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Nouvelles exigences réglementaires pour les chargeurs frontaux
Le présent avis a pour objet de rappeler la réglementation applicable et de présenter les mesures attendues concernant la conception et l'utilisation des chargeurs frontaux, suite à la décision d'exécution (UE) 2024/1256 de la Commission du 26 avril 2024 modifiant et corrigeant la décision d'exécution (UE) 2023/1586 en ce qui concerne les normes harmonisées relatives aux engins agricoles à chargeur frontal, aux quads tout-terrain et aux outils portatifs à moteur électrique, publiée au Journal officiel de l'Union européenne le 30 avril 2024.
Il précise les mesures attendues de la part des différents opérateurs économiques (fabricants, importateurs, distributeurs, vendeurs, loueurs) mettant à disposition sur le marché des chargeurs frontaux et des employeurs utilisateurs de ce type de machines.
- Contexte
Les chargeurs frontaux sont le plus souvent des équipements interchangeables au sens de la directive 2006/42/CE du 17 mai 2006 relative aux machines. Ils peuvent être montés et démontés sur un tracteur agricole ou forestier par l'opérateur. Ils sont considérés comme des machines lorsqu'ils sont installés à demeure sur des tracteurs agricoles ou forestiers.
La plupart des chargeurs frontaux sont équipés d'un dispositif d'attache permettant d'installer différents outils, équipements interchangeables ou appareils de levage (fourche, crochet…) leur conférant ainsi une fonction pour réaliser des opérations de levage au sens de la directive du 17 mai 2006 précitée. Le point 4.1.1 a de son annexe I définit l'opération de levage comme une : « opération de déplacement de charges unitaires composées d'objets et/ou de personnes nécessitant, à un moment donné, un changement de niveau ». Cependant, il n'a pas pour fonction le levage de personnes. Il est donc interdit d'utiliser le chargeur frontal à cette fin, sauf en cas d'urgence comme prévu par l'article L. 4323-32 du code du travail.
Certains chargeurs frontaux équipés de façon permanente d'un godet sont exclusivement destinés à des opérations de manipulation de charges en vrac (fumier, grain, terre, sable…). Celles-ci ne sont pas considérées comme des opérations de levage mais comparables à des opérations de terrassement.
Selon leur masse et leur catégorie, les tracteurs agricoles ou forestiers sont équipés d'une structure de protection contre le retournement (SPCR ou ROPS en anglais pour roll-over protective structure). Celle-ci peut se présenter sous la forme d'un arceau monté à l'avant ou à l'arrière du poste de conduite ou d'une structure à quatre montants, souvent intégrée à la cabine du tracteur. Cette structure a pour fonction de protéger le conducteur du tracteur lors d'un renversement ou d'un retournement, sous réserve que celui-ci ait bouclé sa ceinture de sécurité, en préservant un volume limite de déformation autour de lui.
De manière optionnelle, les tracteurs peuvent être équipés d'une structure de protection contre les chutes d'objets (SPCO ou FOPS en anglais pour falling objects protective structure). Cette structure doit être vérifiée selon les dispositions de l'annexe XI du règlement délégué (UE) n° 1322/2014 du 19 septembre 2014, complétant et modifiant le règlement (UE) n° 167/2013, ou du code 10 des codes tracteurs de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).
Plusieurs accidents de travail graves ou mortels occasionnés par la chute de balles de fourrage ont conduit l'Allemagne à remettre en question la norme harmonisée EN 12525 : 2000 + A2 : 2010 relative aux chargeurs frontaux, en expliquant que celle-ci ne satisfaisait pas aux exigences essentielles de santé et de sécurité (EESS) énoncées aux points 1.1.2 et 1.7.4.2 (l) de l'annexe I de la directive du 17 mai 2006 précitée.
Après consultation des Etats membres, des différentes parties prenantes et du comité européen de normalisation (CEN), la Commission a conclu que la norme ne satisfaisait pas aux EESS énoncées aux points 1.1.2 et 1.7.4.2 (l) de l'annexe I de la directive du 17 mai 2006 précitée.
