Synthèse
Le Gouvernement a modifié son scénario macroéconomique et de finances publiques pour 2021 et 2022. Ce scénario prend notamment en compte des mesures nouvelles, de montants importants, qui ne figuraient pas lors du dépôt du projet de loi de finances. Le Gouvernement a procédé en conséquence à une nouvelle saisine du Haut Conseil sur le projet de loi de finances (PLF) pour 2022 conjointement à celle sur le 2e projet de loi de finances rectificative pour 2021.
Le Haut Conseil se félicite de cette nouvelle saisine qu'il avait appelée de ses vœux au vu du scénario macroéconomique et de finances publiques associé à la précédente saisine et qui lui permet de rendre un avis plus éclairé sur le PLF pour 2022.
Pour 2021, le Haut Conseil considère que l'hypothèse de croissance du Gouvernement (+ 6 ¼ %), révisée en hausse d'un quart de point par rapport au PLF initial pour 2022, devrait être dépassée, au vu des résultats, nettement meilleurs qu'attendu, des comptes trimestriels du 3e trimestre publiés après la saisine. Pour 2022, l'hypothèse de croissance (+ 4,0 %), inchangée par rapport au PLF initial, reste plausible. Les nouveaux développements intervenus depuis septembre - nouvelles mesures de soutien au pouvoir d'achat et à l'investissement et dégradation de l'environnement économique international - jouent dans des sens opposés.
Le Haut Conseil estime que la prévision d'inflation du Gouvernement est plausible pour 2021, mais que celle pour 2022, inchangée en dépit de la hausse des prix de l'énergie et de la nette amélioration du marché du travail enregistrées depuis le PLF initial, semble en revanche trop basse. Les prévisions d'emploi et de masse salariale pour 2021 et 2022, bien que révisées en hausse, restent également prudentes au regard des données les plus récentes.
Le Haut Conseil estime que le déficit public pour 2021 présenté dans le PLFR pourrait être légèrement inférieur à la prévision, du fait notamment d'une sous-estimation des recettes assises sur la masse salariale. Pour 2022, la dynamique de l'emploi et de la masse salariale laisse également attendre des recettes publiques plus élevées, mais le degré d'incertitude qui entoure la prévision de dépenses est important compte tenu de mouvements d'ampleur affectant les nouvelles dépenses. Leur calendrier, leur rythme d'exécution et leurs montants demeurent à ce stade à préciser. Au total, en l'état des informations disponibles, la prévision de déficit public pour 2022 peut toutefois être considérée comme plausible.
Le solde structurel pour 2022 présenté par le Gouvernement s'établirait à - 4,0 points de PIB en appliquant l'hypothèse de PIB potentiel de la loi de programmation (LPFP) en vigueur, et serait ainsi inférieur de 3,2 points à celui inscrit dans cette loi, soit un écart important au sens de la loi organique de décembre 2012. Néanmoins, le Haut Conseil considère que la clause des circonstances exceptionnelles, déclenchée au printemps 2020, peut encore justifier, en 2022, des écarts à la trajectoire programmée.
La LPFP en vigueur constitue toutefois une référence dépassée pour apprécier la trajectoire de finances publiques. Le solde structurel calculé à partir de la dernière estimation de croissance potentielle du Gouvernement, révisée pour tenir compte des conséquences de la crise sanitaire, s'établit à -5,0 points de PIB, soit un écart de plus de 4 points à l'objectif de moyen terme des finances publiques que s'est donné la France dans la LPFP et une dégradation de 2,5 points du solde structurel par rapport à 2019.
Le Haut Conseil observe que le repli du ratio de dette pour 2022 dans le PLF révisé par rapport au projet initial est plus fort que prévu (- 1,8 point à 113,5 points de PIB, au lieu de - 1,5 point). Cela ne résulte toutefois pas d'une réduction du déficit public mais d'opérations de gestion de trésorerie de l'Etat.
