JORF n°0003 du 5 janvier 2011

5.5. Obligations comptables
5.5.1. Objectifs généraux

Les obligations de séparation comptable et de comptabilisation des coûts sont des remèdes distincts que peut imposer l'Autorité à un opérateur déclaré puissant sur un marché donné au terme des analyses de marché menées selon la procédure déclinée dans l'article 16 de la directive « Cadre ».
Le 5° du de l'article L. 38 du CPCE prévoit que « les opérateurs réputés exercer une influence significative sur un marché du secteur des télécommunications électroniques peuvent se voir imposer, (...) [d'] isoler sur le plan comptable certaines activités en matière d'interconnexion ou d'accès, ou tenir une comptabilité des services et des activités qui permette de vérifier le respect des obligations imposées au titre du présent article ».
D'une part, la mise en œuvre de l'obligation d'orientation des tarifs vers les coûts d'un opérateur mobile générique efficace (cf. supra) envisagée pour l'ensemble des opérateurs nécessite que l'Autorité dispose d'une connaissance fine et fiable des coûts des opérateurs. L'obligation de séparation comptable et de comptabilisation des coûts vise cet objectif.
D'autre part, le caractère intégré et le positionnement des opérateurs mobiles sur les marchés de la terminaison d'appel SMS peut se traduire par des distorsions discriminatoires sur les marchés de gros et de détail, qui peuvent être mises sous surveillance, grâce notamment à l'imposition d'une obligation de séparation comptable.
L'obligation de séparation comptable et de comptabilisation des coûts vise ainsi à donner à l'Autorité les moyens de vérifier la mise en œuvre de l'obligation de non-discrimination et l'absence de subventions croisées abusives.
Pour ces deux raisons, l'Autorité estime nécessaire d'imposer à Orange France, SFR, Bouygues Telecom, Orange Caraïbe et SRR une obligation de séparation comptable et de comptabilisation des coûts.
Cette obligation est proportionnée aux objectifs fixés à l'article L. 32-1 du CPCE, et en particulier les 2°, 3° et 4° du II. Cette obligation constitue le minimum nécessaire pour s'assurer notamment de l'absence de comportements anticoncurrentiels et du respect de l'obligation de reflet des coûts (cf. supra).
Toutefois, l'Autorité considère que l'imposition aux autres opérateurs mobiles ultramarins d'une obligation de séparation comptable et de comptabilisation des coûts ne serait pas proportionnée, quand bien même ces opérateurs seraient soumis à une obligation d'orientation vers les coûts au même titre qu'Orange France, SFR, Bouygues Telecom, Orange Caraïbe et SRR. En effet, elle n'apparaît pas absolument nécessaire, dans la mesure où l'obligation de comptabilisation des coûts imposée à Orange Caraïbe et SRR permet déjà à l'Autorité de disposer de données fiables de coûts sur la zone Antilles-Guyane et la zone Réunion-Mayotte. En outre, elle n'apparaît pas proportionnée au regard de la complexité de mise en œuvre de cette obligation et des positions respectives qu'occupent ces opérateurs (taille et parts de marché) au sein des zones géographiques où ils sont présents.
Dans sa réponse à la consultation publique de l'automne 2009, Orange Caraïbe juge qu'il est également disproportionné d'alourdir sa comptabilité réglementaire par un volet SMS.
Sur ce point, l'Autorité estime que la restitution par Orange Caraïbe d'un volet réglementaire SMS en sus du volet voix ne devrait pas représenter une charge de travail supplémentaire excessive au regard du caractère d'ores et déjà très fin de son modèle réglementaire.

