JORF n°0209 du 8 septembre 2012

I. - Cadre réglementaire

Aux termes de l'article L. 44 du CPCE :
« Les opérateurs sont tenus de proposer à un tarif raisonnable à leurs abonnés les offres permettant à ces derniers de conserver leur numéro géographique lorsqu'ils changent d'opérateur sans changer d'implantation géographique et de conserver leur numéro non géographique, fixe ou mobile, lorsqu'ils changent d'opérateur tout en demeurant en métropole, dans un même département d'outre-mer, à Mayotte ou à Saint-Pierre-et-Miquelon. Les opérateurs prévoient les dispositions nécessaires dans les conventions d'accès et d'interconnexion à des tarifs reflétant les coûts correspondants. »
Ainsi, les opérateurs ont l'obligation légale de fixer, pour la mise en œuvre de la conservation du numéro fixe, des tarifs orientés vers les coûts.
L'Autorité a la possibilité de préciser, en tant que de besoin, les mécanismes de recouvrement, de tarification et de comptabilisation des coûts relatifs à la conservation du numéro. En effet, l'article D. 406-19 du CPCE dispose que :
« III. ― Les opérateurs qui fournissent des prestations à d'autres opérateurs au titre de la conservation des numéros doivent être en mesure de démontrer que les tarifs d'accès et d'interconnexion associés reflètent les coûts correspondants. L'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes peut demander à ces opérateurs de justifier intégralement leurs tarifs et, si nécessaire, en exiger l'adaptation.
IV. - Pour la mise en œuvre du III du présent article, l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes précise, en tant que de besoin, les mécanismes de recouvrement des coûts, les méthodes de tarification et les méthodes de comptabilisation des coûts, qui peuvent être distinctes de celles appliquées par l'opérateur. Elle peut également prendre en compte les prix en vigueur sur les marchés comparables en France ou à l'étranger. Elle veille à ce que les méthodes retenues promeuvent l'efficacité économique, favorisent une concurrence durable et optimisent les avantages pour le consommateur. Elle veille également à assurer une rémunération raisonnable des capitaux employés, compte tenu du risque encouru. »
La présente décision, adoptée sur le fondement des dispositions de l'article L. 36-6 de ce même code, a pour objet de préciser certaines règles concernant les droits et obligations afférents à ces opérateurs, dans le cadre de la mise en œuvre de la prestation de la conservation du numéro fixe.
L'Autorité, en adoptant cette décision, a pour objectif d'œuvrer, dans le cadre de ses prérogatives, d'une part, à la mise en place d'un mécanisme de recouvrement des coûts et, d'autre part, à la mise en œuvre des méthodes de tarification et de comptabilisation concernant la conservation du numéro fixe.

II. - Le processus de conservation du numéro fixe

a) Les interactions entre les opérateurs
La décision n° 2009-0637 de l'Autorité (1) précise les modalités d'application de la conservation des numéros fixes et rappelle notamment le principe de simple guichet selon lequel l'abonné mandate son nouvel opérateur (ci-après « opérateur receveur ») pour qu'il réalise l'ensemble des démarches administratives relatives à sa demande de conservation du numéro, particulièrement la transmission de la demande à son ancien opérateur (ci-après « opérateur donneur »), laquelle vaut demande de résiliation du contrat qui lie celui-ci à l'abonné. L'opérateur receveur est également chargé d'informer l'opérateur auquel la ressource de numérotation a été attribuée (ci-après « opérateur attributaire »), si celui-ci est différent de l'opérateur donneur, ainsi que les opérateurs tiers non directement impliqués dans la mise en œuvre de la conservation du numéro fixe.
La mise en œuvre de la prestation de conservation du numéro fixe nécessite ainsi la coordination de plusieurs acteurs : les opérateurs receveur, donneur, attributaire, mais également un opérateur d'accès, lorsque la demande de conservation du numéro fixe est associée à une commande d'accès. En effet, dans ce dernier cas, la synchronisation entre la livraison de l'offre d'accès et de services qu'il supporte et la mise en œuvre de la conservation du numéro est déterminante.
Enfin, plus globalement, l'ensemble des opérateurs de téléphonie, fixe ou mobile, sont concernés par le portage du numéro car, selon l'article 13 de la décision n° 2009-0637 susvisée, les opérateurs appelants sont tenus de respecter la même qualité de service pour les communications à destination des numéros fixes et mobiles, qu'ils soient portés ou non. Ainsi les opérateurs sont tenus de prendre toutes les dispositions nécessaires pour permettre l'acheminement des appels à destination du numéro fixe porté.
Outre les acteurs cités ci-dessus, un opérateur peut choisir de déléguer à une société tierce, sous sa responsabilité, tout ou partie des actions nécessaires à la mise en œuvre de la conservation du numéro fixe.
L'Autorité souhaite par ailleurs rappeler que, conformément à l'article 11 de la décision n° 2009-0637 : « Les opérateurs peuvent recourir à une entité commune pour faciliter l'échange de flux d'information entre opérateurs dans la mesure où les prestations fournies par cette entité sont conformes aux obligations résultant du code des postes et des communications électroniques et des décisions prises pour son application.
Dans ce cas, les opérateurs veillent à ce que les prestations fournies par l'entité commune respectent notamment les principes de reflet des coûts et de non-discrimination et ne créent pas d'obstacle artificiel au libre exercice d'une concurrence loyale entre opérateurs. »
Plusieurs opérateurs ont ainsi créé en 2009 l'association de la portabilité des numéros fixes (ci-après « APNF ») dont les objectifs initiaux étaient de constituer et exploiter la base de données de référence des numéros portés fixes, de permettre à ses membres d'alimenter cette base de données et d'informer l'ensemble des opérateurs de leurs opérations de portage, conformément à l'article 7 de la décision n° 2009-0637. Par ailleurs, l'APNF a mis en place depuis 2010 un protocole d'échanges interopérateurs pour le traitement des demandes de conservation du numéro, commun à l'ensemble de ses membres.
L'Autorité estime qu'à moyen terme la centralisation par l'APNF de la gestion du processus de conservation des numéros fixes, complexe par nature, représenterait une solution efficace, à l'image du rôle joué par le groupement d'intérêt économique entité de gestion de la portabilité (« GIE EGP ») en ce qui concerne la conservation des numéros mobiles. Une telle centralisation nécessiterait néanmoins une bonne articulation entre les processus propres à l'entité commune et les processus de chaque opérateur, notamment de production de l'accès, et impliquerait notamment un travail de spécification et de synchronisation qui engagerait les acteurs.
b) Les différentes étapes du processus
Les différentes étapes de la mise en œuvre de la conservation du numéro fixe telle que décrite dans la décision n° 2009-0637 sont les suivantes :

  1. L'abonné consulte gratuitement sur son espace client accessible sur internet ou sur sa facture les informations mises à disposition par son opérateur actuel (opérateur donneur) (2) afin de connaître le détail de son installation :
    ― sur le marché entreprise : ensemble des numéros de sélection directe à l'arrivée (SDA) associés au(x) numéro(s) d'identification de son installation (NDI ou « tête de ligne ») ;
    ― sur le marché grand public : ensemble des numéros associés à son installation ; les opérateurs fixes travaillent par ailleurs à la mise en œuvre d'un relevé d'identité opérateur (RIO) associé à chaque numéro de téléphone, à l'instar du RIO sur le marché mobile, à des fins de fiabilisation de la demande de portage.
  2. L'abonné souscrit un contrat auprès de l'opérateur receveur avec demande de conservation d'un ou de plusieurs numéros fixes.
  3. L'opérateur receveur transmet, selon les délais précisés dans la décision susvisée, la demande de conservation du numéro à l'opérateur donneur et à l'opérateur attributaire (3), lorsque celui-ci est distinct (la conservation du numéro est alors qualifiée de « subséquente »).
  4. L'opérateur donneur étudie puis confirme ou infirme l'éligibilité de la demande. Par ailleurs, sur demande de l'opérateur receveur, l'opérateur donneur peut également réaliser une opération dite de fiabilisation des informations relatives à l'installation de l'abonné sur le marché entreprise ou transmettre l'identification de l'accès associé au numéro de téléphone sur le marché grand public (4) afin de limiter les risques de changements de ligne non sollicités (CLNS).
  5. L'opérateur receveur commande un accès à l'opérateur d'accès.
  6. L'opérateur receveur informe les opérateurs tiers de la prévision de portage (cette action est réalisée via une annonce de prévision à l'APNF (5).
  7. Les opérateurs tiers ayant opté pour un acheminement des appels en routage indirect temporaire mettent à jour leurs tables de routage.
  8. L'opérateur d'accès annonce à l'opérateur receveur la livraison de l'accès.
  9. L'opérateur receveur demande à l'opérateur donneur et éventuellement à l'opérateur attributaire, si celui-ci est distinct, l'activation du portage.
  10. L'opérateur donneur et éventuellement l'opérateur attributaire, si celui-ci est distinct, met(tent) en œuvre le portage puis rend(ent) compte de l'opération à l'opérateur receveur.
  11. L'opérateur receveur informe les opérateurs tiers de la réalisation du portage (cette action est réalisée via une annonce de réalisation à l'APNF).
  12. Les opérateurs tiers ayant opté pour un acheminement des appels en routage direct mettent à jour leurs tables de routage.
  13. L'opérateur donneur résilie le contrat de l'abonné et effectue les actions liées à cette résiliation : mise à jour des bases de données internes techniques et commerciales, mise à jour de l'annuaire universel, etc.
    En pratique, un même opérateur peut cumuler plusieurs rôles et ainsi dégager certaines synergies en coordonnant au mieux les étapes décrites ci-dessus. Par exemple, sur le marché grand public, les commandes de conservation du numéro fixe sont, dans une majorité des cas, réalisées conjointement à une commande d'accès (dégroupage ou ADSL nu). Dans cette configuration, l'opérateur d'accès peut être à la fois opérateur d'accès, opérateur attributaire du numéro à porter, voire opérateur donneur.
    La conservation du numéro peut, dans ce cas, être proposée à l'opérateur receveur comme une option ajoutée au processus préexistant de production d'accès. Dans cette configuration, l'opérateur d'accès synchronise la mise en œuvre du portage au plus près de la production de l'accès, conformément à la décision n° 2011-0668 de l'Autorité en date du 14 juin 2011.
    c) La typologie des processus de conservation du numéro fixe
    Il apparaît que les conservations du numéro interviennent principalement selon quatre types de processus (deux pour le marché grand public et deux pour le marché entreprise) :
    ― les conservations du numéro grand public groupées avec une commande d'accès (dégroupage ou ADSL nu) ;
    ― les conservations du numéro « sèches » sur le marché grand public (c'est-à-dire non groupées avec une commande d'accès ; une commande d'accès peut avoir lieu en parallèle selon un processus de commande distinct du processus de conservation, synchronisé par l'opérateur receveur) ;
    ― les conservations du numéro « sèches » sur le marché entreprise, synchronisées par l'opérateur receveur (6) par un appel téléphonique de ce dernier à l'opérateur donneur (et éventuellement l'opérateur attributaire si celui-ci est distinct) et incluant une demande de « fiabilisation » de la liste des numéros transmis par l'opérateur receveur à l'opérateur donneur, qui consiste en l'identification, par l'opérateur donneur, de l'intégralité des numéros rattachés à la tête de ligne dont la conservation est demandée par l'opérateur receveur ;
    ― les conservations du numéro « sèches » sur le marché entreprise, synchronisées par l'opérateur receveur par un appel téléphonique de ce dernier auprès de l'opérateur donneur (et éventuellement l'opérateur attributaire si celui-ci est distinct) et n'incluant pas une demande de « fiabilisation » auprès de l'opérateur donneur.