Le Haut Conseil constate que, contrairement à ce qu'il préconisait dans son avis du 17 septembre 2021, le surcroît de recettes attendu n'est pas consacré au désendettement, mais qu'il est, au contraire, plus que compensé par un surcroît de dépenses ou de mesures de baisse des prélèvements obligatoires. Il souligne une nouvelle fois que la soutenabilité à moyen terme de la dette publique, prévue en hausse de 16 points de PIB en 2022 par rapport à 2019, appelle à la plus grande vigilance.
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Le Haut Conseil a été saisi par le Gouvernement le 22 octobre 2021, pour rendre un avis sur les prévisions macroéconomiques associées au deuxième projet de loi de finances rectificative (PLFR) pour 2021 et sur la cohérence de ce projet de loi avec la trajectoire pluriannuelle de solde structurel, en application de l'article 15 de la loi organique n° 2012-1403 du 17 décembre 2012 relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques.
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Par cette même saisine, en application de l'article 16 de la loi organique n° 2012-1403 précitée, le Haut Conseil a été saisi par le Gouvernement d'une révision des projets de lois de finances et de financement de la sécurité sociale pour l'année 2022 portant révision des hypothèses macroéconomiques sur lesquelles reposaient ces projets.
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Cette double saisine a été accompagnée par des réponses aux questionnaires adressés par le Haut Conseil aux administrations compétentes.
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Comme le permet l'article 18 de la loi organique de 2012, le Haut Conseil a auditionné les représentants de la direction générale du Trésor et de la direction du budget le 25 octobre 2021.
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Le Haut Conseil s'est appuyé sur les informations conjoncturelles et les dernières prévisions produites par un ensemble d'organismes et d'institutions internationales et nationales. En outre, il a pris en compte la publication par l'Insee, le 29 octobre, de la première estimation des comptes du troisième trimestre et des résultats provisoires de l'indice des prix à la consommation d'octobre.
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Après en avoir délibéré lors de sa séance du 29 octobre 2021, le Haut Conseil a adopté le présent avis répondant à cette double saisine.
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Les prévisions macroéconomiques
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Le Haut Conseil apprécie successivement les nouvelles hypothèses de croissance de l'activité, d'inflation, d'emploi et de masse salariale du secteur privé pour 2021 et 2022.
a) La croissance de l'activité : -
Pour 2021, le Gouvernement prévoit une progression du PIB en volume de 6 ¼ %, révisée en hausse d'un quart de point par rapport au projet de loi de finances pour 2022, et de 4,0 % en 2022, inchangée par rapport à ce projet.
Les prévisions de croissance du PIB pour 2021-2022
| |France|Zone euro| | | | |
|----------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------|------|---------|---------|----|----|---------|
| | 2021 | 2022 |2022/2019|2021|2022|2022/2019|
| Gouvernement (PLF 2022 - septembre 2021) | 6,0 | 4,0 | 1,4 |4,9 |4,4 | 2,4 |
| Banque de France (septembre 2021) | 6,3 | 3,7 | 1,5 |5,0 |4,6 | 2,7 |
| OCDE (septembre 2021) | 6,3 | 4,0 | 1,7 |5,3 |4,6 | 3,0 |
| FMI (octobre 2021) | 6,3 | 3,9 | 1,6 |5,0 |4,3 | 2,5 |
| Observatoire français des conjonctures économiques (octobre 2021) | 6,3 | 4,1 | 1,9 |5,1 |4,8 | 3,0 |
| Rexecode (octobre 2021) | 6,3 | 3,5 | 1,2 | 5 |3,9 | 2,1 |
| Consensus Forecasts (octobre 2021) | 6,1 | 3,8 | 1,3 |5,1 |4,4 | 2,6 |
| Gouvernement (PLF 2022 révisé - octobre 2021) | 6,25 | 4,0 | 1,7 |4,9 |4,4 | 2,4 |
|Source : HCFP à partir des prévisions d'organisations internationales et d'instituts de conjoncture
Les colonnes ‘2022/2019'présentent pour chaque prévision le niveau du PIB atteint en 2022 par rapport à celui observé en 2019.| | | | | | |
- Dans son avis sur les PLF et PLFSS pour 2022, le Haut Conseil avait estimé que la prévision de croissance du Gouvernement pour 2021 pouvait être considérée comme prudente au regard notamment des dernières prévisions de l'Insee et de la Banque de France. De fait, la nouvelle prévision du Gouvernement pour 2021 a été révisée en hausse d'un quart de point et est désormais quasi identique à celle de ces deux organismes. La publication par l'Insee des comptes trimestriels du troisième trimestre, survenue le 29 octobre, soit après la saisine du Gouvernement, conduit toutefois désormais à considérer que cette prévision devrait être dépassée : l'acquis de croissance du PIB à l'issue du troisième trimestre 2021, c'est-à-dire la croissance qui serait enregistrée sur l'ensemble de l'année 2021 si le PIB était stable au quatrième trimestre, est déjà de 6,6 %. Le PIB est ainsi revenu au troisième trimestre 2021 quasiment à son niveau du quatrième trimestre 2019.
