JORF n°303 du 31 décembre 2000

  1. Ce dispositif viole le principe d'égalité

devant les charges publiques

L'extension de la TGAP telle qu'elle a été adoptée par le Parlement porte atteinte au principe d'égalité devant l'impôt à plusieurs égards :

Tout d'abord, le chauffage des immeubles résidentiels est très majoritairement exonéré par le jeu de la franchise à la base, mais se trouve taxé dès lors qu'il concerne le chauffage collectif d'immeubles résidentiels de grande importance. Il en résulte une évidente rupture du principe d'égalité qui ne saurait être justifiée par aucun motif d'intérêt général, ni par aucune différence de situation au regard du droit fiscal.

En outre, le système d'abattements progressifs adopté par le Parlement comporte encore, et cela malgré les modifications apportées au texte par le rapporteur général du budget, des écarts significatifs entre les taux d'abattement selon les tranches du barème. Compte tenu du fait que ces taux s'appliquent à la consommation totale de l'entreprise, ce système d'abattements engendre d'importants effets de seuil dont l'ampleur génère, au voisinage des limites de ces tranches, des inégalités de traitement incompatibles avec le principe d'égalité devant les charges publiques. Par ailleurs, ce dispositif ne permet pas de tenir compte de la croissance de l'entreprise puisque l'année de référence est fixe.

Enfin, le mécanisme de contrat d'engagement volontaire de réduction des consommations intermédiaires d'énergie induit une rupture d'égalité entre les entreprises pour lesquelles ces consommations d'énergie peuvent effectivement être réduites et celles pour lesquelles le process industriel ne le permet pas. Cela soumet la fiscalité au bon vouloir du service des mines (DRIRE), ce qui est une rupture manifeste de l'égalité, d'autant que seule une minorité d'entreprises auront accès à ces accords. Ainsi, certaines entreprises pourront bénéficier de réductions de leur montant dû au titre de la TGAP parce que leur appareil de production dispose encore de marges d'amélioration en matière de consommations énergétiques, alors que d'autres entreprises ne bénéficieront pas des mêmes systèmes d'abattements pour la simple raison que l'état actuel de la technologie ne leur permet pas d'améliorer leur outil productif dans le sens d'une moindre consommation énergétique (exemple de l'aluminium).

Pour ces raisons, le dispositif de l'article 37 viole le principe d'égalité devant l'impôt tel qu'il résulte de l'article 13 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen.

Par ailleurs, les atteintes au principe d'égalité qui résultent du texte de l'article 37 ne sauraient être justifiées par des raisons d'intérêt général, dès lors que les différences de traitement qui en résultent ne sont pas en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit.

En effet, certaines modalités de mise en oeuvre de l'extension de la TGAP ne sont pas cohérentes avec l'objectif général affiché de lutte contre l'émission de gaz à effet de serre. Ainsi, le choix de soumettre à la taxe l'électricité consommée par les assujettis, qu'elle soit ou non produite à partir de sources d'énergie fossiles, et de lui appliquer le même taux que celui qui est applicable au gaz naturel est illogique. Il ressort en effet du Livre blanc diffusé par le Gouvernement en juillet 1999 que la consommation de gaz dégage deux fois plus de dioxyde de carbone que la production d'électricité, ceci compte tenu de la part prise par l'électricité d'origine hydraulique ou nucléaire dans la production française d'électricité.

Ainsi, il n'est pas cohérent au regard de l'objectif poursuivi, qui est de lutter contre l'émission de gaz à effet de serre, de taxer de manière identique des sources d'énergie inégalement polluantes, sauf à considérer qu'une telle décision constitue la traduction fiscale d'une modification fondamentale de la politique énergétique de la France. Mais dans ce cas, un tel revirement ne saurait être engagé sans qu'une étude précise ne soit menée au préalable et qu'un débat approfondi ne se tienne sur ce sujet. Or, les délais impartis pour l'examen d'un collectif budgétaire de fin d'année ne le permettent pas. Qui plus est, ce débat n'a fait l'objet d'aucune programmation par le Gouvernement.

Or, selon la jurisprudence constitutionnelle no 96-380 DC du 23 juillet 1996, « le principe d'égalité ne s'oppose pas à ce que le législateur déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général dès lors que les différences de traitement qui en résultent sont en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit ». Les atteintes au principe d'égalité résultant du dispositif de l'article 37 sont donc contraires à la Constitution.


