JORF n°0060 du 12 mars 2022

Délibération n°2022-61 du 24 février 2022

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Certification de RTE par la CRE: Analyse des Conséquences de la Nomination des Commissaires aux Comptes

Résumé La CRE dit que RTE reste indépendante malgré la nomination des mêmes commissaires aux comptes que la CDC, grâce à des mesures de protection.

Participaient à la séance : Jean-François CARENCO, président, Ivan FAUCHEUX, Jean-Laurent LASTELLE et Valérie PLAGNOL, commissaires.

  1. Contexte et compétence de la CRE

La procédure de certification vise à s'assurer du respect par les gestionnaires de réseaux de transport (ci-après « GRT ») des règles d'organisation et d'indépendance vis-à-vis des sociétés exerçant une activité de production ou de fourniture au sein de l'entreprise verticalement intégrée (ci-après « EVI ») à laquelle ils appartiennent. La séparation effective des activités de gestion des réseaux de transport et des activités de production ou de fourniture a pour principale finalité d'éviter tout risque de discrimination entre utilisateurs de ces réseaux.
La société RTE Réseau de transport d'électricité (ci-après « RTE ») est, aux termes de l'article L. 111-40 du code de l'énergie, la société gestionnaire du réseau public de transport d'électricité en France tel que défini à l'article L. 321-4 dudit code.
Par délibération du 26 janvier 2012, la Commission de régulation de l'énergie (ci-après « CRE ») a certifié RTE, société alors contrôlée à 100 % par la société Electricité de France S.A. (ci-après « EDF »), en tant que GRT agissant en toute indépendance vis-à-vis des autres parties de l'EVI à laquelle elle appartient, conformément au modèle « gestionnaire de réseau de transport indépendant » (modèle dit « ITO - independent transmission operator »).
La certification de RTE par la CRE a été assortie de certaines demandes et recommandations visant à garantir l'application par le GRT des règles d'organisation et d'indépendance énoncées aux articles L. 111-11 et L. 111-13 à L. 111-39 du code de l'énergie.
A la suite de l'opération de prise de participation par l'établissement public Caisse des dépôts et consignations (ci-après « CDC ») et CNP Assurances (ci-après « CNP ») de 49,9 % (1) du capital de la société holding dénommée Coentreprise de Transport d'Electricité (ci-après « CTE »), détenant elle-même 100 % du capital de RTE, la CRE a réexaminé et maintenu la certification de RTE par une délibération du 11 janvier 2018 (2).
Cette opération a eu pour effet d'élargir le périmètre de l'entreprise verticalement intégrée (ci-après « EVI ») à laquelle appartient RTE (ci-après « EVI RTE »), à la CDC qui contrôle RTE (3), et aux sociétés de production ou de fourniture d'électricité placées sous son contrôle direct ou indirect. Cette opération n'a pas élargi le périmètre de l'EVI RTE à CNP, en l'absence de contrôle de celle-ci sur RTE.
Par ailleurs, la CRE a maintenu la certification de RTE, dans une délibération du 2 juillet 2020 (4), à la suite d'une opération visant à réorganiser les participations de la CDC au sein de La Poste afin de créer un pôle financier public réunissant la CDC, La Poste, La Banque Postale et CNP Assurances. Une telle opération n'a pas modifié le périmètre de l'EVI RTE.
Par courrier du 2 février 2022, la CDC, en application de l'article L. 111-4-1 1° du code de l'énergie, a notifié à la CRE le résultat de la procédure de publicité et de mise en concurrence ayant conduit le conseil de surveillance de la CDC à nommer un binôme de commissaires aux comptes identique à celui de RTE pour la période 2022-2027 : KPMG et Mazars.
Sur la base des éléments communiqués par la CDC, la présente délibération vise à analyser les conséquences de cette nomination sur la certification de RTE.

  1. Analyse de la CRE

L'article L. 111-15 du code de l'énergie dispose que « les comptes sociaux du [GRT] sont certifiés par un commissaire aux comptes qui ne certifie ni les comptes d'une autre partie de l'EVI ni les comptes consolidés de cette dernière ».
L'article L. 823-2 du code de commerce impose la désignation de deux commissaires aux comptes pour toute personne astreinte à publier des comptes consolidés, ce qui est le cas de RTE. La CDC est également dans l'obligation de désigner deux commissaires aux comptes en vertu de l'article L. 518-15 du code monétaire et financier.
Or, il n'existe sur le marché français que cinq cabinets (5) qui disposent de la compétence suffisante, de la surface financière et du réseau international nécessaire pour certifier les comptes d'entreprises de la taille de RTE et de la CDC. De plus, pour la période 2022-2027, la CDC ne peut bénéficier des services de certification de deux des cinq cabinets d'audit susceptibles de candidater (à savoir Ernst & Young et Deloitte), en raison des missions de conseil confiées par la CDC à ces cabinets.
Compte tenu de ces spécificités, il apparait quasi-impossible pour la CDC de mandater des commissaires aux comptes disposant des ressources nécessaires pour certifier ses comptes et qui acceptent de renoncer à effectuer tout mandat pour le compte de RTE.
Afin de pallier cette situation et lui permettre de nommer le même binôme de commissaires aux comptes que RTE, la CDC a proposé à la CRE la mise en place de mesures de sauvegarde, permettant d'exclure tout risque de conflit d'intérêts entre RTE et la CDC :