III. - Les mécanismes de recouvrement des coûts induits
par la mise en œuvre de la prestation de conservation du numéro fixe

a) La typologie des coûts induits
La mise en œuvre de la fonctionnalité de conservation du numéro fixe se traduit par de nombreuses modifications ou adaptations des systèmes d'information existants et des processus internes des opérateurs. L'ensemble des grands postes de coûts des opérateurs sont donc concernés par la conservation du numéro. Ces postes de coûts sont les suivants :
― les coûts de systèmes d'information ;
― les coûts de réseau ;
― les coûts commerciaux.
La délimitation précise de l'ensemble des charges découlant de la mise en œuvre de l'obligation de conservation du numéro est particulièrement complexe. Certains coûts de conservation des numéros font ainsi partie intégrante de coûts d'investissement et d'exploitation de l'opérateur, sans qu'il soit pour autant possible de mesurer précisément l'écart avec les coûts qui auraient été supportés si cette fonctionnalité n'était pas obligatoire. Les systèmes d'information auraient été relativement moins complexes, les choix d'architecture peut-être différents. Par ailleurs, comme évoqué précédemment, un même opérateur peut dégager certaines synergies en coordonnant les traitements liés à la conservation du numéro fixe avec d'autres systèmes n'ayant pas de rapport direct avec cette fonctionnalité, par exemple avec la chaîne de production des accès.
Pour autant, certains coûts de mise en œuvre de la conservation des numéros sont directement observables car strictement spécifiques à la mise en œuvre de cette fonctionnalité.
L'ensemble des systèmes mis en œuvre par un opérateur pour respecter l'obligation de conservation du numéro lui permet de remplir les trois rôles principaux d'opérateur donneur, receveur et attributaire.
Certains des coûts associés à ces systèmes sont clairement identifiables et affectables à chacun de ces rôles, mais la plupart d'entre eux ne le sont pas ; par exemple, sur le marché entreprise, le coût de la mise à disposition d'un technicien le jour du portage pour synchroniser le portage avec l'opérateur receveur par voie téléphonique est attribuable au rôle d'opérateur donneur (ou d'opérateur attributaire, lorsque celui-ci est distinct). Ainsi d'autres coûts sont joints pour l'ensemble des trois rôles : par exemple le coût de conception et de gestion du projet de déploiement des systèmes de conservation du numéro ne peut être alloué qu'à l'ensemble des trois fonctions. Enfin, de nombreux coûts induits sont des postes de coûts qui découlent de l'activité générale d'opérateur indépendamment de l'obligation de conservation du numéro.
En outre, l'adaptation de l'organisation de l'opérateur à l'obligation de conservation du numéro peut être l'occasion d'introduire de manière simultanée d'autres modifications d'organisation indépendantes de l'obligation de conservation du numéro tout en mutualisant un certain nombre de coûts à cette occasion.
b) Les possibilités théoriques de recouvrement des coûts
Les coûts subis par un opérateur pour permettre la mise en œuvre de la conservation du numéro peuvent être recouvrés théoriquement selon les trois modes suivants, non exclusifs les uns des autres :
― mode 1 : auprès de l'abonné qui fait une demande de conservation du numéro, via un tarif spécifique et explicite de l'offre de conservation du numéro ;
― mode 2 : par la facturation d'une prestation de « conservation du numéro » aux autres opérateurs à la suite d'une souscription d'un abonné avec conservation du numéro auprès du nouvel opérateur ;
― mode 3 : au titre de son activité générale d'opérateur, via ses tarifs de détails (frais d'accès au service, abonnement mensuel, tarif des communications électroniques, etc.). Le coût reste à sa charge et est finalement supporté par l'ensemble de ses abonnés sans tarification explicite et identifiée de cette prestation.
Il convient néanmoins d'apprécier la pertinence de chacune de ces sources de recouvrement en fonction du rôle que joue l'opérateur dans l'opération de mise en œuvre de la conservation du numéro.
c) Les possibilités de recouvrement pour chaque rôle
i) Les modes de recouvrement des coûts de l'opérateur receveur
L'opérateur receveur offre à son client la possibilité de conserver son numéro fixe. Cette prestation lui permet d'acquérir de nouveaux abonnés et ainsi de faciliter son activité commerciale de fournisseur de services de communications électroniques.
La mise en œuvre de la conservation du numéro se faisant au bénéfice de l'opérateur receveur, un recouvrement des coûts auprès des autres opérateurs (mode 2) n'apparaît pas justifié.
L'opérateur peut recouvrer auprès de son nouvel abonné des coûts générés par le portage du numéro demandé (mode 1). Toutefois, et même si l'opérateur receveur est naturellement incité à pratiquer une tarification raisonnable afin de ne pas décourager l'arrivée de nouveaux clients, ce mécanisme est encadré par l'article L. 44 du CPCE qui dispose que :
« Les opérateurs sont tenus de proposer à un tarif raisonnable à leurs abonnés les offres permettant à ces derniers de conserver leur numéro [...] non géographique, fixe ou mobile [...]. »
De manière générale, la prestation de conservation du numéro fixe n'est pas facturée aux abonnés sur le marché grand public.
L'opérateur peut également recouvrer ses coûts via son activité générale (mode 3).
ii) Les modes de recouvrement des coûts de l'opérateur donneur
Parmi les trois possibilités théoriques de recouvrement précitées, le recouvrement auprès de l'abonné qui fait une demande de conservation du numéro (mode 1) est exclu par le cadre réglementaire ; en effet, l'article D. 406-19 du CPCE prévoit en son premier alinéa que « l'opérateur donneur ne peut facturer les coûts de portage à l'abonné ». Ainsi, l'opérateur donneur ne peut faire payer un abonné qui résilie son contrat dans le cadre d'une demande de conservation du numéro.
L'opérateur peut recouvrer ses coûts partiellement en sa qualité d'opérateur donneur via la facturation d'une prestation de « conservation du numéro sortante » (mode 2). Dans ce cas, il apparaît pertinent que la facturation de cette prestation soit faite à l'opérateur qui est à l'origine de la demande de conservation du numéro, c'est-à-dire l'opérateur receveur. Toutefois, l'article L. 44 du CPCE précise : « Les opérateurs prévoient les dispositions nécessaires dans les conventions d'accès et d'interconnexion, à des tarifs reflétant les coûts correspondants ». Ainsi, les tarifs de la prestation de « conservation du numéro sortante » sont orientés vers les coûts.
L'opérateur peut également recouvrer ses coûts via son activité générale (mode 3), l'opérateur est soumis à la pression du jeu concurrentiel et est donc naturellement incité à modérer ses tarifs.
iii) Les modes de recouvrement des coûts de l'opérateur attributaire
Parmi les trois possibilités théoriques précitées, le recouvrement auprès de l'abonné (mode 1) ne semble pas possible dès lors que la demande de conservation du numéro peut s'inscrire dans le cadre d'une conservation du numéro subséquente, c'est-à-dire dans le cas où l'opérateur attributaire n'est pas l'opérateur donneur et n'a donc pas de lien contractuel direct avec l'abonné (7).
L'opérateur peut recouvrer ses coûts partiellement en sa qualité d'opérateur attributaire via la facturation d'une prestation de « conservation du numéro attributaire » (mode 2). Dans ce cas, il apparaît pertinent que la facturation de cette prestation soit faite à l'opérateur qui est à l'origine de la demande de conservation du numéro, c'est-à-dire l'opérateur receveur.
L'opérateur peut également recouvrer ses coûts via son activité générale (mode 3). Il est soumis à la pression du jeu concurrentiel et est donc naturellement incité à modérer ses tarifs.