La norme reste harmonisée à la directive du 17 mai 2006 précitée mais avec la restriction suivante : « La présente norme harmonisée ne confère pas de présomption de conformité aux exigences essentielles de santé et de sécurité énoncées au point 1.1.2 de l'annexe I de la directive 2006/42/CE, qui exige des mesures techniques, et non [à] des mesures organisationnelles telles que des structures de protection atténuant spécifiquement les chutes au lieu de traiter d'autres scénarios d'accident, y compris les événements de renversement de véhicule, et au point 1.7.4,2 l) de l'annexe I de la directive 2006/42/CE, qui exige des informations sur les risques résiduels qui subsistent malgré les mesures de conception sûres, de sauvegarde et de protection complémentaires adoptées. »
- Conséquences
La norme harmonisée EN 12525 : 2000 + A2 : 2010 ne donne plus de présomption de conformité à certaines exigences essentielles de la directive du 17 mai 2006 précitée mais elle continue d'exister et peut être utilisée par les fabricants lors de la conception.
Les fabricants ne peuvent plus s'appuyer uniquement sur cette norme pour mettre sur le marché européen les chargeurs frontaux mais doivent s'assurer du respect des dispositions pertinentes de la directive du 17 mai 2006 précitée, en particulier les EESS 1.1.2 et 1.7.4,2 l de l'annexe I. Les fabricants doivent revoir leur évaluation des risques, choisir des mesures de protection adéquates pour traiter les risques concernés et justifier leurs choix dans le dossier technique.
Il n'est pas envisagé de considérer que tous les chargeurs frontaux déjà en service sont non conformes à la règlementation en vigueur du fait de la restriction de la norme. Chaque modèle de chargeur frontal devra faire l'objet d'un examen afin de vérifier s'il est ou non conforme aux dispositions applicables au moment de sa mise sur le marché, particulièrement s'agissant des dispositions imposant de prévenir toute chute d'objets présentant un risque pour le conducteur.
Parallèlement à la procédure d'objection formelle, les travaux de révision de la norme ont été lancés fin 2022 sans attendre les conclusions de la Commission.
- Rappel de la réglementation applicable
Les chargeurs frontaux constituent des machines (la directive du 17 mai 2006 précitée s'applique aux équipements interchangeables) et donc des équipements de travail au sens de l'article L. 4311-2 du code du travail.
Les chargeurs frontaux en service doivent être conformes aux règles de conception en vigueur au moment de leur mise sur le marché en application de l'article L. 4321-2 du code du travail.
La version actuellement en vigueur de ces dispositions est issue de l'annexe I de la directive du 17 mai 2006 précitée, transposée en droit français par le décret n° 2008-1156 du 7 novembre 2008. Cette réglementation est entrée en application le 29 décembre 2009. Toutes les machines mises sur le marché à l'état neuf à compter de cette date doivent donc être conformes à ces dispositions.
Les chargeurs frontaux mis en service avant l'entrée en vigueur de la directive du 17 mai 2006 précitée doivent être conformes :
- soit à la directive 98/37/CE du 22 juin 1998 concernant le rapprochement des législations des États membres relatives aux machines pour ceux mis sur le marché entre le 1er janvier 1993 et le 31 décembre 1994 ;
- soit aux prescriptions relatives à l'utilisation des équipements de travail pour ceux mis sur le marché antérieurement au 1er janvier 1993 (articles R. 4324-1 et suivants du code du travail).
a) Obligation des fabricants, importateurs, distributeurs, vendeurs ou loueurs
En application de l'article L. 4311-3 du code du travail, il est interdit d'exposer, de mettre en vente, de vendre, d'importer, de louer, de mettre à disposition ou de céder à quelque titre que ce soit des équipements de travail ne répondant pas aux règles techniques de conception en vigueur, c'est à dire aux dispositions de l'annexe I prévue à l'article R. 4312-1 du code du travail.
Le non-respect de ces dispositions constitue un délit prévu et sanctionné à l'article L. 4741-9 du code du travail.
Conformément à l'article R. 4312-2 du code du travail, les machines d'occasion, soumises lors de leur mise en service à l'état neuf aux règles techniques de conception et de construction prévues à l'annexe I de l'article R. 4312-1, demeurent soumises aux règles de cette annexe. Les machines d'occasion qui n'étaient pas soumises à ces règles lors de leur mise en service à l'état neuf sont soumises aux prescriptions techniques d'utilisation prévues aux articles R. 4324-1 et suivants du code du travail.
b) Obligation des employeurs utilisateurs
L'article L. 4321-2 interdit de mettre en service ou d'utiliser des équipements de travail et des moyens de protection qui ne répondent pas aux règles techniques de conception applicables, c'est à dire aux dispositions de l'annexe I mentionnée à l'article R. 4312-1 du code du travail.
