Les obligations envisagées ci-dessous visent l'ensemble des prestations de terminaison d'appel SMS relevant du régime de l'interconnexion des opérateurs mobiles métropolitains et ultramarins, existantes ou futures. Ainsi qu'il a été exposé dans les chapitres précédents, l'Autorité considère en effet que les agrégateurs, les opérateurs de réseau fixe et FAI présentant la qualité d'exploitants de réseau ouvert au public peuvent bénéficier d'une interconnexion directe avec les opérateurs de réseau mobile au regard de leur statut.
5.1. Prestations d'accès et d'interconnexion au réseau mobile
5.1.1. Obligation de faire droit à toute demande raisonnable d'accès
d'un acteur éligible à l'interconnexion
Le 3° du I de l'article L. 38 du CPCE prévoit, conformément à l'article 12 de la directive « Accès » susvisée, que l'Autorité peut imposer, à un opérateur disposant d'une influence significative, l'obligation de « faire droit à des demandes raisonnables d'accès à des éléments de réseau ou à des moyens qui y sont associés ». En particulier, cette obligation d'accès peut porter spécifiquement sur les demandes en provenance d'acteurs éligibles à l'interconnexion, c'est-à-dire en provenance d'exploitants de réseaux ouverts au public.
L'existence de marchés de gros de l'accès permet à des opérateurs qui ne possèdent pas l'ensemble des infrastructures nécessaires à l'acheminement de trafic de bout en bout de s'appuyer sur les réseaux existants pour intervenir sur les marchés de détail. Par conséquent, ces marchés de gros sont indispensables à l'existence et au bon fonctionnement d'une concurrence durable sur les marchés de communications électroniques.
Afin de permettre l'interopérabilité des services et des investissements efficaces au titre de l'accès et compte tenu de la position monopolistique de chaque opérateur mobile sur le marché de la terminaison SMS vers ses numéros mobiles, l'Autorité estime nécessaire d'imposer à chaque opérateur mobile visé dans la section 2.4 une obligation de faire droit à toute demande raisonnable d'accès à des fins de terminer du trafic SMS à destination des numéros mobiles ouverts à l'interconnexion sur son réseau, ce conformément à l'article D. 310 (1°) du CPCE.
Si l'article L. 34-8-II du CPCE impose d'ores et déjà aux exploitants de réseaux ouverts au public, et donc en particulier aux opérateurs de réseaux mobiles, de faire droit aux demandes d'interconnexion des autres exploitants de réseaux ouverts au public, l'interconnexion étant une modalité de l'accès, l'article L. 38 du CPCE permet de renforcer ces dispositions.
Il est nécessaire et proportionné, au regard notamment de l'objectif de développement efficace dans les infrastructures et de compétitivité du secteur mentionné au 3° de l'article L. 32-1 du code précité, que les opérateurs mobiles présentent les conditions techniques et tarifaires de fourniture des prestations qu'ils offrent de façon suffisamment claire et détaillée, et qu'ils ne subordonnent pas l'octroi d'une prestation à une autre, afin de ne pas conduire les acteurs à payer pour des prestations qui ne leur seraient pas nécessaires.
L'Autorité estime également nécessaire que les opérateurs désignés puissants négocient de bonne foi, conformément à l'article D. 310 (2°) du CPCE afin, d'une part, de minimiser les cas de litige et, d'autre part, de ne pas profiter de l'influence significative qu'ils exercent sur ces marchés pour durcir les négociations avec les opérateurs acheteurs. Enfin, compte tenu des investissements réalisés par les opérateurs qui demandent (ou demanderaient) l'interconnexion, il est également justifié que les opérateurs puissants soient soumis à l'obligation de ne pas retirer un accès déjà accordé, hors accord de l'Autorité ou de l'opérateur concerné.
Compte tenu de l'impossibilité, pour un opérateur souhaitant terminer un SMS sur le réseau, de déployer ses propres infrastructures, ces obligations d'accès sont justifiées et proportionnées, notamment au regard de l'objectif fixé à l'article L. 32-1-II du CPCE visant à définir des « conditions d'accès aux réseaux ouverts au public et d'interconnexion de ces réseaux qui garantissent la possibilité pour tous les utilisateurs de communiquer librement et l'égalité des conditions de la concurrence ».
Enfin, d'une manière générale, tout refus de l'opérateur exerçant une influence significative de fournir ces prestations doit être dûment motivé.
5.1.2. Précision sur les demandes d'accès et d'interconnexion des agrégateurs de SMS
L'obligation de faire droit à toute demande raisonnable d'accès d'un exploitant de réseau ouvert au public non mobile, en particulier d'un agrégateur de SMS, a fait l'objet de contributions opposées de la part des acteurs du secteur dans la consultation publique menée par l'Autorité à l'automne 2009.
Si Orange France et Bouygues Telecom estiment qu'une offre d'interconnexion SMS offrant davantage de latitude technique aux agrégateurs SMS serait inutile et contre-productive, les agrégateurs de SMS approuvent au contraire cette obligation.
Selon Orange France et Bouygues Telecom, leurs offres actuelles respectives répondent aux attentes techniques de tous les agrégateurs de SMS, qui n'ont pas exprimé ces dernières années le besoin d'évolutions fonctionnelles majeures. Orange France estime que la valeur ajoutée des agrégateurs SMS réside uniquement dans le conseil marketing et l'intégration de services et ne justifie pas la construction d'infrastructures techniques alternatives. Selon l'opérateur, le marché des SMS Push fonctionne de manière concurrentielle, la principale menace sur son développement étant liée à la gestion du spam et non à des considérations techniques. De son côté, Bouygues Telecom fait valoir que la mise en œuvre opérationnelle et la qualité de service sont jugés satisfaisants sur son offre dédiée aux agrégateurs, la gateway B2B. L'opérateur considère de plus qu'une offre d'interconnexion via un raccordement en protocole SS7 ne serait pas adaptée aux besoins des agrégateurs, contrairement à son offre actuelle (fonctionnalités STOP et CONTACT (33) inopérables par SS7, absence de possibilité d'enrichissement du service via la connaissance des fonctionnalités du terminal, homogénéisation à terme des architectures sur un principe de connexion serveur à serveur rendant obsolète le SS7, etc.). Enfin, Bouygues Telecom fait valoir que la lourdeur des investissements à consentir par les agrégateurs de SMS pour bénéficier d'une offre d'interconnexion en SS7 aboutirait à une concentration du marché de l'agrégation.
(33) Un éditeur de services est tenu de communiquer à un client mobile qui en fait la demande par SMS via le mot « CONTACT » des informations le concernant (raison sociale, numéro de RCS, coordonnées du service d'assistance). De la même manière, un éditeur de services est tenu dans les 24 heures tout envoi de SMS à un abonné mobile si ce dernier a exercé un droit d'opposition en envoyant par SMS le mot « STOP ».
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