JORF n°0033 du 8 février 2012

TITRE III : DÉMONSTRATION DE SÛRETÉ NUCLÉAIRE

Article 3.1

I. ― L'exploitant applique le principe de défense en profondeur, consistant en la mise en œuvre de niveaux de défense successifs et suffisamment indépendants visant, pour ce qui concerne l'exploitant, à :
― prévenir les incidents ;
― détecter les incidents et mettre en œuvre les actions permettant, d'une part, d'empêcher que ceux-ci ne conduisent à un accident et, d'autre part, de rétablir une situation de fonctionnement normal ou, à défaut, d'atteindre puis de maintenir l'installation dans un état sûr ;
― maîtriser les accidents n'ayant pu être évités ou, à défaut, limiter leur aggravation, en reprenant la maîtrise de l'installation afin de la ramener et de la maintenir dans un état sûr ;
― gérer les situations d'accident n'ayant pas pu être maîtrisées de façon à limiter les conséquences notamment pour les personnes et l'environnement.
II. ― La mise en œuvre du principe de défense en profondeur s'appuie notamment sur :
― le choix d'un site adapté, tenant compte notamment des risques d'origine naturelle ou industrielle pesant sur l'installation ;
― l'identification des fonctions nécessaires à la démonstration de sûreté nucléaire ;
― une démarche de conception prudente, intégrant des marges de dimensionnement et recourant, en tant que de besoin, à une redondance, une diversification et une séparation physique adéquates des éléments importants pour la protection qui assurent des fonctions nécessaires à la démonstration de sûreté nucléaire, pour obtenir un haut niveau de fiabilité et garantir les fonctions citées à l'alinéa précédent ;
― la qualité des activités mentionnées à l'article 1er.1 ;
― une préparation à la gestion d'éventuelles situations d'incident et d'accident.

Article 3.2

I. ― La démonstration de sûreté nucléaire est réalisée selon une démarche déterministe prudente. Cette démarche intègre les dimensions techniques, organisationnelles et humaines et prend en compte l'ensemble des états possibles de l'installation, qu'ils soient permanents ou transitoires.
II. ― En complément des événements déclencheurs uniques postulés, la démonstration de sûreté nucléaire traite des situations plausibles de cumul d'événements déclencheurs, sélectionnés selon des critères justifiés notamment au regard des analyses et évaluations mentionnées aux articles 2.7.2 et 3.3.

Article 3.3

La démonstration de sûreté nucléaire comporte en outre, sauf si l'exploitant démontre que ce n'est pas pertinent, des analyses probabilistes des accidents et de leurs conséquences. Ces analyses peuvent être réalisées, sauf prescription particulière contraire de l'Autorité de sûreté nucléaire, selon des méthodes appliquées aux installations mentionnées à l'article L. 512-1 du code de l'environnement. Elles intègrent les dimensions techniques, organisationnelles et humaines.

Article 3.4

I. ― La démonstration de sûreté nucléaire présente la manière dont les fonctions suivantes sont assurées :
― la maîtrise des réactions nucléaires en chaîne ;
― l'évacuation de la puissance thermique issue des substances radioactives et des réactions nucléaires ;
― le confinement des substances radioactives ;
― la protection des personnes et de l'environnement contre les rayonnements ionisants.
II. ― Au titre de la maîtrise des réactions nucléaires en chaîne, l'exploitant démontre que les dispositions prises permettent de prévenir le risque de criticité lorsque cette dernière n'est pas recherchée.
III. ― La fonction de confinement des substances radioactives est assurée par l'interposition, entre ces substances et les personnes et l'environnement, d'une ou plusieurs barrières successives suffisamment indépendantes, et si nécessaire par un système de confinement dynamique. Le nombre et l'efficacité de ces dispositifs sont proportionnés à l'importance et à l'impact des rejets radioactifs potentiels, y compris en cas d'incident ou d'accident.

Article 3.5

Les agressions internes à prendre en considération dans la démonstration de sûreté nucléaire comprennent :
― les émissions de projectiles, notamment celles induites par la défaillance de matériels tournants ;
― les défaillances d'équipements sous pression ;
― les collisions et chutes de charges ;
― les explosions ;
― les incendies ;
― les émissions de substances dangereuses ;
― les inondations trouvant leur origine dans le périmètre de l'installation nucléaire de base ;
― les interférences électromagnétiques ;
― les actes de malveillance ;
― toute autre agression interne que l'exploitant identifie ou, le cas échéant, que l'Autorité de sûreté nucléaire juge nécessaire de prendre en compte ;
― les cumuls plausibles entre les agressions ci-dessus.