Le non-respect de ces dispositions constitue un délit prévu et sanctionné à l'article L. 4741-9 du code du travail.
Conformément aux dispositions de l'article R. 4322-1 du code du travail, les équipements de travail doivent être maintenus en conformité avec les règles techniques de conception et de construction applicables lors de leur mise en service dans l'établissement, y compris au regard de la notice d'instructions.
Les machines non soumises aux règles de conception lors de leur mise sur le marché doivent être en conformité avec les prescriptions d'utilisation des équipements de travail prévues aux articles R. 4324-1 et suivants du code du travail. Le cas échant, elles doivent avoir été mises en conformité avec la version actuellement en vigueur de ces dispositions.
En particulier, pour le risque considéré de chutes d'objets, l'article R. 4324-32 prévoit : « Lorsque le risque de chute d'objets ne peut pas être complètement évité, l'équipement de travail mobile est équipé d'une structure de protection contre ce risque. »
Par ailleurs les employeurs utilisateurs doivent s'assurer régulièrement du bon fonctionnement des dispositifs de sécurité du chargeur frontal, en particulier lors des vérifications générales périodiques réalisées tous les 6 mois si le chargeur frontal est utilisé pour des opérations de levage ; celles-ci sont prévues par l'article R. 4323-23 du code du travail et l'arrêté du 1er mars 2004 relatif aux vérifications des appareils et accessoires de levage. Ces obligations s'intègrent dans le cadre du principe de maintien en état de conformité prévu aux articles R. 4322-1 et -2 du code du travail.
c) Cause de résolution
Il est rappelé que l'employeur ayant acheté ou loué un chargeur frontal qui s'avère non conforme peut, en application de l'article L. 4311-5 du code du travail, et nonobstant toute clause contraire, demander la résolution de la vente ou du bail dans le délai d'une année à compter du jour de la livraison.
Par ailleurs, il peut se voir accorder des dommages et intérêts par le tribunal qui prononce cette résolution.
- Chargeurs frontaux neufs
Ce chapitre décrit les actions à mener lors de la conception et la construction des chargeurs frontaux. Il concerne également ceux présents dans la chaîne de distribution et non encore mis en service.
Les opérateurs économiques (fabricants, importateurs, mandataires, distributeurs) doivent agir chacun selon leur rôle.
a) Actions à la charge des fabricants de chargeurs frontaux
Depuis l'entrée en vigueur de la décision d'exécution (UE) de la Commission du 26 avril 2024, c'est-à-dire le jour de sa publication au JOUE le 30 avril 2024, les fabricants doivent identifier les modèles de chargeurs frontaux présentant un risque de chute d'objets sur le conducteur du tracteur en examinant leurs évaluations des risques.
Les exemplaires de modèles de chargeurs frontaux présentant un risque lorsqu'ils sont associés avec certains tracteurs agricoles ou forestiers ne doivent plus être mis sur le marché par leurs fabricants tant que de nouveaux éléments de conception les rendant sûrs ne seront pas mis en œuvre.
Pour les exemplaires de modèles de chargeurs frontaux présentant un risque, présents dans la chaîne de distribution, ils doivent les retirer du marché. Ils ne pourront être remis sur le marché qu'après avoir été mis en conformité. Cette opération peut être réalisée dans les locaux du fabricant ou des distributeurs.
Afin d'accompagner les fabricants, des mesures techniques minimales sont présentées en annexe B en fonction de plusieurs situations possibles, permettant de mettre en conformité les chargeurs frontaux conformément à la réglementation. Les fabricants peuvent choisir toute autre solution présentant un niveau de sécurité au moins équivalent et permettant de répondre aux EESS. Ils doivent être en mesure de justifier leurs choix sur demande des services de contrôle habilités.
Les notices d'instructions devront être mises à jour en conséquence.
L'identification et le retrait du marché des chargeurs frontaux présentant un risque lorsqu'ils sont associés avec certains tracteurs agricoles ou forestiers doivent être effectifs au plus tard 6 mois après la date de publication du présent avis.
Ils doivent informer leurs distributeurs, vendeurs et loueurs au plus tard 3 mois après la date de publication du présent avis afin que ceux-ci retirent du marché les chargeurs frontaux non conformes.
b) Actions à la charge des importateurs
Les importateurs ne doivent plus mettre à disposition sur le marché les modèles de chargeurs frontaux présentant un risque. En se mettant en relation avec les fabricants et/ou en utilisant les documents à leur disposition, ils doivent être en mesure d'identifier les modèles concernés.
