JORF n°0180 du 5 août 2023

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Décision de la Commission de Régulation de l'Énergie (CRE) du 29 juin 2023

Résumé La CRE a décidé des notifications de participations et des changements dans des entreprises d'énergie. L'analyse porte sur les participations du groupe GIC et de Pacific Mezz Luxembourg dans EDP, EDPR, Teréga, et Teréga Holding, ainsi que les transferts de participations entre ces entités.

Participaient à la séance : Emmanuelle WARGON, présidente, Anthony CELLIER, Ivan FAUCHEUX et Valérie PLAGNOL, commissaires.

  1. Contexte et compétence de la CRE

La procédure de certification vise à s'assurer du respect par les gestionnaires de réseaux de transport (ci-après « GRT ») des règles d'organisation et d'indépendance vis-à-vis des sociétés exerçant une activité de production ou de fourniture telles que définies par le code de l'énergie et la directive gaz 2009/73/CE du 13 juillet 2009 (1) (ci-après « la directive »). La séparation effective des activités de gestion des réseaux de transport et des activités de production ou de fourniture a pour principale finalité d'éviter tout risque de discrimination entre utilisateurs de ces réseaux.
Par délibération du 26 janvier 2012 (2), la Commission de régulation de l'énergie (ci-après « CRE ») a certifié la société Teréga SA (ci-après « Teréga »), anciennement dénommée TIGF (3), contrôlée, à cette époque, indirectement à 100 % par Total SA, en tant que gestionnaire de réseau de transport agissant en toute indépendance vis-à-vis des autres sociétés de l'entreprise verticalement intégrée à laquelle elle appartient (ci-après « EVI »), et ce, conformément au modèle « gestionnaire de réseau de transport indépendant » (modèle dit « Independent Transmission Operator » ou « ITO »).
A la suite du transfert des titres de Teréga, jusqu'alors détenue par Total, au profit de Teréga SAS (ci-après « Teréga SAS »), anciennement dénommée TIGF Investissements SAS, la CRE, par délibération du 3 juillet 2014 (4), a certifié Teréga en modèle de séparation patrimoniale (modèle dit « Ownership unbundling » ou « OU »).
Teréga SAS était alors détenue à 100 % par Teréga Holding SAS (ci-après « Teréga Holding »), anciennement TIGF Holding, elle-même détenue par Snam S.p.A. à hauteur de 45 %, à hauteur de 35 % par Pacific Mezz Luxembourg S.a.r.l. (ci-après « Pacific Mezz Luxembourg ») (5), détenue par le groupe GIC, et par la société C31 SAS à hauteur de 20 %.
Aux termes de cette délibération du 3 juillet 2014, il était précisé qu'« afin de permettre à la CRE de suivre l'évolution du portefeuille de participations du groupe GIC, toute prise de participation de ce dernier dans une entreprise de production ou fourniture de gaz ou d'électricité en Europe et dans les pays qui possèdent une interconnexion électrique ou gazière avec l'Europe et qui s'élève à plus de 5 %, [devait] être notifiée, sans délai, à la CRE. La CRE se [réservait] en outre le droit de demander à tout moment à TIGF de lui transmettre le détail des participations du groupe GIC dans des entreprises de production ou fourniture de gaz ou d'électricité, en Europe et hors Europe. »
Par délibération du 4 février 2016 (6) portant décision sur le maintien de la certification de Teréga, la CRE a conclu que l'entrée de la société Prévoyance Dialogue du Crédit Agricole SA (7) (ci-après « Predica ») au capital de Teréga Holding à hauteur de 10 %, d'une part, n'était pas susceptible de porter atteinte aux obligations d'indépendance mentionnées à l'article L. 111-3 du code de l'énergie, ni aux dispositions de l'article 9 de la directive et, d'autre part, n'affectait pas le respect par Teréga des obligations découlant des articles L. 111-8 et suivants du code de l'énergie et de l'article 9 de la directive.
En effet, la CRE avait constaté que Predica n'exerçait ni contrôle sur Teréga (anciennement TIGF), ni sur des entreprises ayant des activités de production ou de fourniture d'énergie. La CRE avait cependant constaté que Predica et la société Crédit Agricole SA détenaient chacune un quelconque pouvoir sur Teréga.
L'analyse des intérêts détenus par Predica et par les sociétés du groupe Crédit Agricole dans des activités de production ou de fourniture avait montré que ceux-ci, soit ne conféraient pas le contrôle sur ces sociétés, soit ne pouvaient pas être favorisés par les décisions prises par Teréga.
Aux termes de cette délibération du 4 février 2016, il était précisé qu'« afin d'assurer le suivi du portefeuille de participations des sociétés du groupe Crédit Agricole, toute prise de participation de ces sociétés dans une entreprise de production ou fourniture de gaz ou d'électricité en Europe et dans les pays qui possèdent une interconnexion électrique ou gazière avec l'Europe et qui s'élève à plus de 5 %, [devait] être notifiée, sans délai, à la CRE. La CRE se [réservait] en outre le droit de demander à tout moment à TIGF de lui transmettre le détail des participations des sociétés du groupe Crédit Agricole dans des entreprises de production ou fourniture de gaz ou d'électricité, en Europe et hors Europe. »
Enfin, dans sa délibération du 18 novembre 2021 (8), la CRE avait maintenu la certification de Teréga à la suite de la prise de participation du groupe GIC à hauteur de 9,99 % dans le capital de China Three Gorges International Ltd (ci-après « CTGI »), via sa filiale Ceningan Investment Pte Ltd (ci-après « Ceningan »), société sœur de Pacific Mezz Luxembourg, CTGI détenant 19,03 % d'Energias de Portugal (ci-après « EDP »). Le groupe GIC disposant d'un quelconque pouvoir, au sens des dispositions de l'article L. 111-8-1 du code de l'énergie, dans CTGI, CTGI détenant seulement une participation non contrôlante à hauteur de 19,03 % dans la société EDP, la CRE avait considéré que le groupe GIC ne disposait pas d'un « quelconque pouvoir » dans la société EDP.
La CRE avait estimé qu'il n'existait pas, in concreto, de risque de conflit d'intérêts entre la participation indirecte du groupe GIC dans la société EDP, d'une part, et sa participation contrôlante dans Teréga, d'autre part. Ainsi, la CRE avait considéré que l'opération n'était pas contraire aux dispositions de l'article 9 de la directive et des articles L. 111-8 et suivants du code de l'énergie. Toutefois, la CRE avait demandé à Pacific Mezz Luxembourg de lui notifier toute évolution de la participation du groupe GIC au sein de CTGI et celle de CTGI au sein d'EDP.
Il était ainsi précisé qu'« au titre de son obligation de notification de toute prise de participation de plus de 5 % du groupe GIC dans une entreprise de production ou de fourniture de gaz ou d'électricité en Europe et dans les pays qui possèdent une interconnexion électrique ou gazière avec l'Europe, la CRE demande à Pacific Mezz Luxembourg de lui notifier toute évolution de la participation du groupe GIC au sein de CTGI, d'une part, et de celle de CTGI au sein d'EDP, d'autre part ».
A ce jour, Teréga est détenue par Teréga SAS à hauteur de 99,99 %, elle-même entièrement détenue par Teréga Holding, laquelle est détenue à hauteur de 40,5 % par SNAM SpA, de 31,5 % par Pacific Mezz Luxembourg, de 18 % par Ouestgaz SAS, de 9 % par Predica SA et de 1 % par Crédit Agricole Assurances Retraite.
Par courrier du 27 octobre 2022 reçu le 3 novembre 2022, Pacific Mezz Luxembourg a notifié à la CRE une évolution à compter du 1er février 2022 de la participation de China Three Gorges Europe SA (ci-après « CTGE »), détenue par CTGI, au sein d'EDP, de 19,03 % à 20,22 %. EDP détient une participation contrôlante dans EDP Renovaveis SA (ci-après « EDPR »), laquelle développe notamment des projets éoliens en France, et exerce des activités de production, de fourniture et de distribution de gaz et d'électricité en Espagne et au Portugal. A cette occasion, Pacific Mezz Luxembourg a également demandé à la CRE de modifier l'obligation de notification du groupe GIC de toute évolution de sa participation au sein de CTGI et de celle de CTGI au sein d'EDP, résultant de la délibération du 18 novembre 2021 susmentionnée. Par courriel du 21 avril 2023 complété par courriels des 3 mai et 12 juin 2023, le groupe GIC a notifié à la CRE les évolutions récentes des participations des sociétés du groupe GIC, Lisson Grove Investment Pte Ltd (ci-après « Lisson Grove Investment ») et GIC Private Ltd (ci-après « GIC Private Ltd »), dans les sociétés EDP et EDPR (ci-après ensemble « l'Opération GIC/CTGI/CTGE/EDP et EDPR »).
Par courrier du 6 décembre 2022, reçu le 12 décembre 2022, Teréga a informé la CRE que Pacific Mezz Luxembourg envisageait de transférer la totalité des 18 746 924 actions qu'elle détient dans le capital de Teréga Holding, représentant 31,5 % dudit capital, à Raffles Infra Holdings Limited (ci-après « Raffles Infra Holdings ») dont le siège social se trouve à Londres au Royaume-Uni. Cette société à responsabilité limitée de droit anglais est, au même titre que Pacific Mezz Luxembourg, une filiale indirectement détenue à 100 % par GIC (Ventures) Private Limited, [CONFIDENTIEL] (ci-après « l'Opération GIC/Raffles Infra Holdings »).
Teréga a apporté à la demande de la CRE en date du 9 février 2023 des informations complémentaires par courriel en date du 7 mars 2023.
Par courrier du 15 novembre 2022, reçu le 21 novembre 2022, Teréga a informé la CRE que Predica avait transféré 559 431 actions qu'elle détient dans le capital de Teréga Holding, représentant 1 % dudit capital, à Crédit Agricole Assurances Retraite (ci-après « CAAR »). Cette société anonyme a une activité de fonds de retraite professionnelle supplémentaire (ci-après « FRPS »). Elle est, au même titre que Predica, détenue à hauteur de 100 % par la société Crédit Agricole Assurances (ci-après « Crédit Agricole Assurances ») et donc par le groupe Crédit Agricole (ci-après « l'Opération Crédit Agricole/Predica/CAAR »).
Teréga a apporté à la demande de la CRE en date du 9 mars 2023 des informations complémentaires par courriels en date des 14, 23 et 28 mars 2023.

