JORF n°0179 du 3 août 2012

Décision du 31 mai 2012

Le comité de règlement des différends et des sanctions,

Vu la demande de règlement de différend, enregistrée le 9 mars 2011, sous le numéro 36-38-11, présentée par la société MSO PV Top, société en nom collectif, immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Lyon sous le numéro 514 201 185, dont le siège social est situé 115, avenue Maréchal-de-Saxe, 69003 Lyon, représentée par son gérant, la société Maïa Solar, ayant pour avocat Me Arnaud GOSSEMENT, SELARL Gossement Enckell, 73, rue Broca, 75013 Paris.

La société MSO PV Top a saisi le comité de règlement des différends et des sanctions de la Commission de régulation de l'énergie du différend qui l'oppose à la société Electricité Réseau Distribution France (ci-après désignée « ERDF »), sur les conditions de raccordement au réseau public de distribution d'électricité d'un projet de centrale photovoltaïque.

Il ressort des pièces du dossier que la société MSO PV Top développe, sur le territoire de la commune de Rocles (Allier), un projet de centrale photovoltaïque intégrée au bâti d'une puissance de production maximale de 244,8 kWc.

Le 18 août 2010, la société ERDF a accusé réception d'une demande de proposition technique et financière pour le raccordement au réseau public de distribution du projet de centrale photovoltaïque de la société MSO PV Top, en date du 17 août 2010.

Le 2 novembre 2010, la société ERDF a délivré une proposition de raccordement et les conditions particulières de la convention de raccordement à la société MSO PV Top.

Le 8 décembre 2010, la société MSO PV Top a retourné à la société ERDF la proposition de raccordement signée et les conditions particulières de la convention de raccordement signées.

Par courrier du 27 janvier 2011, la société ERDF a informé la société MSO PV Top qu'elle devait, si elle souhaitait bénéficier d'un contrat d'obligation d'achat, adresser une nouvelle demande complète de raccordement à la fin de période de suspension de l'obligation d'achat instaurée par le décret du 9 décembre 2010.

Estimant que les conditions de raccordement au réseau public de distribution de son installation de production photovoltaïque n'étaient pas satisfaisantes, la société MSO PV Top a saisi le comité de règlement des différends et des sanctions d'une demande de règlement du différend qui l'oppose à la société ERDF.

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Dans ses observations, la société MSO PV Top soutient que le comité de règlement des différends et des sanctions est compétent pour trancher le litige l'opposant à la société ERDF.
Elle expose que le comité de règlement des différends et des sanctions doit écarter l'application de dispositions de droit interne contraires au droit communautaire et procéder à une interprétation conforme de ces dispositions de droit interne au regard du droit européen.
La société MSO PV Top précise que le décret du 9 décembre 2010 est contraire au droit de l'Union européenne dès lors qu'il est fondé sur la loi du 10 février 2000 qui elle-même viole les directives 2003/54/CE du 26 juin 2003 et 2009/28/CE du 23 avril 2009 en ce que celles-ci ne prévoient pas explicitement un dispositif de suspension de l'obligation d'achat ni même dans leur objectif.
Elle ajoute que ledit décret viole, d'une part, les principes de confiance légitime et de non-rétroactivité en ce qu'il s'applique rétroactivement à sa situation et, d'autre part, les principes d'égalité et de non-discrimination puisque certaines installations ne sont pas soumises à la suspension de l'obligation d'achat instaurée par le décret.
La société MSO PV Top soutient que le décret du 9 décembre 2010 devrait être écarté par le comité de règlement des différends et des sanctions dès lors que ce dernier est contraire à la loi du 10 février 2000.
Elle considère que cette contradiction avec la loi du 10 février 2000 repose, d'une part, sur l'absence de consultation de la Commission de régulation de l'énergie préalablement à son édiction et, d'autre part, sur le fait que l'article 5 dudit décret, fixe des nouvelles règles en matière de raccordement sans lien avec la possibilité de suspendre l'obligation d'achat prévue par l'article 10 de la loi du 10 févier 2000.
La société MSO PV Top estime que le décret du 9 décembre 2010 ne saurait lui être appliqué antérieurement à son entrée en vigueur le 10 décembre 2010.
La société MSO PV Top demande, en conséquence, au comité de règlement des différends et des sanctions de la Commission de régulation de l'énergie, de :
A titre principal, dire et juger que l'application du décret du 9 décembre 2010 doit être écartée.
A titre subsidiaire, dire et juger que le décret du 9 décembre 2010 ne saurait être opposé à la société MSO PV Top dès lors qu'il ne saurait être appliqué antérieurement à son entrée en vigueur le 10 décembre 2010.
Par conséquent :
― dire et juger que la société ERDF n'est pas fondée à en faire application à l'encontre de la société MSO PV Top ;
― enjoindre la société ERDF de valider l'acceptation, par la société MSO PV Top, de la proposition de raccordement et des conditions particulières de la convention de raccordement ;
― enjoindre la société ERDF de signer les conditions particulières de la convention de raccordement ;
― enjoindre la société ERDF de procéder dans ces conditions à la transmission de la demande de contrat d'achat à l'autorité en charge de l'obligation d'achat ;
― enjoindre la société ERDF de confirmer que l'accord sur la proposition de raccordement et sur les conditions particulières de la convention de raccordement est intervenu sans que le décret du 9 décembre 2010 ne puisse s'opposer, d'une part, à la réalisation des travaux de raccordement et, d'autre part, à la transmission d'un contrat d'achat.