5.5.2. Spécifications comptables

Au titre de cette obligation et afin de respecter une cohérence entre opérateurs, l'Autorité dispose de la possibilité d'établir, en vertu de l'article D. 312 du CPCE, les spécifications du système de comptabilisation des coûts, ainsi que les méthodes de valorisation et les règles d'allocation des coûts. Elle précise par ailleurs le format et le degré de détail des comptes, pour permettre la vérification du respect des obligations de non-discrimination et de reflet des coûts, lorsqu'elles s'appliquent.
La décision n° 2010-0200 de l'Autorité en date du 11 février 2010 porte, en l'occurrence, sur la spécification de l'obligation de comptabilisation et de restitution des coûts imposées aux opérateurs sur le marché de gros de la terminaison d'appel SMS sur leurs réseaux respectifs.
Cette spécification est sans préjudice d'une décision ultérieure de l'Autorité.
Afin d'assurer un degré d'information suffisant, les éléments pertinents du système d'information et les données comptables sont tenus à la disposition de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, à la demande de cette dernière, dans le respect des règles qu'elle a établi concernant les spécifications éventuelles des systèmes de comptabilisation, les méthodologies de valorisation et d'allocation des coûts, ainsi que le format des comptes à produire.

5.5.3. Audits

Conformément au 5° du I de l'article L. 38 du CPCE, les comptes produits et les systèmes de comptabilisation des coûts sont audités annuellement par des organismes indépendants. Ces organismes sont désignés par l'Autorité. Cette vérification est assurée aux frais des opérateurs concernés. Les organismes désignés publient annuellement une attestation de conformité des comptes.
Cette obligation s'inscrit en cohérence avec celles imposées au titre de la régulation des marchés de gros de la terminaison d'appel vocal en métropole.
Un audit du système comptable est nécessaire pour en garantir la robustesse, la conformité avec les décisions de l'Autorité et la fiabilité des données comptables qui en découlent.
L'Autorité estime cette obligation justifiée et proportionnée à l'objectif visant à garantir l'exercice au bénéfice des utilisateurs d'une concurrence effective et loyale entre les exploitants de réseau et les fournisseurs de services de communications électroniques.

5.6. Prise en compte des contributions à la consultation publique menée du 16 juin au 16 juillet 2010
sur les obligations envisagées

L'Autorité ne traite pas ici des éléments déjà présents dans les contributions à la consultation publique précédente, menée du 17 novembre au 18 décembre 2009, auxquels l'Autorité a déjà apporté des réponses.

