La société Bouygues Telecom rappelle, d'une part, que le tarif de terminaison d'appel SMS est soumis aux principes du CPCE, d'autre part, que la charge d'interconnexion, fixée à 5,3 centimes d'euro HT en 1999, ne répond plus aux principes d'objectivité et de transparence de l'article D. 99-10 du CPCE.
Elle a souhaité bénéficier d'un tarif de terminaison d'appel SMS supérieur à celui de ses concurrents pour les motifs suivants :
- la différence de coûts et de revenus associés à chacun des réseaux mobiles liés notamment à l'arrivée tardive de Bouygues Telecom sur le marché ;
- la taille des parcs de clients respectifs et la part de marché des trois opérateurs.
Bouygues Telecom affirme que sa demande est équitable au sens des dispositions de l'article L. 36-8 du CPCE, car :
- la baisse de la terminaison d'appel SMS est nécessaire au regard de la forte croissance qu'a connue la consommation de SMS ;
- la diminution du prix s'impose, compte tenu de la nécessité de veiller au respect du principe d'interopérabilité ;
- la baisse repose sur des conditions justifiées et équitables.
A. - Sur le niveau de la terminaison SMS
Bouygues Telecom rappelle que l'augmentation de la consommation de SMS porte atteinte à l'interopérabilité en créant un obstacle artificiel à l'échange de SMS entre les réseaux. Dans ce contexte, la baisse de la terminaison d'appel SMS s'impose, afin que les prix au détail puissent aussi être revus à la baisse.
Le nombre de SMS est en forte croissance :
Bouygues Telecom indique qu'un tarif d'interconnexion SMS peu élevé favorise le développement d'offres de détails à des tarifs attractifs et une croissance forte de l'usage du service SMS. A titre d'exemple, c'est par ce mécanisme que sont apparues au Danemark des offres illimitées qui ont généré une augmentation sensible de l'usage de SMS.
Bouygues Telecom n'a pas profité de la croissance de façon équilibrée :
Bouygues Telecom considère qu'avec une part de marché de près de [...] le volume de SMS échangé sur le réseau d'Orange France n'est pas comparable avec celui échangé sur son réseau. Par ailleurs, l'opérateur note que la majorité des SMS émis provient des réseaux d'Orange France et de SFR.
[...]
B. - Les conditions tarifaires demandées
par Bouygues Telecom sont justifiées et équitables
Bouygues Telecom considère que les tarifs de terminaison d'appel SMS doivent répondre aux principes posés par l'article D. 99-10 du CPCE et que le respect des principes d'objectivité et de transparence impose à chaque opérateur de pratiquer des tarifs raisonnables. Au demeurant, il apparaît justifié que les tarifs de gros pratiqués suivent l'évolution des coûts réellement supportés par chacun des opérateurs.
Or, Bouygues Telecom constate que les tarifs de terminaison d'appel SMS fixés en 1999 n'ont pas évolué et ne répondent plus aux principes fixés par les dispositions de l'article D. 99-10 du CPCE.
La baisse demandée par Bouygues Telecom est raisonnable :
A l'appui de sa demande, l'opérateur peut invoquer les arguments suivants :
- une charge d'interconnexion SMS de 5,3 centimes d'euro HT n'offre pas de marge de manoeuvre pour une diminution sensible des offres de détail ;
- une baisse de 50 % de la terminaison d'appel SMS en 2005 doit être appréciée dans le temps, au regard de l'absence de baisse depuis 1999 ;
- un tarif de 2,5 centimes d'euro HT reste supérieur aux coûts d'Orange France ;
- la demande de Bouygues Telecom n'a pas d'impact sur le développement des autres services de données.
Selon l'entreprise, cette demande est justifiée par la structure du marché de la téléphonie mobile. Le maintien d'un tarif de terminaison SMS élevé pénaliserait le développement du secteur avec des conséquences plus graves encore pour Bouygues Telecom. A l'inverse, une baisse significative du tarif de terminaison SMS n'aurait pas d'impact financier pour Orange France.
Une demande conforme à la structure du marché :
Il est précisé que les opérateurs européens troisième entrant subissent un handicap lié à leur arrivée tardive qui, bien que compensé parfois par des mesures réglementaires adaptées, se traduit par des marchés structurellement déséquilibrés.
[...]
Un tarif de terminaison SMS élevé pénalise le développement du marché :
Pour l'opérateur, le poids de la terminaison d'appel SMS dans la construction d'une offre de détail est central notamment pour les offres les plus attractives dont le tarif est d'environ 7 centimes d'euro TTC par SMS.
Bouygues Telecom indique en ce sens qu'un phénomène identique a pu être constaté en matière de terminaison d'appel vocal et a justifié l'intervention du régulateur qui a imposé aux opérateurs puissants, depuis 1999, une baisse tarifaire dans le cadre de plusieurs price cap successifs. En outre, Bouygues Telecom considère que la demande de détermination d'un prix de terminaison à 2,5 centimes d'euro en 2005 correspond à la tendance européenne.
La société indique que le benchmark sur les prix de détail des SMS communiqué par Orange France ne permet pas d'étayer une analyse objective car Orange France ne prend en compte qu'un nombre réduit de pays européens. Bouygues Telecom précise qu'Orange France occulte certains pays du nord et de l'est de l'Europe qui pratiquent des tarifs de détails plus faibles que les tarifs observés en France.
Bouygues Telecom souligne qu'une étude comparée des tarifs de terminaison d'appel SMS et des offres de détail permet de constater qu'une charge d'interconnexion peu élevée favorise la baisse des tarifs de détail et par conséquent le développement des usages sur le marché de détail.