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Vu la décision du 29 avril 2011 par laquelle le comité de règlement des différends et des sanctions a suspendu son instruction jusqu'à l'intervention de la décision du Conseil d'Etat sur les requêtes tendant à l'annulation du décret n° 2010-1510 du 9 décembre 2010.

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Vu la lettre du directeur général du 28 mars 2012 par laquelle il est demandé à la société ERDF de présenter ses observations.

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Vu les observations en défense, enregistrées le 27 avril 2012, présentées par la société Electricité Réseau Distribution France (ERDF), société anonyme, immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Nanterre sous le numéro B 444 608 442, dont le siège social est situé 102, terrasse Boieldieu, 92085 Paris La Défense Cedex, représentée par sa présidente du directoire, Mme Michèle BELLON, et ayant pour avocats Me Michel GUENAIRE et Me Sylvain BERGÈS, cabinet Gide Loyrette Nouel, 26, cours Albert-Ier, 75008 Paris.
La société ERDF soutient que le comité de règlement des différends et des sanctions ne peut pas écarter l'application du décret du 9 décembre 2010 dès lors qu'il n'est pas compétent pour apprécier la légalité d'un acte administratif, lequel a en outre été jugé légal par le Conseil d'Etat.
Elle rappelle que le Conseil d'Etat a considéré que le décret du 9 décembre 2010 était conforme au droit de l'Union européenne et soutient que ce décret est conforme aux directives ainsi qu'au principe de confiance légitime.
La société ERDF estime, également, que le décret du 9 décembre 2010 est conforme aux dispositions de la loi du 10 février 2000 ainsi qu'aux principes généraux du droit tels que le principe de non-rétroactivité des actes administratifs et le principe d'égalité.
Elle affirme ne pas avoir méconnu le délai de trois mois pour délivrer au producteur une proposition technique et financière que le producteur a retourné la proposition technique et financière après l'entrée en vigueur du décret du 9 décembre 2010, de sorte qu'elle était tenue d'interrompre la procédure de raccordement.
La société ERDF demande, en conséquence, au comité de règlement des différends et des sanctions de :
A titre principal :
― se déclarer incompétent pour statuer sur les conclusions tendant à écarter les dispositions du décret du 9 décembre 2010 ;
― se déclarer incompétent pour statuer sur les conclusions tendant à enjoindre la société ERDF de procéder à la transmission de la demande de contrat d'achat à l'autorité en charge de l'obligation d'achat ;
― se déclarer incompétent pour statuer sur les conclusions tendant à enjoindre la société ERDF de confirmer que l'accord sur la proposition technique et financière est intervenu sans que le décret du 9 décembre 2010 ne puisse s'opposer, d'une part, à la régularisation de la convention de raccordement et, d'autre part, à la transmission d'un contrat d'achat.
A titre subsidiaire, constater que la société ERDF devait respecter les dispositions du décret du 9 décembre 2010.
En tout état de cause, rejeter l'ensemble des conclusions de la demanderesse.