5.6.1. Contributions sur les obligations envisagées

Sur l'obligation de faire droit aux demandes raisonnables d'accès et d'interconnexion des opérateurs non mobiles
Le groupe France Télécom-Orange et Bouygues Telecom estiment qu'une interconnexion directe au SMS-C, de type SS7, avec des opérateurs non mobiles soulève des risques de spam. Bouygues Telecom prône le maintien de la solution actuelle de raccordement et se dit « favorable au développement par l'ensemble des opérateurs mobiles d'une roadmap fonctionnelle enrichie au service des agrégateurs ».
S'ils réfutent la nécessité d'une régulation des offres aux opérateurs non mobiles, en mettant en avant le lancement de nouvelles offres répondant aux attentes, le groupe France Télécom-Orange et Bouygues Telecom se disent néanmoins favorables à l'organisation de réunions multilatérales réunissant les acteurs du secteur afin de faciliter la mise en place de nouvelles fonctionnalités sur les offres aux agrégateurs de SMS.
Un agrégateur de SMS estime qu'une connexion de type SS7 entre opérateurs mobiles et agrégateurs de SMS pourrait apporter « une plus grande flexibilité et une certaine indépendance technique » aux agrégateurs de SMS. Toutefois, l'opérateur estime que « de simples évolutions contractuelles ou techniques de l'existant peuvent aussi répondre à 95 % des demandes actuelles, qui sont principalement : la gestion des débits, le plan de numérotation, la qualité de service et diverses fonctionnalités mineures comme le changement d'OADC ».
Un autre agrégateur, Ocito, demande à l'Autorité de préciser le format technique de l'interconnexion. Ocito dit partager l'analyse des opérateurs mobiles sur le risque de spam induit par une interconnexion de type SS7 et recommande à l'Autorité « de conserver les accès techniques existants ».
L'agrégateur Netsize est favorable à l'obligation de faire droit aux demandes raisonnables d'accès et d'interconnexion des agrégateurs de SMS. L'opérateur précise cependant qu'un flou demeure sur le champ d'application de ces offres d'interconnexion, certains opérateurs les limitant à l'envoi de SMS à destination de personnes, le trafic B2B (39) étant traité à part. Netsize demande à ce que ce champ soit élargi à « tout SMS-MT terminé sur le réseau de l'opérateur concerné, qu'il s'agisse de trafic standard ou premium, B2B ou B2C (40) (machine to machine ou machine to employee) (41). S'agissant de l'obligation de négocier de bonne foi mise à la charge des opérateurs mobiles, Netsize estime qu'elle doit intégrer « la notion de temps et de diligence dans la conduite desdites négociations ».
Par ailleurs, l'opérateur est favorable à l'organisation de réunions multilatérales entre agrégateurs de SMS et opérateurs de réseau mobiles et demande « la mise en place d'un plan de travail assorti d'un calendrier précis, ceci sur une période de temps relativement courte ».
L'opérateur fixe BJT Partners estime que la mise en place d'une interconnexion SMS bidirectionnelle entre opérateurs fixes et opérateurs mobiles pourrait « favoriser l'innovation de la part des différents opérateurs fixes, permettant notamment le développement de l'usage de nouveaux services et outils de messagerie unifiée, de convergence fixe mobile et de travail collaboratif ». BJT Partners demande à ce que cette interconnexion soit possible « dans des conditions économiques réalistes pour un nouvel entrant » et juge que les minima de facturation et coûts fixes récurrents actuellement demandés par les opérateurs de réseau mobiles, qui seraient près de dix fois supérieurs aux coûts fixes pour une interconnexion avec France Télécom, préviennent aujourd'hui la mise en place d'une interconnexion SMS fixe-mobile pour la majorité des petits opérateurs fixes.
Par ailleurs, Dauphin Telecom mentionne à l'Autorité la demande qu'il a formulée à Orange Caraïbe d'une interconnexion directe sous protocole SIP, en lieu et place de l'interconnexion qui est aujourd'hui assurée via l'achat d'une prestation de transit. L'opérateur des îles du Nord précise que cette demande reste sans réponse satisfaisante.
Sur l'obligation de transparence
Le groupe France Télécom-Orange estime que l'obligation de publier une offre de référence imposée aux opérateurs mobiles métropolitains est disproportionnée.
Netsize se dit à l'opposé favorable à toute mesure tendant à accroître la transparence dans les relations entre agrégateurs de SMS et opérateurs mobiles, afin de concourir à la mise en place de conditions de négociations plus équilibrées entre les parties.
Sur l'obligation d'orientation des tarifs vers les coûts
Le groupe France Télécom-Orange estime que le plafond tarifaire de 1 c€ par SMS-MT imposé pour la terminaison d'appel SMS entre opérateurs mobiles n'est pas suffisamment élevé pour prévenir tout risque de spam par SMS.
