Contrairement donc à ce qui a été avancé au cours des débats, la seule présence d'un juge pour enfant ne suffit en rien à garantir la spécialité du tribunal, pour la simple raison qu'il sera minoritaire dans la formation du tribunal correctionnel pour mineurs de droit commun, et archi minoritaire dans la formation complétée de citoyens assesseurs.
Cette atteinte manifeste au cœur même de ce qui faisait la spécificité de l'ordonnance de 1945 ne saurait dès lors échapper à votre censure.
IV. ― Sur l'article 9 quater A
L'article 9 quater A a été introduit par voie d'amendement par l'Assemblée nationale et dispose que : « L'article 131-36-11 du code pénal est abrogé. »
Ledit article du code pénal prévoit que : « Lorsqu'il est ordonné par le tribunal correctionnel, le placement sous surveillance électronique mobile doit faire l'objet d'une décision spécialement motivée.
Lorsqu'il est ordonné par la cour d'assises, il doit être décidé dans les conditions de majorité prévues par l'article 362 du code de procédure pénale pour le prononcé du maximum de la peine. »
Comme l'indique le rapport de la commission des lois de l'Assemblée nationale, cette disposition a pour objet d'assouplir les conditions du placement sous surveillance électronique mobile (PSEM) dans le cadre d'un suivi socio-judiciaire (n° 3532, p. 201).
Les requérants vous demanderont de constater qu'il s'agit là d'un « cavalier législatif ». En effet, selon l'article 45 de la Constitution, « tout amendement est recevable en première lecture dès lors qu'il présente un lien, même indirect, avec le texte déposé ou transmis ». Vous en déduisez, y compris d'office, qu'une disposition adoptée par voie d'amendement qui ne présente « aucun lien, même indirect, avec celles qui figuraient dans le projet de loi » initiale, a « été adoptée selon une procédure contraire à la Constitution » (n° 2009-584 DC du 16 juillet 2009, cons. 43).
Il ressort encore de votre jurisprudence, y compris la plus récente, que, pour échapper à votre censure, l'amendement en question doit au moins posséder un lien indirect avec l'objet du projet initial, ou avec les dispositions spécifiques qu'il comporte (n° 2010-617 DC du 9 novembre 2010, cons. 21-25). Or aucune de ces deux conditions n'est remplie en l'espèce.
D'abord parce que le texte initial poursuivait deux objectifs : améliorer la participation des citoyens au fonctionnement de la justice pénale, et améliorer la procédure de jugement des mineurs. L'assouplissement des conditions de placement sous surveillance électronique mobile ne participe à l'évidence pas de ces deux objectifs. Ensuite, aucun des six chapitres que contient la loi ne contient de dispositions relatives au suivi socio-judiciaire ou au PSEM. Le chapitre IV relatif à la Participation des citoyens aux décisions en matière d'application des peines ne contenait lui-même initialement qu'un seul article 9 relatif à la composition des tribunaux de l'application des peines et des chambres de l'application des peines, et à la libération conditionnelle. Rien sur le suivi socio-judiciaire et le PSEM.
En l'absence donc de tout lien même indirect de cet amendement avec le projet de loi initiale, vous censurerez cette disposition comme adoptée selon une procédure irrégulière.
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Pour tous ces motifs, les requérants vous invitent donc à prononcer la censure de l'ensemble de ces dispositions, ainsi que de toutes celles que vous relèveriez d'office.
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