JORF n°0190 du 17 août 2013

Décret n°2013-742 du 14 août 2013

Le Premier ministre,

Sur le rapport de la ministre des affaires sociales et de la santé,

Vu le code de la santé publique, notamment ses articles L. 1243-3, L. 1413-2 et L. 3231-1 ;

Vu le code de la sécurité sociale, notamment son article L. 161-28-1 ;

Vu la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, notamment le I de son article 27 et son article 57 ;

Vu la loi n° 2004-806 du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique ;

Vu la loi n° 2009-967 du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de l'environnement, notamment son article 37 ;

Vu l'avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés en date du 14 février 2013 ;

Vu l'avis du conseil de la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés en date du 16 avril 2013 ;

Le Conseil d'Etat (section sociale) entendu,

Décrète :

Article 1

L'Agence nationale de santé publique est autorisée à mettre en œuvre un traitement automatisé de données à caractère personnel relatives à l'enquête nationale portant sur la biosurveillance, la surveillance de la santé et la nutrition dénommée "Esteban".

Le traitement a pour finalités :

1° De décrire les niveaux d'imprégnation des substances chimiques ayant un impact présumé ou observé sur la santé humaine et d'établir des valeurs de référence, dans le cadre de la surveillance prévue par l'article 37 de la loi de programmation du 3 août 2009 susvisée ;

2° D'estimer la prévalence de certaines maladies chroniques et des facteurs de risque vasculaire chez l'adulte et la prévalence de l'atopie, de l'asthme et des maladies allergiques chez l'enfant, conformément aux objectifs figurant en annexe de la loi du 9 août 2004 susvisée ;

3° De décrire les consommations alimentaires, l'activité physique et la sédentarité, dans le cadre de la surveillance de l'état nutritionnel de la population et de ses déterminants prévus par le programme national mentionné à l'article L. 3231-1 du code de la santé publique.

Article 2

Les catégories de données à caractère personnel et les informations enregistrées dans le traitement sont :
1° Des données collectées directement auprès des personnes participant à l'étude :
a) Les données d'identification, notamment le nom de famille, le nom d'usage, les prénoms, le sexe, la date et le lieu de naissance ;
b) L'adresse postale, le ou les numéros de téléphone et, le cas échéant, les adresses électroniques ;
c) Les données d'identification du médecin traitant et son adresse postale ;
d) Le numéro d'inscription au répertoire national des personnes physiques (NIR), dans les conditions précisées à l'article 3 du présent décret ;
e) Le consentement à participer à l'étude et le consentement concernant le recueil du NIR ;
2° Des données pertinentes pour la réalisation de l'étude, collectées auprès des personnes qui y consentent après avoir reçu une information dans les conditions prévues par l'article 57 de la loi du 6 janvier 1978 susvisée, et, pour les personnes mineures, une information relative au droit d'accès de leurs parents ou représentants légaux aux données déclarées par leurs enfants :
a) Le mode de vie, l'activité physique et les habitudes alimentaires ;
b) L'état de santé, le recours aux soins et la consommation médicale ;
c) L'habitat et les conditions de vie ;
d) La situation familiale, la situation au regard de l'emploi, les revenus du ménage et le niveau d'étude ;
3° Des données de santé complémentaires, pertinentes pour la réalisation de l'étude, relatives aux personnes y participant qui ont expressément consenti à procéder aux examens nécessaires après avoir reçu une information dans les conditions prévues par l'article 57 de la loi du 6 janvier 1978 susvisée ou relatives aux personnes mineures dont les titulaires de l'autorité parentale ou le représentant légal, dûment informés, ont autorisé ces examens :
a) Des résultats d'analyses d'échantillons de sang, de cheveux et d'urine ;
b) Des données d'examens cliniques et paracliniques :
― pour les personnes adultes : des mesures anthropométriques (poids, taille, tour de taille et tour de hanches), trois mesures de la pression artérielle et une exploration fonctionnelle respiratoire ;
― pour les personnes mineures : des mesures anthropométriques (poids, taille) ;
4° Des données nécessaires à la réalisation de l'enquête telles que les dates des entretiens à domicile et le nom de l'enquêteur, les dates d'examen clinique et de prélèvement et le nom du professionnel de santé les ayant effectués ;
5° Des données de consommation médicale, des données hospitalières mentionnées à l'article R. 6113-1 du code de la santé publique ainsi que des données de prise en charge pour affection de longue durée concernant les personnes participant à cette étude ayant accepté de communiquer leur NIR, et extraites, dans les conditions précisées à l'article 3 du présent décret, du système national d'information interrégimes de l'assurance maladie (SNIIR-AM), créé par l'article L. 161-28-1 du code de la sécurité sociale.