IV. - Les principes de comptabilisation
des coûts recouvrables auprès de l'opérateur receveur

L'Autorité estime nécessaire de préciser les méthodes permettant de recouvrer les coûts induits par la fonctionnalité de conservation du numéro fixe par les opérateurs en leur qualité d'opérateur donneur et/ou attributaire vis-à-vis d'un opérateur receveur au regard de trois objectifs majeurs énoncés à l'article D. 406-19 du CPCE :
― promouvoir l'efficacité économique ;
― favoriser une concurrence durable ;
― optimiser les avantages pour le consommateur.
a) Promouvoir l'efficacité économique
Afin de promouvoir l'efficacité économique, les coûts pertinents induits par le mécanisme de conservation des numéros fixes doivent respecter le principe d'efficacité ; ainsi les inefficacités éventuelles d'un opérateur ne peuvent être prises en compte dans la formation du tarif de conservation du numéro. Les coûts pertinents sont donc les coûts directement liés au processus de conservation du numéro fixe d'un opérateur efficace mettant en œuvre le processus de conservation du numéro tel que précisé par la décision n° 2009-0687 susvisée.
b) Favoriser une concurrence durable
Dans un marché déjà développé, la concurrence entre les acteurs ne peut être durable que si ce marché est suffisamment fluide de sorte que les opérateurs aient une véritable incitation à être compétitifs pour tenter de conquérir de nouveaux clients, mais aussi pour conserver leurs propres abonnés. Sans cette fluidité, les opérateurs risqueraient au contraire d'être incités à « exploiter » une base d'abonnés captifs.
Parmi les conditions essentielles de l'émergence d'une concurrence durable, le faible niveau de barrière à l'entrée et des coûts de changement d'opérateur pour les utilisateurs finals peuvent être cités. Au cas d'espèce, les coûts d'acquisition de clients par les nouveaux entrants doivent être proportionnés de manière à favoriser une concurrence saine entre les différents acteurs. Des tarifs trop élevés constitueraient en effet une barrière à l'entrée trop importante pour les nouveaux entrants et induiraient des coûts de changement d'opérateur plus élevés pour les clients finals, ce qui limiterait la dynamique concurrentielle.
c) Optimiser les avantages pour le consommateur
La pratique de tarifs élevés pour la mise en œuvre de la conservation du numéro fixe pourrait inciter les opérateurs receveurs à en répercuter les coûts sur les nouveaux abonnés. Ces coûts de changement réduiraient la fluidité du marché, ce qui nuirait au jeu concurrentiel.
Par ailleurs, l'Autorité observe que proposer aux clients la possibilité de conserver leur numéro est une obligation pour chaque opérateur envers l'ensemble de ses abonnés, que ceux-ci décident de faire jouer ce droit, ou non. Cette obligation est de nature « symétrique », i.e. elle s'impose au titre des règles liées à la déclaration d'opérateur et bénéficie à l'ensemble des utilisateurs finals. Les coûts liés à la conception, la modification ou la maintenance des mécanismes et des processus d'un opérateur pour rendre possible la conservation du numéro sont donc supportés par chaque opérateur pour ses propres abonnés et les coûts qu'il encourt à ce titre dépendent principalement du nombre d'abonnés qu'il possède (8).
d) Application des principes
Le partage des coûts induits par la conservation des numéros entre facturation à l'opérateur receveur et recouvrement via l'activité générale de l'opérateur doit respecter les principes décrits précédemment. En particulier, il découle de ces principes que :
― le coût devrait être établi selon une estimation du coût efficace du processus de conservation du numéro ;
― le coût facturé par l'opérateur donneur à l'opérateur receveur devrait rester suffisamment faible pour favoriser une concurrence durable et optimiser les avantages pour le consommateur ;
― les coûts nécessaires pour rendre possible la conservation du numéro découlent d'une obligation de chaque opérateur envers ses propres abonnés indépendamment de l'exercice éventuel de ce droit.
Trois méthodes de comptabilisation des coûts différentes peuvent être utilisées pour préciser la part des coûts induits par la conservation des numéros qu'il est pertinent de facturer à l'opérateur receveur :
― méthode de comptabilisation en coût direct et variable : seuls les coûts directs variables sont pris en compte, soit les coûts directement liés au traitement d'une demande additionnelle de conservation du numéro fixe ;
― méthode de comptabilisation en coût incrémental : seuls les coûts directs engendrés par la mise en place de la prestation de conservation du numéro fixe sont pris en compte. Il s'agit des coûts d'exploitation et de maintien des systèmes mis en place pour permettre les traitements de conservation du numéro fixe ;
― méthode de comptabilisation en coût complet : selon cette méthode, l'intégralité des coûts de l'entreprise sont alloués sur ses différentes activités et produits. Ces coûts incluent tous les coûts directs et indirects liés à la prestation de conservation du numéro fixe ainsi qu'une part de coûts joints et coûts communs.
Les trois méthodes sont résumées dans le schéma suivant :

Vous pouvez consulter le tableau dans le
JOn° 209 du 08/09/2012 texte numéro 39

Par application des principes détaillés ci-dessus :
― lorsqu'un client décide d'exercer son droit à la conservation du numéro et demande le portage effectif de son numéro, seuls les coûts directs et variables liés au traitement de cette demande peuvent être facturés à l'opérateur receveur par l'opérateur donneur et l'opérateur attributaire (si celui-ci est distinct). Ils sont alors estimés en référence aux coûts d'un opérateur efficace mettant en œuvre le processus de conservation du numéro ;
― en revanche, tous les autres coûts (coûts fixes, directs et indirects, coûts d'investissement, coûts d'exploitation, quote-part des coûts joints et des coûts communs) encourus par un opérateur donneur et par un opérateur attributaire (si celui-ci est distinct) doivent rester à la charge de ces derniers, indépendamment de l'exercice de ce droit par les abonnés. Ces coûts sont recouvrés sur son activité générale et, in fine, sur l'ensemble des abonnés qui bénéficient de la possibilité de conserver leur numéro.

V. - Les méthodes de comptabilisation des coûts recouvrables
dans le cadre de la facturation d'une prestation à l'opérateur receveur

a) Les coûts liés à la conservation du numéro fixe recouvrables par l'opérateur donneur
Dans le cas des opérations de conservation du numéro groupées avec une commande d'accès sur le marché grand public, la mise en œuvre de la prestation constitue une option de la prestation d'accès (dégroupage ou ADSL nu). Ce processus est totalement automatisé et n'implique donc a priori aucune action manuelle de la part de l'opérateur donneur.
Aucun coût direct variable lié à la demande de conservation du numéro n'a été identifié pour ces opérations.
Dans le cas des opérations de conservation du numéro « sèches » sur le marché grand public, c'est-à-dire sans être groupées avec une commande d'accès (i.e. une commande d'accès peut avoir lieu en parallèle), la conservation du numéro est partiellement automatisée, dans la mesure où elle peut supposer une opération manuelle de saisie de la commande de conservation du numéro dans les systèmes de résiliation technique et commerciale de l'opérateur donneur. La vérification de l'éligibilité de la demande de portage par l'opérateur peut également être accompagnée de la transmission de la référence de l'accès associé au numéro ou de la vérification de la concordance entre le relevé d'identité opérateur associé au numéro fixe, dès lors que celui-ci sera effectif, afin de limiter les risques de changements de ligne non sollicités (CLNS). Les coûts liés à l'acte de saisie manuelle devraient être exclus du périmètre des postes de coûts directs variables recouvrables par l'opérateur donneur auprès de l'opérateur receveur, en ce qu'ils résultent d'un processus pouvant être en grande partie automatisé et ainsi gagner en efficacité. En revanche, les coûts liés à la mise à disposition d'un relevé d'identité opérateur associé au numéro de téléphone ou des informations relatives à l'installation peuvent être inclus dans ce périmètre.
Enfin, dans le cas des opérations de conservation du numéro « sèches » sur le marché entreprise, la mise en œuvre de la conservation du numéro est partiellement automatisée et, à la suite d'une demande de conservation des numéros « sèche » sur le marché entreprise, deux actes manuels principaux ont été identifiés, lesquels engendrent des coûts directs et variables :
L'opération dite « de fiabilisation » de la séquence de numéros. Cet acte, préalable au portage des numéros de l'opérateur donneur vers l'opérateur receveur et réalisé en option, consiste en l'identification par l'opérateur donneur de l'intégralité des numéros rattachés à la tête de ligne dont la conservation est demandée par l'opérateur receveur.
L'acte de fiabilisation est un élément significatif garantissant la qualité de service dont bénéficient les abonnés du marché entreprise en ce qui concerne la prestation de conservation du numéro fixe.
Néanmoins, les opérateurs sont tenus de mettre à disposition de leurs abonnés la liste exhaustive des numéros fixes qui ont été affectés ou réservés dans le cadre de leur contrat (9). Un respect général de cette obligation ainsi que les travaux engagés par le secteur pour fiabiliser les commandes devraient conduire à rendre l'option de fiabilisation de moins en moins nécessaire. Cette prestation pourra toujours être proposée en tant qu'option, afin de garantir un confort et une qualité de service accrue à l'opérateur receveur et donc à son abonné. Sa facturation apparaît pertinente sous réserve que l'opérateur mette effectivement à disposition de son abonné les informations relatives à son installation.
L'appel téléphonique de synchronisation entre l'opérateur receveur et l'opérateur donneur le jour du « portage » effectif des numéros. Cet acte, proposé le plus souvent en option, répond à un souci d'efficacité de l'opération de conservation des numéros et est nécessaire afin de s'assurer que le transfert des numéros de la part de l'opérateur donneur et leur réception de la part de l'opérateur receveur sont parfaitement synchronisés. La coordination entre les opérateurs receveur et donneur doit permettre la bonne mise en œuvre de la conservation du numéro.
Ces deux options sont aujourd'hui souscrites pour une grande majorité des traitements de conservations de numéros « sèches » sur le marché entreprise.
Par ailleurs, l'opérateur receveur peut demander à l'opérateur donneur de prévoir le « retour arrière » à la situation précédant la mise en œuvre du portage, en cas de problème technique lors du portage. En général, l'option de « retour arrière » sur le marché entreprise est facturée en supplément des frais d'accès au service (ci-après « FAS ») de conservation du numéro.
b) Les coûts liés à la conservation du numéro fixe recouvrables par l'opérateur attributaire
Dans le cadre de la mise en œuvre d'une conservation de numéro fixe, quel que soit le marché (grand public ou entreprise), l'opérateur attributaire est tenu :