L'Association des utilisateurs du radiotéléphone se félicite du projet de régulation des prix de gros de la terminaison d'appel SMS en métropole et outre-mer et espère que cette régulation aura un impact sur le prix des SMS à l'unité intraterritoriaux mais aussi sur le prix des SMS entre la métropole et l'outre-mer. L'association estime que ces derniers ne devraient pas être surfacturés mais inclus dans les forfaits et offres d'abondance.
En revanche, l'association juge que l'asymétrie de Bouygues Telecom sur le tarif de terminaison d'appel SMS pourrait être immédiatement supprimée.
Dauphin Telecom est favorable, sur le principe, à l'imposition de plafonds tarifaires sur la terminaison d'appel SMS. L'opérateur des îles du Nord estime que cette mesure permettra l'émergence d'offres d'abondance SMS non seulement dans les DOM mais également entre la métropole et les DOM, ce qui favorisera une véritable continuité territoriale.
L'agrégateur Atos Wordline interprète les plafonds tarifaires mis en avant dans le projet de décision pour les offres d'interconnexion entre opérateurs mobiles comme s'appliquant également aux offres d'interconnexion aux opérateurs non mobiles. L'opérateur estime que « la baisse significative des prix proposée est absolument nécessaire pour redynamiser le marché du SMS de notification par rapport aux canaux concurrents comme le push mail sur mobile ou la notification applicative ».
Quant à Ocito, il demande à l'Autorité de fixer des plafonds tarifaires pour les offres d'interconnexion aux agrégateurs de SMS et souhaite une diminution très progressive du prix de la terminaison SMS, jusqu'à un tarif optimum ne favorisant pas le développement du spam par SMS.
Sur le sujet de la lutte contre le spam
L'agrégateur Netsize s'exprime en faveur de l'amélioration des outils de lutte contre le spam, qui doit être le fruit d'une véritable concertation entre tous les acteurs.
Ocito estime quant à lui que les opérateurs mobiles doivent garder la capacité d'exercer un pouvoir de sanction sur les agrégateurs indélicats. Ocito demande également à l'Autorité de saisir la CNIL pour avis sur son projet de décision.
Sur l'encadrement tarifaire imposé sur la zone Antilles-Guyane
Dauphin Telecom estime ne pas pouvoir baisser le tarif de sa terminaison d'appel SMS en deçà de 0,002 US$ (environ 1,5 c€), montant correspondant aux coûts de transit supportés par l'opérateur en l'absence d'interconnexion directe avec Orange Caraïbe, Digicel et Outremer Telecom.
Sur l'encadrement tarifaire imposé sur la zone Réunion-Mayotte
SRR approuve l'imposition d'un contrôle tarifaire sur la terminaison d'appel SMS sur la zone Réunion-Mayotte mais considère que le projet de décision de l'Autorité est problématique.
Tout d'abord, selon l'opérateur, en fixant un plafond tarifaire intermédiaire à 3 c€ par SMS-MT tout en indiquant qu'il appartient aux opérateurs, et notamment à SRR, de s'assurer de la conformité de leur tarification au détail avec l'obligation de non-discrimination interne-externe, l'Autorité sous-entend qu'un niveau de 3 c€ n'est pas adapté. SRR considère par conséquent que l'Autorité ne remédie pas aux problèmes concurrentiels qu'elle a identifiés.
SRR estime qu'une phase de transition n'est pas nécessaire et que les plafonds tarifaires de terminaison d'appel SMS peuvent être fixés directement aux coûts, dans la mesure où les opérateurs n'en seraient pas déstabilisés.
D'autre part, SRR interprète le projet de décision de l'ARCEP comme une invitation à abaisser unilatéralement son tarif de terminaison d'appel SMS, i.e. à introduire une asymétrie entre opérateurs, dont l'Autorité démontre par ailleurs les effets distorsifs, ce qui est jugé contradictoire par SRR. L'opérateur précise en particulier que cette asymétrie inciterait à une différenciation tarifaire on-net/off-net au détail, qui ne semble pas être souhaité par l'Autorité.
SRR rappelle qu'Orange Réunion et Outremer Telecom sont eux aussi en monopole sur le marché de la terminaison d'appel SMS sur leur réseau et qu'ils commercialisent des offres d'abondance SMS similaires à celles de SRR. Dès lors, SRR considère que le commentaire de l'Autorité tenant au respect de l'obligation de non-discrimination interne-externe dans la tarification des offres de détail a vocation à s'appliquer à l'ensemble des opérateurs.
SRR demande par conséquent à l'Autorité de modifier le rythme de baisse envisagé sur la zone Réunion-Mayotte.
Sur l'obligation de séparation comptable et de comptabilisation des coûts
SRR s'oppose à l'obligation de séparation comptable et de comptabilisation des coûts relatifs aux offres d'interconnexion SMS qui lui serait imposée sur la zone Réunion-Mayotte, contrairement à Orange Réunion et Outremer Telecom. SRR juge ce remède disproportionné. SRR relève de plus que l'Autorité fixe des tarifs de terminaison d'appel SMS identiques in fine en métropole et en outre-mer et juge que, dès lors, l'Autorité n'a pas besoin de référentiels de coûts supplémentaires.

