Code de procédure pénale

Section 2 : Saisine des juridictions spécialisées disposant d'une compétence concurrente

Article L2151-5

Lorsque le ministère public près un tribunal judiciaire spécialisé dispose d'une compétence concurrente qui s'étend aux ressorts d'autres tribunaux judiciaires, spécialisés ou non, cette compétence s'exerce de façon prioritaire sur celle des parquets près ces tribunaux tant que l'action pénale n'a pas été mise en mouvement.
Lorsqu'il décide d'exercer sa compétence, les parquets près ces tribunaux se dessaisissent sans délai à son profit.

Article L2151-6

Le procureur de la République près un tribunal judiciaire non spécialisé peut, pour les infractions relevant de la compétence concurrente d'une juridiction spécialisée, requérir le juge d'instruction de son tribunal de se dessaisir au profit du juge d'instruction de la juridiction spécialisée.
Les parties sont préalablement avisées et invitées à faire connaître leurs observations par le juge d'instruction ; l'ordonnance est rendue huit jours au plus tôt et un mois au plus tard à compter de cet avis.
L'ordonnance par laquelle le juge d'instruction se dessaisit ne prend effet qu'à compter du délai de cinq jours prévus par l'article L. 2151-7 ; lorsqu'un recours est exercé en application de cet article, le juge d'instruction demeure saisi jusqu'à ce que l'arrêt de la chambre criminelle de la Cour de cassation soit porté à sa connaissance.
Dès que l'ordonnance est devenue définitive, le procureur de la République du tribunal judiciaire non spécialisé adresse le dossier de la procédure au procureur de la République de la juridiction spécialisée.
Les mandats de dépôt ou d'arrêt délivrée par le juge non spécialisé conservent leur force exécutoire ; les actes de poursuite ou d'instruction et les formalités intervenus avant que la décision de dessaisissement soit devenue définitive n'ont pas à être renouvelés.
Les dispositions du présent article sont applicables devant la chambre des investigations et des libertés lorsqu'elle est saisie d'affaires relevant de la compétence d'une juridiction spécialisée disposant d'une compétence concurrente.

Article L2151-7

Toute ordonnance rendue sur le fondement de l'article L. 2151-6 par laquelle un juge d'instruction statue sur son dessaisissement peut, à l'exclusion de toute autre voie de recours, être déférée dans les cinq jours de sa notification, à la requête du ministère public ou des parties, à la chambre criminelle de la Cour de cassation. Cette dernière désigne, dans les huit jours suivant la date de réception du dossier, le juge d'instruction chargé de poursuivre l'information.
Le ministère public peut également saisir directement la chambre criminelle de la Cour de cassation, lorsque le juge d'instruction n'a pas rendu son ordonnance dans le délai d'un mois prévu au deuxième alinéa de l'article L. 2151-6.
L'arrêt de la chambre criminelle est porté à la connaissance du juge d'instruction ainsi qu'au ministère public. Il est signifié aux parties.
Les dispositions du présent article sont applicables à l'arrêt rendu sur le fondement du dernier alinéa de l'article L. 2151-6 par lequel une chambre des investigations et des libertés statue sur son dessaisissement.

Article L2151-8

Lorsqu'elle a été saisie, la juridiction spécialisée reste compétente quelles que soient les incriminations retenues lors du règlement ou du jugement de l'affaire, sous réserve de respecter la répartition des compétences entre les juridictions délictuelles et criminelles.
Si les faits constituent une contravention, le juge d'instruction spécialisé prononce le renvoi de l'affaire devant le tribunal contraventionnel normalement compétent en application de l'article L. 2141-4.

Article L2151-9

Si la loi le prévoit par dérogation aux dispositions de l'article L. 2151-8, lorsqu'il apparaît au juge d'instruction de la juridiction spécialisée que les faits dont il a été saisi ne constituent pas une des infractions entrant dans le champ d'application de sa compétence élargie et ne relèvent pas de sa compétence à un autre titre, ce juge se déclare incompétent soit à la requête du procureur de la République, soit, après avis de ce dernier, d'office ou à la requête des parties. Celles des parties qui n'ont pas présenté une requête sont préalablement avisées et invitées à faire connaître leurs observations ; l'ordonnance est rendue au plus tôt huit jours après cet avis et un mois au plus tard à compter de cet avis.
Conformément à l'article L. 2151-6, cette ordonnance peut faire l'objet, d'un recours devant la chambre criminelle de la Cour de cassation. La chambre criminelle qui constate que le juge d'instruction du tribunal judiciaire spécialisé n'est pas compétent peut néanmoins, dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, décider que l'information sera poursuivie à ce tribunal.
Dès que l'ordonnance est devenue définitive, le procureur de la République de la juridiction spécialisée initialement saisie adresse le dossier de la procédure au procureur de la République territorialement compétent. Le présent alinéa est applicable lorsque la chambre des investigations et des libertés statue sur sa compétence.
Lorsque la juridiction spécialisée initialement saisie se déclare incompétente aux motifs que les infractions en cause ne relèvent ni de sa compétence élargie ni d'une autre de ses compétences, elle renvoie le ministère public à se pourvoir ainsi qu'il avisera ; elle peut, le ministère public entendu, décerner, par la même décision, mandat de dépôt ou d'arrêt contre le prévenu. S'il a déjà été décerné, le mandat de dépôt ou d'arrêt conserve sa force exécutoire ; les actes de poursuite ou d'instruction et les formalités intervenus avant que la décision d'incompétence soit devenue définitive n'ont pas à être renouvelés.