JORF n°0009 du 11 janvier 2012

1.1. Rappel des faits préalables à l'ouverture de la procédure
prévue par l'article L. 36-11 du CPCE
1.1.1. La décision n° 2010-1179 de l'Autorité du 4 novembre 2010

A partir de 2009, France Télécom a souhaité modifier certaines des dispositions contenues dans les contrats de cession de réseaux câblés signés avec les sociétés Numericable en 1999, 2001 et 2004.
Les modifications demandées par France Télécom visaient à ce que les sociétés Numericable, lorsqu'elles procèdent, dans le cadre prévu par les quatre contrats de cession signés avec France Télécom, à de nouveaux déploiements de câbles en fibre optique, ou procèdent à leur exploitation, respectent des processus opérationnels et des règles d'intervention désormais identiques à ceux et celles s'imposant aux autres utilisateurs du génie civil déployant des réseaux Fttx.
Les négociations commerciales engagées entre France Télécom et les sociétés Numericable sur la modification des contrats ayant échoué, l'Autorité a été saisie le 7 juillet 2010 de deux demandes de règlement de différend par France Télécom.
Dans sa décision n° 2010-1179 en date du 4 novembre 2010, l'Autorité a fait droit à l'essentiel des demandes de France Télécom, en décidant :
« Art. 1er. ― Dans le cadre des opérations de déploiement et de maintenance de réseaux en fibre optique réalisées par les sociétés Numericable SAS et NC Numericable en application des contrats de cession objets de la présente saisine de la société France Télécom, les modalités opérationnelles d'accès aux infrastructures de génie civil prévues dans ces contrats, relatives :
― aux déclarations précédant toute intervention sur le génie civil de France Télécom ;
― aux principes généraux des commandes ;
― à la fourniture de la documentation préalable ;
― à la phase d'études ;
― à la commande d'accès ;
― à la phase de travaux ;
― aux prestations complémentaires pendant la phase étude et/ou la phase travaux, à l'exception de la prestation d'accompagnement pour accéder aux chambres sécurisées ; et
― à la maintenance,
doivent être mises en conformité avec les modalités opérationnelles prévues dans l'"offre d'accès aux installations de génie civil de France Télécom pour les réseaux Fttx”.
« Art. 2. ― La présente décision doit être mise en application dans un délai de deux mois à compter de sa notification.
« Art. 3. ― Le surplus des conclusions des saisines de France Télécom est rejeté [...]. »
Cette décision, notifiée aux parties le 8 novembre 2010, aurait dû être mise en application au plus tard le 8 janvier 2011, conformément à son article 2.
Par un recours déposé devant la cour d'appel de Paris le 8 décembre 2010, les sociétés Numericable ont demandé l'annulation de la décision n° 2010-1179. Ce recours, conformément au III de l'article L. 36-8 du CPCE, n'avait pas de caractère suspensif. Les sociétés Numericable ont assorti ce recours d'une demande de sursis à exécution le 20 décembre 2010.
La cour d'appel de Paris a rejeté la demande de sursis à exécution dans une ordonnance du 3 février 2011. La cour d'appel de Paris a notamment considéré que :
« [...] Numericable ne peut démontrer que la modification contractuelle imposée par la décision aura des conséquences négatives irréversibles sur sa situation ;
Que la signature et l'exécution d'avenants ne sont certes pas des dispositions de moyen de long terme et laisseraient à une éventuelle annulation de la décision une large potentialité d'effets concrets ; [...]
Que de même, les adaptations, humaines et matérielles, que Numericable devra mettre en œuvre en son sein ne relèvent pas de circonstances exceptionnelles ou irréversibles mais constituent au contraire la conséquence la plus ordinaire d'une modification contractuelle dans une immédiateté qu'a voulue le législateur ; [...]. »
La cour d'appel de Paris a ensuite rejeté, dans un arrêt du 23 juin 2011, le recours en annulation, et ainsi confirmé dans son l'intégralité la décision n° 2010-1179. La cour d'appel a notamment relevé que :
« [...] la mission régulatrice confiée par la loi à l'ARCEP lui donne notamment le pouvoir d'imposer aux opérateurs relevant de son autorité des prescriptions et des injonctions ayant une incidence sur la conclusion, le contenu ou l'exécution de leurs conventions et de restreindre ainsi, pour des motifs d'ordre public économique, le principe de liberté contractuelle dont ils bénéficient ;
[...] qu'il en résulte que le moyen d'annulation pris du fait que l'ARCEP aurait excédé la compétence qui lui est dévolue par l'article L. 36-8 du CPCE en matière de règlement de différend au détriment de la compétence du juge du contrat doit être rejeté ; ».
Les sociétés Numericable ont formé un pourvoi en cassation contre cet arrêt le 21 juillet 2011. L'affaire est pendante à ce jour.
Les sociétés Numericable ont, en outre, engagé deux procédures supplémentaires devant le tribunal de commerce de Paris le 7 octobre 2010, d'une part, et devant la chambre de commerce internationale le 21 octobre 2010, d'autre part, aux fins d'obtenir réparation du préjudice que leur aurait, selon elles, causé la modification unilatérale des contrats de cession résultant des saisines introduites par France Télécom devant l'autorité.
1.1.2. Les échanges intervenus entre France Télécom et les sociétés Numericable depuis l'adoption de la décision n° 2010-1179 et préalablement à l'ouverture de la procédure prévue à l'article L. 36-11 à l'encontre des sociétés Numericable
Par trois courriers en date du 7 janvier 2011, France Télécom a transmis aux sociétés Numericable des projets d'avenants aux quatre contrats de cession visant à adapter ces contrats conformément à la décision.
Par un courrier en date du 10 février 2011, les sociétés Numericable ont fait part à France Télécom de leur refus de consentir à une modification des contrats de cession. Ces sociétés estimaient, en particulier, que certaines des clauses proposées par France Télécom n'étaient pas conformes à la décision de l'Autorité et qu'il était, par conséquent, nécessaire que France Télécom et les sociétés Numericable se rencontrent « pour examiner ensemble la situation sur le plan des modalités opérationnelles ».
Par ailleurs, les sociétés Numericable soutenaient dans leur courrier que :
« [...] la décision de l'ARCEP n'indique nullement qu'il serait question de signer des avenants, précisément dans la mesure où nos "droits acquis” sont supposés ne pas être remis en cause.
Vous comprendrez dès lors qu'il soit impossible en l'état actuel que nous signions des avenants à nos contrats de cession, [...] dans la mesure où cela reviendrait pour nous à consentir à la modification de nos droits d'accès au génie civil.
