JORF n°0166 du 18 juillet 2008

I. - Typologie des coûts induits
par la conservation des numéros

La mise en œuvre de la fonctionnalité de conservation du numéro se traduit par de nombreuses modifications ou adaptations des systèmes d'information existants et des processus internes de l'entreprise. L'ensemble des grands postes de coûts des opérateurs sont donc impactés par la conservation du numéro. Ces postes de coûts sont de manière générale les suivants :
― les coûts de systèmes d'information ;
― les coûts de réseau ;
― les coûts commerciaux.
La délimitation précise de l'ensemble des charges découlant de la mise en œuvre de l'obligation de conservation du numéro est alors particulièrement complexe. Certains coûts de conservation des numéros font ainsi partie intégrante de coûts d'investissement et d'exploitation de l'opérateur, sans qu'il soit pour autant possible de mesurer précisément l'écart avec les coûts qui auraient été supportés si cette fonctionnalité n'était pas obligatoire. Les systèmes d'information auraient été relativement moins complexes, les choix d'architecture peut-être différents.
Pour autant, certains coûts de mise en œuvre de la conservation des numéros sont directement observables car strictement spécifiques à la mise en œuvre de cette fonctionnalité. Il peut s'agir par exemple des coûts liés au serveur vocal interactif prévu par l'article 5 de la décision n° 2006-0381 susvisée, destiné à renseigner les clients désireux de conserver leur numéro.
L'ensemble des coûts encourus par un opérateur lui permet de remplir les trois fonctions qui lui incombent suivant les circonstances :
― en tant qu'opérateur receveur : il doit recevoir la demande du client de conserver son numéro lors de la souscription d'un nouveau contrat et lui donner effet ;
― en tant qu'opérateur donneur : il doit recevoir la demande de l'opérateur receveur de transférer un numéro faisant l'objet d'une demande de conservation et lui donner effet ;
― en tant qu'opérateur attributaire : il doit recevoir les demandes des opérateurs tiers souhaitant connaître la liste des numéros dont il est attributaire et ayant fait l'objet d'une demande de conservation et y faire droit.
Certains de ces coûts sont clairement identifiables et affectables à chacune de ces fonctions, mais la plupart d'entre eux ne le sont pas (exemple : le coût de mise à disposition du RIO est attribuable à la fonction d'opérateur donneur). Mais d'autres sont joints pour l'ensemble de ces trois fonctions (exemple : le coût de conception et de gestion du projet de déploiement des systèmes de portabilité ne peut être alloué qu'à l'ensemble des trois fonctions). Enfin, de nombreux coûts induits le sont dans des postes de coûts qui découlent de l'activité générale d'opérateur indépendamment de l'obligation de portabilité (exemple : l'insertion dans un support de facturation, ou sur un espace client sur un site internet, de la mention du RIO induit un surcoût dans la fonction facturation, ou espace client internet, lors de sa mise en place sans impliquer nécessairement une hausse du coût de production des factures ou d'édition de l'espace client internet).
En outre, l'adaptation de son organisation à cette obligation peut être l'occasion d'introduire de manière simultanée d'autres modifications d'organisation indépendantes de l'obligation de conservation du numéro tout en mutualisant un certain nombre de coûts à cette occasion.

