JORF n°0302 du 29 décembre 2021

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Sanction contre la société Enedis pour non-respect de la décision n° 11-38-16

Résumé Moulin du Teulel demande une sanction contre Enedis pour non-respect de la décision n° 11-38-16. Enedis n'a pas respecté les exigences techniques et a causé des préjudices à Moulin du Teulel.

Une demande de sanction, introduite par la société Moulin du Teulel, a été enregistrée le 21 juin 2019, sous le numéro 02-40-19, à l'encontre de la société Enedis ;
Elle est relative au non-respect par la société Enedis de la décision de règlement de différend n° 11-38-16 en date du 8 décembre 2017.

  1. Rappel des faits et de la procédure
    1.1. Rappel des faits

Le comité de règlement des différends et des sanctions est saisi des faits ci-après.
Il ressort des pièces du dossier que la société Moulin du Teulel, société à responsabilité limitée, immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Rodez sous le numéro 524 806 502, dont le siège social est situé 431, chemin du Teulel à Villefranche-de-Rouergue, représentée par son gérant, M. Andréas Rick, exerce une activité de production d'électricité par une centrale hydroélectrique.
Il ressort également des pièces du dossier qu'un différend est né entre la société Moulin du Teulel et la société Enedis relatif à une demande de raccordement d'une installation de production existante, appartenant à la société Moulin du Teulel, comprenant la rénovation de deux turbines existantes, l'augmentation de puissance des installations et le renouvellement du dispositif de comptage.
Dans ces conditions, la société Moulin de Teulel a saisi le comité de règlement des différends et des sanctions d'une demande de règlement de différend, assortie d'une demande de mesures conservatoires, relatives aux conditions de raccordement d'une nouvelle installation de production hydroélectrique au réseau public de distribution et au comptage de l'installation de production hydroélectrique existante.

1.2. Exposé de la procédure de règlement du différend et de la demande de mesures conservatoires
1.2.1. Exposé de la procédure de règlement du différend

Vu la demande de règlement de différend, enregistrée le 2 décembre 2015 et régularisée le 15 avril 2016 sous le numéro 11-38-16, présentée par la société Moulin du Teulel, représentée par son gérant, M. Andréas Rick.
Par une décision n° 11-38-16 du 8 décembre 2017, le comité de règlement des différends et des sanctions a décidé que :
Article 1er. - La société Enedis communiquera à la société Moulin de Teulel, avant le 8 février 2018 au plus tard, une nouvelle convention de raccordement prenant en compte la protection de découplage conforme à la norme DIN VDE 0126-1-1/A1 disposant de réglages VFR2014 et les résultats de l'étude sur la puissance transitant dans le transformateur du poste de distribution publique.
Article 2. - Le montant de la prestation de reprise d'étude n'a pas à être mis à la charge de la société Moulin du Teulel.
Article 3. - La société Enedis n'a pas régulièrement exécuté le contrat CARD-I en ce qui concerne la mise à disposition des données de comptage.
Article 4. - La société Enedis communiquera à la société Moulin de Teulel, avant le 15 janvier 2018 au plus tard, un nouveau devis pour le remplacement des dispositifs de comptage de type électromécanique en type électronique.
Article 5. - Le surplus des demandes de la société du Moulin du Teulel est rejeté.
Article 6. - La présente décision sera notifiée à la société du Moulin du Teulel et à la société Enedis. Elle sera publiée au Journal officiel de la République française. »

1.2.2. Exposé de la procédure de demande de mesures conservatoires

Vu la demande de mesures conservatoires, enregistrée le 2 décembre 2015 et régularisée le 15 avril 2016 sous le numéro 11-38-16, présentée par la société Moulin du Teulel, représentée par son gérant, M. Andréas Rick.
Vu la décision du comité de règlement des différends et des sanctions de la Commission de régulation de l'énergie en date du 17 octobre 2016 par laquelle le comité a décidé, à titre conservatoire, que l'utilisation temporaire d'une protection de découplage conforme à la norme DIN VDE 0126-1-1/A1 disposant de réglages VFR2014 pouvait être mise en œuvre dans l'installation de production hydroélectrique de la société Moulin de Teulel.
Vu la demande de sanction, enregistrée le 31 mars 2017 sous le numéro 01-40-17, présentée par la société Moulin du Teulel, représentée par son gérant, M. Andréas Rick.
Vu la décision du 26 février 2019 du membre désigné du comité de règlement des différends et des sanctions relative à la demande de sanction introduite par la société Moulin du Teulel à l'encontre de la société Enedis, enregistrée sous le numéro 01-40-17, décidant qu'il n'y avait lieu de poursuivre le gestionnaire de réseau public de distribution d'électricité.

1.3. Exposé des échanges entre la société Enedis et la société Moulin du Teulel à la suite de la décision n° 11-38-16

Vu la décision n° 11-38-16 du 8 décembre 2017 du comité de règlement des différends et des sanctions.
Les 20 et 25 février 2018, la société Moulin du Teulel a indiqué à la société Enedis qu'à la suite de la décision n° 11-38-16 du CoRDiS, plusieurs points étaient encore en cours relatifs à la transmission de la convention de raccordement, aux dédommagements pour des pertes d'exploitation et à la désinstallation d'un ancien câble.
Le 25 février 2018, la société Enedis a accusé réception du courrier électronique du même jour de la société Moulin du Teulel.
Le 17 mars 2019, la société Moulin du Teulel a enjoint à la société Enedis de se conformer à la décision du 8 décembre 2017 avant le 1er avril 2019. Elle indiquait qu'en l'absence de réponse de sa part, elle saisirait à nouveau le CoRDiS d'une demande de sanction.
Vu la demande de sanction, enregistrée le 21 juin 2019, sous le numéro 02-40-19, présentée par la société Moulin du Teulel, représentée par son gérant, M. Andréas Rick.
La société Moulin du Teulel demande au comité de règlement des différends et des sanctions de prononcer une sanction à l'encontre de la société Enedis en raison du non-respect par cette dernière de la décision n° 11-38-16 du 8 décembre 2017.
La société Moulin du Teulel soutient que la société Enedis ne s'est pas conformée à la décision du CoRDiS en ne lui transmettant ni un projet de convention de raccordement prenant en compte une protection de découplage DIN VDE 126-1-1/A1 ni l'étude sur la puissance transitant dans le transformateur du poste de distribution publique ; que, par conséquent, elle demeure raccordée au réseau public de distribution d'électricité par une installation provisoire qui ne respecte ni sa demande ni la réglementation et ce malgré des relances de sa part auprès du gestionnaire de réseau public de distribution d'électricité ; qu'enfin, cette situation lui a causé plusieurs préjudices estimés au total à au moins XX euros.

  1. Ouverture, sur le fondement des articles L. 134-25-1 et R. 134-30 du code de l'énergie, de la procédure d'instruction et les griefs retenus

Vu la décision du président du comité de règlement des différends et des sanctions, en date du 15 juillet 2019, désignant M. Nicolas Maziau membre du comité en charge de l'instruction (ci-après : le « membre désigné »), en application de l'article R. 134-30 du code de l'énergie.

2.1. Rappel de la procédure suivie par le membre désigné
2.1.1. Cadre juridique applicable

Depuis l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2020-891 du 20 juillet 2020 relative aux procédures du comité de règlement des différends et des sanctions de la Commission de régulation de l'énergie, applicable aux procédures de sanctions enregistrées à la date du 24 juillet 2020, l'article L. 134-25-1 du code de l'énergie prévoit que : « Dès réception de la demande de sanction, sauf cas d'irrecevabilité manifeste, le président du comité de règlement des différends et des sanctions désigne un membre de ce comité, titulaire ou suppléant, chargé de l'instruction avec le concours des agents de la Commission de régulation de l'énergie. / Le membre désigné peut, lorsqu'il l'estime nécessaire, entendre la personne mise en cause ou toute autre personne utile à la solution du litige. / Il peut également demander à la personne mise en cause ou toute autre personne concernée de lui donner tout renseignement ou de produire toute pièce, tout document ou toute information utile à la solution du litige. / Il peut inviter les personnes mentionnées aux deux alinéas précédents à produire des observations. / […] Il notifie les griefs. Si les faits dont il a connaissance au cours de l'instruction lui paraissent susceptibles de constituer un manquement supplémentaire, le membre désigné notifie les nouveaux griefs à la personne poursuivie ainsi qu'à toute personne concernée et recueille leurs observations ».
Aux termes de l'article L. 134-28 du code de l'énergie : « Les sanction énumérées à l'article L. 134-27 sont également encourues, sur saisine des parties au règlement de différend, du ministre chargé de l'énergie, du président de la Commission de régulation de l'énergie, d'une organisation professionnelle, d'une association agréée d'utilisateurs ou de toute autre personne concernée, lorsque le gestionnaire, l'opérateur, l'exploitant ou l'utilisateur d'un réseau, d'un ouvrage ou d'une installation ou le fournisseur d'électricité ou de gaz naturel mentionné à l'article L. 134-25 ne s'est pas conformé dans les délais requis à une décision prise par le comité en application des articles L. 134-20 et L. 134-22, sans qu'il y ait lieu de le mettre préalablement en demeure ».
Aux termes de l'article L. 134-31 du code de l'énergie : « Les sanctions sont prononcées après que la personne mise en cause, qui a reçu notification des griefs par le membre désigné en application de l'article L. 134-25-1, a été mise à même, assistée par toute personne de son choix, de consulter le dossier et de présenter ses observations écrites et, lors de la séance publique, orales ».
Aux termes de l'article R. 134-30 du code de l'énergie : « Pour chaque affaire, le président du comité de règlement des différends et des sanctions désigne un membre de ce comité chargé, avec le concours des agents de la Commission de régulation de l'énergie, de l'instruction. Le cas échéant, ce membre adresse la mise en demeure prévue à l'article L. 134-26 et notifie les griefs. Il peut ne pas donner suite à la saisine. […] ».
En outre, selon l'article 14 de la décision du 13 février 2019 portant adoption du règlement intérieur du comité de règlement des différends et des sanctions de la Commission de régulation de l'énergie, « s'il y a lieu, le membre désigné notifie les griefs, les sanctions encourues et la sanction qu'il entend proposer au comité de règlement des différends et des sanctions. Cette notification est adressée à la personne mise en cause qui dispose d'un délai ne pouvant pas être inférieur à quinze jours pour présenter au comité de règlement des différends et des sanctions ses observations écrites ».
Il résulte de ces dispositions qu'en cas de non-respect d'une décision de règlement de différend prise par le CoRDiS en application de l'article L. 134-20 du code de l'énergie, le membre désigné du comité peut notifier des griefs, sans avoir préalablement mis l'intéressé en demeure de se conformer à cette décision.

2.1.2. Echanges contradictoires antérieurs à la notification des griefs

Par un courrier en date du 30 septembre 2019, le membre désigné a communiqué à la société Enedis la demande de sanction formée par la société Moulin du Teulel à son encontre.
Par un courrier en date du 30 septembre 2019, le membre désigné a demandé à la société Moulin du Teulel de lui adresser une copie des courriers électroniques qu'elle aurait envoyés à la société Enedis afin de lui demander d'exécuter la décision de règlement de différend. Ces courriers électroniques ont été transmis le 5 octobre 2019 par la société Moulin du Teulel et communiqués à la société Enedis le 4 novembre 2019.
Par des observations enregistrées le 16 octobre 2019 et communiquées à la société Moulin du Teulel le 4 novembre 2019, la société Enedis, représentée par Me Bergerot et Me de Pouzilhac, fait valoir qu'elle a correctement exécuté la décision du CoRDiS du 8 décembre 2017, dès lors :

- que les travaux de raccordement des installations exploitées par la société Moulin du Teulel ont été terminés le 20 novembre 2015 et que les installations ont été mises en service le 27 décembre 2016, soit dès avant l'intervention de la décision du CoRDiS ;
- que ce raccordement, qui est définitif et non provisoire, prend en compte la protection de découplage conforme à la norme DIN VDE 0126-1-1/A1 disposant de réglages VFR2014, conformément à la décision du CoRDiS ;
- qu'elle a abandonné le projet de travaux de changement du poste de distribution publique et a uniquement procédé à une mutation du transformateur de XX kVA à XX kVA au sein du même poste de distribution ;
- qu'elle a remboursé la prestation de reprise d'études en ayant envoyé un chèque à la société Moulin du Teulel mais que, pour une raison inconnue, cette dernière ne l'a pas encaissé ;
- enfin, que si les « conditions particulières de la convention de raccordement » de la société Moulin du Teulel, datées du 15 février 2018, qui reprennent ces différents éléments, n'avaient jusqu'à présent pas été transmises à cette société, elles lui ont désormais été communiquées ; qu'en tout état de cause, ce « contretemps administratif » est sans incidence sur le respect de l'exécution de la décision du CoRDiS d'un point de vue technique et financier.

Le 27 octobre 2019, la société Moulin du Teulel a indiqué à la société Enedis avoir bien reçu la version 3 du CARD-I envoyée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception mais soutient qu'elle attend encore l'envoi d'un projet de convention de raccordement prenant en compte une puissance maximale de XX kVA et le détail de calcul des prix ; que, par ailleurs, elle attend encore la prise en compte de ses demandes de dédommagements et la dépose d'un ancien câble.
Par de nouvelles observations enregistrées le 27 octobre 2019 et communiquées à la société Enedis le 4 novembre 2019, la société Moulin du Teulel conclut aux mêmes fins que sa saisine, par les mêmes moyens et soutient en outre :

- que si elle a reçu le 16 octobre 2019, de la part de la société Enedis, une nouvelle version du projet de convention de raccordement prenant en compte la protection de découplage prévue par la décision de règlement de différend du CoRDiS, aucune conséquence n'en a cependant été tirée s'agissant, par exemple, du maintien d'une prestation de vérification de la protection de découplage qui n'a désormais plus lieu d'être ;
- qu'elle n'a pas été remboursée de la prestation de reprise d'étude ;
- que sa demande de bénéficier d'une puissance d'injection de XX kW n'a pas été pris en compte ;
- que la société Enedis n'a pas achevé les travaux de raccordement qui lui incombent.

Le 4 novembre 2019, la société Moulin du Teulel a relancé la société Enedis en lui demandant une réponse à la suite de son courrier électronique du 27 octobre 2019.
Le 5 novembre 2019, la société Enedis a accusé réception du courrier électronique de la société Moulin du Teulel du 27 octobre 2019.
Par de nouvelles observations enregistrées le 18 novembre 2019 et communiquées le 25 novembre 2019 à la société Moulin du Teulel, la société Enedis conclut aux mêmes fins que ses précédentes observations, par les mêmes moyens et soutient, en outre :

- qu'elle a complètement exécuté la décision du CoRDiS en transmettant un projet de convention de raccordement prévoyant la protection de découplage mentionnée dans cette décision ; que le prix de la prestation de vérification de la protection de découplage prévu dans le projet de contrat n'est pas affecté par la protection de découplage choisie par la société Moulin du Teulel ;
- que, s'agissant du remboursement de la prestation de reprise d'études, le premier chèque n'a jamais été encaissé mais qu'en tout état de cause un nouveau chèque a été envoyé à la société Moulin du Teulel par lettre recommandée ;
- que la décision du CoRDiS n'oblige pas le gestionnaire de réseau à prendre en compte une puissance de branchement de XX kW, la société Moulin du Teulel ayant modifié sa demande initiale, qui ne mentionnait qu'une puissance de XX kW ; que, par conséquent, l'étude de raccordement de la version 3 des conditions particulières de la convention de raccordement tient compte d'une puissance de XX kW ;
- que c'est en fonction de cette demande, portant sur une puissance de XX kW, qu'elle s'est bornée à modifier le transformateur en le faisant passer de XX kVA à XX kVA au sein du même poste de distribution ;
- que le dédommagement sollicité par la société Moulin du Teulel au titre de la perte d'exploitation qu'elle aurait subi est hors du champ d'application de la décision de règlement de différend du CoRDiS, lequel a rejeté les prétentions indemnitaires de la demanderesse ;
- que, depuis la mise en service de ses installations en décembre 2016, la société Moulin du Teulel peut injecter sa production sur le réseau et qu'elle n'est donc pas fondée à réclamer une indemnisation au titre de l'exploitation de ses installations ;
- que la dépose des anciennes installations ne relève pas d'une obligation issue de la décision du CoRDiS mais qu'elle va néanmoins procéder à cette intervention le 25 novembre 2019.

Par de nouvelles observations enregistrées le 18 novembre 2019 et communiquées le 25 novembre 2019 à la société Enedis, la société Moulin du Teulel conclut aux mêmes fins que par sa saisine, par les mêmes moyens et soutient, en outre :

- que contrairement à ce que prétend la société Enedis, les travaux de raccordement des installations et de désinstallation du point de livraison utilisé avant la mise en service, qui étaient prévus dans le contrat, ne sont toujours pas achevés et que l'installation existante continue, dès lors, de présenter les caractéristiques d'une installation provisoire ;
- que le projet de convention de raccordement finalement transmis par la société Enedis ne tire pas toutes les conséquences de la mise en place de la protection de découplage prévue par la décision de règlement de différend du CoRDiS ;
- que sa demande de puissance de XX kW, antérieure à la reprise d'étude annulée par le CoRDiS, est la seule qui fasse foi, dès lors que ce sont les indications erronées fournies par la société Enedis qui l'ont induite en erreur et l'ont conduite à présenter une demande de puissance d'injection de XX kW alors même que cela n'était pas justifié techniquement ;
- que la société Enedis doit, par conséquent, réaliser une nouvelle étude fondée sur une puissance de XX kW qui établira que le transformateur existant est de XX kVA et qu'il convient par la suite que la société Enedis lui propose un nouveau projet de convention de raccordement tenant compte d'une puissance d'injection de XX kW ;
- que les justifications avancées par la société Enedis pour expliquer le retard avec lequel elle lui a transmis une nouvelle proposition de convention de raccordement ne sont pas crédibles ; qu'il en est de même s'agissant de l'envoi allégué d'un chèque destiné à rembourser la prestation de reprise d'études.