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Vu les observations en réplique, enregistrées le 16 mai 2012, présentées par la société MSO PV Top.
La société MSO PV Top précise qu'elle a été rendue destinataire d'une proposition de raccordement et de conditions particulières de la convention de raccordement et non d'une simple proposition technique et financière.
Elle soutient que le comité de règlement des différends et des sanctions est une instance juridictionnelle et, en tant que telle, est dans l'obligation d'écarter une règle nationale ou un acte administratif dont l'application serait illégale. Elle ajoute que le comité a non seulement le droit, mais le devoir, de contrôler que le décret du 9 décembre 2010 a été appliqué dans la légalité.
La société MSO PV Top considère que la société ERDF a appliqué de manière illégale le décret du 9 décembre 2010, à la demande de raccordement effectuée par la société MSO PV Top.
Elle indique que, dès lors que le tracé, le coût et les délais de raccordement sont communiqués dans les documents définitifs, le décret du 9 décembre 2010 ne saurait être opposé.
La société MSO PV Top indique que la société ERDF a favorisé l'application dudit décret, alors même que le seul décret du 23 avril 2008 pouvait être légalement appliqué à ladite demande de raccordement.
Elle soutient que la circonstance que le décret du 9 décembre 2010 ait été jugé légal par le Conseil d'Etat ne signifie nullement que celui-ci ait considéré que les gestionnaires de réseaux étaient tenus d'appliquer le dispositif de suspension de l'obligation d'achat.
La société MSO PV Top soutient que la société ERDF n'a pas respecté les délais prescrits par sa procédure de traitement des demandes de raccordement, alors même que ceux-ci sont obligatoires.
Elle indique que c'est la méconnaissance par la société ERDF de sa documentation technique de référence qui a conduit à l'application du décret du 9 décembre 2010 à la demande de raccordement opérée par la société MSO PV Top.
La société MSO PV Top demande, en conséquence, au comité de règlement des différends et des sanctions de :
A titre principal :
― dire et juger que la société ERDF a méconnu la documentation technique de référence, élaborée par ses soins ;
― dire et juger que l'application du décret du 9 décembre 2010 doit être écartée ;
― dire et juger que seules les dispositions visées par la documentation technique de référence, et particulièrement le décret du 23 avril 2008 et son arrêté d'application, peuvent motiver un refus d'instruire une demande de raccordement au réseau.
A titre subsidiaire, dire et juger que le décret du 9 décembre 2010 ne saurait être opposé à la société MSO PV Top en raison des manquements du gestionnaire de réseaux publics d'électricité à sa documentation technique de référence.
Par conséquent :
― dire et juger que la société ERDF n'est, donc, pas fondée à en faire application à l'encontre de la société MSO PV Top ;
― enjoindre la société ERDF de valider l'acceptation, par la société MSO PV Top, de la proposition de raccordement et des conditions particulières de la convention de raccordement ;
― enjoindre la société ERDF de confirmer que l'accord sur la proposition de raccordement et des conditions particulières de raccordement est intervenu sans que le décret du 9 décembre 2010 ne puisse s'opposer, d'une part, à la réalisation des travaux de raccordement ni, d'autre part, à la transmission d'un contrat d'achat ;
― enjoindre la société ERDF de procéder dans ces conditions à la transmission de la demande de contrat d'achat à l'autorité en charge de l'obligation d'achat.