(39) B2B (business to business) désigne les échanges d'entreprise à entreprise. (40) B2C (business to consumer) désigne les communications des entreprises vers leurs clients. (41) Machine to machine désigne les communications entre machines, machine to employee désigne les communications de machines vers les employés de l'entreprise.


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5.5. Obligations comptables

5.5.1. Objectifs généraux

Les obligations de séparation comptable et de comptabilisation des coûts sont des remèdes distincts que peut imposer l'Autorité à un opérateur déclaré puissant sur un marché donné au terme des analyses de marché menées selon la procédure déclinée dans l'article 16 de la directive « Cadre ».

Le 5° du de l'article L. 38 du CPCE prévoit que « les opérateurs réputés exercer une influence significative sur un marché du secteur des télécommunications électroniques peuvent se voir imposer, (...) [d'] isoler sur le plan comptable certaines activités en matière d'interconnexion ou d'accès, ou tenir une comptabilité des services et des activités qui permette de vérifier le respect des obligations imposées au titre du présent article ».

D'une part, la mise en œuvre de l'obligation d'orientation des tarifs vers les coûts d'un opérateur mobile générique efficace (cf. supra) envisagée pour l'ensemble des opérateurs nécessite que l'Autorité dispose d'une connaissance fine et fiable des coûts des opérateurs. L'obligation de séparation comptable et de comptabilisation des coûts vise cet objectif.

D'autre part, le caractère intégré et le positionnement des opérateurs mobiles sur les marchés de la terminaison d'appel SMS peut se traduire par des distorsions discriminatoires sur les marchés de gros et de détail, qui peuvent être mises sous surveillance, grâce notamment à l'imposition d'une obligation de séparation comptable.

L'obligation de séparation comptable et de comptabilisation des coûts vise ainsi à donner à l'Autorité les moyens de vérifier la mise en œuvre de l'obligation de non-discrimination et l'absence de subventions croisées abusives.

Pour ces deux raisons, l'Autorité estime nécessaire d'imposer à Orange France, SFR, Bouygues Telecom, Orange Caraïbe et SRR une obligation de séparation comptable et de comptabilisation des coûts.

Cette obligation est proportionnée aux objectifs fixés à l'article L. 32-1 du CPCE, et en particulier les 2°, 3° et 4° du II. Cette obligation constitue le minimum nécessaire pour s'assurer notamment de l'absence de comportements anticoncurrentiels et du respect de l'obligation de reflet des coûts (cf. supra).

Toutefois, l'Autorité considère que l'imposition aux autres opérateurs mobiles ultramarins d'une obligation de séparation comptable et de comptabilisation des coûts ne serait pas proportionnée, quand bien même ces opérateurs seraient soumis à une obligation d'orientation vers les coûts au même titre qu'Orange France, SFR, Bouygues Telecom, Orange Caraïbe et SRR. En effet, elle n'apparaît pas absolument nécessaire, dans la mesure où l'obligation de comptabilisation des coûts imposée à Orange Caraïbe et SRR permet déjà à l'Autorité de disposer de données fiables de coûts sur la zone Antilles-Guyane et la zone Réunion-Mayotte. En outre, elle n'apparaît pas proportionnée au regard de la complexité de mise en œuvre de cette obligation et des positions respectives qu'occupent ces opérateurs (taille et parts de marché) au sein des zones géographiques où ils sont présents.

Dans sa réponse à la consultation publique de l'automne 2009, Orange Caraïbe juge qu'il est également disproportionné d'alourdir sa comptabilité réglementaire par un volet SMS.

Sur ce point, l'Autorité estime que la restitution par Orange Caraïbe d'un volet réglementaire SMS en sus du volet voix ne devrait pas représenter une charge de travail supplémentaire excessive au regard du caractère d'ores et déjà très fin de son modèle réglementaire.

5.5.2. Spécifications comptables

Au titre de cette obligation et afin de respecter une cohérence entre opérateurs, l'Autorité dispose de la possibilité d'établir, en vertu de l'article D. 312 du CPCE, les spécifications du système de comptabilisation des coûts, ainsi que les méthodes de valorisation et les règles d'allocation des coûts. Elle précise par ailleurs le format et le degré de détail des comptes, pour permettre la vérification du respect des obligations de non-discrimination et de reflet des coûts, lorsqu'elles s'appliquent.