Nous vous rappelons à cet égard, ainsi que cela a été clairement explicité dans notre assignation devant le tribunal de commerce de Paris et dans notre demande d'arbitrage, que la modification unilatérale de ces contrats par France Télécom entraîne pour le groupe Numericable un préjudice évalué à hauteur de 3 124 890 000 euros, tenant essentiellement compte de l'actualisation de la valeur de ces contrats, de la perte des projets industriels construits autour de ceux-ci, et de la perte de valeur de notre fonds de commerce.
Par conséquent, si vous entendez modifier nos contrats de cession et d'accès au génie civil, il conviendra que vous nous indemnisiez sur les bases indiquées ci-dessus [...] ».
Dans un courrier en date du 9 mars 2011 adressé aux sociétés Numericable, France Télécom a pris acte du refus de ces dernières de signer les contrats d'avenants communiqués le 7 janvier 2011 et a rappelé aux sociétés Numericable que, selon elle, les procédures engagées devant d'autres juridictions ne faisaient pas obstacle au caractère exécutoire de la décision de l'ARCEP :
« La décision n° 2010-1179 de l'ARCEP du 4 novembre 2010 impose la mise en conformité pour les opérations de déploiement et de maintenance réalisées dans le cadre des contrats de cession entre nos sociétés, sous un délai de deux mois, des modalités opérationnelles d'accès au génie civil prévues par ces contrats et énumérées à l'article 1er avec les modalités opérationnelles prévues dans l'offre Fttx.
Conformément à cette décision, France Télécom a proposé par un courrier en date du 7 janvier 2011 des avenants aux contrats de cession, solution qui a été rejetée par votre société.
Nous pensons utile de vous rappeler que les procédures judiciaires dont vous faites état dans votre courrier n'ont aucun effet sur l'application de la décision de l'ARCEP. En effet, dès lors qu'un sursis à exécution de la décision n'a pas été ordonné, celle-ci reste pleinement exécutoire, et son non-respect sanctionnable. »
Dans ce même courrier, France Télécom a accepté le principe d'une rencontre avec les sociétés Numericable ayant pour objectif l'application de la décision de l'ARCEP, et notamment la formalisation des modifications contractuelles retenues dans celle-ci :
« Nous sommes bien évidemment favorables à la rencontre que vous proposez dès lors qu'elle a pour seule finalité la mise en œuvre de la décision de l'ARCEP, et la formalisation sans délai des évolutions contractuelles nécessaires. »
Lors d'une réunion entre France Télécom et les sociétés Numericable qui s'est tenue le 27 mai 2011, les sociétés Numericable ont présenté à France Télécom la méthodologie qu'elles souhaitaient mettre en œuvre pour appliquer la décision de l'Autorité. Cette méthodologie avait été présentée précédemment par les sociétés Numericable aux services de l'Autorité lors d'une réunion qui s'est tenue le 16 mai 2011.
Lors de cette réunion, les sociétés Numericable ont proposé à France Télécom que soient conduits quatre ateliers de travail traitant respectivement des processus GC Fttx, des systèmes d'information, des limites volumétriques, de la maintenance des réseaux hybrides. Lors de cette réunion, France Télécom a accepté le principe d'une participation à ces ateliers de travail mais a rappelé à cette occasion qu'il importait que les modifications opérationnelles soient formalisées contractuellement et a demandé, à ce titre, aux sociétés Numericable de lui indiquer la manière dont elles entendaient procéder en la matière.
En réponse à cette question, les sociétés Numericable lui ont indiqué dans un courrier en date du 7 juin 2011 qu'elles estimaient avoir démontré, notamment au travers de la méthodologie proposée lors de la réunion du 27 mai 2011, qu'elles respectaient la décision de l'ARCEP. Dans ce même courrier, après avoir rappelé leur refus de signer les avenants aux contrats de cession proposés par France Télécom, les sociétés Numericable ont indiqué qu'elles ne formaliseraient aucun écrit relatif aux nouvelles modalités d'intervention dans le génie civil en l'absence d'une indemnisation de la part de France Télécom :
« [...] Le fait (i) que vous ayez imposé vos "règles d'ingénierie” unilatéralement depuis plus de deux ans, (ii) que l'ARCEP ait désormais validé votre demande d'alignement s'agissant des modalités opérationnelles, et enfin le fait (iii) que les sociétés Numericable prouvent qu'elles modifient concrètement leurs processus d'intervention sur leurs réseaux câblés suffisent amplement à entériner la modification de nos contrats, modification que nous contestons et dont nous demandons réparation.
Compte tenu des litiges en cours devant le tribunal de commerce de Paris et la chambre de commerce internationale, nous maintenons qu'il n'est évidemment pas question de signer un avenant ou tout autre document qui aurait pour effet de marquer notre accord à la modification de nos contrats.
En d'autres termes, nous ne formaliserons aucun écrit en l'absence d'une indemnisation juste de la part de France Télécom [...] ».
Dans un courrier électronique du 9 juin 2011, France Télécom a fait part aux sociétés Numericable de ses réserves quant à la méthodologie proposée par ces dernières lors de la réunion du 27 mai 2011 relative à l'organisation d'ateliers de travail.
Dans ce courrier, France Télécom a indiqué notamment qu'elle ne partageait pas l'appréciation des sociétés Numericable quant à la particulière complexité que supposerait l'application de la décision de l'ARCEP et qu'elle estimait que nombre des questions soulevées par les sociétés Numericable lui apparaissaient soit comme hors sujet, soit comme devant être maîtrisées par un opérateur partageant de longue date le génie civil de France Télécom.
Dans ce même courrier électronique, France Télécom a néanmoins fait part de sa volonté d'avancer rapidement dans la mise en œuvre de la décision de l'ARCEP, et à ce titre, a proposé des interlocuteurs aux sociétés Numericable pour la conduite des ateliers de travail. France Télécom a ajouté toutefois que ceux-ci ne pourraient « perdurer au-delà du 31 juillet 2011, sauf à caractériser une attitude dilatoire de la part de Numericable ».
Enfin, France Télécom a rappelé « la nécessité absolue de formaliser » avec les sociétés Numericable « les processus opérationnels qui seront modifiés, conformément à la décision de l'ARCEP, dans les contrats en cours ».
En réponse à ce courrier électronique, les sociétés Numericable, dans un courrier adressé à France Télécom le 23 juin 2011, lui ont indiqué qu'elles considéraient le délai proposé pour la tenue des ateliers de travail comme irréaliste. Dans ce même courrier, les sociétés Numericable ont indiqué que :
« [...] Cette décision [la décision n° 2010-1179] n'impose donc la signature d'aucun accord écrit quel qu'il soit, notamment dans la mesure où l'ARCEP ne dispose pas d'un tel pouvoir ; il s'agit uniquement d'appliquer les modalités de l'offre "GC Fttx” comme cela nous a été imposé par l'ARCEP à votre demande.
