Paris, le 8 décembre 2006.
Le ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire, le ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer et la ministre de l'écologie et du développement durable à Mesdames et Messieurs les préfets de région et de département
Références :
Directive n° 91/271/CEE du 21 mai 1991 relative au traitement des eaux urbaines résiduaires (dite « directive ERU »).
Code de l'environnement : articles L. 214-1 à L. 214-4, L. 214-6, L. 216-1.
Code général des collectivités territoriales : articles R. 2224-6 à R. 2224-16 relatifs à la collecte et au traitement des eaux usées des communes, modifiés par le décret n° 2006-503 du 2 mai 2006 relatif à la collecte et au traitement des eaux usées mentionnées aux articles L. 2224-8 et L. 2224-10 du CGCT.
Code de l'urbanisme : articles L. 121-1, L. 121-3, R. 123-9.
Circulaire DE/SDMAGE/BLPDI n° 16 du 19 octobre 2005.
Documents abrogés : circulaire interministérielle (environnement, intérieur) du 3 mai 2002.
La directive européenne du 21 mai 1991 relative au traitement des eaux résiduaires urbaines a fixé des obligations pour l'assainissement des eaux usées des agglomérations de plus de 2 000 équivalents habitants (EH).
La France a été condamnée le 23 septembre 2004 par la Cour de justice des Communautés européennes au motif d'avoir notamment « omis de soumettre à un traitement plus rigoureux les rejets (en zones sensibles) d'eaux urbaines résiduaires provenant d'agglomérations » de plus de 10 000 équivalents habitants soumises à l'échéance du 31 décembre 1998.
Elle a par ailleurs été mise en demeure en juillet 2004 et en décembre 2005 par la Commission européenne pour le retard de mise en conformité de la collecte et du traitement des eaux usées des agglomérations d'assainissement de plus de 15 000 équivalents habitants soumises à l'échéance du 31 décembre 2000.
La France est ainsi sous la menace d'une amende (son montant est apprécié au cas par cas) et d'astreintes journalières très élevées. Pour mémoire la France a déjà été condamnée (arrêt du 12 juillet 2005) dans le dossier « Poissons sous taille » à verser une amende de 20 millions d'euros et à 57,5 millions d'euros d'astreinte par semestre d'ici la mise en conformité complète.
La présente circulaire se substitue à la circulaire du 3 mai 2002, tenant compte des modifications introduites par le décret n° 2006-503 du 2 mai 2006 qui a simplifié les procédures que vous devrez mettre en place. Il est impératif que la France prenne toutes les dispositions nécessaires pour résorber les retards de mise en oeuvre de la directive ERU.
Nous vous demandons donc de prendre toutes les mesures nécessaires afin que les collectivités concernées réalisent les travaux de mise en conformité de la collecte et du traitement de leurs eaux usées dans les délais les plus courts possible.
Nous attacherons une attention particulière sur la rigueur avec laquelle ces mesures seront appliquées.
Mises en demeure
En premier lieu, il convient que, pour toutes les agglomérations d'assainissement non conformes de taille supérieure à 2 000 EH et dont les travaux d'assainissement devraient être en cours ou terminés et ne sont pas commencés à la date de la publication de la présente circulaire, vous mettiez sans délai celles-ci en demeure, si cela n'a pas déjà été fait, de façon à procéder à ces travaux dans les délais les plus courts possible techniquement.
Pour les collectivités qui n'ont pas d'arrêté de prescriptions ou dont l'arrêté est obsolète ou encore qui auraient dû déclarer leur système d'assainissement, il convient de les mettre sans délai en demeure de déposer un dossier de demande d'autorisation ou de déclaration.
Pour celles qui disposent déjà d'une autorisation ou d'un récépissé de déclaration mais n'auraient pas réalisé les travaux nécessaires, il convient de les mettre en demeure de réaliser les travaux correspondant aux prescriptions figurant dans l'autorisation ou le récépissé de déclaration.
Pour celles qui ont une autorisation ancienne, il convient qu'elles soient mises en demeure de mettre leurs ouvrages en conformité.
Vous vous appuierez à cette fin sur les dispositions qui sont indiquées en annexe.
Nous vous rappelons qu'il incombe au préfet, en application de l'article L. 216-1 du code de l'environnement, de procéder aux mises en demeure. Vous veillerez à la mise en oeuvre systématique de ces procédures. Sauf urgence, ces mises en demeure devront être motivées et avoir été précédées d'une procédure contradictoire.
Pour ce qui concerne les agglomérations soumises à l'échéance du 31 décembre 1998, nous vous demandons de procéder aux mises en demeure nécessaires dans le délai maximum de trois mois à compter de la publication de la présente circulaire. Les délais d'exécution de ces mises en demeure devront être définis au plus juste techniquement. En tout état de cause, compte tenu du retard accumulé, ils ne sauraient être supérieurs à 12 mois pour une étude et le dépôt d'un dossier et à 18 mois pour l'engagement de travaux, sauf cas de procédure administrative d'une complexité particulière.
Consignation des fonds
Une mise en demeure ne peut être suivie d'une autre mise en demeure ayant le même objet et, eu égard aux nombreux cas de mises en demeure répétées et demeurées infructueuses qui ont été portées à notre connaissance, cet acte n'a de sens et de portée que si l'absence de respect de la mise en demeure est effectivement suivie de la consignation des fonds nécessaires aux travaux à réaliser.
Pour les mises en demeure non suivies d'effet à l'expiration du délai que vous avez fixé, vous engagerez donc, dans un délai qui ne devra pas excéder un mois, sur le fondement de l'alinéa II (1°) de l'article L. 216-1 du code de l'environnement cette procédure de consignation (cf. annexe, chapitre 3).