  1. De mettre à jour le routage des numéros portés dont il est l'attributaire ;
  2. D'assurer le routage indirect pour le compte des opérateurs appelants qui ne réalisent pas de routage direct ;
  3. De continuer à verser à l'Autorité la taxe correspondant à la ressource de numérotation qui a été portée. En effet, l'article L. 44 du CPCE prévoit que chaque attribution de ressource de numérotation donne lieu au paiement à l'Autorité d'une taxe annuelle. Cette taxe est exigible indépendamment du caractère porté ou non du numéro.
    L'ensemble de ces coûts n'a pas vocation à être recouvré par les FAS de conservation du numéro fixe, dans la mesure où :
  4. Il appartient à l'opérateur attributaire, tout comme à l'ensemble des opérateurs, de prendre les dispositions nécessaires pour permettre l'acheminement des appels à destination du numéro fixe porté, comme précisé par les articles 8 et 13 de la décision n° 2009-0687 ;
  5. Il existe une prestation spécifique dite de « re-routage » permettant le bon acheminement de la communication auprès du réseau de l'opérateur receveur, composée notamment d'une prestation de « préfixage » des appels vers les numéros portés sortants dont il est attributaire :
    ― en ce qui concerne les appels vers les numéros interpersonnels portés sortant de son réseau (au format géographique commençant par 01 à 05 ou non géographique commençant par 09), cette prestation est d'ores et déjà facturée (facturation à l'appel) par l'opérateur attributaire à l'opérateur appelant ;
    ― en ce qui concerne les appels vers les numéros de service à valeur ajoutée (numéros en 08) portés sortant de son réseau, cette prestation était jusqu'à présent facturée (facturation à l'appel) par l'opérateur attributaire à l'opérateur receveur. Néanmoins, afin de favoriser le développement du routage direct à destination des numéros de SVA portés, les opérateurs ont acté (10) le principe d'appliquer, à partir du 1er janvier 2012 et de manière simultanée pour l'ensemble des opérateurs attributaires de numéros de SVA, la facturation de cette prestation de préfixage à l'opérateur appelant et non plus à l'opérateur receveur du numéro porté.
  6. Enfin, dans la mesure où le coût correspondant à la taxe de numérotation n'est pas lié aux demandes de conservation de numéros mais au volume cumulé de numéros « portés », il ne semble pas nécessaire de le recouvrer sur chacune des demandes de conservation de numéro fixe. La refacturation par un opérateur attributaire de cette redevance aux opérateurs tiers exploitant les numéros portés semble justifiée, mais cette prestation devrait faire l'objet d'une facturation ad hoc et les coûts induits n'ont pas vocation à être recouvrés par les FAS de conservation du numéro fixe (11).
    En revanche, dans le cas d'une conservation du numéro de type « subséquente » sur le marché entreprise, l'opérateur receveur peut choisir d'activer la mise à jour des tables de routage des numéros portés tenues par l'opérateur attributaire, au travers d'un appel téléphonique. Cette prestation, souscrite par l'opérateur receveur auprès de l'opérateur attributaire, est similaire à l'option « appel de synchronisation » mise en œuvre par l'opérateur donneur, de même qu'en cas de prestation de « retour arrière », réalisée à la demande de l'opérateur receveur. Elles visent à garantir à l'abonné une qualité optimale pour l'acheminement des appels et peut faire l'objet d'un recouvrement auprès de l'opérateur receveur (12).
    Par conséquent, il apparaît que les coûts supportés par l'opérateur attributaire n'ont pas été identifiés comme devant être recouvrés au travers des frais d'accès de la prestation de conservation du numéro fixe, à l'exception des coûts directs et variables relatifs au temps de traitement de l'appel de synchronisation ou de « retour arrière » par le personnel de l'opérateur attributaire, sous réserve que cette option soit souscrite par l'opérateur receveur.
    c) Traitement d'une demande de conservation du numéro hors processus efficace
    Le processus efficace décrit précédemment est largement automatisé et fait appel à des protocoles d'échange d'information mis en œuvre par la majorité des opérateurs. Toutefois, du fait de l'opérateur receveur, un processus spécifique, par exemple un processus manuel, peut être imposé à l'opérateur donneur. Dans ce cas, des coûts directs et variables différents peuvent apparaître et ainsi faire l'objet d'une tarification particulière dès lors que l'opérateur donneur y a recours du fait de l'opérateur receveur.
    Une telle tarification peut par ailleurs prendre en compte une majoration visant à encourager l'opérateur receveur à adopter les outils les plus efficaces.

VI. - Les méthodes de tarification

a) La structure tarifaire de la prestation de conservation du numéro fixe
La structure tarifaire actuellement proposée par les opérateurs pour la prestation de conservation du numéro fixe est généralement constituée :
― d'une partie fixe dépendant du mode de traitement de la demande ;
― d'une partie variable en fonction du nombre de numéros concernés par la demande.
L'inducteur de coûts dans les actes manuels de fiabilisation et de traitement de l'appel de synchronisation du portage semble être le nombre de séquences de numéros consécutifs à traiter plutôt que le nombre de numéros contenus dans ces séquences. D'une part, un appel permet de coordonner le portage d'une séquence complète de numéros consécutifs, quelle que soit sa taille et, d'autre part, l'opération de fiabilisation nécessite des recherches par l'opérateur donneur sur l'installation de l'abonné dont la durée ne dépend pas de la taille de la séquence concernée.
Par ailleurs, il semble pertinent que les FAS de conservation du numéro fixe soient facturés à l'opérateur receveur par l'opérateur donneur, voire par l'opérateur attributaire, si celui-ci est distinct du donneur.
b) Les méthodes de tarification
Les coûts supportés par l'opérateur donneur et l'opérateur attributaire (si celui-ci est distinct) lors de la mise en œuvre de la conservation des numéros sortants et recouvrables par les FAS associés varient considérablement en fonction du mode de traitement des commandes auquel l'opérateur receveur recourt. En particulier, un écart de coûts important existe entre les opérations de conservation du numéro sur les marchés grand public et entreprise.
Ainsi, sur le marché grand public, aucun coût direct variable lié au traitement efficace d'une demande de conservation du numéro n'est a priori identifiable ; néanmoins, la mise à disposition d'un relevé d'identité opérateur associé au numéro de téléphone ou des informations relatives à l'installation est susceptible d'engendrer un coût direct variable recouvrable auprès de l'opérateur receveur.
Sur le marché entreprise, ces coûts varient en fonction des options souscrites par l'opérateur receveur. Les deux options les plus couramment souscrites par les opérateurs receveurs correspondent aux opérations de « fiabilisation » et de « synchronisation téléphonique » du portage avec la livraison de l'accès. Les temps de traitements associés et les coûts horaires des techniciens peuvent être évalués sur la base de l'ensemble des informations communiquées par les opérateurs :
― la durée moyenne de traitement de l'opération de fiabilisation pour une séquence de numéros a été valorisée à 15 minutes environ ;
― la durée moyenne de traitement de l'appel de synchronisation a été valorisée à 12 minutes environ ;
― enfin, le coût horaire moyen d'un technicien chargé de ces actes a été valorisé à 46 € HT environ.
Décide :


Historique des versions

Version 1

I. - Cadre réglementaire

Aux termes de l'article L. 44 du CPCE :

« Les opérateurs sont tenus de proposer à un tarif raisonnable à leurs abonnés les offres permettant à ces derniers de conserver leur numéro géographique lorsqu'ils changent d'opérateur sans changer d'implantation géographique et de conserver leur numéro non géographique, fixe ou mobile, lorsqu'ils changent d'opérateur tout en demeurant en métropole, dans un même département d'outre-mer, à Mayotte ou à Saint-Pierre-et-Miquelon. Les opérateurs prévoient les dispositions nécessaires dans les conventions d'accès et d'interconnexion à des tarifs reflétant les coûts correspondants. »

Ainsi, les opérateurs ont l'obligation légale de fixer, pour la mise en œuvre de la conservation du numéro fixe, des tarifs orientés vers les coûts.