II. - Modes de recouvrement des coûts
II-1. Modes de recouvrement des coûts de l'opérateur receveur

L'opérateur receveur offre à son client la possibilité de conserver son numéro. A ce titre, il prend en charge l'ensemble de la mise en œuvre de cette demande, y compris la résiliation de la ligne sur laquelle le numéro était précédemment actif. Cette prestation lui permet d'acquérir de nouveaux abonnés et ainsi de développer son activité commerciale de fournisseur de communications électroniques.
Les coûts subis par l'opérateur receveur peuvent être recouvrés selon les deux modes suivants :
― auprès de l'abonné qui fait une demande de conservation du numéro, via un tarif spécifique et explicite de l'offre de conservation du numéro ;
― au titre de son activité générale d'opérateur, via ses tarifs de détails (frais d'accès au service, abonnement mensuel, tarif des communications électroniques, etc.). Le coût reste à sa charge et est finalement supporté par l'ensemble de ses abonnés sans tarification explicite et identifiée de cette prestation offerte.
La possibilité de recouvrer auprès de son nouvel abonné des coûts générés par le portage du numéro demandé est toutefois encadrée. L'article L. 44 du CPCE dispose en effet :
« Les opérateurs sont tenus de proposer à un tarif raisonnable à leurs abonnés les offres permettant à ces derniers de conserver leur numéro [...] non géographique, fixe ou mobile [...]. »
La mise en œuvre de la conservation du numéro se faisant au bénéfice de l'opérateur receveur, qui peut ainsi développer son activité auprès de nouveaux clients, cet opérateur est naturellement incité à pratiquer une tarification raisonnable. Il ne convient donc pas de préciser plus avant les modalités de recouvrements des coûts qu'il encourt en sa capacité d'opérateur receveur.

II-2. Modes de recouvrement des coûts de l'opérateur donneur

En théorie, l'ensemble des coûts subis par l'opérateur en sa qualité d'opérateur donneur et présentés précédemment peuvent être recouvrés auprès de trois sources, non exclusives les unes des autres. Ces sources sont :
― la facturation d'une prestation de « portabilité sortante » à son abonné lorsque celui-ci résilie son contrat et demande à conserver son numéro ;
― la facturation d'une prestation de « portabilité sortante » à l'opérateur receveur qui demande le transfert d'un numéro suite à la demande d'un de ses clients lors de la souscription d'une offre de détail ;
― l'activité générale de l'opérateur via la tarification de ses offres de détail sans qu'il existe un tarif spécifique et identifié de cette prestation. Le coût reste à sa charge et il est finalement supporté par l'ensemble de ses abonnés, qu'ils exercent ou non leur droit à conserver leur numéro en cas de changement d'opérateur.
Parmi ces possibilités théoriques, l'une est exclue par le cadre réglementaire, puisque l'article D. 406-19 du CPCE prévoit en son premier alinéa que : « L'opérateur donneur ne peut facturer les coûts de portage à l'abonné. » Ainsi, l'opérateur donneur ne peut faire payer un abonné qui résilie son contrat et demande à cette occasion à conserver son numéro.
Pour autant, comme il a été vu au paragraphe précédent, le CPCE ouvre la possibilité de recouvrer des coûts de conservation des numéros auprès d'abonnés entrants, à condition que la tarification reste raisonnable. Dans ce cas, l'opérateur est naturellement incité à ne pas décourager l'arrivée de nouveaux clients.
De même, lorsqu'il recouvre ses coûts via son activité générale, l'opérateur est soumis à la pression du jeu concurrentiel et est donc naturellement incité à modérer ses tarifs.
En revanche, l'opérateur en sa qualité d'opérateur donneur peut recouvrer ses coûts partiellement via la facturation d'une prestation de « portabilité sortante » à l'opérateur receveur. L'article L. 44 du code des postes et des communications électroniques prévoit que les tarifs de la prestation de « portabilité sortante » sont orientés vers les coûts : « Les opérateurs prévoient les dispositions nécessaires dans les conventions d'accès et d'interconnexion, à des tarifs reflétant les coûts correspondants. » Par ailleurs, chaque opérateur ayant intérêt individuellement à ne pas prendre à sa charge ces coûts, la question de la part des coûts recouvrables auprès de l'opérateur receveur ne trouve pas d'équilibre naturel et doit donc être précisée conformément aux dispositions du cadre réglementaire en vigueur.