Le 24 novembre 2019, la société Enedis a répondu à la société Moulin du Teulel lui indiquant, d'une part, ne pas pouvoir lui apporter de nouveaux éléments, autres que ceux mentionnés dans ses observations dans le cadre de la procédure de sanction en cours et, d'autre part, qu'elle allait recevoir une nouvelle lettre-chèque pour le remboursement de la prestation de reprise d'étude et que des travaux prévus le 25 novembre 2019 par son prestataire permettraient la dépose de l'ancien câble.
Par de nouvelles observations enregistrées le 6 décembre 2019 et communiquées le 19 décembre 2019 à la société Enedis, la société Moulin du Teulel conclut aux mêmes fins que par sa saisine, par les mêmes moyens et soutient, en outre :

- que la vérification de protection de découplage ne constitue pas une prestation forfaitaire indivisible ; qu'il n'y a pas lieu pour elle de payer cette prestation compte tenu de la protection de découplage désormais mise en œuvre à la suite de la décision de règlement de différend du comité ; que la société Enedis doit détailler les différents travaux à réaliser au sein de sa proposition technique et financière ;
- que les anciens câbles n'ont finalement été déposés que le 25 novembre 2019 et uniquement en raison de la procédure qu'elle a initiée devant le CoRDiS.

Par un courrier en date du 9 décembre 2019, le membre désigné a demandé à la société Enedis de lui adresser une copie des « Conditions Particulières de la Convention de Raccordement » qui auraient été transmises le 16 octobre 2019 à la société Moulin du Teulel. La société Enedis a répondu à cette demande le 11 décembre 2019.
Par de nouvelles observations enregistrées le 9 décembre 2019 et communiquées le 19 décembre 2019 à la société Moulin du Teulel, la société Enedis conclut aux mêmes fins que par ses précédentes observations, par les mêmes moyens.
Par de nouvelles observations enregistrées le 2 janvier 2020 et communiquées le 19 février 2020 à la société Enedis, la société Moulin du Teulel conclut aux mêmes fins que par ses précédentes observations, par les mêmes moyens.
Par des courriers en date du 19 février 2020, le membre désigné a demandé à la société Enedis et à la société Moulin du Teulel de lui indiquer si les « Conditions Particulières de la Convention de Raccordement » qui auraient été adressées à la demanderesse avaient été signées par les deux parties et de lui communiquer, le cas échéant, une copie de cette convention.
Par de nouvelles observations enregistrées le 21 février 2020, la société Moulin du Teulel indique n'avoir pas signé ce projet de convention de raccordement dans la mesure où il ne correspond, selon elle, ni à sa demande ni aux prescriptions de la décision de règlement de différend du CoRDiS.
Par de nouvelles observations enregistrées le 27 février 2020, la société Enedis indique que ce projet de convention de raccordement a été transmis à la société Moulin du Teulel, qui ne l'a pas retourné signé.

2.2. Notifications des griefs

Vu la décision du membre désigné du comité de règlement des différends et des sanctions de la Commission de régulation de l'énergie, en date du 6 août 2021, portant notification des griefs à la société Enedis.

2.2.1. Constatations du membre désigné

Sur la transmission à la société Moulin du Teulel du projet d'une nouvelle convention de raccordement et des résultats de l'étude sur la puissance transitant dans le transformateur du poste de distribution publique :
Le membre désigné constate qu'il ressort de l'instruction que la société Enedis n'a pas transmis à la société Moulin du Teulel de projet de convention de raccordement, pas plus que les résultats de l'étude sur la puissance transitant dans le transformateur du poste de distribution publique, avant le 16 octobre 2019, alors même que le CoRDiS lui avait enjoint de le faire avant le 8 février 2018 aux termes de sa décision n° 11-38-16, ces transmissions étant ainsi intervenues plus de 20 mois après l'expiration du délai qui lui était imparti.
Sur le fond, le membre désigné estime que le projet de convention de raccordement transmis par la société Enedis est conforme à la décision du CoRDiS n° 11-38-16, d'une part, en ce qu'il prend en compte la protection de découplage conforme à la norme DIN VDE 0126-1-1/A1 disposant de réglages VFR2014 et, d'autre part, en ayant retenu une puissance d'injection de XX kW conforme à la fiche de collecte de renseignement signée par le gérant de la société Moulin du Teulel et compatible avec un transformateur de XX kW.
Partant, le membre désigné constate qu'en ne s'étant pas conformée dans les délais prescrit à la décision du CoRDiS n° 11-38-16, la société Enedis a méconnu les dispositions de l'article L. 134-28 du code de l'énergie.
Sur le remboursement de la prestation de reprise d'études :
Le membre désigné constate que la société Enedis n'établit pas avoir envoyé à la société Moulin du Teulel une lettre-chèque le 20 février 2018 afin de procéder au remboursement de la prestation de reprise d'études mais n'y a procédé effectivement que seulement près de deux ans après le prononcé de la décision du CoRDiS.
Le membre désigné relève, toutefois, que le comité n'avait pas explicitement imparti de délai à la société Enedis pour procéder à ce remboursement. Dès lors, la société Enedis ne saurait être regardée comme ayant méconnu une obligation qui lui incombait spécifiquement en application de la décision de règlement de différend du 8 décembre 2017 et, par conséquent, n'a pas méconnu les dispositions de l'article L. 134-28 du code de l'énergie, tout en prenant un retard inexplicable pour procéder au règlement dû à la société Moulin du Teulel.
Sur la réalisation des travaux de dépose de l'ancienne installation :
Le membre désigné relève que les travaux de dépose de l'ancienne installation du point de livraison n'ont pas fait l'objet d'une injonction spécifique du comité dans sa décision et qu'il ressort de l'instruction que ces travaux ont été réalisés le 25 novembre 2019.
Par la suite, aucun grief relatif à la réalisation des travaux de dépose de l'ancienne installation ne saurait être retenu contre la société Enedis.
Sur la demande indemnitaire de la société Moulin du Teulel :
Le membre désigné rappelle qu'aucune disposition du code de l'énergie ne confère au CoRDiS la compétence pour statuer sur des conclusions indemnitaires.
Dès lors, la demande présentée par la société Moulin du Teulel de se voir indemniser en raison des préjudices qu'elle estime avoir subis ne saurait prospérer.

2.2.2. Griefs retenus par le membre désigné

Le membre désigné du comité de règlement des différends et des sanctions a fait grief à la société Enedis :
« d'avoir méconnu les dispositions précitées de l'article L. 134-28 du code de l'énergie, dès lors qu'elle ne s'est pas conformée dans les délais requis à la décision de règlement de différend n° 11-38-16 du 8 décembre 2017 puisqu'elle n'a transmis à la société Moulin du Teulel un projet de convention conforme aux prescriptions de cette décision ainsi que les résultats de l'étude mentionnée dans cette décision que le 16 octobre 2019, soit avec un retard de 20 mois et huit jours. »
Aux termes de la notification des griefs, le membre désigné estime qu'une sanction pécuniaire devrait être prononcée à l'encontre de la société Enedis dont le montant pourrait être fixé entre 100 000 euros et 150 000 euros.
Conformément aux dispositions de l'article R. 134-32 du code de l'énergie, la société Enedis a été invitée par la notification des griefs à présenter ses observations en réponse avant le 1er octobre 2021 à 12 heures et à consulter le dossier.
Vu le courrier électronique en date du 3 septembre 2021 par lequel la société Enedis a demandé à consulter le dossier.
Le 8 septembre 2021, la société Enedis a eu accès à l'ensemble des pièces du dossier de la notification des griefs au sein des locaux de la Commission de régulation de l'énergie. Le conseil de la société Enedis a été autorisé à télécharger l'ensemble des pièces du dossier sur une clé USB.

  1. Observations en réponse à la notification des griefs

Vu les observations de la société Moulin du Teulel à la suite de la notification des griefs adressée à la société Enedis, enregistrées le 21 août 2021.
La société Moulin du Teulel soutient que, contrairement à l'analyse du membre désigné dans la notification des griefs, la société Enedis n'a pas communiqué le résultat de l'étude sur la puissance du transformateur, ce qui ne permet pas de conclure, d'une part et de manière définitive, sur la nécessaire réduction de puissance de branchement de XX kW à XX kW pour obtenir un branchement sur un transformateur de XX kW comme elle le souhaitait et, d'autre part, sur la bonne exécution de la décision n° 11-38-16 du CoRDiS.
Vu les observations en réponse à la notification des griefs enregistrées le 30 septembre 2021 de la société Enedis, représentée par sa présidente du directoire, Mme Marianne Laigneau, et ayant pour avocats, Me Damien Bergerot et Me Cédric de Pouzilhac, Cabinet Aramis, 9, rue Scribe, 75009 Paris.
La société Enedis demande au comité de règlement des différends et des sanctions :

- à titre principal, de rejeter la demande de sanction ;
- à titre subsidiaire, de prononcer une sanction d'un montant proportionné au manquement, purement formel, de la société Enedis, laquelle n'a à aucun moment eu l'intention de se soustraire à l'exécution de la décision n° 11-38-16.