L'Autorité a la possibilité de préciser, en tant que de besoin, les mécanismes de recouvrement, de tarification et de comptabilisation des coûts relatifs à la conservation du numéro. En effet, l'article D. 406-19 du CPCE dispose que :

« III. ― Les opérateurs qui fournissent des prestations à d'autres opérateurs au titre de la conservation des numéros doivent être en mesure de démontrer que les tarifs d'accès et d'interconnexion associés reflètent les coûts correspondants. L'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes peut demander à ces opérateurs de justifier intégralement leurs tarifs et, si nécessaire, en exiger l'adaptation.

IV. - Pour la mise en œuvre du III du présent article, l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes précise, en tant que de besoin, les mécanismes de recouvrement des coûts, les méthodes de tarification et les méthodes de comptabilisation des coûts, qui peuvent être distinctes de celles appliquées par l'opérateur. Elle peut également prendre en compte les prix en vigueur sur les marchés comparables en France ou à l'étranger. Elle veille à ce que les méthodes retenues promeuvent l'efficacité économique, favorisent une concurrence durable et optimisent les avantages pour le consommateur. Elle veille également à assurer une rémunération raisonnable des capitaux employés, compte tenu du risque encouru. »

La présente décision, adoptée sur le fondement des dispositions de l'article L. 36-6 de ce même code, a pour objet de préciser certaines règles concernant les droits et obligations afférents à ces opérateurs, dans le cadre de la mise en œuvre de la prestation de la conservation du numéro fixe.

L'Autorité, en adoptant cette décision, a pour objectif d'œuvrer, dans le cadre de ses prérogatives, d'une part, à la mise en place d'un mécanisme de recouvrement des coûts et, d'autre part, à la mise en œuvre des méthodes de tarification et de comptabilisation concernant la conservation du numéro fixe.

II. - Le processus de conservation du numéro fixe

a) Les interactions entre les opérateurs

La décision n° 2009-0637 de l'Autorité (1) précise les modalités d'application de la conservation des numéros fixes et rappelle notamment le principe de simple guichet selon lequel l'abonné mandate son nouvel opérateur (ci-après « opérateur receveur ») pour qu'il réalise l'ensemble des démarches administratives relatives à sa demande de conservation du numéro, particulièrement la transmission de la demande à son ancien opérateur (ci-après « opérateur donneur »), laquelle vaut demande de résiliation du contrat qui lie celui-ci à l'abonné. L'opérateur receveur est également chargé d'informer l'opérateur auquel la ressource de numérotation a été attribuée (ci-après « opérateur attributaire »), si celui-ci est différent de l'opérateur donneur, ainsi que les opérateurs tiers non directement impliqués dans la mise en œuvre de la conservation du numéro fixe.

La mise en œuvre de la prestation de conservation du numéro fixe nécessite ainsi la coordination de plusieurs acteurs : les opérateurs receveur, donneur, attributaire, mais également un opérateur d'accès, lorsque la demande de conservation du numéro fixe est associée à une commande d'accès. En effet, dans ce dernier cas, la synchronisation entre la livraison de l'offre d'accès et de services qu'il supporte et la mise en œuvre de la conservation du numéro est déterminante.

Enfin, plus globalement, l'ensemble des opérateurs de téléphonie, fixe ou mobile, sont concernés par le portage du numéro car, selon l'article 13 de la décision n° 2009-0637 susvisée, les opérateurs appelants sont tenus de respecter la même qualité de service pour les communications à destination des numéros fixes et mobiles, qu'ils soient portés ou non. Ainsi les opérateurs sont tenus de prendre toutes les dispositions nécessaires pour permettre l'acheminement des appels à destination du numéro fixe porté.

Outre les acteurs cités ci-dessus, un opérateur peut choisir de déléguer à une société tierce, sous sa responsabilité, tout ou partie des actions nécessaires à la mise en œuvre de la conservation du numéro fixe.

L'Autorité souhaite par ailleurs rappeler que, conformément à l'article 11 de la décision n° 2009-0637 : « Les opérateurs peuvent recourir à une entité commune pour faciliter l'échange de flux d'information entre opérateurs dans la mesure où les prestations fournies par cette entité sont conformes aux obligations résultant du code des postes et des communications électroniques et des décisions prises pour son application.

Dans ce cas, les opérateurs veillent à ce que les prestations fournies par l'entité commune respectent notamment les principes de reflet des coûts et de non-discrimination et ne créent pas d'obstacle artificiel au libre exercice d'une concurrence loyale entre opérateurs. »

Plusieurs opérateurs ont ainsi créé en 2009 l'association de la portabilité des numéros fixes (ci-après « APNF ») dont les objectifs initiaux étaient de constituer et exploiter la base de données de référence des numéros portés fixes, de permettre à ses membres d'alimenter cette base de données et d'informer l'ensemble des opérateurs de leurs opérations de portage, conformément à l'article 7 de la décision n° 2009-0637. Par ailleurs, l'APNF a mis en place depuis 2010 un protocole d'échanges interopérateurs pour le traitement des demandes de conservation du numéro, commun à l'ensemble de ses membres.

L'Autorité estime qu'à moyen terme la centralisation par l'APNF de la gestion du processus de conservation des numéros fixes, complexe par nature, représenterait une solution efficace, à l'image du rôle joué par le groupement d'intérêt économique entité de gestion de la portabilité (« GIE EGP ») en ce qui concerne la conservation des numéros mobiles. Une telle centralisation nécessiterait néanmoins une bonne articulation entre les processus propres à l'entité commune et les processus de chaque opérateur, notamment de production de l'accès, et impliquerait notamment un travail de spécification et de synchronisation qui engagerait les acteurs.

b) Les différentes étapes du processus

Les différentes étapes de la mise en œuvre de la conservation du numéro fixe telle que décrite dans la décision n° 2009-0637 sont les suivantes :

1. L'abonné consulte gratuitement sur son espace client accessible sur internet ou sur sa facture les informations mises à disposition par son opérateur actuel (opérateur donneur) (2) afin de connaître le détail de son installation :

― sur le marché entreprise : ensemble des numéros de sélection directe à l'arrivée (SDA) associés au(x) numéro(s) d'identification de son installation (NDI ou « tête de ligne ») ;

― sur le marché grand public : ensemble des numéros associés à son installation ; les opérateurs fixes travaillent par ailleurs à la mise en œuvre d'un relevé d'identité opérateur (RIO) associé à chaque numéro de téléphone, à l'instar du RIO sur le marché mobile, à des fins de fiabilisation de la demande de portage.

2. L'abonné souscrit un contrat auprès de l'opérateur receveur avec demande de conservation d'un ou de plusieurs numéros fixes.

3. L'opérateur receveur transmet, selon les délais précisés dans la décision susvisée, la demande de conservation du numéro à l'opérateur donneur et à l'opérateur attributaire (3), lorsque celui-ci est distinct (la conservation du numéro est alors qualifiée de « subséquente »).

4. L'opérateur donneur étudie puis confirme ou infirme l'éligibilité de la demande. Par ailleurs, sur demande de l'opérateur receveur, l'opérateur donneur peut également réaliser une opération dite de fiabilisation des informations relatives à l'installation de l'abonné sur le marché entreprise ou transmettre l'identification de l'accès associé au numéro de téléphone sur le marché grand public (4) afin de limiter les risques de changements de ligne non sollicités (CLNS).

5. L'opérateur receveur commande un accès à l'opérateur d'accès.

6. L'opérateur receveur informe les opérateurs tiers de la prévision de portage (cette action est réalisée via une annonce de prévision à l'APNF (5).

7. Les opérateurs tiers ayant opté pour un acheminement des appels en routage indirect temporaire mettent à jour leurs tables de routage.

8. L'opérateur d'accès annonce à l'opérateur receveur la livraison de l'accès.

9. L'opérateur receveur demande à l'opérateur donneur et éventuellement à l'opérateur attributaire, si celui-ci est distinct, l'activation du portage.

10. L'opérateur donneur et éventuellement l'opérateur attributaire, si celui-ci est distinct, met(tent) en œuvre le portage puis rend(ent) compte de l'opération à l'opérateur receveur.

11. L'opérateur receveur informe les opérateurs tiers de la réalisation du portage (cette action est réalisée via une annonce de réalisation à l'APNF).