II-3. Modes de recouvrement des coûts de l'opérateur attributaire

L'opérateur attributaire doit maintenir une liste des numéros dont il est attributaire et ayant fait l'objet d'une demande de conservation. Cette liste précise la référence du réseau sur lequel le numéro est actuellement actif. A cette fin, l'opérateur receveur informe l'opérateur attributaire du portage d'un numéro sur son réseau. Il fait droit aux demandes des opérateurs tiers souhaitant connaitre cette liste. Conformément à l'article D. 406-19-II du CPCE, « l'opérateur attributaire peut recouvrer les coûts encourus pour la transmission de ces informations ».
Pour remplir cette obligation, l'opérateur encourt des coûts pour la constitution et le maintien de cette liste, d'une part, et pour sa transmission, d'autre part.
La transmission de ces informations se faisant au bénéfice des opérateurs tiers ayant demandé communication de cette liste, les coûts de transmission peuvent être recouvrés auprès de ces opérateurs.
Les coûts de constitution et de maintien de la liste des numéros portés peuvent être recouvrés auprès de deux sources, non exclusives l'une de l'autre. Ces sources sont :
― la facturation d'une prestation de « portabilité attributaire » à l'opérateur receveur qui demande le transfert d'un numéro suite à la demande d'un de ses clients lors de la souscription d'une offre de détail ;
― l'activité générale de l'opérateur via la tarification de ses offres de détail. Le coût reste à sa charge et il est finalement supporté par l'ensemble de ses abonnés.
Lorsqu'il recouvre ses coûts via son activité générale, l'opérateur est soumis à la pression du jeu concurrentiel et est donc naturellement incité à modérer ses tarifs.
En revanche, l'opérateur en sa qualité d'opérateur attributaire peut recouvrer ses coûts partiellement via la facturation d'une prestation de « portabilité attributaire » à l'opérateur receveur. Chaque opérateur ayant intérêt individuellement à ne pas prendre à sa charge ces coûts, la question de la part des coûts recouvrables auprès de l'opérateur receveur ne trouve pas d'équilibre naturel et doit donc être précisée conformément aux dispositions du cadre réglementaire en vigueur.

III. - Mécanismes de comptabilisation,
principes de recouvrement et méthodes de tarification

L'Autorité estime donc nécessaire de préciser les mécanismes permettant de recouvrer les coûts induits par cette nouvelle fonctionnalité par les opérateurs en leur qualité d'opérateur donneur et/ou attributaire vis-à-vis d'un opérateur receveur au regard de quatre objectifs précédemment cités que sont :
― promouvoir l'efficacité économique ;
― favoriser une concurrence durable ;
― optimiser les avantages pour le consommateur ;
― assurer une rémunération raisonnable des capitaux employés.
Dans ce qui suit l'Autorité étudie comment les principes ci-dessus s'appliquent à la typologie de coûts et aux méthodes de recouvrement précédemment exposées.

III-1. Promouvoir l'efficacité économique

L'Autorité estime qu'il est quasiment impossible pour un opérateur de comptabiliser de manière effective l'ensemble des coûts induits par la mise en œuvre de l'obligation de portabilité. En effet, la fonctionnalité de portabilité des numéros étant imbriquée avec l'ensemble des grandes fonctionnalités des opérateurs (systèmes d'informations, réseaux, commercialisation), elles-mêmes dépendant des caractéristiques propres à chaque opérateur, la mise en œuvre d'une comptabilisation réglementaire propre à cette fonctionnalité serait irréalisable et induirait des coûts de contrôle disproportionnés.
Par ailleurs, afin de promouvoir l'efficacité économique, les coûts pertinents induits par le mécanisme de conservation des numéros mobiles doivent respecter le principe d'efficacité ; les inefficacités éventuelles d'un opérateur ne peuvent être prises en compte dans la formation du tarif de portabilité. Les coûts pertinents sont donc ceux d'un opérateur efficace mettant en œuvre le processus de conservation des numéros précisé par la décision n° 2006-0381 susvisée.

