JORF n°302 du 29 décembre 2001

II. - Certaines dispositions particulières de la loi de finances pour 2002 doivent être censurées car elles portent atteinte à des principes fondamentaux du droit constitutionnel

Article 4

Les dispositions au A du II de l'article 4 de la loi de finances pour 2002 sont contraires au principe d'égalité des citoyens devant la loi inscrit à l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen.

Le A du II de cet article dispense les contribuables, jusqu'à l'imposition des revenus de l'année 2003, qui transmettent leur déclaration de revenus par voie électronique de joindre à cette déclaration les reçus délivrés par les syndicats. Les contribuables qui envoient leur déclaration de revenus par le courrier sont encore tenus de joindre les pièces justificatives.

Cet article crée donc une inégalité entre particuliers selon que ceux-ci transmettent leur déclaration de revenus par voie électronique ou par courrier. Il crée des sujétions supplémentaires pour les particuliers transmettant leur déclaration de revenus par voie traditionnelle en ce qu'ils sont tenus de joindre à cette déclaration les reçus délivrés par les syndicats alors que les particuliers transmettant leur déclaration des revenus ne sont pas tenus de joindre ces pièces justificatives. Il est contraire à la Constitution de faire peser cette obligation sur certains particuliers alors que d'autres en sont dispensés.

Le A du II de l'article 4 est donc contraire au principe d'égalité devant la loi.

Le III de l'article 4 de la loi de finances pour 2002 a pour objet d'encadrer strictement le dispositif permettant aux organismes sans but lucratif de rémunérer leurs dirigeants. Il crée quatre conditions cumulatives auxquelles les associations concernées doivent satisfaire afin de pouvoir rémunérer leurs dirigeants :

a) Les statuts de l'association doivent prévoir explicitement le versement de telles rémunérations et la décision doit être prise par l'assemblée générale à la majorité des deux tiers de ses membres ;

b) Instauration d'un barème de trois tranches, selon le montant annuel moyen (sur les trois exercices clos précédemment) des ressources (hors ressources issues des versements effectués par des personnes morales de droit public) :

- pour un montant supérieur à 200 000 Euro : un seul dirigeant rémunérable ;

- pour un montant supérieur à 500 000 Euro : deux dirigeants rémunérables ;

- pour un montant supérieur à 1 000 000 Euro : trois dirigeants rémunérables ;

c) Le montant des ressources (hors ressources issues des versements effectués par des personnes morales de droit public) est constaté par un commissaire aux comptes ;

d) Le montant de toutes les rémunérations versées à chaque dirigeant ne peut excéder trois fois le montant du plafond de la sécurité sociale.

Ces dispositions créent une inégalité entre associations puisque, manifestement, les points b, c et d montrent qu'il n'a pas été jugé opportun de permettre à tous les organismes présumés sans but lucratif de rémunérer leurs dirigeants. Seules les associations les plus grandes peuvent être soumises aux obligations de transparence et de contrôle qui constituent la contrepartie nécessaire de cette autorisation de rémunération. Les autres associations, et notamment les associations cultuelles ou sportives, peuvent être lésées par ces dispositions puisque, selon la réalité associative concernée, elles ne peuvent aller au-delà de l'interdiction de rémunération. Les dispositions du III de l'article 4 de la présente loi de finances pour 2002 sont donc contraires au principe d'égalité devant la loi inscrit à l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789.

De plus, le III de l'article 4 de la loi de finances pour 2002 est contraire au principe de la liberté d'association, solennellement réaffirmé par le préambule de la Constitution et érigé en principe fondamental reconnu par les lois de la République par le Conseil constitutionnel dans sa décision no 71-44 DC du 16 juillet 1971. En effet, ces dispositions rendent possible, sur ces nouvelles bases, la contestation du caractère désintéressé de la gestion de certaines associations, et notamment la gestion des associations sportives et cultuelles. S'agissant des associations cultuelles plus spécifiquement, le respect de ces nouvelles dispositions peut impliquer une modification de leur organisation interne. Ce qui serait contraire au principe de liberté d'association.

Le III de l'article 4 de la loi ici déférée est donc contraire au principe d'égalité et au principe de liberté d'association.


