JORF n°302 du 29 décembre 2001

Une sous-estimation du déficit budgétaire

Le déficit budgétaire 2002 prévu par la présente loi de finances, soit 30,438 milliards d'euros, est manifestement erroné. Le solde général mentionné à l'article 27 de la loi de finances pour 2002 n'est pas sincère et il est sous-évalué de 9,15 milliards d'euros (60 milliards de francs), 7,62 milliards d'euros (50 milliards de francs) en surestimation de recettes et 1,52 milliard d'euros (10 milliards de francs) en sous-estimation de dépenses.

En effet, et selon les modalités définies par l'article 32 de la loi organique du 1er août 2001, « compte tenu des informations disponibles et des prévisions qui peuvent raisonnablement en découler », le déficit budgétaire prévisible en 2002 est de 39,63 milliards d'euros (260 milliards de francs) et non pas de 30,438 milliards d'euros (200 milliards de francs) mentionnés dans l'article 27.

Les plafonds des grandes catégories de dépenses que fixe l'article 27 manquent également de sincérité. Plusieurs crédits extrabudgétaires des ministères ne sont pas pris en compte. Comme l'a montré la Cour des comptes dans ses différents rapports, les prévisions de dépenses n'ont pas été tenues depuis 1998. De plus, les interventions du FOREC directement retracées en lois de financement de la sécurité sociale (côté recettes) ne sont pas évaluées en lois de finances (côté dépenses), comme elles devraient l'être.

De plus, l'absence de maîtrise de la dépense publique de fonctionnement sera aggravée en 2002, comme lors des années précédentes, par la sous-estimation de certaines charges dans la loi de finances pour 2002. Les engagements nouveaux annoncés pour renforcer le traitement social du chômage par la création de 30 000 contrats emploi solidarité n'apparaissent pas dans le budget, ni les crédits de relance de la politique de la ville, non plus que la totalité des crédits pour financer l'augmentation de 1 % des traitements des fonctionnaires le 1er mars prochain.

Compte tenu des sommes budgétaires en jeu et du caractère économiquement incontestable des réévaluations évoquées précédemment, un tel refus constitue une erreur manifeste d'appréciation qui porte atteinte aux droits d'information et d'autorisation du Parlement et ne respecte pas l'ordonnance du 2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances.

En examinant l'article 32 de la loi organique du 1er août 2001, le Conseil constitutionnel a précisé dans la décision no 2001-448 DC du 25 juillet 2001 que pour les lois de finances prévisionnelles « la sincérité se caractérise par l'absence d'intention de fausser les grandes lignes de l'équilibre déterminé par la loi de finances » alors que la sincérité de la loi de règlement s'entend en outre comme imposant l'exactitude des comptes.

Le principe de sincérité est aussi défini, selon le plan comptable général qui a inspiré une partie des travaux menés sur la réforme de l'ordonnance de 1959, comme « l'application de bonne foi des règles et des procédures, en fonction de la connaissance que les responsables doivent avoir de la réalité ».

Il implique de donner « des informations adéquates, loyales, claires, précises et complètes » selon l'expression du rapporteur du projet de loi organique.

Compte tenu des informations disponibles à tous, le refus du Gouvernement de « tenir compte des informations disponibles et des prévisions qui peuvent raisonnablement en découler » font que cette loi de finances pour 2002 est contraire au principe de sincérité des lois de finances, consacré par la loi organique du 1er août dernier et précisé par le Conseil constitutionnel.


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Version 1

Une sous-estimation du déficit budgétaire

Le déficit budgétaire 2002 prévu par la présente loi de finances, soit 30,438 milliards d'euros, est manifestement erroné. Le solde général mentionné à l'article 27 de la loi de finances pour 2002 n'est pas sincère et il est sous-évalué de 9,15 milliards d'euros (60 milliards de francs), 7,62 milliards d'euros (50 milliards de francs) en surestimation de recettes et 1,52 milliard d'euros (10 milliards de francs) en sous-estimation de dépenses.

En effet, et selon les modalités définies par l'article 32 de la loi organique du 1er août 2001, « compte tenu des informations disponibles et des prévisions qui peuvent raisonnablement en découler », le déficit budgétaire prévisible en 2002 est de 39,63 milliards d'euros (260 milliards de francs) et non pas de 30,438 milliards d'euros (200 milliards de francs) mentionnés dans l'article 27.

Les plafonds des grandes catégories de dépenses que fixe l'article 27 manquent également de sincérité. Plusieurs crédits extrabudgétaires des ministères ne sont pas pris en compte. Comme l'a montré la Cour des comptes dans ses différents rapports, les prévisions de dépenses n'ont pas été tenues depuis 1998. De plus, les interventions du FOREC directement retracées en lois de financement de la sécurité sociale (côté recettes) ne sont pas évaluées en lois de finances (côté dépenses), comme elles devraient l'être.

De plus, l'absence de maîtrise de la dépense publique de fonctionnement sera aggravée en 2002, comme lors des années précédentes, par la sous-estimation de certaines charges dans la loi de finances pour 2002. Les engagements nouveaux annoncés pour renforcer le traitement social du chômage par la création de 30 000 contrats emploi solidarité n'apparaissent pas dans le budget, ni les crédits de relance de la politique de la ville, non plus que la totalité des crédits pour financer l'augmentation de 1 % des traitements des fonctionnaires le 1er mars prochain.

Compte tenu des sommes budgétaires en jeu et du caractère économiquement incontestable des réévaluations évoquées précédemment, un tel refus constitue une erreur manifeste d'appréciation qui porte atteinte aux droits d'information et d'autorisation du Parlement et ne respecte pas l'ordonnance du 2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances.

En examinant l'article 32 de la loi organique du 1er août 2001, le Conseil constitutionnel a précisé dans la décision no 2001-448 DC du 25 juillet 2001 que pour les lois de finances prévisionnelles « la sincérité se caractérise par l'absence d'intention de fausser les grandes lignes de l'équilibre déterminé par la loi de finances » alors que la sincérité de la loi de règlement s'entend en outre comme imposant l'exactitude des comptes.

Le principe de sincérité est aussi défini, selon le plan comptable général qui a inspiré une partie des travaux menés sur la réforme de l'ordonnance de 1959, comme « l'application de bonne foi des règles et des procédures, en fonction de la connaissance que les responsables doivent avoir de la réalité ».

Il implique de donner « des informations adéquates, loyales, claires, précises et complètes » selon l'expression du rapporteur du projet de loi organique.

Compte tenu des informations disponibles à tous, le refus du Gouvernement de « tenir compte des informations disponibles et des prévisions qui peuvent raisonnablement en découler » font que cette loi de finances pour 2002 est contraire au principe de sincérité des lois de finances, consacré par la loi organique du 1er août dernier et précisé par le Conseil constitutionnel.