JORF n°185 du 11 août 2006

Chapitre 2 : Définition des marchés

2.1. Introduction

La délimitation des marchés a pour but de définir le contour, en termes de services et en termes géographiques, des marchés susceptibles d'être régulés ex ante. Conformément aux lignes directrices de la Commission européenne précitées, dont l'Autorité doit tenir le plus grand compte en vertu de l'article D. 301 du code des postes et des communications électroniques (CPCE), cet exercice est effectué dans le respect des principes issus du droit de la concurrence.

2.1.1. Délimitation des marchés en termes de produits et services

La délimitation des marchés du point de vue des services repose sur l'analyse de :
- la substituabilité du côté de la demande : deux produits appartiennent à un même marché s'ils sont suffisamment interchangeables pour leurs utilisateurs, du point de vue de l'usage qui est fait des produits et services, de leurs caractéristiques, de leur tarification, de leurs conditions de distribution, des coûts de « migration » d'un produit vers l'autre, etc. Il ressort de la jurisprudence qu'indépendamment des réglementations publiques, trois facteurs sont généralement retenus pour différencier des marchés concernant des produits présentant des caractéristiques techniques identiques ou similaires : les qualités particulières du produit, ses conditions d'utilisation et son mode de commercialisation ;
- la substituabilité du côté de l'offre : il y a substituabilité du côté de l'offre lorsqu'un opérateur qui n'est pas actuellement présent sur un marché donné est susceptible d'y entrer rapidement et sans s'exposer à des frais trop importants en réponse à une augmentation du prix des produits qui y sont vendus. Si l'on constate que le passage des entreprises d'un marché à l'autre est aisé et ne se heurte qu'à de faibles barrières à l'entrée (peu de différences suscitant des adaptations techniques de production et d'outillages, caractère raisonnable des délais et investissements afférents à la modification des installations de production), la faculté des offreurs présents sur l'un ou l'autre de ces marchés à s'abstraire de la concurrence serait inexistante et il conviendrait de traiter ces marchés comme un marché unique ;
- un troisième critère pouvant être analysé est lié à l'existence de contraintes concurrentielles et notamment de prix communes, au-delà des deux premiers critères. Sur les marchés analysés certains produits mutuellement non substituables, notamment du fait des usages, ne sont vendus ou consommés que de manière liée : cela peut être par exemple le cas d'une gamme de services offerts dans des bouquets. Il pourrait alors être pertinent d'inclure les services dans le même marché.
Pour établir l'existence d'une éventuelle substituabilité du côté de la demande ou de l'offre, l'analyse peut impliquer la mise en oeuvre de la méthode dite du « test du monopoleur hypothétique », ainsi que le suggèrent les lignes directrices de la Commission. Du côté de la demande, ce test consiste à étudier les effets qu'aurait sur les consommateurs une augmentation légère mais sensible et durable des prix d'un service (10 à 15 % par exemple), de manière à déterminer par exemple s'il existe des services considérés par les demandeurs comme substituables aux services à examiner. Ainsi que le mentionnent les lignes directrices, l'utilité essentielle de cet outil réside dans son caractère conceptuel ; sa mise en oeuvre n'implique donc pas d'étude économétrique systématique poussée.

2.1.2. Délimitation des marchés en termes géographiques

Il est rappelé au point 56 des lignes directrices susvisées que, « selon une jurisprudence constante, le marché géographique pertinent peut être défini comme le territoire sur lequel les entreprises concernées engagées dans la fourniture ou la demande des produits ou services sont exposées à des conditions de concurrence similaires ou suffisamment homogènes et qui se distingue des territoires voisins sur lesquels les conditions de concurrence sont sensiblement différentes ».
Deux principaux critères permettent, selon les lignes directrices de la commission (§ 59), de procéder à la délimitation géographique des marchés de communications électroniques : d'une part, le territoire effectivement couvert par les réseaux, d'autre part, l'existence d'instruments de nature juridique conduisant en pratique à distinguer telle ou telle zone géographique ou, au contraire, à considérer que le marché est de dimension nationale.

2.2. Présentation du marché de détail

L'Autorité évoque ici le marché de détail en tant que marché associé au marché de gros. En revanche, cet examen n'entraîne aucune conséquence en termes de délimitation de marché pertinent, et plus généralement en termes de qualification juridique.
En France, le SMS (Short Message Service) a connu un très fort développement depuis la signature des accords d'interopérabilité intervenue en décembre 1999. En effet, près de 13 milliards de SMS ont été envoyés sur les réseaux mobiles métropolitains en 2005 (contre 1,5 milliard en 2000), soit une multiplication par huit et demi en six ans, dégageant un chiffre d'affaires de plus d'un milliard d'euros (contre 151 millions d'euros en 2000) (30). L'appétence des consommateurs pour le SMS, loin de se tarir, semble au contraire redoubler avec l'arrivée de nouveaux services à valeur ajoutée (SMS +, MMS, etc.).
En fonction des différents usages dont il est le support, le SMS peut être rattaché à plusieurs activités de détail distinctes :
- les données interpersonnelles mobiles ;
- les services en ligne qui incluent notamment les services payants en ligne (contenus) et ceux de la distribution en ligne (marketing direct).
Dans le premier cas, le SMS est le plus souvent vecteur d'une conversation entre deux personnes physiques. Cependant, dans le cas des SMS à usage professionnel, il peut aussi s'agir d'une conversation entre un homme et une machine (par exemple entre un releveur de compteur d'eau et la base de données), voire entre deux machines (par exemple pour la mise à jour d'un panneau d'affichage). Cette activité représente plus de 85 % des envois de SMS en volume et permet une communication discrète et asynchrone entre deux ou plusieurs personnes dont l'une au moins se trouve en situation de mobilité.