Historique des versions

Version 1

II. - Certaines dispositions particulières de la loi de finances pour 2002 doivent être censurées car elles portent atteinte à des principes fondamentaux du droit constitutionnel

Article 4

Les dispositions au A du II de l'article 4 de la loi de finances pour 2002 sont contraires au principe d'égalité des citoyens devant la loi inscrit à l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen.

Le A du II de cet article dispense les contribuables, jusqu'à l'imposition des revenus de l'année 2003, qui transmettent leur déclaration de revenus par voie électronique de joindre à cette déclaration les reçus délivrés par les syndicats. Les contribuables qui envoient leur déclaration de revenus par le courrier sont encore tenus de joindre les pièces justificatives.

Cet article crée donc une inégalité entre particuliers selon que ceux-ci transmettent leur déclaration de revenus par voie électronique ou par courrier. Il crée des sujétions supplémentaires pour les particuliers transmettant leur déclaration de revenus par voie traditionnelle en ce qu'ils sont tenus de joindre à cette déclaration les reçus délivrés par les syndicats alors que les particuliers transmettant leur déclaration des revenus ne sont pas tenus de joindre ces pièces justificatives. Il est contraire à la Constitution de faire peser cette obligation sur certains particuliers alors que d'autres en sont dispensés.

Le A du II de l'article 4 est donc contraire au principe d'égalité devant la loi.

Le III de l'article 4 de la loi de finances pour 2002 a pour objet d'encadrer strictement le dispositif permettant aux organismes sans but lucratif de rémunérer leurs dirigeants. Il crée quatre conditions cumulatives auxquelles les associations concernées doivent satisfaire afin de pouvoir rémunérer leurs dirigeants :

a) Les statuts de l'association doivent prévoir explicitement le versement de telles rémunérations et la décision doit être prise par l'assemblée générale à la majorité des deux tiers de ses membres ;

b) Instauration d'un barème de trois tranches, selon le montant annuel moyen (sur les trois exercices clos précédemment) des ressources (hors ressources issues des versements effectués par des personnes morales de droit public) :

- pour un montant supérieur à 200 000 Euro : un seul dirigeant rémunérable ;

- pour un montant supérieur à 500 000 Euro : deux dirigeants rémunérables ;

- pour un montant supérieur à 1 000 000 Euro : trois dirigeants rémunérables ;

c) Le montant des ressources (hors ressources issues des versements effectués par des personnes morales de droit public) est constaté par un commissaire aux comptes ;

d) Le montant de toutes les rémunérations versées à chaque dirigeant ne peut excéder trois fois le montant du plafond de la sécurité sociale.

Ces dispositions créent une inégalité entre associations puisque, manifestement, les points b, c et d montrent qu'il n'a pas été jugé opportun de permettre à tous les organismes présumés sans but lucratif de rémunérer leurs dirigeants. Seules les associations les plus grandes peuvent être soumises aux obligations de transparence et de contrôle qui constituent la contrepartie nécessaire de cette autorisation de rémunération. Les autres associations, et notamment les associations cultuelles ou sportives, peuvent être lésées par ces dispositions puisque, selon la réalité associative concernée, elles ne peuvent aller au-delà de l'interdiction de rémunération. Les dispositions du III de l'article 4 de la présente loi de finances pour 2002 sont donc contraires au principe d'égalité devant la loi inscrit à l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789.

De plus, le III de l'article 4 de la loi de finances pour 2002 est contraire au principe de la liberté d'association, solennellement réaffirmé par le préambule de la Constitution et érigé en principe fondamental reconnu par les lois de la République par le Conseil constitutionnel dans sa décision no 71-44 DC du 16 juillet 1971. En effet, ces dispositions rendent possible, sur ces nouvelles bases, la contestation du caractère désintéressé de la gestion de certaines associations, et notamment la gestion des associations sportives et cultuelles. S'agissant des associations cultuelles plus spécifiquement, le respect de ces nouvelles dispositions peut impliquer une modification de leur organisation interne. Ce qui serait contraire au principe de liberté d'association.

Le III de l'article 4 de la loi ici déférée est donc contraire au principe d'égalité et au principe de liberté d'association.