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Vu les observations en duplique, enregistrées le 25 mai 2012, présentées par la société ERDF.
La société ERDF soutient que le comité de règlement des différends et des sanctions ne peut en aucun cas être regardé comme une juridiction et qu'à supposer que le comité se reconnaisse compétent pour écarter un acte réglementaire, il ne pourrait pas écarter le décret du 9 décembre 2010.
Elle indique qu'elle a fait une exacte application des termes du décret du 9 décembre 2010 en indiquant, le 31 janvier 2011, que la demande de raccordement de la société MSO PV Top devait être suspendue.
La société ERDF considère que l'application de l'article 3 du décret du 9 décembre 2010 ne saurait être écartée dans le cas de la société MSO PV Top.
Elle considère qu'un accord sur l'offre de raccordement entre les sociétés ERDF et MSO PV Top n'était pas intervenu à la date du 2 décembre 2010 et, en conséquence, qu'elle était fondée à appliquer le décret emportant suspension de l'obligation d'achat.
La société ERDF soutient qu'en application de la procédure de traitement des demandes de raccordement la convention de raccordement à la même valeur qu'une proposition technique et financière et, donc, qu'elle « vaut offre de raccordement ».
Elle considère qu'une proposition technique et financière étant une offre de raccordement et une convention de raccordement selon l'article 9.1.2 de la procédure de traitement des demandes de raccordement valant offre de raccordement, elle était fondée à retenir que la convention de raccordement constituait une proposition technique et financière au sens de l'article 3 du décret du 9 décembre 2010 et qu'elle devait être retournée signée avant le 2 décembre 2010.
La société ERDF demande, en conséquence, au comité de règlement des différends et des sanctions de :
A titre principal :
― se déclarer incompétent pour statuer sur les conclusions tendant à écarter les dispositions du décret du 9 décembre 2010 ;
― se déclarer incompétent pour statuer sur les conclusions tendant à enjoindre la société ERDF de procéder à la transmission de la demande de contrat d'achat à l'autorité en charge de l'obligation d'achat ;
― se déclarer incompétent pour statuer sur les conclusions tendant à enjoindre la société ERDF de confirmer que l'accord sur la proposition technique et financière est intervenu sans que le décret du 9 décembre 2010 ne puisse s'opposer, d'une part, à la régularisation de la convention de raccordement et, d'autre part, à la transmission d'un contrat d'achat.
A titre subsidiaire :
― constater que la société ERDF devait respecter les dispositions du décret du 9 décembre 2010 ;
― rejeter la demande de la société MSO PV Top tendant à ce qu'une proposition de raccordement ne vaille pas une proposition technique et financière contrairement à ce qu'énonce l'article 9.1.2 de la procédure de traitement des demandes de raccordement.
En tout état de cause, rejeter l'ensemble des conclusions de la demanderesse.

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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'énergie, notamment ses articles L. 134-19 et suivants ;
Vu le décret n° 2000-894 du 11 septembre 2000 modifié relatif aux procédures applicables devant la Commission de régulation de l'énergie ;
Vu le décret n° 2010-1510 du 9 décembre 2010 suspendant l'obligation d'achat de l'électricité produite par certaines installations utilisant l'énergie radiative du soleil ;
Vu la décision du 20 février 2009 relative au règlement intérieur du comité de règlement des différends et des sanctions de la Commission de régulation de l'énergie ;
Vu la décision du 9 mars 2011 du président du comité de règlement des différends et des sanctions de la Commission de régulation de l'énergie relative à la désignation d'un rapporteur et d'un rapporteur adjoint pour l'instruction de la demande de règlement de différend enregistrée sous le numéro 36-38-11 ;
Vu la décision du 29 avril 2011 du comité de règlement des différends et des sanctions de la Commission de régulation de l'énergie relative aux demandes de règlement de différends mettant en cause l'application du décret n° 2010-1510 du 9 décembre 2010 suspendant l'obligation d'achat de l'électricité produite par certaines installations utilisant l'énergie radiative du soleil ;
Vu la décision du 6 mai 2011 du comité de règlement des différends et des sanctions de la Commission de régulation de l'énergie relative à la prorogation du délai d'instruction de la demande de règlement de différend introduite par la société MSO PV Top ;
Vu la décision n° 344972 et autres du 16 novembre 2011 du Conseil d'Etat, société Ciel et Terre et autres.