La décision n° 2010-0200 de l'Autorité en date du 11 février 2010 porte, en l'occurrence, sur la spécification de l'obligation de comptabilisation et de restitution des coûts imposées aux opérateurs sur le marché de gros de la terminaison d'appel SMS sur leurs réseaux respectifs.

Cette spécification est sans préjudice d'une décision ultérieure de l'Autorité.

Afin d'assurer un degré d'information suffisant, les éléments pertinents du système d'information et les données comptables sont tenus à la disposition de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, à la demande de cette dernière, dans le respect des règles qu'elle a établi concernant les spécifications éventuelles des systèmes de comptabilisation, les méthodologies de valorisation et d'allocation des coûts, ainsi que le format des comptes à produire.

5.5.3. Audits

Conformément au 5° du I de l'article L. 38 du CPCE, les comptes produits et les systèmes de comptabilisation des coûts sont audités annuellement par des organismes indépendants. Ces organismes sont désignés par l'Autorité. Cette vérification est assurée aux frais des opérateurs concernés. Les organismes désignés publient annuellement une attestation de conformité des comptes.

Cette obligation s'inscrit en cohérence avec celles imposées au titre de la régulation des marchés de gros de la terminaison d'appel vocal en métropole.

Un audit du système comptable est nécessaire pour en garantir la robustesse, la conformité avec les décisions de l'Autorité et la fiabilité des données comptables qui en découlent.

L'Autorité estime cette obligation justifiée et proportionnée à l'objectif visant à garantir l'exercice au bénéfice des utilisateurs d'une concurrence effective et loyale entre les exploitants de réseau et les fournisseurs de services de communications électroniques.

5.6. Prise en compte des contributions à la consultation publique menée du 16 juin au 16 juillet 2010

sur les obligations envisagées

L'Autorité ne traite pas ici des éléments déjà présents dans les contributions à la consultation publique précédente, menée du 17 novembre au 18 décembre 2009, auxquels l'Autorité a déjà apporté des réponses.

5.6.1. Contributions sur les obligations envisagées

Sur l'obligation de faire droit aux demandes raisonnables d'accès et d'interconnexion des opérateurs non mobiles

Le groupe France Télécom-Orange et Bouygues Telecom estiment qu'une interconnexion directe au SMS-C, de type SS7, avec des opérateurs non mobiles soulève des risques de spam. Bouygues Telecom prône le maintien de la solution actuelle de raccordement et se dit « favorable au développement par l'ensemble des opérateurs mobiles d'une roadmap fonctionnelle enrichie au service des agrégateurs ».

S'ils réfutent la nécessité d'une régulation des offres aux opérateurs non mobiles, en mettant en avant le lancement de nouvelles offres répondant aux attentes, le groupe France Télécom-Orange et Bouygues Telecom se disent néanmoins favorables à l'organisation de réunions multilatérales réunissant les acteurs du secteur afin de faciliter la mise en place de nouvelles fonctionnalités sur les offres aux agrégateurs de SMS.

Un agrégateur de SMS estime qu'une connexion de type SS7 entre opérateurs mobiles et agrégateurs de SMS pourrait apporter « une plus grande flexibilité et une certaine indépendance technique » aux agrégateurs de SMS. Toutefois, l'opérateur estime que « de simples évolutions contractuelles ou techniques de l'existant peuvent aussi répondre à 95 % des demandes actuelles, qui sont principalement : la gestion des débits, le plan de numérotation, la qualité de service et diverses fonctionnalités mineures comme le changement d'OADC ».

Un autre agrégateur, Ocito, demande à l'Autorité de préciser le format technique de l'interconnexion. Ocito dit partager l'analyse des opérateurs mobiles sur le risque de spam induit par une interconnexion de type SS7 et recommande à l'Autorité « de conserver les accès techniques existants ».