[...] Si France Télécom entend obtenir l'accord formel des sociétés Numericable sur la modification des contrats d'accès au génie civil, modification imposée par France Télécom, il appartient à cette dernière de proposer une compensation financière appropriée, constituant la juste contrepartie de cette modification substantielle des contrats et l'indemnisation du préjudice subi par Numericable. A défaut, vous savez pertinemment que Numericable ne peut pas accéder à vos demandes, pour les raisons évidentes développées dans le cadre de nos contentieux en cours devant le tribunal de commerce de Paris et la chambre de commerce internationale. »
Dans un courrier à France Télécom en date du 28 juillet 2011, les sociétés Numericable ont une nouvelle fois fait valoir que, selon elles, « la signature d'avenants n'est en aucune manière prévue par la décision de l'ARCEP, même si les modalités de l'offre "GC Fttx” s'imposent désormais à Numericable ».
Les sociétés Numericable estimaient en outre dans ce courrier que « [...] l'ARCEP n'est pas le juge du contrat et n'a en toute hypothèse aucun pouvoir pour intervenir dans les rapports contractuels qui existent entre France Télécom et les sociétés Numericable concernant notamment l'indemnisation et les restitutions auxquelles Numericable est en droit de prétendre du fait de l'inexécution par France Télécom de ses obligations au titre des contrats précités : en ne permettant plus aux sociétés Numericable d'accéder aux installations de génie civil de France Télécom dans les conditions prévues à ces contrats ».
Les sociétés Numericable ont réaffirmé par conséquent qu'elles n'accepteraient de signer des avenants aux contrats de cession « qu'en contrepartie d'une juste indemnisation par France Télécom ».
Par un courrier en date du 29 juillet 2011, France Télécom a indiqué aux sociétés Numericable :
« [...] Je dois constater qu'au terme de nos échanges, vous rejetez désormais par principe toute évolution des contrats nous liant, et donc toute formalisation des modifications contractuelles imposées par la décision de l'ARCEP. Un tel rejet est évidemment inacceptable, ne serait-ce que pour d'évidentes raisons de responsabilité contractuelle, d'opposabilité des évolutions à intervenir et de transparence des relations entre nos entités. [...] Je ne peux donc que prendre acte de ce rejet, qui prive désormais de tout objet les workshops auxquels nous avions pourtant accepté de participer [...]. Au total, je dois constater qu'à ce jour et de votre seul fait, les modifications contractuelles que l'ARCEP a prescrites ne sont toujours pas intervenues et ne semblent devoir intervenir à horizon raisonnable ; qu'ainsi la décision n° 2010-1179 de l'ARCEP n'est toujours pas exécutée, mettant les demandes de France Télécom auxquelles elle a fait droit en situation d'échec. »
Par un courrier en date du 1er septembre 2011 adressé au directeur des affaires juridiques de l'ARCEP et à France Télécom, les sociétés Numericable ont proposé d'établir un engagement écrit par lequel elles s'engageraient à respecter « formellement les modalités opérationnelles de l'offre Fttx conformément aux prescriptions de la décision de l'ARCEP. Sur le plan pratique, la mise en œuvre de cet engagement impliquera bien entendu que France Télécom accepte de coopérer dans le cadre des quatre ateliers-workshops prévus depuis le mois de mai dernier ».
Les sociétés Numericable indiquaient en outre dans ce courrier que France Télécom refusait de leur délivrer le code d'accès « FCI » « empêchant par là-même non seulement la bonne exécution de la décision de l'ARCEP mais également la poursuite normale de l'activité de Numericable ».
Dans un courrier adressé au directeur juridique de l'ARCEP et aux sociétés Numericable en date du 8 septembre 2011, France Télécom a réaffirmé sa position en indiquant que « seuls des ajustements traduits dans des contrats signés entre France Télécom et Numericable seront à même d'assurer la bonne exécution de leurs obligations par les deux parties et ce, de manière pérenne ».
Par ce même courrier, France Télécom a rappelé par ailleurs avoir proposé, dès le 7 janvier 2011, aux sociétés Numericable une convention, lui permettant d'obtenir le code FCI :
« [...] [le code FCI] est délivré sur simple signature d'une convention qui a été adressée à Numericable dès le 7 janvier 2011. Numericable a pour l'heure purement et simplement refusé de signer cette convention, sans aucune justification particulière [...]. »
Par deux courriers en date du 14 septembre 2011, le directeur des affaires juridiques de l'Autorité, constatant que la décision de l'Autorité demeurait inexécutée, a demandé à chacune des deux parties de lui indiquer quels étaient les moyens précis qu'elles proposaient ou avaient proposé de mettre en œuvre « pour assurer sans délai l'exécution de la décision et quels sont les obstacles concrets qui ont été rencontrés ».
En réponse à ce courrier, les sociétés Numericable ont transmis au directeur des affaires juridiques de l'Autorité le projet d'engagement (courrier en date du 27 septembre 2011 également adressé à France Télécom). Le document ainsi transmis à l'Autorité et à France Télécom prévoit que :
« Numericable s'engage à mobiliser les moyens humains et matériels nécessaires à la mise en conformité des modalités opérationnelles d'accès aux infrastructures de génie civil de France Télécom avec celles prévues dans l'offre "GC fttx” (figurant en annexe 1 ci-après), pour les opérations de modernisation des réseaux câblés en fibre optique », tout en précisant que la bonne fin de cet engagement est subordonnée à la condition « que France Télécom mobilise également, de son côté et de bonne foi, les moyens nécessaires pour rendre possible cette mise en conformité dans le délai prévu de douze (12) mois, et en particulier qu'elle participe activement et de manière diligente aux workshops dont la présentation et le rôle sont joints en annexe 2 (ou à toute autre forme de collaboration qui se révélerait utile ou adaptée pour parvenir à cette mise en conformité des modalités opérationnelles d'accès à son génie civil par Numericable) ».
Enfin, dans un courrier en date du 29 septembre 2011 adressé au directeur des affaires juridiques de l'Autorité, France Télécom a réaffirmé sa position, en indiquant notamment que « [s]eule une modification des contrats en cours garantit [l'] opposabilité entre parties [...]. Quelle que soit l'appellation du document appelé à formaliser les modifications induites par la décision de l'ARCEP, ce document doit être de nature contractuelle, signé des deux parties, daté, et doit modifier expressément les conventions en cours ».