S'agissant de l'exécution de la décision n° 11-38-16, la société Enedis soutient tout d'abord que, sur un plan technique, la décision a été exécutée dans les délais fixés par le CoRDiS puisque les travaux de raccordement des installations de la société Moulin du Teulel ont été achevés le 20 novembre 2015, avant même la saisine initiale du comité et que ces installations ont été mises en service le 27 décembre 2016, conformément à la décision portant mesures conservatoires n° 10-38-16 du 17 octobre 2016, permettant à la société Moulin du Teulel de bénéficier d'un raccordement présentant les caractéristiques techniques d'un raccordement définitif ; que c'est d'ailleurs ce qu'a confirmé le membre désigné dans sa décision du 26 février 2019 de non-lieu à notifier des griefs à la société Enedis.
Elle soutient, en outre, que la société Moulin du Teulel maintient sa demande de sanction sur le seul motif qu'elle demande une nouvelle modification technique de son raccordement pour augmenter sa puissance de XX à XX kW et que c'est la raison pour laquelle elle n'a toujours pas accepté de signer le projet de la convention de raccordement reflétant parfaitement les conditions techniques rappelées par le comité et qu'elle a adressée il y près de deux ans à la demanderesse, alors même que la société Moulin du Teulel est en capacité d'injecter et injecte d'ores et déjà sur le réseau public de distribution d'électricité depuis le 27 décembre 2016.
S'agissant du retard dans la transmission du projet de la convention de raccordement à la société Moulin du Teulel, la société Enedis fait valoir que ce retard n'est aucunement volontaire et ne résulte que d'une erreur interne ; que les « Conditions Particulières de la Convention de Raccordement » ont été éditées dans une troisième version le 15 février 2018 pour tenir compte du type de protection de découplage installée au point de livraison, conformément à la décision du CoRDiS, ce que reconnaît le membre désigné dans sa décision de notification des griefs, et pour tenir compte des résultats de l'étude sur la puissance transitant dans le transformateur du poste de distribution publique qui ne requiert plus le changement de ce poste, contrairement à ce qu'elle soutenait jusqu'ici.
Si, en raison d'une erreur interne, la société Enedis n'a pas directement transmis ces « Conditions Particulières » à la société Moulin du Teulel, elle soutient qu'elle a régularisé cette situation le 16 octobre 2019 mais que, depuis cette date, la demanderesse ne l'a pas retournée signée. Ainsi, elle fait valoir qu'elle ne conteste pas ce grief mais que seul un retard dans la transmission du projet de convention de raccordement peut lui être reproché et qu'elle n'a cherché en aucune manière à se soustraire aux injonctions du CoRDiS.
En outre, elle soutient que nonobstant l'absence de signature d'une convention de raccordement, elle a traité la société Moulin du Teulel comme tout producteur injectant normalement sur le réseau en réalisant pour elle des prestations de comptage et de relève.
S'agissant du remboursement de la prestation de reprise d'étude, elle soutient qu'une première lettre-chèque éditée le 20 février 2018 a été adressée à la société Moulin du Teulel qui ne l'a pas encaissée, de sorte qu'elle a été amenée à envoyer un nouveau chèque, qui a été cette fois encaissé.
S'agissant de la sanction encourue, la société Enedis soutient tout d'abord que le Conseil d'Etat, en réformant le montant fixé dans une décision du comité, a récemment rappelé, dans sa décision n° 422616 du 18 juin 2021 dite « Lislet 2 », la nécessaire proportionnalité d'une sanction.
Sur la gravité du manquement qui lui est imputé, la société Enedis fait valoir que, contrairement à ce que soutient le membre désigné, elle n'a pas entrepris d'exécuter la décision du CoRDiS une fois seulement qu'elle a eu connaissance de l'instruction menée dans le cadre de la procédure de sanction ; qu'elle a, en effet, tout mis en œuvre pour permettre le raccordement technique et effectif de la société Moulin du Teulel dès la fin de l'année 2016, soit bien avant la demande de sanction enregistrée le 15 juin 2019 ; et que, par ailleurs, elle a bien exécuté l'entièreté de la décision du CoRDiS, même avec du retard, puisque deux semaines seulement séparent la réception de la notification de la demande de sanction par la société Enedis le 30 septembre 2019 de l'envoi du projet de convention à la société Moulin du Teulel le 16 octobre 2019.
Sur l'absence d'avantages tirés par la société Enedis de l'exécution tardive de la décision du CoRDiS, elle soutient que, contrairement à l'analyse qui résulte de la notification des griefs, dans l'hypothèse théorique d'un dommage lié à l'exploitation des installations de production de la société Moulin du Teulel et nonobstant l'absence de convention de raccordement, il aurait bien existé un cadre contractuel afin que la demanderesse puisse agir à l'encontre du gestionnaire de réseau public de distribution d'électricité en se fondant sur les stipulations du CARD-I puisque ce contrat définit les conditions techniques, juridiques et financières de l'injection d'énergie dans le réseau ; qu'un CARD-I a bien été signé avec la société Moulin du Teulel en date du 31 mars 2014 avec prise d'effet au 1er avril 2014 couvrant les manquements aux engagements de la société Enedis en matière de continuité et de qualité de l'onde et définissant les fautes et négligences du gestionnaire de réseau public de distribution d'électricité ; que, dès lors, la société Enedis n'aurait pu bénéficier d'un quelconque vide juridique.
La société Enedis soutient, en outre, qu'un éventuel vide juridique aurait été également préjudiciable pour elle et que le cadre contractuel dont peut se prévaloir la société Moulin du Teulel inclut également l'ensemble des obligations légales et réglementaires qui incombent au gestionnaire de réseau public de distribution d'électricité et sa documentation technique de référence, qui auraient pu être invoquées devant le juge sur le fondement délictuel de l'article 1240 du code civil.
Elle soutient, enfin, qu'aucun dommage en lien avec une défaillance du réseau n'est à constater et qu'elle n'a retiré aucun gain économique ou un quelconque avantage concurrentiel ni n'a transféré un risque financier sur la société Moulin du Teulel du fait de l'exécution tardive de la décision du CoRDiS.
Sur l'ampleur des dommages causés à la société Moulin du Teulel, la société Enedis soutient que, contrairement au lien effectué par le membre désigné dans la notification des griefs entre le retard dans la signature de la convention de raccordement et le bénéfice de l'obligation d'achat, le tarif est fixé par « EDF Obligation d'achat » de manière rétroactive en tenant compte de la date à laquelle la demande de raccordement complète du producteur est adressée au gestionnaire de réseau public de distribution d'électricité, soit en l'espèce le 3 août 2014 à la suite de la reprise d'étude demandée par la société Moulin du Teulel pour baisser sa puissance de XX à XX kW, permettant à cette dernière de bénéficier de l'obligation d'achat. La société Enedis relève, par ailleurs, que la société Moulin du Teulel injecte sa production dans le réseau depuis 2009 et est rattachée au périmètre du responsable d'équilibre XX depuis le 1er avril 2014.
En outre, la société Enedis soutient que le motif exposé par la notification des griefs est insusceptible, en droit, de caractériser « l'ampleur du dommage » au sens de l'article L. 134-27 du code de l'énergie, le Conseil d'Etat ayant jugé dans son arrêt déjà cité du 18 juin 2021 dit « Lislet 2 » que l'ampleur du dommage doit s'apprécier « en fonction de la perturbation générale apportée au fonctionnement des réseaux et aux dommages subis, le cas échéant, tant par ses utilisateurs que par d'autres acteurs économiques et par les consommateurs finals » ; qu'en effet, le CoRDiS étant incompétent pour statuer sur une demande de dommages-intérêts, l'ampleur du dommage causé au producteur ne saurait être pris en compte, seul un dommage se rapportant au fonctionnement des réseaux et subi par ses utilisateurs pourrait être pris en compte afin de déterminer le quantum d'une sanction.
En conséquence, la société Enedis conclut qu'aucun dommage se rattachant à l'exécution tardive de la décision du CoRDiS ne saurait être pris en compte dans le cadre de la détermination d'une éventuelle sanction pécuniaire.
S'agissant des engagements pris par le gestionnaire de réseau public de distribution d'électricité, la société Enedis fait valoir qu'elle a adapté sa documentation technique à la suite de la décision n° 11-38-16 en éditant une version 7 de sa documentation relative aux « Protections des Installations de Production raccordées au Réseau Public de Distribution », applicable au 14 décembre 2018, afin de tenir compte de la protection de découplage de type DIN VDE 0126-1-1/A1 qui permettrait « une augmentation graduée du seuil de découplage sur fréquence haute des protections de découplage de type DIN VDE 0126-1-1/A1 afin d'élargir la plage de stabilité du système électrique sur variation accidentelle de fréquence ».
Par ailleurs, elle fait valoir qu'un portail de raccordement a été mis en ligne en 2018 pour permettre le dépôt et le suivi des demandes de raccordement des producteurs et qu'un guichet unique d'accueil et de complétude des demandes de raccordement relatives aux installations de production BT supérieures à 36 kVA a été mis en place en 2020.
Vu les observations de la société Moulin du Teulel en réponse aux observations de la société Enedis, enregistrées le 5 octobre 2021.
S'agissant de la limitation du défaut de la société Enedis au seul retard dans la transmission du projet de convention de raccordement, la société Moulin du Teulel soutient que le fait que la date du projet transmis soit du 15 février 2018 n'a aucune valeur juridique puisque que ce document n'a été effectivement communiqué que le 16 octobre 2019 et qu'elle considère ce document comme antidaté puisque le gestionnaire de réseau public de distribution d'électricité n'a jamais répondu à ses relances pour obtenir cette convention, notamment son courrier électronique du 20 février 2018.
La société Moulin du Teulel fait, par ailleurs, valoir qu'elle n'a pas retourné signée le projet de la convention de raccordement car elle conteste toujours la puissance maximale d'injection de XX kW ; que les résultats de l'étude de raccordement ne pourront que démontrer que c'est à tort que le gestionnaire de réseau public de distribution d'électricité a exigé la réduction de la puissance de XX kW à XX kW et qu'ainsi un nouveau projet de convention de raccordement devra être édité.
S'agissant de la sanction encourue par la société Enedis et de la gravité du manquement, en premier lieu, la société Moulin du Teulel soutient que, contrairement à ce que prétend le gestionnaire de réseau public de distribution d'électricité, les mesures prises pour permettre le raccordement technique effectif ne sont pas antérieures à la saisine du CoRDiS aux fins de sanction mais se situent entre les deux décisions de mesures conservatoire et de règlement de différend, ce qui signifie que la société Enedis n'a tiré aucune conséquence de la décision du 8 décembre 2017.
Elle soutient, également, d'une part, que, si le montant de la prestation de reprise d'étude lui a bien été restitué, les dommages dus à l'obligation erronée de procéder à une reprise d'étude n'ont pas été compensés et, d'autre part, que la société Enedis ne s'est jamais rapprochée d'elle pour régulariser les dommages créés par la mauvaise exécution du CARD-I en ce qui concerne la mise à disposition des données de comptage.
En outre, la société Moulin du Teulel soutient que la société Enedis ne s'est pas conformée à l'article 4 de la décision n° 11-38-16, en ne lui transmettant aucun devis pour le remplacement des dispositifs de comptage de type électromécanique par des dispositifs de type électronique. Toutefois, elle dispose déjà d'un tel compteur depuis le 26 décembre 2016 et considère que cette injonction à l'article 4 n'a que pour but de souligner que la société Enedis n'avait pas pris en compte l'ensemble de sa demande de branchement en date du 2 janvier 2014.
S'agissant de l'absence d'avantages tirés par la société Enedis de l'exécution tardive de la décision du CoRDiS, la société Moulin du Teulel soutient que le gestionnaire de réseau public de distribution d'électricité a essayé de tirer un avantage de XX euros en ne communiquant pas les résultats de l'étude de puissance transitant dans le transformateur. Ce montant se détermine par la différence entre le montant de XX euros de la proposition technique et financière adressée par la société ERDF intégrant un branchement surdimensionné de XX kW, qui aurait permis notamment le financement par l'utilisateur du réseau du remplacement de l'enceinte du transformateur existant qui n'était plus au norme et qui était pourtant à la charge de la société ERDF, et la deuxième proposition de la société Enedis pour un montant de XX euros avec un transformateur de XX kW mais conditionnée par l'obligation pour le demandeur de réduire sa demande de puissance à XX kW.
En outre, la société Moulin du Teulel fait valoir qu'en refusant de la dédommager à hauteur de XX euros pour le dommage résultant du refus de traiter son dossier et les non-lectures de comptage pour un montant de XX euros, la société Enedis aurait essayé de tirer un avantage total de XX euros.
S'agissant de l'ampleur des dommages causés, la société Moulin du Teulel soutient que si elle produit aujourd'hui de l'électricité grâce à ses anciennes turbines de XX kW, elle ne peut pour autant procéder à une augmentation de puissance et, donc, bénéficier d'un contrat d'obligation d'achat plus important puisqu'en l'absence de résultat de l'étude de puissance, elle ne connaît toujours pas la puissance qu'elle pourrait injecter dans le réseau ; qu'ainsi, elle ne peut procéder à cette augmentation de puissance depuis 7 années, ce qui représente autour de XX euros de pertes d'exploitation et une absence de production de plus XX d'énergie renouvelable, alors même que le besoin de production d'une énergie renouvelable est nécessaire pour la lutte contre le réchauffement climatique.
S'agissant des engagements pris par la société Enedis, la société Moulin du Teulel soutient, d'une part, qu'aucune modification du seuil haut de fréquence n'a été opérée puisqu'il était de 50.6 Hz dans la version 5 de 2013 et également de 50.6 Hz dans la version 7 de 2018 et, d'autre part, que la mise en place d'un guichet unique n'a pas été communiquée aux demandeurs et n'entre, dans tous les cas, pas dans l'appréciation de la sanction.
Vu les observations de la société Enedis en réponse n° 2 enregistrées le 18 octobre 2021 et présentées par Me Damien Bergerot et Me Cédric de Pouzilhac. La société Enedis conclut aux mêmes fins que par ses précédentes observations, par les mêmes moyens.
Par ailleurs, s'agissant de la communication avant le 8 février 2018 du projet d'une nouvelle convention de raccordement prenant en compte la protection de découplage conforme à la norme DIN VDE 0126-1-1/A1 disposant de réglages VFR2014 et les résultats de l'étude sur la puissance transitant dans le transformateur du poste de distribution publique, elle soutient qu'il s'agit du seul manquement qui était allégué dans la saisine du CoRDiS par la société Moulin du Teulel le 15 juin 2019 ; que la convention de raccordement n'a en aucune manière été antidatée mais que le retard dans sa transmission depuis le 15 février 2018 ne résulte que d'une erreur interne.
En outre, la société Enedis soutient que les conditions particulières de la version 3 de la convention de raccordement prennent bien en compte les résultats de l'étude sur la puissance transitant dans le transformateur du poste de distribution publique puisque le gestionnaire de réseau public de distribution d'électricité a finalement retenu l'analyse de la société Moulin du Teulel sur l'absence de changement de poste de distribution publique pour une puissance demandée limitée à XX kW, ne requérant que la mutation du transformateur de XX kVA à XX kVA ; que, dès lors, la société Moulin du Teulel ne peut ignorer que la société Enedis n'a pas mené une étude pour un passage à XX kW dans la mesure où la décision n° 11-38-16 confirme que seule une puissance de XX kW était désormais demandée ; que, partant, seule une nouvelle demande d'augmentation de puissance à XX kW la conduirait à réaliser une nouvelle étude.
Elle relève, au surplus, que la société Moulin du Teulel dispose désormais de l'autorisation d'injecter jusqu'à XX kW mais ne produit que XX kW maximum, ce qu'elle ne peut sérieusement expliquer par la seule contestation d'une différence de puissance de XX kW entre XX et XX kW.
S'agissant de l'article 2 de la décision n° 11-38-16 relatif au remboursement de la prestation de reprise d'études initialement réglée par la société Moulin du Teulel, aucun manquement sur ce point ne figure dans la demande de sanction formée devant le CoRDiS ni dans la notification des griefs.
S'agissant du constat du CoRDiS dans sa décision du 8 décembre 2017 qu'elle n'aurait pas régulièrement exécuté le contrat CARD-I en ce qui concerne la mise à disposition des données de comptage, la société Enedis soutient que ce manquement ne figurait ni dans la saisine du 15 juin 2019 ni n'a fait l'objet d'un grief retenu par le membre désigné ; que l'article 3 de la décision n° 11-38-16 n'enjoignait aucunement au gestionnaire de réseau public de distribution d'électricité de se rapprocher de la demanderesse pour une indemnisation qui, au surplus, n'entrerait pas dans la compétence du comité ; qu'en outre, la société Moulin du Teulel bénéficie de la mise à disposition de ses données de comptage.
S'agissant de l'injonction faite à la société Enedis de communiquer avant le 15 janvier 2018 un nouveau devis pour le remplacement des dispositifs de comptage de type électromécanique par des dispositifs de type électronique, cette dernière soutient que, là encore, ce manquement ne figurait ni dans la saisine du 15 juin 2019 ni n'a fait l'objet d'un grief retenu par le membre désigné ; qu'en outre, comme le relève la société Moulin du Teulel elle-même, les compteurs avaient été changés dès le 26 décembre 2016, de sorte que l'injonction prévue à l'article 4 de la décision du CoRDiS était devenue sans objet.
S'agissant de la gravité du manquement imputé à la société Enedis, cette dernière fait valoir que, comme le reconnaît la société Moulin du Teulel, ses installations de production ont bien été techniquement raccordées avant même l'intervention de la décision n° 11-38-16, avec les caractéristiques techniques d'un raccordement définitif ; ce qui ne peut nullement être interprété comme une volonté de la part du gestionnaire de réseau de public distribution d'électricité de se soustraire à la décision du comité.
S'agissant de l'absence d'avantages tirés par elle de l'exécution tardive de la décision n° 11-38-16, la société Enedis soutient à nouveau qu'elle n'a profité d'aucun vide juridique, qui n'est pas survenu en l'espèce ; qu'en outre, aucun dommage se rattachant à une exécution tardive de sa part ne saurait être pris en compte par le comité dans le cadre de la détermination du quantum de l'éventuelle sanction pécuniaire ; que la société Moulin du Teulel confirme qu'elle produit de l'électricité et que rien ne fait donc obstacle à ce qu'elle bénéficie du tarif d'obligation d'achat d'EDF, dont la contractualisation ressort de ses relations avec la société EDF seule.
S'agissant des engagements pris par la société Enedis, cette dernière fait valoir qu'elle a bien modifié sa documentation technique de référence pour prévoir l'acceptation du matériel de découplage pour une installation hydraulique mais que la fréquence maximale admise sur le réseau ne saurait pour autant être outrepassée, ce qui explique l'absence de modification de la fréquence maximale entre les différentes versions de cette documentation ; qu'en ce qui concerne le guichet unique, il s'agit d'une organisation interne du gestionnaire de réseau public de distribution d'électricité pour le traitement des demandes de producteurs émises depuis sa mise en place en 2020.
Vu les observations de la société Moulin du Teulel enregistrées le 19 novembre 2021.
La société Moulin du Teulel soutient qu'une sanction particulièrement sévère doit être prononcée par le CoRDiS puisque les manquements du gestionnaire de réseau public de distribution d'électricité persistent, ce dernier n'ayant toujours pas transmis le calcul de puissance possible pour son poste de transformateur ni réglé les problèmes liés au retard injustifié dans la transmission du projet de la convention de raccordement et liés à l'absence de lecture de son compteur.

  1. Procédure de sanction

Vu le code de l'énergie, notamment ses articles L. 134-25 à L. 134-34 et R. 134-29 à R. 134-37 ;
Vu la décision du 13 février 2019, portant adoption du règlement intérieur du comité de règlement des différends et des sanctions de la Commission de régulation de l'énergie ;
Vu la décision du 3 septembre 2021 du président du comité de règlement des différends et des sanctions de la Commission de régulation de l'énergie, relative à la désignation d'un rapporteur pour l'instruction de la demande de sanction enregistrée sous le numéro 02-40-19 ;
Par courriers du 8 novembre 2021, la société Enedis et la société Moulin du Teulel ont été informées que la séance publique se tiendrait le lundi 22 novembre 2021 à 9 heures au siège de la Commission nationale de l'informatique et des libertés, comme l'y autorise les dispositions de l'article 1er du règlement intérieur du CoRDiS au terme desquelles « Le comité peut se réunir en tout lieu […] ».
Par courriers électroniques du 16 novembre 2021, la société Enedis et la société Moulin du Teulel ont été informées que la séance publique se tiendrait désormais à 9 h 30.
Par courrier électronique du 19 novembre 2021, la société Moulin du Teulel a confirmé qu'elle ne serait ni présente ni représentée à cette séance publique.
La société Enedis ayant été régulièrement convoquée et la société Moulin du Teulel ayant été dûment informée de la possibilité d'assister à la séance publique, qui s'est tenue le lundi 22 novembre 2021 au siège de la Commission nationale de l'informatique et des libertés, du comité de règlement des différends et des sanctions, composé de M. Thierry Tuot, président, M. Henri de Larosière de Champfeu et M. Laurent-Xavier Simonel, membres, en présence de :
M. Nicolas Maziau, membre désigné par le président du comité de règlement des différends et des sanctions,
Mme Alexandra Bonhomme, directrice des affaires juridiques et représentant le directeur général empêché,
M. Martial Fournier de Saint Jean, rapporteur,
Les représentants de la société Enedis, assistés de Me Damien Bergerot et Me Cédric de Pouzilhac,
Après avoir entendu :

- le rapport de M. Martial Fournier de Saint Jean, présentant les faits, la saisine du comité de règlement des différends et des sanctions par la société Moulin du Teulel, le grief notifié et les observations écrites en réponse au grief ainsi que, plus généralement, les conclusions et moyens des parties ;
- les observations de M. Nicolas Maziau, présentant les motifs l'ayant conduit à notifier un grief et précisant la nature pécuniaire ainsi que le montant de la sanction proposée ;
- les observations de Me Damien Bergerot et Me Cédric de Pouzilhac pour la société Enedis, cette dernière persiste dans ses moyens et ses conclusions. Elle fait, notamment, valoir que des procédures internes de suivi de l'exécution des décisions du CoRDiS sont envisagées et devraient être formellement mises en place en 2022.

La parole ayant été donnée en dernier à Me Damien Bergerot et Me Cédric de Pouzilhac et aux représentants de la société Enedis.
Le comité de règlement des différends et des sanctions en ayant délibéré, après que le membre désigné, le rapporteur, la partie mise en cause, le public et les agents des services se sont retirés.

  1. Analyse du comité de règlement des différends et des sanctions
    5.1. Cadre juridique applicable

Aux termes des dispositions de l'article L. 134-28 du code de l'énergie : « Les sanctions énumérées à l'article L. 134-27 sont également encourues […] lorsque le gestionnaire, l'opérateur, l'exploitant ou l'utilisateur d'un réseau, d'un ouvrage ou d'une installation ou le fournisseur d'électricité ou de gaz naturel mentionné à l'article L. 134-25 ne s'est pas conformé dans les délais requis à une décision prise par le comité en application des articles L. 134-20 et L. 134-22, sans qu'il y ait lieu de le mettre préalablement en demeure ».

5.2. Analyse du grief retenu par le membre désigné

Le membre désigné du comité de règlement des différends et des sanctions fait grief à la société Enedis : « d'avoir méconnu les dispositions précitées de l'article L. 134-28 du code de l'énergie, dès lors qu'elle ne s'est pas conformée dans les délais requis à la décision de règlement de différend n° 11-38-16 du 8 décembre 2017 puisqu'elle n'a transmis à la société Moulin du Teulel un projet de convention conforme aux prescriptions de cette décision ainsi que les résultats de l'étude mentionnée dans cette décision que le 16 octobre 2019, soit avec un retard de 20 mois et huit jours ».
Il résulte de l'instruction, d'une part, que, par des courriers électroniques en date des 20 et 25 février 2018 et 17 mars 2019, la société Moulin du Teulel a cherché à obtenir auprès du gestionnaire de réseau public de distribution d'électricité le projet de la convention de raccordement mentionné à l'article 1er de la décision du CoRDiS du 8 décembre 2017 et, d'autre part, que ce projet de convention de raccordement, daté du 15 février 2018, soit postérieurement à la date limite du 8 février 2018 fixée par le CoRDiS, n'a été transmis à la société Moulin du Teulel par la société Enedis que le 16 octobre 2019.
Ainsi, la société Enedis a pris un retard de vingt mois et huit jours pour transmettre à la société Moulin du Teulel le projet de convention de raccordement en se conformant au dispositif de la décision de règlement de différend du CoRDiS du 8 décembre 2017, sans qu'aucune cause de ce retard, même indirecte, ne puisse être imputée à la société Moulin du Teulel qui, au contraire, a tenté à plusieurs reprises d'obtenir ce projet avant de former sa demande de sanction.
Par suite, le comité estime que la société Enedis ne s'est pas conformée dans le délai qui lui était imparti à l'injonction qui lui était faite par l'article 1er de la décision du CoRDiS n° 11-38-16 du 8 décembre 2017.
En conséquence, est retenu à l'encontre de la société Enedis, en raison de son retard de vingt mois et huit jours pour se conformer à une décision du CoRDiS, un manquement caractérisé à l'article L. 134-28 du code de l'énergie.

  1. Sanction retenue à l'encontre de la société Enedis
    6.1. Rappel des principes applicables en matière de sanction

En application des dispositions de l'article L. 134-27 du code de l'énergie, le comité de règlement des différends et des sanctions peut prononcer, en fonction de la gravité du manquement :
« 1° Soit une interdiction temporaire, pour une durée n'excédant pas un an, de l'accès aux réseaux, ouvrages et installations mentionnés à l'article L. 134-19 […] ;
2° Soit, si le manquement n'est pas constitutif d'une infraction pénale, une sanction pécuniaire, dont le montant est proportionné à la gravité du manquement, à la situation de l'intéressé, à l'ampleur du dommage et aux avantages qui en sont tirés. (soulignement ajouté)
Ce montant ne peut excéder 3 % du chiffre d'affaires hors taxes lors du dernier exercice clos, porté à 5 % en cas de nouvelle violation de la même obligation dans le cas d'un manquement aux obligations de transmission d'informations ou de documents ou à l'obligation de donner accès à la comptabilité, ainsi qu'aux informations économiques, financières et sociales prévues à l'article L. 135-1. A défaut d'activité permettant de déterminer ce plafond, le montant de la sanction ne peut excéder 100 000 euros, porté à 250 000 euros en cas de nouvelle violation de la même obligation.
Dans le cas des autres manquements, il ne peut excéder 8 % du chiffre d'affaires hors taxes lors du dernier exercice clos, porté à 10 % en cas de nouvelle violation de la même obligation. A défaut d'activité permettant de déterminer ce plafond, le montant de la sanction ne peut excéder 150 000 euros, porté à 375 000 euros en cas de nouvelle violation de la même obligation.
Si le manquement a déjà fait l'objet d'une sanction pécuniaire au titre d'une autre législation, la sanction pécuniaire éventuellement prononcée par le comité est limitée de sorte que le montant global des sanctions pécuniaires ne dépasse pas le montant le plus élevé de l'une des sanctions encourues ».
Aux termes des dispositions de l'article L. 134-28 du code de l'énergie : « Les sanctions énumérées à l'article L. 134-27 sont également encourues, […] lorsque le gestionnaire, l'opérateur, l'exploitant ou l'utilisateur d'un réseau, d'un ouvrage ou d'une installation ou le fournisseur d'électricité ou de gaz naturel mentionné à l'article L. 134-25 ne s'est pas conformé dans les délais requis à une décision prise par le comité en application des articles L. 134-20 et L. 134-22, sans qu'il y ait lieu de le mettre préalablement en demeure ».