L'agrégateur Netsize est favorable à l'obligation de faire droit aux demandes raisonnables d'accès et d'interconnexion des agrégateurs de SMS. L'opérateur précise cependant qu'un flou demeure sur le champ d'application de ces offres d'interconnexion, certains opérateurs les limitant à l'envoi de SMS à destination de personnes, le trafic B2B (39) étant traité à part. Netsize demande à ce que ce champ soit élargi à « tout SMS-MT terminé sur le réseau de l'opérateur concerné, qu'il s'agisse de trafic standard ou premium, B2B ou B2C (40) (machine to machine ou machine to employee) (41). S'agissant de l'obligation de négocier de bonne foi mise à la charge des opérateurs mobiles, Netsize estime qu'elle doit intégrer « la notion de temps et de diligence dans la conduite desdites négociations ».

Par ailleurs, l'opérateur est favorable à l'organisation de réunions multilatérales entre agrégateurs de SMS et opérateurs de réseau mobiles et demande « la mise en place d'un plan de travail assorti d'un calendrier précis, ceci sur une période de temps relativement courte ».

L'opérateur fixe BJT Partners estime que la mise en place d'une interconnexion SMS bidirectionnelle entre opérateurs fixes et opérateurs mobiles pourrait « favoriser l'innovation de la part des différents opérateurs fixes, permettant notamment le développement de l'usage de nouveaux services et outils de messagerie unifiée, de convergence fixe mobile et de travail collaboratif ». BJT Partners demande à ce que cette interconnexion soit possible « dans des conditions économiques réalistes pour un nouvel entrant » et juge que les minima de facturation et coûts fixes récurrents actuellement demandés par les opérateurs de réseau mobiles, qui seraient près de dix fois supérieurs aux coûts fixes pour une interconnexion avec France Télécom, préviennent aujourd'hui la mise en place d'une interconnexion SMS fixe-mobile pour la majorité des petits opérateurs fixes.

Par ailleurs, Dauphin Telecom mentionne à l'Autorité la demande qu'il a formulée à Orange Caraïbe d'une interconnexion directe sous protocole SIP, en lieu et place de l'interconnexion qui est aujourd'hui assurée via l'achat d'une prestation de transit. L'opérateur des îles du Nord précise que cette demande reste sans réponse satisfaisante.

Sur l'obligation de transparence

Le groupe France Télécom-Orange estime que l'obligation de publier une offre de référence imposée aux opérateurs mobiles métropolitains est disproportionnée.

Netsize se dit à l'opposé favorable à toute mesure tendant à accroître la transparence dans les relations entre agrégateurs de SMS et opérateurs mobiles, afin de concourir à la mise en place de conditions de négociations plus équilibrées entre les parties.

Sur l'obligation d'orientation des tarifs vers les coûts

Le groupe France Télécom-Orange estime que le plafond tarifaire de 1 c€ par SMS-MT imposé pour la terminaison d'appel SMS entre opérateurs mobiles n'est pas suffisamment élevé pour prévenir tout risque de spam par SMS.

L'Association des utilisateurs du radiotéléphone se félicite du projet de régulation des prix de gros de la terminaison d'appel SMS en métropole et outre-mer et espère que cette régulation aura un impact sur le prix des SMS à l'unité intraterritoriaux mais aussi sur le prix des SMS entre la métropole et l'outre-mer. L'association estime que ces derniers ne devraient pas être surfacturés mais inclus dans les forfaits et offres d'abondance.

En revanche, l'association juge que l'asymétrie de Bouygues Telecom sur le tarif de terminaison d'appel SMS pourrait être immédiatement supprimée.

Dauphin Telecom est favorable, sur le principe, à l'imposition de plafonds tarifaires sur la terminaison d'appel SMS. L'opérateur des îles du Nord estime que cette mesure permettra l'émergence d'offres d'abondance SMS non seulement dans les DOM mais également entre la métropole et les DOM, ce qui favorisera une véritable continuité territoriale.

L'agrégateur Atos Wordline interprète les plafonds tarifaires mis en avant dans le projet de décision pour les offres d'interconnexion entre opérateurs mobiles comme s'appliquant également aux offres d'interconnexion aux opérateurs non mobiles. L'opérateur estime que « la baisse significative des prix proposée est absolument nécessaire pour redynamiser le marché du SMS de notification par rapport aux canaux concurrents comme le push mail sur mobile ou la notification applicative ».