1.2. Rappel de l'exposé des faits et des griefs contenus dans le rapport des rapporteurs
1.2.1. Les faits exposés

Dans le rapport exposant les faits et les griefs adressés aux sociétés Numericable le 15 novembre 2011, les rapporteurs ont exposé les éléments suivants :

1.2.1.1. En contradiction avec l'obligation posée par la décision n° 2010-1179,
les sociétés Numericable se sont délibérément opposées à toute modification des contrats de cession

Alors que France Télécom a transmis aux sociétés Numericable dès le 7 janvier 2011 des avenants aux contrats de cession, ces sociétés ont refusé le 10 février 2011, par un courrier adressé à France Télécom, de procéder à une modification de ces contrats. Par la suite, ces sociétés ont constamment maintenu leur opposition de principe à toute modification des contrats de cession objet de la décision n° 2010-1179. Le rapport fait ainsi état de quatre autres courriers des sociétés Numericable par lesquels elles s'opposent résolument à toute modification des contrats de cession (4).
Au regard de ces éléments, les rapporteurs ont conclu qu'en contradiction avec la décision n° 2010-1179 de l'Autorité qui venait régler les différends survenus entre France Télécom et les sociétés Numericable quant à la modification des contrats de cession signés entre elles en 1999, 2001 et 2004, et imposait de ce fait une modification contractuelle limitée à un ensemble de modalités dont elle a arrêté la liste, et ce dans un délai de deux mois, les sociétés Numericable ont opposé, de manière répétée, un refus à toute modification desdits contrats.

(4) Extraits des échanges cités dans le rapport exposant les faits et les griefs en date du 15 novembre 2011 : ― courrier du 7 juin 2011 adressé à France Télécom : « [...] nous maintenons qu'il n'est évidemment pas question de signer un avenant ou tout autre document qui aurait pour effet de marquer notre accord à la modification de nos contrats. » ; ― courrier du 23 juin 2011 adressé à France Télécom : « [...] Cette décision n'impose donc la signature d'aucun accord écrit quel qu'il soit, notamment dans la mesure où l'ARCEP ne dispose pas d'un tel pouvoir [...] » ; ― courrier du 28 juillet 2011 adressé à France Télécom : « [...] la signature d'avenants n'est en aucune manière prévue par la décision de l'ARCEP [...] » ; ― courrier du 1er septembre 2011 adressé au directeur des affaires juridiques de l'ARCEP et à France Télécom (en copie) : « France Télécom voudrait de son côté imposer au préalable à Numericable, pour appliquer l'offre Fttx et pour exécuter votre décision, de signer des avenants aux contrats de cession et d'accès de 1999 à 2004. [...] le groupe Numericable ne peut pas accepter de signer des avenants aux contrats de cession et d'accès. »


Historique des versions

Version 1

1.1. Rappel des faits préalables à l'ouverture de la procédure

prévue par l'article L. 36-11 du CPCE

1.1.1. La décision n° 2010-1179 de l'Autorité du 4 novembre 2010

A partir de 2009, France Télécom a souhaité modifier certaines des dispositions contenues dans les contrats de cession de réseaux câblés signés avec les sociétés Numericable en 1999, 2001 et 2004.