III-2. Favoriser une concurrence durable

Dans un marché déjà développé, la concurrence entre les acteurs ne peut être durable que si ce marché est suffisamment fluide de sorte que les opérateurs aient une véritable incitation à être compétitifs pour tenter de conquérir de nouveaux clients, mais aussi pour conserver leurs propres abonnés. Sans cette fluidité, les opérateurs risqueraient au contraire d'être incités à « exploiter » une base d'abonnés captifs.
Parmi les conditions essentielles de l'émergence d'une concurrence durable, on peut citer l'absence de barrière à l'entrée et le faible niveau des coûts de changement d'opérateur pour les utilisateurs finals. Au cas d'espèce, les coûts d'acquisition de clients par les nouveaux entrants doivent être proportionnés de manière à favoriser une concurrence saine entre les différents acteurs. Des tarifs trop élevés constitueraient en effet une barrière à l'entrée pour les nouveaux entrants et induirait des coûts de changement d'opérateur plus élevés pour les clients finals, ce qui limiterait le jeu concurrentiel.

III-3. Optimiser les avantages des consommateurs

La pratique de tarifs de portabilité inter-opérateurs élevés inciterait les opérateurs receveurs à en répercuter les coûts sur les nouveaux abonnés. Ces coûts de changements réduiraient la fluidité du marché, ce qui nuirait au jeu concurrentiel, et limiterait la pression à la baisse sur les tarifs de détail proposés aux utilisateurs finals. Ceci serait particulièrement sensible sur les petits consommateurs et les clients de formules prépayées pour qui ce coût représenterait une part importante du coût induit par le changement d'opérateur.
Par ailleurs, l'Autorité observe que proposer aux clients la possibilité de conserver leur numéro est une obligation pour chaque opérateur envers l'ensemble de ses abonnés, que ceux-ci décident de faire jouer ce droit, ou non. Cette obligation est de nature « symétrique », i.e. elle s'impose au titre des règles liées aux activités d'opérateur, et bénéficie à l'ensemble des utilisateurs finals. Les coûts liés à la conception, la modification ou la maintenance des systèmes d'un opérateur pour rendre possible la conservation du numéro sont donc supportés par chaque opérateur pour ses propres abonnés, et les coûts qu'il encourt à ce titre dépendent principalement du nombre d'abonnés qu'il possède (2) et non du nombre d'abonnés qui le quittent en invoquant leur droit à conserver leur numéro.

(2) Au-delà d'une part fixe indépendante du nombre d'abonnés.


Historique des versions

Version 1

I. - Typologie des coûts induits

par la conservation des numéros

La mise en œuvre de la fonctionnalité de conservation du numéro se traduit par de nombreuses modifications ou adaptations des systèmes d'information existants et des processus internes de l'entreprise. L'ensemble des grands postes de coûts des opérateurs sont donc impactés par la conservation du numéro. Ces postes de coûts sont de manière générale les suivants :

― les coûts de systèmes d'information ;

― les coûts de réseau ;

― les coûts commerciaux.

La délimitation précise de l'ensemble des charges découlant de la mise en œuvre de l'obligation de conservation du numéro est alors particulièrement complexe. Certains coûts de conservation des numéros font ainsi partie intégrante de coûts d'investissement et d'exploitation de l'opérateur, sans qu'il soit pour autant possible de mesurer précisément l'écart avec les coûts qui auraient été supportés si cette fonctionnalité n'était pas obligatoire. Les systèmes d'information auraient été relativement moins complexes, les choix d'architecture peut-être différents.

Pour autant, certains coûts de mise en œuvre de la conservation des numéros sont directement observables car strictement spécifiques à la mise en œuvre de cette fonctionnalité. Il peut s'agir par exemple des coûts liés au serveur vocal interactif prévu par l'article 5 de la décision n° 2006-0381 susvisée, destiné à renseigner les clients désireux de conserver leur numéro.

L'ensemble des coûts encourus par un opérateur lui permet de remplir les trois fonctions qui lui incombent suivant les circonstances :

― en tant qu'opérateur receveur : il doit recevoir la demande du client de conserver son numéro lors de la souscription d'un nouveau contrat et lui donner effet ;

― en tant qu'opérateur donneur : il doit recevoir la demande de l'opérateur receveur de transférer un numéro faisant l'objet d'une demande de conservation et lui donner effet ;

― en tant qu'opérateur attributaire : il doit recevoir les demandes des opérateurs tiers souhaitant connaître la liste des numéros dont il est attributaire et ayant fait l'objet d'une demande de conservation et y faire droit.