  1. Analyse de la CRE

Dans le cadre du modèle de certification de « séparation patrimoniale », l'article 9 de la directive, telle qu'interprétée par la Commission européenne dans son document de travail sur le modèle de « séparation patrimoniale » (9), transposé à l'article L. 111-8-3 du code de l'énergie, prévoit notamment qu'une même personne ne peut :

- exercer un contrôle direct ou indirect sur une entreprise de production ou de fourniture et un contrôle direct ou indirect ou un quelconque pouvoir sur un gestionnaire de réseau de transport ou sur un réseau de transport ;
- exercer un contrôle direct ou indirect sur un gestionnaire de réseau de transport ou sur un réseau de transport et un contrôle direct ou indirect ou un quelconque pouvoir sur une entreprise de production ou de fourniture.

Il ressort également de ces dispositions qu'une même personne ne peut désigner les membres du conseil de surveillance, du conseil d'administration ou des organes représentant légalement le GRT et exercer un contrôle direct ou indirect ou un quelconque pouvoir sur une entreprise de production ou de fourniture.
Enfin, une même personne ne peut être membre du conseil de surveillance, du conseil d'administration ou des organes représentant légalement une entreprise de production ou de fourniture et du conseil de surveillance, du conseil d'administration ou des organes représentant légalement le GRT.

2.1. L'Opération GIC/CTGI/CTGE/EDP et EDPR

Sur la base des éléments communiqués par le groupe GIC, la CRE a procédé à une analyse des éventuelles conséquences de l'Opération GIC/CTGI/CTGE/EDP et EDPR au regard des obligations mentionnées à l'article 9 de la directive et aux articles L. 111-8 et suivants du code de l'énergie.
Dans sa délibération du 3 juillet 2014 portant décision de certification de Teréga, la CRE avait considéré que Pacific Mezz Luxembourg détenait un contrôle sur Teréga (10). La CRE doit donc s'assurer que Pacific Mezz Luxembourg, et son actionnaire de contrôle (le groupe GIC), n'exercent pas de contrôle ou de quelconque pouvoir sur des entreprises ayant des activités de production ou de fourniture d'énergie. En cas de contrôle direct ou indirect ou de quelconque pouvoir sur ces entreprises, conformément au document de travail de la Commission européenne (11), la CRE doit analyser si ces opérations sont de nature à créer un risque de conflit d'intérêts entre les participations dans des entreprises actives dans la production d'énergie détenues par le groupe GIC et Pacific Mezz Luxembourg et le contrôle de Pacific Mezz Luxembourg sur Teréga.
L'évolution de la participation de CTGI dans la société EDP, passant à compter du 1er février 2022 de 19,03 % à 20,22 % du capital de EDP, n'est pas de nature à remettre en cause l'analyse de la CRE telle qu'issue de sa délibération du 18 novembre 2021 dans la mesure où la participation indirecte du groupe GIC dans EDP, via CTGI et CTGE, évolue de 1,9 % à 2,02 % du capital de EDP et que Ceningan ne dispose d'aucun droit de vote ou siège au sein des organes de gouvernance d'EDP. La CRE considère par conséquent que le groupe GIC, par l'intermédiaire de Ceningan, CTGI et CTGE, ne dispose pas d'un quelconque pouvoir dans la société EDP.
Le 14 mars 2023, EDP a annoncé que CTGE avait souscrit à l'augmentation de capital d'EDP pour un nombre d'actions nouvelles représentant environ 1,09 % du capital social d'EDP. Après la réalisation de l'augmentation de capital d'EDP, la participation de CTGI a été diluée et représente 20,861 % du capital social d'EDP.
Lisson Grove Investment, une société de droit singapourien, société sœur de Ceningan et filiale à hauteur de 100 % de la société GIC Infra Holdings Private Limited, a également souscrit à l'augmentation de capital d'EDP à hauteur de 2,1 % du capital social d'EDP.
[CONFIDENTIEL]
Le 3 mars 2023, EDP a annoncé que sa filiale détenue à 74,98 % EDPR avait réalisé une augmentation de capital. Lisson Grove Investment a conclu un accord d'investissement le 1er mars 2023 en vertu duquel elle s'est engagée à souscrire des actions d'une valeur approximative de 850 millions d'euros représentant 4,283 % du capital social d'EDPR.
[CONFIDENTIEL]
Après la réalisation de l'augmentation de capital d'EDPR, la participation d'EDP dans EDPR a été diluée et représente 71,20 % du capital social d'EDPR.
A l'issue de la réalisation de ces augmentations de capital, le groupe GIC détient une participation :

- dans le capital d'EDP [CONFIDENTIEL] ; et
- dans le capital d'EDPR [CONFIDENTIEL].

Lisson Grove Investment a pour activité principale une activité de « holding » d'investissement. Pacific Mezz Luxembourg déclare qu'à ce jour, Lisson Grove Investment ne détient aucune participation capitalistique ou investissement dans des sociétés en Europe qui produisent ou fournissent du gaz ou qui génèrent ou fournissent de l'électricité, autres qu'EDP et EDPR.
[CONFIDENTIEL]
Aucune entité du groupe GIC, prise individuellement, ne bénéficie de droit de gouvernance ou de droit de veto vis-à-vis d'EDP ou EDPR. Lisson Grove Investment et GIC Private Ltd disposent de droits de vote dans EDP ou EDPR à hauteur de leur participation en capital dans ces sociétés.
Par conséquent, la CRE considère que Lisson Grove Investment et GIC Private Ltd disposent d'un quelconque pouvoir sur les sociétés EDP et EDPR.
Toutefois, compte tenu des faibles participations directes dans EDP et EDPR, la CRE estime que le groupe GIC n'est pas incité à influencer les décisions de Teréga afin de favoriser les intérêts d'EDP ou d'EDPR. Au vu de ces éléments, la CRE estime qu'il n'existe pas, in concreto, de risque de conflit d'intérêts entre la participation directe du groupe GIC dans EDP et EDPR, d'une part, et sa participation contrôlante dans Teréga, d'autre part.
Par conséquent, la CRE considère que ces évolutions ne sont pas contraires aux dispositions de l'article 9 de la directive et des articles L. 111-8 et suivants du code de l'énergie.
A cette occasion, la CRE précise qu'afin de lui permettre de suivre l'évolution du portefeuille de participations du groupe GIC, toute prise de participation du groupe GIC dans une entreprise de production ou fourniture de gaz ou d'électricité en Europe et dans les pays qui possèdent une interconnexion électrique ou gazière avec l'Europe et qui s'élève à plus de 5 %, doit être notifiée, sans délai, à la CRE par le groupe GIC, (i) le groupe GIC renvoie à l'ensemble des sociétés composant le groupe GIC en ce compris (a) GIC (Ventures) Private Limited, (b) GIC Private Limited et (c) leurs filiales respectives ainsi que (d) toutes sociétés dans lesquelles ces dernières détiennent des droits de vote supérieurs à 50 % ou le droit de nommer la majorité des membres des organes d'administration, (ii) le seuil de 5 % doit s'apprécier de manière agrégée au regard de l'ensemble des participations des sociétés composant le groupe GIC tel que défini ci-dessus (étant précisé qu'en cas de détention par une société visée au (d), la participation directe d'une telle société sera incluse dans le seuil de 5 %).
La CRE estime que les modalités de notification telles que proposées par le groupe GIC s'agissant de la participation du groupe GIC au sein de CTGI et de celle de CTGI au sein d'EDP sont pertinentes, soit :

- une notification des évolutions de la participation indirecte du groupe GIC via CTGI excédant le seuil de 25 % du capital d'EDP (étant précisé que, conformément à l'article 14 (3) aux statuts d'EDP, « les voix exprimées par un actionnaire, pour son propre compte ou pour le compte d'un autre actionnaire, qui dépassent 25 % des droits de vote correspondant au capital social, ne sont pas prises en compte ») ;
- deux notifications par an de la participation de CTGE dans EDP sur la base des informations publiées par EDP dans ses rapports annuels et semestriels ;
- une notification de tout franchissement par CTGE des seuils légaux prévus à l'article 16 (1) du code portugais des valeurs mobilières au sein du capital d'EDP.

