Le Comité pour la réforme des collectivités locales s'est efforcé d'élaborer des propositions qui répondent aux exigences de notre temps, en termes d'accompagnement du développement économique, de renforcement de la démocratie locale et d'efficience de la dépense publique.A ses yeux, cette tâche implique une simplification des structures de l'administration territoriale, indispensable à la clarification des compétences qu'il appelle de ses vœux comme à la modernisation de la fiscalité locale.
Encore convient-il de définir les critères de cette simplification institutionnelle, administrative et financière, de telle manière que la réforme dont elle a vocation à dessiner les contours permette également à notre pays de relever les défis de l'avenir.
C'est pourquoi il a semblé au Comité que les caractéristiques nouvelles de l'économie, à la fois intégrée à la mondialisation et fondée sur des pôles territoriaux dont les pouvoirs publics ont consacré l'existence en donnant corps à la notion de pôles de compétitivité, avaient substantiellement modifié les rapports entre l'économie et le territoire. Dans le même temps, le Comité a relevé que les dynamiques démographiques et sociales en cours se traduisaient par un déséquilibre croissant dans la répartition de la population et l'émergence de modes de vie inédits qui ont pour conséquence des besoins accrus de services de proximité. Il en a déduit que ces évolutions rendaient nécessaire que l'action publique des collectivités locales, en symbiose avec celle de l'Etat, s'articule, à terme, autour de deux niveaux principaux d'administration exerçant deux catégories de compétences distinctes. Le premier, à l'échelle régionale, aurait la charge de la mise en œuvre des politiques publiques de soutien à l'activité et à la compétitivité ; le second, à l'échelon intercommunal, aurait pour mission, en complément du rôle joué par le département, surtout en milieu rural, d'assumer l'action de proximité à destination des habitants. Il s'agit de préparer cette évolution indispensable par quelques premières mesures prenant effet dans un avenir proche.
A cette spécialisation des structures d'administration locale, qui implique sinon leur hiérarchisation du moins le rapprochement des structures actuelles, ferait écho une spécialisation fonctionnelle des compétences, de manière à assurer l'efficacité de l'action publique et la clarté des choix démocratiques.
Enfin, la mise en place d'un système fiscal modernisé et plus lisible, garantissant que la responsabilité des élus locaux puisse effectivement être mise en jeu, est apparue au Comité comme devant procéder de cette nouvelle organisation institutionnelle.
Telles sont les orientations auxquelles obéissent les propositions qui suivent. Le Comité s'est attaché à ce que ces propositions ne portent pas la marque de l'uniformité qui a trop longtemps caractérisé notre mode d'administration territoriale. Les situations auxquelles l'action publique locale doit répondre sont diverses ; il convient donc de leur apporter des réponses institutionnelles, administratives et financières adaptées, en se gardant de tout esprit de système.
A. ― DES STRUCTURES SIMPLIÉES
La simplification des structures de l'administration territoriale française est, on l'a vu, une nécessité en termes de démocratie locale et d'efficacité de l'action publique. Aux yeux du Comité, cette simplification n'implique pas la suppression de tel ou tel niveau d'administration, facilité dont il a souhaité se garder dès lors qu'elle pose au moins autant de problèmes qu'elle est supposée en résoudre. En revanche, la spécialisation fonctionnelle des collectivités locales lorsqu'elle est utile et leur rapprochement organique lorsqu'il se justifie lui ont paru devoir être privilégiés. Cette voie peut être empruntée, dans des conditions à préciser, aussi bien pour les régions et les départements que pour les communes et leurs groupements.
- La région et le département
En premier lieu, l'adaptation de l'échelon régional aux conditions nouvelles de la compétitivité économique et le consensus européen sur l'importance du niveau régional dans les politiques de développement ont convaincu le Comité qu'il convenait de renforcer le rôle des régions françaises, notamment au regard de leurs homologues étrangères.
Contrairement à ce qui est parfois soutenu, les régions françaises, loin d'être plus petites que les autres régions d'Europe, sont plus vastes. Mais leur densité est plus faible et, pour des raisons administratives, historiques ou politiques, leur périmètre géographique est parfois contestable, et d'ailleurs contesté.L'objectif consistant à doter les régions d'une population moyenne de l'ordre de 3 à 4 millions d'habitants serait de nature à leur donner force et vigueur. Aussi le Comité suggère-t-il que le périmètre de certaines des régions françaises soit revu, de telle manière que, sans méconnaître la force de certaines identités régionales attachées à des territoires d'importance inégale, le découpage des régions leur permette de mieux prendre rang dans l'ensemble européen des régions.
Le Comité a estimé qu'il n'avait pas compétence pour procéder à des recommandations précises en cette matière. Il s'est borné à prendre acte, au fil des auditions auxquelles il a procédé, des souhaits d'ores et déjà formulés ; il a formé le vœu que les pouvoirs publics puissent, en concertation avec les élus régionaux et départementaux, mener à bien la réflexion pour que, dans un délai raisonnable, notre pays soit doté d'environ une quinzaine de régions. Plusieurs projets en ce sens existent, à l'initiative de certaines régions, il n'y aurait que des avantages à les encourager.
Encore conviendrait-il de modifier à cette fin la législation existante.
S'agissant des regroupements de régions, l'article L. 4123-1 du code général des collectivités territoriales prévoit qu'ils peuvent être prononcés, sur demande concordante des conseils régionaux intéressés, par décret en Conseil d'Etat à la condition qu'ait été recueilli l'avis favorable exprimé par une majorité qualifiée constituée par une moitié des conseils généraux représentant les deux tiers de la population ou des deux tiers des conseils généraux représentant la moitié de la population. Le Comité suggère, à l'instar du rapport Warsmann (45), que cette exigence ne soit plus requise. Il suffirait donc, pour qu'intervienne un décret en Conseil d'Etat, de l'accord de chacune des régions concernées, exprimé soit par délibération de leur assemblée, soit par la voie du référendum local décisionnel, comme le permet le deuxième alinéa de l'article 72-1 de la Constitution, précisé par la loi organique n° 2003-705 du 1er août 2003.
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(45) Op. cit.
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