JORF n°299 du 26 décembre 2001

  1. Sur le domaine des lois de financement

Trois articles de la loi qui est déférée ne peuvent manifestement pas être rattachés d'une quelconque manière que ce soit au domaine des lois de financement.

Celui-ci est précisément défini par l'article 34, alinéa 4, de la Constitution au terme duquel « les lois de financement de la sécurité sociale déterminent les conditions générales de son équilibre financier et, compte tenu de leurs prévisions de recettes, fixent ses objectifs de dépenses, dans les conditions et sous les réserves prévues par une loi organique ».

L'article LO 111-3 du code de la sécurité sociale précise également le contenu des lois de financement dans son I, et dispose, dans le III, « qu'outre celles prévues au I, les lois de financement de la sécurité sociale ne peuvent comporter que des dispositions affectant directement l'équilibre financier des régimes obligatoires de base ou améliorant le contrôle du Parlement sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale ».

Au regard de ce domaine constitutionnellement défini, il apparaît que plusieurs articles de la loi qui est déférée ne sont pas de ceux qui peuvent figurer dans une loi de financement de la sécurité sociale. Ils ne concernent en effet ni les orientations de la politique de santé et de sécurité sociale, ni les objectifs qui déterminent les conditions générales de l'équilibre financier de la sécurité sociale.

L'article 31 vise à mettre en oeuvre la réduction du temps de travail dans la fonction publique hospitalière. Pour ce faire, il modifie l'ordonnance no 82-272 du 26 mars 1982 relative à la durée hebdomadaire du travail dans la fonction publique hospitalière. S'il est évident que la réduction du temps de travail à l'hôpital et la création de 45 000 emplois en trois ans annoncée par le Gouvernement aura une incidence financière sur les comptes de la sécurité sociale, en revanche l'article 31 qui modifie une ordonnance n'a pas en soit d'incidence directe sur les comptes de la sécurité sociale.

Or, à plusieurs reprises, le juge constitutionnel a censuré des cavaliers sociaux, notamment dans sa décision no 2000-437 DC du 19 décembre 2000, qui a jugé non conformes à la Constitution 6 articles pour ce motif, rappelant à cette occasion que les dispositions doivent avoir « une incidence directe, immédiate et significative sur l'équilibre des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale ». En l'espèce, ce n'est pas le cas de l'article 31 qui constitue donc un cavalier social.

Deux autres articles sont également concernés.

L'article 73 de la loi de financement dont l'objectif selon l'exposé des motifs est de simplifier les relations entre les usagers et les organismes de recouvrement des cotisations de sécurité sociale, notamment par le développement des déclarations sociales et du paiement des cotisations par voie électronique.

L'article 75, résultant de l'adoption en première lecture à l'Assemblée nationale d'un amendement du Gouvernement, réforme les modalités de fonctionnement des caisses de sécurité sociale (UCANSS) qui assurent la gestion du personnel de la sécurité sociale.

L'objet même de ces deux articles ne relève pas d'une loi de financement de la sécurité sociale puisqu'ils n'ont pas d'incidence sur l'équilibre financier des régimes de base et ne constituent pas non plus une amélioration du contrôle du Parlement sur la gestion des comptes.

Les lois de financement de la sécurité sociale ne sauraient devenir des lois fourre-tout, dénaturant ainsi la volonté exprimée par le constituant, au mépris de la jurisprudence du juge constitutionnel.

Pour ces raisons, les articles 31, 73 et 75 de la présente loi de financement doivent être déclarés non conformes à la Constitution.


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1. Sur le domaine des lois de financement

Trois articles de la loi qui est déférée ne peuvent manifestement pas être rattachés d'une quelconque manière que ce soit au domaine des lois de financement.

Celui-ci est précisément défini par l'article 34, alinéa 4, de la Constitution au terme duquel « les lois de financement de la sécurité sociale déterminent les conditions générales de son équilibre financier et, compte tenu de leurs prévisions de recettes, fixent ses objectifs de dépenses, dans les conditions et sous les réserves prévues par une loi organique ».

L'article LO 111-3 du code de la sécurité sociale précise également le contenu des lois de financement dans son I, et dispose, dans le III, « qu'outre celles prévues au I, les lois de financement de la sécurité sociale ne peuvent comporter que des dispositions affectant directement l'équilibre financier des régimes obligatoires de base ou améliorant le contrôle du Parlement sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale ».

Au regard de ce domaine constitutionnellement défini, il apparaît que plusieurs articles de la loi qui est déférée ne sont pas de ceux qui peuvent figurer dans une loi de financement de la sécurité sociale. Ils ne concernent en effet ni les orientations de la politique de santé et de sécurité sociale, ni les objectifs qui déterminent les conditions générales de l'équilibre financier de la sécurité sociale.

L'article 31 vise à mettre en oeuvre la réduction du temps de travail dans la fonction publique hospitalière. Pour ce faire, il modifie l'ordonnance no 82-272 du 26 mars 1982 relative à la durée hebdomadaire du travail dans la fonction publique hospitalière. S'il est évident que la réduction du temps de travail à l'hôpital et la création de 45 000 emplois en trois ans annoncée par le Gouvernement aura une incidence financière sur les comptes de la sécurité sociale, en revanche l'article 31 qui modifie une ordonnance n'a pas en soit d'incidence directe sur les comptes de la sécurité sociale.

Or, à plusieurs reprises, le juge constitutionnel a censuré des cavaliers sociaux, notamment dans sa décision no 2000-437 DC du 19 décembre 2000, qui a jugé non conformes à la Constitution 6 articles pour ce motif, rappelant à cette occasion que les dispositions doivent avoir « une incidence directe, immédiate et significative sur l'équilibre des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale ». En l'espèce, ce n'est pas le cas de l'article 31 qui constitue donc un cavalier social.

Deux autres articles sont également concernés.

L'article 73 de la loi de financement dont l'objectif selon l'exposé des motifs est de simplifier les relations entre les usagers et les organismes de recouvrement des cotisations de sécurité sociale, notamment par le développement des déclarations sociales et du paiement des cotisations par voie électronique.

L'article 75, résultant de l'adoption en première lecture à l'Assemblée nationale d'un amendement du Gouvernement, réforme les modalités de fonctionnement des caisses de sécurité sociale (UCANSS) qui assurent la gestion du personnel de la sécurité sociale.

L'objet même de ces deux articles ne relève pas d'une loi de financement de la sécurité sociale puisqu'ils n'ont pas d'incidence sur l'équilibre financier des régimes de base et ne constituent pas non plus une amélioration du contrôle du Parlement sur la gestion des comptes.

Les lois de financement de la sécurité sociale ne sauraient devenir des lois fourre-tout, dénaturant ainsi la volonté exprimée par le constituant, au mépris de la jurisprudence du juge constitutionnel.

Pour ces raisons, les articles 31, 73 et 75 de la présente loi de financement doivent être déclarés non conformes à la Constitution.