Les modifications demandées par France Télécom visaient à ce que les sociétés Numericable, lorsqu'elles procèdent, dans le cadre prévu par les quatre contrats de cession signés avec France Télécom, à de nouveaux déploiements de câbles en fibre optique, ou procèdent à leur exploitation, respectent des processus opérationnels et des règles d'intervention désormais identiques à ceux et celles s'imposant aux autres utilisateurs du génie civil déployant des réseaux Fttx.

Les négociations commerciales engagées entre France Télécom et les sociétés Numericable sur la modification des contrats ayant échoué, l'Autorité a été saisie le 7 juillet 2010 de deux demandes de règlement de différend par France Télécom.

Dans sa décision n° 2010-1179 en date du 4 novembre 2010, l'Autorité a fait droit à l'essentiel des demandes de France Télécom, en décidant :

« Art. 1er. ― Dans le cadre des opérations de déploiement et de maintenance de réseaux en fibre optique réalisées par les sociétés Numericable SAS et NC Numericable en application des contrats de cession objets de la présente saisine de la société France Télécom, les modalités opérationnelles d'accès aux infrastructures de génie civil prévues dans ces contrats, relatives :

― aux déclarations précédant toute intervention sur le génie civil de France Télécom ;

― aux principes généraux des commandes ;

― à la fourniture de la documentation préalable ;

― à la phase d'études ;

― à la commande d'accès ;

― à la phase de travaux ;

― aux prestations complémentaires pendant la phase étude et/ou la phase travaux, à l'exception de la prestation d'accompagnement pour accéder aux chambres sécurisées ; et

― à la maintenance,

doivent être mises en conformité avec les modalités opérationnelles prévues dans l'"offre d'accès aux installations de génie civil de France Télécom pour les réseaux Fttx”.

« Art. 2. ― La présente décision doit être mise en application dans un délai de deux mois à compter de sa notification.

« Art. 3. ― Le surplus des conclusions des saisines de France Télécom est rejeté [...]. »

Cette décision, notifiée aux parties le 8 novembre 2010, aurait dû être mise en application au plus tard le 8 janvier 2011, conformément à son article 2.

Par un recours déposé devant la cour d'appel de Paris le 8 décembre 2010, les sociétés Numericable ont demandé l'annulation de la décision n° 2010-1179. Ce recours, conformément au III de l'article L. 36-8 du CPCE, n'avait pas de caractère suspensif. Les sociétés Numericable ont assorti ce recours d'une demande de sursis à exécution le 20 décembre 2010.

La cour d'appel de Paris a rejeté la demande de sursis à exécution dans une ordonnance du 3 février 2011. La cour d'appel de Paris a notamment considéré que :

« [...] Numericable ne peut démontrer que la modification contractuelle imposée par la décision aura des conséquences négatives irréversibles sur sa situation ;

Que la signature et l'exécution d'avenants ne sont certes pas des dispositions de moyen de long terme et laisseraient à une éventuelle annulation de la décision une large potentialité d'effets concrets ; [...]

Que de même, les adaptations, humaines et matérielles, que Numericable devra mettre en œuvre en son sein ne relèvent pas de circonstances exceptionnelles ou irréversibles mais constituent au contraire la conséquence la plus ordinaire d'une modification contractuelle dans une immédiateté qu'a voulue le législateur ; [...]. »

La cour d'appel de Paris a ensuite rejeté, dans un arrêt du 23 juin 2011, le recours en annulation, et ainsi confirmé dans son l'intégralité la décision n° 2010-1179. La cour d'appel a notamment relevé que :

« [...] la mission régulatrice confiée par la loi à l'ARCEP lui donne notamment le pouvoir d'imposer aux opérateurs relevant de son autorité des prescriptions et des injonctions ayant une incidence sur la conclusion, le contenu ou l'exécution de leurs conventions et de restreindre ainsi, pour des motifs d'ordre public économique, le principe de liberté contractuelle dont ils bénéficient ;

[...] qu'il en résulte que le moyen d'annulation pris du fait que l'ARCEP aurait excédé la compétence qui lui est dévolue par l'article L. 36-8 du CPCE en matière de règlement de différend au détriment de la compétence du juge du contrat doit être rejeté ; ».

Les sociétés Numericable ont formé un pourvoi en cassation contre cet arrêt le 21 juillet 2011. L'affaire est pendante à ce jour.

Les sociétés Numericable ont, en outre, engagé deux procédures supplémentaires devant le tribunal de commerce de Paris le 7 octobre 2010, d'une part, et devant la chambre de commerce internationale le 21 octobre 2010, d'autre part, aux fins d'obtenir réparation du préjudice que leur aurait, selon elles, causé la modification unilatérale des contrats de cession résultant des saisines introduites par France Télécom devant l'autorité.

1.1.2. Les échanges intervenus entre France Télécom et les sociétés Numericable depuis l'adoption de la décision n° 2010-1179 et préalablement à l'ouverture de la procédure prévue à l'article L. 36-11 à l'encontre des sociétés Numericable

Par trois courriers en date du 7 janvier 2011, France Télécom a transmis aux sociétés Numericable des projets d'avenants aux quatre contrats de cession visant à adapter ces contrats conformément à la décision.