12. Les opérateurs tiers ayant opté pour un acheminement des appels en routage direct mettent à jour leurs tables de routage.

13. L'opérateur donneur résilie le contrat de l'abonné et effectue les actions liées à cette résiliation : mise à jour des bases de données internes techniques et commerciales, mise à jour de l'annuaire universel, etc.

En pratique, un même opérateur peut cumuler plusieurs rôles et ainsi dégager certaines synergies en coordonnant au mieux les étapes décrites ci-dessus. Par exemple, sur le marché grand public, les commandes de conservation du numéro fixe sont, dans une majorité des cas, réalisées conjointement à une commande d'accès (dégroupage ou ADSL nu). Dans cette configuration, l'opérateur d'accès peut être à la fois opérateur d'accès, opérateur attributaire du numéro à porter, voire opérateur donneur.

La conservation du numéro peut, dans ce cas, être proposée à l'opérateur receveur comme une option ajoutée au processus préexistant de production d'accès. Dans cette configuration, l'opérateur d'accès synchronise la mise en œuvre du portage au plus près de la production de l'accès, conformément à la décision n° 2011-0668 de l'Autorité en date du 14 juin 2011.

c) La typologie des processus de conservation du numéro fixe

Il apparaît que les conservations du numéro interviennent principalement selon quatre types de processus (deux pour le marché grand public et deux pour le marché entreprise) :

― les conservations du numéro grand public groupées avec une commande d'accès (dégroupage ou ADSL nu) ;

― les conservations du numéro « sèches » sur le marché grand public (c'est-à-dire non groupées avec une commande d'accès ; une commande d'accès peut avoir lieu en parallèle selon un processus de commande distinct du processus de conservation, synchronisé par l'opérateur receveur) ;

― les conservations du numéro « sèches » sur le marché entreprise, synchronisées par l'opérateur receveur (6) par un appel téléphonique de ce dernier à l'opérateur donneur (et éventuellement l'opérateur attributaire si celui-ci est distinct) et incluant une demande de « fiabilisation » de la liste des numéros transmis par l'opérateur receveur à l'opérateur donneur, qui consiste en l'identification, par l'opérateur donneur, de l'intégralité des numéros rattachés à la tête de ligne dont la conservation est demandée par l'opérateur receveur ;

― les conservations du numéro « sèches » sur le marché entreprise, synchronisées par l'opérateur receveur par un appel téléphonique de ce dernier auprès de l'opérateur donneur (et éventuellement l'opérateur attributaire si celui-ci est distinct) et n'incluant pas une demande de « fiabilisation » auprès de l'opérateur donneur.

III. - Les mécanismes de recouvrement des coûts induits

par la mise en œuvre de la prestation de conservation du numéro fixe

a) La typologie des coûts induits

La mise en œuvre de la fonctionnalité de conservation du numéro fixe se traduit par de nombreuses modifications ou adaptations des systèmes d'information existants et des processus internes des opérateurs. L'ensemble des grands postes de coûts des opérateurs sont donc concernés par la conservation du numéro. Ces postes de coûts sont les suivants :

― les coûts de systèmes d'information ;

― les coûts de réseau ;

― les coûts commerciaux.

La délimitation précise de l'ensemble des charges découlant de la mise en œuvre de l'obligation de conservation du numéro est particulièrement complexe. Certains coûts de conservation des numéros font ainsi partie intégrante de coûts d'investissement et d'exploitation de l'opérateur, sans qu'il soit pour autant possible de mesurer précisément l'écart avec les coûts qui auraient été supportés si cette fonctionnalité n'était pas obligatoire. Les systèmes d'information auraient été relativement moins complexes, les choix d'architecture peut-être différents. Par ailleurs, comme évoqué précédemment, un même opérateur peut dégager certaines synergies en coordonnant les traitements liés à la conservation du numéro fixe avec d'autres systèmes n'ayant pas de rapport direct avec cette fonctionnalité, par exemple avec la chaîne de production des accès.

Pour autant, certains coûts de mise en œuvre de la conservation des numéros sont directement observables car strictement spécifiques à la mise en œuvre de cette fonctionnalité.

L'ensemble des systèmes mis en œuvre par un opérateur pour respecter l'obligation de conservation du numéro lui permet de remplir les trois rôles principaux d'opérateur donneur, receveur et attributaire.

Certains des coûts associés à ces systèmes sont clairement identifiables et affectables à chacun de ces rôles, mais la plupart d'entre eux ne le sont pas ; par exemple, sur le marché entreprise, le coût de la mise à disposition d'un technicien le jour du portage pour synchroniser le portage avec l'opérateur receveur par voie téléphonique est attribuable au rôle d'opérateur donneur (ou d'opérateur attributaire, lorsque celui-ci est distinct). Ainsi d'autres coûts sont joints pour l'ensemble des trois rôles : par exemple le coût de conception et de gestion du projet de déploiement des systèmes de conservation du numéro ne peut être alloué qu'à l'ensemble des trois fonctions. Enfin, de nombreux coûts induits sont des postes de coûts qui découlent de l'activité générale d'opérateur indépendamment de l'obligation de conservation du numéro.

En outre, l'adaptation de l'organisation de l'opérateur à l'obligation de conservation du numéro peut être l'occasion d'introduire de manière simultanée d'autres modifications d'organisation indépendantes de l'obligation de conservation du numéro tout en mutualisant un certain nombre de coûts à cette occasion.

b) Les possibilités théoriques de recouvrement des coûts

Les coûts subis par un opérateur pour permettre la mise en œuvre de la conservation du numéro peuvent être recouvrés théoriquement selon les trois modes suivants, non exclusifs les uns des autres :

― mode 1 : auprès de l'abonné qui fait une demande de conservation du numéro, via un tarif spécifique et explicite de l'offre de conservation du numéro ;

― mode 2 : par la facturation d'une prestation de « conservation du numéro » aux autres opérateurs à la suite d'une souscription d'un abonné avec conservation du numéro auprès du nouvel opérateur ;

― mode 3 : au titre de son activité générale d'opérateur, via ses tarifs de détails (frais d'accès au service, abonnement mensuel, tarif des communications électroniques, etc.). Le coût reste à sa charge et est finalement supporté par l'ensemble de ses abonnés sans tarification explicite et identifiée de cette prestation.

Il convient néanmoins d'apprécier la pertinence de chacune de ces sources de recouvrement en fonction du rôle que joue l'opérateur dans l'opération de mise en œuvre de la conservation du numéro.

c) Les possibilités de recouvrement pour chaque rôle

i) Les modes de recouvrement des coûts de l'opérateur receveur

L'opérateur receveur offre à son client la possibilité de conserver son numéro fixe. Cette prestation lui permet d'acquérir de nouveaux abonnés et ainsi de faciliter son activité commerciale de fournisseur de services de communications électroniques.

La mise en œuvre de la conservation du numéro se faisant au bénéfice de l'opérateur receveur, un recouvrement des coûts auprès des autres opérateurs (mode 2) n'apparaît pas justifié.

L'opérateur peut recouvrer auprès de son nouvel abonné des coûts générés par le portage du numéro demandé (mode 1). Toutefois, et même si l'opérateur receveur est naturellement incité à pratiquer une tarification raisonnable afin de ne pas décourager l'arrivée de nouveaux clients, ce mécanisme est encadré par l'article L. 44 du CPCE qui dispose que :

« Les opérateurs sont tenus de proposer à un tarif raisonnable à leurs abonnés les offres permettant à ces derniers de conserver leur numéro [...] non géographique, fixe ou mobile [...]. »

De manière générale, la prestation de conservation du numéro fixe n'est pas facturée aux abonnés sur le marché grand public.

L'opérateur peut également recouvrer ses coûts via son activité générale (mode 3).

ii) Les modes de recouvrement des coûts de l'opérateur donneur

Parmi les trois possibilités théoriques de recouvrement précitées, le recouvrement auprès de l'abonné qui fait une demande de conservation du numéro (mode 1) est exclu par le cadre réglementaire ; en effet, l'article D. 406-19 du CPCE prévoit en son premier alinéa que « l'opérateur donneur ne peut facturer les coûts de portage à l'abonné ». Ainsi, l'opérateur donneur ne peut faire payer un abonné qui résilie son contrat dans le cadre d'une demande de conservation du numéro.

L'opérateur peut recouvrer ses coûts partiellement en sa qualité d'opérateur donneur via la facturation d'une prestation de « conservation du numéro sortante » (mode 2). Dans ce cas, il apparaît pertinent que la facturation de cette prestation soit faite à l'opérateur qui est à l'origine de la demande de conservation du numéro, c'est-à-dire l'opérateur receveur. Toutefois, l'article L. 44 du CPCE précise : « Les opérateurs prévoient les dispositions nécessaires dans les conventions d'accès et d'interconnexion, à des tarifs reflétant les coûts correspondants ». Ainsi, les tarifs de la prestation de « conservation du numéro sortante » sont orientés vers les coûts.

L'opérateur peut également recouvrer ses coûts via son activité générale (mode 3), l'opérateur est soumis à la pression du jeu concurrentiel et est donc naturellement incité à modérer ses tarifs.

iii) Les modes de recouvrement des coûts de l'opérateur attributaire

Parmi les trois possibilités théoriques précitées, le recouvrement auprès de l'abonné (mode 1) ne semble pas possible dès lors que la demande de conservation du numéro peut s'inscrire dans le cadre d'une conservation du numéro subséquente, c'est-à-dire dans le cas où l'opérateur attributaire n'est pas l'opérateur donneur et n'a donc pas de lien contractuel direct avec l'abonné (7).

