JORF n°0272 du 20 novembre 2025

Sous-section 1 : Dispositions générales

Article L6313-2

Tant que l'action pénale n'a pas été mise en mouvement ou, lorsqu'une information a été ouverte, dans le cas prévu par l'article L. 6312-3, le procureur de la République peut proposer à une personne morale mise en cause pour les délits mentionnés à la sous-section 2 de la présente section de conclure une convention judiciaire d'intérêt public imposant une ou plusieurs des obligations prévues à l'article L. 6313-3.

Article L6313-3

Peuvent être imposées à la personne les obligations suivantes :
1° Verser une amende d'intérêt public au Trésor public. Le montant de cette amende est fixé de manière proportionnée aux avantages tirés des manquements constatés, dans la limite de 30 % du chiffre d'affaires moyen annuel calculé sur les trois derniers chiffres d'affaires annuels connus à la date du constat de ces manquements. Son versement peut être échelonné, selon un échéancier fixé par le procureur de la République, sur une période qui ne peut être supérieure à un an et qui est précisée par la convention ;
2° Se soumettre, pour une durée maximale de trois ans, à un programme de mise en conformité, sous le contrôle des autorités administratives compétentes, selon des modalités prévues par la loi.
3° Se dessaisir au profit de l'Etat de tout ou partie des biens saisis dans le cadre de la procédure.
Les frais occasionnés par le recours par ces autorités administratives à des experts ou à des personnes ou autorités qualifiées, pour l'assister dans la réalisation des expertises ou analyses de toute nature nécessaires à sa mission de contrôle sont supportés par la personne morale mise en cause, dans la limite d'un plafond fixé par la convention.

Article L6313-4

Lorsque la victime est identifiée, et sauf si la personne morale mise en cause justifie de la réparation de son préjudice, la convention prévoit également le montant et les modalités de la réparation des dommages causés par l'infraction dans un délai qui ne peut être supérieur à un an.
La victime est informée de la décision du procureur de la République de proposer la conclusion d'une convention judiciaire d'intérêt public à la personne morale mise en cause. Elle transmet au procureur de la République tout élément permettant d'établir la réalité et l'étendue de son préjudice.

Article L6313-5

Les représentants légaux de la personne morale mise en cause demeurent responsables en tant que personnes physiques.
Ils sont informés, dès la proposition du procureur de la République, qu'ils peuvent se faire assister d'un avocat avant de donner leur accord à la proposition de convention.

Article L6313-6

Lorsque la personne morale mise en cause donne son accord à la proposition de convention, le procureur de la République saisit par requête le président du tribunal judiciaire aux fins de validation de la convention. Le président du tribunal judiciaire peut désigner, aux fins de validation, tout juge du tribunal.
La proposition de convention est jointe à la requête. La requête contient un exposé précis des faits ainsi que la qualification juridique susceptible de leur être appliquée. Le procureur de la République informe de cette saisine la personne morale mise en cause et, le cas échéant, la victime.

Article L6313-7

Le président du tribunal ou le juge désigné procède à l'audition, en audience publique, de la personne morale mise en cause et de la victime assistées, le cas échéant, de leur avocat.
A l'issue de cette audition, le président du tribunal ou le juge désigné prend la décision de valider ou non la proposition de convention, en vérifiant le bien-fondé du recours à cette procédure, la régularité de son déroulement, la conformité du montant de l'amende aux limites prévues au 1° de l'article L. 6313-3 et la proportionnalité des mesures prévues aux avantages tirés des manquements.
La décision du président du tribunal ou du juge désigné, qui est notifiée à la personne morale mise en cause et, le cas échéant, à la victime, n'est pas susceptible de recours.

Article L6313-8

Si le président du tribunal ou le juge désigné rend une ordonnance de validation, la personne morale mise en cause dispose, à compter du jour de la validation, d'un délai de dix jours pour exercer son droit de rétractation.
La rétractation est notifiée au procureur de la République par lettre recommandée avec demande d'avis de réception.
Si la personne morale mise en cause n'exerce pas ce droit de rétractation, les obligations que la convention comporte sont mises à exécution. Dans le cas contraire, la proposition devient caduque.

Article L6313-9

L'ordonnance de validation n'emporte pas déclaration de culpabilité et n'a ni la nature ni les effets d'un jugement de condamnation.
La convention judiciaire d'intérêt public n'est pas inscrite au bulletin n° 1 du casier judiciaire. Elle fait l'objet d'un communiqué de presse du procureur de la République.
L'ordonnance de validation, le montant de l'amende d'intérêt public et la convention sont publiés sur le site internet du ministère de la justice.
La victime peut, au vu de l'ordonnance de validation, demander le recouvrement des dommages et intérêts que la personne morale s'est engagée à lui verser suivant la procédure d'injonction de payer, conformément aux règles prévues par le code de procédure civile.

Article L6313-10

L'extinction de l'action pénale résultant de l'exécution des obligations prévues par la convention ne fait pas échec au droit des personnes ayant subi un préjudice du fait des manquements constatés, sauf l'Etat, de poursuivre la réparation de leur préjudice devant la juridiction civile.

Article L6313-11

Le procureur de la République met en mouvement l'action pénale, sauf élément nouveau :
1° Si le président du tribunal ou le juge désigné ne valide pas la proposition de convention ;
2° Si la personne morale mise en cause décide d'exercer son droit de rétractation ;
3° Ou si, dans le délai prévu par la convention, la personne morale mise en cause ne justifie pas de l'exécution intégrale des obligations prévues.
Si la convention a été conclue dans le cadre d'une information judiciaire, le procureur de la République transmet la procédure au juge d'instruction, accompagnée des réquisitions aux fins de reprise de l'information, conformément aux dispositions de l'article L. 6312-5. En cas de poursuites et de condamnation, il est tenu compte, s'il y a lieu, de l'exécution partielle des obligations prévues par la convention.

Article L6313-12

Si le président du tribunal ou le juge désigné ne valide pas la proposition de convention ou si la personne morale exerce son droit de rétractation, le procureur de la République ne peut faire état devant la juridiction d'instruction ou de jugement des déclarations faites ou des documents remis par la personne morale au cours de la procédure prévue au présent article.

Article L6313-13

A peine de nullité, le procureur de la République notifie à la personne morale mise en cause l'interruption de l'exécution de la convention lorsque cette personne ne justifie pas de l'exécution intégrale des obligations prévues.
Cette décision prend effet immédiatement.
Le cas échéant, elle entraîne de plein droit la restitution de l'amende d'intérêt public versée au Trésor public.
Elle n'entraîne cependant pas la restitution des éventuels frais supportés par la personne morale et occasionnés par le recours par l'autorité administrative à des experts ou à des personnes ou autorités qualifiées pour l'assister dans la réalisation des expertises et analyses nécessaires à sa mission de contrôle.

Article L6313-14

Les modalités d'application des dispositions du présent chapitre sont fixées par décret en Conseil d'Etat.