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- Le Gouvernement n'a pas changé sa prévision de croissance pour 2022 qui reste fixée à 4,0 %. Le Haut Conseil avait considéré plausible cette prévision dans son avis sur les PLF et PLFSS pour 2022. Depuis lors, le Gouvernement a pris en compte des mesures nouvelles de soutien au pouvoir d'achat et à l'investissement susceptibles de relever la croissance de l'activité en 2022. À l'inverse, la croissance risque de pâtir de la dégradation de l'environnement économique mondial. Celui-ci est marqué notamment par la persistance de difficultés d'approvisionnement. De plus, les prix de l'énergie ont poursuivi leur hausse. Ces facteurs ont conduit à une perte de dynamisme de l'économie mondiale, dont attestent des données conjoncturelles moins bonnes qu'attendu (PIB du troisième trimestre aux Etats-Unis, au Royaume-Uni, en Chine ou en Allemagne). Les pressions inflationnistes ont par ailleurs conduit certaines banques centrales (notamment la Réserve Fédérale américaine, la Banque d'Angleterre et la Banque du Canada) à annoncer un durcissement plus précoce que prévu de leur politique monétaire. Ces annonces poussent à la hausse les taux d'intérêt et pourraient entraîner des tensions sur les marchés financiers. Au total, ces éléments qui jouent dans des sens opposés conduisent le Haut Conseil à estimer que la prévision de croissance du Gouvernement pour 2022 reste plausible.
- Le Haut Conseil considère que l'hypothèse de croissance du Gouvernement pour 2021 (+ 6 ¼ %), révisée en hausse d'un quart de point par rapport au PLF initial pour 2022, devrait être dépassée, au vu des résultats nettement meilleurs qu'attendu, des comptes trimestriels du 3e trimestre, publiés après la saisine. Pour 2022, l'hypothèse de croissance (+ 4,0 %), inchangée par rapport au PLF initial, reste plausible. Les nouveaux développements intervenus depuis septembre - nouvelles mesures de soutien au pouvoir d'achat et à l'investissement et dégradation de l'environnement économique international - jouent dans des sens opposés.
b) La hausse des prix à la consommation : - Le Gouvernement n'a pas modifié sa prévision de hausse de l'indice des prix à la consommation pour 2021 et 2022 : + 1,5 % en moyenne annuelle en 2021 et 2022, après + 0,5 % en 2020.
Indice des prix à la consommation (IPC)
| Variations en % |Prévisions du Gouvernement (en moyenne annuelle)| | | | |----------------------|------------------------------------------------|----|----|---| | 2019 | 2020 |2021|2022| | | Indice d'ensemble | 1,1 |0,5 |1,5 |1,5| |Indice « sous-jacent »| 0,8 |0,6 |1,1 |1,5|
Source : Projet de loi de finances pour 2022 révisé
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