Dans le second cas, les services en ligne depuis les mobiles représentent moins de 15 % des envois de SMS en volume et regroupent les services relevant de la distribution de services ou de contenus en ligne via un support de communication électronique :
- pour les services payants en ligne (contenus), le SMS est le vecteur d'un échange entre un éditeur de services et un client. Généralement, l'utilisateur accède à un contenu payant, surtaxé ou non, via son terminal. Ce marché (moins de 5 % en volume) implique un grand nombre d'acteurs qui vont de l'éditeur de services à l'utilisateur final en passant par de nombreux intermédiaires (opérateurs, agrégateurs, FAI, etc.) ;
- pour le marketing direct (5 à 10 % en volume), le SMS est le vecteur d'un message publicitaire envoyé par un annonceur (opérateurs, agrégateurs, éditeurs, etc.) à une cible commerciale ayant donné son consentement (base opt-in).
Cette partie, à la fois descriptive et prospective, a pour but de mieux appréhender ces trois activités de détail.

2.2.1. Les communications interpersonnelles mobiles non vocales

L'essor des communications interpersonnelles initialement porté par la voix a été soutenu au cours des cinq dernières années par le développement des services de données. On peut identifier au niveau du détail un premier segment relatif aux communications de données interpersonnelles incluant notamment le SMS, le MMS et l'internet mobile (e-mail, Instant Messaging, etc.). Ces différents médias, bien qu'appartenant à des réseaux distincts, ont en commun d'introduire une communication écrite et asynchrone entre plusieurs utilisateurs en situation de mobilité et illustrent le phénomène de convergence des réseaux.

2.2.1.1. Le développement du SMS interpersonnel
2.2.1.1.1. Un succès immédiat depuis la signature des accords d'interopérabilité
intervenue en décembre 1999 pour la métropole et en 2003 pour l'outre-mer

Entre le 1er janvier 2000 et le 31 décembre 2005, le nombre de SMS envoyés annuellement à été multiplié par 8,6, passant de 1,47 milliard à 12,71 milliards.
Cette croissance s'explique à la fois par la croissance du nombre de clients mobiles (effets de parc) et par le développement des usages spécifiques liés au SMS. En effet, le parc d'utilisateurs a, sur la période considérée, plus que doublé, passant de 22 635 600 au début de l'année 2000 à 48 099 156 à la fin de l'année 2005 (31).
Parallèlement, le nombre de SMS mensuel moyen par abonné sur le marché français a été multiplié par plus de 3, passant de 7 à 23 entre 2001 et 2005. A titre de comparaison, il convient de signaler que le trafic voix, mesuré par le volume mensuel moyen par client, est passé sur la même période de 113 minutes (1 heure et 53 minutes) à 154 minutes (2 heures 34 minutes), soit une progression de 36 % en cinq ans.
Le graphique suivant présente l'évolution comparée des trafics SMS et Voix en volume corrigé des effets de parc (32) entre le 1er janvier 2001 et le 31 décembre 2005. Il ressort ainsi qu'au cours des cinq dernières années, les usages liés au SMS se sont développés deux fois et demie plus vite que ceux liés à la voix.

(31) Source : ARCEP, Observatoire des marchés.
(32) Les trafics moyens SMS et Voix par client actif par mois sont calculés en divisant le volume total de trafic SMS et Voix par le parc actif. Cette manière de procéder permet d'isoler la partie concernant le développement des usages de la partie du trafic due à l'accroissement du nombre de clients (effets de parc).

2.2.1.1.2. Plus qu'un simple medium, le SMS est devenu
en quelques années un véritable phénomène de société

Toutefois, on ne peut pas comprendre l'essor du SMS sans en évoquer les dimensions sociologiques et culturelles.
En effet, comme l'ont souligné l'ensemble des acteurs dans leur réponse au questionnaire de l'ARCEP portant sur les services de communications mobiles SMS, le SMS est devenu pour une certaine catégorie de population, notamment les moins de 25 ans, un nouveau medium à la fois pratique et discret, mais aussi une nouvelle façon de communiquer.
Selon le CREDOC, 64 % des individus équipés d'un téléphone mobile envoient des SMS. Plus précisément « 97 % des 12-24 ans envoient régulièrement des SMS », contre seulement 20 % des sexagénaires (33). Même si cette pratique se diffuse petit à petit à l'ensemble de la population française, la communication par SMS demeure l'apanage de la jeunesse. Comme le montre le tableau suivant, les moins de 25 ans équipés d'un téléphone portable envoient environ 24 SMS par semaine, contre 3 seulement pour les 60 ans et plus.

Nombre de SMS envoyés par semaine

Ainsi, le SMS est devenu en quelques années un véritable phénomène de société, générateur de nouvelles normes sociales, parfois source de conflits intergénérationnels.

2.2.1.1.3. Le SMS interpersonnel : un medium arrivé à maturité

Si le service pouvait encore être considéré comme émergent cinq ou six ans auparavant, il n'en va plus de même aujourd'hui.
En effet, le SMS est, après la voix, le service mobile le plus ancien. Le premier SMS a été émis en 1992 par l'opérateur Vodafone, tandis que la signature des accords d'interopérabilité, événement qui a véritablement permis au service de décoller en métropole, est intervenue dès le mois de décembre 1999.
Par ailleurs, la croissance du SMS interpersonnel, de l'ordre de 150 % entre 2000 et 2001 (cf. tableau et graphique suivants), s'est fortement ralentie les années suivantes pour se stabiliser en 2004 autour de 25 % (27,2 % en volume, 20,4 % en valeur).

Croissance de la messagerie interpersonnelle sur la période 2000-2004

Malgré l'attrait exercé par les nouveaux services à valeur ajoutée tels que le MMS (Multimédia Message Service), il est intéressant de noter que le SMS continue de croître et de se diffuser à l'ensemble de la population française.

