Participaient à la séance : Philippe de LADOUCETTE, président, Catherine EDWIGE, Hélène GASSIN et Jean-Pierre SOTURA, commissaires.
En application des dispositions de l'article L. 134-1 du code de l'énergie, « dans le respect des dispositions législatives et réglementaires, la Commission de régulation de l'énergie précise, par décision publiée au Journal officiel de la République française, les règles concernant :
(…)
9° La valorisation des effacements de consommation mentionnés à l'article L. 271-1. »
- Contexte
Dans sa délibération du 17 décembre 2014, la CRE a approuvé les règles, telles que proposées par RTE, pour la valorisation des effacements de consommation sur les marchés de l'énergie, dites règles « NEBEF », à l'exception de l'article 7 relatif au régime dérogatoire de gestion de périmètres d'effacement.
Ces règles sont entrées en vigueur le 19 décembre 2014. Elles ont pris la suite des règles expérimentales de valorisation des effacements de consommation sur les marchés de l'énergie, approuvées par la CRE dans sa délibération du 28 novembre 2013 en application des dispositions de l'article 14-II de la loi n° 2013-312 du 15 avril 2013 visant à préparer la transition vers un système énergétique sobre et portant diverses dispositions sur la tarification de l'eau et sur les éoliennes, pour une durée maximale de douze mois à compter du 18 décembre 2013.
La loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte a modifié le cadre juridique applicable aux effacements et à leur valorisation. L'article 168, III de cette loi prévoit que « les articles L. 271-2 et L. 271-3 et l'article L. 321-15-1 du code de l'énergie, dans sa rédaction résultant du 3° du I du présent article, entrent en vigueur à la date de publication du décret en Conseil d'Etat mentionné au même article L. 271-2, et au plus tard douze mois après la promulgation de la présente loi ».
Dans l'attente de l'entrée en vigueur de ces nouvelles dispositions législatives et réglementaires, RTE a poursuivi au cours de l'année 2015 les travaux de concertation avec les acteurs de marché au sein du Comité des utilisateurs du réseau de transport d'électricité (« CURTE »). Ces travaux ont notamment permis d'instruire des propositions d'améliorations techniques demandées par la CRE dans sa précédente délibération ou par les acteurs eux-mêmes.
Au regard de ces travaux et de leurs résultats, la CRE souhaite que les règles NEBEF évoluent dès à présent afin d'intégrer des améliorations portant sur des points techniques et indépendants des évolutions introduites par la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte.
- Analyse de la CRE
2.1. Participation simultanée d'un même site au sein du dispositif NEBEF et sur le mécanisme d'ajustement
Les règles relatives à la valorisation des effacements de consommation sur les marchés de l'énergie actuellement en vigueur prévoient qu'un site de soutirage peut, sous réserve qu'il soit valorisé par un même opérateur d'effacement, être rattaché simultanément à une entité d'effacement (« EDE ») au sein du dispositif NEBEF et à une entité d'ajustement (« EDA ») sur le mécanisme d'ajustement (« MA »).
Toutefois, un site ne peut pas valoriser simultanément une partie de sa flexibilité au sein du dispositif NEBEF et le reste sur le mécanisme d'ajustement.
La concertation menée par RTE a permis de faire émerger le souhait des acteurs de pouvoir valoriser simultanément sa flexibilité au sein du dispositif NEBEF et sur le mécanisme d'ajustement.
La CRE considère que, dans la mesure où des méthodes de contrôle du réalisé sont mises en œuvre afin de permettre la bonne identification des effacements valorisés sur chacun des mécanismes et d'éviter tout double compte, il est pertinent d'apporter aux acteurs cette possibilité additionnelle de valorisation des effacements.
La CRE souhaite que RTE mette en place un suivi régulier des impacts de cette évolution.
2.2. Reconnaissance des opérateurs d'effacement
Les règles relatives à la valorisation des effacements de consommation sur les marchés de l'énergie actuellement en vigueur prévoient, en application des dispositions de l'article 4 du décret n° 2014-764 du 3 juillet 2014 relatif aux effacements de consommation d'électricité, devenu l'article R. 271-4 du code de l'énergie, un processus de reconnaissance des capacités techniques des opérateurs d'effacement. Ce processus de reconnaissance est aujourd'hui réalisé au travers de tests réalisés de manière ad hoc et hors de toute valorisation permettant d'attester la faculté de l'acteur à mettre en œuvre des effacements de consommation selon les caractéristiques techniques conformes à ses déclarations.
Les règles relatives à la valorisation des effacements de consommation sur les marchés de l'énergie actuellement en vigueur prévoient par ailleurs que les opérateurs d'effacement doivent renouveler leur reconnaissance tous les deux ans.
Dans le cadre de la concertation menée par RTE, certains acteurs ont fait part de leur souhait de pouvoir faire valoir les effacements qu'ils ont réalisés et valorisés dans le cadre du dispositif NEBEF ou sur le mécanisme d'ajustement afin d'obtenir le renouvellement de leur reconnaissance et ce en lieu et place des tests.