Par un courrier en date du 10 février 2011, les sociétés Numericable ont fait part à France Télécom de leur refus de consentir à une modification des contrats de cession. Ces sociétés estimaient, en particulier, que certaines des clauses proposées par France Télécom n'étaient pas conformes à la décision de l'Autorité et qu'il était, par conséquent, nécessaire que France Télécom et les sociétés Numericable se rencontrent « pour examiner ensemble la situation sur le plan des modalités opérationnelles ».

Par ailleurs, les sociétés Numericable soutenaient dans leur courrier que :

« [...] la décision de l'ARCEP n'indique nullement qu'il serait question de signer des avenants, précisément dans la mesure où nos "droits acquis” sont supposés ne pas être remis en cause.

Vous comprendrez dès lors qu'il soit impossible en l'état actuel que nous signions des avenants à nos contrats de cession, [...] dans la mesure où cela reviendrait pour nous à consentir à la modification de nos droits d'accès au génie civil.

Nous vous rappelons à cet égard, ainsi que cela a été clairement explicité dans notre assignation devant le tribunal de commerce de Paris et dans notre demande d'arbitrage, que la modification unilatérale de ces contrats par France Télécom entraîne pour le groupe Numericable un préjudice évalué à hauteur de 3 124 890 000 euros, tenant essentiellement compte de l'actualisation de la valeur de ces contrats, de la perte des projets industriels construits autour de ceux-ci, et de la perte de valeur de notre fonds de commerce.

Par conséquent, si vous entendez modifier nos contrats de cession et d'accès au génie civil, il conviendra que vous nous indemnisiez sur les bases indiquées ci-dessus [...] ».

Dans un courrier en date du 9 mars 2011 adressé aux sociétés Numericable, France Télécom a pris acte du refus de ces dernières de signer les contrats d'avenants communiqués le 7 janvier 2011 et a rappelé aux sociétés Numericable que, selon elle, les procédures engagées devant d'autres juridictions ne faisaient pas obstacle au caractère exécutoire de la décision de l'ARCEP :

« La décision n° 2010-1179 de l'ARCEP du 4 novembre 2010 impose la mise en conformité pour les opérations de déploiement et de maintenance réalisées dans le cadre des contrats de cession entre nos sociétés, sous un délai de deux mois, des modalités opérationnelles d'accès au génie civil prévues par ces contrats et énumérées à l'article 1er avec les modalités opérationnelles prévues dans l'offre Fttx.

Conformément à cette décision, France Télécom a proposé par un courrier en date du 7 janvier 2011 des avenants aux contrats de cession, solution qui a été rejetée par votre société.

Nous pensons utile de vous rappeler que les procédures judiciaires dont vous faites état dans votre courrier n'ont aucun effet sur l'application de la décision de l'ARCEP. En effet, dès lors qu'un sursis à exécution de la décision n'a pas été ordonné, celle-ci reste pleinement exécutoire, et son non-respect sanctionnable. »

Dans ce même courrier, France Télécom a accepté le principe d'une rencontre avec les sociétés Numericable ayant pour objectif l'application de la décision de l'ARCEP, et notamment la formalisation des modifications contractuelles retenues dans celle-ci :

« Nous sommes bien évidemment favorables à la rencontre que vous proposez dès lors qu'elle a pour seule finalité la mise en œuvre de la décision de l'ARCEP, et la formalisation sans délai des évolutions contractuelles nécessaires. »

Lors d'une réunion entre France Télécom et les sociétés Numericable qui s'est tenue le 27 mai 2011, les sociétés Numericable ont présenté à France Télécom la méthodologie qu'elles souhaitaient mettre en œuvre pour appliquer la décision de l'Autorité. Cette méthodologie avait été présentée précédemment par les sociétés Numericable aux services de l'Autorité lors d'une réunion qui s'est tenue le 16 mai 2011.

Lors de cette réunion, les sociétés Numericable ont proposé à France Télécom que soient conduits quatre ateliers de travail traitant respectivement des processus GC Fttx, des systèmes d'information, des limites volumétriques, de la maintenance des réseaux hybrides. Lors de cette réunion, France Télécom a accepté le principe d'une participation à ces ateliers de travail mais a rappelé à cette occasion qu'il importait que les modifications opérationnelles soient formalisées contractuellement et a demandé, à ce titre, aux sociétés Numericable de lui indiquer la manière dont elles entendaient procéder en la matière.

En réponse à cette question, les sociétés Numericable lui ont indiqué dans un courrier en date du 7 juin 2011 qu'elles estimaient avoir démontré, notamment au travers de la méthodologie proposée lors de la réunion du 27 mai 2011, qu'elles respectaient la décision de l'ARCEP. Dans ce même courrier, après avoir rappelé leur refus de signer les avenants aux contrats de cession proposés par France Télécom, les sociétés Numericable ont indiqué qu'elles ne formaliseraient aucun écrit relatif aux nouvelles modalités d'intervention dans le génie civil en l'absence d'une indemnisation de la part de France Télécom :

« [...] Le fait (i) que vous ayez imposé vos "règles d'ingénierie” unilatéralement depuis plus de deux ans, (ii) que l'ARCEP ait désormais validé votre demande d'alignement s'agissant des modalités opérationnelles, et enfin le fait (iii) que les sociétés Numericable prouvent qu'elles modifient concrètement leurs processus d'intervention sur leurs réseaux câblés suffisent amplement à entériner la modification de nos contrats, modification que nous contestons et dont nous demandons réparation.

Compte tenu des litiges en cours devant le tribunal de commerce de Paris et la chambre de commerce internationale, nous maintenons qu'il n'est évidemment pas question de signer un avenant ou tout autre document qui aurait pour effet de marquer notre accord à la modification de nos contrats.