Il est encore signalé qu'en France les niveaux des tarifs de détails observés pour des clients post-payés situent le marché national en dessous de la courbe de tendance, ce qui démontre qu'une baisse des tarifs de terminaison d'appel SMS est nécessaire pour permettre une baisse des tarifs de détails.
Un tarif actuel défavorable à Bouygues Telecom :
La partie demanderesse estime qu'avec la baisse du prix de détail des SMS et le lancement d'offres on net par ses concurrents sur la période 2003-2004, elle a perdu une part de son pouvoir d'attraction auprès des usagers des SMS au profit d'Orange France et de SFR, ce qui leur a permis d'augmenter leur chiffre d'affaires à son détriment.
Une demande proportionnée au regard des coûts :
Bouygues Telecom signale que sa demande est proportionnée au regard des coûts encourus par les opérateurs.
La méthode de modélisation retenue s'appuie sur un modèle de type CMILT bottom-up sur la base des coûts courants exposés pour la construction d'un réseau GSM permettant de fournir le service SMS et le service d'acheminement de la voix.
Bouygues Telecom indique que les résultats de cette modélisation font apparaître, pour Orange France, un coût moyen de terminaison d'appel SMS sur la période 1999-2003 inférieur à [...] et inférieur à [...] pour la période 2004-2008, alors que, dans le même temps, le coût moyen de terminaison pour Bouygues Telecom sur la période 1999-2003 était de [...].
Ces résultats démontrent que si le tarif d'interopérabilité appliqué sur la première période était cohérent avec les coûts supportés par les opérateurs pour la fourniture de service il demeure excessif au regard des coûts qui seront encourus sur la période 2004-2008 et justifient donc la baisse demandée par Bouygues Telecom et la fixation d'un tarif de 2,5 centimes d'euro.
Par ailleurs, Bouygues Telecom a estimé le coût de terminaison d'appel SMS sur la base de ses coûts historiques pour 2003 tels qu'ils ont été élaborés pour le reporting à l'Autorité des comptes réglementaires sur le segment de la voix.
Bouygues Telecom indique que ses coûts ont été alloués sur les services voix et SMS et que l'allocation des coûts au SMS est basée :
- pour les coûts de réseau sur la base de l'usage ;
- pour les coûts communs en les répartissant entre les services voix et SMS au prorata des coûts réseau, ces coûts allouables au SMS sont ensuite répartis sur les différents types de SMS (entrant, sortant, on net) au pro rata des volumétries correspondantes.
Bouygues Telecom souligne que cette méthode a permis de calculer un coût de terminaison d'appel SMS pour l'année 2003 de l'ordre de [...].
Une demande sans incidence sur les résultats financiers d'Orange France :
L'opérateur estime qu'un tarif de terminaison d'appel SMS de 2,5 centimes d'euro reste supérieur aux coûts supportés par Orange France. Bouygues Telecom considère ainsi que si l'Autorité fait droit à sa demande et que la baisse du prix de gros est répercutée en intégralité sur les prix de détail, le manque à gagner pour Orange France ne devrait pas représenter plus de [...], ce qui est insignifiant au regard du chiffre d'affaires d'Orange France.
L'absence d'effet sur le développement des nouveaux services :
La société Bouygues Telecom souligne que les conséquences sur les investissements d'une baisse du prix du service en partie substituable ne sont pas justifiées et sont contredites par les investissements consentis par Orange France et SFR pour le déploiement du réseau UMTS effectué au moment même où le prix des communications GSM baissait.
L'opérateur considère que la rentabilité des nouveaux services s'étudie à long terme selon les besoins des consommateurs et que l'évolution du prix du service de SMS est sans incidence sur le développement de ces services.
La demande d'asymétrie tarifaire de Bouygues Telecom est fondée :
Bouygues Telecom indique que si une asymétrie tarifaire est justifiée entre deux opérateurs de réseaux de téléphonie fixe, la justification est encore plus forte entre deux opérateurs de téléphonie mobile.
Dans cette optique, il est précisé qu'il y a une différence entre réseaux fixes et mobiles car les opérateurs de réseaux fixes peuvent déployer leurs infrastructures dans des zones rentables, alors que les opérateurs mobiles doivent couvrir une part croissante de la population, y compris dans les zones non rentables.
Bouygues Telecom précise que l'investissement en infrastructures des opérateurs mobiles se situe à des niveaux comparables, alors que, pour les acteurs de la téléphonie fixe, les coûts de déploiement pèsent essentiellement sur France Télécom.
Bouygues Telecom indique qu'avec 7,6 millions de clients elle est exposée aux mêmes coûts qu'Orange France et SFR et que cette situation est liée à l'attribution tardive de la troisième licence GSM près de quatre ans après les deux autres.
Bouygues Telecom souligne que l'asymétrie qui lui a été accordée par l'Autorité sur sa terminaison d'appel vocal montre qu'elle n'est pas en mesure d'atteindre des niveaux de coûts de réseau comparables à ceux d'Orange France et de SFR. Par voie de conséquence, cette approche doit également être retenue en ce qui concerne la terminaison d'appel SMS.
[...]
Vu les réponses des parties au questionnaire des rapporteurs enregistrées le 23 septembre 2005 ;
Vu les réponses des parties au second questionnaire des rapporteurs enregistrées le 29 septembre 2005 ;
Vu les secondes observations en défense présentées par la société Orange France enregistrées le 3 octobre 2005 ;
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