Article 3

I. ― Le NIR est recueilli par des enquêteurs auprès des personnes participant à l'étude qui y consentent, après avoir reçu, de l'Agence nationale de santé publique ou sous sa responsabilité, une information suffisante sur les conditions d'utilisation et de conservation de cette donnée. Pour les personnes ayant la qualité d'ayant droit de l'assuré, le NIR de l'assuré est communiqué dans les mêmes conditions.

II. ― Les enquêteurs ayant recueilli le NIR auprès des personnes participant à l'étude sont seuls habilités à l'enregistrer dans le système d'information de recueil des données de l'enquête.

III. ― Le NIR ne peut être utilisé qu'en vue d'effectuer un appariement des données relatives aux personnes participant à l'étude, mentionnées aux 2° et 3° de l'article 2 du présent décret, avec les données issues du SNIIR-AM mentionnées au 5° de ce même article 2 enregistrées au cours des trente-six derniers mois précédant la fin du recueil des données.

IV. ― Le NIR fait l'objet d'un chiffrement, à l'aide d'une clé fournie par la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés, dès son enregistrement.

Le NIR chiffré est transmis au moyen d'un flux sécurisé à la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés, à la fin du recueil de l'ensemble des données.

V. ― La Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés procède à l'extraction du SNIIR-AM des données individuelles mentionnées au 5° de l'article 2 du présent décret et les transmet à l'Agence nationale de santé publique au moyen d'un flux sécurisé. Cette communication de données ne comporte pas le NIR des personnes concernées mais un identifiant anonymisé.

Le rapprochement des informations relatives aux personnes participant à l'étude avec les données extraites du SNIIR-AM est effectué par l'Agence nationale de santé publique à l'aide de l'identifiant anonymisé.

VI. ― L'utilisation du NIR n'est autorisée que pendant une durée de deux ans à compter de la date de sa communication par la personne concernée participant à l'étude.

VII. ― L'Agence nationale de santé publique remet tous les trois ans à la Commission nationale de l'informatique et des libertés un rapport sur l'évolution des systèmes de sécurité du traitement mis en œuvre pour l'étude.

Article 4

Les données mentionnées aux 1° et 2° de l'article 2 du présent décret sont enregistrées par un enquêteur ou directement par la personne participant à l'étude dans le système d'information de recueil des données de l'enquête mis en œuvre par un prestataire sous la responsabilité de l'Agence nationale de santé publique

Ces données sont transférées dans les bases de données de l'Agence nationale de santé publique, aux fins de leur exploitation. Ce transfert a lieu de façon périodique au cours de la phase de recueil des données et, au plus tard, à son terme.

Article 5

Les prélèvements biologiques ainsi que les données cliniques et paracliniques mentionnés au 3° de l'article 2 du présent décret sont recueillis dans le cadre de l'examen de santé réalisé par un professionnel de santé au domicile de la personne participant à l'enquête ou dans un centre d'examen de santé.

Les résultats des analyses des prélèvements biologiques sont enregistrés par les laboratoires associés à l'étude et transmis à l'Agence nationale de santé publique par un flux sécurisé.

Les données cliniques et paracliniques sont ensuite enregistrées dans le système de recueil des données par le prestataire sous la responsabilité de l'Agence nationale de santé publique.