Article 3.6

Les agressions externes à prendre en considération dans la démonstration de sûreté nucléaire comprennent :
― les risques induits par les activités industrielles et les voies de communication, dont les explosions, les émissions de substances dangereuses et les chutes d'aéronefs ;
― le séisme ;
― la foudre et les interférences électromagnétiques ;
― les conditions météorologiques ou climatiques extrêmes ;
― les incendies ;
― les inondations trouvant leur origine à l'extérieur du périmètre de l'installation nucléaire de base, y compris leur effet dynamique ;
― les actes de malveillance ;
― toute autre agression externe que l'exploitant identifie ou, le cas échéant, que l'Autorité de sûreté nucléaire juge nécessaire de prendre en compte ;
― les cumuls plausibles entre les agressions ci-dessus.

Article 3.7

I. ― La démonstration de sûreté nucléaire comporte une évaluation des conséquences potentielles, radiologiques ou non, des incidents et accidents envisagés. Cette évaluation comporte, pour chaque scénario :
― une présentation des hypothèses retenues pour le calcul des rejets et pour les scénarios d'exposition ; les hypothèses retenues pour le calcul des rejets doivent être raisonnablement pessimistes et les scénarios d'exposition doivent être fondés sur des paramètres réalistes sans toutefois tenir compte d'éventuelles actions de protection des populations qui pourraient être mises en œuvre par les pouvoirs publics ;
― une estimation des doses efficaces et de l'intensité des phénomènes non radiologiques auxquelles les personnes et l'environnement sont susceptibles d'être exposés à court, moyen et long termes, en distinguant les différentes classes d'âge lorsque nécessaire, et en considérant les différentes voies de transfert des substances dangereuses ; en cas de rejet de substances radioactives le justifiant, l'estimation inclut les doses équivalentes à la thyroïde ;
― une estimation de l'étendue des zones susceptibles d'être affectées ;
― pour les incidents ou accidents ayant des conséquences à l'extérieur du site, la cinétique d'évolution des phénomènes dangereux et de propagation de leurs effets.
II. ― L'intensité des phénomènes dangereux non radiologiques est définie par rapport à des valeurs de référence exprimées sous forme d'effets toxiques, d'effets de surpression, d'effets thermiques et d'effets liés à l'impact d'un projectile pour les hommes et les structures. Les valeurs de référence à utiliser sont celles figurant à l'annexe II de l'arrêté du 29 septembre 2005.
III. ― L'intensité des phénomènes dangereux radiologiques est définie par rapport à des valeurs de référence exprimées sous forme de niveaux d'intervention des pouvoirs publics en situation d'urgence radiologique, tels que définis par l'Autorité de sûreté nucléaire en application de l'article R. 1333-80 du code de la santé publique.

Article 3.8

I. ― La démonstration de sûreté nucléaire s'appuie sur :
― des données à jour et référencées ; elle tient notamment compte des informations disponibles mentionnés à l'article 2.7.2 ;
― des méthodes appropriées, explicitées et validées, intégrant des hypothèses et des règles adaptées aux incertitudes et aux limites des connaissances des phénomènes mis en jeu ;
― des outils de calcul et de modélisation qualifiés pour les domaines dans lesquels ils sont utilisés.
II. ― L'exploitant précise et justifie ses critères de validation des méthodes, de qualification des outils de calcul et de modélisation et d'appréciation des résultats des études réalisées pour démontrer la sûreté nucléaire.

Article 3.9

La démonstration de sûreté nucléaire doit justifier que les accidents susceptibles de conduire à des rejets importants de matières dangereuses ou à des effets dangereux hors du site avec une cinétique qui ne permettrait pas la mise en œuvre à temps des mesures nécessaires de protection des populations sont impossibles physiquement ou, si cette impossibilité physique ne peut être démontrée, que les dispositions mises en œuvre sur ou pour l'installation permettent de rendre ces accidents extrêmement improbables avec un haut degré de confiance.

Article 3.10

L'exploitant se tient informé des modifications apportées ou projetées au voisinage de son installation susceptibles de modifier la nature, l'importance ou la probabilité d'une agression externe. Il met à jour si nécessaire la démonstration de sûreté nucléaire de son installation dans le cadre des procédures réglementaires appropriées.