2.5.2. Commentaires de l'Autorité
L'Autorité relève que l'Autorité de la concurrence partage dans son ensemble la délimitation des marchés pertinents effectuée, et en particulier la non-inclusion des offres de SMS Push destinées aux éditeurs de services, relevant du marché de détail, dans les marchés de gros pertinents.
En ce qui concerne les applications embarquées sur smartphones, l'Autorité partage avec l'Autorité de la concurrence le constat de leur développement. Néanmoins elle estime que ces applications ne sont pas substituables aux SMS, même à l'horizon du présent cycle d'analyse.
En ce qui concerne l'usage interpersonnel du SMS, l'échange de messages via des applications embarquées sur smartphones, comme par exemple What'sApp sur iPhone, nécessitent à la fois de la part de l'émetteur et de la part du receveur du message la possession d'un smartphone, comme l'indique l'Autorité de la concurrence, ainsi que le téléchargement préalable de l'application et la couverture en 3G au moment de l'échange.
Comme le mentionne l'Autorité de la concurrence, le taux de pénétration des smartphones est aujourd'hui de l'ordre de 16 % et ne devrait pas dépasser les 50 % à l'horizon du cycle d'analyse. Les smartphones sont en effet des terminaux relativement onéreux et généralement associés à des forfaits de gamme supérieure. Il convient en outre de noter que ces taux concernent la métropole, la pénétration des smartphones étant plus contenue en outre-mer aujourd'hui. La probabilité que les deux correspondants soient ainsi équipés est très faible. L'Autorité estime donc, comme l'Autorité de la concurrence, que les applications embarquées, qui ne permettent l'échange de messages qu'au sein d'un groupe fermé et réduit d'utilisateurs de l'application, ne peuvent se substituer aux services SMS, qui sont 100 % interopérables. De plus, ces deux media se complètent plus qu'ils ne se concurrencent frontalement, les forfaits associés aux smartphones incluant la plupart du temps des SMS en abondance.
En ce qui concerne les usages non interpersonnels du SMS (marketing direct, livraison de contenu, notification, etc.), l'Autorité estime que les applications embarquées sur smartphones ne sont que partiellement substituables aux SMS Push du point de vue des éditeurs de services. En effet, cette substitution ne peut s'exercer que sur une partie des services et une partie des abonnés mobiles adressables.
D'une part, la délivrance d'un service via une application embarquée sur smartphone nécessite de la part du client une démarche initiale correspondant au téléchargement de l'application. Cette démarche n'a de sens pour le client que pour un service régulier auquel il est ou souhaite être abonné (ex : service d'envoi d'actualités). Or les SMS Push permettent en majorité de fournir des services ponctuels (SMS de notification, marketing, etc.) pour lesquels le téléchargement initial d'une application aurait peu de sens pour l'abonné mobile joint.
D'autre part, les services via des applications sur smartphones ne peuvent être fournis par définition qu'aux possesseurs de smartphones. Comme mentionné précédemment, ce type de terminal n'a pour l'instant qu'un taux de pénétration faible en France et qui ne devrait pas dépasser les 50 % à l'horizon du cycle d'analyse. Or, sauf dans le cas des services réguliers nécessitant un abonnement, un éditeur développant un service par SMS doit pouvoir adresser potentiellement l'ensemble des abonnés mobiles. Une application sur smartphone n'est donc pas substituable au SMS Push du point de vue de l'éditeur de services.
Il faut enfin ajouter, comme le précise l'Autorité de la concurrence que, compte-tenu des contraintes différentes imposées par les équipementiers pour le développement d'une application sur smartphone, les éditeurs de services devraient développer plusieurs applications différentes pour adresser l'ensemble des possesseurs de smartphones. A l'inverse, le SMS reste un mode de communication 100 % interopérable.
L'Autorité entend cependant suivre le développement des smartphones et des applications embarquées comme l'y invite l'Autorité de la concurrence.
2.6. Prise en compte des observations de la Commission européenne
sur la définition des marchés pertinents
2.6.1. Observation de la Commission européenne
Dans ses observations en date du 16 juillet 2010, la Commission européenne explique qu'elle « ne conteste pas, à ce stade, que la terminaison pour les services de SMS Push relève des marchés pertinents de la terminaison d'appel SMS vu que, actuellement, les éditeurs de services et les agrégateurs peuvent être confrontés, en matière de terminaison, aux mêmes goulots d'étranglement que les opérateurs de réseau souhaitant faire aboutir des SMS interpersonnels ».