6.2. Maximum légal de la sanction pécuniaire

En application de ces dispositions de l'article L. 134-27 du code de l'énergie, le maximum légal de 3 % du chiffre d'affaires hors taxes s'applique pour un manquement aux obligations de transmission d'informations ou de documents ou à l'obligation de donner accès à la comptabilité. Pour les autres manquements, le maximum légal de la sanction s'élève à « 8 % du chiffre d'affaires hors taxes lors du dernier exercice clos, porté à 10 % en cas de nouvelle violation de la même obligation ».
Au cas d'espèce, le manquement de la société Enedis aux dispositions de l'article L. 134-28 du code de l'énergie, ne constitue pas un manquement aux obligations de transmission d'informations ou d'accès à la comptabilité.
En conséquence, le montant de la sanction en l'espèce ne peut excéder 8 % du chiffre d'affaires hors taxes de la société Enedis du dernier exercice clos. En l'occurrence, le chiffre d'affaires hors taxes réalisé en 2020 par la société Enedis est de 14,2 milliards d'euros (1). Compte-tenu de cet élément, le maximum légal de la sanction s'élève à 1,136 milliards d'euros.

6.3. Éléments d'appréciation de la sanction

Sur la gravité du manquement :
Le comité relève, en premier lieu, que la méconnaissance par la personne mise en cause d'injonctions la concernant et fixées par une décision de règlement de différend précédente constitue en soi un manquement grave quelle que soit la nature de ces injonctions comme le précise le Conseil d'État au point 21 de son arrêt du 18 juin 2021, n° 422616, déjà cité, qui indique que le non-respect des obligations mises à la charge d'un opérateur en vertu d'une décision prise par le comité en application des articles L. 134-20 et L. 134-22 du code de l'énergie constitue, en principe, un manquement grave.
Une décision de règlement d'un différend entre un gestionnaire de réseau public de distribution d'électricité et un utilisateur de ce réseau, qu'il soit notamment producteur ou consommateur final, vise en particulier à rendre effectif en faveur de cet utilisateur l'exercice de l'ensemble de ses droits d'accès au réseau tel qu'ils sont garantis par la loi et par le droit de l'Union européenne. En outre, le respect du délai imparti à ce gestionnaire pour exécuter la décision du CoRDiS permet au comité de s'assurer, dans l'intérêt de l'ordre public économique, que le différend est effectivement réglé dans les meilleurs délais conformément aux exigences du droit de l'Union.
Ainsi, la non-exécution d'une décision de règlement de différend par la société Enedis conduit à faire perdurer des manquements à ses obligations et aux droits de l'utilisateur, manquements susceptibles d'engendrer un préjudice pour cet utilisateur et de nature à rompre l'équilibre déterminé par le législateur entre les droits et obligations respectifs des différents opérateurs du secteur de l'énergie.
Par ailleurs, il résulte de l'instruction que le manquement de la société Enedis n'a cessé qu'à compter de la connaissance par cette dernière de la saisine du comité par la société Moulin du Teulel en vue du prononcé d'une sanction, alors qu'elle avait pourtant reçu précédemment plusieurs relances de la part de la demanderesse lui enjoignant de se conformer à la décision de règlement de différend du 8 décembre 2017 du comité. En outre, la circonstance que les conditions de dialogue entre le demandeur et la société Enedis se seraient complexifiées eu égard aux très nombreux échanges entre les deux sociétés et aux différentes saisines devant le CoRDiS formées par la société Moulin du Teulel est sans incidence sur le devoir du gestionnaire de réseau public de distribution d'électricité de continuer à instruire les demandes dont il est saisi et d'y donner la suite la plus rapide. En l'espèce, l'absence de réponse aux démarches répétées de la société Moulin du Teulel témoigne d'un défaut de rigueur de la société Enedis dans le traitement des demandes de cet utilisateur du réseau. La transmission par la société Enedis d'un projet de convention de raccordement entre la société Moulin du Teulel et la société « ERDF » avec une ancienne version du modèle de convention de raccordement ne tenant pas compte du changement de dénomination sociale du gestionnaire de réseau public de distribution d'électricité en est une illustration.
Il y a lieu, toutefois, de constater que l'inexécution de la décision du CoRDiS a pris fin le 16 octobre 2019 lors de cet envoi.
En deuxième lieu, le comité relève que le non-respect de la décision du comité par la société Enedis était susceptible de conduire cette dernière à porter atteinte au fonctionnement du réseau du fait de l'absence de tout cadre contractuel venant encadrer d'un point de vue technique et juridique l'injection dans le réseau public de distribution d'une quantité d'électricité produite à partir d'une source d'énergie renouvelable.
Aux termes de l'article D. 342-10 du code de l'énergie : « Toute installation raccordée à un réseau public d'électricité fait l'objet d'une convention de raccordement et d'une convention d'exploitation entre le demandeur et le gestionnaire du réseau. / Ces conventions sont établies avant la mise en service de l'installation ».
La société Enedis soutient, d'une part, que les installations de production ont bien été techniquement raccordées avant même l'intervention de la décision n° 11-38-16, avec les caractéristiques techniques d'un raccordement définitif et, d'autre part, que la société Moulin du Teulel dispose désormais de l'autorisation d'injecter jusqu'à XX kW mais ne produit que XX kW au maximum.
Le comité relève que l'absence de transmission par la société Enedis d'un projet de convention de raccordement dans les délais prescrits par la décision de règlement du différend du 8 décembre 2017 aurait pu conduire la société Moulin du Teulel à devoir injecter sa production sans convention de raccordement, en méconnaissance des dispositions de l'article D. 342-10 du code de l'énergie qui rend pourtant obligatoire la signature d'une convention de raccordement avant la mise en service de toute installation raccordée à un réseau public d'électricité.
En outre, la société Enedis a soutenu, lors de la séance publique, que la relation contractuelle entre les deux sociétés, en l'absence de convention de raccordement, pouvait découler de la décision n° 11-38-16 du CoRDiS. Toutefois, le comité rappelle qu'une décision de règlement de différend prise en application de l'article L. 134-20 du code de l'énergie donne une solution à un différend mais ne saurait, par elle-même, créer une relation contractuelle ou se substituer à celle-ci, d'autant plus lorsque son dispositif enjoint au gestionnaire de réseau public de distribution d'électricité de proposer les bases de cette relation contractuelle. Ainsi, l'accès au réseau ne saurait légalement résulter, en l'espèce, de la simple décision du CoRDiS.
Par ailleurs, le comité relève qu'il ressort des observations de la société Enedis que le gestionnaire de réseau public de distribution d'électricité ne manifeste aucune réserve ou inquiétude quant à l'éventualité de la survenance d'une telle situation irrégulière, manifestant même son incompréhension que la société Moulin du Teulel se soit limitée à la production des seuls XX kW.
Dès lors, il y a lieu pour le comité de constater le facteur aggravant, qu'il importe de prendre en compte dans l'appréciation du montant de la sanction, doublement caractérisé, d'abord, par l'appréciation portée par la société Enedis sur le fait que l'injection par la société Moulin du Teulel de XX kW dans le réseau public de distribution d'électricité était d'ores et déjà possible, ce qui aurait prévenu tout effet négatif du retard pris dans la transmission d'un projet de convention de raccordement et, ensuite, par le constat que la société Enedis ne semble tenir aucun compte des risques qui pourraient résulter de l'injection d'électricité dans ce réseau sans aucune détermination des prescriptions techniques destinées, notamment, à assurer la sécurité de son exploitation.
En troisième lieu, il y a lieu pour le comité de constater l'atteinte qui est portée au marché par le gestionnaire de réseau public de distribution d'électricité, d'une part, en raison de la méconnaissance du droit d'accès aux réseaux de manière non-discriminatoire de la société Moulin du Teulel, que celle-ci doit pouvoir exercer comme tout producteur d'énergie voulant vendre sa production sur le marché et, d'autre part, en privant le marché des bénéfices de l'intégration d'un nouvel acteur contribuant à l'équilibre de l'offre d'énergie et proposant une offre d'électricité alternative issue de sources d'énergie renouvelables.
Le comité ne peut que relever que le retard pris par la société Enedis a privé le marché de la possibilité d'une injection dans des conditions légalement régulières d'énergie de sources renouvelables.
Sur la situation de l'entreprise intéressée :
En 2020, la société Enedis a réalisé un chiffre d'affaires de 14,2 milliards d'euros et un résultat net après impôt des sociétés de 835 millions d'euros (2).
Par ailleurs, la société Enedis n'a pas fait valoir de difficultés affectant sa capacité financière à exécuter à une sanction pécuniaire.
Compte tenu de sa taille et des moyens humains aussi bien techniques que juridiques à sa disposition et compte tenu de l'ancienneté de la demande de raccordement de la société Moulin du Teulel, qui est un opérateur bien identifié par le gestionnaire de réseau public de distribution d'électricité, la société Enedis était en mesure de tirer toutes les conséquences de la décision du 8 décembre 2017 afin de s'y conformer dans les délais requis.
Pour apprécier le montant de la sanction, le CoRDiS relève que la situation d'ordre monopolistique de la société Enedis dans sa zone de desserte pour la distribution d'électricité, avec une exclusivité couvrant 95 % des réseaux publics de distribution d'électricité, ne permet pas de voie alternative pour accéder à la majeure partie de ces réseaux.
Enfin, le CoRDiS relève la responsabilité particulière qui pèse sur la société Enedis à raison des missions de service public qui lui sont confiées par le code de l'énergie en matière de distribution d'électricité.
Sur l'ampleur du dommage :
La société Moulin du Teulel soutient que dans la mesure où elle ne dispose pas des résultats de l'étude de puissance, elle ne connait pas la puissance qu'elle peut injecter dans le réseau et qu'elle continue, donc, de ne produire que XX kW, ce qui ne lui permet pas de bénéficier d'un contrat d'achat HO7R depuis 2014. Elle évalue la perte de ses recettes à près de XX euros. Elle soutient, en outre, qu'elle n'a pas pu injecter plus XX d'énergie renouvelable dans le réseau, alors même que le besoin de production d'une énergie renouvelable est nécessaire pour la lutte contre le réchauffement climatique.
Le comité estime qu'il convient d'analyser l'ampleur du dommage potentiel causé aux utilisateurs et au réseau sur la seule période correspondante aux manquements de la société Enedis, soit de février 2018 à octobre 2019.
En premier lieu, la société Enedis soutient que le motif exposé par la notification des griefs est insusceptible, en droit, de caractériser « l'ampleur du dommage » au sens de l'article L. 134-27 du code de l'énergie, le Conseil d'État ayant jugé au point 23 de son arrêt, déjà cité, du 18 juin 2021, dit « Lislet 2 », que l'ampleur du dommage doit s'apprécier « en fonction de la perturbation générale apportée au fonctionnement des réseaux et aux dommages subis, le cas échéant, tant par ses utilisateurs que par d'autres acteurs économiques et par les consommateurs finals » ; que le CoRDiS étant incompétent pour statuer sur une demande de dommages-intérêts, seule l'ampleur du dommage se rapportant au fonctionnement du réseau et subi par ses utilisateurs pourrait être pris en compte afin de déterminer le quantum d'une sanction mais qu'un producteur ne saurait être considéré comme un utilisateur de ce réseau.
Le comité rappelle qu'aux termes de l'article L. 134-27, le montant de la sanction doit être proportionné « à l'ampleur du dommage » et considère que rien ne permet de déduire de cette décision du Conseil d'Etat qu'un producteur qui injecte dans le réseau public de distribution d'électricité ne pourrait être regardé comme ayant la qualité d'utilisateur de ce réseau, alors que l'article 2, 36), de la directive (UE) 2019/944 du Parlement européen et du Conseil du 5 juin 2019 concernant des règles communes pour le marché intérieur de l'électricité et modifiant la directive 2012/27/UE, définit l'utilisateur comme « une personne physique ou morale qui alimente un réseau de transport ou un réseau de distribution ou qui est desservie par un de ces réseaux » (soulignement ajouté). Au surplus, le comité souligne que si la société Moulin du Teulel n'était pas un utilisateur de réseau public de distribution d'électricité, elle n'aurait pas été fondée à saisir initialement le CoRDiS d'une demande de règlement de différend l'opposant au gestionnaire de ce réseau.
En deuxième lieu, la société Enedis soutient que la société Moulin du Teulel pouvait bénéficier du tarif d'obligation d'achat d'EDF XX pour une puissance de XX kW puisqu'elle produisait et que ce tarif est fixé de manière rétroactive en tenant compte de la date à laquelle la demande de raccordement complète du producteur est adressée au gestionnaire de réseau public de distribution d'électricité, soit en l'espèce le 3 août 2014 à la suite de la reprise d'étude demandée par la société Moulin du Teulel pour baisser sa puissance de XX à XX kW.
Si la société Moulin du Teulel était éligible au tarif d'achat XX sur la période susmentionnée, il n'en demeure pas moins qu'en l'absence de convention de raccordement, elle n'était pas autorisée à produire réellement avec une puissance de XX kW et, donc, ne pouvait ni vendre une telle quantité d'énergie sur le marché ni bénéficier du tarif d'achat XX, ainsi que l'a reconnu la société Enedis lors de la séance publique.
Partant, il apparaît que le retard pris par la société Enedis pour exécuter la décision de règlement de différend n° 11-38-16 est susceptible d'avoir empêché la société Moulin du Teulel de bénéficier, dans des conditions normales, d'un contrat d'obligation d'achat XX sur une période courant de février 2018 à octobre 2019.
En troisième lieu, le CoRDiS estime que la circonstance alléguée par la société Enedis qu'aucune défaillance du réseau au détriment de la société Moulin du Teulel n'est à constater ne saurait constituer en soi un motif justifiant ou atténuant le manquement du gestionnaire de réseau public de distribution d'électricité.
Sur les avantages tirés par la société Enedis :
En premier lieu, la société Enedis soutient qu'elle n'aurait « pu bénéficier d'un quelconque vide juridique » résultant de l'absence de convention de raccordement dans l'hypothèse théorique d'un dommage lié à l'exploitation des installations de production de la société Moulin du Teulel, puisque cette dernière aurait pu se prévaloir des stipulations du CARD-I entré en vigueur au 1er avril 2014 couvrant les manquements aux engagements de la société Enedis en matière de continuité, de qualité de l'onde et relatives aux fautes et négligences du gestionnaire de réseau public de distribution d'électricité et qu'elle aurait, également, pu invoquer devant le juge l'ensemble des obligations légales et réglementaires qui incombent à ce gestionnaire.
Le CoRDiS estime, cependant, que s'il existait bien un cadre juridique pour l'utilisation d'installations d'une puissance de XX kW, aucune stipulation contractuelle ne permettait d'encadrer le branchement d'installations d'une puissance de XX kW.
En outre, la société Enedis ne saurait sérieusement soutenir que l'absence de tout contrat entre un utilisateur d'un réseau public de distribution d'électricité et le gestionnaire de ce réseau pourrait être palliée par la seule invocation devant le juge des obligations qui s'imposent à ce gestionnaire en application de la loi. En effet, l'absence d'un cadre contractuel pour une installation de puissance de XX kW aurait conduit le producteur à injecter une puissance de XX kW dans le réseau dans des conditions également irrégulières.
En considération de l'ensemble des circonstances de l'espèce, le comité estime que l'ampleur et la gravité du dommage résultent pour l'essentiel de la négligence et de la désorganisation interne du gestionnaire de réseau public de distribution d'électricité, dont il n'a pas été démontré qu'il ait cherché à tirer parti de la situation qu'il a laissée se constituer. A cet égard, demeure sans incidence sur cette appréciation la mention faite pour la première fois à l'audience d'un audit destiné à permettre l'adoption de mesures correctrices, qui n'ont fait l'objet d'aucune production permettant d'en apprécier la portée et qui, en tout état de cause, sont postérieures à la période de manquement retenue ci-dessus,
En second lieu, la société Moulin du Teulel soutient que la société Enedis a essayé de tirer un avantage total de XX euros constitué, d'une part, de XX euros liés à l'absence de communication des résultats de l'étude de puissance transitant dans le transformateur, ce montant se déterminant par la différence entre, d'un côté, le montant de XX euros de la proposition technique et financière adressée par la société ERDF, devenue Enedis, intégrant un branchement surdimensionné de XX kW, qui aurait permis notamment le financement par l'utilisateur du réseau du remplacement de l'enceinte du transformateur existant qui n'était plus aux normes et qui était pourtant à la charge de la société ERDF et, d'un autre côté, la deuxième proposition de la société Enedis pour un montant de XX euros avec un transformateur de XX kW mais conditionnée par l'obligation pour le demandeur de réduire sa demande de puissance à XX kW. D'autre part, cet avantage total serait composé de XX euros liés au refus de dédommager le préjudice résultant de l'absence de traitement de sa demande de raccordement et les non-lectures de comptage pour un montant de XX euros.
Toutefois, le comité estime que la société Moulin du Teulel n'apporte pas d'éléments suffisants au soutien de sa démonstration et qu'il ne résulte pas de l'instruction que la société Enedis ait jouit d'un tel bénéfice financier.

6.4. Détermination de la sanction

Compte tenu de l'ensemble des éléments d'appréciation de la sanction exposé ci-dessus, il y a lieu de prononcer une sanction pécuniaire proportionnée de cent mille euros (100 000 €) à l'encontre de la société Enedis.
Par ailleurs, eu égard aux exigences d'intérêt général et d'ordre public qui s'attachent à ce qu'elle soit connue de l'ensemble des acteurs du marché de l'énergie, le comité décide que sa décision sera publiée en application des dispositions du premier alinéa de l'article L. 134-34 du code de l'énergie, d'une part, au Journal officiel de la République française et, d'autre part, sur le site internet de la Commission de régulation de l'énergie. Au regard des faits de l'espèce et de la sanction qu'ils justifient, il sera fait une juste appréciation des modalités de son maintien en ligne sur ce site internet en fixant cette période à deux ans à compter de sa première publication, sans anonymisation de l'identité de la société sanctionnée pendant cette période et sous réserve des secrets protégés par la loi.
Décide :


Historique des versions

Version 1

Une demande de sanction, introduite par la société Moulin du Teulel, a été enregistrée le 21 juin 2019, sous le numéro 02-40-19, à l'encontre de la société Enedis ;

Elle est relative au non-respect par la société Enedis de la décision de règlement de différend n° 11-38-16 en date du 8 décembre 2017.

