JORF n°0174 du 30 juillet 2014

II-2. - La méconnaissance des exigences relatives à la portée des lois de validation

En premier lieu, le Conseil constitutionnel a estimé, s'agissant de la version précédente des dispositions contestées, que portait une atteinte injustifiée aux droits des personnes une validation législative pour laquelle les « critères ne sont pas en adéquation avec l'objectif poursuivi » mais aussi lorsque la « validation revêt une portée très large » (CC, n° 2013-685 DC du 29 décembre 2013, cons. 79).
Votre Conseil a, à cet égard, estimé que l'article 92-II de la loi de finances pour 2014 avait pour objet de « prévenir les conséquences financières susceptibles de résulter, pour certains établissements de crédit auxquels l'Etat a apporté sa garantie », de la généralisation des motifs du jugement du tribunal de grande instance de Nanterre du 8 février 2013 (CC, n° 2013-685 DC du 29 décembre 2013, cons. 78).
Par conséquent, devraient être exclus du champ de la loi de validation les établissements de crédit autres que Dexia et la SFIL.
Or, sans que l'on comprenne vraiment pourquoi, la validation à laquelle procède la loi déférée couvre non seulement Dexia et la SFIL, dont l'Etat est garant, mais aussi l'ensemble des établissements de crédit qui ont conclu des prêts structurés avec des personnes morales de droit public, alors qu'ils ne portent « qu'une partie limitée des emprunts toxiques » (22).
Cette inadéquation, entre l'objet de la loi de validation et les établissements de crédit qui en bénéficient, est d'autant plus marquée que les travaux parlementaires sont particulièrement vagues et élusifs sur la nécessité de les inclure dans le champ de la loi contestée, notamment au regard d'un motif impérieux d'intérêt général dont les requérants peinent à trouver trace.
Par conséquent, l'inclusion des établissements de crédit autres que Dexia et la SFIL dans le champ de la loi de validation n'est pas en adéquation avec l'objectif poursuivi. De ce fait, la validation revêt une portée trop large.
En second lieu, le Conseil estime que « si le législateur peut, dans un but d'intérêt général suffisant, valider un acte dont le juge administratif est saisi, afin de prévenir les difficultés qui pourraient naître de son annulation, c'est à la condition de définir strictement la portée de cette validation, eu égard à ses effets sur le contrôle de la juridiction saisie ; qu'une telle validation ne saurait avoir pour effet, sous peine de méconnaître le principe de la séparation des pouvoirs et le droit à un recours juridictionnel effectif qui découlent de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, d'interdire tout contrôle juridictionnel de l'acte validé quelle que soit l'illégalité invoquée par les requérants » (CC, n° 99-422 DC du 21 décembre 1999, cons. 64 ; dans le même sens, CC, n° 2006-545 DC du 28 décembre 2006 ; CC, n° 2010-100 QPC du 11 février 2011, cons. 5).
Par ailleurs, la loi déférée propose une version substantiellement plus étoffée de la validation que celle retenue par l'article 92 de la loi de finances pour 2014. En effet, outre l'absence de TEG sont désormais validées l'absence de taux de période, l'absence de la durée de période ainsi que les erreurs de calcul de l'un de ces trois éléments.
Or, en privant de sanction l'ensemble des prescriptions du code de la consommation relatives au taux d'intérêt, hormis celles relatives au taux d'usure, la loi déférée interdit tout contrôle juridictionnel sur le taux d'intérêt appliqué aux personnes morales de droit public par les établissements de crédit et méconnaît à ce titre les exigences de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen.
Les députés auteurs de la saisine font donc valoir que la validation législative à laquelle procède la loi relative à la sécurisation des contrats de prêts structurés souscrits par les personnes morales de droit public est irrégulière en ce qu'elle ne répond pas à un motif impérieux d'intérêt général et qu'elle méconnaît les exigences constitutionnelles relatives à la portée des lois de validation.

(22) Sénat, Compte rendu intégral, séance du mardi 13 mai 2014, p. 3859.