2.2.1.2. Le décollage récent des nouveaux services de messagerie mobile

Le succès du SMS a soutenu ces dernières années l'essor de nouveaux services de messagerie, notamment ceux du MMS (Multimédia Message Service) et de l'Internet mobile qui permettent l'envoi de messages instantanés ou de contenus multimédia (textes, sons, photos, vidéos, etc.). Techniquement, l'envoi de MMS se fait uniquement sur les réseaux GPRS, EDGE et UMTS, tandis que les services liés à l'Internet mobile (e-mail, Instant Messaging, etc.) peuvent également être accessibles via le protocole Wap.
Un accord d'interopérabilité MMS entre les opérateurs mobiles métropolitains a été conclu en juin 2003. Ces nouveaux services permettent une communication plus élaborée, par exemple en offrant la possibilité d'envoyer une image prise par un téléphone disposant d'un appareil photo intégré. A court terme, ces nouveaux services de messagerie demeurent toutefois limités.
Si 8 % des possesseurs de téléphone mobile avaient déjà envoyé un MMS en 2003, leur proportion s'élève à 11 % en 2004 (34). La progression n'est pas spectaculaire, mais elle témoigne d'un certain dynamisme. Le développement des ventes de téléphone portable avec appareil photo numérique intégré contribue pour beaucoup à la croissance des MMS. Au 31 décembre 2005, le parc multimédia mobile (35) s'élevait ainsi à 14,2 millions, soit près de 30 % du parc total de clients.

Comparaison du parc multimédia mobile et du parc total de la téléphonie mobile

Parmi les services intégrés aux terminaux multimédia, on peut également citer la possibilité de consulter Internet ou sa messagerie électronique. D'après l'étude précitée du CREDOC, une part croissante des possesseurs de téléphone mobile utilisent leur terminal pour naviguer sur Internet. La proportion est cependant assez faible, mais elle progresse régulièrement d'année en année : 10 % en 2005, contre 5 % deux ans plus tôt. Dans le même temps, la proportion de ceux qui consultent leurs e-mails depuis sur leur terminal mobile est passé de 4 à 7 %. Dans l'ensemble, on ne peut cependant pas dire que les Français se précipitent sur ce moyen pour accéder à Internet. Certes, en valeur absolue, le nombre des « Mobinautes » est loin d'être négligeable - il s'élèverait à plus de deux millions de personnes en France -, mais l'augmentation annuelle du nombre d'utilisateurs demeure limitée.

2.2.2. Les services en ligne depuis les mobiles

La seconde activité de détail à laquelle peut être rattaché le SMS concerne les services en ligne, qui regroupent les services relevant de la distribution de services ou de contenus en ligne via un support de communication électronique, tous médias confondus (minitel, wap, i-mode, internet, etc.).
Cette activité nécessite une connexion préalable donc un terminal compatible et met en relation l'utilisateur final avec un éditeur de services. Généralement, l'utilisateur accède à un contenu payant - surtaxé ou non - via son terminal. Elle implique un plus grand nombre d'acteurs qui vont de l'éditeur de services à l'utilisateur final en passant par de nombreux intermédiaires (opérateurs, agrégateurs, FAI, etc.).
D'après l'ACSEL (Association pour le commerce et les services en ligne), ces services représentent, tous médias confondus, un chiffre d'affaires d'environ 1,65 milliard d'euros en 2004 - dont environ 200 millions d'euros pour les mobiles en 2004 -, encore en croissance et qui devrait atteindre de 2,5 à 5 milliards d'euros à l'horizon 2006-2007 (36). L'envoi de SMS de contenus (dont le SMS + n'est qu'une offre parmi d'autres) représente environ 5 % des envois de SMS en volume, soit 500 millions de SMS.
Cette activité peut être scindée en deux : le segment des services payants en ligne qui s'adresse principalement aux consommateurs et le segment de la distribution en ligne (marketing direct) qui concerne surtout les éditeurs de services.

2.2.2.1. Prestations rendues au client final : les services payants en ligne
2.2.2.1.1. Description

Les services payants en ligne s'adressant aux clients résidentiels et non résidentiels mettent en relation le consommateur d'un service (service bancaire, hotline, etc.) ou d'un contenu (informations, météo, etc.) avec l'éditeur de ce service/contenu.
Ces éditeurs peuvent être très variés (médias, banques, etc.). D'après l'ACSEL, à peine plus d'une centaine d'entre eux créent et exploitent ce type de services qui représentent 80 % du marché en valeur.
Pour proposer leurs contenus en ligne, les éditeurs disposent de différents médias et de différents modes de distribution (cf. figure 13 ci-dessous) :
- soit ils utilisent la vente directe (modèle qui s'est beaucoup développé avec Internet) ;
- soit ils choisissent la distribution indirecte en passant par un kiosque ou un portail. Ces deux derniers moyens se sont particulièrement développés avec l'univers de la téléphonie mobile.

Figure 13 : Portail pour démarrer les usages - Kiosque pour élargir l'audience (37)

2.2.2.1.2. Description des offres kiosques des opérateurs
L'offre SMS +

La première offre de kiosque proposée par les trois opérateurs mobiles métropolitains est l'offre SMS +. Depuis 2002, elle permet aux éditeurs d'exploiter leurs propres services SMS, indépendamment des portails de services des opérateurs. Les relations entre les éditeurs et les opérateurs sont régies par l'association SMS + qui regroupe notamment Bouygues Telecom, Orange France et SFR. Au 1er juillet 2004, 300 services SMS + étaient activés auprès de ces trois opérateurs.
Les deux grands principes de SMS + sont, d'une part, un numéro court à 5 chiffres commun à Bouygues Telecom, Orange France et SFR, et, d'autre part, une tarification unique pour le client quel que soit son opérateur, organisée selon huit paliers tarifaires (cf. tableau suivant). Le client paye à son opérateur le prix d'un SMS pour le transport du SMS-MO, plus une surtaxe correspondant au prix du service dont le revenu est partagé entre l'éditeur de services et l'opérateur mobile.