Les résultats individuels de santé, obtenus à la suite de ces analyses, sont transmis aux participants à l'enquête par les centres d'examens de santé ou par un médecin de l'Agence nationale de santé publique et à leur médecin traitant si les personnes participant à l'étude en font la demande.

Toute personne participant à l'étude peut, après avoir été informée des finalités des prélèvements et de leur conservation, consentir expressément à la conservation des échantillons la concernant au sein d'une collection d'échantillons biologiques humains, dans les conditions prévues à l'article L. 1243-3 du code de la santé publique. Elle peut s'opposer à ce que les échantillons prélevés et conservés soient utilisés dans le cadre d'une autre étude ou recherche.

Article 6

I. ― Ont accès aux données contenues dans le système d'information de recueil pendant la période de recueil des données :

1° Les enquêteurs chargés des entretiens et questionnaires pour les données mentionnées aux 1°, 2° et 4° de l'article 2 du présent décret des seules personnes participant dont ils ont la charge ;

2° Les professionnels de santé des centres d'examens de santé chargés des examens cliniques et prélèvements biologiques, pour les données mentionnées au 3° et 4° de l'article 2 du présent décret des seules personnes qu'ils prennent en charge.

II. ― Seuls les personnels de l'Agence nationale de santé publique, nommément désignés et habilités à cet effet par son directeur, sont autorisés à accéder aux données mentionnées à l'article 2 du présent décret, dans la stricte mesure où elles sont nécessaires à l'exercice des missions qui leur sont confiées.

Lorsqu'il s'agit de données couvertes par le secret médical, seuls des médecins peuvent y accéder.

Article 7

A l'exception du NIR qui est conservé dans les conditions définies au VI de l'article 3 du présent décret, sont conservées :
1° Pendant douze mois après la fin de la phase de recueil, les données identifiantes mentionnées à l'article 2 du présent décret ;
2° Pendant cinq ans après la fin du recueil, les données relatives aux nom, prénoms et adresse des personnes enquêtées ainsi qu'aux nom, prénoms et adresse des médecins traitants afin de permettre l'envoi aux personnes participant à l'étude des résultats des analyses mentionnées au deuxième alinéa de l'article 5 du présent décret ;
3° Pendant vingt ans après la fin du recueil, les données de géolocalisation issues du fichier des adresses des participants à l'étude ;
4° Pendant trente ans, les autres données individuelles non identifiantes.

Article 8

I. ― Seul l'Agence nationale de santé publique est autorisé à diffuser des extractions de données individuelles issues du traitement mentionné à l'article 1er du présent décret ne permettant aucune identification directe ou indirecte des personnes auprès desquelles l'enquête a été réalisée.

II. ― L'Institut national de prévention et d'éducation à la santé et l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'environnement, de l'alimentation et du travail peuvent être destinataires des extractions de données mentionnées au I du présent article.

III. ― L'Agence nationale de santé publique est responsable de la mise en œuvre des mesures de sécurité destinées à garantir la confidentialité et l'intégrité de la conservation, de la sauvegarde et des transmissions des données à caractère personnel du système d'information de recueil des données de l'enquête et des bases de données dédiées de l'institut.

L'ensemble des flux d'échange de données font l'objet d'un chiffrement et d'une conservation à part. Les données d'identité font l'objet d'un cloisonnement par rapport aux autres données.

L'Agence nationale de santé publique assure la traçabilité des actions effectuées sur les données.

Article 9

Les droits d'accès et de rectification prévus par les articles 39 et 40 de la loi du 6 janvier 1978 susvisée s'exercent auprès du directeur général de l'Agence nationale de santé publique.

Article 10

La ministre des affaires sociales et de la santé est chargée de l'exécution du présent décret, qui sera publié au Journal officiel de la République française.

Fait le 14 août 2013.

Jean-Marc Ayrault

Par le Premier ministre :

La ministre des affaires sociales

et de la santé,

Marisol Touraine