Les dispositions du présent titre ont pour objet d'adapter la législation fiscale à l'ouverture de la fiducie aux personnes physiques. En particulier, elles transposent aux cas des constituants personnes physiques le principe de neutralité fiscale du transfert de propriété des actifs mis en fiducie qui avait été institué par la loi du 19 février 2007 précitée. Ainsi, l'opération fiduciaire serait en principe transparente en matière fiscale, que le constituant soit une personne morale soumise à l'impôt sur les sociétés ou une personne physique soumise à l'impôt sur le revenu.
A titre liminaire, afin de lever toute ambiguïté, le XIII de l'article 10 propose d'insérer un article 238 quater A dans le code général qui définit le terme de constituant en précisant qu'il s'entend de la personne titulaire d'une créance au titre de la fiducie ou de ses ayants droit.
En premier lieu, il est proposé d'adapter le dispositif mis en place par la loi du 19 février 2007 précitée en matière d'imposition des bénéfices.
S'agissant tout d'abord de l'extension de la fiducie aux titulaires de revenus imposables dans la catégorie des bénéfices industriels ou commerciaux (BIC) ou des bénéfices agricoles (BA) déterminés selon un régime réel, il est envisagé de transposer le dispositif déjà en place pour les constituants personnes morales soumises à l'impôt sur les sociétés. Tel est l'objet du XIV de l'article 10 qui modifie les dispositions de l'article 223 V du code général des impôts, article lui-même transféré sous un article 238 quater B.
S'agissant des personnes titulaires de revenus déterminés selon un mode forfaitaire (micro-BIC, régime spécial BNC et forfait BA), il résulte des I et III que l'application de ce régime serait incompatible avec un transfert en fiducie de biens professionnels.
En effet, n'étant pas astreints à la tenue de documents comptables et le sursis d'imposition étant conditionné par une continuité des valeurs fiscales retenues entre le patrimoine professionnel de la personne physique et le patrimoine fiduciaire, il n'est pas possible d'ouvrir cette possibilité aux titulaires de revenus déterminés selon un mode forfaitaire.
Le V de l'article 10 pose comme condition que, durant toute la durée du contrat de fiducie, le résultat imposable du constituant demeure déterminé selon un mode réel ou selon le régime de la déclaration contrôlée.
S'agissant du résultat de la fiducie, il est proposé, au XVI de l'article 10, d'insérer dans le code général des impôts un article 238 quater F qui prévoit de maintenir le principe d'une détermination selon les modalités applicables aux sociétés de personnes, avec une imposition au nom du ou des constituants de la fiducie.
Le résultat de la fiducie serait déterminé selon les règles applicables au constituant (BIC, BNC, BA, IS) lorsque la créance fiduciaire est inscrite au bilan du constituant.
En outre, il est proposé de poser le principe selon lequel le changement de régime fiscal du constituant ne constitue pas une cause de cessation du contrat de fiducie.
Il est par ailleurs proposé au XIX de l'article 10 de prévoir que les dispositions de l'actuel article 223 VE du code général des impôts, transférées sous l'article 238 quater I, ne s'appliquent pas en cas de transfert de la créance réalisé dans le cadre d'une opération bénéficiant des dispositions prévues aux articles 41, 151 octies, 151 octies A ou 210 A du code général des impôts.
Enfin, afin de tirer les conséquences de l'ouverture de la qualité de fiduciaire aux avocats, le IV de l'article 10 propose de qualifier de revenus non commerciaux les sommes qu'ils perçoivent en leur qualité de fiduciaire.
En deuxième lieu, le régime fiscal applicable aux constituants personnes physiques est précisé, d'une part, en ce qui concerne les règles applicables en matière de plus-values et, d'autre part, pour assurer la neutralité fiscale aux différentes étapes de la fiducie (constitution du patrimoine fiduciaire, déroulement de la fiducie et fin de la fiducie).
Les VI à XI de l'article 10 procèdent à l'adaptation des articles du code général des impôts applicables en matière de taxation des plus-values.
Le VI précise le champ d'application des plus-values de cession de valeurs mobilières en prévoyant l'imposition des gains nets de cession de titres réalisés par l'intermédiaire d'une fiducie, à l'instar des titres cédés par une société ou un groupement relevant de l'article 8 du code général des impôts (société de personnes), exerçant une activité civile et dans lequel le contribuable est associé ou membre.
Le VII abroge le 1 bis de l'article 150-0 D bis du code précité qui prévoit les modalités de détermination du prix d'acquisition en cas de cession de titres ou de droits reçus à la suite de la dissolution du constituant personne morale soumise à l'impôt sur les sociétés avec des ayants droit personnes physiques, l'élargissement de la qualité du constituant aux personnes physiques rendant cette disposition caduque.
Au VIII, il est proposé de modifier l'article 150-0 D bis du code général des impôts de manière à adapter les dispositions relatives à la détermination de l'abattement pour durée de détention applicable en matière de plus-values mobilières. Le calcul de la durée de détention des titres ou droits cédés est aménagé pour tenir compte du fait que ces derniers peuvent être cédés par une fiducie ou cédés par le constituant ou le titulaire de la créance sur la fiducie après leur retour dans leur patrimoine à la fin de la fiducie.
