l'article 4 de l'arrêté du 3 août 2016 portant réglementation des installations électriques des bâtiments d'habitation : « Les installations électriques des bâtiments d'habitation mentionnées à l'article 2 du présent arrêté, conçues et réalisées selon les prescriptions du titre 10 de la norme NF C 15-100 de 2002, la mise à jour de 2005 de la norme NF C 15-100 de 2002 et ses amendements A1 à A5, et les ouvrages de branchement mentionnées à l'article 3, conçus et réalisés selon les prescriptions de la norme NF C 14-100 de 2008 et ses amendements A1 à A3, sont présumés satisfaire aux objectifs du présent arrêté. / Toute autre norme équivalente peut être utilisée dès lors qu'elle permet d'atteindre le même niveau de sécurité à l'échelle de l'installation électrique et du bâtiment. »
- Aux termes du point 8.1 de la procédure Enedis-PRO-RAC_14E : « Conformément à l'arrêté du 28 août 2007, Enedis détermine l'Opération de Raccordement de Référence à partir des éléments transmis par le Demandeur. / Le cas échéant, Enedis étudie également une alternative ne correspondant pas à l'Opération de Raccordement de Référence et qui répondrait au choix ou préférences exprimés par le Demandeur. Celui-ci supporte les surcoûts liés à la solution alternative, la réfaction tarifaire ne s'appliquant que sur le montant de l'Opération de Raccordement de Référence. Dans cette hypothèse, Enedis présente au Demandeur la solution correspondant à l'Opération de Raccordement de Référence et celle s'en écartant. »
- Aux termes du point 3.2.6.2 de la norme NF C 14-100 : « La disposition des lieux ne permet pas d'installer l'AGCP (D1) dans les locaux de l'utilisateur ; ce dernier est alors placé en général à proximité du CCPI (sur la parcelle dont l'utilisateur à l'exclusivité de l'usage), et un dispositif D2 est installé dans les locaux de l'utilisateur afin d'assurer la coupure d'urgence et le sectionnement. »
- Il résulte des dispositions précitées que le gestionnaire du réseau public de distribution d'électricité est tenu d'établir l'opération de raccordement de référence qui réponde aux besoins en électricité du consommateur, dont le tracé est réalisable d'un point de vue technique et administratif et qui représente l'opération qui minimise la somme des coûts de branchement et d'extension définis respectivement aux articles D. 342-1 et D. 342-2 du code de l'énergie. Ces coûts sont calculés selon les dispositions du barème de raccordement de la société Enedis. Le cas échéant, elle peut également proposer une opération de raccordement différente dont elle devra supporter les coûts si elle est à son initiative, les deux projets devant alors figurer dans la proposition de raccordement transmise au demandeur.
- La société Enedis soutient que la solution évoquée par elle, à savoir une extension du réseau public de distribution sur la parcelle n° 1053 et un branchement de type 1 pour raccorder l'habitation des demandeurs sur la parcelle n° 1145 est la seule solution conforme à la réglementation en vigueur compte tenu des informations dont elle dispose s'agissant de l'état d'enclave de la parcelle à desservir. En effet, elle rappelle qu'en matière de parcelles enclavées ne disposant pas d'un accès direct au domaine public, la norme NF C 14-100 prévoit que les coffrets de raccordement doivent être placés sur la parcelle à desservir et non pas sur la parcelle appartenant à un tiers pour des impératifs de sécurité et de bon fonctionnement du réseau.
- Le comité relève qu'en ce qui concerne l'application de la norme NF C 14-100, la société ELEC'CHANTIER 44 soutient que l'arrêté du 22 octobre 1969 qui prévoit l'application obligatoire de la norme NF C 14-100 pour établir l'opération de raccordement de référence a été abrogé par l'arrêté du 3 août 2016. La société Enedis soutient quant à elle que le caractère non obligatoire de la norme NF C 14-100 ne suffit pas à l'écarter dès lors qu'il s'agit de la seule norme connue et pertinente en vigueur.
- Il résulte de l'arrêté du 3 août 2016, versé au dossier par la société ELEC'CHANTIER 44, que la norme NF C 14-100 n'est plus d'application obligatoire depuis l'entrée en vigueur de ce texte.
- Dès lors, si elle demeure une norme technique de référence, la norme NF C 14-100 ne peut faire obstacle à ce qu'une solution technique constitue l'opération de raccordement de référence sur le seul motif que certaines dispositions de ladite norme ne rendraient pas cette solution « techniquement et administrativement réalisable », si le gestionnaire du réseau public de distribution d'électricité n'a pas dans le même temps réalisé une étude financière approfondie des différentes solutions techniques qui pourraient être envisagées. En effet, une opération de raccordement de référence doit être élaborée en tenant compte de l'ensemble des critères rappelés à l'article 1er de l'arrêté du 28 août 2007 et l'application pourtant non obligatoire d'une norme ne peut être le seul motif invoqué par la société Enedis au soutien du choix de la solution technique.
- En outre, si les ouvrages de branchement réalisés selon les prescriptions de la norme NF C 14-100 sont présumés satisfaire aux objectifs de l'arrêté du 3 août 2016, ce dernier précise bien en son article 4 que tout autre référentiel équivalent et par conséquent toute autre solution technique qui permettrait de satisfaire aux objectifs dudit arrêté peut être utilisé.
- En l'espèce, le comité ne peut que constater qu'à ce stade, aucune étude financière n'a été fournie par la société Enedis à l'appui de la solution technique qu'elle envisage. Or en application des articles L. 342-6 et L. 342-11 du code de l'énergie susmentionnés, une solution technique avec extension du réseau public mettrait à la charge des demandeurs à la fois une partie des coûts de branchement mais également des coûts d'extension du réseau sur le terrain d'assiette de l'opération, sans qu'il ne soit établi, en l'état du dossier, qu'une telle solution constitue l'opération de raccordement de référence.
- Au surplus, le comité relève que la société Enedis envisagerait de réétudier sa solution technique au regard des droits indivis de propriété dont bénéficient les demandeurs sur la parcelle n° 1053. Elle note que cette information semble avoir pour conséquence de ne plus exclure définitivement une solution avec un branchement de type 2 que la société Enedis refusait jusqu'ici de retenir au motif notamment que les coffrets doivent être installés sur la parcelle dont le propriétaire a l'exclusivité de l'usage en application de la norme NF C 14-100.
- Enfin, le comité a constaté aux points 21 et 30 à 32 de la présente décision que la société Enedis avait méconnu ses obligations de traitement non discriminatoire, de transparence et d'information relatives à l'accès aux réseaux en faisant perdurer à ce jour des manquements à ses procédures et en ne traitant pas la demande de raccordement définitif de la société ELEC'CHANTIER 44.
- Il résulte de tout ce qui précède qu'il y a lieu pour le comité de règlement des différends et des sanctions d'enjoindre à la société Enedis de produire une proposition de raccordement se fondant sur l'opération de raccordement de référence, en tenant compte de l'ensemble des critères rappelés à l'article 1er de l'arrêté du 28 août 2007, dans le délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision, dans le respect du droit en vigueur, y compris des procédures du gestionnaire du réseau public de distribution d'électricité et des dispositions du cahier des charges de la concession.
Décide :
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