Ils doivent se coordonner avec les fabricants pour établir le cas échéant la procédure de mise en conformité de ces chargeurs (retour usine, modification en entrepôt…).
Le retrait du marché des chargeurs frontaux présentant un risque lorsqu'ils sont associés avec certains tracteurs agricoles ou forestiers doit être effectif au plus tard 6 mois après la date de publication du présent avis.
Ils doivent informer leurs distributeurs, vendeurs et loueurs au plus tard 3 mois après la date de publication du présent avis.
c) Actions à la charge des distributeurs, vendeurs et loueurs
Les distributeurs, les vendeurs et les loueurs ne doivent plus mettre à disposition sur le marché les modèles de chargeurs frontaux présentant un risque. En se mettant en relation avec les fabricants et les importateurs et/ou en utilisant les documents à leur disposition, ils doivent être en mesure d'identifier les modèles concernés.
Le retrait du marché des chargeurs frontaux présentant un risque lorsqu'ils sont associés avec certains tracteurs agricoles ou forestiers doit être effectif au plus tard 6 mois après la date de publication du présent avis.
Ils doivent se coordonner avec les fabricants et les importateurs pour établir la procédure de mise en conformité de ces chargeurs (retour usine, modification en entrepôt…).
En cas de refus de la part du fabricant ou de l'importateur, le distributeur peut transmettre un signalement au service de surveillance du marché.
- Chargeurs frontaux mis en service
a) Actions à la charge des fabricants et importateurs de chargeurs frontaux
Ils doivent informer au plus tard 3 mois après la date de publication du présent avis leurs distributeurs, vendeurs et loueurs des risques possibles et interdire l'association d'un chargeur frontal avec un tracteur agricole ou forestier si les mesures techniques ne sont pas en place selon les cas décrits en annexe B.
L'application des mesures techniques doit couvrir les chargeurs frontaux mis en service depuis 10 ans avant la date de publication du présent avis.
Selon les possibilités techniques, ils doivent proposer aux distributeurs, vendeurs, loueurs et aux utilisateurs des solutions permettant de modifier le chargeur frontal. Ces modifications sont à la charge du fabricant, sauf s'il était bien précisé dans la notice d'instructions que l'association du chargeur frontal était impossible avec le tracteur concerné.
Si le constructeur n'est pas en mesure de proposer une solution technique permettant de modifier le chargeur frontal, il doit être échangé contre un chargeur frontal conforme à sa charge.
b) Actions à la charge des fabricants et importateurs de tracteurs agricoles ou forestiers.
En fonction des avertissements figurant déjà dans le manuel d'utilisation, informer le cas échéant les distributeurs, vendeurs, loueurs et les utilisateurs des risques possibles et interdire l'association d'un chargeur frontal avec un tracteur agricole si le conducteur n'est pas protégé du risque de chute d'objets.
Certains fabricants et importateurs de tracteurs agricoles ou forestiers sont aussi fabricants ou importateurs de chargeurs frontaux. Le § 5 a s'applique aussi pour eux.
c) Actions à la charge des distributeurs, vendeurs et loueurs
Les distributeurs, vendeurs et loueurs doivent alerter les utilisateurs par tous les moyens à leur disposition (affichage, mailing…) au plus tard 6 mois après la date de publication du présent avis.
Ils doivent proposer une solution de mise en sécurité selon les prescriptions du fabricant ou de l'importateur. La mise en œuvre des mesures techniques prévue au 5 d doit être réalisée au plus tard 18 mois après la date de publication du présent avis.
d) Actions à la charge des employeurs utilisateurs
Dès que les employeurs utilisateurs ont l'information sur le risque, ils ne doivent plus utiliser le chargeur frontal ou limiter son usage afin d'éviter le risque de chute d'objets et ce jusqu'à sa mise en sécurité.
L'annexe C présente les mesures que l'employeur est susceptible de prendre en fonction des différents cas de figure.
S'agissant des mesures techniques à prendre pour mettre en sécurité leur chargeur frontal, il est recommandé à l'employeur de s'adresser au fabricant, à l'importateur ou au distributeur de son chargeur frontal.
Les utilisateurs non employeurs sont invités à prendre les mêmes mesures pour leur propre sécurité.
La mise en sécurité des chargeurs frontaux présentant un risque doit être effective au plus tard 18 mois après la date de publication du présent avis.
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