1. Rappel des faits et de la procédure

1.1. Rappel des faits

Le comité de règlement des différends et des sanctions est saisi des faits ci-après.

Il ressort des pièces du dossier que la société Moulin du Teulel, société à responsabilité limitée, immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Rodez sous le numéro 524 806 502, dont le siège social est situé 431, chemin du Teulel à Villefranche-de-Rouergue, représentée par son gérant, M. Andréas Rick, exerce une activité de production d'électricité par une centrale hydroélectrique.

Il ressort également des pièces du dossier qu'un différend est né entre la société Moulin du Teulel et la société Enedis relatif à une demande de raccordement d'une installation de production existante, appartenant à la société Moulin du Teulel, comprenant la rénovation de deux turbines existantes, l'augmentation de puissance des installations et le renouvellement du dispositif de comptage.

Dans ces conditions, la société Moulin de Teulel a saisi le comité de règlement des différends et des sanctions d'une demande de règlement de différend, assortie d'une demande de mesures conservatoires, relatives aux conditions de raccordement d'une nouvelle installation de production hydroélectrique au réseau public de distribution et au comptage de l'installation de production hydroélectrique existante.

1.2. Exposé de la procédure de règlement du différend et de la demande de mesures conservatoires

1.2.1. Exposé de la procédure de règlement du différend

Vu la demande de règlement de différend, enregistrée le 2 décembre 2015 et régularisée le 15 avril 2016 sous le numéro 11-38-16, présentée par la société Moulin du Teulel, représentée par son gérant, M. Andréas Rick.

Par une décision n° 11-38-16 du 8 décembre 2017, le comité de règlement des différends et des sanctions a décidé que :

Article 1er. - La société Enedis communiquera à la société Moulin de Teulel, avant le 8 février 2018 au plus tard, une nouvelle convention de raccordement prenant en compte la protection de découplage conforme à la norme DIN VDE 0126-1-1/A1 disposant de réglages VFR2014 et les résultats de l'étude sur la puissance transitant dans le transformateur du poste de distribution publique.

Article 2. - Le montant de la prestation de reprise d'étude n'a pas à être mis à la charge de la société Moulin du Teulel.

Article 3. - La société Enedis n'a pas régulièrement exécuté le contrat CARD-I en ce qui concerne la mise à disposition des données de comptage.

Article 4. - La société Enedis communiquera à la société Moulin de Teulel, avant le 15 janvier 2018 au plus tard, un nouveau devis pour le remplacement des dispositifs de comptage de type électromécanique en type électronique.

Article 5. - Le surplus des demandes de la société du Moulin du Teulel est rejeté.

Article 6. - La présente décision sera notifiée à la société du Moulin du Teulel et à la société Enedis. Elle sera publiée au Journal officiel de la République française. »

1.2.2. Exposé de la procédure de demande de mesures conservatoires

Vu la demande de mesures conservatoires, enregistrée le 2 décembre 2015 et régularisée le 15 avril 2016 sous le numéro 11-38-16, présentée par la société Moulin du Teulel, représentée par son gérant, M. Andréas Rick.

Vu la décision du comité de règlement des différends et des sanctions de la Commission de régulation de l'énergie en date du 17 octobre 2016 par laquelle le comité a décidé, à titre conservatoire, que l'utilisation temporaire d'une protection de découplage conforme à la norme DIN VDE 0126-1-1/A1 disposant de réglages VFR2014 pouvait être mise en œuvre dans l'installation de production hydroélectrique de la société Moulin de Teulel.

Vu la demande de sanction, enregistrée le 31 mars 2017 sous le numéro 01-40-17, présentée par la société Moulin du Teulel, représentée par son gérant, M. Andréas Rick.

Vu la décision du 26 février 2019 du membre désigné du comité de règlement des différends et des sanctions relative à la demande de sanction introduite par la société Moulin du Teulel à l'encontre de la société Enedis, enregistrée sous le numéro 01-40-17, décidant qu'il n'y avait lieu de poursuivre le gestionnaire de réseau public de distribution d'électricité.

1.3. Exposé des échanges entre la société Enedis et la société Moulin du Teulel à la suite de la décision n° 11-38-16

Vu la décision n° 11-38-16 du 8 décembre 2017 du comité de règlement des différends et des sanctions.

Les 20 et 25 février 2018, la société Moulin du Teulel a indiqué à la société Enedis qu'à la suite de la décision n° 11-38-16 du CoRDiS, plusieurs points étaient encore en cours relatifs à la transmission de la convention de raccordement, aux dédommagements pour des pertes d'exploitation et à la désinstallation d'un ancien câble.

Le 25 février 2018, la société Enedis a accusé réception du courrier électronique du même jour de la société Moulin du Teulel.

Le 17 mars 2019, la société Moulin du Teulel a enjoint à la société Enedis de se conformer à la décision du 8 décembre 2017 avant le 1er avril 2019. Elle indiquait qu'en l'absence de réponse de sa part, elle saisirait à nouveau le CoRDiS d'une demande de sanction.

Vu la demande de sanction, enregistrée le 21 juin 2019, sous le numéro 02-40-19, présentée par la société Moulin du Teulel, représentée par son gérant, M. Andréas Rick.

La société Moulin du Teulel demande au comité de règlement des différends et des sanctions de prononcer une sanction à l'encontre de la société Enedis en raison du non-respect par cette dernière de la décision n° 11-38-16 du 8 décembre 2017.

La société Moulin du Teulel soutient que la société Enedis ne s'est pas conformée à la décision du CoRDiS en ne lui transmettant ni un projet de convention de raccordement prenant en compte une protection de découplage DIN VDE 126-1-1/A1 ni l'étude sur la puissance transitant dans le transformateur du poste de distribution publique ; que, par conséquent, elle demeure raccordée au réseau public de distribution d'électricité par une installation provisoire qui ne respecte ni sa demande ni la réglementation et ce malgré des relances de sa part auprès du gestionnaire de réseau public de distribution d'électricité ; qu'enfin, cette situation lui a causé plusieurs préjudices estimés au total à au moins XX euros.

2. Ouverture, sur le fondement des articles L. 134-25-1 et R. 134-30 du code de l'énergie, de la procédure d'instruction et les griefs retenus

Vu la décision du président du comité de règlement des différends et des sanctions, en date du 15 juillet 2019, désignant M. Nicolas Maziau membre du comité en charge de l'instruction (ci-après : le « membre désigné »), en application de l'article R. 134-30 du code de l'énergie.

2.1. Rappel de la procédure suivie par le membre désigné

2.1.1. Cadre juridique applicable

Depuis l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2020-891 du 20 juillet 2020 relative aux procédures du comité de règlement des différends et des sanctions de la Commission de régulation de l'énergie, applicable aux procédures de sanctions enregistrées à la date du 24 juillet 2020, l'article L. 134-25-1 du code de l'énergie prévoit que : « Dès réception de la demande de sanction, sauf cas d'irrecevabilité manifeste, le président du comité de règlement des différends et des sanctions désigne un membre de ce comité, titulaire ou suppléant, chargé de l'instruction avec le concours des agents de la Commission de régulation de l'énergie. / Le membre désigné peut, lorsqu'il l'estime nécessaire, entendre la personne mise en cause ou toute autre personne utile à la solution du litige. / Il peut également demander à la personne mise en cause ou toute autre personne concernée de lui donner tout renseignement ou de produire toute pièce, tout document ou toute information utile à la solution du litige. / Il peut inviter les personnes mentionnées aux deux alinéas précédents à produire des observations. / […] Il notifie les griefs. Si les faits dont il a connaissance au cours de l'instruction lui paraissent susceptibles de constituer un manquement supplémentaire, le membre désigné notifie les nouveaux griefs à la personne poursuivie ainsi qu'à toute personne concernée et recueille leurs observations ».

Aux termes de l'article L. 134-28 du code de l'énergie : « Les sanction énumérées à l'article L. 134-27 sont également encourues, sur saisine des parties au règlement de différend, du ministre chargé de l'énergie, du président de la Commission de régulation de l'énergie, d'une organisation professionnelle, d'une association agréée d'utilisateurs ou de toute autre personne concernée, lorsque le gestionnaire, l'opérateur, l'exploitant ou l'utilisateur d'un réseau, d'un ouvrage ou d'une installation ou le fournisseur d'électricité ou de gaz naturel mentionné à l'article L. 134-25 ne s'est pas conformé dans les délais requis à une décision prise par le comité en application des articles L. 134-20 et L. 134-22, sans qu'il y ait lieu de le mettre préalablement en demeure ».

Aux termes de l'article L. 134-31 du code de l'énergie : « Les sanctions sont prononcées après que la personne mise en cause, qui a reçu notification des griefs par le membre désigné en application de l'article L. 134-25-1, a été mise à même, assistée par toute personne de son choix, de consulter le dossier et de présenter ses observations écrites et, lors de la séance publique, orales ».

Aux termes de l'article R. 134-30 du code de l'énergie : « Pour chaque affaire, le président du comité de règlement des différends et des sanctions désigne un membre de ce comité chargé, avec le concours des agents de la Commission de régulation de l'énergie, de l'instruction. Le cas échéant, ce membre adresse la mise en demeure prévue à l'article L. 134-26 et notifie les griefs. Il peut ne pas donner suite à la saisine. […] ».

En outre, selon l'article 14 de la décision du 13 février 2019 portant adoption du règlement intérieur du comité de règlement des différends et des sanctions de la Commission de régulation de l'énergie, « s'il y a lieu, le membre désigné notifie les griefs, les sanctions encourues et la sanction qu'il entend proposer au comité de règlement des différends et des sanctions. Cette notification est adressée à la personne mise en cause qui dispose d'un délai ne pouvant pas être inférieur à quinze jours pour présenter au comité de règlement des différends et des sanctions ses observations écrites ».

Il résulte de ces dispositions qu'en cas de non-respect d'une décision de règlement de différend prise par le CoRDiS en application de l'article L. 134-20 du code de l'énergie, le membre désigné du comité peut notifier des griefs, sans avoir préalablement mis l'intéressé en demeure de se conformer à cette décision.

2.1.2. Echanges contradictoires antérieurs à la notification des griefs

Par un courrier en date du 30 septembre 2019, le membre désigné a communiqué à la société Enedis la demande de sanction formée par la société Moulin du Teulel à son encontre.

Par un courrier en date du 30 septembre 2019, le membre désigné a demandé à la société Moulin du Teulel de lui adresser une copie des courriers électroniques qu'elle aurait envoyés à la société Enedis afin de lui demander d'exécuter la décision de règlement de différend. Ces courriers électroniques ont été transmis le 5 octobre 2019 par la société Moulin du Teulel et communiqués à la société Enedis le 4 novembre 2019.

Par des observations enregistrées le 16 octobre 2019 et communiquées à la société Moulin du Teulel le 4 novembre 2019, la société Enedis, représentée par Me Bergerot et Me de Pouzilhac, fait valoir qu'elle a correctement exécuté la décision du CoRDiS du 8 décembre 2017, dès lors :

- que les travaux de raccordement des installations exploitées par la société Moulin du Teulel ont été terminés le 20 novembre 2015 et que les installations ont été mises en service le 27 décembre 2016, soit dès avant l'intervention de la décision du CoRDiS ;

- que ce raccordement, qui est définitif et non provisoire, prend en compte la protection de découplage conforme à la norme DIN VDE 0126-1-1/A1 disposant de réglages VFR2014, conformément à la décision du CoRDiS ;

- qu'elle a abandonné le projet de travaux de changement du poste de distribution publique et a uniquement procédé à une mutation du transformateur de XX kVA à XX kVA au sein du même poste de distribution ;

- qu'elle a remboursé la prestation de reprise d'études en ayant envoyé un chèque à la société Moulin du Teulel mais que, pour une raison inconnue, cette dernière ne l'a pas encaissé ;

- enfin, que si les « conditions particulières de la convention de raccordement » de la société Moulin du Teulel, datées du 15 février 2018, qui reprennent ces différents éléments, n'avaient jusqu'à présent pas été transmises à cette société, elles lui ont désormais été communiquées ; qu'en tout état de cause, ce « contretemps administratif » est sans incidence sur le respect de l'exécution de la décision du CoRDiS d'un point de vue technique et financier.

Le 27 octobre 2019, la société Moulin du Teulel a indiqué à la société Enedis avoir bien reçu la version 3 du CARD-I envoyée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception mais soutient qu'elle attend encore l'envoi d'un projet de convention de raccordement prenant en compte une puissance maximale de XX kVA et le détail de calcul des prix ; que, par ailleurs, elle attend encore la prise en compte de ses demandes de dédommagements et la dépose d'un ancien câble.

Par de nouvelles observations enregistrées le 27 octobre 2019 et communiquées à la société Enedis le 4 novembre 2019, la société Moulin du Teulel conclut aux mêmes fins que sa saisine, par les mêmes moyens et soutient en outre :

- que si elle a reçu le 16 octobre 2019, de la part de la société Enedis, une nouvelle version du projet de convention de raccordement prenant en compte la protection de découplage prévue par la décision de règlement de différend du CoRDiS, aucune conséquence n'en a cependant été tirée s'agissant, par exemple, du maintien d'une prestation de vérification de la protection de découplage qui n'a désormais plus lieu d'être ;

- qu'elle n'a pas été remboursée de la prestation de reprise d'étude ;

- que sa demande de bénéficier d'une puissance d'injection de XX kW n'a pas été pris en compte ;

- que la société Enedis n'a pas achevé les travaux de raccordement qui lui incombent.

Le 4 novembre 2019, la société Moulin du Teulel a relancé la société Enedis en lui demandant une réponse à la suite de son courrier électronique du 27 octobre 2019.

Le 5 novembre 2019, la société Enedis a accusé réception du courrier électronique de la société Moulin du Teulel du 27 octobre 2019.

Par de nouvelles observations enregistrées le 18 novembre 2019 et communiquées le 25 novembre 2019 à la société Moulin du Teulel, la société Enedis conclut aux mêmes fins que ses précédentes observations, par les mêmes moyens et soutient, en outre :

- qu'elle a complètement exécuté la décision du CoRDiS en transmettant un projet de convention de raccordement prévoyant la protection de découplage mentionnée dans cette décision ; que le prix de la prestation de vérification de la protection de découplage prévu dans le projet de contrat n'est pas affecté par la protection de découplage choisie par la société Moulin du Teulel ;

- que, s'agissant du remboursement de la prestation de reprise d'études, le premier chèque n'a jamais été encaissé mais qu'en tout état de cause un nouveau chèque a été envoyé à la société Moulin du Teulel par lettre recommandée ;

- que la décision du CoRDiS n'oblige pas le gestionnaire de réseau à prendre en compte une puissance de branchement de XX kW, la société Moulin du Teulel ayant modifié sa demande initiale, qui ne mentionnait qu'une puissance de XX kW ; que, par conséquent, l'étude de raccordement de la version 3 des conditions particulières de la convention de raccordement tient compte d'une puissance de XX kW ;

- que c'est en fonction de cette demande, portant sur une puissance de XX kW, qu'elle s'est bornée à modifier le transformateur en le faisant passer de XX kVA à XX kVA au sein du même poste de distribution ;

- que le dédommagement sollicité par la société Moulin du Teulel au titre de la perte d'exploitation qu'elle aurait subi est hors du champ d'application de la décision de règlement de différend du CoRDiS, lequel a rejeté les prétentions indemnitaires de la demanderesse ;

- que, depuis la mise en service de ses installations en décembre 2016, la société Moulin du Teulel peut injecter sa production sur le réseau et qu'elle n'est donc pas fondée à réclamer une indemnisation au titre de l'exploitation de ses installations ;

- que la dépose des anciennes installations ne relève pas d'une obligation issue de la décision du CoRDiS mais qu'elle va néanmoins procéder à cette intervention le 25 novembre 2019.

Par de nouvelles observations enregistrées le 18 novembre 2019 et communiquées le 25 novembre 2019 à la société Enedis, la société Moulin du Teulel conclut aux mêmes fins que par sa saisine, par les mêmes moyens et soutient, en outre :

- que contrairement à ce que prétend la société Enedis, les travaux de raccordement des installations et de désinstallation du point de livraison utilisé avant la mise en service, qui étaient prévus dans le contrat, ne sont toujours pas achevés et que l'installation existante continue, dès lors, de présenter les caractéristiques d'une installation provisoire ;

- que le projet de convention de raccordement finalement transmis par la société Enedis ne tire pas toutes les conséquences de la mise en place de la protection de découplage prévue par la décision de règlement de différend du CoRDiS ;

- que sa demande de puissance de XX kW, antérieure à la reprise d'étude annulée par le CoRDiS, est la seule qui fasse foi, dès lors que ce sont les indications erronées fournies par la société Enedis qui l'ont induite en erreur et l'ont conduite à présenter une demande de puissance d'injection de XX kW alors même que cela n'était pas justifié techniquement ;

- que la société Enedis doit, par conséquent, réaliser une nouvelle étude fondée sur une puissance de XX kW qui établira que le transformateur existant est de XX kVA et qu'il convient par la suite que la société Enedis lui propose un nouveau projet de convention de raccordement tenant compte d'une puissance d'injection de XX kW ;

- que les justifications avancées par la société Enedis pour expliquer le retard avec lequel elle lui a transmis une nouvelle proposition de convention de raccordement ne sont pas crédibles ; qu'il en est de même s'agissant de l'envoi allégué d'un chèque destiné à rembourser la prestation de reprise d'études.

Le 24 novembre 2019, la société Enedis a répondu à la société Moulin du Teulel lui indiquant, d'une part, ne pas pouvoir lui apporter de nouveaux éléments, autres que ceux mentionnés dans ses observations dans le cadre de la procédure de sanction en cours et, d'autre part, qu'elle allait recevoir une nouvelle lettre-chèque pour le remboursement de la prestation de reprise d'étude et que des travaux prévus le 25 novembre 2019 par son prestataire permettraient la dépose de l'ancien câble.

