Monsieur le Président de la République,
En vertu de l'article 17 de la loi n° 2014-1 du 2 janvier 2014, le Gouvernement est habilité à prendre par voie d'ordonnance toute mesure relevant du domaine de la loi afin de permettre une meilleure contribution des en-cours d'assurance vie au financement de l'économie : il s'agit, par la création d'un nouveau contrat d'assurance sur la vie, d'assurer une plus grande diffusion d'engagements garantis, pour tout ou partie, à terme et non plus à tout moment.
Cette réforme, qui s'inscrit dans le prolongement des recommandations du rapport de Karine Berger et Dominique Lefebvre, vise une meilleure contribution au financement de l'économie de l'épargne financière des ménages. En effet, les investissements que peuvent faire les assureurs sont très dépendants des engagements qui les lient aux assurés : aujourd'hui 85 % des en-cours d'assurance vie sont des engagements en euros, garantis à tout moment. Cette contrainte limite fortement la capacité des assureurs à prendre des risques et se traduit par des investissements effectués principalement en obligations.
La plus grande diffusion des fonds avec des engagements garantis à terme (et non plus à tout moment) nécessite de rationaliser et d'unifier le code des assurances en transférant diverses dispositions relatives aux contrats sur la vie « diversifiés » du titre IV du livre Ier dans le titre III du livre Ier. Il s'agit notamment d'intégrer le droit applicable à ces contrats au sein des règles relatives aux assurances de personnes et aux opérations de capitalisation codifiées. Ces modifications permettront que des engagements offrant une garantie de tout ou partie du capital à terme soient gérés dans des contrats de type multisupports, comme c'est actuellement le cas lorsqu'un contrat d'assurance vie voit coexister en son sein des engagements exprimés en euros et des engagements exprimés en unités de comptes. La gestion de ce type d'engagement pour les entreprises d'assurance sera ainsi facilitée et fluidifiée, et les assurés n'auront plus à ouvrir de nouveaux contrats spécifiques. Enfin, l'objectif d'une diffusion large de ces nouveaux produits rend nécessaires des dispositifs d'information renforcée des souscripteurs.
L'article 1er a pour objet principal de créer, au sein du livre relatif au droit du contrat, un chapitre dédié aux engagements donnant lieu à la constitution d'une provision de diversification et d'adapter ce livre à la création de ce nouveau chapitre.
Les 1° et 2° sont des mesures de correction.
Le 3° replace l'article définissant la valeur de rachat des contrats d'assurance sur la vie ou de capitalisation dans le livre relatif au contrat et l'adapte à l'introduction, dans le droit commun du contrat, des engagements donnant lieu à la constitution d'une provision pour diversification.
Le degré d'information du souscripteur est renforcé puisque le 4° prévoit que pour les contrats relevant du chapitre IV, l'entreprise d'assurance ou de capitalisation indique les modalités et conditions de rachat dans la mesure où les contrats peuvent ne pas être rachetables durant une période plafonnée réglementairement.
Le 5° établit le cadre dans lequel les engagements ne sont pas rachetables : il complète l'article L. 132-23 par une disposition permettant aux contrats de prévoir le caractère non rachetable des engagements pendant une période fixée par décret en Conseil d'Etat, qui sera fixée à huit ans.
Le 6° a pour objet de créer au sein du titre III du livre Ier, un chapitre IV relatif aux engagements donnant lieu à la constitution d'une provision de diversification qui reprend et adapte le droit existant régissant les anciens contrats de groupes diversifiés. Ce chapitre se substitue au chapitre II du titre IV relatif aux contrats diversifiés.
L'article L. 134-1 étend les dispositions de l'actuel L. 142-1 aux contrats individuels et leur champ à l'ensemble des engagements (y compris contrats de capitalisation) hors assurances temporaires en cas de décès. La définition de ce type d'engagements est clarifiée : ils garantissent une rente ou un capital à échéance, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Ils donnent lieu à la constitution d'une provision de diversification, absorbant la fluctuation des actifs en représentation, appellation qu'elle revêt déjà dans la doctrine prudentielle. La possibilité de faire coexister au sein d'un même contrat les trois types d'engagements (euros, unités de comptes, diversifiés) est explicitement prévue.
Les articles L. 134-2 et L. 134-3 reprennent respectivement les dispositions des articles L. 142-2 et L. 142-3 actuellement applicables : la notion de contrat est remplacée par celle de la comptabilité auxiliaire d'affectation, une modalité de cantonnement comptable prioritaire s'agissant de l'affectation d'actifs en représentation.
L'article L. 134-4 remplace l'article L. 142-4 : il reprend le super privilège des souscripteurs du contrat et adapte les formulations aux contrats individuels.
L'article L. 134-5 reprend le contenu de l'actuel article L. 142-4 en prévoyant le renvoi de ses modalités d'application à un décret en Conseil d'Etat. Le renvoi au décret de l'article L. 142-4 pour les conditions de rachat est supprimé car ces dispositions ont été remontées au niveau législatif.
Les 7° à 12° contiennent des mesures de coordination et le 13° une mention de précision.
L'article 2 contient des mesures de coordination concernant le code des impôts.
L'article 3 est consacré à la définition dans la loi des obligations d'information incombant à l'assureur lors de la transformation des contrats en traitant en particulier du cas spécifique de la transformation des contrats par avenant. Ces dispositions sont apparues nécessaires eu égard à l'objectif d'une diffusion large de ces types d'engagements, relativement plus risqués que les contrats traditionnels en euros.
Les I et II instaurent un droit de rétablissement de la situation initiale du contrat pour le souscripteur qui souhaite revenir sur sa décision de conversion d'un support en euros pour acquérir des engagements donnant lieu à la constitution d'une provision de diversification, dans le cadre du mécanisme de maintien de l'antériorité fiscale mis en place par l'article 9 de la loi de finances rectificative n° 2013-1279 du 29 décembre 2013.
La volonté du Gouvernement est de réserver cette faculté, étrangère au code des assurances, aux souscripteurs qui voient réellement croître le niveau de risque de leur contrat, à savoir ceux qui convertissent un fonds en euros, garanti et sans risque, pour aller vers des engagements donnant lieu à la constitution d'une provision de diversification, à l'exclusion des souscripteurs souhaitant convertir des unités de comptes, plus risquées que des fonds donnant lieu à des engagements donnant lieu à la constitution de provision de diversification.
Le III rend applicable le devoir général de conseil de l'assureur ou de l'intermédiaire en assurance posé par les dispositions de l'article L. 132-27-1 du code des assurances.
Le IV vise à préciser le contenu de l'information que doit fournir l'assureur lors de la conversion d'engagements consécutive à une transformation de contrat par avenant. Il s'agit de garantir une information de même qualité, quelle que soit la modalité technique de conversion des engagements. L'ordonnance prévoit ainsi un dispositif d'information renforcée du souscripteur dont le contrat est modifié par avenant, étranger au code des assurances, pour l'éclairer sur le compromis risque-rendement proposé au moment de la transformation des engagements, c'est-à-dire le moment où les primes sont transférées et qui correspond au moment de l'exposition effective au risque.
Tel est l'objet de la présente ordonnance que nous avons l'honneur de soumettre à votre approbation.
Veuillez agréer, Monsieur le Président, l'assurance de notre profond respect.
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