La CRE rappelle qu'en tout état de cause elle se réserve le droit de demander à tout moment au groupe GIC de lui transmettre le détail de ses participations dans des entreprises de production ou fourniture de gaz ou d'électricité, en Europe et hors d'Europe.

2.2. L'opération GIC/Raffles Infra Holdings

Sur la base des éléments communiqués par Teréga, la CRE a procédé à une analyse des éventuelles conséquences de l'opération GIC/Raffles Infra Holdings au regard des obligations mentionnées à l'article 9 de la directive et aux articles L. 111-8 et suivants du code de l'énergie.

2.2.1. Examen des pouvoirs de la société Raffles Infra Holdings sur Teréga

Le transfert des titres de Teréga Holding, jusqu'alors détenue par Pacific Mezz Luxembourg, au profit de Raffles Infra Holdings représenterait 31,5 % du capital de Teréga Holding et s'accompagnerait du pouvoir de nommer des administrateurs aux conseils d'administration de Teréga SA, Teréga SAS et Teréga Holding ainsi que de droits de veto (12) pour certaines décisions du conseil d'administration de Teréga SAS s'agissant de Teréga.
Dans ces conditions, au vu des éléments communiqués par Teréga, la CRE considère que Raffles Infra Holdings détiendrait un contrôle direct sur Teréga.
Par conséquent, Raffles Infra Holdings et ses actionnaires ne peuvent pas exercer un contrôle ou un quelconque pouvoir sur des entreprises exerçant des activités de production ou de fourniture d'énergie, conformément aux dispositions de l'article 9 de la directive et aux articles L. 111-8 et suivants du code de l'énergie.

2.2.2. Examen des participations de la société Raffles Infra Holdings dans des activités de production ou de fourniture d'électricité ou de gaz

Raffles Infra Holdings n'est pas elle-même active dans la production ou la fourniture de gaz ou d'électricité. Toutefois, Raffles Infra Holdings détient un portefeuille de participations, dont deux appartiennent au secteur de l'énergie : [CONFIDENTIEL].
[CONFIDENTIEL] Selon les déclarations de Teréga, « aucune des deux entités, ni aucune de leurs filiales, n'exercent d'activités de production ou de fourniture en énergie, autres que par leur nature de sociétés d'infrastructures gazières intermédiaires [« midstream »] transportant du gaz ».
[CONFIDENTIEL] (13).
Par conséquent, la CRE considère que Raffles Infra Holdings n'exerce ni contrôle, ni un quelconque pouvoir sur des entreprises de production ou de fourniture d'électricité ou de gaz.

2.2.3. Examen des participations du groupe GIC dans des activités de production de fourniture d'électricité ou de gaz

Raffles Infra Holdings est une société du groupe GIC et ainsi une société sœur de Pacific Mezz Luxembourg. Raffles Infra Holdings est une société de droit anglais détenue en totalité par GIC Infra Holdings Pte Ltd, une société de droit singapourien, elle-même détenue par GIC (Ventures) Pte Ltd, société également de droit singapourien qui est [CONFIDENTIEL].
Eu égard à l'obligation de notification pesant sur le groupe GIC et aux développements qui précèdent (cf. 2.1), la CRE constate que sa situation demeure conforme aux dispositions de l'article 9 de la directive et des dispositions des articles L. 111-8 et suivants du code de l'énergie.

2.3. L'opération Crédit Agricole/Predica/CAAR

Sur la base des éléments communiqués par Teréga, la CRE a procédé à une analyse des éventuelles conséquences de l'Opération Crédit Agricole/Predica/CAAR au regard des obligations mentionnées à l'article 9 de la directive et aux articles L. 111-8 et suivants du code de l'énergie.

2.3.1. Examen des pouvoirs de la société CAAR sur Teréga

En application des stipulations de l'article 15 des statuts de Teréga SAS (14) et [CONFIDENTIEL] (15) (16), les pouvoirs de CAAR sur Teréga sont attachés à ceux de Predica. Par conséquent, CAAR dispose avec Predica d'un quelconque pouvoir sur Teréga dès lors que CAAR et Predica peuvent désigner ensemble un administrateur de Teréga Holding en qualité d'actionnaires disposant à elles deux de 10 % du capital social de celle-ci [CONFIDENTIEL] (17).
Par conséquent, CAAR et ses actionnaires ne peuvent pas exercer de contrôle sur des entreprises exerçant des activités de production ou de fourniture d'énergie, conformément aux dispositions de l'article 9 de la directive et aux articles L. 111-8 et suivants du code de l'énergie.

2.3.2. Examen des participations de la société CAAR dans des activités de production ou de fourniture d'électricité ou de gaz

CAAR n'est pas elle-même active dans la production ou la fourniture de gaz ou d'électricité. Toutefois, elle détient un portefeuille de participations, dont trois appartiennent au secteur de l'énergie : Pisto Group Holding, ayant une activité dans le transport et le stockage de produits pétroliers en Espagne, FluxDune, une société holding pour la gestion du terminal de Dunkerque de regazéification de GNL et Movhera - Hidroelétricas do Norte, exploitant d'un portefeuille de centrales hydroélectriques au Portugal.
CAAR et Predica détiennent une participation de [CONFIDENTIEL] (respectivement [CONFIDENTIEL] et [CONFIDENTIEL]) dans le capital de Movhera - Hidroelétricas do Norte (ci-après « Movhera »).
La CRE avait constaté dans sa délibération du 28 juillet 2021 (18) que, malgré l'existence d'un contrôle conjoint des sociétés Mirova, Predica et ENGIE sur Movhera, celui-ci ne présentait pas de risque de conflit d'intérêts. En effet, Movhera produit de l'électricité à partir de sources non-gazières, n'ayant donc pas d'interface commune avec le réseau gazier de Teréga. La CRE avait alors considéré que les décisions prises par la société Teréga ne pouvaient par conséquent avoir aucune conséquence sur la gestion des actifs de production de Movhera. Cette opération n'était donc pas de nature à remettre en cause la certification de Teréga, malgré le quelconque pouvoir détenu par Predica sur Teréga.
La CRE considère que la participation de CAAR dans Movhera n'est pas de nature à remettre en cause son analyse telle qu'issue de sa délibération du 28 juillet 2021.
Par conséquent, la CRE considère que la participation de CAAR dans le capital de Teréga demeure conforme aux dispositions de l'article 9 de la directive et des articles L. 111-8 et suivants du code de l'énergie.

2.3.3. Examen des participations du groupe Crédit Agricole dans des activités de production de fourniture d'électricité ou de gaz

CAAR est une société du groupe Crédit Agricole et ainsi une société sœur de Predica. CAAR est détenue à 99,99 % par la société Crédit Agricole Assurances SA, elle-même détenue par la société cotée Crédit Agricole SA, qui est la société holding du groupe de bancassurance Crédit Agricole.
A l'occasion de l'instruction de l'Opération Crédit Agricole/Predica/CAAR, certains éléments ont appelé l'attention de la CRE. La CRE entend solliciter des informations complémentaires relatives aux participations contrôlantes du groupe Crédit Agricole dans des entreprises de production ou de fourniture d'électricité ou de gaz actives en Europe afin de les analyser au regard des dispositions de l'article 9 de la directive et des articles L. 111-8 et suivants du code de l'énergie.
Eu égard aux informations dont elle dispose à ce jour, la CRE constate que la situation du groupe Crédit Agricole est conforme aux dispositions de l'article 9 de la directive et des articles L. 111-8 et suivants du code de l'énergie.
La CRE précise qu'afin d'assurer le suivi du portefeuille de participations des sociétés du groupe Crédit Agricole, toute prise de participation de ces sociétés dans une entreprise de production ou fourniture de gaz ou d'électricité en Europe et dans les pays qui possèdent une interconnexion électrique ou gazière avec l'Europe et qui s'élève à plus de 5 %, doit être notifiée, sans délai, à la CRE par le groupe Crédit Agricole, (i) le groupe Crédit Agricole renvoie à l'ensemble des sociétés composant le groupe Crédit Agricole en ce compris (a) la société Crédit Agricole Assurances, (b) la société Crédit Agricole SA et (c) leurs filiales respectives ainsi que (d) toutes sociétés dans lesquelles ces dernières détiennent des droits de vote supérieurs à 50 % ou le droit de nommer la majorité des membres des organes d'administration, (ii) le seuil de 5 % doit s'apprécier de manière agrégée au regard de l'ensemble des participations des sociétés composant le groupe Crédit Agricole tel que défini ci-dessus (étant précisé qu'en cas de détention par une société visée au (d), la participation directe d'une telle société sera incluse dans le seuil de 5 %).
La CRE se réserve en tout état de cause le droit de demander à tout moment au groupe Crédit Agricole de lui transmettre le détail de ses participations dans des entreprises de production ou fourniture de gaz ou d'électricité, en Europe et hors Europe.