Par de nouvelles observations enregistrées le 6 décembre 2019 et communiquées le 19 décembre 2019 à la société Enedis, la société Moulin du Teulel conclut aux mêmes fins que par sa saisine, par les mêmes moyens et soutient, en outre :

- que la vérification de protection de découplage ne constitue pas une prestation forfaitaire indivisible ; qu'il n'y a pas lieu pour elle de payer cette prestation compte tenu de la protection de découplage désormais mise en œuvre à la suite de la décision de règlement de différend du comité ; que la société Enedis doit détailler les différents travaux à réaliser au sein de sa proposition technique et financière ;

- que les anciens câbles n'ont finalement été déposés que le 25 novembre 2019 et uniquement en raison de la procédure qu'elle a initiée devant le CoRDiS.

Par un courrier en date du 9 décembre 2019, le membre désigné a demandé à la société Enedis de lui adresser une copie des « Conditions Particulières de la Convention de Raccordement » qui auraient été transmises le 16 octobre 2019 à la société Moulin du Teulel. La société Enedis a répondu à cette demande le 11 décembre 2019.

Par de nouvelles observations enregistrées le 9 décembre 2019 et communiquées le 19 décembre 2019 à la société Moulin du Teulel, la société Enedis conclut aux mêmes fins que par ses précédentes observations, par les mêmes moyens.

Par de nouvelles observations enregistrées le 2 janvier 2020 et communiquées le 19 février 2020 à la société Enedis, la société Moulin du Teulel conclut aux mêmes fins que par ses précédentes observations, par les mêmes moyens.

Par des courriers en date du 19 février 2020, le membre désigné a demandé à la société Enedis et à la société Moulin du Teulel de lui indiquer si les « Conditions Particulières de la Convention de Raccordement » qui auraient été adressées à la demanderesse avaient été signées par les deux parties et de lui communiquer, le cas échéant, une copie de cette convention.

Par de nouvelles observations enregistrées le 21 février 2020, la société Moulin du Teulel indique n'avoir pas signé ce projet de convention de raccordement dans la mesure où il ne correspond, selon elle, ni à sa demande ni aux prescriptions de la décision de règlement de différend du CoRDiS.

Par de nouvelles observations enregistrées le 27 février 2020, la société Enedis indique que ce projet de convention de raccordement a été transmis à la société Moulin du Teulel, qui ne l'a pas retourné signé.

2.2. Notifications des griefs

Vu la décision du membre désigné du comité de règlement des différends et des sanctions de la Commission de régulation de l'énergie, en date du 6 août 2021, portant notification des griefs à la société Enedis.

2.2.1. Constatations du membre désigné

Sur la transmission à la société Moulin du Teulel du projet d'une nouvelle convention de raccordement et des résultats de l'étude sur la puissance transitant dans le transformateur du poste de distribution publique :

Le membre désigné constate qu'il ressort de l'instruction que la société Enedis n'a pas transmis à la société Moulin du Teulel de projet de convention de raccordement, pas plus que les résultats de l'étude sur la puissance transitant dans le transformateur du poste de distribution publique, avant le 16 octobre 2019, alors même que le CoRDiS lui avait enjoint de le faire avant le 8 février 2018 aux termes de sa décision n° 11-38-16, ces transmissions étant ainsi intervenues plus de 20 mois après l'expiration du délai qui lui était imparti.

Sur le fond, le membre désigné estime que le projet de convention de raccordement transmis par la société Enedis est conforme à la décision du CoRDiS n° 11-38-16, d'une part, en ce qu'il prend en compte la protection de découplage conforme à la norme DIN VDE 0126-1-1/A1 disposant de réglages VFR2014 et, d'autre part, en ayant retenu une puissance d'injection de XX kW conforme à la fiche de collecte de renseignement signée par le gérant de la société Moulin du Teulel et compatible avec un transformateur de XX kW.

Partant, le membre désigné constate qu'en ne s'étant pas conformée dans les délais prescrit à la décision du CoRDiS n° 11-38-16, la société Enedis a méconnu les dispositions de l'article L. 134-28 du code de l'énergie.

Sur le remboursement de la prestation de reprise d'études :

Le membre désigné constate que la société Enedis n'établit pas avoir envoyé à la société Moulin du Teulel une lettre-chèque le 20 février 2018 afin de procéder au remboursement de la prestation de reprise d'études mais n'y a procédé effectivement que seulement près de deux ans après le prononcé de la décision du CoRDiS.

Le membre désigné relève, toutefois, que le comité n'avait pas explicitement imparti de délai à la société Enedis pour procéder à ce remboursement. Dès lors, la société Enedis ne saurait être regardée comme ayant méconnu une obligation qui lui incombait spécifiquement en application de la décision de règlement de différend du 8 décembre 2017 et, par conséquent, n'a pas méconnu les dispositions de l'article L. 134-28 du code de l'énergie, tout en prenant un retard inexplicable pour procéder au règlement dû à la société Moulin du Teulel.

Sur la réalisation des travaux de dépose de l'ancienne installation :

Le membre désigné relève que les travaux de dépose de l'ancienne installation du point de livraison n'ont pas fait l'objet d'une injonction spécifique du comité dans sa décision et qu'il ressort de l'instruction que ces travaux ont été réalisés le 25 novembre 2019.

Par la suite, aucun grief relatif à la réalisation des travaux de dépose de l'ancienne installation ne saurait être retenu contre la société Enedis.

Sur la demande indemnitaire de la société Moulin du Teulel :

Le membre désigné rappelle qu'aucune disposition du code de l'énergie ne confère au CoRDiS la compétence pour statuer sur des conclusions indemnitaires.

Dès lors, la demande présentée par la société Moulin du Teulel de se voir indemniser en raison des préjudices qu'elle estime avoir subis ne saurait prospérer.

2.2.2. Griefs retenus par le membre désigné

Le membre désigné du comité de règlement des différends et des sanctions a fait grief à la société Enedis :

« d'avoir méconnu les dispositions précitées de l'article L. 134-28 du code de l'énergie, dès lors qu'elle ne s'est pas conformée dans les délais requis à la décision de règlement de différend n° 11-38-16 du 8 décembre 2017 puisqu'elle n'a transmis à la société Moulin du Teulel un projet de convention conforme aux prescriptions de cette décision ainsi que les résultats de l'étude mentionnée dans cette décision que le 16 octobre 2019, soit avec un retard de 20 mois et huit jours. »

Aux termes de la notification des griefs, le membre désigné estime qu'une sanction pécuniaire devrait être prononcée à l'encontre de la société Enedis dont le montant pourrait être fixé entre 100 000 euros et 150 000 euros.

Conformément aux dispositions de l'article R. 134-32 du code de l'énergie, la société Enedis a été invitée par la notification des griefs à présenter ses observations en réponse avant le 1er octobre 2021 à 12 heures et à consulter le dossier.

Vu le courrier électronique en date du 3 septembre 2021 par lequel la société Enedis a demandé à consulter le dossier.

Le 8 septembre 2021, la société Enedis a eu accès à l'ensemble des pièces du dossier de la notification des griefs au sein des locaux de la Commission de régulation de l'énergie. Le conseil de la société Enedis a été autorisé à télécharger l'ensemble des pièces du dossier sur une clé USB.

3. Observations en réponse à la notification des griefs

Vu les observations de la société Moulin du Teulel à la suite de la notification des griefs adressée à la société Enedis, enregistrées le 21 août 2021.

La société Moulin du Teulel soutient que, contrairement à l'analyse du membre désigné dans la notification des griefs, la société Enedis n'a pas communiqué le résultat de l'étude sur la puissance du transformateur, ce qui ne permet pas de conclure, d'une part et de manière définitive, sur la nécessaire réduction de puissance de branchement de XX kW à XX kW pour obtenir un branchement sur un transformateur de XX kW comme elle le souhaitait et, d'autre part, sur la bonne exécution de la décision n° 11-38-16 du CoRDiS.

Vu les observations en réponse à la notification des griefs enregistrées le 30 septembre 2021 de la société Enedis, représentée par sa présidente du directoire, Mme Marianne Laigneau, et ayant pour avocats, Me Damien Bergerot et Me Cédric de Pouzilhac, Cabinet Aramis, 9, rue Scribe, 75009 Paris.

La société Enedis demande au comité de règlement des différends et des sanctions :

- à titre principal, de rejeter la demande de sanction ;

- à titre subsidiaire, de prononcer une sanction d'un montant proportionné au manquement, purement formel, de la société Enedis, laquelle n'a à aucun moment eu l'intention de se soustraire à l'exécution de la décision n° 11-38-16.

S'agissant de l'exécution de la décision n° 11-38-16, la société Enedis soutient tout d'abord que, sur un plan technique, la décision a été exécutée dans les délais fixés par le CoRDiS puisque les travaux de raccordement des installations de la société Moulin du Teulel ont été achevés le 20 novembre 2015, avant même la saisine initiale du comité et que ces installations ont été mises en service le 27 décembre 2016, conformément à la décision portant mesures conservatoires n° 10-38-16 du 17 octobre 2016, permettant à la société Moulin du Teulel de bénéficier d'un raccordement présentant les caractéristiques techniques d'un raccordement définitif ; que c'est d'ailleurs ce qu'a confirmé le membre désigné dans sa décision du 26 février 2019 de non-lieu à notifier des griefs à la société Enedis.

Elle soutient, en outre, que la société Moulin du Teulel maintient sa demande de sanction sur le seul motif qu'elle demande une nouvelle modification technique de son raccordement pour augmenter sa puissance de XX à XX kW et que c'est la raison pour laquelle elle n'a toujours pas accepté de signer le projet de la convention de raccordement reflétant parfaitement les conditions techniques rappelées par le comité et qu'elle a adressée il y près de deux ans à la demanderesse, alors même que la société Moulin du Teulel est en capacité d'injecter et injecte d'ores et déjà sur le réseau public de distribution d'électricité depuis le 27 décembre 2016.

S'agissant du retard dans la transmission du projet de la convention de raccordement à la société Moulin du Teulel, la société Enedis fait valoir que ce retard n'est aucunement volontaire et ne résulte que d'une erreur interne ; que les « Conditions Particulières de la Convention de Raccordement » ont été éditées dans une troisième version le 15 février 2018 pour tenir compte du type de protection de découplage installée au point de livraison, conformément à la décision du CoRDiS, ce que reconnaît le membre désigné dans sa décision de notification des griefs, et pour tenir compte des résultats de l'étude sur la puissance transitant dans le transformateur du poste de distribution publique qui ne requiert plus le changement de ce poste, contrairement à ce qu'elle soutenait jusqu'ici.

Si, en raison d'une erreur interne, la société Enedis n'a pas directement transmis ces « Conditions Particulières » à la société Moulin du Teulel, elle soutient qu'elle a régularisé cette situation le 16 octobre 2019 mais que, depuis cette date, la demanderesse ne l'a pas retournée signée. Ainsi, elle fait valoir qu'elle ne conteste pas ce grief mais que seul un retard dans la transmission du projet de convention de raccordement peut lui être reproché et qu'elle n'a cherché en aucune manière à se soustraire aux injonctions du CoRDiS.

En outre, elle soutient que nonobstant l'absence de signature d'une convention de raccordement, elle a traité la société Moulin du Teulel comme tout producteur injectant normalement sur le réseau en réalisant pour elle des prestations de comptage et de relève.

S'agissant du remboursement de la prestation de reprise d'étude, elle soutient qu'une première lettre-chèque éditée le 20 février 2018 a été adressée à la société Moulin du Teulel qui ne l'a pas encaissée, de sorte qu'elle a été amenée à envoyer un nouveau chèque, qui a été cette fois encaissé.

S'agissant de la sanction encourue, la société Enedis soutient tout d'abord que le Conseil d'Etat, en réformant le montant fixé dans une décision du comité, a récemment rappelé, dans sa décision n° 422616 du 18 juin 2021 dite « Lislet 2 », la nécessaire proportionnalité d'une sanction.

Sur la gravité du manquement qui lui est imputé, la société Enedis fait valoir que, contrairement à ce que soutient le membre désigné, elle n'a pas entrepris d'exécuter la décision du CoRDiS une fois seulement qu'elle a eu connaissance de l'instruction menée dans le cadre de la procédure de sanction ; qu'elle a, en effet, tout mis en œuvre pour permettre le raccordement technique et effectif de la société Moulin du Teulel dès la fin de l'année 2016, soit bien avant la demande de sanction enregistrée le 15 juin 2019 ; et que, par ailleurs, elle a bien exécuté l'entièreté de la décision du CoRDiS, même avec du retard, puisque deux semaines seulement séparent la réception de la notification de la demande de sanction par la société Enedis le 30 septembre 2019 de l'envoi du projet de convention à la société Moulin du Teulel le 16 octobre 2019.

Sur l'absence d'avantages tirés par la société Enedis de l'exécution tardive de la décision du CoRDiS, elle soutient que, contrairement à l'analyse qui résulte de la notification des griefs, dans l'hypothèse théorique d'un dommage lié à l'exploitation des installations de production de la société Moulin du Teulel et nonobstant l'absence de convention de raccordement, il aurait bien existé un cadre contractuel afin que la demanderesse puisse agir à l'encontre du gestionnaire de réseau public de distribution d'électricité en se fondant sur les stipulations du CARD-I puisque ce contrat définit les conditions techniques, juridiques et financières de l'injection d'énergie dans le réseau ; qu'un CARD-I a bien été signé avec la société Moulin du Teulel en date du 31 mars 2014 avec prise d'effet au 1er avril 2014 couvrant les manquements aux engagements de la société Enedis en matière de continuité et de qualité de l'onde et définissant les fautes et négligences du gestionnaire de réseau public de distribution d'électricité ; que, dès lors, la société Enedis n'aurait pu bénéficier d'un quelconque vide juridique.

La société Enedis soutient, en outre, qu'un éventuel vide juridique aurait été également préjudiciable pour elle et que le cadre contractuel dont peut se prévaloir la société Moulin du Teulel inclut également l'ensemble des obligations légales et réglementaires qui incombent au gestionnaire de réseau public de distribution d'électricité et sa documentation technique de référence, qui auraient pu être invoquées devant le juge sur le fondement délictuel de l'article 1240 du code civil.

Elle soutient, enfin, qu'aucun dommage en lien avec une défaillance du réseau n'est à constater et qu'elle n'a retiré aucun gain économique ou un quelconque avantage concurrentiel ni n'a transféré un risque financier sur la société Moulin du Teulel du fait de l'exécution tardive de la décision du CoRDiS.

Sur l'ampleur des dommages causés à la société Moulin du Teulel, la société Enedis soutient que, contrairement au lien effectué par le membre désigné dans la notification des griefs entre le retard dans la signature de la convention de raccordement et le bénéfice de l'obligation d'achat, le tarif est fixé par « EDF Obligation d'achat » de manière rétroactive en tenant compte de la date à laquelle la demande de raccordement complète du producteur est adressée au gestionnaire de réseau public de distribution d'électricité, soit en l'espèce le 3 août 2014 à la suite de la reprise d'étude demandée par la société Moulin du Teulel pour baisser sa puissance de XX à XX kW, permettant à cette dernière de bénéficier de l'obligation d'achat. La société Enedis relève, par ailleurs, que la société Moulin du Teulel injecte sa production dans le réseau depuis 2009 et est rattachée au périmètre du responsable d'équilibre XX depuis le 1er avril 2014.

En outre, la société Enedis soutient que le motif exposé par la notification des griefs est insusceptible, en droit, de caractériser « l'ampleur du dommage » au sens de l'article L. 134-27 du code de l'énergie, le Conseil d'Etat ayant jugé dans son arrêt déjà cité du 18 juin 2021 dit « Lislet 2 » que l'ampleur du dommage doit s'apprécier « en fonction de la perturbation générale apportée au fonctionnement des réseaux et aux dommages subis, le cas échéant, tant par ses utilisateurs que par d'autres acteurs économiques et par les consommateurs finals » ; qu'en effet, le CoRDiS étant incompétent pour statuer sur une demande de dommages-intérêts, l'ampleur du dommage causé au producteur ne saurait être pris en compte, seul un dommage se rapportant au fonctionnement des réseaux et subi par ses utilisateurs pourrait être pris en compte afin de déterminer le quantum d'une sanction.

En conséquence, la société Enedis conclut qu'aucun dommage se rattachant à l'exécution tardive de la décision du CoRDiS ne saurait être pris en compte dans le cadre de la détermination d'une éventuelle sanction pécuniaire.

S'agissant des engagements pris par le gestionnaire de réseau public de distribution d'électricité, la société Enedis fait valoir qu'elle a adapté sa documentation technique à la suite de la décision n° 11-38-16 en éditant une version 7 de sa documentation relative aux « Protections des Installations de Production raccordées au Réseau Public de Distribution », applicable au 14 décembre 2018, afin de tenir compte de la protection de découplage de type DIN VDE 0126-1-1/A1 qui permettrait « une augmentation graduée du seuil de découplage sur fréquence haute des protections de découplage de type DIN VDE 0126-1-1/A1 afin d'élargir la plage de stabilité du système électrique sur variation accidentelle de fréquence ».

Par ailleurs, elle fait valoir qu'un portail de raccordement a été mis en ligne en 2018 pour permettre le dépôt et le suivi des demandes de raccordement des producteurs et qu'un guichet unique d'accueil et de complétude des demandes de raccordement relatives aux installations de production BT supérieures à 36 kVA a été mis en place en 2020.

Vu les observations de la société Moulin du Teulel en réponse aux observations de la société Enedis, enregistrées le 5 octobre 2021.

S'agissant de la limitation du défaut de la société Enedis au seul retard dans la transmission du projet de convention de raccordement, la société Moulin du Teulel soutient que le fait que la date du projet transmis soit du 15 février 2018 n'a aucune valeur juridique puisque que ce document n'a été effectivement communiqué que le 16 octobre 2019 et qu'elle considère ce document comme antidaté puisque le gestionnaire de réseau public de distribution d'électricité n'a jamais répondu à ses relances pour obtenir cette convention, notamment son courrier électronique du 20 février 2018.

