III-5. Application des principes
Le partage des coûts induits par la conservation des numéros entre facturation à l'opérateur receveur et recouvrement via l'activité générale de l'opérateur doit respecter les principes décrits précédemment. En particulier, il découle de ces principes que :
― le coût devrait être établi selon une estimation du coût efficace du processus de portabilité ;
― le coût facturé par l'opérateur donneur à l'opérateur receveur devrait rester faible pour favoriser une concurrence durable et optimiser les avantages pour le consommateur ;
― les coûts nécessaires pour rendre possible la conservation du numéro découlent d'une obligation de chaque opérateur envers ses propres abonnés indépendamment de l'exercice éventuel de ce droit.
Ainsi, tous les coûts d'investissement et les coûts d'exploitation, excepté la part de ces coûts qui découlent directement du traitement d'une demande d'un opérateur receveur, encourus par un opérateur donneur doivent rester à la charge de ce dernier opérateur, indépendamment de l'exercice de ce droit par les abonnés. Ces coûts sont recouvrés sur son activité générale, et in fine sur l'ensemble des abonnés qui bénéficient de la possibilité de conserver leur numéro.
A l'inverse, lorsqu'un client décide d'exercer ce droit et demande le portage effectif de son numéro, les coûts directement liés au traitement de cette demande peuvent être refacturés à l'opérateur receveur par l'opérateur donneur et/ou attributaire. Ils sont alors estimés en référence aux coûts d'un opérateur efficace mettant en œuvre le processus de portabilité et tiennent compte d'une rémunération raisonnable des capitaux employés, conformément à l'article D. 406-19 du CPCE.
IV. ― Coûts directement liés à une demande
de portage pour un opérateur donneur
Les coûts directement liés à une demande de portage sont les coûts qui sont variables en fonction du nombre de demandes. Il s'agit alors de coûts incrémentaux occasionnés par chaque demande de portage.
Les coûts non variables en fonction des demandes de portage relèvent de l'obligation réglementaire prévue à l'article L. 44 du CPCE imposant aux opérateurs envers leurs abonnés de leur donner la possibilité de conserver leur numéro, que ces derniers exercent ou non cette possibilité.
Les coûts directs et variables sont donc ceux encourus par l'opérateur donneur pour réaliser les opérations prévues par la décision n° 2006-0381 susvisée aux fins des demandes de portage, à savoir :
i. Réponse à la consultation par l'abonné des informations nécessaires au portage dans le système de l'opérateur donneur. Il s'agit en particulier du relevé d'identité opérateur (« RIO »), transmis grâce à un serveur vocal d'information (« SVI ») et par SMS pour les abonnés grand public, et via un espace client internet ou sur la facture pour les abonnés entreprises ;
ii. Contrôle d'éligibilité de conservation du numéro, lorsqu'une demande est transmise via l'opérateur receveur. Cela consiste à vérifier que le numéro mobile et le « RIO » sont exacts, que le numéro mobile est toujours actif et, enfin, que ce numéro ne fait pas l'objet d'une demande de portabilité en cours (vérification réalisée par le GIE EGP). Une fois ces vérifications effectuées, l'opérateur donneur informe l'opérateur receveur sur l'éligibilité de la demande. En cas d'inéligibilité, il doit en indiquer le motif.
Le traitement de ces coûts est décrit ci-après.
i. La transmission des informations nécessaires au portage :
L'article 5 de la décision n° 2006-0381 susvisée prévoit que les informations doivent être mises gratuitement à disposition des abonnés mobiles. Par abonné mobile, on entend personne physique ou morale utilisant le service fourni par un opérateur mobile et à laquelle a été affecté un numéro mobile. Il s'agit donc des abonnés grand public et des abonnés entreprises ou entités publiques (4).
Dans tous les cas, les coûts sous-jacents à l'obligation d'information gratuite des abonnés sur leur RIO et les informations connexes à celui-ci (information sur le titulaire de la ligne et sur une éventuelle durée contractuelle minimum d'engagement) ne sauraient être refacturés dans leur intégralité par l'opérateur donneur à l'opérateur receveur. De nombreux clients peuvent en effet s'informer sur les modalités nécessaires à l'exercice de leur droit à la portabilité sans pour autant décider in fine de changer d'opérateur.