L'opérateur peut recouvrer ses coûts partiellement en sa qualité d'opérateur attributaire via la facturation d'une prestation de « conservation du numéro attributaire » (mode 2). Dans ce cas, il apparaît pertinent que la facturation de cette prestation soit faite à l'opérateur qui est à l'origine de la demande de conservation du numéro, c'est-à-dire l'opérateur receveur.

L'opérateur peut également recouvrer ses coûts via son activité générale (mode 3). Il est soumis à la pression du jeu concurrentiel et est donc naturellement incité à modérer ses tarifs.

IV. - Les principes de comptabilisation

des coûts recouvrables auprès de l'opérateur receveur

L'Autorité estime nécessaire de préciser les méthodes permettant de recouvrer les coûts induits par la fonctionnalité de conservation du numéro fixe par les opérateurs en leur qualité d'opérateur donneur et/ou attributaire vis-à-vis d'un opérateur receveur au regard de trois objectifs majeurs énoncés à l'article D. 406-19 du CPCE :

― promouvoir l'efficacité économique ;

― favoriser une concurrence durable ;

― optimiser les avantages pour le consommateur.

a) Promouvoir l'efficacité économique

Afin de promouvoir l'efficacité économique, les coûts pertinents induits par le mécanisme de conservation des numéros fixes doivent respecter le principe d'efficacité ; ainsi les inefficacités éventuelles d'un opérateur ne peuvent être prises en compte dans la formation du tarif de conservation du numéro. Les coûts pertinents sont donc les coûts directement liés au processus de conservation du numéro fixe d'un opérateur efficace mettant en œuvre le processus de conservation du numéro tel que précisé par la décision n° 2009-0687 susvisée.

b) Favoriser une concurrence durable

Dans un marché déjà développé, la concurrence entre les acteurs ne peut être durable que si ce marché est suffisamment fluide de sorte que les opérateurs aient une véritable incitation à être compétitifs pour tenter de conquérir de nouveaux clients, mais aussi pour conserver leurs propres abonnés. Sans cette fluidité, les opérateurs risqueraient au contraire d'être incités à « exploiter » une base d'abonnés captifs.

Parmi les conditions essentielles de l'émergence d'une concurrence durable, le faible niveau de barrière à l'entrée et des coûts de changement d'opérateur pour les utilisateurs finals peuvent être cités. Au cas d'espèce, les coûts d'acquisition de clients par les nouveaux entrants doivent être proportionnés de manière à favoriser une concurrence saine entre les différents acteurs. Des tarifs trop élevés constitueraient en effet une barrière à l'entrée trop importante pour les nouveaux entrants et induiraient des coûts de changement d'opérateur plus élevés pour les clients finals, ce qui limiterait la dynamique concurrentielle.

c) Optimiser les avantages pour le consommateur

La pratique de tarifs élevés pour la mise en œuvre de la conservation du numéro fixe pourrait inciter les opérateurs receveurs à en répercuter les coûts sur les nouveaux abonnés. Ces coûts de changement réduiraient la fluidité du marché, ce qui nuirait au jeu concurrentiel.

Par ailleurs, l'Autorité observe que proposer aux clients la possibilité de conserver leur numéro est une obligation pour chaque opérateur envers l'ensemble de ses abonnés, que ceux-ci décident de faire jouer ce droit, ou non. Cette obligation est de nature « symétrique », i.e. elle s'impose au titre des règles liées à la déclaration d'opérateur et bénéficie à l'ensemble des utilisateurs finals. Les coûts liés à la conception, la modification ou la maintenance des mécanismes et des processus d'un opérateur pour rendre possible la conservation du numéro sont donc supportés par chaque opérateur pour ses propres abonnés et les coûts qu'il encourt à ce titre dépendent principalement du nombre d'abonnés qu'il possède (8).

d) Application des principes

Le partage des coûts induits par la conservation des numéros entre facturation à l'opérateur receveur et recouvrement via l'activité générale de l'opérateur doit respecter les principes décrits précédemment. En particulier, il découle de ces principes que :

― le coût devrait être établi selon une estimation du coût efficace du processus de conservation du numéro ;

― le coût facturé par l'opérateur donneur à l'opérateur receveur devrait rester suffisamment faible pour favoriser une concurrence durable et optimiser les avantages pour le consommateur ;

― les coûts nécessaires pour rendre possible la conservation du numéro découlent d'une obligation de chaque opérateur envers ses propres abonnés indépendamment de l'exercice éventuel de ce droit.

Trois méthodes de comptabilisation des coûts différentes peuvent être utilisées pour préciser la part des coûts induits par la conservation des numéros qu'il est pertinent de facturer à l'opérateur receveur :

― méthode de comptabilisation en coût direct et variable : seuls les coûts directs variables sont pris en compte, soit les coûts directement liés au traitement d'une demande additionnelle de conservation du numéro fixe ;

― méthode de comptabilisation en coût incrémental : seuls les coûts directs engendrés par la mise en place de la prestation de conservation du numéro fixe sont pris en compte. Il s'agit des coûts d'exploitation et de maintien des systèmes mis en place pour permettre les traitements de conservation du numéro fixe ;

― méthode de comptabilisation en coût complet : selon cette méthode, l'intégralité des coûts de l'entreprise sont alloués sur ses différentes activités et produits. Ces coûts incluent tous les coûts directs et indirects liés à la prestation de conservation du numéro fixe ainsi qu'une part de coûts joints et coûts communs.

Les trois méthodes sont résumées dans le schéma suivant :

Vous pouvez consulter le tableau dans le

JOn° 209 du 08/09/2012 texte numéro 39

Par application des principes détaillés ci-dessus :

― lorsqu'un client décide d'exercer son droit à la conservation du numéro et demande le portage effectif de son numéro, seuls les coûts directs et variables liés au traitement de cette demande peuvent être facturés à l'opérateur receveur par l'opérateur donneur et l'opérateur attributaire (si celui-ci est distinct). Ils sont alors estimés en référence aux coûts d'un opérateur efficace mettant en œuvre le processus de conservation du numéro ;

― en revanche, tous les autres coûts (coûts fixes, directs et indirects, coûts d'investissement, coûts d'exploitation, quote-part des coûts joints et des coûts communs) encourus par un opérateur donneur et par un opérateur attributaire (si celui-ci est distinct) doivent rester à la charge de ces derniers, indépendamment de l'exercice de ce droit par les abonnés. Ces coûts sont recouvrés sur son activité générale et, in fine, sur l'ensemble des abonnés qui bénéficient de la possibilité de conserver leur numéro.

V. - Les méthodes de comptabilisation des coûts recouvrables

dans le cadre de la facturation d'une prestation à l'opérateur receveur

a) Les coûts liés à la conservation du numéro fixe recouvrables par l'opérateur donneur

Dans le cas des opérations de conservation du numéro groupées avec une commande d'accès sur le marché grand public, la mise en œuvre de la prestation constitue une option de la prestation d'accès (dégroupage ou ADSL nu). Ce processus est totalement automatisé et n'implique donc a priori aucune action manuelle de la part de l'opérateur donneur.

Aucun coût direct variable lié à la demande de conservation du numéro n'a été identifié pour ces opérations.

Dans le cas des opérations de conservation du numéro « sèches » sur le marché grand public, c'est-à-dire sans être groupées avec une commande d'accès (i.e. une commande d'accès peut avoir lieu en parallèle), la conservation du numéro est partiellement automatisée, dans la mesure où elle peut supposer une opération manuelle de saisie de la commande de conservation du numéro dans les systèmes de résiliation technique et commerciale de l'opérateur donneur. La vérification de l'éligibilité de la demande de portage par l'opérateur peut également être accompagnée de la transmission de la référence de l'accès associé au numéro ou de la vérification de la concordance entre le relevé d'identité opérateur associé au numéro fixe, dès lors que celui-ci sera effectif, afin de limiter les risques de changements de ligne non sollicités (CLNS). Les coûts liés à l'acte de saisie manuelle devraient être exclus du périmètre des postes de coûts directs variables recouvrables par l'opérateur donneur auprès de l'opérateur receveur, en ce qu'ils résultent d'un processus pouvant être en grande partie automatisé et ainsi gagner en efficacité. En revanche, les coûts liés à la mise à disposition d'un relevé d'identité opérateur associé au numéro de téléphone ou des informations relatives à l'installation peuvent être inclus dans ce périmètre.

Enfin, dans le cas des opérations de conservation du numéro « sèches » sur le marché entreprise, la mise en œuvre de la conservation du numéro est partiellement automatisée et, à la suite d'une demande de conservation des numéros « sèche » sur le marché entreprise, deux actes manuels principaux ont été identifiés, lesquels engendrent des coûts directs et variables :

L'opération dite « de fiabilisation » de la séquence de numéros. Cet acte, préalable au portage des numéros de l'opérateur donneur vers l'opérateur receveur et réalisé en option, consiste en l'identification par l'opérateur donneur de l'intégralité des numéros rattachés à la tête de ligne dont la conservation est demandée par l'opérateur receveur.