Certains de ces coûts sont clairement identifiables et affectables à chacune de ces fonctions, mais la plupart d'entre eux ne le sont pas (exemple : le coût de mise à disposition du RIO est attribuable à la fonction d'opérateur donneur). Mais d'autres sont joints pour l'ensemble de ces trois fonctions (exemple : le coût de conception et de gestion du projet de déploiement des systèmes de portabilité ne peut être alloué qu'à l'ensemble des trois fonctions). Enfin, de nombreux coûts induits le sont dans des postes de coûts qui découlent de l'activité générale d'opérateur indépendamment de l'obligation de portabilité (exemple : l'insertion dans un support de facturation, ou sur un espace client sur un site internet, de la mention du RIO induit un surcoût dans la fonction facturation, ou espace client internet, lors de sa mise en place sans impliquer nécessairement une hausse du coût de production des factures ou d'édition de l'espace client internet).

En outre, l'adaptation de son organisation à cette obligation peut être l'occasion d'introduire de manière simultanée d'autres modifications d'organisation indépendantes de l'obligation de conservation du numéro tout en mutualisant un certain nombre de coûts à cette occasion.

II. - Modes de recouvrement des coûts

II-1. Modes de recouvrement des coûts de l'opérateur receveur

L'opérateur receveur offre à son client la possibilité de conserver son numéro. A ce titre, il prend en charge l'ensemble de la mise en œuvre de cette demande, y compris la résiliation de la ligne sur laquelle le numéro était précédemment actif. Cette prestation lui permet d'acquérir de nouveaux abonnés et ainsi de développer son activité commerciale de fournisseur de communications électroniques.

Les coûts subis par l'opérateur receveur peuvent être recouvrés selon les deux modes suivants :

― auprès de l'abonné qui fait une demande de conservation du numéro, via un tarif spécifique et explicite de l'offre de conservation du numéro ;

― au titre de son activité générale d'opérateur, via ses tarifs de détails (frais d'accès au service, abonnement mensuel, tarif des communications électroniques, etc.). Le coût reste à sa charge et est finalement supporté par l'ensemble de ses abonnés sans tarification explicite et identifiée de cette prestation offerte.

La possibilité de recouvrer auprès de son nouvel abonné des coûts générés par le portage du numéro demandé est toutefois encadrée. L'article L. 44 du CPCE dispose en effet :

« Les opérateurs sont tenus de proposer à un tarif raisonnable à leurs abonnés les offres permettant à ces derniers de conserver leur numéro [...] non géographique, fixe ou mobile [...]. »

La mise en œuvre de la conservation du numéro se faisant au bénéfice de l'opérateur receveur, qui peut ainsi développer son activité auprès de nouveaux clients, cet opérateur est naturellement incité à pratiquer une tarification raisonnable. Il ne convient donc pas de préciser plus avant les modalités de recouvrements des coûts qu'il encourt en sa capacité d'opérateur receveur.

II-2. Modes de recouvrement des coûts de l'opérateur donneur

En théorie, l'ensemble des coûts subis par l'opérateur en sa qualité d'opérateur donneur et présentés précédemment peuvent être recouvrés auprès de trois sources, non exclusives les unes des autres. Ces sources sont :

― la facturation d'une prestation de « portabilité sortante » à son abonné lorsque celui-ci résilie son contrat et demande à conserver son numéro ;

― la facturation d'une prestation de « portabilité sortante » à l'opérateur receveur qui demande le transfert d'un numéro suite à la demande d'un de ses clients lors de la souscription d'une offre de détail ;

― l'activité générale de l'opérateur via la tarification de ses offres de détail sans qu'il existe un tarif spécifique et identifié de cette prestation. Le coût reste à sa charge et il est finalement supporté par l'ensemble de ses abonnés, qu'ils exercent ou non leur droit à conserver leur numéro en cas de changement d'opérateur.