En revanche, lorsque cette interrogation donne lieu à une demande de portage, la prestation réalisée par l'opérateur donneur n'est plus une simple information destinée à son abonné, mais bien la transmission des informations nécessaires à l'opérateur receveur en vue de réaliser pour le compte de l'abonné la demande de portage.
Ainsi, à l'évidence, la transmission du RIO n'a pas pour finalité l'information de l'abonné mais constitue bien, lorsqu'il est transmis par l'abonné à l'opérateur receveur, le flux d'information technique correspondant à la première étape du processus de portage entre opérateurs.
Dans le cas des abonnés grand public, la décision précitée prévoit que la consultation des informations pour ces abonnés se fait par interrogation gratuite d'un serveur vocal d'information suivie par l'envoi d'un SMS reprenant les mêmes informations.
Les coûts variables directement liés à une demande effective de portage d'un numéro mobile sont refacturés à l'opérateur receveur par l'opérateur donneur, en référence aux coûts d'un opérateur efficace mettant en œuvre ce processus.
Dans le cadre de ce processus, l'Autorité estime donc légitime que l'opérateur donneur facture à l'opérateur receveur, suite à une demande de portage d'un abonné, les coûts liés au processus déclenchant cette demande, et qui sont constitués par les prestations suivantes :
― la mise à disposition d'information aux abonnés mobiles conformément à la décision n° 2006-0381 de l'Autorité susvisée, comprenant :
― un appel d'interrogation du serveur vocal d'information dédié à la portabilité des numéros permettant d'obtenir le RIO de l'abonné (coût direct lié à un seul appel au SVI de l'OPD), et ;
― l'envoi d'un SMS à l'abonné mobile (coût direct lié à un seul envoi par l'OPD) ;
― la vérification du caractère éligible de la demande de conservation du numéro et la transmission du résultat à l'opérateur receveur.
Concernant les abonnés entreprises, les informations nécessaires au portage sont mises à leur disposition, soit sous forme électronique par le biais d'un espace client accessible par le réseau internet, soit par une mention sur le support de facturation.
Dans les deux cas, et contrairement aux abonnés grand public, il semble très difficile de distinguer les coûts liés à l'information gratuite des abonnés de ceux induits directement par le déclenchement effectif d'une demande de conservation du numéro d'autant qu'une demande peut concerner un nombre très variable de numéros.
Les coûts directs et variables, évalués unitairement par numéro, ne sauraient cependant être supérieurs à ceux mis en évidence dans le cas des demandes d'abonnés grand public qui mettent en œuvre des processus plus couteux que la simple édition d'une information supplémentaire (le RIO) sur une facture ou un site web comme un appel au SVI ou l'envoi d'un SMS. L'Autorité considère ainsi a priori que, dans le cas d'une demande de portabilité pour les abonnés entreprises, les coûts directs et variables « grand public » (interrogation de SVI et envoi de SMS) constituent un majorant des coûts qui peuvent être refacturés par un opérateur donneur à un opérateur receveur.
ii. Contrôle de l'éligibilité de la demande de conservation du numéro :
L'opérateur donneur a l'obligation de vérifier que la demande de conservation de numéro qui lui est présentée par l'opérateur receveur est « éligible » conformément aux dispositions de l'article 4 de la décision n° 2006-0381 précitée, puis d'informer l'opérateur receveur du résultat de cette vérification. Cette vérification correspond à une interrogation dans la base de gestion client de l'opérateur donneur pour chaque numéro objet d'une demande de portage.
Les coûts susceptibles d'être refacturés sont donc ceux entraînés par la formulation d'une requête sur une base de données interne préexistante.
iii. Traitement d'une demande de portabilité hors processus nominal :
Dans le cadre d'un processus dit nominal répondant à une demande de portabilité d'un abonné grand public, entreprise ou entité publique, les opérateurs mobiles métropolitains ont mis en place un processus entièrement automatisé, décrit précédemment. Toutefois, du fait de l'opérateur receveur, un processus spécifique, par exemple un processus manuel, peut être mis en place. Dans ce cas, des coûts directs différents peuvent apparaître et ainsi faire l'objet d'une tarification particulière dès lors que l'opérateur donneur y a recours du fait de l'opérateur receveur.
(4) Définition donnée dans l'article 1er de la décision 2006-0381 de l'ARCEP en date du 30 mars 2006 précisant les modalités d'application de la portabilité des numéros mobiles en métropole.
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