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Version 1

II-2. - La méconnaissance des exigences relatives à la portée des lois de validation

En premier lieu, le Conseil constitutionnel a estimé, s'agissant de la version précédente des dispositions contestées, que portait une atteinte injustifiée aux droits des personnes une validation législative pour laquelle les « critères ne sont pas en adéquation avec l'objectif poursuivi » mais aussi lorsque la « validation revêt une portée très large » (CC, n° 2013-685 DC du 29 décembre 2013, cons. 79).

Votre Conseil a, à cet égard, estimé que l'article 92-II de la loi de finances pour 2014 avait pour objet de « prévenir les conséquences financières susceptibles de résulter, pour certains établissements de crédit auxquels l'Etat a apporté sa garantie », de la généralisation des motifs du jugement du tribunal de grande instance de Nanterre du 8 février 2013 (CC, n° 2013-685 DC du 29 décembre 2013, cons. 78).

Par conséquent, devraient être exclus du champ de la loi de validation les établissements de crédit autres que Dexia et la SFIL.

Or, sans que l'on comprenne vraiment pourquoi, la validation à laquelle procède la loi déférée couvre non seulement Dexia et la SFIL, dont l'Etat est garant, mais aussi l'ensemble des établissements de crédit qui ont conclu des prêts structurés avec des personnes morales de droit public, alors qu'ils ne portent « qu'une partie limitée des emprunts toxiques » (22).

Cette inadéquation, entre l'objet de la loi de validation et les établissements de crédit qui en bénéficient, est d'autant plus marquée que les travaux parlementaires sont particulièrement vagues et élusifs sur la nécessité de les inclure dans le champ de la loi contestée, notamment au regard d'un motif impérieux d'intérêt général dont les requérants peinent à trouver trace.

Par conséquent, l'inclusion des établissements de crédit autres que Dexia et la SFIL dans le champ de la loi de validation n'est pas en adéquation avec l'objectif poursuivi. De ce fait, la validation revêt une portée trop large.

En second lieu, le Conseil estime que « si le législateur peut, dans un but d'intérêt général suffisant, valider un acte dont le juge administratif est saisi, afin de prévenir les difficultés qui pourraient naître de son annulation, c'est à la condition de définir strictement la portée de cette validation, eu égard à ses effets sur le contrôle de la juridiction saisie ; qu'une telle validation ne saurait avoir pour effet, sous peine de méconnaître le principe de la séparation des pouvoirs et le droit à un recours juridictionnel effectif qui découlent de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, d'interdire tout contrôle juridictionnel de l'acte validé quelle que soit l'illégalité invoquée par les requérants » (CC, n° 99-422 DC du 21 décembre 1999, cons. 64 ; dans le même sens, CC, n° 2006-545 DC du 28 décembre 2006 ; CC, n° 2010-100 QPC du 11 février 2011, cons. 5).

Par ailleurs, la loi déférée propose une version substantiellement plus étoffée de la validation que celle retenue par l'article 92 de la loi de finances pour 2014. En effet, outre l'absence de TEG sont désormais validées l'absence de taux de période, l'absence de la durée de période ainsi que les erreurs de calcul de l'un de ces trois éléments.

Or, en privant de sanction l'ensemble des prescriptions du code de la consommation relatives au taux d'intérêt, hormis celles relatives au taux d'usure, la loi déférée interdit tout contrôle juridictionnel sur le taux d'intérêt appliqué aux personnes morales de droit public par les établissements de crédit et méconnaît à ce titre les exigences de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen.

Les députés auteurs de la saisine font donc valoir que la validation législative à laquelle procède la loi relative à la sécurisation des contrats de prêts structurés souscrits par les personnes morales de droit public est irrégulière en ce qu'elle ne répond pas à un motif impérieux d'intérêt général et qu'elle méconnaît les exigences constitutionnelles relatives à la portée des lois de validation.

(22) Sénat, Compte rendu intégral, séance du mardi 13 mai 2014, p. 3859.