Décision de la CRE

Par courrier du 27 octobre 2022 reçu le 3 novembre 2022, Pacific Mezz Luxembourg S.a.r.l (ci-après « Pacific Mezz Luxembourg ») a notifié à la CRE une évolution à compter du 1er février 2022 de la participation de China Three Gorges Europe SA (ci-après « CTGE »), détenue par China Three Gorges International (ci-après « CTGI »), au sein d'EDP, de 19,03 % à 20,22 %. EDP détient une participation contrôlante dans EDP Renovaveis SA (ci-après « EDPR »), laquelle développe notamment des projets éoliens en France, et exerce des activités de production, fourniture et de distribution de gaz et d'électricité en Espagne et au Portugal. A cette occasion, Pacific Mezz Luxembourg a également demandé à la CRE de modifier l'obligation de notification du groupe GIC de toute évolution de sa participation au sein de CTGI et de celle de CTGI au sein d'EDP résultant de la délibération du 18 novembre 2021 portant décision sur le maintien de la certification de la société Teréga à la suite d'une prise de participation du groupe GIC dans une entreprise active dans la production d'énergie. Par courriel du 21 avril 2023 complété par courriels des 3 mai et 12 juin 2023, le groupe GIC a notifié à la CRE les évolutions récentes des participations des sociétés du groupe GIC, Lisson Grove Investment Pte Ltd et GIC Private Ltd, dans les sociétés EDP et EDPR.
Par courrier du 6 décembre 2022 reçu le 12 décembre 2022, Teréga SA a informé la CRE que Pacific Mezz Luxembourg envisageait de transférer la totalité des 18 746 924 actions qu'elle détient dans le capital de Teréga Holding SAS, représentant 31,5% dudit capital, à Raffles Infra Holdings Limited (ci-après « Raffles Infra Holdings ») dont le siège social se trouve à Londres au Royaume-Uni. Cette société à responsabilité limitée de droit anglais est, au même titre que Pacific Mezz Luxembourg, une filiale indirectement détenue à 100 % par GIC (Ventures) Private Limited, [CONFIDENTIEL].
Par courrier du 15 novembre 2022 reçu le 21 novembre 2022, Teréga SA a informé la CRE que Predica SA avait transféré 559 431 actions qu'elle détient dans le capital de Teréga Holding SAS, représentant 1 % dudit capital, à Crédit Agricole Assurances Retraite (ci-après « CAAR »). Cette société anonyme a une activité de fonds de retraite professionnelle supplémentaire (ci-après « FRPS »). Elle est, au même titre que Predica, détenue à hauteur de 100 % par la société Crédit Agricole Assurances (ci-après « Crédit Agricole Assurances ») et donc par le groupe Crédit Agricole.
Après analyse des éléments fournis par Teréga, Pacific Mezz Luxembourg, Lisson Grove Investment Pte Ltd, GIC Private Limited, Predica SA et CAAR, la CRE considère que les opérations notifiées par courriers des 27 octobre, 15 novembre, 6 décembre 2022 et 21 avril 2023, relatives à l'évolution de la participation du groupe GIC dans les sociétés EDP et EDPR, au transfert de titres de Pacific Mezz Luxembourg à Raffles Infra Holdings et à l'entrée de CAAR au capital de Teréga Holding SAS, ne sont pas contraires aux dispositions de l'article 9 de la directive et des articles L. 111-18 et suivants du code de l'énergie et n'affectent pas le respect par Teréga de ses obligations au titre de ces mêmes articles.
La CRE précise qu'afin de lui permettre de suivre l'évolution du portefeuille de participations du groupe GIC, toute prise de participation du groupe GIC dans une entreprise de production ou fourniture de gaz ou d'électricité en Europe et dans les pays qui possèdent une interconnexion électrique ou gazière avec l'Europe et qui s'élève à plus de 5 %, doit être notifiée, sans délai, à la CRE par le groupe GIC, (i) le groupe GIC renvoie à l'ensemble des sociétés composant le groupe GIC en ce compris (a) GIC (Ventures) Private Limited, (b) GIC Private Limited et (c) leurs filiales respectives ainsi que (d) toutes sociétés dans lesquelles ces dernières détiennent des droits de vote supérieurs à 50 % ou le droit de nommer la majorité des membres des organes d'administration, (ii) le seuil de 5 % doit s'apprécier de manière agrégée au regard de l'ensemble des participations des sociétés composant le groupe GIC tel que défini ci-dessus (étant précisé qu'en cas de détention par une société visée au (d), la participation directe d'une telle société sera incluse dans le seuil de 5 %).
La CRE estime que les modalités de notification telles que proposées par le groupe GIC s'agissant de la participation du groupe GIC au sein de CTGI et de celle de CTGI au sein d'EDP sont pertinentes, soit :

- une notification des évolutions de la participation indirecte du groupe GIC via CTGI excédant le seuil de 25 % du capital d'EDP (étant précisé que, conformément à l'article 14 (3) aux statuts d'EDP, « les voix exprimées par un actionnaire, pour son propre compte ou pour le compte d'un autre actionnaire, qui dépassent 25 % des droits de vote correspondant au capital social, ne sont pas prises en compte ») ;
- deux notifications par an de la participation de CTGE dans EDP sur la base des informations publiées par EDP dans ses rapports annuels et semestriels ;
- une notification de tout franchissement par CTGE des seuils légaux prévus à l'article 16(1) du code portugais des valeurs mobilières au sein du capital d'EDP.

La CRE rappelle qu'en tout état de cause elle se réserve le droit de demander à tout moment au groupe GIC de lui transmettre le détail de ses participations dans des entreprises de production ou fourniture de gaz ou d'électricité, en Europe et hors d'Europe.
La CRE précise enfin, qu'afin d'assurer le suivi du portefeuille de participations des sociétés du groupe Crédit Agricole, toute prise de participation de ces sociétés dans une entreprise de production ou fourniture de gaz ou d'électricité en Europe et dans les pays qui possèdent une interconnexion électrique ou gazière avec l'Europe et qui s'élève à plus de 5 %, doit être notifiée, sans délai, à la CRE par le groupe Crédit Agricole, (i) le groupe Crédit Agricole renvoie à l'ensemble des sociétés composant le groupe Crédit Agricole en ce compris (a) la société Crédit Agricole Assurances, (b) la société Crédit Agricole SA et (c) leurs filiales respectives ainsi que (d) toutes sociétés dans lesquelles ces dernières détiennent des droits de vote supérieurs à 50 % ou le droit de nommer la majorité des membres des organes d'administration, (ii) le seuil de 5 % doit s'apprécier de manière agrégée au regard de l'ensemble des participations des sociétés composant le groupe Crédit Agricole tel que défini ci-dessus (étant précisé qu'en cas de détention par une société visée au (d), la participation directe d'une telle société sera incluse dans le seuil de 5 %).
La CRE se réserve en outre le droit de demander à tout moment au groupe Crédit Agricole de lui transmettre le détail de ses participations dans des entreprises de production ou fourniture de gaz ou d'électricité, en Europe et hors Europe.
La CRE entend d'ores et déjà solliciter des informations complémentaires relatives aux participations contrôlantes du groupe Crédit Agricole dans des entreprises de production ou de fourniture d'électricité et de gaz actives en Europe afin de les analyser au regard des dispositions de l'article 9 de la directive et des articles L. 111-8 et suivants du code de l'énergie.
La présente délibération complète la délibération de la CRE du 3 juillet 2014 portant décision de certification de la société Teréga SA, dont les conditions ne sont pas modifiées.
La présente délibération sera publiée au Journal officiel de la République française et sur le site Internet de la CRE. Elle sera notifiée à Teréga SA, à Pacific Mezz Luxembourg, à la société GIC Infra Holdings Private Limited, à Predica et à CAAR.
La délibération sera transmise à la ministre de la transition énergétique ainsi qu'au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.