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Version 1

1. Ce dispositif viole le principe d'égalité

devant les charges publiques

L'extension de la TGAP telle qu'elle a été adoptée par le Parlement porte atteinte au principe d'égalité devant l'impôt à plusieurs égards :

Tout d'abord, le chauffage des immeubles résidentiels est très majoritairement exonéré par le jeu de la franchise à la base, mais se trouve taxé dès lors qu'il concerne le chauffage collectif d'immeubles résidentiels de grande importance. Il en résulte une évidente rupture du principe d'égalité qui ne saurait être justifiée par aucun motif d'intérêt général, ni par aucune différence de situation au regard du droit fiscal.

En outre, le système d'abattements progressifs adopté par le Parlement comporte encore, et cela malgré les modifications apportées au texte par le rapporteur général du budget, des écarts significatifs entre les taux d'abattement selon les tranches du barème. Compte tenu du fait que ces taux s'appliquent à la consommation totale de l'entreprise, ce système d'abattements engendre d'importants effets de seuil dont l'ampleur génère, au voisinage des limites de ces tranches, des inégalités de traitement incompatibles avec le principe d'égalité devant les charges publiques. Par ailleurs, ce dispositif ne permet pas de tenir compte de la croissance de l'entreprise puisque l'année de référence est fixe.

Enfin, le mécanisme de contrat d'engagement volontaire de réduction des consommations intermédiaires d'énergie induit une rupture d'égalité entre les entreprises pour lesquelles ces consommations d'énergie peuvent effectivement être réduites et celles pour lesquelles le process industriel ne le permet pas. Cela soumet la fiscalité au bon vouloir du service des mines (DRIRE), ce qui est une rupture manifeste de l'égalité, d'autant que seule une minorité d'entreprises auront accès à ces accords. Ainsi, certaines entreprises pourront bénéficier de réductions de leur montant dû au titre de la TGAP parce que leur appareil de production dispose encore de marges d'amélioration en matière de consommations énergétiques, alors que d'autres entreprises ne bénéficieront pas des mêmes systèmes d'abattements pour la simple raison que l'état actuel de la technologie ne leur permet pas d'améliorer leur outil productif dans le sens d'une moindre consommation énergétique (exemple de l'aluminium).

Pour ces raisons, le dispositif de l'article 37 viole le principe d'égalité devant l'impôt tel qu'il résulte de l'article 13 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen.

Par ailleurs, les atteintes au principe d'égalité qui résultent du texte de l'article 37 ne sauraient être justifiées par des raisons d'intérêt général, dès lors que les différences de traitement qui en résultent ne sont pas en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit.

En effet, certaines modalités de mise en oeuvre de l'extension de la TGAP ne sont pas cohérentes avec l'objectif général affiché de lutte contre l'émission de gaz à effet de serre. Ainsi, le choix de soumettre à la taxe l'électricité consommée par les assujettis, qu'elle soit ou non produite à partir de sources d'énergie fossiles, et de lui appliquer le même taux que celui qui est applicable au gaz naturel est illogique. Il ressort en effet du Livre blanc diffusé par le Gouvernement en juillet 1999 que la consommation de gaz dégage deux fois plus de dioxyde de carbone que la production d'électricité, ceci compte tenu de la part prise par l'électricité d'origine hydraulique ou nucléaire dans la production française d'électricité.

Ainsi, il n'est pas cohérent au regard de l'objectif poursuivi, qui est de lutter contre l'émission de gaz à effet de serre, de taxer de manière identique des sources d'énergie inégalement polluantes, sauf à considérer qu'une telle décision constitue la traduction fiscale d'une modification fondamentale de la politique énergétique de la France. Mais dans ce cas, un tel revirement ne saurait être engagé sans qu'une étude précise ne soit menée au préalable et qu'un débat approfondi ne se tienne sur ce sujet. Or, les délais impartis pour l'examen d'un collectif budgétaire de fin d'année ne le permettent pas. Qui plus est, ce débat n'a fait l'objet d'aucune programmation par le Gouvernement.

Or, selon la jurisprudence constitutionnelle no 96-380 DC du 23 juillet 1996, « le principe d'égalité ne s'oppose pas à ce que le législateur déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général dès lors que les différences de traitement qui en résultent sont en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit ». Les atteintes au principe d'égalité résultant du dispositif de l'article 37 sont donc contraires à la Constitution.