La société Moulin du Teulel fait, par ailleurs, valoir qu'elle n'a pas retourné signée le projet de la convention de raccordement car elle conteste toujours la puissance maximale d'injection de XX kW ; que les résultats de l'étude de raccordement ne pourront que démontrer que c'est à tort que le gestionnaire de réseau public de distribution d'électricité a exigé la réduction de la puissance de XX kW à XX kW et qu'ainsi un nouveau projet de convention de raccordement devra être édité.

S'agissant de la sanction encourue par la société Enedis et de la gravité du manquement, en premier lieu, la société Moulin du Teulel soutient que, contrairement à ce que prétend le gestionnaire de réseau public de distribution d'électricité, les mesures prises pour permettre le raccordement technique effectif ne sont pas antérieures à la saisine du CoRDiS aux fins de sanction mais se situent entre les deux décisions de mesures conservatoire et de règlement de différend, ce qui signifie que la société Enedis n'a tiré aucune conséquence de la décision du 8 décembre 2017.

Elle soutient, également, d'une part, que, si le montant de la prestation de reprise d'étude lui a bien été restitué, les dommages dus à l'obligation erronée de procéder à une reprise d'étude n'ont pas été compensés et, d'autre part, que la société Enedis ne s'est jamais rapprochée d'elle pour régulariser les dommages créés par la mauvaise exécution du CARD-I en ce qui concerne la mise à disposition des données de comptage.

En outre, la société Moulin du Teulel soutient que la société Enedis ne s'est pas conformée à l'article 4 de la décision n° 11-38-16, en ne lui transmettant aucun devis pour le remplacement des dispositifs de comptage de type électromécanique par des dispositifs de type électronique. Toutefois, elle dispose déjà d'un tel compteur depuis le 26 décembre 2016 et considère que cette injonction à l'article 4 n'a que pour but de souligner que la société Enedis n'avait pas pris en compte l'ensemble de sa demande de branchement en date du 2 janvier 2014.

S'agissant de l'absence d'avantages tirés par la société Enedis de l'exécution tardive de la décision du CoRDiS, la société Moulin du Teulel soutient que le gestionnaire de réseau public de distribution d'électricité a essayé de tirer un avantage de XX euros en ne communiquant pas les résultats de l'étude de puissance transitant dans le transformateur. Ce montant se détermine par la différence entre le montant de XX euros de la proposition technique et financière adressée par la société ERDF intégrant un branchement surdimensionné de XX kW, qui aurait permis notamment le financement par l'utilisateur du réseau du remplacement de l'enceinte du transformateur existant qui n'était plus au norme et qui était pourtant à la charge de la société ERDF, et la deuxième proposition de la société Enedis pour un montant de XX euros avec un transformateur de XX kW mais conditionnée par l'obligation pour le demandeur de réduire sa demande de puissance à XX kW.

En outre, la société Moulin du Teulel fait valoir qu'en refusant de la dédommager à hauteur de XX euros pour le dommage résultant du refus de traiter son dossier et les non-lectures de comptage pour un montant de XX euros, la société Enedis aurait essayé de tirer un avantage total de XX euros.

S'agissant de l'ampleur des dommages causés, la société Moulin du Teulel soutient que si elle produit aujourd'hui de l'électricité grâce à ses anciennes turbines de XX kW, elle ne peut pour autant procéder à une augmentation de puissance et, donc, bénéficier d'un contrat d'obligation d'achat plus important puisqu'en l'absence de résultat de l'étude de puissance, elle ne connaît toujours pas la puissance qu'elle pourrait injecter dans le réseau ; qu'ainsi, elle ne peut procéder à cette augmentation de puissance depuis 7 années, ce qui représente autour de XX euros de pertes d'exploitation et une absence de production de plus XX d'énergie renouvelable, alors même que le besoin de production d'une énergie renouvelable est nécessaire pour la lutte contre le réchauffement climatique.

S'agissant des engagements pris par la société Enedis, la société Moulin du Teulel soutient, d'une part, qu'aucune modification du seuil haut de fréquence n'a été opérée puisqu'il était de 50.6 Hz dans la version 5 de 2013 et également de 50.6 Hz dans la version 7 de 2018 et, d'autre part, que la mise en place d'un guichet unique n'a pas été communiquée aux demandeurs et n'entre, dans tous les cas, pas dans l'appréciation de la sanction.

Vu les observations de la société Enedis en réponse n° 2 enregistrées le 18 octobre 2021 et présentées par Me Damien Bergerot et Me Cédric de Pouzilhac. La société Enedis conclut aux mêmes fins que par ses précédentes observations, par les mêmes moyens.

Par ailleurs, s'agissant de la communication avant le 8 février 2018 du projet d'une nouvelle convention de raccordement prenant en compte la protection de découplage conforme à la norme DIN VDE 0126-1-1/A1 disposant de réglages VFR2014 et les résultats de l'étude sur la puissance transitant dans le transformateur du poste de distribution publique, elle soutient qu'il s'agit du seul manquement qui était allégué dans la saisine du CoRDiS par la société Moulin du Teulel le 15 juin 2019 ; que la convention de raccordement n'a en aucune manière été antidatée mais que le retard dans sa transmission depuis le 15 février 2018 ne résulte que d'une erreur interne.

En outre, la société Enedis soutient que les conditions particulières de la version 3 de la convention de raccordement prennent bien en compte les résultats de l'étude sur la puissance transitant dans le transformateur du poste de distribution publique puisque le gestionnaire de réseau public de distribution d'électricité a finalement retenu l'analyse de la société Moulin du Teulel sur l'absence de changement de poste de distribution publique pour une puissance demandée limitée à XX kW, ne requérant que la mutation du transformateur de XX kVA à XX kVA ; que, dès lors, la société Moulin du Teulel ne peut ignorer que la société Enedis n'a pas mené une étude pour un passage à XX kW dans la mesure où la décision n° 11-38-16 confirme que seule une puissance de XX kW était désormais demandée ; que, partant, seule une nouvelle demande d'augmentation de puissance à XX kW la conduirait à réaliser une nouvelle étude.

Elle relève, au surplus, que la société Moulin du Teulel dispose désormais de l'autorisation d'injecter jusqu'à XX kW mais ne produit que XX kW maximum, ce qu'elle ne peut sérieusement expliquer par la seule contestation d'une différence de puissance de XX kW entre XX et XX kW.

S'agissant de l'article 2 de la décision n° 11-38-16 relatif au remboursement de la prestation de reprise d'études initialement réglée par la société Moulin du Teulel, aucun manquement sur ce point ne figure dans la demande de sanction formée devant le CoRDiS ni dans la notification des griefs.

S'agissant du constat du CoRDiS dans sa décision du 8 décembre 2017 qu'elle n'aurait pas régulièrement exécuté le contrat CARD-I en ce qui concerne la mise à disposition des données de comptage, la société Enedis soutient que ce manquement ne figurait ni dans la saisine du 15 juin 2019 ni n'a fait l'objet d'un grief retenu par le membre désigné ; que l'article 3 de la décision n° 11-38-16 n'enjoignait aucunement au gestionnaire de réseau public de distribution d'électricité de se rapprocher de la demanderesse pour une indemnisation qui, au surplus, n'entrerait pas dans la compétence du comité ; qu'en outre, la société Moulin du Teulel bénéficie de la mise à disposition de ses données de comptage.

S'agissant de l'injonction faite à la société Enedis de communiquer avant le 15 janvier 2018 un nouveau devis pour le remplacement des dispositifs de comptage de type électromécanique par des dispositifs de type électronique, cette dernière soutient que, là encore, ce manquement ne figurait ni dans la saisine du 15 juin 2019 ni n'a fait l'objet d'un grief retenu par le membre désigné ; qu'en outre, comme le relève la société Moulin du Teulel elle-même, les compteurs avaient été changés dès le 26 décembre 2016, de sorte que l'injonction prévue à l'article 4 de la décision du CoRDiS était devenue sans objet.

S'agissant de la gravité du manquement imputé à la société Enedis, cette dernière fait valoir que, comme le reconnaît la société Moulin du Teulel, ses installations de production ont bien été techniquement raccordées avant même l'intervention de la décision n° 11-38-16, avec les caractéristiques techniques d'un raccordement définitif ; ce qui ne peut nullement être interprété comme une volonté de la part du gestionnaire de réseau de public distribution d'électricité de se soustraire à la décision du comité.

S'agissant de l'absence d'avantages tirés par elle de l'exécution tardive de la décision n° 11-38-16, la société Enedis soutient à nouveau qu'elle n'a profité d'aucun vide juridique, qui n'est pas survenu en l'espèce ; qu'en outre, aucun dommage se rattachant à une exécution tardive de sa part ne saurait être pris en compte par le comité dans le cadre de la détermination du quantum de l'éventuelle sanction pécuniaire ; que la société Moulin du Teulel confirme qu'elle produit de l'électricité et que rien ne fait donc obstacle à ce qu'elle bénéficie du tarif d'obligation d'achat d'EDF, dont la contractualisation ressort de ses relations avec la société EDF seule.

S'agissant des engagements pris par la société Enedis, cette dernière fait valoir qu'elle a bien modifié sa documentation technique de référence pour prévoir l'acceptation du matériel de découplage pour une installation hydraulique mais que la fréquence maximale admise sur le réseau ne saurait pour autant être outrepassée, ce qui explique l'absence de modification de la fréquence maximale entre les différentes versions de cette documentation ; qu'en ce qui concerne le guichet unique, il s'agit d'une organisation interne du gestionnaire de réseau public de distribution d'électricité pour le traitement des demandes de producteurs émises depuis sa mise en place en 2020.

Vu les observations de la société Moulin du Teulel enregistrées le 19 novembre 2021.

La société Moulin du Teulel soutient qu'une sanction particulièrement sévère doit être prononcée par le CoRDiS puisque les manquements du gestionnaire de réseau public de distribution d'électricité persistent, ce dernier n'ayant toujours pas transmis le calcul de puissance possible pour son poste de transformateur ni réglé les problèmes liés au retard injustifié dans la transmission du projet de la convention de raccordement et liés à l'absence de lecture de son compteur.

4. Procédure de sanction

Vu le code de l'énergie, notamment ses articles L. 134-25 à L. 134-34 et R. 134-29 à R. 134-37 ;

Vu la décision du 13 février 2019, portant adoption du règlement intérieur du comité de règlement des différends et des sanctions de la Commission de régulation de l'énergie ;

Vu la décision du 3 septembre 2021 du président du comité de règlement des différends et des sanctions de la Commission de régulation de l'énergie, relative à la désignation d'un rapporteur pour l'instruction de la demande de sanction enregistrée sous le numéro 02-40-19 ;

Par courriers du 8 novembre 2021, la société Enedis et la société Moulin du Teulel ont été informées que la séance publique se tiendrait le lundi 22 novembre 2021 à 9 heures au siège de la Commission nationale de l'informatique et des libertés, comme l'y autorise les dispositions de l'article 1er du règlement intérieur du CoRDiS au terme desquelles « Le comité peut se réunir en tout lieu […] ».

Par courriers électroniques du 16 novembre 2021, la société Enedis et la société Moulin du Teulel ont été informées que la séance publique se tiendrait désormais à 9 h 30.

Par courrier électronique du 19 novembre 2021, la société Moulin du Teulel a confirmé qu'elle ne serait ni présente ni représentée à cette séance publique.

La société Enedis ayant été régulièrement convoquée et la société Moulin du Teulel ayant été dûment informée de la possibilité d'assister à la séance publique, qui s'est tenue le lundi 22 novembre 2021 au siège de la Commission nationale de l'informatique et des libertés, du comité de règlement des différends et des sanctions, composé de M. Thierry Tuot, président, M. Henri de Larosière de Champfeu et M. Laurent-Xavier Simonel, membres, en présence de :

M. Nicolas Maziau, membre désigné par le président du comité de règlement des différends et des sanctions,

Mme Alexandra Bonhomme, directrice des affaires juridiques et représentant le directeur général empêché,

M. Martial Fournier de Saint Jean, rapporteur,

Les représentants de la société Enedis, assistés de Me Damien Bergerot et Me Cédric de Pouzilhac,

Après avoir entendu :

- le rapport de M. Martial Fournier de Saint Jean, présentant les faits, la saisine du comité de règlement des différends et des sanctions par la société Moulin du Teulel, le grief notifié et les observations écrites en réponse au grief ainsi que, plus généralement, les conclusions et moyens des parties ;

- les observations de M. Nicolas Maziau, présentant les motifs l'ayant conduit à notifier un grief et précisant la nature pécuniaire ainsi que le montant de la sanction proposée ;

- les observations de Me Damien Bergerot et Me Cédric de Pouzilhac pour la société Enedis, cette dernière persiste dans ses moyens et ses conclusions. Elle fait, notamment, valoir que des procédures internes de suivi de l'exécution des décisions du CoRDiS sont envisagées et devraient être formellement mises en place en 2022.

La parole ayant été donnée en dernier à Me Damien Bergerot et Me Cédric de Pouzilhac et aux représentants de la société Enedis.

Le comité de règlement des différends et des sanctions en ayant délibéré, après que le membre désigné, le rapporteur, la partie mise en cause, le public et les agents des services se sont retirés.

5. Analyse du comité de règlement des différends et des sanctions

5.1. Cadre juridique applicable

Aux termes des dispositions de l'article L. 134-28 du code de l'énergie : « Les sanctions énumérées à l'article L. 134-27 sont également encourues […] lorsque le gestionnaire, l'opérateur, l'exploitant ou l'utilisateur d'un réseau, d'un ouvrage ou d'une installation ou le fournisseur d'électricité ou de gaz naturel mentionné à l'article L. 134-25 ne s'est pas conformé dans les délais requis à une décision prise par le comité en application des articles L. 134-20 et L. 134-22, sans qu'il y ait lieu de le mettre préalablement en demeure ».

5.2. Analyse du grief retenu par le membre désigné

Le membre désigné du comité de règlement des différends et des sanctions fait grief à la société Enedis : « d'avoir méconnu les dispositions précitées de l'article L. 134-28 du code de l'énergie, dès lors qu'elle ne s'est pas conformée dans les délais requis à la décision de règlement de différend n° 11-38-16 du 8 décembre 2017 puisqu'elle n'a transmis à la société Moulin du Teulel un projet de convention conforme aux prescriptions de cette décision ainsi que les résultats de l'étude mentionnée dans cette décision que le 16 octobre 2019, soit avec un retard de 20 mois et huit jours ».

Il résulte de l'instruction, d'une part, que, par des courriers électroniques en date des 20 et 25 février 2018 et 17 mars 2019, la société Moulin du Teulel a cherché à obtenir auprès du gestionnaire de réseau public de distribution d'électricité le projet de la convention de raccordement mentionné à l'article 1er de la décision du CoRDiS du 8 décembre 2017 et, d'autre part, que ce projet de convention de raccordement, daté du 15 février 2018, soit postérieurement à la date limite du 8 février 2018 fixée par le CoRDiS, n'a été transmis à la société Moulin du Teulel par la société Enedis que le 16 octobre 2019.

Ainsi, la société Enedis a pris un retard de vingt mois et huit jours pour transmettre à la société Moulin du Teulel le projet de convention de raccordement en se conformant au dispositif de la décision de règlement de différend du CoRDiS du 8 décembre 2017, sans qu'aucune cause de ce retard, même indirecte, ne puisse être imputée à la société Moulin du Teulel qui, au contraire, a tenté à plusieurs reprises d'obtenir ce projet avant de former sa demande de sanction.

Par suite, le comité estime que la société Enedis ne s'est pas conformée dans le délai qui lui était imparti à l'injonction qui lui était faite par l'article 1er de la décision du CoRDiS n° 11-38-16 du 8 décembre 2017.

En conséquence, est retenu à l'encontre de la société Enedis, en raison de son retard de vingt mois et huit jours pour se conformer à une décision du CoRDiS, un manquement caractérisé à l'article L. 134-28 du code de l'énergie.

6. Sanction retenue à l'encontre de la société Enedis

6.1. Rappel des principes applicables en matière de sanction

En application des dispositions de l'article L. 134-27 du code de l'énergie, le comité de règlement des différends et des sanctions peut prononcer, en fonction de la gravité du manquement :

« 1° Soit une interdiction temporaire, pour une durée n'excédant pas un an, de l'accès aux réseaux, ouvrages et installations mentionnés à l'article L. 134-19 […] ;

2° Soit, si le manquement n'est pas constitutif d'une infraction pénale, une sanction pécuniaire, dont le montant est proportionné à la gravité du manquement, à la situation de l'intéressé, à l'ampleur du dommage et aux avantages qui en sont tirés. (soulignement ajouté)

Ce montant ne peut excéder 3 % du chiffre d'affaires hors taxes lors du dernier exercice clos, porté à 5 % en cas de nouvelle violation de la même obligation dans le cas d'un manquement aux obligations de transmission d'informations ou de documents ou à l'obligation de donner accès à la comptabilité, ainsi qu'aux informations économiques, financières et sociales prévues à l'article L. 135-1. A défaut d'activité permettant de déterminer ce plafond, le montant de la sanction ne peut excéder 100 000 euros, porté à 250 000 euros en cas de nouvelle violation de la même obligation.

Dans le cas des autres manquements, il ne peut excéder 8 % du chiffre d'affaires hors taxes lors du dernier exercice clos, porté à 10 % en cas de nouvelle violation de la même obligation. A défaut d'activité permettant de déterminer ce plafond, le montant de la sanction ne peut excéder 150 000 euros, porté à 375 000 euros en cas de nouvelle violation de la même obligation.

Si le manquement a déjà fait l'objet d'une sanction pécuniaire au titre d'une autre législation, la sanction pécuniaire éventuellement prononcée par le comité est limitée de sorte que le montant global des sanctions pécuniaires ne dépasse pas le montant le plus élevé de l'une des sanctions encourues ».

Aux termes des dispositions de l'article L. 134-28 du code de l'énergie : « Les sanctions énumérées à l'article L. 134-27 sont également encourues, […] lorsque le gestionnaire, l'opérateur, l'exploitant ou l'utilisateur d'un réseau, d'un ouvrage ou d'une installation ou le fournisseur d'électricité ou de gaz naturel mentionné à l'article L. 134-25 ne s'est pas conformé dans les délais requis à une décision prise par le comité en application des articles L. 134-20 et L. 134-22, sans qu'il y ait lieu de le mettre préalablement en demeure ».