Parmi ces possibilités théoriques, l'une est exclue par le cadre réglementaire, puisque l'article D. 406-19 du CPCE prévoit en son premier alinéa que : « L'opérateur donneur ne peut facturer les coûts de portage à l'abonné. » Ainsi, l'opérateur donneur ne peut faire payer un abonné qui résilie son contrat et demande à cette occasion à conserver son numéro.

Pour autant, comme il a été vu au paragraphe précédent, le CPCE ouvre la possibilité de recouvrer des coûts de conservation des numéros auprès d'abonnés entrants, à condition que la tarification reste raisonnable. Dans ce cas, l'opérateur est naturellement incité à ne pas décourager l'arrivée de nouveaux clients.

De même, lorsqu'il recouvre ses coûts via son activité générale, l'opérateur est soumis à la pression du jeu concurrentiel et est donc naturellement incité à modérer ses tarifs.

En revanche, l'opérateur en sa qualité d'opérateur donneur peut recouvrer ses coûts partiellement via la facturation d'une prestation de « portabilité sortante » à l'opérateur receveur. L'article L. 44 du code des postes et des communications électroniques prévoit que les tarifs de la prestation de « portabilité sortante » sont orientés vers les coûts : « Les opérateurs prévoient les dispositions nécessaires dans les conventions d'accès et d'interconnexion, à des tarifs reflétant les coûts correspondants. » Par ailleurs, chaque opérateur ayant intérêt individuellement à ne pas prendre à sa charge ces coûts, la question de la part des coûts recouvrables auprès de l'opérateur receveur ne trouve pas d'équilibre naturel et doit donc être précisée conformément aux dispositions du cadre réglementaire en vigueur.

II-3. Modes de recouvrement des coûts de l'opérateur attributaire

L'opérateur attributaire doit maintenir une liste des numéros dont il est attributaire et ayant fait l'objet d'une demande de conservation. Cette liste précise la référence du réseau sur lequel le numéro est actuellement actif. A cette fin, l'opérateur receveur informe l'opérateur attributaire du portage d'un numéro sur son réseau. Il fait droit aux demandes des opérateurs tiers souhaitant connaitre cette liste. Conformément à l'article D. 406-19-II du CPCE, « l'opérateur attributaire peut recouvrer les coûts encourus pour la transmission de ces informations ».

Pour remplir cette obligation, l'opérateur encourt des coûts pour la constitution et le maintien de cette liste, d'une part, et pour sa transmission, d'autre part.

La transmission de ces informations se faisant au bénéfice des opérateurs tiers ayant demandé communication de cette liste, les coûts de transmission peuvent être recouvrés auprès de ces opérateurs.

Les coûts de constitution et de maintien de la liste des numéros portés peuvent être recouvrés auprès de deux sources, non exclusives l'une de l'autre. Ces sources sont :

― la facturation d'une prestation de « portabilité attributaire » à l'opérateur receveur qui demande le transfert d'un numéro suite à la demande d'un de ses clients lors de la souscription d'une offre de détail ;

― l'activité générale de l'opérateur via la tarification de ses offres de détail. Le coût reste à sa charge et il est finalement supporté par l'ensemble de ses abonnés.

Lorsqu'il recouvre ses coûts via son activité générale, l'opérateur est soumis à la pression du jeu concurrentiel et est donc naturellement incité à modérer ses tarifs.

En revanche, l'opérateur en sa qualité d'opérateur attributaire peut recouvrer ses coûts partiellement via la facturation d'une prestation de « portabilité attributaire » à l'opérateur receveur. Chaque opérateur ayant intérêt individuellement à ne pas prendre à sa charge ces coûts, la question de la part des coûts recouvrables auprès de l'opérateur receveur ne trouve pas d'équilibre naturel et doit donc être précisée conformément aux dispositions du cadre réglementaire en vigueur.

III. - Mécanismes de comptabilisation,

principes de recouvrement et méthodes de tarification

L'Autorité estime donc nécessaire de préciser les mécanismes permettant de recouvrer les coûts induits par cette nouvelle fonctionnalité par les opérateurs en leur qualité d'opérateur donneur et/ou attributaire vis-à-vis d'un opérateur receveur au regard de quatre objectifs précédemment cités que sont :

― promouvoir l'efficacité économique ;

― favoriser une concurrence durable ;

― optimiser les avantages pour le consommateur ;

― assurer une rémunération raisonnable des capitaux employés.