Paliers tarifaires SMS +

Les services SMS + sont répartis en quatre thématiques principales :
- services de chat : environ 40 % des services ;
- services de divertissement : environ 25 % des services (jeux, concours, votes, etc.) ;
- services de personnalisation du mobile : environ un tiers des services (logos, sonneries, fonds d'écran, etc.) ;
- services pratiques : moins de 5 % des services (météo, bourse, actualités, relevés bancaires, etc.).

Les autres offres de kiosques (Gallery, VOX +, MMS +)

Gallery est un kiosque commun aux trois opérateurs de services mobiles surtaxés, regroupant des marques, accessibles par leur code ou à travers un index thématique et alphabétique.
Le client accède aux services proposés (information, météo, téléchargement de contenus, etc.) en payant une communication WAP ou HTML. Le paiement se fait à l'acte, à la journée ou au mois. L'achat figure sur la facture de l'opérateur mobile si le client possède un abonnement, ou bien est directement prélevé si le client utilise une carte prépayée.
VOX + et MMS + constituent des offres de kiosques en phase de pré-lancement ou d'étude. A la fois pour les clients et les éditeurs, ces nouveaux kiosques doivent permettre le développement des services de contenu mobiles :
- VOX + proposera des services vocaux avec un numéro court SMS + aux clients des opérateurs mobiles concernés. Ce service est en phase de prélancement ;
- le développement du kiosque MMS + est quant à lui en cours d'étude. Son principe est similaire à l'offre SMS +.

2.2.2.2. Prestations rendues aux éditeurs : le marché de la distribution en ligne ou marketing direct

La seconde activité de détail identifiée dans le cadre des services payants est la distribution en ligne s'adressant aux éditeurs. Elle met en relation un éditeur de services avec un opérateur « distribuant » ces services auprès de sa clientèle (marketing direct).
En effet, dans le cadre de la distribution indirecte, les opérateurs de téléphonie mobile sont un canal de distribution de contenu et proposent différents services :
- distribution auprès des clients finaux du contenu proposé par les éditeurs de services. Il peut, par exemple, s'agir de services réguliers pour lesquels le client a souscrit un abonnement auprès d'un éditeur (systèmes d'alerte bancaires, actualités sportives, bulletins météo, horoscopes, etc.), mais ces services peuvent également répondre à un besoin ponctuel. En général, le client, qui a donné son consentement pour être sollicité sur un sujet précis, reçoit un SMS de la part d'un éditeur lui proposant un service en rapport avec ses intérêts (places de concert, téléchargement d'une mélodie particulière, chat avec d'autres personnes, etc.). D'après les éditeurs, les taux de réponse à de telles campagnes varient entre 0 et 40 % si la campagne est bien ciblée ;
- facturation. Les opérateurs ou les agrégateurs de SMS assurent non seulement la facturation du transport, mais peuvent également se charger de celle du contenu. L'argent, ainsi prélevé pour le compte de l'éditeur, est reversé (moyennant une commission) par l'opérateur hôte à ce dernier. Dans ce cas, les opérateurs adaptent ou développent leur système interne de facturation, afin que ces petits montants puissent apparaître sur la facture de téléphone de leurs propres clients (38) ;
- campagnes publicitaires. Le SMS et le MMS sont de plus en plus utilisés par les grandes entreprises comme un vecteur de promotion de leur enseigne ou de leurs marques (39). Etant donné les retombées médiatiques généralement positives en terme d'image, certaines entreprises appartenant à des secteurs aussi différents que la grande distribution, l'automobile ou la banque, n'hésitent pas à consacrer des budgets de communication pour lancer de nouveaux produits auprès d'une clientèle majoritairement technophile. A la différence de la distribution de contenus en ligne qui crée un besoin immédiat chez le client final, ces campagnes publicitaires n'appellent pas nécessairement de réponse ;
- au-delà de l'offre SMS +, les canaux de distribution proposés par les opérateurs mobiles se diversifient et se multiplient. Ces derniers développent à la fois des kiosques communs (SMS +, MMS +, Gallery, etc.), mais aussi des portails qui leur sont propres (i-mode, 6e Sens, Orange World, Vodafone Live). L'éditeur désirant être présent sur ces différents canaux doit généralement payer des frais de référencement.
La relation sur ce segment d'activité entre le client final et l'éditeur aboutit dans la majorité des cas à la signature d'un contrat entre les éditeurs de services, d'une part, et les opérateurs mobiles et les agrégateurs, d'autre part.

2.2.3. Récapitulatif des usages du SMS selon l'origine des appels

En 2004, près de 11 milliards de SMS ont été envoyés au départ d'un terminal mobile. A titre de comparaison, le trafic fixe vers mobile représente un volume global de 6,5 millions de SMS. Le trafic d'origine mobile représente plus de 99 % de l'ensemble des SMS émis depuis un fixe ou un mobile.
Les SMS interpersonnels représentent plus de 85 % des envois de SMS. Les offres SMS + et Vote + (systèmes de vote par SMS) représentent quant à elles moins de 5 % des envois de SMS en volume.

Usages des SMS

2.3. Analyse de la substituabilité sur le marché de gros
2.3.1. Les différents modes de substitution
2.3.1.1. Point de départ de l'analyse

La présente décision analyse le marché de la terminaison d'appel SMS sur les réseaux téléphoniques publics mobiles français, à destination des clients de ces derniers.
La délimitation du marché pertinent correspondant part du marché le plus petit possible, à savoir la terminaison d'appel SMS sur le réseau mobile de l'opérateur B, depuis le réseau mobile d'un opérateur A. Il est ensuite nécessaire d'examiner la substituabilité du côté de la demande et du côté de l'offre afin de déterminer quel est l'ensemble des produits substituables.