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Les parties ayant été régulièrement convoquées à la séance publique du comité de règlement des différends et des sanctions, qui s'est tenue le 31 mai 2012 en présence de :
M. Pierre-François RACINE, président du comité de règlement des différends et des sanctions, Mme Dominique GUIRIMAND, Mme Sylvie MANDEL et M. Roland PEYLET, membres du comité de règlement des différends et des sanctions ;
M. Olivier BEATRIX, directeur juridique et représentant le directeur général empêché ;
M. Didier LAFFAILLE, rapporteur, et M. Mathieu CACCIALI, rapporteur adjoint ;
Les représentants de la société MSO PV Top, assistés de Me Arnaud GOSSEMENT ;
Les représentants de la société ERDF, assistés de Me Michel GUÉNAIRE.
Après avoir entendu :
― le rapport de M. Didier LAFFAILLE, présentant les moyens et les conclusions des parties ;
― les observations de Me Arnaud GOSSEMENT pour la société MSO PV Top ; la société MSO PV Top demande que les délais de raccordement de l'installation de production tiennent compte des circonstances de l'espèce ; la société MSO PV Top persiste dans ses moyens et conclusions ;
― les observations de Me Michel GUÉNAIRE pour la société ERDF ; la société ERDF persiste dans ses moyens et conclusions.
Aucun report de séance n'ayant été sollicité.
Le comité de règlement des différends et des sanctions en ayant délibéré le 31 mai 2012, après que les parties, le rapporteur, le rapporteur adjoint, le public et les agents des services se sont retirés.