6.2. Maximum légal de la sanction pécuniaire

En application de ces dispositions de l'article L. 134-27 du code de l'énergie, le maximum légal de 3 % du chiffre d'affaires hors taxes s'applique pour un manquement aux obligations de transmission d'informations ou de documents ou à l'obligation de donner accès à la comptabilité. Pour les autres manquements, le maximum légal de la sanction s'élève à « 8 % du chiffre d'affaires hors taxes lors du dernier exercice clos, porté à 10 % en cas de nouvelle violation de la même obligation ».

Au cas d'espèce, le manquement de la société Enedis aux dispositions de l'article L. 134-28 du code de l'énergie, ne constitue pas un manquement aux obligations de transmission d'informations ou d'accès à la comptabilité.

En conséquence, le montant de la sanction en l'espèce ne peut excéder 8 % du chiffre d'affaires hors taxes de la société Enedis du dernier exercice clos. En l'occurrence, le chiffre d'affaires hors taxes réalisé en 2020 par la société Enedis est de 14,2 milliards d'euros (1). Compte-tenu de cet élément, le maximum légal de la sanction s'élève à 1,136 milliards d'euros.

6.3. Éléments d'appréciation de la sanction

Sur la gravité du manquement :

Le comité relève, en premier lieu, que la méconnaissance par la personne mise en cause d'injonctions la concernant et fixées par une décision de règlement de différend précédente constitue en soi un manquement grave quelle que soit la nature de ces injonctions comme le précise le Conseil d'État au point 21 de son arrêt du 18 juin 2021, n° 422616, déjà cité, qui indique que le non-respect des obligations mises à la charge d'un opérateur en vertu d'une décision prise par le comité en application des articles L. 134-20 et L. 134-22 du code de l'énergie constitue, en principe, un manquement grave.

Une décision de règlement d'un différend entre un gestionnaire de réseau public de distribution d'électricité et un utilisateur de ce réseau, qu'il soit notamment producteur ou consommateur final, vise en particulier à rendre effectif en faveur de cet utilisateur l'exercice de l'ensemble de ses droits d'accès au réseau tel qu'ils sont garantis par la loi et par le droit de l'Union européenne. En outre, le respect du délai imparti à ce gestionnaire pour exécuter la décision du CoRDiS permet au comité de s'assurer, dans l'intérêt de l'ordre public économique, que le différend est effectivement réglé dans les meilleurs délais conformément aux exigences du droit de l'Union.

Ainsi, la non-exécution d'une décision de règlement de différend par la société Enedis conduit à faire perdurer des manquements à ses obligations et aux droits de l'utilisateur, manquements susceptibles d'engendrer un préjudice pour cet utilisateur et de nature à rompre l'équilibre déterminé par le législateur entre les droits et obligations respectifs des différents opérateurs du secteur de l'énergie.

Par ailleurs, il résulte de l'instruction que le manquement de la société Enedis n'a cessé qu'à compter de la connaissance par cette dernière de la saisine du comité par la société Moulin du Teulel en vue du prononcé d'une sanction, alors qu'elle avait pourtant reçu précédemment plusieurs relances de la part de la demanderesse lui enjoignant de se conformer à la décision de règlement de différend du 8 décembre 2017 du comité. En outre, la circonstance que les conditions de dialogue entre le demandeur et la société Enedis se seraient complexifiées eu égard aux très nombreux échanges entre les deux sociétés et aux différentes saisines devant le CoRDiS formées par la société Moulin du Teulel est sans incidence sur le devoir du gestionnaire de réseau public de distribution d'électricité de continuer à instruire les demandes dont il est saisi et d'y donner la suite la plus rapide. En l'espèce, l'absence de réponse aux démarches répétées de la société Moulin du Teulel témoigne d'un défaut de rigueur de la société Enedis dans le traitement des demandes de cet utilisateur du réseau. La transmission par la société Enedis d'un projet de convention de raccordement entre la société Moulin du Teulel et la société « ERDF » avec une ancienne version du modèle de convention de raccordement ne tenant pas compte du changement de dénomination sociale du gestionnaire de réseau public de distribution d'électricité en est une illustration.

Il y a lieu, toutefois, de constater que l'inexécution de la décision du CoRDiS a pris fin le 16 octobre 2019 lors de cet envoi.

En deuxième lieu, le comité relève que le non-respect de la décision du comité par la société Enedis était susceptible de conduire cette dernière à porter atteinte au fonctionnement du réseau du fait de l'absence de tout cadre contractuel venant encadrer d'un point de vue technique et juridique l'injection dans le réseau public de distribution d'une quantité d'électricité produite à partir d'une source d'énergie renouvelable.

Aux termes de l'article D. 342-10 du code de l'énergie : « Toute installation raccordée à un réseau public d'électricité fait l'objet d'une convention de raccordement et d'une convention d'exploitation entre le demandeur et le gestionnaire du réseau. / Ces conventions sont établies avant la mise en service de l'installation ».

La société Enedis soutient, d'une part, que les installations de production ont bien été techniquement raccordées avant même l'intervention de la décision n° 11-38-16, avec les caractéristiques techniques d'un raccordement définitif et, d'autre part, que la société Moulin du Teulel dispose désormais de l'autorisation d'injecter jusqu'à XX kW mais ne produit que XX kW au maximum.

Le comité relève que l'absence de transmission par la société Enedis d'un projet de convention de raccordement dans les délais prescrits par la décision de règlement du différend du 8 décembre 2017 aurait pu conduire la société Moulin du Teulel à devoir injecter sa production sans convention de raccordement, en méconnaissance des dispositions de l'article D. 342-10 du code de l'énergie qui rend pourtant obligatoire la signature d'une convention de raccordement avant la mise en service de toute installation raccordée à un réseau public d'électricité.

En outre, la société Enedis a soutenu, lors de la séance publique, que la relation contractuelle entre les deux sociétés, en l'absence de convention de raccordement, pouvait découler de la décision n° 11-38-16 du CoRDiS. Toutefois, le comité rappelle qu'une décision de règlement de différend prise en application de l'article L. 134-20 du code de l'énergie donne une solution à un différend mais ne saurait, par elle-même, créer une relation contractuelle ou se substituer à celle-ci, d'autant plus lorsque son dispositif enjoint au gestionnaire de réseau public de distribution d'électricité de proposer les bases de cette relation contractuelle. Ainsi, l'accès au réseau ne saurait légalement résulter, en l'espèce, de la simple décision du CoRDiS.

Par ailleurs, le comité relève qu'il ressort des observations de la société Enedis que le gestionnaire de réseau public de distribution d'électricité ne manifeste aucune réserve ou inquiétude quant à l'éventualité de la survenance d'une telle situation irrégulière, manifestant même son incompréhension que la société Moulin du Teulel se soit limitée à la production des seuls XX kW.

Dès lors, il y a lieu pour le comité de constater le facteur aggravant, qu'il importe de prendre en compte dans l'appréciation du montant de la sanction, doublement caractérisé, d'abord, par l'appréciation portée par la société Enedis sur le fait que l'injection par la société Moulin du Teulel de XX kW dans le réseau public de distribution d'électricité était d'ores et déjà possible, ce qui aurait prévenu tout effet négatif du retard pris dans la transmission d'un projet de convention de raccordement et, ensuite, par le constat que la société Enedis ne semble tenir aucun compte des risques qui pourraient résulter de l'injection d'électricité dans ce réseau sans aucune détermination des prescriptions techniques destinées, notamment, à assurer la sécurité de son exploitation.

En troisième lieu, il y a lieu pour le comité de constater l'atteinte qui est portée au marché par le gestionnaire de réseau public de distribution d'électricité, d'une part, en raison de la méconnaissance du droit d'accès aux réseaux de manière non-discriminatoire de la société Moulin du Teulel, que celle-ci doit pouvoir exercer comme tout producteur d'énergie voulant vendre sa production sur le marché et, d'autre part, en privant le marché des bénéfices de l'intégration d'un nouvel acteur contribuant à l'équilibre de l'offre d'énergie et proposant une offre d'électricité alternative issue de sources d'énergie renouvelables.

Le comité ne peut que relever que le retard pris par la société Enedis a privé le marché de la possibilité d'une injection dans des conditions légalement régulières d'énergie de sources renouvelables.

Sur la situation de l'entreprise intéressée :

En 2020, la société Enedis a réalisé un chiffre d'affaires de 14,2 milliards d'euros et un résultat net après impôt des sociétés de 835 millions d'euros (2).

Par ailleurs, la société Enedis n'a pas fait valoir de difficultés affectant sa capacité financière à exécuter à une sanction pécuniaire.

Compte tenu de sa taille et des moyens humains aussi bien techniques que juridiques à sa disposition et compte tenu de l'ancienneté de la demande de raccordement de la société Moulin du Teulel, qui est un opérateur bien identifié par le gestionnaire de réseau public de distribution d'électricité, la société Enedis était en mesure de tirer toutes les conséquences de la décision du 8 décembre 2017 afin de s'y conformer dans les délais requis.

Pour apprécier le montant de la sanction, le CoRDiS relève que la situation d'ordre monopolistique de la société Enedis dans sa zone de desserte pour la distribution d'électricité, avec une exclusivité couvrant 95 % des réseaux publics de distribution d'électricité, ne permet pas de voie alternative pour accéder à la majeure partie de ces réseaux.

Enfin, le CoRDiS relève la responsabilité particulière qui pèse sur la société Enedis à raison des missions de service public qui lui sont confiées par le code de l'énergie en matière de distribution d'électricité.

Sur l'ampleur du dommage :

La société Moulin du Teulel soutient que dans la mesure où elle ne dispose pas des résultats de l'étude de puissance, elle ne connait pas la puissance qu'elle peut injecter dans le réseau et qu'elle continue, donc, de ne produire que XX kW, ce qui ne lui permet pas de bénéficier d'un contrat d'achat HO7R depuis 2014. Elle évalue la perte de ses recettes à près de XX euros. Elle soutient, en outre, qu'elle n'a pas pu injecter plus XX d'énergie renouvelable dans le réseau, alors même que le besoin de production d'une énergie renouvelable est nécessaire pour la lutte contre le réchauffement climatique.

Le comité estime qu'il convient d'analyser l'ampleur du dommage potentiel causé aux utilisateurs et au réseau sur la seule période correspondante aux manquements de la société Enedis, soit de février 2018 à octobre 2019.

En premier lieu, la société Enedis soutient que le motif exposé par la notification des griefs est insusceptible, en droit, de caractériser « l'ampleur du dommage » au sens de l'article L. 134-27 du code de l'énergie, le Conseil d'État ayant jugé au point 23 de son arrêt, déjà cité, du 18 juin 2021, dit « Lislet 2 », que l'ampleur du dommage doit s'apprécier « en fonction de la perturbation générale apportée au fonctionnement des réseaux et aux dommages subis, le cas échéant, tant par ses utilisateurs que par d'autres acteurs économiques et par les consommateurs finals » ; que le CoRDiS étant incompétent pour statuer sur une demande de dommages-intérêts, seule l'ampleur du dommage se rapportant au fonctionnement du réseau et subi par ses utilisateurs pourrait être pris en compte afin de déterminer le quantum d'une sanction mais qu'un producteur ne saurait être considéré comme un utilisateur de ce réseau.

Le comité rappelle qu'aux termes de l'article L. 134-27, le montant de la sanction doit être proportionné « à l'ampleur du dommage » et considère que rien ne permet de déduire de cette décision du Conseil d'Etat qu'un producteur qui injecte dans le réseau public de distribution d'électricité ne pourrait être regardé comme ayant la qualité d'utilisateur de ce réseau, alors que l'article 2, 36), de la directive (UE) 2019/944 du Parlement européen et du Conseil du 5 juin 2019 concernant des règles communes pour le marché intérieur de l'électricité et modifiant la directive 2012/27/UE, définit l'utilisateur comme « une personne physique ou morale qui alimente un réseau de transport ou un réseau de distribution ou qui est desservie par un de ces réseaux » (soulignement ajouté). Au surplus, le comité souligne que si la société Moulin du Teulel n'était pas un utilisateur de réseau public de distribution d'électricité, elle n'aurait pas été fondée à saisir initialement le CoRDiS d'une demande de règlement de différend l'opposant au gestionnaire de ce réseau.

En deuxième lieu, la société Enedis soutient que la société Moulin du Teulel pouvait bénéficier du tarif d'obligation d'achat d'EDF XX pour une puissance de XX kW puisqu'elle produisait et que ce tarif est fixé de manière rétroactive en tenant compte de la date à laquelle la demande de raccordement complète du producteur est adressée au gestionnaire de réseau public de distribution d'électricité, soit en l'espèce le 3 août 2014 à la suite de la reprise d'étude demandée par la société Moulin du Teulel pour baisser sa puissance de XX à XX kW.

Si la société Moulin du Teulel était éligible au tarif d'achat XX sur la période susmentionnée, il n'en demeure pas moins qu'en l'absence de convention de raccordement, elle n'était pas autorisée à produire réellement avec une puissance de XX kW et, donc, ne pouvait ni vendre une telle quantité d'énergie sur le marché ni bénéficier du tarif d'achat XX, ainsi que l'a reconnu la société Enedis lors de la séance publique.

Partant, il apparaît que le retard pris par la société Enedis pour exécuter la décision de règlement de différend n° 11-38-16 est susceptible d'avoir empêché la société Moulin du Teulel de bénéficier, dans des conditions normales, d'un contrat d'obligation d'achat XX sur une période courant de février 2018 à octobre 2019.

En troisième lieu, le CoRDiS estime que la circonstance alléguée par la société Enedis qu'aucune défaillance du réseau au détriment de la société Moulin du Teulel n'est à constater ne saurait constituer en soi un motif justifiant ou atténuant le manquement du gestionnaire de réseau public de distribution d'électricité.

Sur les avantages tirés par la société Enedis :

En premier lieu, la société Enedis soutient qu'elle n'aurait « pu bénéficier d'un quelconque vide juridique » résultant de l'absence de convention de raccordement dans l'hypothèse théorique d'un dommage lié à l'exploitation des installations de production de la société Moulin du Teulel, puisque cette dernière aurait pu se prévaloir des stipulations du CARD-I entré en vigueur au 1er avril 2014 couvrant les manquements aux engagements de la société Enedis en matière de continuité, de qualité de l'onde et relatives aux fautes et négligences du gestionnaire de réseau public de distribution d'électricité et qu'elle aurait, également, pu invoquer devant le juge l'ensemble des obligations légales et réglementaires qui incombent à ce gestionnaire.

Le CoRDiS estime, cependant, que s'il existait bien un cadre juridique pour l'utilisation d'installations d'une puissance de XX kW, aucune stipulation contractuelle ne permettait d'encadrer le branchement d'installations d'une puissance de XX kW.

En outre, la société Enedis ne saurait sérieusement soutenir que l'absence de tout contrat entre un utilisateur d'un réseau public de distribution d'électricité et le gestionnaire de ce réseau pourrait être palliée par la seule invocation devant le juge des obligations qui s'imposent à ce gestionnaire en application de la loi. En effet, l'absence d'un cadre contractuel pour une installation de puissance de XX kW aurait conduit le producteur à injecter une puissance de XX kW dans le réseau dans des conditions également irrégulières.

En considération de l'ensemble des circonstances de l'espèce, le comité estime que l'ampleur et la gravité du dommage résultent pour l'essentiel de la négligence et de la désorganisation interne du gestionnaire de réseau public de distribution d'électricité, dont il n'a pas été démontré qu'il ait cherché à tirer parti de la situation qu'il a laissée se constituer. A cet égard, demeure sans incidence sur cette appréciation la mention faite pour la première fois à l'audience d'un audit destiné à permettre l'adoption de mesures correctrices, qui n'ont fait l'objet d'aucune production permettant d'en apprécier la portée et qui, en tout état de cause, sont postérieures à la période de manquement retenue ci-dessus,

En second lieu, la société Moulin du Teulel soutient que la société Enedis a essayé de tirer un avantage total de XX euros constitué, d'une part, de XX euros liés à l'absence de communication des résultats de l'étude de puissance transitant dans le transformateur, ce montant se déterminant par la différence entre, d'un côté, le montant de XX euros de la proposition technique et financière adressée par la société ERDF, devenue Enedis, intégrant un branchement surdimensionné de XX kW, qui aurait permis notamment le financement par l'utilisateur du réseau du remplacement de l'enceinte du transformateur existant qui n'était plus aux normes et qui était pourtant à la charge de la société ERDF et, d'un autre côté, la deuxième proposition de la société Enedis pour un montant de XX euros avec un transformateur de XX kW mais conditionnée par l'obligation pour le demandeur de réduire sa demande de puissance à XX kW. D'autre part, cet avantage total serait composé de XX euros liés au refus de dédommager le préjudice résultant de l'absence de traitement de sa demande de raccordement et les non-lectures de comptage pour un montant de XX euros.

Toutefois, le comité estime que la société Moulin du Teulel n'apporte pas d'éléments suffisants au soutien de sa démonstration et qu'il ne résulte pas de l'instruction que la société Enedis ait jouit d'un tel bénéfice financier.

6.4. Détermination de la sanction

Compte tenu de l'ensemble des éléments d'appréciation de la sanction exposé ci-dessus, il y a lieu de prononcer une sanction pécuniaire proportionnée de cent mille euros (100 000 €) à l'encontre de la société Enedis.

Par ailleurs, eu égard aux exigences d'intérêt général et d'ordre public qui s'attachent à ce qu'elle soit connue de l'ensemble des acteurs du marché de l'énergie, le comité décide que sa décision sera publiée en application des dispositions du premier alinéa de l'article L. 134-34 du code de l'énergie, d'une part, au Journal officiel de la République française et, d'autre part, sur le site internet de la Commission de régulation de l'énergie. Au regard des faits de l'espèce et de la sanction qu'ils justifient, il sera fait une juste appréciation des modalités de son maintien en ligne sur ce site internet en fixant cette période à deux ans à compter de sa première publication, sans anonymisation de l'identité de la société sanctionnée pendant cette période et sous réserve des secrets protégés par la loi.

Décide :