Les deux opérateurs mobiles invoquent un risque de développement accru du spam par SMS. Pour Orange France, une offre d'interconnexion impliquerait de déléguer opérationnellement et contractuellement aux agrégateurs la gestion des problèmes de spam (fonctionnalités STOP et CONTACT, gestion individuelle des numéros courts) alors que l'opérateur de réseau, assumant la relation avec les consommateurs, doit au contraire garder ces capacités. Pour Bouygues Telecom, un raccordement des agrégateurs de SMS au niveau de la plate-forme de signalisation SS7 pose des problématiques au niveau de la mise en œuvre et du contrôle des règles déontologiques et au niveau de la sécurité des réseaux (accès au HLR, contournement aisé de la plateforme SS7).
En revanche, SFR indique, dans sa réponse à la consultation publique de l'automne 2009, qu'il travaille actuellement sur une offre d'interconnexion à destination d'agrégateurs de SMS suite à la réception de demandes.
De leur côté, certains agrégateurs de SMS considèrent qu'une offre d'interconnexion associée à la détention en propre d'un SMS-C pourrait leur offrir des fonctionnalités pertinentes (changement dynamique de l'OAdC, gestion de bout en bout du message, meilleure garantie de service, etc.) et qu'elle doit a minima être envisageable pour un agrégateur de SMS.
En ce qui concerne le périmètre des services éligibles à l'interconnexion SMS, un agrégateur et un éditeur de services précisent, en réponse à la consultation publique de l'automne 2009, que les évolutions fonctionnelles de l'offre d'interconnexion ne doivent pas être restreintes à l'acheminement de SMS sur numéro clair (MSISDN) (34), à l'exclusion des SMS sur numéros masqués (alias) (35), sans quoi les opérateurs mobiles continueraient de préempter ce dernier marché.
Ces considérations appellent des précisions de la part de l'Autorité.
L'Autorité rappelle que la fourniture de la terminaison d'appel SMS revêt le caractère d'une infrastructure essentielle. Il est donc essentiel que les opérateurs vendant cette prestation à des agrégateurs le fassent dans des conditions économiques et techniques qui ne génèrent pas de biais concurrentiel sur le marché de détail associés. Comme mentionné au chapitre 3, les contraintes fonctionnelles et techniques des agrégateurs ne semblent pas répondre à d'autres justifications que la volonté des opérateurs mobiles de conserver la maîtrise de la totalité de la chaîne de valeur associée à la fourniture de SMS et alors même qu'il apparaît que les agrégateurs de SMS ont une légitimité à intervenir eux-mêmes sur cette chaîne et à bénéficier de certaines fonctionnalités.
L'Autorité entend mettre en place un cadre corrigeant le déséquilibre de pouvoir de négociation entre agrégateurs de SMS et opérateurs mobiles, et enjoindre les opérateurs de réseaux mobiles à respecter une obligation de faire droit à des demandes raisonnables d'accès à la terminaison d'appel SMS provenant des acteurs éligibles à l'interconnexion.
Cette obligation s'entend comme une injonction à négocier de bonne foi avec ces acteurs et à leur offrir la latitude technique raisonnable à laquelle leur statut d'opérateur leur donne droit.
Par ailleurs, les ouvertures fonctionnelles des offres d'interconnexion à destination des agrégateurs de SMS doivent s'accompagner d'un nécessaire encadrement déontologique spécifique, sujet sur lequel doivent pouvoir contribuer l'ensemble des acteurs de la chaîne de valeur et non pas unilatéralement les opérateurs mobiles.
L'Autorité pourra organiser des réunions multilatérales réunissant agrégateurs de SMS et opérateurs mobiles, afin de faciliter les échanges sur ces ouvertures fonctionnelles et contractuelles et leur mise en œuvre, comme l'y a invitée Orange France.
Enfin, l'Autorité précise que l'obligation de faire droit à toute demande raisonnable d'accès s'entend dans le respect des règles liées aux messages et contenus acheminés, à leur « déontologie » au sens large du terme (responsabilités quant aux messages et contenus acheminés, loyauté des services, réglementations afférentes à la prospection directe ou aux données personnelles, etc.).
Il apparaît justifié et proportionné d'imposer une telle obligation, notamment au regard des objectifs poursuivis par l'Autorité en application de l'article L. 32-1-II du CPCE visant à garantir « l'innovation et la compétitivité dans le secteur des communications électroniques », « l'absence de discrimination, dans des circonstances analogues, dans le traitement des opérateurs » ainsi que « le développement de l'investissement efficace dans les infrastructures » et « un niveau élevé de protection des consommateurs ».
(34) Cf. lexique en annexe A. (35) Cf. lexique en annexe A.
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