Aux IX, X et XI de l'article 10, les règles applicables en matière de plus-values immobilières sont précisées. En l'absence de transmission d'un droit réel immobilier lors de la cession de la créance détenue au titre de la fiducie, il est proposé de créer un fait générateur de plus-values immobilières pour qu'il y ait imposition de la plus-value résultant de la fraction de la créance correspondant à des biens ou droits immobiliers. C'est l'objet du nouvel article 150 UD du code général des impôts. Il est également proposé de modifier l'article 150 VB du même code de manière à préciser les règles de détermination du prix d'acquisition à retenir en cas de cession après la fin de la fiducie d'un bien ou droit immobilier. Enfin, l'article 150 VC du même code serait modifié de manière à adapter les dispositions relatives au calcul de l'abattement pour durée de détention des biens ou droits immobiliers pour tenir compte du fait que ces derniers peuvent être cédés par la fiducie ou cédés par le constituant ou le titulaire de la créance après leur retour dans leur patrimoine à la fin de la fiducie.
Le XXIII de l'article 10 insère quatre nouveaux articles dans le code général des impôts destinés à instaurer un régime neutralité fiscale aux différentes étapes de la fiducie.
L'article 238 quater N du code général des impôts fixe les conditions d'application de cette neutralité fiscale lors du transfert de biens ou droits en fiducie. Il est en effet proposé d'instaurer un sursis d'imposition afin de traiter la mise en fiducie comme une opération intercalaire qui, au titre de l'année où cette opération a lieu, ne serait retenue ni pour l'établissement de l'impôt sur le revenu ni, s'agissant des plus-values mobilières, pour l'appréciation du seuil de cession. A l'instar de ce qui est prévu pour la mise en fiducie par un constituant personne morale soumise à l'impôt sur les sociétés, le sursis d'imposition ne s'appliquerait que sous certaines conditions.
L'article 238 quater O du même code fixe les modalités de détermination et d'imposition du bénéfice de la fiducie. A cet effet, il est proposé que le résultat de la fiducie soit déterminé au niveau du patrimoine fiduciaire lui-même. En revanche, la fiducie ne serait pas en elle-même redevable de l'impôt dû sur son résultat, celui-ci étant imposé au nom du constituant ou du titulaire de la créance, à proportion de la valeur réelle des biens ou droits mis en fiducie, valeur appréciée à la date du transfert en fiducie. Les règles d'assiette et d'imposition seraient les mêmes que celles prévues pour les sociétés de personnes.
L'article 238 quater P du même code détermine le régime fiscal de la cession de la créance au titre de la fiducie et de la fin de la fiducie. En cas de cession de la créance, seul le cédant est imposé sur le résultat de cessation de la fiducie, à proportion de ses droits dans la fiducie. Les mêmes règles s'appliqueraient lorsque la fiducie prend fin et qu'elle n'emporte pas transfert des biens ou droits dans le patrimoine des constituants ou titulaires de créances en neutralité fiscale. Toutefois, dans cette situation, c'est l'ensemble des constituants ou titulaires de créances qui sont imposés sur le résultat de cessation de la fiducie.
Enfin, l'article 238 quater Q du code général des impôts prévoit un régime de neutralité fiscale en cas de retour des biens ou droits dans le patrimoine du titulaire de la créance au titre de la fiducie. Il est proposé de traiter ce transfert comme une opération intercalaire lorsque certaines conditions sont respectées (fin du contrat de fiducie sans liquidation et engagement du titulaire de la créance à calculer les plus ou moins-values ou gain ou pertes réalisés lors de la cession ultérieure des biens ou droits reçus de la fiducie, de telle sorte qu'il n'y ait pas de perte de matière fiscale).
En dernier lieu, les XXIV à XXVI de l'article 10 encadrent l'extension de la fiducie aux personnes physiques au regard des droits de mutation à titre gratuit et de l'impôt de solidarité sur la fortune.
Le XXIV crée un article 766 bis du code général des impôts qui précise les modalités d'évaluation des biens et droits mis en fiducie en matière de droits de mutation à titre gratuit. Pour la taxation aux droits de mutation par décès, les biens ou droits mis en fiducie font de plein droit retour à la succession du constituant ou de la personne titulaire des droits représentatifs des biens ou droits transférés en fiducie et sont compris dans le patrimoine de ce dernier pour leur valeur vénale nette à la date du décès.
Le XXV de l'article 10 abroge l'article 792 ter du même code devenu caduque car ses dispositions ne se justifiaient que par la volonté de prévenir l'extension de la fiducie aux personnes physiques par le biais de la dissolution du constituant.
Le XXVI assujettit à l'impôt de solidarité sur la fortune, dans le patrimoine du constituant ou de la personne titulaire des droits représentatifs des biens ou droits transférés en fiducie, les biens et droits mis en fiducie ainsi que leurs fruits. Le principe de neutralité fiscale conduit ainsi à considérer que les biens n'ont jamais quitté le patrimoine du constituant. L'imposition des biens est effectuée dans les mêmes conditions que s'ils étaient directement détenus par le constituant.
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