En revanche, la Commission européenne rejoint l'Autorité de la concurrence sur le fait que la diffusion des smartphones peut impacter les moyens de fourniture de contenu aux abonnés mobiles et donc les conditions des offres de gros de terminaison de SMS de contenu en précisant que « l'adoption d'équipements terminaux mobiles, qui permettent de recevoir du contenu par des moyens pouvant remplacer les SMS ― messages électroniques acheminés sur smartphones par exemple ― peut aussi restreindre la fourniture en gros des prestations de terminaison pour les services SMS Push. Ces derniers pourraient finir par être remplacés si les fournisseurs de services envoyaient du contenu par message électronique plutôt que par SMS. La diffusion future des Smartphones aura probablement une moindre influence sur les conditions concurrentielles de la terminaison des SMS interpersonnels étant donné que les deux parties devraient utiliser le message électronique au lieu du SMS, ce qui exige l'équipement approprié de part et d'autre. En revanche, la fourniture de contenu aux abonnés des ORM n'est conditionnée que par l'équipement du destinataire. Aussi la diffusion des Smartphones n'aura-t-elle d'impact, à ce stade, que sur les moyens de fourniture du contenu essentiellement et, partant, sur les conditions de fourniture en gros des prestations de terminaison de SMS Push.
De plus, le développement de nouveaux modèles commerciaux concernant la fourniture de contenu aux abonnés changera peut-être les conditions commerciales de la terminaison pour le contenu acheminé par SMS. Il se peut que les contraintes du marché s'exercent différemment dans le cas où les SMS sont demandés par le destinataire dans la mesure où celui-ci paiera peut-être une partie ou la totalité du prix du service. Cela limitera l'impact du principe dit du "calling party pays” sur les marchés de gros de la terminaison pour les services de SMS Push et sensibilisera le destinataire aux tarifs de gros de la terminaison d'appel SMS pratiqués par son opérateur ».
En conclusion, la Commission européenne « invite l'ARCEP à suivre de près l'évolution de la fourniture de contenu sur appareil mobile, laquelle pourrait conduire l'ARCEP à ne plus inclure les marchés de gros de la terminaison pour les services de SMS Push dans les marchés pertinents de la terminaison d'appel SMS et à envisager de ne plus les soumettre à réglementation ».
2.6.2. Réponses de l'Autorité
A titre liminaire et à des fins de clarification, l'Autorité souhaite rappeler la distinction qu'elle opère entre les SMS Push dits « de détail » et les SMS Push dits « de gros ». Les premiers sont des offres commerciales relevant du marché de détail, notamment proposées par les opérateurs de réseau mobile ou les agrégateurs de SMS, et à destination d'éditeurs de services (banques, marques de distribution, etc.). Les seconds sont des offres dédiées aux acheteurs ayant le statut d'opérateur (agrégateurs de SMS, opérateurs fixes, etc.) et qui se distinguent techniquement et/ou contractuellement des offres aux éditeurs de services, comme par exemple l'offre d'acheminement de Bouygues Telecom lancée en avril 2007 et l'offre plus récente d'Orange France lancée en mars 2010.
Cette distinction étant faite, l'Autorité souhaite préciser qu'elle n'inclut pas de manière générale les services de SMS Push dans les marchés pertinents de la terminaison d'appel SMS, mais uniquement les SMS Push de gros, autrement dit les offres d'interconnexion SMS à destination d'opérateurs non mobiles.
Par ailleurs, l'Autorité souhaite rappeler que les SMS Push de gros ou offres d'interconnexion SMS à destination d'opérateurs non mobiles ne sont pas uniquement sous-jacentes à la prestation d'envoi de SMS de contenu sur le marché de détail, mais également à celle d'envoi de SMS interpersonnels fixe vers mobile ou internet vers mobile, les opérateurs fixes et FAI pouvant souscrire à ces offres de gros. La diffusion sur le marché de détail de services substituables au SMS pour l'envoi de contenu, si elle était avérée, ne remettrait donc pas automatiquement en question la pertinence d'inclure les offres d'interconnexion aux opérateurs non mobiles dans le périmètre des marchés pertinents de la terminaison d'appel SMS sur les réseaux respectifs des opérateurs mobiles.
Par ailleurs, à ce stade, et comme indiqué précédemment en réponse à l'Autorité de la concurrence, l'Autorité ne juge pas que cette évolution entraînera à l'horizon de l'analyse une substituabilité totale du SMS par des services multimedia pour l'envoi de contenu, cette substituabilité ne pouvant s'exercer notamment que sur une partie des abonnés mobiles, dans des conditions de couverture adéquates, et surtout sur une partie des services fournis par les éditeurs de contenu. L'Autorité prend cependant note du commentaire de la Commission européenne et suivra avec attention le développement des smartphones et de son impact sur l'envoi de contenu aux abonnés mobiles.
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