La CRE soutient cette demande dans la mesure où les effacements valorisés dans le cadre du dispositif NEBEF ou sur le mécanisme d'ajustement permettent d'attester, au même titre que les tests actuellement en place, de la faculté de l'opérateur d'effacement à mettre en œuvre des effacements de consommation selon les caractéristiques techniques conformes à ses déclarations.
2.3. Agrégation des sites de soutirage au sein des EDE
Dans sa délibération du 17 décembre 2014 portant approbation des règles pour la valorisation des effacements de consommation sur les marchés de l'énergie, la CRE avait souligné son attachement au principe de l'élargissement des possibilités d'agrégation des capacités d'effacement, notamment entre sites ayant des caractéristiques hétérogènes (réseau de raccordement, mode de relève, fournisseur ou responsable d'équilibre). En effet, ces possibilités complémentaires d'agrégation des capacités d'effacement permettraient à l'opérateur d'effacement de foisonner ses capacités afin de se prémunir contre des aléas.
Depuis le 1er avril 2015, RTE a fait évoluer les modalités d'agrégation des sites de soutirage au sein d'une EDA participant au mécanisme d'ajustement.
Le CRE est favorable à ce que les mêmes modalités d'agrégation soient mises en œuvre pour l'agrégation des sites de soutirage au sein d'une EDE permettant la valorisation des effacements dans le cadre du dispositif NEBEF.
2.4. Qualification des données utilisées par les opérateurs d'effacement
L'article R. 271-6 du code de l'énergie prévoit que « les données utilisées pour la certification des volumes d'effacement de consommation sont issues des dispositifs de comptage des gestionnaires des réseaux publics de transport et de distribution d'électricité.
Quand ces dispositifs ou les données qui en sont issues ne présentent pas les caractéristiques nécessaires à l'évaluation précise des volumes d'effacement de consommation en vue de leur certification en application des dispositions de l'article R. 271-5, les données produites ou collectées par un opérateur d'effacement peuvent être utilisées.
Les modalités de qualification et de contrôle des données mentionnées à l'alinéa précédent sont prévues par les règles mentionnées à l'article R. 271-3. ».
Un cahier des charges, prévu par les règles relatives à la valorisation des effacements de consommation sur les marchés de l'énergie, définit les modalités permettant de qualifier les données produites par les opérateurs. Ce cahier des charges impose notamment que les dispositifs de mesure utilisés respectent la norme AFNOR NF EN 62053 qui permet de s'assurer de la qualité des données produites.
Dans le cadre des travaux préparatoires de la CRE à la présente décision, un acteur a fait part à la CRE de son impossibilité de valoriser les effacements d'une partie de ses sites en raison des prescriptions du cahier des charges ci-dessus rappelées. En effet, ces sites ne disposent pas, à ce jour, d'un dispositif de comptage du gestionnaire de réseau permettant l'évaluation précise des volumes d'effacement. Par ailleurs, compte tenu de leurs spécificités techniques, ces sites n'entrent pas dans le champ d'application de la norme AFNOR NF EN 62 053, ce qui empêche la qualification de leurs propres dispositifs de mesure.
Dans l'attente du déploiement par le gestionnaire de réseau de compteurs permettant l'évaluation précise des volumes d'effacement, et pour les sites dont les caractéristiques n'entrent pas dans le champ d'application de la norme AFNOR NF EN 62053, la CRE est favorable à ce que RTE puisse, à la demande d'un opérateur d'effacement, définir un protocole de test permettant de vérifier que les données utilisées pour certifier les effacements respectent des exigences métrologiques au moins équivalentes à celles précisées par la norme AFNOR NF EN 62053.
- Décision
En application des dispositions de l'article L. 134-1 (9°) du code de l'énergie, la CRE, par la présente décision, modifie les règles relatives à la valorisation des effacements de consommation sur les marchés de l'énergie actuellement en vigueur comme suit :
S'agissant de la participation simultanée d'un même site à plusieurs mécanismes de marché :
Afin de permettre la participation simultanée d'un site de soutirage au dispositif NEBEF et au mécanisme d'ajustement, les règles relatives à la valorisation des effacements de consommation sur les marchés de l'énergie prévoient que :
Si l'EDE et l'EDA ont moins de 10 % de sites en commun (moins de 10 % de sites de l'EDE sont dans l'EDA et réciproquement), l'EDE et l'EDA peuvent réaliser un effacement simultanément. Le contrôle du réalisé est alors effectué sur la base des sites qui ne sont pas dans l'intersection entre l'EDE et l'EDA, les sites faisant partie de l'intersection n'étant pas pris en compte dans le calcul du volume d'effacement réalisé.
Si l'EDE et l'EDA ont plus de 90 % de sites en commun (plus de 90 % de sites de l'EDE sont dans l'EDA et réciproquement), l'EDE et l'EDA peuvent réaliser un effacement simultanément. Le contrôle du réalisé est alors effectué sur la base de l'intersection entre l'EDE et l'EDA, les sites hors de cette intersection n'étant pas pris en compte dans le calcul du volume d'effacement réalisé.