Travaux d'office
Pour les cas où même la consignation ne serait pas suffisante pour faire évoluer les maîtres d'ouvrage, nous vous rappelons la procédure de travaux d'office visée au II (2°) du même article L. 216-1 du code de l'environnement que vous mettrez en oeuvre en dernier ressort. Avant de lancer une telle procédure, vous prendrez préalablement l'attache des directions concernées de l'administration centrale.
Ouverture à l'urbanisation de nouveaux secteurs
Nous vous demandons de veiller à ce que l'ouverture à l'urbanisation de nouveaux secteurs ne puisse intervenir alors que la collecte et le traitement des eaux usées qui en seraient issues ne pourraient pas être effectués dans des conditions conformes à la réglementation en vigueur et si l'urbanisation n'est pas accompagnée par la programmation des travaux et actions nécessaires à la mise en conformité des équipements de collecte et de traitement situés à l'aval de ces secteurs. Pour ce faire, vous agirez notamment sur le fondement des articles L. 121-1, L. 123-1 et R. 123-9 du code de l'urbanisme.
Vous veillerez donc à assurer, pour les opérations relevant d'une compétence décentralisée, un strict contrôle de légalité et, dans le cas où l'autorité compétente ne rapporterait pas, à votre demande, une décision que vous jugeriez irrégulière, à déférer cette décision devant le juge administratif compétent.
Dans le cas où la collectivité responsable de l'assainissement ne se serait aucunement engagée dans une opération de mise en conformité par le lancement d'un projet dont le délai prévisible de réalisation aura été réduit au minimum faisable techniquement, vous préciserez, d'une part, aux communes et groupements concernés, dans le cadre des portés à connaissance, qu'aucun nouveau secteur ne pourra être ouvert à l'urbanisation en l'absence de mise en conformité des dispositifs de collecte et de traitement des eaux usées urbaines, et les informerez, d'autre part, de l'entrée en application immédiate de ces dispositions.
Sanctions pénales
Par ailleurs, il existe des sanctions pénales prévues pour le non-respect des obligations réglementaires applicables aux stations d'épuration des eaux usées, en application des articles L. 216-8 à L. 216-12 du code de l'environnement et de l'article 44 du décret n° 93-742 modifié du 29 mars 1993.
Ces sanctions sont à mettre en oeuvre dans toutes les situations où elles sont justifiées par un défaut de traitement des eaux usées particulièrement grave, concurremment ou indépendamment de la procédure de mise en demeure.
Dans le cas de non-respect avéré et flagrant de la mise en demeure et en application de l'article L. 216-10 du code de l'environnement, nous vous demandons de saisir du dossier sans délai le procureur de la République afin que l'action publique puisse être engagée (cf. annexe, chapitre 4).
Pour l'ensemble des sanctions pénales, il est essentiel que vous attiriez préalablement l'attention du procureur de la République concerné sur ces situations et sur les actions que vous allez engager. Une collaboration et une bonne information réciproque avec les services du procureur s'imposent en effet afin d'assurer la portée réelle de votre action.
Il convient de rappeler que le juge pénal dispose de pouvoirs étendus pour enjoindre les collectivités de respecter les prescriptions auxquelles elles ont contrevenu (délais pour l'exécution des prescriptions, astreintes, etc.) afin de permettre d'obtenir la réalisation effective des travaux de mise en conformité.
Contractualisation avec les agences de l'eau
Les agences de l'eau proposeront à toutes les collectivités non conformes concernées par les échéances 1998 et 2000 un contrat que celles-ci devront signer avant le 31 décembre 2007 pour pouvoir bénéficier des aides financières de l'agence et dans lequel elles s'engagent en contrepartie à respecter un échéancier détaillé de leurs travaux de mise en conformité, qui ne devra prendre en compte que les délais liés à des contraintes techniques. En cas de difficultés financières, les agences proposeront aux collectivités des offres de financement sur mesure. En cas de refus des collectivités de s'engager sur un contrat avec les agences dans les délais impartis ou de non-respect des échéances contractuelles, les agences de l'eau appliqueront des conditions d'aides dégressives.
Compte tenu des spécificités propres à chaque agence, nous vous demandons de vous rapprocher des services de l'agence concernée pour chaque cas particulier et vous demandons de veiller particulièrement à ce que les collectivités concernées procèdent à la signature d'un tel contrat.
Les agences de l'eau ne financeront plus au Xe programme (2012-2016) les stations concernées par l'échéance 2005. Il convient donc d'obtenir, au plus tard le 31 décembre 2010, un échéancier de travaux pour chacune des collectivités.
Autres mesures
En ce qui concerne les rejets s'effectuant dans des zones nouvellement classées sensibles à l'eutrophisation, il convient de prendre un arrêté de prescriptions complémentaires qui indiquera les performances minimales de traitement des eaux usées tenant compte des prescriptions à respecter en fonction de la zone de classement et de la date limite de réalisation.
Si ces zones ont été visées par l'arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes du 23 septembre 2004 ou s'il s'agit de rejet s'effectuant dans les bassins versants pertinents de ces zones, la mise en oeuvre des mesures décrites dans cet arrêté complémentaire doit être considérée comme devant être immédiate et le délai devra donc être limité au délai technique de réalisation.
La présente circulaire abroge les instructions contraires précédemment données, notamment par les circulaires du 13 septembre 1994, du 12 mai 1995 et du 3 mai 2002.
Vous voudrez bien faire part à nos services des difficultés rencontrées dans l'application des présentes instructions.
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