- En ce qui concerne les écarts
entre les différents montants de redevance
L'article R. 56 du code du domaine de l'Etat dispose que « toute redevance stipulée au profit du trésor doit tenir compte des avantages de toute nature procurés au concessionnaire ». Par la suite, la jurisprudence administrative est venue préciser cette règle en posant le principe selon lequel la redevance doit être calculée en fonction de la valeur locative d'une propriété privée comparable, mais également en fonction de l'avantage spécifique que tire l'occupant de la jouissance privative du domaine public. Le juge administratif admet encore que seul le critère de l'avantage retiré peut être pris en considération par l'administration pour fixer le montant d'une redevance.
Par ailleurs, dans une décision récente, le juge administratif a rappelé que lorsque d'importantes incertitudes entachaient la détermination des avantages que les opérateurs de réseaux de communications électroniques étaient supposés retirer de l'occupation du domaine public fluvial et du domaine public routier, le montant réclamé n'apparaissait pas juridiquement fondé (1). Au cas d'espèce, le juge avait pu tirer toutes les conséquences du fait que le gestionnaire du domaine a reconnu l'existence d'un rapport de 10 à 25 entre les tarifs des redevances pratiqués sur le domaine public routier et sur le domaine public non routier.
En outre, l'Autorité indique que l'évaluation de l'avantage retiré par l'occupant privatif du domaine peut être fonction de la nécessité de réaliser ou non des travaux de génie civil. L'utilisation par un opérateur donné des tranchées existantes, réalisées le cas échéant par la collectivité elle-même, peut expliquer le montant plus élevé des redevances dans la mesure où les coûts afférents aux travaux d'installation n'ont pas été supportés par l'opérateur.
Dans ces conditions, il apparaîtrait souhaitable que les niveaux des redevances plafonds fixées par le décret soient fondés sur des explications tenant à la différence d'évaluation des avantages retirés par les opérateurs dont les installations se situent sur les différentes dépendances de l'un ou l'autre des deux domaines.
Or l'Autorité constate que :
- le projet de texte prévoit des écarts de redevances entre les différents domaines plus importants que ceux ayant conduit à l'annulation du précédent décret par le Conseil d'Etat, ou que ceux ayant permis au tribunal administratif dans l'affaire précitée de constater que le montant réclamé n'apparaissait pas fondé. En effet, le projet de décret instaure un barème qui conduit à mettre en place des redevances sur le domaine public routier et non routier dont les tarifs varient dans une proportion allant de 1 à 100 ;
- le rapport au Premier ministre, joint au présent projet de décret, semble relativement fragile dans la mesure où, s'agissant du domaine public autoroutier et du domaine public fluvial, les arguments tirés de la continuité du domaine, de la surveillance du réseau et de l'existence d'un interlocuteur unique sont indifféremment avancés pour déterminer l'avantage retiré par l'occupant privatif. Pourtant, le projet de décret ne semble pas en tirer les conséquences et s'abstient d'aligner au même niveau le montant des redevances perçues au titre de l'occupation des dépendances correspondantes. En effet, il ressort du projet d'article R. 20-52 que les sommes varient dans un rapport de 1 à 3 selon qu'il s'agit d'occuper respectivement le domaine public autoroutier ou le domaine public fluvial.
Il pourrait dès lors apparaître souhaitable, soit de réduire les écarts entre les niveaux de redevance assortis à l'occupation des différents types de domaines, soit d'en étayer les motifs de justification.
1 version