En d'autres termes, nous ne formaliserons aucun écrit en l'absence d'une indemnisation juste de la part de France Télécom [...] ».

Dans un courrier électronique du 9 juin 2011, France Télécom a fait part aux sociétés Numericable de ses réserves quant à la méthodologie proposée par ces dernières lors de la réunion du 27 mai 2011 relative à l'organisation d'ateliers de travail.

Dans ce courrier, France Télécom a indiqué notamment qu'elle ne partageait pas l'appréciation des sociétés Numericable quant à la particulière complexité que supposerait l'application de la décision de l'ARCEP et qu'elle estimait que nombre des questions soulevées par les sociétés Numericable lui apparaissaient soit comme hors sujet, soit comme devant être maîtrisées par un opérateur partageant de longue date le génie civil de France Télécom.

Dans ce même courrier électronique, France Télécom a néanmoins fait part de sa volonté d'avancer rapidement dans la mise en œuvre de la décision de l'ARCEP, et à ce titre, a proposé des interlocuteurs aux sociétés Numericable pour la conduite des ateliers de travail. France Télécom a ajouté toutefois que ceux-ci ne pourraient « perdurer au-delà du 31 juillet 2011, sauf à caractériser une attitude dilatoire de la part de Numericable ».

Enfin, France Télécom a rappelé « la nécessité absolue de formaliser » avec les sociétés Numericable « les processus opérationnels qui seront modifiés, conformément à la décision de l'ARCEP, dans les contrats en cours ».

En réponse à ce courrier électronique, les sociétés Numericable, dans un courrier adressé à France Télécom le 23 juin 2011, lui ont indiqué qu'elles considéraient le délai proposé pour la tenue des ateliers de travail comme irréaliste. Dans ce même courrier, les sociétés Numericable ont indiqué que :

« [...] Cette décision [la décision n° 2010-1179] n'impose donc la signature d'aucun accord écrit quel qu'il soit, notamment dans la mesure où l'ARCEP ne dispose pas d'un tel pouvoir ; il s'agit uniquement d'appliquer les modalités de l'offre "GC Fttx” comme cela nous a été imposé par l'ARCEP à votre demande.

[...] Si France Télécom entend obtenir l'accord formel des sociétés Numericable sur la modification des contrats d'accès au génie civil, modification imposée par France Télécom, il appartient à cette dernière de proposer une compensation financière appropriée, constituant la juste contrepartie de cette modification substantielle des contrats et l'indemnisation du préjudice subi par Numericable. A défaut, vous savez pertinemment que Numericable ne peut pas accéder à vos demandes, pour les raisons évidentes développées dans le cadre de nos contentieux en cours devant le tribunal de commerce de Paris et la chambre de commerce internationale. »

Dans un courrier à France Télécom en date du 28 juillet 2011, les sociétés Numericable ont une nouvelle fois fait valoir que, selon elles, « la signature d'avenants n'est en aucune manière prévue par la décision de l'ARCEP, même si les modalités de l'offre "GC Fttx” s'imposent désormais à Numericable ».

Les sociétés Numericable estimaient en outre dans ce courrier que « [...] l'ARCEP n'est pas le juge du contrat et n'a en toute hypothèse aucun pouvoir pour intervenir dans les rapports contractuels qui existent entre France Télécom et les sociétés Numericable concernant notamment l'indemnisation et les restitutions auxquelles Numericable est en droit de prétendre du fait de l'inexécution par France Télécom de ses obligations au titre des contrats précités : en ne permettant plus aux sociétés Numericable d'accéder aux installations de génie civil de France Télécom dans les conditions prévues à ces contrats ».

Les sociétés Numericable ont réaffirmé par conséquent qu'elles n'accepteraient de signer des avenants aux contrats de cession « qu'en contrepartie d'une juste indemnisation par France Télécom ».

Par un courrier en date du 29 juillet 2011, France Télécom a indiqué aux sociétés Numericable :

« [...] Je dois constater qu'au terme de nos échanges, vous rejetez désormais par principe toute évolution des contrats nous liant, et donc toute formalisation des modifications contractuelles imposées par la décision de l'ARCEP. Un tel rejet est évidemment inacceptable, ne serait-ce que pour d'évidentes raisons de responsabilité contractuelle, d'opposabilité des évolutions à intervenir et de transparence des relations entre nos entités. [...] Je ne peux donc que prendre acte de ce rejet, qui prive désormais de tout objet les workshops auxquels nous avions pourtant accepté de participer [...]. Au total, je dois constater qu'à ce jour et de votre seul fait, les modifications contractuelles que l'ARCEP a prescrites ne sont toujours pas intervenues et ne semblent devoir intervenir à horizon raisonnable ; qu'ainsi la décision n° 2010-1179 de l'ARCEP n'est toujours pas exécutée, mettant les demandes de France Télécom auxquelles elle a fait droit en situation d'échec. »

Par un courrier en date du 1er septembre 2011 adressé au directeur des affaires juridiques de l'ARCEP et à France Télécom, les sociétés Numericable ont proposé d'établir un engagement écrit par lequel elles s'engageraient à respecter « formellement les modalités opérationnelles de l'offre Fttx conformément aux prescriptions de la décision de l'ARCEP. Sur le plan pratique, la mise en œuvre de cet engagement impliquera bien entendu que France Télécom accepte de coopérer dans le cadre des quatre ateliers-workshops prévus depuis le mois de mai dernier ».

Les sociétés Numericable indiquaient en outre dans ce courrier que France Télécom refusait de leur délivrer le code d'accès « FCI » « empêchant par là-même non seulement la bonne exécution de la décision de l'ARCEP mais également la poursuite normale de l'activité de Numericable ».

