2.2.3.2.2. Le SMS et la voix correspondent à des services et à des usages différents
Il convient tout d'abord de rappeler qu'un SMS est composé d'au maximum 160 caractères et que sa transmission ne se fait pas en temps réel comme la voix. La durée moyenne des communications à destination d'un réseau mobile est proche de 100 secondes. Les appels de moins de 30 secondes représentent environ 45 % des appels. Bien qu'un appel téléphonique puisse être constitué d'un dialogue ou d'un quasi-monologue de l'appelant, un appel vocal (mobile-mobile ou fixe-mobile) ne peut pas, en général, se substituer à l'envoi d'un SMS.
Contrairement à la voix, le SMS instaure en effet une communication discrète en temps différé entre l'émetteur du SMS et son destinataire. En ce sens, les SMS et les appels vocaux correspondent à des services et à des usages différents.
En effet, alors que la voix instaure, par définition, une communication en temps réel entre l'appelant et l'appelé, le temps d'attente entre deux messages courts est quant à lui indéterminé et dépend de l'occupation des canaux de signalisation. Ainsi, la communication en temps différé est une caractéristique propre au SMS qui le distingue fondamentalement de la voix. Même dans le cas de très courts dialogues, voire de quasi-monologues (16), la voix diffère du SMS en ce que l'émetteur ne sait pas si le destinataire a effectivement reçu le message (son terminal peut être éteint ou allumé) et, s'il l'a reçu, à quel moment il l'a lu (17). Une substitution peut donc avoir lieu, dans le cas très particulier où l'appelant n'a pas besoin que l'appelé soit immédiatement informé, ni qu'il soit certain qu'il ait bien reçu le message, comme c'est par exemple le cas d'un message laissé sur une boîte de messagerie vocale. Mais, même dans ce cas, un appel vocal peut ne pas être un substitut du SMS comme cela est développé dans la section suivante.
En second lieu, le caractère écrit du SMS en fait le support d'une communication discrète. En effet, l'appelé mobile peut se trouver dans une situation où il ne peut s'isoler facilement, ce qui peut gêner à la fois les personnes qui se trouvent immédiatement à proximité (18) mais aussi l'appelé lui-même, voire l'appelant, qui n'ont pas forcément envie que d'autres personnes entendent leur conversation. Contrairement aux appels vocaux où l'appelant et l'appelé, en se parlant, font nécessairement du bruit, le SMS ne dérange personne et offre à ses utilisateurs un moyen extrêmement pratique pour communiquer discrètement.
Enfin, le SMS, plus qu'un simple medium, est devenu en quelques années un véritable phénomène de société, parfois source de conflits intergénérationnels. Pour une certaine classe d'âge (les moins de 17 ans), il est à la fois le support d'une identité commune, un signe de reconnaissance et le symbole d'une culture différente de celle des générations précédentes. Les nombreux débats sur l'état de la langue française (grammaire, orthographe, etc.) que suscite ce médium sont un parfait exemple de la manière dont le SMS est perçu. En utilisant des codes qui lui sont propres (smileys [19], langage phonétique, etc.), le SMS est devenu en quelques années un mode de communication à part entière qui se distingue notamment de la voix.
(16) L'appelant peut ainsi vouloir seulement communiquer une information précise du type « je pars », « j'arriverai en retard », « je suis bien arrivé... ». Le cas d'un message directement laissé sur une boîte de messagerie vocale fait l'objet d'une analyse spécifique dans la section suivante. (17) S'il le souhaite, l'émetteur du SMS a certes la possibilité de recevoir un accusé de réception lui permettant de savoir à quel moment le message a été déposé sur le terminal mobile de l'appelé. Mais, d'une part, cette fonctionnalité n'est pas généralisée à tous les terminaux et nécessite une manipulation supplémentaire (activation d'une fonction spécifique au moment d'envoyer le SMS). D'autre part, si le message a bien été reçu par le destinataire, rien ne dit à quel moment il a été effectivement lu. Il peut ainsi s'écouler un temps a priori indéterminé entre le moment où l'émetteur reçoit l'accusé de réception et le moment où le destinataire prend connaissance du message. (18) Avec le développement de la téléphonie mobile, l'usage du téléphone portable se trouve ainsi de plus en plus restreint. Il est notamment interdit dans certains lieux culturels (théâtres, cinémas, concerts, opéras...) et tend à être limité dans les transports publics (TGV, TER...) précisément pour ne pas gêner les personnes alentour. (19) Un smiley est une représentation graphique d'un visage humain sous la forme d'une suite de caractères typographiques traduisant une « émotion » : le sourire :-), l'étonnement :-o, le clin d'œil ;-), la déception :-(, etc. Sur certains terminaux il faut incliner la tête à gauche pour décrypter les yeux, le nez et la bouche ; sur d'autres terminaux, le visage apparaît automatiquement au moment de la frappe de la suite de caractères.
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