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Sur la compétence du comité de règlement des différends et des sanctions :
La société ERDF demande au comité de règlement des différends et des sanctions de se déclarer incompétent pour statuer sur les conclusions tendant à écarter les dispositions du décret du 9 décembre 2010.
Quant à la demande de contrat d'achat pour l'installation de production de la société MSO PV Top :
L'article L. 134-19 du code de l'énergie dispose que le « comité de règlement des différends et des sanctions peut être saisi en cas de différend : 1° Entre les gestionnaires et les utilisateurs des réseaux publics de transport ou de distribution d'électricité [...] sur l'accès auxdits réseaux [...] ou à leur utilisation, notamment en cas de refus d'accès ou de désaccord sur la conclusion, l'interprétation ou l'exécution des contrats mentionnés aux articles L. 111-91 à L. 111-94, L. 321-11 et L. 321-12 [...], la saisine du comité est à l'initiative de l'une ou l'autre des parties [...] ».
Tel n'est pas le cas de la demande de la société MSO PV Top relative à un contrat d'achat pour l'installation de production.
Dès lors, une telle demande, en tant qu'elle ne porte ni sur l'accès aux réseaux publics ni sur leur utilisation par l'installation de production de la société MSO PV Top, ne peut qu'être rejetée, comme portée devant une autorité incompétente pour en connaître.
Quant à la demande de raccordement de l'installation de production au réseau public de distribution :
Il n'est pas contesté qu'une demande de raccordement a été enregistrée par la société ERDF, le 18 août 2010, et qu'il existe un différend sur le raccordement de l'installation de production au réseau public d'électricité qui entre dans la compétence du comité de règlement des différends et des sanctions.
Sur la méconnaissance par la société ERDF de sa documentation technique de référence :
La société MSO PV Top demande au comité de règlement des différends et des sanctions de dire que la société ERDF a méconnu la documentation technique de référence, élaborée par ses soins.
La procédure de traitement des demandes de raccordement individuel en BT de puissance supérieure à 36 kVA et en HTA, au réseau public de distribution géré par ERDF, qui fait partie de la documentation technique de référence de la société ERDF, prévoit dans sa version applicable à l'espèce et en son article 8.2.1 qu'à « compter de la date de qualification de la demande de raccordement, le délai de transmission au demandeur de l'offre de raccordement ne dépassera pas le délai défini dans le barème de raccordement pour le type d'installation concernée. Ce délai n'excédera pas trois mois quel que soit le domaine de tension de raccordement ».
Il ressort des pièces du dossier que la demande de raccordement a été qualifiée par la société ERDF, le 17 août 2010 et que la proposition technique et financière a été notifiée, le 2 novembre 2010, dans le délai de trois mois, par la société ERDF à la société MSO PV Top.
La société MSO PV Top n'est, donc, pas fondée à invoquer la méconnaissance par la société ERDF de sa documentation technique de référence.
Sur l'application du décret du 9 décembre 2010 :
La société MSO PV Top demande au comité de règlement des différends et des sanctions de dire, à titre principal, que l'application du décret du 9 décembre 2010 doit être écartée et, à titre subsidiaire, que le décret du 9 décembre 2010 ne saurait lui être opposé en raison des manquements de la société ERDF à sa documentation technique de référence.
Elle demande, par conséquent, au comité de règlement des différends et des sanctions de :
― dire et juger que la société ERDF n'est donc pas fondée à en faire application à l'encontre de la société MSO PV Top ;
― enjoindre la société ERDF de valider l'acceptation par la société MSO PV Top, de la proposition de raccordement et des conditions particulières de la convention de raccordement ;
― enjoindre la société ERDF de confirmer que l'accord sur la proposition de raccordement et des conditions particulières de raccordement est intervenu sans que le décret du 9 décembre 2010 ne puisse s'opposer, d'une part, à la réalisation des travaux de raccordement ni, d'autre part, à la transmission d'un contrat d'achat ;
― enjoindre la société ERDF de procéder dans ces conditions à la transmission de la demande de contrat d'achat à l'autorité en charge de l'obligation d'achat.
L'article 1er du décret du 9 décembre 2010 dispose que l'« obligation de conclure un contrat d'achat de l'électricité produite par les installations mentionnées au 3° de l'article 2 du décret du 6 décembre 2000 susvisé est suspendue pour une durée de trois mois courant à compter de l'entrée en vigueur du présent décret. Aucune nouvelle demande ne peut être déposée durant la période de suspension ».
L'article 3 du décret du 9 décembre 2010, prévoit que les « dispositions de l'article 1er ne s'appliquent pas aux installations de production d'électricité issue de l'énergie radiative du soleil dont le producteur a notifié au gestionnaire de réseau, avant le 2 décembre 2010, son acceptation de la proposition technique et financière de raccordement au réseau ».
Toutefois, à la différence d'une proposition technique et financière, dans une convention de raccordement, le tracé, le coût et les délais de raccordement sont définitifs ainsi qu'il résulte de l'article 9.1.1 de la procédure de traitement des demandes de raccordement applicable en l'espèce.
Une telle distinction est d'ailleurs faite à plusieurs reprises dans le texte même de la procédure de traitement, en particulier à l'article 10.2 « Dispositions particulières » qui traite au point 10.2.1 de la « demande de modification après acceptation de l'offre de raccordement et avant acceptation de la convention de raccordement » et au point 10.2.2 de la même demande « après acceptation de la convention de raccordement ».
Dès lors, la convention de raccordement, quand bien même elle vaudrait offre de raccordement au sens de l'article 9.1.2 de la procédure de traitement des demandes de raccordement en tant qu'elle inclut les éléments devant figurer dans une proposition technique et financière en vertu de l'article 4.5 de la même procédure, ne se résume pas à une simple proposition technique et financière mais se situe à un stade contractuel plus avancé.
En conséquence, les dispositions de l'article 3 précitées ne permettent pas à la société ERDF, quelles qu'en soient les conséquences sur l'obligation d'achat, laquelle soulève une question distincte, de refuser d'exécuter une convention de raccordement signée et notifiée avant le 10 décembre 2010, date d'entrée en vigueur du décret précité.
Dans ces conditions, la société ERDF ne pouvait invoquer le décret du 9 décembre 2010 pour refuser d'exécuter la convention de raccordement signée et notifiée par la société MSO PV Top.

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Décide :

Article 1

La société Electricité Réseau Distribution France exécutera la convention de raccordement signée par la société MSO PV Top dans les conditions indiquées dans les motifs de la présente décision.

Article 2

Le comité se déclare incompétent pour connaître de la demande de la société MSO PV Top relative à l'achat de l'électricité produite par son installation de production.

Article 3

Le surplus des demandes de la société MSO PV Top est rejeté.

Article 4

La présente décision sera notifiée à la société MSO PV Top et à la société Electricité Réseau Distribution France. Elle sera publiée au Journal officiel de la République française.

Fait à Paris, le 31 mai 2012.

Pour le comité de règlement des différends

et des sanctions :

Le président,

P.-F. Racine