- signature des rapports d'audit de la CDC et de RTE par des associés différents et rattachés eux-mêmes à des départements distincts ;
- équipes d'audit différentes et encadrement totalement distinct ;
- signature d'un engagement de confidentialité spécifique par l'ensemble des personnels concernés par les travaux d'audit ;
- revue indépendante des travaux d'audits réalisés ;
- contrôle annuel de la correcte application du dispositif mis en œuvre par la fonction qualité de chaque cabinet.

KPMG et Mazars se sont engagés à mettre en place de telles mesures de sauvegarde.
La CRE considère également nécessaire que RTE lui communique annuellement une attestation des deux cabinets d'audit accompagnée d'une part, de la liste des mandats concernant d'autres sociétés de l'entreprise verticalement intégrée et détenus par le même réseau de commissaires aux comptes et, d'autre part, de la nature des mesures mises en œuvre au sein de ce réseau pour prévenir tout conflit d'intérêts. Une telle demande est maintenue tant que la CDC dispose d'un binôme de commissaires aux comptes identique à celui de RTE.
Compte tenu de l'ensemble de ces éléments et des engagements énoncés ci-dessus, la CRE considère que la nomination par la CDC d'un binôme de commissaires aux comptes identique à celui de RTE ne remet pas en cause la certification de RTE.

Décision de la CRE

Par courrier du 2 février 2022, l'établissement public Caisse des dépôts et consignations (ci-après « CDC »), en application de l'article L. 111-4-1 (1°) du code de l'énergie, a notifié à la Commission de régulation de l'énergie (ci-après « CRE ») le résultat de la procédure de publicité et de mise en concurrence ayant conduit le conseil de surveillance de la CDC a nommé un binôme de commissaires aux comptes identique à celui de RTE pour la période 2022-2027 : KPMG et Mazars.
Après analyse des éléments fournis par la CDC relatifs à la quasi-impossibilité de recourir à des cabinets différents pour la CDC et RTE, ainsi que des mesures de sauvegarde prises par KPMG et Mazars, la CRE considère que la nomination par la CDC d'un binôme de commissaires aux comptes identique à celui de RTE ne remet pas en cause la certification de RTE.
Les dispositions de la délibération de la CRE du 11 janvier 2018 portant décision sur le maintien de la certification de la société RTE demeurent donc en l'état sans qu'il soit nécessaire de procéder à un nouvel examen de la certification de RTE au sens de l'article L. 111-4 du code de l'énergie.
Par ailleurs, la CRE demande à RTE de lui communiquer annuellement une attestation des deux cabinets d'audit accompagnée d'une part, de la liste des mandats concernant d'autres sociétés de l'entreprise verticalement intégrée et détenus par le même réseau de commissaires aux comptes et, d'autre part, de la nature des mesures mises en œuvre au sein de ce réseau pour prévenir tout conflit d'intérêts. Une telle demande est maintenue tant que la CDC dispose d'un binôme de commissaires aux comptes identique à celui de RTE.
La présente délibération sera publiée sur le site internet de la CRE et notifiée à RTE et à la CDC.
Elle sera publiée au Journal officiel de la République française et transmise à la ministre de la transition écologique ainsi qu'au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Délibéré à Paris, le 24 février 2022.

Pour la Commission de régulation de l'énergie :

Le président,

J.-F. Carenco

(1) 29,9 % au profit de la CDC et 20 % au profit de CNP.

(2) Délibération de la CRE du 11 janvier 2018 portant décision sur le maintien de la certification de la société RTE.

(3) La CDC dispose en effet de droits de veto sur des décisions stratégiques relatives à RTE (notamment l'approbation du plan financier à moyen terme de RTE et les investissements régulés ou non régulés au-delà de 40 millions [80 millions d'euros cumulés par an]) de nature à lui conférer une influence déterminante au sens de l'article L. 430-1 du code de commerce.

(4) Déliberation de la Commission de régulation de l'énergie du 2 juillet 2020 portant décision sur le maintien de la certification de la société RTE.

(5) PricewaterhouseCoopers (PwC), KPMG, Deloitte, Ernst & Young et Mazars.