2.3.1.2. Deux niveaux de substituabilité par la demande

Sur un marché de gros, il peut exister deux niveaux de substituabilité du service considéré :
- une substitution par un autre service de gros : il s'agit d'examiner l'ensemble des services de gros qui s'offrent à un opérateur pour fournir un même service de détail et d'étudier la substituabilité des services entre eux ;
- une substitution sur le marché de détail du service auquel est associé le produit de gros considéré. Le comportement du client final sur le marché de détail peut avoir des implications indirectes sur le marché de gros analysé, que ce soit sur sa définition ou son fonctionnement.
L'étude commence par l'analyse de la substituabilité sur le marché de gros, puisque, à une augmentation substantielle et non transitoire du tarif de terminaison d'appel SMS, c'est d'abord sur le marché de gros que peut s'opérer une substitution.

2.3.2. Analyse de la substituabilité du côté de la demande sur le marché de gros

En cas d'une augmentation sensible et durable de la charge de terminaison d'appel SMS, un opérateur tiers devant terminer un SMS à destination d'un abonné de l'opérateur mobile considéré, pourrait utiliser différents produits de gros :
- l'offre d'interconnexion SMS de l'opérateur mobile de destination adressée aux exploitants de réseau ouvert au public non mobile ;
- les offres d'interconnexion SMS d'un autre opérateur mobile ;
- les offres de SMS Push de l'opérateur mobile de destination ;
- les offres de SMS Push d'un agrégateur achetant des SMS Push sur le marché de gros à l'opérateur mobile considéré et les revendant sur ce même marché de gros ;
- le reroutage par l'international ;
- des offres d'interconnexion de l'opérateur mobile utilisant d'autres réseaux que le réseau GSM lorsque de telles offres existent.
La délimitation du marché de gros passe par l'analyse de la substituabilité de ces différents produits, en supposant que le marché contient au minimum l'offre d'interconnexion.

2.3.2.1. Substituabilité entre les différentes offres d'interconnexion SMS
offertes par un même opérateur mobile de destination

En l'état actuel des architectures des réseaux, notamment mobiles, il n'existe pas aujourd'hui d'offre d'interconnexion SMS que les opérateurs mobiles mettraient en place à destination des exploitants de réseau ouvert au public non mobile (opérateurs fixes, agrégateurs de SMS, etc.). Dans ce contexte, pour acheminer un SMS sur le réseau mobile de l'opérateur de destination, ces acteurs recourent aux offres de SMS Push de ce même opérateur. Contrairement aux « contrats d'interfonctionnement point à point pour l'envoi et la réception de messages courts » qui précisent les règles d'interconnexion entre deux exploitants de réseau mobile, ces contrats de SMS Push apparaissent sous la forme de contrats commerciaux proposés par des exploitants de réseau mobile à des tiers, indépendamment de leur statut juridique au regard du CPCE. Ainsi, un même contrat de SMS Push peut aussi bien être proposé à un exploitant de réseau non mobile qu'à un client final (éditeur de services notamment).
Or, dans une vision prospective dans laquelle le SMS continue à se développer, notamment en dehors du monde mobile, il apparaît qu'à court et moyen terme, les exploitants de réseau ouvert au public non mobile, comme les agrégateurs de SMS (cf. section 1.6), ont vocation à acheter des SMS-MT dans des conditions d'interconnexion. Sans préjuger des modalités techniques et tarifaires de ces futures offres d'interconnexion SMS qu'Orange France, SFR et Bouygues Telecom mettront en place à destination d'exploitants de réseau tiers, il convient toutefois d'en tenir compte dans le cadre de la présente analyse, dans la mesure notamment où de telles offres seront très certainement mises en place avant la fin de la période couverte par la présente décision.
Ainsi, dans une vision prospective dans laquelle un même opérateur mobile propose plusieurs offres d'interconnexion SMS, on peut conclure, du point de vue de la demande sur le marché de gros, à une parfaite substituabilité entre la TA SMS et les autres offres d'interconnexion SMS. Ainsi, l'augmentation sensible et durable du tarif associé à une offre d'interconnexion SMS entraînerait nécessairement le développement de solutions techniques alternatives induisant des effets de substitution entre les différentes offres d'interconnexion SMS.
Par conséquent, la délimitation du marché pertinent doit inclure l'ensemble des offres d'interconnexion SMS, existantes et futures, sur le réseau mobile de l'opérateur B, depuis le réseau d'un opérateur A. L'opérateur A, exploitant un réseau ouvert au public, peut être aussi bien, dans une vision prospective, un opérateur mobile, un opérateur fixe, un FAI ou encore un agrégateur.

Il est désormais nécessaire d'examiner la substituabilité du côté de la demande et du côté de l'offre en partant de ce nouveau point de départ, afin de déterminer quel est l'ensemble des produits substituables.

2.3.2.2. Non-substituabilité des offres d'interconnexion SMS sur un autre réseau mobile

Les offres d'interconnexion SMS sur un autre réseau mobile B' ne peuvent pas être un substitut pour B. En effet, puisqu'il s'agit d'atteindre in fine l'appelé B sur le réseau B, le seul moyen pour l'opérateur B' de fournir à l'opérateur de l'appelé B le produit souhaité, est de lui-même acheter le tarif d'interconnexion SMS sur le réseau de B. L'opérateur A n'a donc aucun intérêt à passer par B', si ce n'est pour du transit.

En cas d'existence d'un opérateur mobile virtuel B'', il n'y aurait pas non plus de substituabilité, car l'opérateur mobile virtuel B'' devrait, tout comme l'opérateur B', acheter à B une offre d'interconnexion SMS.