Dans un courrier adressé au directeur juridique de l'ARCEP et aux sociétés Numericable en date du 8 septembre 2011, France Télécom a réaffirmé sa position en indiquant que « seuls des ajustements traduits dans des contrats signés entre France Télécom et Numericable seront à même d'assurer la bonne exécution de leurs obligations par les deux parties et ce, de manière pérenne ».

Par ce même courrier, France Télécom a rappelé par ailleurs avoir proposé, dès le 7 janvier 2011, aux sociétés Numericable une convention, lui permettant d'obtenir le code FCI :

« [...] [le code FCI] est délivré sur simple signature d'une convention qui a été adressée à Numericable dès le 7 janvier 2011. Numericable a pour l'heure purement et simplement refusé de signer cette convention, sans aucune justification particulière [...]. »

Par deux courriers en date du 14 septembre 2011, le directeur des affaires juridiques de l'Autorité, constatant que la décision de l'Autorité demeurait inexécutée, a demandé à chacune des deux parties de lui indiquer quels étaient les moyens précis qu'elles proposaient ou avaient proposé de mettre en œuvre « pour assurer sans délai l'exécution de la décision et quels sont les obstacles concrets qui ont été rencontrés ».

En réponse à ce courrier, les sociétés Numericable ont transmis au directeur des affaires juridiques de l'Autorité le projet d'engagement (courrier en date du 27 septembre 2011 également adressé à France Télécom). Le document ainsi transmis à l'Autorité et à France Télécom prévoit que :

« Numericable s'engage à mobiliser les moyens humains et matériels nécessaires à la mise en conformité des modalités opérationnelles d'accès aux infrastructures de génie civil de France Télécom avec celles prévues dans l'offre "GC fttx” (figurant en annexe 1 ci-après), pour les opérations de modernisation des réseaux câblés en fibre optique », tout en précisant que la bonne fin de cet engagement est subordonnée à la condition « que France Télécom mobilise également, de son côté et de bonne foi, les moyens nécessaires pour rendre possible cette mise en conformité dans le délai prévu de douze (12) mois, et en particulier qu'elle participe activement et de manière diligente aux workshops dont la présentation et le rôle sont joints en annexe 2 (ou à toute autre forme de collaboration qui se révélerait utile ou adaptée pour parvenir à cette mise en conformité des modalités opérationnelles d'accès à son génie civil par Numericable) ».

Enfin, dans un courrier en date du 29 septembre 2011 adressé au directeur des affaires juridiques de l'Autorité, France Télécom a réaffirmé sa position, en indiquant notamment que « [s]eule une modification des contrats en cours garantit [l'] opposabilité entre parties [...]. Quelle que soit l'appellation du document appelé à formaliser les modifications induites par la décision de l'ARCEP, ce document doit être de nature contractuelle, signé des deux parties, daté, et doit modifier expressément les conventions en cours ».

1.2. Rappel de l'exposé des faits et des griefs contenus dans le rapport des rapporteurs

1.2.1. Les faits exposés

Dans le rapport exposant les faits et les griefs adressés aux sociétés Numericable le 15 novembre 2011, les rapporteurs ont exposé les éléments suivants :

1.2.1.1. En contradiction avec l'obligation posée par la décision n° 2010-1179,

les sociétés Numericable se sont délibérément opposées à toute modification des contrats de cession

Alors que France Télécom a transmis aux sociétés Numericable dès le 7 janvier 2011 des avenants aux contrats de cession, ces sociétés ont refusé le 10 février 2011, par un courrier adressé à France Télécom, de procéder à une modification de ces contrats. Par la suite, ces sociétés ont constamment maintenu leur opposition de principe à toute modification des contrats de cession objet de la décision n° 2010-1179. Le rapport fait ainsi état de quatre autres courriers des sociétés Numericable par lesquels elles s'opposent résolument à toute modification des contrats de cession (4).

Au regard de ces éléments, les rapporteurs ont conclu qu'en contradiction avec la décision n° 2010-1179 de l'Autorité qui venait régler les différends survenus entre France Télécom et les sociétés Numericable quant à la modification des contrats de cession signés entre elles en 1999, 2001 et 2004, et imposait de ce fait une modification contractuelle limitée à un ensemble de modalités dont elle a arrêté la liste, et ce dans un délai de deux mois, les sociétés Numericable ont opposé, de manière répétée, un refus à toute modification desdits contrats.

(4) Extraits des échanges cités dans le rapport exposant les faits et les griefs en date du 15 novembre 2011 : ― courrier du 7 juin 2011 adressé à France Télécom : « [...] nous maintenons qu'il n'est évidemment pas question de signer un avenant ou tout autre document qui aurait pour effet de marquer notre accord à la modification de nos contrats. » ; ― courrier du 23 juin 2011 adressé à France Télécom : « [...] Cette décision n'impose donc la signature d'aucun accord écrit quel qu'il soit, notamment dans la mesure où l'ARCEP ne dispose pas d'un tel pouvoir [...] » ; ― courrier du 28 juillet 2011 adressé à France Télécom : « [...] la signature d'avenants n'est en aucune manière prévue par la décision de l'ARCEP [...] » ; ― courrier du 1er septembre 2011 adressé au directeur des affaires juridiques de l'ARCEP et à France Télécom (en copie) : « France Télécom voudrait de son côté imposer au préalable à Numericable, pour appliquer l'offre Fttx et pour exécuter votre décision, de signer des avenants aux contrats de cession et d'accès de 1999 à 2004. [...] le groupe Numericable ne peut pas accepter de signer des avenants aux contrats de cession et d'accès. »