Le niveau des recettes fiscales est manifestement surévalué
Le Gouvernement a procédé, à plusieurs reprises, à des réévaluations du niveau des recettes fiscales pour 2001, depuis la promulgation de la loi de finances initiale, la dernière réévaluation intervenue dans le cadre du projet de loi de finances rectificative pour 2001 n'a pas été prise en compte pour l'élaboration de la présente loi de finances et laisse inchangées les évaluations de recettes pour 2002, notamment en ce qui concerne les hypothèses de croissance retenues.
Les informations disponibles et les prévisions qui peuvent raisonnablement en découler montrent que la croissance en France a commencé à diminuer dès la fin 2000. A cette époque, la prévision de croissance retenue pour élaborer le projet de budget 2002 était de 3,3 % pour 2001, niveau estimé comme optimiste compte tenu des premiers signes de ralentissement. Dès le début 2001, les signes du ralentissement de la croissance se sont manifestés, avec la baisse des prévisions d'investissement dans les enquêtes réalisées auprès des chefs d'entreprise, le ralentissement de la consommation qui est passé d'un rythme de 1,5 % au premier trimestre 2001 à une quasi-stabilité au second (0,2 %), et une baisse de 6,1 % des exportations en avril 2001.
Ce n'est qu'au printemps 2001 que le Gouvernement a reconnu les effets probables de la stagnation économique américaine et admis que la croissance 2001 pourrait être plus proche de 2,7 % que des 3,3 % prévus. La loi de finances 2002 a été élaborée à partir d'une prévision de croissance rectifiée à 2,5 % pour 2001. Les événements tragiques du 11 septembre et leurs conséquences négatives sur la croissance (estimées à 0,8 % de PIB par le Fonds monétaire international) renforçaient la nécessité de réviser les prévisions de croissance pour 2002 à la baisse d'autant plus que le Fonds monétaire international (FMI), l'Organisation pour la coopération et le développement économiques (OCDE), la commission de Bruxelles et la plupart des observateurs économiques convergent sur un taux de croissance compris entre 1 % et 1,8 %, très inférieur au taux de 2,5 % de croissance retenu dans la loi de finances pour 2002.
Les recettes fiscales sont surévaluées de 40 à 50 milliards de francs (6,1 à 7,62 milliards d'euros). L'évaluation de ces moins-values fiscales découle des hypothèses mêmes retenues pour l'élaboration de cette loi de finances pour 2002.
En premier lieu, la base 2001 est surévaluée d'environ 15 milliards de francs (2,29 milliards d'euros) car la croissance en 2001 sera de 2 % au maximum et non pas de 2,5 % envisagé en août dernier. Ensuite, 30 milliards de francs (4,5 milliards d'euros) de recettes fiscales feront défaut en 2002, car la croissance 2002 ne sera pas de 2,5 %, mais plutôt de 1 % à 1,8 %, selon les prévisions de la plupart des instituts de prévisions.
Il faut rappeler notamment que l'Observatoire français de la conjoncture économique (OFCE) estime à 35 milliards de francs (5,33 milliards d'euros) la perte de recettes fiscales nettes lorsque la croissance baisse d'un point.
De plus, l'évaluation des ressources permanentes de l'Etat qu'il comporte est, de ces points de vue, critiquable à plusieurs titres. La désaffectation des recettes destinées au FOREC n'est rien moins qu'une débudgétisation qui contrevient aux articles 1er et 4 de l'ordonnance organique no 59-2 du 2 janvier 1959. L'équilibre du FOREC - qui, au demeurant, n'a toujours pas d'existence juridique - n'est pas non plus assuré. Après avoir forcé la sécurité sociale à participer au financement du FOREC pour solder les comptes 2000, ce qui vient d'être censuré par le Conseil constitutionnel dans sa décision no 2001-435 DC du 18 décembre 2001, c'est le budget de l'Etat qui sera utilisé pour combler les déficits 2001 et 2002, ce qui rend la loi de finances pour 2002 ici déférée d'autant plus insincère.
L'évaluation des recettes des comptes d'affectation spéciale est biaisée par le caractère arbitraire de l'évaluation du montant des recettes du compte d'affectation spéciale no 902-24 qui, depuis des années, se trouve en exécution considérablement éloigné des prévisions des lois de finances (voir les rapports de la Cour des comptes et des rapporteurs spéciaux des commissions des finances du Parlement en charge des comptes spéciaux du Trésor).