2.3.2.3. Substituabilité des offres de SMS Push

Sur un plan technique, les offres d'interconnexion SMS et de SMS Push sont largement équivalentes. Face à une hausse de la charge d'interconnexion SMS de l'opérateur mobile de destination, une solution pour un opérateur tiers désirant acheminer un SMS vers l'appelé B consisterait alors à recourir à une offre de SMS Push (40).
Certes, une certaine catégorie d'acteurs, qui n'ont pas le statut d'exploitant de réseau ouvert au public (banques, fournisseurs de contenus), ne pourraient pas substituer des SMS Push par une offre d'interconnexion SMS puisqu'ils ne disposent pas de droit à l'interconnexion (cf. section 1.6).
Toutefois, les utilisateurs de SMS Push sont le plus souvent des exploitants de réseau ouvert au public (agrégateurs, FAI ou un opérateurs de téléphonie fixe). Or, comme n'importe quel acteur désirant acheminer un SMS vers le client B, l'opérateur A peut recourir à une offre de SMS Push, soit directement proposée par l'opérateur mobile de destination B (« SMS Push opérateur »), soit par le biais d'un agrégateur de SMS (« SMS Push agrégateur »). Si la charge d'interconnexion SMS devient plus chère que les différentes offres de SMS Push proposées sur le marché de gros, l'opérateur de l'appelant choisira l'offre dont le tarif sera le plus avantageux pour lui, compte tenu de ses contraintes et de ses volumes de trafic.
En ce sens, il existe pour l'opérateur de l'appelant une substituabilité entre les offres d'interconnexion SMS et l'ensemble des offres de SMS Push proposées à la fois par l'opérateur mobile de l'appelé et par les agrégateurs de SMS.

A ce stade de l'analyse, on peut donc dire qu'il existe une certaine substituabilité entre les offres de SMS Push et les offres d'interconnexion SMS. Cette analyse est complétée dans la partie 2.3.4 au moment d'analyser la substituabilité de côté de l'offre.

2.3.2.4. Substituabilité des offres d'interconnexion SMS depuis un réseau national
et depuis un réseau international

Si le tarif d'interconnexion SMS depuis un réseau national devient plus cher que le tarif d'interconnexion SMS depuis un réseau international, l'opérateur de l'appelant aura la possibilité de rerouter son trafic par l'international pour bénéficier du tarif le plus avantageux.
Inversement, si le tarif d'interconnexion SMS depuis un réseau international devient plus cher que le tarif d'interconnexion SMS depuis un réseau national, l'opérateur de l'appelant étranger reroutera son trafic par l'intermédiaire d'un opérateur français pour bénéficier du tarif le plus avantageux.
Il y a donc substituabilité entre les offres d'interconnexion SMS depuis un réseau national et les offres d'interconnexion SMS reroutées par l'international.

2.3.2.5. Substituabilité des offres d'interconnexion SMS utilisant la norme GSM
et de celles utilisant la norme UMTS

Tous les opérateurs disposant aujourd'hui en France d'une licence UMTS possèdent également une licence GSM (cf. section 1.3.1).
Or, aucun d'eux ne dit vouloir établir des tarifs différenciés pour les offres d'interconnexion SMS suivant qu'elles utilisent la norme GSM ou la norme UMTS. Cela s'explique notamment par le fait qu'en fonction du déplacement de l'appelé un SMS peut par exemple être émis en GSM et reçu en UMTS. En outre, le service rendu, à savoir permettre une communication écrite en temps différé, est le même quelle que soit la norme utilisée.
Il y a donc pour l'opérateur de l'appelant une substituabilité complète entre les offres d'interconnexion GSM et UMTS puisque les deux procurent le même service, au même prix et que l'opérateur de l'appelant n'est pas en mesure de savoir s'il utilise une terminaison GSM ou UMTS.

2.3.3. Analyse de la substituabilité du côté de la demande sur les marchés de détail :
comportement de l'appelant face à une hausse du prix des SMS

Il est probable que l'augmentation de la charge d'interconnexion de l'opérateur mobile entraînerait une augmentation du même ordre du prix de détail des SMS (mobile vers mobile tiers, fixe vers mobile et Internet vers mobile). Il est en effet probable que l'opérateur mobile répercute cette augmentation sur son client au détail afin de maintenir son niveau de marge.
Il convient alors d'examiner le comportement de l'appelant si la charge d'interconnexion SMS de l'opérateur mobile considéré, et donc, par répercussion, le prix de détail des SMS, augmentait de manière sensible et durable. Cette section analyse le comportement de l'appelant face à une hausse du prix de détail des SMS à destination des mobiles, quelle que soit leur origine (mobile, fixe ou Internet). Différents types de substitution sur les marchés de détail sont envisageables :
- substitution par un SMS à destination d'un téléphone fixe ou d'Internet ;
- substitution par un appel vocal ;
- substitution par un autre service de messagerie mobile (MMS, e-mail mobile, Instant Messaging, etc.).

2.3.3.1. Non-substituabilité d'un SMS à destination d'un mobile par un SMS
à destination d'un téléphone fixe ou d'Internet

Face à une hausse du prix de détail des SMS (mobile vers mobile, fixe vers mobile et Internet vers mobile), il existe en toute rigueur six possibilités de substitution : envoi d'un SMS mobile vers fixe, mobile vers Internet, fixe vers fixe, fixe vers Internet, Internet vers fixe et Internet vers Internet. Le trafic mobile vers mobile (M2M) captant la quasi-totalité du trafic SMS interpersonnel, seuls les SMS au départ d'un terminal mobile font l'objet d'une analyse poussée.