Dans ce qui suit l'Autorité étudie comment les principes ci-dessus s'appliquent à la typologie de coûts et aux méthodes de recouvrement précédemment exposées.

III-1. Promouvoir l'efficacité économique

L'Autorité estime qu'il est quasiment impossible pour un opérateur de comptabiliser de manière effective l'ensemble des coûts induits par la mise en œuvre de l'obligation de portabilité. En effet, la fonctionnalité de portabilité des numéros étant imbriquée avec l'ensemble des grandes fonctionnalités des opérateurs (systèmes d'informations, réseaux, commercialisation), elles-mêmes dépendant des caractéristiques propres à chaque opérateur, la mise en œuvre d'une comptabilisation réglementaire propre à cette fonctionnalité serait irréalisable et induirait des coûts de contrôle disproportionnés.

Par ailleurs, afin de promouvoir l'efficacité économique, les coûts pertinents induits par le mécanisme de conservation des numéros mobiles doivent respecter le principe d'efficacité ; les inefficacités éventuelles d'un opérateur ne peuvent être prises en compte dans la formation du tarif de portabilité. Les coûts pertinents sont donc ceux d'un opérateur efficace mettant en œuvre le processus de conservation des numéros précisé par la décision n° 2006-0381 susvisée.

III-2. Favoriser une concurrence durable

Dans un marché déjà développé, la concurrence entre les acteurs ne peut être durable que si ce marché est suffisamment fluide de sorte que les opérateurs aient une véritable incitation à être compétitifs pour tenter de conquérir de nouveaux clients, mais aussi pour conserver leurs propres abonnés. Sans cette fluidité, les opérateurs risqueraient au contraire d'être incités à « exploiter » une base d'abonnés captifs.

Parmi les conditions essentielles de l'émergence d'une concurrence durable, on peut citer l'absence de barrière à l'entrée et le faible niveau des coûts de changement d'opérateur pour les utilisateurs finals. Au cas d'espèce, les coûts d'acquisition de clients par les nouveaux entrants doivent être proportionnés de manière à favoriser une concurrence saine entre les différents acteurs. Des tarifs trop élevés constitueraient en effet une barrière à l'entrée pour les nouveaux entrants et induirait des coûts de changement d'opérateur plus élevés pour les clients finals, ce qui limiterait le jeu concurrentiel.

III-3. Optimiser les avantages des consommateurs

La pratique de tarifs de portabilité inter-opérateurs élevés inciterait les opérateurs receveurs à en répercuter les coûts sur les nouveaux abonnés. Ces coûts de changements réduiraient la fluidité du marché, ce qui nuirait au jeu concurrentiel, et limiterait la pression à la baisse sur les tarifs de détail proposés aux utilisateurs finals. Ceci serait particulièrement sensible sur les petits consommateurs et les clients de formules prépayées pour qui ce coût représenterait une part importante du coût induit par le changement d'opérateur.

Par ailleurs, l'Autorité observe que proposer aux clients la possibilité de conserver leur numéro est une obligation pour chaque opérateur envers l'ensemble de ses abonnés, que ceux-ci décident de faire jouer ce droit, ou non. Cette obligation est de nature « symétrique », i.e. elle s'impose au titre des règles liées aux activités d'opérateur, et bénéficie à l'ensemble des utilisateurs finals. Les coûts liés à la conception, la modification ou la maintenance des systèmes d'un opérateur pour rendre possible la conservation du numéro sont donc supportés par chaque opérateur pour ses propres abonnés, et les coûts qu'il encourt à ce titre dépendent principalement du nombre d'abonnés qu'il possède (2) et non du nombre d'abonnés qui le quittent en invoquant leur droit à conserver leur numéro.

(2) Au-delà d'une part fixe indépendante du nombre d'abonnés.