Historique des versions

Version 1

Participaient à la séance : Emmanuelle WARGON, présidente, Anthony CELLIER, Ivan FAUCHEUX et Valérie PLAGNOL, commissaires.

1. Contexte et compétence de la CRE

La procédure de certification vise à s'assurer du respect par les gestionnaires de réseaux de transport (ci-après « GRT ») des règles d'organisation et d'indépendance vis-à-vis des sociétés exerçant une activité de production ou de fourniture telles que définies par le code de l'énergie et la directive gaz 2009/73/CE du 13 juillet 2009 (1) (ci-après « la directive »). La séparation effective des activités de gestion des réseaux de transport et des activités de production ou de fourniture a pour principale finalité d'éviter tout risque de discrimination entre utilisateurs de ces réseaux.

Par délibération du 26 janvier 2012 (2), la Commission de régulation de l'énergie (ci-après « CRE ») a certifié la société Teréga SA (ci-après « Teréga »), anciennement dénommée TIGF (3), contrôlée, à cette époque, indirectement à 100 % par Total SA, en tant que gestionnaire de réseau de transport agissant en toute indépendance vis-à-vis des autres sociétés de l'entreprise verticalement intégrée à laquelle elle appartient (ci-après « EVI »), et ce, conformément au modèle « gestionnaire de réseau de transport indépendant » (modèle dit « Independent Transmission Operator » ou « ITO »).

A la suite du transfert des titres de Teréga, jusqu'alors détenue par Total, au profit de Teréga SAS (ci-après « Teréga SAS »), anciennement dénommée TIGF Investissements SAS, la CRE, par délibération du 3 juillet 2014 (4), a certifié Teréga en modèle de séparation patrimoniale (modèle dit « Ownership unbundling » ou « OU »).

Teréga SAS était alors détenue à 100 % par Teréga Holding SAS (ci-après « Teréga Holding »), anciennement TIGF Holding, elle-même détenue par Snam S.p.A. à hauteur de 45 %, à hauteur de 35 % par Pacific Mezz Luxembourg S.a.r.l. (ci-après « Pacific Mezz Luxembourg ») (5), détenue par le groupe GIC, et par la société C31 SAS à hauteur de 20 %.

Aux termes de cette délibération du 3 juillet 2014, il était précisé qu'« afin de permettre à la CRE de suivre l'évolution du portefeuille de participations du groupe GIC, toute prise de participation de ce dernier dans une entreprise de production ou fourniture de gaz ou d'électricité en Europe et dans les pays qui possèdent une interconnexion électrique ou gazière avec l'Europe et qui s'élève à plus de 5 %, [devait] être notifiée, sans délai, à la CRE. La CRE se [réservait] en outre le droit de demander à tout moment à TIGF de lui transmettre le détail des participations du groupe GIC dans des entreprises de production ou fourniture de gaz ou d'électricité, en Europe et hors Europe. »

Par délibération du 4 février 2016 (6) portant décision sur le maintien de la certification de Teréga, la CRE a conclu que l'entrée de la société Prévoyance Dialogue du Crédit Agricole SA (7) (ci-après « Predica ») au capital de Teréga Holding à hauteur de 10 %, d'une part, n'était pas susceptible de porter atteinte aux obligations d'indépendance mentionnées à l'article L. 111-3 du code de l'énergie, ni aux dispositions de l'article 9 de la directive et, d'autre part, n'affectait pas le respect par Teréga des obligations découlant des articles L. 111-8 et suivants du code de l'énergie et de l'article 9 de la directive.

En effet, la CRE avait constaté que Predica n'exerçait ni contrôle sur Teréga (anciennement TIGF), ni sur des entreprises ayant des activités de production ou de fourniture d'énergie. La CRE avait cependant constaté que Predica et la société Crédit Agricole SA détenaient chacune un quelconque pouvoir sur Teréga.

L'analyse des intérêts détenus par Predica et par les sociétés du groupe Crédit Agricole dans des activités de production ou de fourniture avait montré que ceux-ci, soit ne conféraient pas le contrôle sur ces sociétés, soit ne pouvaient pas être favorisés par les décisions prises par Teréga.

Aux termes de cette délibération du 4 février 2016, il était précisé qu'« afin d'assurer le suivi du portefeuille de participations des sociétés du groupe Crédit Agricole, toute prise de participation de ces sociétés dans une entreprise de production ou fourniture de gaz ou d'électricité en Europe et dans les pays qui possèdent une interconnexion électrique ou gazière avec l'Europe et qui s'élève à plus de 5 %, [devait] être notifiée, sans délai, à la CRE. La CRE se [réservait] en outre le droit de demander à tout moment à TIGF de lui transmettre le détail des participations des sociétés du groupe Crédit Agricole dans des entreprises de production ou fourniture de gaz ou d'électricité, en Europe et hors Europe. »

Enfin, dans sa délibération du 18 novembre 2021 (8), la CRE avait maintenu la certification de Teréga à la suite de la prise de participation du groupe GIC à hauteur de 9,99 % dans le capital de China Three Gorges International Ltd (ci-après « CTGI »), via sa filiale Ceningan Investment Pte Ltd (ci-après « Ceningan »), société sœur de Pacific Mezz Luxembourg, CTGI détenant 19,03 % d'Energias de Portugal (ci-après « EDP »). Le groupe GIC disposant d'un quelconque pouvoir, au sens des dispositions de l'article L. 111-8-1 du code de l'énergie, dans CTGI, CTGI détenant seulement une participation non contrôlante à hauteur de 19,03 % dans la société EDP, la CRE avait considéré que le groupe GIC ne disposait pas d'un « quelconque pouvoir » dans la société EDP.

La CRE avait estimé qu'il n'existait pas, in concreto, de risque de conflit d'intérêts entre la participation indirecte du groupe GIC dans la société EDP, d'une part, et sa participation contrôlante dans Teréga, d'autre part. Ainsi, la CRE avait considéré que l'opération n'était pas contraire aux dispositions de l'article 9 de la directive et des articles L. 111-8 et suivants du code de l'énergie. Toutefois, la CRE avait demandé à Pacific Mezz Luxembourg de lui notifier toute évolution de la participation du groupe GIC au sein de CTGI et celle de CTGI au sein d'EDP.

Il était ainsi précisé qu'« au titre de son obligation de notification de toute prise de participation de plus de 5 % du groupe GIC dans une entreprise de production ou de fourniture de gaz ou d'électricité en Europe et dans les pays qui possèdent une interconnexion électrique ou gazière avec l'Europe, la CRE demande à Pacific Mezz Luxembourg de lui notifier toute évolution de la participation du groupe GIC au sein de CTGI, d'une part, et de celle de CTGI au sein d'EDP, d'autre part ».

A ce jour, Teréga est détenue par Teréga SAS à hauteur de 99,99 %, elle-même entièrement détenue par Teréga Holding, laquelle est détenue à hauteur de 40,5 % par SNAM SpA, de 31,5 % par Pacific Mezz Luxembourg, de 18 % par Ouestgaz SAS, de 9 % par Predica SA et de 1 % par Crédit Agricole Assurances Retraite.

Par courrier du 27 octobre 2022 reçu le 3 novembre 2022, Pacific Mezz Luxembourg a notifié à la CRE une évolution à compter du 1er février 2022 de la participation de China Three Gorges Europe SA (ci-après « CTGE »), détenue par CTGI, au sein d'EDP, de 19,03 % à 20,22 %. EDP détient une participation contrôlante dans EDP Renovaveis SA (ci-après « EDPR »), laquelle développe notamment des projets éoliens en France, et exerce des activités de production, de fourniture et de distribution de gaz et d'électricité en Espagne et au Portugal. A cette occasion, Pacific Mezz Luxembourg a également demandé à la CRE de modifier l'obligation de notification du groupe GIC de toute évolution de sa participation au sein de CTGI et de celle de CTGI au sein d'EDP, résultant de la délibération du 18 novembre 2021 susmentionnée. Par courriel du 21 avril 2023 complété par courriels des 3 mai et 12 juin 2023, le groupe GIC a notifié à la CRE les évolutions récentes des participations des sociétés du groupe GIC, Lisson Grove Investment Pte Ltd (ci-après « Lisson Grove Investment ») et GIC Private Ltd (ci-après « GIC Private Ltd »), dans les sociétés EDP et EDPR (ci-après ensemble « l'Opération GIC/CTGI/CTGE/EDP et EDPR »).

