Monsieur le Président de la République,
La loi n° 2008-1249 du 1er décembre 2008 généralisant le revenu de solidarité active et réformant les politiques d'insertion a unifié les dispositifs de contrats aidés dans le cadre juridique du contrat unique d'insertion (CUI), décliné en contrat d'accompagnement dans l'emploi (CUI-CAE), destiné aux employeurs du secteur non marchand, et en contrat initiative-emploi (CUI-CIE), destiné aux employeurs du secteur marchand.
Les deux volets de ce dispositif, CUI-CAE et CUI-CIE, sont entrés en vigueur en France métropolitaine le 1er janvier 2010.
Dans les départements d'outre-mer et les collectivités territoriales de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin et de Saint-Pierre-et-Miquelon, seul le volet CUI-CAE est entré en vigueur le 1er janvier 2011, car il avait été estimé nécessaire d'y conserver un ancien contrat aidé du secteur marchand spécifique à l'outre-mer, le contrat d'accès à l'emploi (CAE-DOM). Ce dispositif a ainsi été défini juridiquement comme le volet marchand du CUI sur le périmètre de l'outre-mer, tout en conservant ses caractères propres : exonération des cotisations patronales de sécurité sociale et aide forfaitaire mensuelle, de 152 € ou 305 € selon l'éloignement de l'emploi du bénéficiaire du contrat.
Un autre contrat aidé antérieur était également maintenu, dans le secteur non marchand : le contrat d'insertion par l'activité (CIA), qui permettait aux collectivités d'outre-mer de remettre en activité des allocataires du revenu de solidarité active (RSA), leur conjoint, leur partenaire ou leur concubin, par l'exécution de taches d'utilité sociale, avec une aide mensuelle de l'Etat de 344 €.
Quatre ans après l'entrée en vigueur du CUI en outre-mer, le CAE-DOM et le CIA n'ont pas répondu aux attentes qui avaient justifié leur maintien dérogatoire :
- des CAE-DOM ont continué à être prescrits, mais avec une attractivité réduite : de 4 370 contrats en 2012, les réalisations ont régulièrement diminué (3 946 en 2013 et 3 894 en 2014). Le caractère forfaitaire de l'aide, son montant mensuel relativement faible et déconnecté de l'inflation, ainsi qu'une complexité des critères d'attribution qui déroute les employeurs, apparaissent comme les principaux motifs de cette désaffection. La tendance se confirme, et même se renforce, au premier semestre 2015 qui n'a enregistré que 1 609 entrées pour un objectif annuel d'environ 6 000 contrats. Et entre janvier et juin, le nombre de salariés ayant un CAE-DOM en cours est passé de 3 215 à 2 993 ;
- dès 2011, les CIA n'étaient plus programmés qu'en Martinique et en Guyane pour un objectif de 2 000 contrats, mais ces collectivités les ont abandonnés en 2012 au profit des CUI-CAE. Le CIA est désormais un dispositif non abrogé, mais éteint de fait.
De toute évidence, ces deux dispositifs ne sont plus pertinents pour appuyer les politiques d'accès et de retour à l'emploi qui sont une priorité du Gouvernement dans les départements et les collectivités d'outre-mer. A titre d'exemple récent, un dispositif initié par le Premier ministre, dit le « CIE starter », n'a pas encore pu être appliqué du simple fait qu'il utilise le cadre juridique du CUI-CIE, inexistant en outre-mer.
Pour l'ensemble de ces raisons, l'article 275 de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques a, dans les conditions prévues par l'article 38 de la Constitution, autorisé le Gouvernement à prendre par ordonnance dans un délai de douze mois toute mesure relevant du domaine de la loi afin de permettre :
1° La suppression du contrat d'accès à l'emploi, mentionné à la sous-section 4 de la section 1 du chapitre II du titre II du livre V de la cinquième partie du code du travail ;
2° L'extension et l'adaptation aux départements d'outre-mer, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin et à Saint-Pierre-et-Miquelon du contrat initiative-emploi mentionné à l'article L. 5134-65 du même code ;
3° La suppression du contrat d'insertion par l'activité mentionné au chapitre II du titre II du livre V du code de l'action sociale et des familles.
Le remplacement du CAE-DOM par le CUI-CIE, dont l'aide est plus substantielle et indexée sur le salaire minimum, contribuera à remobiliser les employeurs du secteur marchand pour l'insertion des personnes les plus éloignées de l'emploi. Par ailleurs, en faisant du CUI-CIE le volet marchand du CUI en outre-mer, elle finalisera l'harmonisation du cadre juridique du CUI sur l'ensemble du territoire français.
La suppression du CIA correspond à un objectif de lisibilité et de simplification du droit.
Le périmètre géographique de l'habilitation législative n'intègre pas Mayotte car le CAE-DOM et le CIA n'y ont jamais été applicables, et le CUI-CAE et le CUI-CIE y sont entrés en vigueur à compter du 1er mars 2012 à l'identique de la France métropolitaine.
La présente ordonnance est composée de neuf articles modifiant les dispositions du code du travail relatives au CAE-DOM et celles du code de l'action sociale et des familles relatives au CIA, ainsi que les dispositions se référant à l'un ou l'autre de ces contrats aidés dans le code du travail et dans le code de la sécurité sociale.
L'article 1er modifie les dispositions du code du travail relatives à ces dispositifs.
Le 1° supprime des références au CAE.
Le 2°, dont la rédaction s'inspire des articles L. 7111-4 et L. 7211-4 du code général des collectivités territoriales et de l'article 16 de la loi n° 2011-884 du 27 juillet 2011 relative aux collectivités territoriales de Guyane et de Martinique, a pour objet d'assurer l'articulation avec le cadre institutionnel qui sera applicable dans ces deux collectivités après les premières élections de leurs assemblées territoriales.
Les 3° et 4° modifient la sous-section 2 de la section 1 du chapitre II du titre II du livre V de la cinquième partie du code du travail pour substituer le CUI-CIE au CAE-DOM en tant que volet marchand du CUI dans les départements d'outre-mer, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin et à Saint-Pierre-et-Miquelon, et il l'adapte en conservant une spécificité du CAE-DOM autorisant l'Etat à accorder une aide supplémentaire pour une formation organisée au profit du salarié en dehors des heures de travail, d'un montant maximal de 7,62 € par heure de formation dans la limite de 1 000 heures.
Le 5° supprime la sous-section 4 de la section 1 du chapitre II du titre II du livre V de la cinquième partie du code du travail, c'est-à-dire le dispositif du CAE-DOM.
L'article 2 modifie le chapitre II du titre II du livre V de la partie législative du code de l'action sociale et des familles pour supprimer le dispositif du CIA.
L'article 3 supprime une référence au CAE-DOM dans un article du code de la sécurité sociale.
L'article 4 prévoit la date d'entrée en vigueur de l'ordonnance, les conditions de renouvellement des contrats CAE-DOM encore en cours à la date d'entrée en vigueur de la présente ordonnance et les dispositions transitoires relatives à l'application de l'article 1er.
Tel est l'objet de l'ordonnance que nous avons l'honneur de soumettre à votre approbation.
Veuillez agréer, Monsieur le Président, l'assurance de notre profond respect.
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