2.3.3.1.1. Non-substituabilité par un SMS à destination d'un téléphone fixe compatible SMS

A ce jour, envoyer un SMS vers un poste fixe suppose à la fois que l'appelé soit dans un lieu où il dispose d'un téléphone fixe compatible SMS, qu'il soit abonné de France Télécom (les opérateurs fixes alternatifs ne proposant pas de service SMS sur leur réseau), qu'il ait souscrit l'une des options « présentation du nom » ou « présentation du numéro », que l'appelant le sache et qu'il connaisse le numéro de téléphone, non pas à 10, mais à 11 chiffres de son correspondant (41).
Par ailleurs, faute d'accord entre les différentes parties concernées, il convient de noter que la pratique de la vocalisation (lecture du SMS par une voix synthétique) s'est développée, notamment pour tous les SMS en provenance des réseaux de Bouygues Telecom et de SFR aboutissant sur le réseau fixe de l'opérateur historique. Il convient enfin de noter qu'environ 30 % des abonnés fixes, passés chez un opérateur alternatif, ne peuvent ni envoyer ni recevoir de SMS puisqu'à ce jour ce service n'est offert que par France Télécom.
Quand bien même toutes ces contingences seraient résolues à l'horizon de cette analyse, notamment dans une vision prospective où l'offre serait davantage diffusée, il convient de remarquer que l'intérêt d'un SMS consiste précisément à pouvoir communiquer en dehors de lieux où le client dispose déjà d'une ligne fixe. En effet, l'envoi d'un SMS à destination d'un poste fixe impose au destinataire du message une certaine sédentarité. Or, la mobilité est une partie intégrante du service SMS. En outre, de plus en plus de personnes ne possèdent plus de lignes fixes (18 % en 2005, contre 10 % en 2000) (42) et cette tendance ne semble pas devoir s'inverser au cours de la période considérée. Enfin, on peut noter que le recours à la vocalisation, qui touche plus de 53 % des SMS à destination d'un téléphone fixe, change la nature même du service qui consiste avant tout à envoyer un message écrit. Ce point est discuté plus longuement dans la section 2.3.3.2.3.

2.3.3.1.2. Non-substituabilité par un SMS à destination d'une boîte de messagerie Internet

De la même manière, envoyer un SMS vers une boîte de messagerie Internet suppose que l'appelé soit dans un lieu où il dispose d'une connexion Internet, qu'il possède une adresse de messagerie virtuelle, que l'appelant le sache et qu'il connaisse l'identifiant correspondant à cette boîte de messagerie. Outre le fait qu'un nombre non négligeable de personnes n'utilisent jamais Internet, soit parce qu'ils n'y ont pas accès, soit parce qu'ils ne savent pas, l'envoi d'un SMS vers une adresse de messagerie virtuelle n'est possible que si l'appelant se connecte préalablement à Internet à l'aide d'un terminal mobile multimédia qui n'est a priori possédé que par 30 % des abonnés mobiles. L'envoi d'un SMS vers une boîte de messagerie hors connexion Internet est à ce jour impossible.
En conclusion, quelle que soit leur origine (mobile, fixe ou Internet), les SMS à destination des postes fixes et d'Internet ne sont pas substituables aux SMS à destination des mobiles.

2.3.3.2. Non-substituabilité d'un SMS par un appel vocal

La question qui se pose est de savoir si, après une augmentation sensible et durable de la charge d'interconnexion SMS sur un réseau mobile, et donc du prix de détail des SMS sur ce même réseau, l'appelant pourrait être tenté de passer un appel vocal. En effet, plutôt que d'envoyer un SMS, il peut préférer appeler directement son correspondant à partir d'un réseau fixe ou mobile ou lui laisser un message vocal sur un répondeur.
Cette partie a pour objet d'analyser la substituabilité entre le SMS et la voix. L'analyse développée par l'Autorité s'appuie à la fois sur des éléments quantitatifs et qualitatifs. Dans un premier temps, l'Autorité procède à une étude quantitative globale qui met en évidence les différences de comportements entre les utilisateurs de SMS et les simples usagers de la voix. Dans un second temps, l'Autorité développe des arguments qualitatifs, dont certains ont déjà été exposés dans le cadre de son analyse du marché de gros de la terminaison d'appel vocal sur les réseaux mobiles (43), et visant à justifier son analyse.

2.3.3.2.1. La non-substituabilité entre le SMS et la voix peut-être mise en évidence
à travers une analyse quantitative

L'analyse en question est développée dans l'annexe D de la présente décision. Seuls les résultats de cette analyse sont exposés ici. Les effets mis en évidence dans cette étude portent sur des comportements macroscopiques.
En comparant les données de trafic voix et SMS, il ressort que le trafic SMS a progressé 3,7 fois plus vite que la voix entre 2000 et 2005, ce qui suggère notamment un comportement propre aux utilisateurs de SMS, par rapport aux usagers de la voix. Parallèlement, il est intéressant de noter que le SMS prend de plus en plus de place dans la structure de revenus des opérateurs mobiles métropolitains. La part du SMS dans le chiffre d'affaires des opérateurs mobiles métropolitains a en effet plus que doublé en l'espace de cinq ans, passant de 3,3 % au premier trimestre 2001 à 8,6 % au quatrième trimestre 2005.

En s'appuyant ensuite sur les données de trafic, l'Autorité observe des effets de saisonnalité à la fois asynchrones et d'ampleur plus marquée pour le SMS que pour la voix. Comme le montrent le graphique (44) et le tableau suivants, la croissance du trafic SMS est marquée par des effets de saisonnalité beaucoup plus prononcés que ceux de la voix. D'une part, les pics relatifs à la croissance du trafic SMS ont une amplitude moyenne de 19,7 % contre seulement 7,4 % pour la voix (M2M) entre 2001 et 2005. D'autre part, les périodes sur lesquelles portent ces effets de saisonnalité sont généralement décalées dans le temps, ce qui indique assez clairement une absence de corrélation entre les trafics SMS et voix sur les réseaux mobiles.