Par courrier du 6 décembre 2022, reçu le 12 décembre 2022, Teréga a informé la CRE que Pacific Mezz Luxembourg envisageait de transférer la totalité des 18 746 924 actions qu'elle détient dans le capital de Teréga Holding, représentant 31,5 % dudit capital, à Raffles Infra Holdings Limited (ci-après « Raffles Infra Holdings ») dont le siège social se trouve à Londres au Royaume-Uni. Cette société à responsabilité limitée de droit anglais est, au même titre que Pacific Mezz Luxembourg, une filiale indirectement détenue à 100 % par GIC (Ventures) Private Limited, [CONFIDENTIEL] (ci-après « l'Opération GIC/Raffles Infra Holdings »).

Teréga a apporté à la demande de la CRE en date du 9 février 2023 des informations complémentaires par courriel en date du 7 mars 2023.

Par courrier du 15 novembre 2022, reçu le 21 novembre 2022, Teréga a informé la CRE que Predica avait transféré 559 431 actions qu'elle détient dans le capital de Teréga Holding, représentant 1 % dudit capital, à Crédit Agricole Assurances Retraite (ci-après « CAAR »). Cette société anonyme a une activité de fonds de retraite professionnelle supplémentaire (ci-après « FRPS »). Elle est, au même titre que Predica, détenue à hauteur de 100 % par la société Crédit Agricole Assurances (ci-après « Crédit Agricole Assurances ») et donc par le groupe Crédit Agricole (ci-après « l'Opération Crédit Agricole/Predica/CAAR »).

Teréga a apporté à la demande de la CRE en date du 9 mars 2023 des informations complémentaires par courriels en date des 14, 23 et 28 mars 2023.

2. Analyse de la CRE

Dans le cadre du modèle de certification de « séparation patrimoniale », l'article 9 de la directive, telle qu'interprétée par la Commission européenne dans son document de travail sur le modèle de « séparation patrimoniale » (9), transposé à l'article L. 111-8-3 du code de l'énergie, prévoit notamment qu'une même personne ne peut :

- exercer un contrôle direct ou indirect sur une entreprise de production ou de fourniture et un contrôle direct ou indirect ou un quelconque pouvoir sur un gestionnaire de réseau de transport ou sur un réseau de transport ;

- exercer un contrôle direct ou indirect sur un gestionnaire de réseau de transport ou sur un réseau de transport et un contrôle direct ou indirect ou un quelconque pouvoir sur une entreprise de production ou de fourniture.

Il ressort également de ces dispositions qu'une même personne ne peut désigner les membres du conseil de surveillance, du conseil d'administration ou des organes représentant légalement le GRT et exercer un contrôle direct ou indirect ou un quelconque pouvoir sur une entreprise de production ou de fourniture.

Enfin, une même personne ne peut être membre du conseil de surveillance, du conseil d'administration ou des organes représentant légalement une entreprise de production ou de fourniture et du conseil de surveillance, du conseil d'administration ou des organes représentant légalement le GRT.

2.1. L'Opération GIC/CTGI/CTGE/EDP et EDPR

Sur la base des éléments communiqués par le groupe GIC, la CRE a procédé à une analyse des éventuelles conséquences de l'Opération GIC/CTGI/CTGE/EDP et EDPR au regard des obligations mentionnées à l'article 9 de la directive et aux articles L. 111-8 et suivants du code de l'énergie.

Dans sa délibération du 3 juillet 2014 portant décision de certification de Teréga, la CRE avait considéré que Pacific Mezz Luxembourg détenait un contrôle sur Teréga (10). La CRE doit donc s'assurer que Pacific Mezz Luxembourg, et son actionnaire de contrôle (le groupe GIC), n'exercent pas de contrôle ou de quelconque pouvoir sur des entreprises ayant des activités de production ou de fourniture d'énergie. En cas de contrôle direct ou indirect ou de quelconque pouvoir sur ces entreprises, conformément au document de travail de la Commission européenne (11), la CRE doit analyser si ces opérations sont de nature à créer un risque de conflit d'intérêts entre les participations dans des entreprises actives dans la production d'énergie détenues par le groupe GIC et Pacific Mezz Luxembourg et le contrôle de Pacific Mezz Luxembourg sur Teréga.

L'évolution de la participation de CTGI dans la société EDP, passant à compter du 1er février 2022 de 19,03 % à 20,22 % du capital de EDP, n'est pas de nature à remettre en cause l'analyse de la CRE telle qu'issue de sa délibération du 18 novembre 2021 dans la mesure où la participation indirecte du groupe GIC dans EDP, via CTGI et CTGE, évolue de 1,9 % à 2,02 % du capital de EDP et que Ceningan ne dispose d'aucun droit de vote ou siège au sein des organes de gouvernance d'EDP. La CRE considère par conséquent que le groupe GIC, par l'intermédiaire de Ceningan, CTGI et CTGE, ne dispose pas d'un quelconque pouvoir dans la société EDP.

Le 14 mars 2023, EDP a annoncé que CTGE avait souscrit à l'augmentation de capital d'EDP pour un nombre d'actions nouvelles représentant environ 1,09 % du capital social d'EDP. Après la réalisation de l'augmentation de capital d'EDP, la participation de CTGI a été diluée et représente 20,861 % du capital social d'EDP.

Lisson Grove Investment, une société de droit singapourien, société sœur de Ceningan et filiale à hauteur de 100 % de la société GIC Infra Holdings Private Limited, a également souscrit à l'augmentation de capital d'EDP à hauteur de 2,1 % du capital social d'EDP.

[CONFIDENTIEL]

Le 3 mars 2023, EDP a annoncé que sa filiale détenue à 74,98 % EDPR avait réalisé une augmentation de capital. Lisson Grove Investment a conclu un accord d'investissement le 1er mars 2023 en vertu duquel elle s'est engagée à souscrire des actions d'une valeur approximative de 850 millions d'euros représentant 4,283 % du capital social d'EDPR.

[CONFIDENTIEL]

Après la réalisation de l'augmentation de capital d'EDPR, la participation d'EDP dans EDPR a été diluée et représente 71,20 % du capital social d'EDPR.

A l'issue de la réalisation de ces augmentations de capital, le groupe GIC détient une participation :

- dans le capital d'EDP [CONFIDENTIEL] ; et

- dans le capital d'EDPR [CONFIDENTIEL].

Lisson Grove Investment a pour activité principale une activité de « holding » d'investissement. Pacific Mezz Luxembourg déclare qu'à ce jour, Lisson Grove Investment ne détient aucune participation capitalistique ou investissement dans des sociétés en Europe qui produisent ou fournissent du gaz ou qui génèrent ou fournissent de l'électricité, autres qu'EDP et EDPR.

[CONFIDENTIEL]

Aucune entité du groupe GIC, prise individuellement, ne bénéficie de droit de gouvernance ou de droit de veto vis-à-vis d'EDP ou EDPR. Lisson Grove Investment et GIC Private Ltd disposent de droits de vote dans EDP ou EDPR à hauteur de leur participation en capital dans ces sociétés.

Par conséquent, la CRE considère que Lisson Grove Investment et GIC Private Ltd disposent d'un quelconque pouvoir sur les sociétés EDP et EDPR.

Toutefois, compte tenu des faibles participations directes dans EDP et EDPR, la CRE estime que le groupe GIC n'est pas incité à influencer les décisions de Teréga afin de favoriser les intérêts d'EDP ou d'EDPR. Au vu de ces éléments, la CRE estime qu'il n'existe pas, in concreto, de risque de conflit d'intérêts entre la participation directe du groupe GIC dans EDP et EDPR, d'une part, et sa participation contrôlante dans Teréga, d'autre part.

Par conséquent, la CRE considère que ces évolutions ne sont pas contraires aux dispositions de l'article 9 de la directive et des articles L. 111-8 et suivants du code de l'énergie.

A cette occasion, la CRE précise qu'afin de lui permettre de suivre l'évolution du portefeuille de participations du groupe GIC, toute prise de participation du groupe GIC dans une entreprise de production ou fourniture de gaz ou d'électricité en Europe et dans les pays qui possèdent une interconnexion électrique ou gazière avec l'Europe et qui s'élève à plus de 5 %, doit être notifiée, sans délai, à la CRE par le groupe GIC, (i) le groupe GIC renvoie à l'ensemble des sociétés composant le groupe GIC en ce compris (a) GIC (Ventures) Private Limited, (b) GIC Private Limited et (c) leurs filiales respectives ainsi que (d) toutes sociétés dans lesquelles ces dernières détiennent des droits de vote supérieurs à 50 % ou le droit de nommer la majorité des membres des organes d'administration, (ii) le seuil de 5 % doit s'apprécier de manière agrégée au regard de l'ensemble des participations des sociétés composant le groupe GIC tel que défini ci-dessus (étant précisé qu'en cas de détention par une société visée au (d), la participation directe d'une telle société sera incluse dans le seuil de 5 %).