Quant à Ocito, il demande à l'Autorité de fixer des plafonds tarifaires pour les offres d'interconnexion aux agrégateurs de SMS et souhaite une diminution très progressive du prix de la terminaison SMS, jusqu'à un tarif optimum ne favorisant pas le développement du spam par SMS.

Sur le sujet de la lutte contre le spam

L'agrégateur Netsize s'exprime en faveur de l'amélioration des outils de lutte contre le spam, qui doit être le fruit d'une véritable concertation entre tous les acteurs.

Ocito estime quant à lui que les opérateurs mobiles doivent garder la capacité d'exercer un pouvoir de sanction sur les agrégateurs indélicats. Ocito demande également à l'Autorité de saisir la CNIL pour avis sur son projet de décision.

Sur l'encadrement tarifaire imposé sur la zone Antilles-Guyane

Dauphin Telecom estime ne pas pouvoir baisser le tarif de sa terminaison d'appel SMS en deçà de 0,002 US$ (environ 1,5 c€), montant correspondant aux coûts de transit supportés par l'opérateur en l'absence d'interconnexion directe avec Orange Caraïbe, Digicel et Outremer Telecom.

Sur l'encadrement tarifaire imposé sur la zone Réunion-Mayotte

SRR approuve l'imposition d'un contrôle tarifaire sur la terminaison d'appel SMS sur la zone Réunion-Mayotte mais considère que le projet de décision de l'Autorité est problématique.

Tout d'abord, selon l'opérateur, en fixant un plafond tarifaire intermédiaire à 3 c€ par SMS-MT tout en indiquant qu'il appartient aux opérateurs, et notamment à SRR, de s'assurer de la conformité de leur tarification au détail avec l'obligation de non-discrimination interne-externe, l'Autorité sous-entend qu'un niveau de 3 c€ n'est pas adapté. SRR considère par conséquent que l'Autorité ne remédie pas aux problèmes concurrentiels qu'elle a identifiés.

SRR estime qu'une phase de transition n'est pas nécessaire et que les plafonds tarifaires de terminaison d'appel SMS peuvent être fixés directement aux coûts, dans la mesure où les opérateurs n'en seraient pas déstabilisés.

D'autre part, SRR interprète le projet de décision de l'ARCEP comme une invitation à abaisser unilatéralement son tarif de terminaison d'appel SMS, i.e. à introduire une asymétrie entre opérateurs, dont l'Autorité démontre par ailleurs les effets distorsifs, ce qui est jugé contradictoire par SRR. L'opérateur précise en particulier que cette asymétrie inciterait à une différenciation tarifaire on-net/off-net au détail, qui ne semble pas être souhaité par l'Autorité.

SRR rappelle qu'Orange Réunion et Outremer Telecom sont eux aussi en monopole sur le marché de la terminaison d'appel SMS sur leur réseau et qu'ils commercialisent des offres d'abondance SMS similaires à celles de SRR. Dès lors, SRR considère que le commentaire de l'Autorité tenant au respect de l'obligation de non-discrimination interne-externe dans la tarification des offres de détail a vocation à s'appliquer à l'ensemble des opérateurs.

SRR demande par conséquent à l'Autorité de modifier le rythme de baisse envisagé sur la zone Réunion-Mayotte.

Sur l'obligation de séparation comptable et de comptabilisation des coûts

SRR s'oppose à l'obligation de séparation comptable et de comptabilisation des coûts relatifs aux offres d'interconnexion SMS qui lui serait imposée sur la zone Réunion-Mayotte, contrairement à Orange Réunion et Outremer Telecom. SRR juge ce remède disproportionné. SRR relève de plus que l'Autorité fixe des tarifs de terminaison d'appel SMS identiques in fine en métropole et en outre-mer et juge que, dès lors, l'Autorité n'a pas besoin de référentiels de coûts supplémentaires.

(39) B2B (business to business) désigne les échanges d'entreprise à entreprise. (40) B2C (business to consumer) désigne les communications des entreprises vers leurs clients. (41) Machine to machine désigne les communications entre machines, machine to employee désigne les communications de machines vers les employés de l'entreprise.