L'acte de fiabilisation est un élément significatif garantissant la qualité de service dont bénéficient les abonnés du marché entreprise en ce qui concerne la prestation de conservation du numéro fixe.

Néanmoins, les opérateurs sont tenus de mettre à disposition de leurs abonnés la liste exhaustive des numéros fixes qui ont été affectés ou réservés dans le cadre de leur contrat (9). Un respect général de cette obligation ainsi que les travaux engagés par le secteur pour fiabiliser les commandes devraient conduire à rendre l'option de fiabilisation de moins en moins nécessaire. Cette prestation pourra toujours être proposée en tant qu'option, afin de garantir un confort et une qualité de service accrue à l'opérateur receveur et donc à son abonné. Sa facturation apparaît pertinente sous réserve que l'opérateur mette effectivement à disposition de son abonné les informations relatives à son installation.

L'appel téléphonique de synchronisation entre l'opérateur receveur et l'opérateur donneur le jour du « portage » effectif des numéros. Cet acte, proposé le plus souvent en option, répond à un souci d'efficacité de l'opération de conservation des numéros et est nécessaire afin de s'assurer que le transfert des numéros de la part de l'opérateur donneur et leur réception de la part de l'opérateur receveur sont parfaitement synchronisés. La coordination entre les opérateurs receveur et donneur doit permettre la bonne mise en œuvre de la conservation du numéro.

Ces deux options sont aujourd'hui souscrites pour une grande majorité des traitements de conservations de numéros « sèches » sur le marché entreprise.

Par ailleurs, l'opérateur receveur peut demander à l'opérateur donneur de prévoir le « retour arrière » à la situation précédant la mise en œuvre du portage, en cas de problème technique lors du portage. En général, l'option de « retour arrière » sur le marché entreprise est facturée en supplément des frais d'accès au service (ci-après « FAS ») de conservation du numéro.

b) Les coûts liés à la conservation du numéro fixe recouvrables par l'opérateur attributaire

Dans le cadre de la mise en œuvre d'une conservation de numéro fixe, quel que soit le marché (grand public ou entreprise), l'opérateur attributaire est tenu :

1. De mettre à jour le routage des numéros portés dont il est l'attributaire ;

2. D'assurer le routage indirect pour le compte des opérateurs appelants qui ne réalisent pas de routage direct ;

3. De continuer à verser à l'Autorité la taxe correspondant à la ressource de numérotation qui a été portée. En effet, l'article L. 44 du CPCE prévoit que chaque attribution de ressource de numérotation donne lieu au paiement à l'Autorité d'une taxe annuelle. Cette taxe est exigible indépendamment du caractère porté ou non du numéro.

L'ensemble de ces coûts n'a pas vocation à être recouvré par les FAS de conservation du numéro fixe, dans la mesure où :

1. Il appartient à l'opérateur attributaire, tout comme à l'ensemble des opérateurs, de prendre les dispositions nécessaires pour permettre l'acheminement des appels à destination du numéro fixe porté, comme précisé par les articles 8 et 13 de la décision n° 2009-0687 ;

2. Il existe une prestation spécifique dite de « re-routage » permettant le bon acheminement de la communication auprès du réseau de l'opérateur receveur, composée notamment d'une prestation de « préfixage » des appels vers les numéros portés sortants dont il est attributaire :

― en ce qui concerne les appels vers les numéros interpersonnels portés sortant de son réseau (au format géographique commençant par 01 à 05 ou non géographique commençant par 09), cette prestation est d'ores et déjà facturée (facturation à l'appel) par l'opérateur attributaire à l'opérateur appelant ;

― en ce qui concerne les appels vers les numéros de service à valeur ajoutée (numéros en 08) portés sortant de son réseau, cette prestation était jusqu'à présent facturée (facturation à l'appel) par l'opérateur attributaire à l'opérateur receveur. Néanmoins, afin de favoriser le développement du routage direct à destination des numéros de SVA portés, les opérateurs ont acté (10) le principe d'appliquer, à partir du 1er janvier 2012 et de manière simultanée pour l'ensemble des opérateurs attributaires de numéros de SVA, la facturation de cette prestation de préfixage à l'opérateur appelant et non plus à l'opérateur receveur du numéro porté.

3. Enfin, dans la mesure où le coût correspondant à la taxe de numérotation n'est pas lié aux demandes de conservation de numéros mais au volume cumulé de numéros « portés », il ne semble pas nécessaire de le recouvrer sur chacune des demandes de conservation de numéro fixe. La refacturation par un opérateur attributaire de cette redevance aux opérateurs tiers exploitant les numéros portés semble justifiée, mais cette prestation devrait faire l'objet d'une facturation ad hoc et les coûts induits n'ont pas vocation à être recouvrés par les FAS de conservation du numéro fixe (11).

En revanche, dans le cas d'une conservation du numéro de type « subséquente » sur le marché entreprise, l'opérateur receveur peut choisir d'activer la mise à jour des tables de routage des numéros portés tenues par l'opérateur attributaire, au travers d'un appel téléphonique. Cette prestation, souscrite par l'opérateur receveur auprès de l'opérateur attributaire, est similaire à l'option « appel de synchronisation » mise en œuvre par l'opérateur donneur, de même qu'en cas de prestation de « retour arrière », réalisée à la demande de l'opérateur receveur. Elles visent à garantir à l'abonné une qualité optimale pour l'acheminement des appels et peut faire l'objet d'un recouvrement auprès de l'opérateur receveur (12).

Par conséquent, il apparaît que les coûts supportés par l'opérateur attributaire n'ont pas été identifiés comme devant être recouvrés au travers des frais d'accès de la prestation de conservation du numéro fixe, à l'exception des coûts directs et variables relatifs au temps de traitement de l'appel de synchronisation ou de « retour arrière » par le personnel de l'opérateur attributaire, sous réserve que cette option soit souscrite par l'opérateur receveur.

c) Traitement d'une demande de conservation du numéro hors processus efficace

Le processus efficace décrit précédemment est largement automatisé et fait appel à des protocoles d'échange d'information mis en œuvre par la majorité des opérateurs. Toutefois, du fait de l'opérateur receveur, un processus spécifique, par exemple un processus manuel, peut être imposé à l'opérateur donneur. Dans ce cas, des coûts directs et variables différents peuvent apparaître et ainsi faire l'objet d'une tarification particulière dès lors que l'opérateur donneur y a recours du fait de l'opérateur receveur.

Une telle tarification peut par ailleurs prendre en compte une majoration visant à encourager l'opérateur receveur à adopter les outils les plus efficaces.

VI. - Les méthodes de tarification

a) La structure tarifaire de la prestation de conservation du numéro fixe

La structure tarifaire actuellement proposée par les opérateurs pour la prestation de conservation du numéro fixe est généralement constituée :

― d'une partie fixe dépendant du mode de traitement de la demande ;

― d'une partie variable en fonction du nombre de numéros concernés par la demande.

L'inducteur de coûts dans les actes manuels de fiabilisation et de traitement de l'appel de synchronisation du portage semble être le nombre de séquences de numéros consécutifs à traiter plutôt que le nombre de numéros contenus dans ces séquences. D'une part, un appel permet de coordonner le portage d'une séquence complète de numéros consécutifs, quelle que soit sa taille et, d'autre part, l'opération de fiabilisation nécessite des recherches par l'opérateur donneur sur l'installation de l'abonné dont la durée ne dépend pas de la taille de la séquence concernée.

Par ailleurs, il semble pertinent que les FAS de conservation du numéro fixe soient facturés à l'opérateur receveur par l'opérateur donneur, voire par l'opérateur attributaire, si celui-ci est distinct du donneur.

b) Les méthodes de tarification

Les coûts supportés par l'opérateur donneur et l'opérateur attributaire (si celui-ci est distinct) lors de la mise en œuvre de la conservation des numéros sortants et recouvrables par les FAS associés varient considérablement en fonction du mode de traitement des commandes auquel l'opérateur receveur recourt. En particulier, un écart de coûts important existe entre les opérations de conservation du numéro sur les marchés grand public et entreprise.

Ainsi, sur le marché grand public, aucun coût direct variable lié au traitement efficace d'une demande de conservation du numéro n'est a priori identifiable ; néanmoins, la mise à disposition d'un relevé d'identité opérateur associé au numéro de téléphone ou des informations relatives à l'installation est susceptible d'engendrer un coût direct variable recouvrable auprès de l'opérateur receveur.

Sur le marché entreprise, ces coûts varient en fonction des options souscrites par l'opérateur receveur. Les deux options les plus couramment souscrites par les opérateurs receveurs correspondent aux opérations de « fiabilisation » et de « synchronisation téléphonique » du portage avec la livraison de l'accès. Les temps de traitements associés et les coûts horaires des techniciens peuvent être évalués sur la base de l'ensemble des informations communiquées par les opérateurs :

― la durée moyenne de traitement de l'opération de fiabilisation pour une séquence de numéros a été valorisée à 15 minutes environ ;

― la durée moyenne de traitement de l'appel de synchronisation a été valorisée à 12 minutes environ ;

― enfin, le coût horaire moyen d'un technicien chargé de ces actes a été valorisé à 46 € HT environ.

Décide :