La CRE estime que les modalités de notification telles que proposées par le groupe GIC s'agissant de la participation du groupe GIC au sein de CTGI et de celle de CTGI au sein d'EDP sont pertinentes, soit :

- une notification des évolutions de la participation indirecte du groupe GIC via CTGI excédant le seuil de 25 % du capital d'EDP (étant précisé que, conformément à l'article 14 (3) aux statuts d'EDP, « les voix exprimées par un actionnaire, pour son propre compte ou pour le compte d'un autre actionnaire, qui dépassent 25 % des droits de vote correspondant au capital social, ne sont pas prises en compte ») ;

- deux notifications par an de la participation de CTGE dans EDP sur la base des informations publiées par EDP dans ses rapports annuels et semestriels ;

- une notification de tout franchissement par CTGE des seuils légaux prévus à l'article 16 (1) du code portugais des valeurs mobilières au sein du capital d'EDP.

La CRE rappelle qu'en tout état de cause elle se réserve le droit de demander à tout moment au groupe GIC de lui transmettre le détail de ses participations dans des entreprises de production ou fourniture de gaz ou d'électricité, en Europe et hors d'Europe.

2.2. L'opération GIC/Raffles Infra Holdings

Sur la base des éléments communiqués par Teréga, la CRE a procédé à une analyse des éventuelles conséquences de l'opération GIC/Raffles Infra Holdings au regard des obligations mentionnées à l'article 9 de la directive et aux articles L. 111-8 et suivants du code de l'énergie.

2.2.1. Examen des pouvoirs de la société Raffles Infra Holdings sur Teréga

Le transfert des titres de Teréga Holding, jusqu'alors détenue par Pacific Mezz Luxembourg, au profit de Raffles Infra Holdings représenterait 31,5 % du capital de Teréga Holding et s'accompagnerait du pouvoir de nommer des administrateurs aux conseils d'administration de Teréga SA, Teréga SAS et Teréga Holding ainsi que de droits de veto (12) pour certaines décisions du conseil d'administration de Teréga SAS s'agissant de Teréga.

Dans ces conditions, au vu des éléments communiqués par Teréga, la CRE considère que Raffles Infra Holdings détiendrait un contrôle direct sur Teréga.

Par conséquent, Raffles Infra Holdings et ses actionnaires ne peuvent pas exercer un contrôle ou un quelconque pouvoir sur des entreprises exerçant des activités de production ou de fourniture d'énergie, conformément aux dispositions de l'article 9 de la directive et aux articles L. 111-8 et suivants du code de l'énergie.

2.2.2. Examen des participations de la société Raffles Infra Holdings dans des activités de production ou de fourniture d'électricité ou de gaz

Raffles Infra Holdings n'est pas elle-même active dans la production ou la fourniture de gaz ou d'électricité. Toutefois, Raffles Infra Holdings détient un portefeuille de participations, dont deux appartiennent au secteur de l'énergie : [CONFIDENTIEL].

[CONFIDENTIEL] Selon les déclarations de Teréga, « aucune des deux entités, ni aucune de leurs filiales, n'exercent d'activités de production ou de fourniture en énergie, autres que par leur nature de sociétés d'infrastructures gazières intermédiaires [« midstream »] transportant du gaz ».

[CONFIDENTIEL] (13).

Par conséquent, la CRE considère que Raffles Infra Holdings n'exerce ni contrôle, ni un quelconque pouvoir sur des entreprises de production ou de fourniture d'électricité ou de gaz.

2.2.3. Examen des participations du groupe GIC dans des activités de production de fourniture d'électricité ou de gaz

Raffles Infra Holdings est une société du groupe GIC et ainsi une société sœur de Pacific Mezz Luxembourg. Raffles Infra Holdings est une société de droit anglais détenue en totalité par GIC Infra Holdings Pte Ltd, une société de droit singapourien, elle-même détenue par GIC (Ventures) Pte Ltd, société également de droit singapourien qui est [CONFIDENTIEL].

Eu égard à l'obligation de notification pesant sur le groupe GIC et aux développements qui précèdent (cf. 2.1), la CRE constate que sa situation demeure conforme aux dispositions de l'article 9 de la directive et des dispositions des articles L. 111-8 et suivants du code de l'énergie.

2.3. L'opération Crédit Agricole/Predica/CAAR

Sur la base des éléments communiqués par Teréga, la CRE a procédé à une analyse des éventuelles conséquences de l'Opération Crédit Agricole/Predica/CAAR au regard des obligations mentionnées à l'article 9 de la directive et aux articles L. 111-8 et suivants du code de l'énergie.

2.3.1. Examen des pouvoirs de la société CAAR sur Teréga

En application des stipulations de l'article 15 des statuts de Teréga SAS (14) et [CONFIDENTIEL] (15) (16), les pouvoirs de CAAR sur Teréga sont attachés à ceux de Predica. Par conséquent, CAAR dispose avec Predica d'un quelconque pouvoir sur Teréga dès lors que CAAR et Predica peuvent désigner ensemble un administrateur de Teréga Holding en qualité d'actionnaires disposant à elles deux de 10 % du capital social de celle-ci [CONFIDENTIEL] (17).

Par conséquent, CAAR et ses actionnaires ne peuvent pas exercer de contrôle sur des entreprises exerçant des activités de production ou de fourniture d'énergie, conformément aux dispositions de l'article 9 de la directive et aux articles L. 111-8 et suivants du code de l'énergie.

2.3.2. Examen des participations de la société CAAR dans des activités de production ou de fourniture d'électricité ou de gaz

CAAR n'est pas elle-même active dans la production ou la fourniture de gaz ou d'électricité. Toutefois, elle détient un portefeuille de participations, dont trois appartiennent au secteur de l'énergie : Pisto Group Holding, ayant une activité dans le transport et le stockage de produits pétroliers en Espagne, FluxDune, une société holding pour la gestion du terminal de Dunkerque de regazéification de GNL et Movhera - Hidroelétricas do Norte, exploitant d'un portefeuille de centrales hydroélectriques au Portugal.

CAAR et Predica détiennent une participation de [CONFIDENTIEL] (respectivement [CONFIDENTIEL] et [CONFIDENTIEL]) dans le capital de Movhera - Hidroelétricas do Norte (ci-après « Movhera »).

La CRE avait constaté dans sa délibération du 28 juillet 2021 (18) que, malgré l'existence d'un contrôle conjoint des sociétés Mirova, Predica et ENGIE sur Movhera, celui-ci ne présentait pas de risque de conflit d'intérêts. En effet, Movhera produit de l'électricité à partir de sources non-gazières, n'ayant donc pas d'interface commune avec le réseau gazier de Teréga. La CRE avait alors considéré que les décisions prises par la société Teréga ne pouvaient par conséquent avoir aucune conséquence sur la gestion des actifs de production de Movhera. Cette opération n'était donc pas de nature à remettre en cause la certification de Teréga, malgré le quelconque pouvoir détenu par Predica sur Teréga.

La CRE considère que la participation de CAAR dans Movhera n'est pas de nature à remettre en cause son analyse telle qu'issue de sa délibération du 28 juillet 2021.

Par conséquent, la CRE considère que la participation de CAAR dans le capital de Teréga demeure conforme aux dispositions de l'article 9 de la directive et des articles L. 111-8 et suivants du code de l'énergie.

2.3.3. Examen des participations du groupe Crédit Agricole dans des activités de production de fourniture d'électricité ou de gaz

CAAR est une société du groupe Crédit Agricole et ainsi une société sœur de Predica. CAAR est détenue à 99,99 % par la société Crédit Agricole Assurances SA, elle-même détenue par la société cotée Crédit Agricole SA, qui est la société holding du groupe de bancassurance Crédit Agricole.

A l'occasion de l'instruction de l'Opération Crédit Agricole/Predica/CAAR, certains éléments ont appelé l'attention de la CRE. La CRE entend solliciter des informations complémentaires relatives aux participations contrôlantes du groupe Crédit Agricole dans des entreprises de production ou de fourniture d'électricité ou de gaz actives en Europe afin de les analyser au regard des dispositions de l'article 9 de la directive et des articles L. 111-8 et suivants du code de l'énergie.

Eu égard aux informations dont elle dispose à ce jour, la CRE constate que la situation du groupe Crédit Agricole est conforme aux dispositions de l'article 9 de la directive et des articles L. 111-8 et suivants du code de l'énergie.