Dans ces deux cas, les modalités de contrôle du réalisé sont les suivantes :
Etablissement de la courbe de référence pour le MA selon la méthode du contrôle de réalisé en vigueur pour le MA et utilisée pour l'EDA. Lorsque la méthode utilisée sur le MA est le simple rectangle, la courbe de référence tient compte du volume déclaré sur NEBEF si la période de prise de référence se situe préalablement à NEBEF.
Calcul du volume réalisé sur le MA par différence entre la courbe de référence MA et la courbe de charge réalisée de l'EDA/EDE
Calcul de la courbe de référence NEBEF selon la méthode du contrôle de réalisé en vigueur dans le cadre NEBEF et utilisé pour l'EDE.
Calcul du volume réalisé dans le cadre de NEBEF par différence entre, d'une part, la courbe de référence NEBEF et, d'autre part, la courbe de charge réalisée de l'EDA/EDE et le volume réalisé dans le cadre du MA.
S'agissant de la reconnaissance des opérateurs d'effacement :
Afin de faciliter le renouvellement de la reconnaissance des opérateurs d'effacement, les règles relatives à la valorisation des effacements de consommation sur les marchés de l'énergie prévoient que cette reconnaissance est automatiquement renouvelée, si :
- au cours des douze derniers mois civils précédant la date de renouvellement de la reconnaissance, l'opérateur d'effacement a effectué des effacements au sein du dispositif NEBEF au moins trois jours, et que l'ensemble des effacement réalisés au cours de ces douze derniers mois civils précédant la date de renouvellement de la reconnaissance n'ont pas conduit à un écart NEBEF mensuel supérieur à 30 % pour l'opérateur d'effacement concerné ;
Ou si :
- au cours des douze derniers mois civils précédant la date de renouvellement de la reconnaissance, l'opérateur d'effacement a déposé des offres sur le mécanisme d'ajustement, et au moins trois de ces offres ont été activées, et parmi l'ensemble des offres activées au cours des douze derniers mois civils, les offres activées et défaillantes ne représentent pas plus de 1/5 des offres activées.
S'agissant des modalités d'agrégation des sites de soutirage au sein des entités d'effacement :
Les règles relatives à la valorisation des effacements de consommation sur les marchés de l'énergie prévoient que les sites de soutirage peuvent être agrégés quels que soient leur fournisseur, leur RE, leur réseau de raccordement, leur modèle de versement, leur barème forfaitaire dans le cadre du modèle régulé.
Ces règles prévoient que seule la méthode de contrôle de réalisé reste unique à la maille de l'EDE.
S'agissant de la répartition des volumes d'effacement certifiés :
Les règles relatives à la valorisation des effacements de consommation sur les marchés de l'énergie prévoient que (i) pour les EDE composées de sites de soutirage télé-relevés, le principe de répartition des volumes certifiés tient compte du comportement mesuré des sites composant l'EDE, et que (ii) pour les EDE composées des sites de soutirage profilés, le principe de répartition des volumes certifies est fondé sur une clé de répartition fixée en fonction des caractéristiques techniques des sites composant l'EDE.
Les règles relatives à la valorisation des effacements de consommation sur les marchés de l'énergie sont précisées afin de mettre en œuvre les mêmes modalités d'agrégation que celles en vigueur sur le mécanisme d'ajustement depuis le 1er avril 2015, en particulier s'agissant du calcul et de l'affectation aux responsables d'équilibres concernés des volumes d'effacement réalisés.
S'agissant de la qualification des données des opérateurs d'effacement :
Les règles relatives à la valorisation des effacements de consommation sur les marchés de l'énergie prévoient que, lorsque la norme AFNOR NF EN 62053 n'est pas applicable aux dispositifs de mesure de l'opérateur d'effacement, RTE peut, à la demande d'un opérateur d'effacement, définir un protocole de test permettant de vérifier que les données utilisées pour certifier les effacements de consommation respectent des exigences métrologiques au moins équivalentes à celles précisées par cette norme AFNOR.
Les règles prévoient que lorsque la qualification est délivrée à l'issue de ce protocole, elle peut être assortie de conditions particulières concernant notamment les caractéristiques et le nombre de sites constituant les EDE et les EDA, la durée de validité de la qualification et des limitations de la capacité d'effacement maximale des entités.
RTE notifiera, le cas échéant, à la CRE et aux acteurs de marché dans le cadre du Comité des utilisateurs du réseau de transport d'électricité, les modalités du protocole mis en œuvre et mettra en place un processus de concertation en vue d'une intégration pérenne dans la prochaine version des règles relatives à la valorisation des effacements de consommation sur les marchés de l'énergie.
Les règles relatives à la valorisation des effacements de consommation sur les marchés de l'énergie ainsi modifiées entreront en vigueur le 1er avril 2016.
La présente délibération sera publiée au Journal officiel de la République française.
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