La CRE précise qu'afin d'assurer le suivi du portefeuille de participations des sociétés du groupe Crédit Agricole, toute prise de participation de ces sociétés dans une entreprise de production ou fourniture de gaz ou d'électricité en Europe et dans les pays qui possèdent une interconnexion électrique ou gazière avec l'Europe et qui s'élève à plus de 5 %, doit être notifiée, sans délai, à la CRE par le groupe Crédit Agricole, (i) le groupe Crédit Agricole renvoie à l'ensemble des sociétés composant le groupe Crédit Agricole en ce compris (a) la société Crédit Agricole Assurances, (b) la société Crédit Agricole SA et (c) leurs filiales respectives ainsi que (d) toutes sociétés dans lesquelles ces dernières détiennent des droits de vote supérieurs à 50 % ou le droit de nommer la majorité des membres des organes d'administration, (ii) le seuil de 5 % doit s'apprécier de manière agrégée au regard de l'ensemble des participations des sociétés composant le groupe Crédit Agricole tel que défini ci-dessus (étant précisé qu'en cas de détention par une société visée au (d), la participation directe d'une telle société sera incluse dans le seuil de 5 %).

La CRE se réserve en tout état de cause le droit de demander à tout moment au groupe Crédit Agricole de lui transmettre le détail de ses participations dans des entreprises de production ou fourniture de gaz ou d'électricité, en Europe et hors Europe.

Décision de la CRE

Par courrier du 27 octobre 2022 reçu le 3 novembre 2022, Pacific Mezz Luxembourg S.a.r.l (ci-après « Pacific Mezz Luxembourg ») a notifié à la CRE une évolution à compter du 1er février 2022 de la participation de China Three Gorges Europe SA (ci-après « CTGE »), détenue par China Three Gorges International (ci-après « CTGI »), au sein d'EDP, de 19,03 % à 20,22 %. EDP détient une participation contrôlante dans EDP Renovaveis SA (ci-après « EDPR »), laquelle développe notamment des projets éoliens en France, et exerce des activités de production, fourniture et de distribution de gaz et d'électricité en Espagne et au Portugal. A cette occasion, Pacific Mezz Luxembourg a également demandé à la CRE de modifier l'obligation de notification du groupe GIC de toute évolution de sa participation au sein de CTGI et de celle de CTGI au sein d'EDP résultant de la délibération du 18 novembre 2021 portant décision sur le maintien de la certification de la société Teréga à la suite d'une prise de participation du groupe GIC dans une entreprise active dans la production d'énergie. Par courriel du 21 avril 2023 complété par courriels des 3 mai et 12 juin 2023, le groupe GIC a notifié à la CRE les évolutions récentes des participations des sociétés du groupe GIC, Lisson Grove Investment Pte Ltd et GIC Private Ltd, dans les sociétés EDP et EDPR.

Par courrier du 6 décembre 2022 reçu le 12 décembre 2022, Teréga SA a informé la CRE que Pacific Mezz Luxembourg envisageait de transférer la totalité des 18 746 924 actions qu'elle détient dans le capital de Teréga Holding SAS, représentant 31,5% dudit capital, à Raffles Infra Holdings Limited (ci-après « Raffles Infra Holdings ») dont le siège social se trouve à Londres au Royaume-Uni. Cette société à responsabilité limitée de droit anglais est, au même titre que Pacific Mezz Luxembourg, une filiale indirectement détenue à 100 % par GIC (Ventures) Private Limited, [CONFIDENTIEL].

Par courrier du 15 novembre 2022 reçu le 21 novembre 2022, Teréga SA a informé la CRE que Predica SA avait transféré 559 431 actions qu'elle détient dans le capital de Teréga Holding SAS, représentant 1 % dudit capital, à Crédit Agricole Assurances Retraite (ci-après « CAAR »). Cette société anonyme a une activité de fonds de retraite professionnelle supplémentaire (ci-après « FRPS »). Elle est, au même titre que Predica, détenue à hauteur de 100 % par la société Crédit Agricole Assurances (ci-après « Crédit Agricole Assurances ») et donc par le groupe Crédit Agricole.

Après analyse des éléments fournis par Teréga, Pacific Mezz Luxembourg, Lisson Grove Investment Pte Ltd, GIC Private Limited, Predica SA et CAAR, la CRE considère que les opérations notifiées par courriers des 27 octobre, 15 novembre, 6 décembre 2022 et 21 avril 2023, relatives à l'évolution de la participation du groupe GIC dans les sociétés EDP et EDPR, au transfert de titres de Pacific Mezz Luxembourg à Raffles Infra Holdings et à l'entrée de CAAR au capital de Teréga Holding SAS, ne sont pas contraires aux dispositions de l'article 9 de la directive et des articles L. 111-18 et suivants du code de l'énergie et n'affectent pas le respect par Teréga de ses obligations au titre de ces mêmes articles.

La CRE précise qu'afin de lui permettre de suivre l'évolution du portefeuille de participations du groupe GIC, toute prise de participation du groupe GIC dans une entreprise de production ou fourniture de gaz ou d'électricité en Europe et dans les pays qui possèdent une interconnexion électrique ou gazière avec l'Europe et qui s'élève à plus de 5 %, doit être notifiée, sans délai, à la CRE par le groupe GIC, (i) le groupe GIC renvoie à l'ensemble des sociétés composant le groupe GIC en ce compris (a) GIC (Ventures) Private Limited, (b) GIC Private Limited et (c) leurs filiales respectives ainsi que (d) toutes sociétés dans lesquelles ces dernières détiennent des droits de vote supérieurs à 50 % ou le droit de nommer la majorité des membres des organes d'administration, (ii) le seuil de 5 % doit s'apprécier de manière agrégée au regard de l'ensemble des participations des sociétés composant le groupe GIC tel que défini ci-dessus (étant précisé qu'en cas de détention par une société visée au (d), la participation directe d'une telle société sera incluse dans le seuil de 5 %).

La CRE estime que les modalités de notification telles que proposées par le groupe GIC s'agissant de la participation du groupe GIC au sein de CTGI et de celle de CTGI au sein d'EDP sont pertinentes, soit :

- une notification des évolutions de la participation indirecte du groupe GIC via CTGI excédant le seuil de 25 % du capital d'EDP (étant précisé que, conformément à l'article 14 (3) aux statuts d'EDP, « les voix exprimées par un actionnaire, pour son propre compte ou pour le compte d'un autre actionnaire, qui dépassent 25 % des droits de vote correspondant au capital social, ne sont pas prises en compte ») ;

- deux notifications par an de la participation de CTGE dans EDP sur la base des informations publiées par EDP dans ses rapports annuels et semestriels ;

- une notification de tout franchissement par CTGE des seuils légaux prévus à l'article 16(1) du code portugais des valeurs mobilières au sein du capital d'EDP.

La CRE rappelle qu'en tout état de cause elle se réserve le droit de demander à tout moment au groupe GIC de lui transmettre le détail de ses participations dans des entreprises de production ou fourniture de gaz ou d'électricité, en Europe et hors d'Europe.

La CRE précise enfin, qu'afin d'assurer le suivi du portefeuille de participations des sociétés du groupe Crédit Agricole, toute prise de participation de ces sociétés dans une entreprise de production ou fourniture de gaz ou d'électricité en Europe et dans les pays qui possèdent une interconnexion électrique ou gazière avec l'Europe et qui s'élève à plus de 5 %, doit être notifiée, sans délai, à la CRE par le groupe Crédit Agricole, (i) le groupe Crédit Agricole renvoie à l'ensemble des sociétés composant le groupe Crédit Agricole en ce compris (a) la société Crédit Agricole Assurances, (b) la société Crédit Agricole SA et (c) leurs filiales respectives ainsi que (d) toutes sociétés dans lesquelles ces dernières détiennent des droits de vote supérieurs à 50 % ou le droit de nommer la majorité des membres des organes d'administration, (ii) le seuil de 5 % doit s'apprécier de manière agrégée au regard de l'ensemble des participations des sociétés composant le groupe Crédit Agricole tel que défini ci-dessus (étant précisé qu'en cas de détention par une société visée au (d), la participation directe d'une telle société sera incluse dans le seuil de 5 %).

La CRE se réserve en outre le droit de demander à tout moment au groupe Crédit Agricole de lui transmettre le détail de ses participations dans des entreprises de production ou fourniture de gaz ou d'électricité, en Europe et hors Europe.

La CRE entend d'ores et déjà solliciter des informations complémentaires relatives aux participations contrôlantes du groupe Crédit Agricole dans des entreprises de production ou de fourniture d'électricité et de gaz actives en Europe afin de les analyser au regard des dispositions de l'article 9 de la directive et des articles L. 111-8 et suivants du code de l'énergie.

La présente délibération complète la délibération de la CRE du 3 juillet 2014 portant décision de certification de la société Teréga SA, dont les conditions ne sont pas modifiées.

La présente délibération sera publiée au Journal officiel de la République française et sur le site Internet de la CRE. Elle sera notifiée à Teréga SA, à Pacific Mezz Luxembourg, à la société GIC Infra Holdings Private Limited, à Predica et à CAAR.

La délibération sera transmise à la ministre de la transition énergétique ainsi qu'au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.