En calculant les coefficients de corrélation entre les séries de croissance trimestrielle SMS et voix corrigées des effets de parc sur la période 2001-2005, dont la valeur s'élève à 0,131 pour le trafic mobile vers mobile, l'Autorité observe que les deux séries de données sont très imparfaitement corrélées l'une à l'autre, donc que la situation du SMS par rapport à la voix est plus proche de la non-substituabilité que de la substituabilité.
Ainsi, les différentes analyses portant sur les données de volume conduisent l'Autorité à considérer que les usages du SMS interpersonnel diffèrent fondamentalement de ceux de la voix. La forte croissance du trafic SMS et la mise en évidence d'effets de saisonnalité à la fois asynchrones et d'amplitudes plus marquées que ceux de la voix, indiquent clairement que l'envoi de SMS interpersonnels et le recours à la voix sont deux modes de communication distincts qui ne sont que très imparfaitement substituables. Cette analyse peut également être étayée par un certain nombre de considérations qualitatives qui mettent en évidence la spécificité du SMS par rapport à la voix.

2.3.3.2.2. Le SMS et la voix correspondent à des services et à des usages différents

Il convient tout d'abord de rappeler qu'un SMS est composé d'au maximum 160 caractères et que sa transmission ne se fait pas en temps réel comme la voix. La durée moyenne des communications à destination d'un réseau mobile est proche de 100 secondes. Les appels de moins de 30 secondes représentent environ 45 % des appels. Bien qu'un appel téléphonique puisse être constitué d'un dialogue ou d'un quasi-monologue de l'appelant, un appel vocal (mobile-mobile ou fixe-mobile) ne peut pas, en général, se substituer à l'envoi d'un SMS. Contrairement à la voix, le SMS instaure en effet une communication discrète en temps différé entre l'émetteur du SMS et son destinataire. En ce sens les SMS et les appels vocaux correspondent à des services et à des usages différents.
En effet, alors que la voix instaure, par définition, une communication en temps réel entre l'appelant et l'appelé, le temps d'attente entre deux messages courts est quant à lui indéterminé et dépend de l'occupation des canaux de signalisation. Ainsi, la communication en temps différé est une caractéristique propre au SMS qui le distingue fondamentalement de la voix. Même dans le cas de très courts dialogues, voire de quasi-monologues (45), la voix diffère du SMS en ce que l'émetteur ne sait pas si le destinataire a effectivement reçu le message (son terminal peut être éteint ou allumé) et, s'il l'a reçu, à quel moment il l'a lu (46). Une substitution peut donc avoir lieu, dans le cas très particulier où l'appelant n'a pas besoin que l'appelé soit immédiatement informé, ni qu'il soit certain qu'il ait bien reçu le message, comme c'est par exemple le cas d'un message laissé sur une boîte de messagerie vocale. Mais, même dans ce cas, il n'est pas certain qu'un appel vocal soit un substitut du SMS comme cela est développé dans la section suivante.
En second lieu, le caractère écrit du SMS en fait le support d'une communication discrète. En effet, il est rare que l'appelé mobile se trouve dans une situation où il puisse s'isoler facilement, ce qui provoque souvent des nuisances sonores à la fois pour les personnes qui se trouvent immédiatement à proximité (47), mais aussi pour l'appelé lui-même qui n'a pas forcément envie que d'autres personnes entendent sa conversation. Contrairement aux appels vocaux où l'appelant et l'appelé, en se parlant, font nécessairement du bruit, le SMS ne dérange personne et offre à ses utilisateurs un moyen extrêmement pratique pour communiquer discrètement.
Enfin, comme il a déjà été mentionné auparavant (cf. section 2.2.1.1.2), le SMS, plus qu'un simple médium, est devenu en quelques années un véritable phénomène de société, parfois source de conflits intergénérationnels. Pour une certaine classe d'âge (les moins de 17 ans), il est à la fois le support d'une identité commune, un signe de reconnaissance et le symbole d'une culture différente de celle des générations précédentes. Les nombreux débats sur l'état de la langue française (grammaire, orthographe, etc.) que suscite ce médium sont un parfait exemple de la manière dont le SMS est perçu. En utilisant des codes qui lui sont propres (smileys, langage phonétique, etc.), le SMS est devenu en quelques années un mode de communication à part entière qui se distingue notamment de la voix.

2.3.3.2.3. Non-substituabilité d'un SMS par un message laissé sur une boîte de messagerie vocale

Le cas d'un appel directement laissé sur une boîte de messagerie vocale ou sur un répondeur téléphonique mérite une analyse plus approfondie. En effet, dans le cas d'une augmentation sensible et durable de la terminaison SMS, donc du prix de détail correspondant, l'appelant pourrait préférer joindre directement le répondeur de l'appelé, plutôt que de lui envoyer un SMS dans la mesure où un message vocal laissé sur un répondeur téléphonique s'apparente bien à une communication discrète en temps différé.
Trois arguments viennent cependant nuancer cette dernière assertion. Tout d'abord, la possibilité d'accéder directement au répondeur de l'appelé sans que ce dernier ne décroche est un service nouveau, mis en place récemment. Peu de personnes connaissent cette possibilité, ce qui limite a fortiori son usage.
Ensuite, alors qu'il n'est pas possible de stocker indéfiniment un message vocal, ce dernier s'effaçant généralement sept jours après qu'il a été sauvegardé (48), les SMS peuvent être conservés pour une durée indéterminée dans la limite de la capacité mémoire du terminal mobile. Par ailleurs, en laissant une trace écrite, ils permettent à l'appelé non seulement de conserver, mais également de réutiliser un certain nombre d'informations sur l'appelant (numéro de téléphone, date et heure d'émission du SMS), ce que ne permet pas un message vocal directement laissé sur un répondeur.
Enfin, il convient de signaler qu'un message vocal ne peut pas restituer toute la complexité d'une communication écrite. Dans un message, il convient en effet de distinguer le signifié, c'est-à-dire le contenu, du signifiant, c'est-à-dire la forme. Or, la forme dans laquelle le message est transmis importe tout autant que le fond. De la même manière que l'écrit ne permet pas de restituer tous les signes phatiques propres au langage oral (interjections, pauses, hésitations, ton de la voix, etc.), une communication orale ne permet pas de restituer l'ensemble des signes et des codes propres au langage écrit, notamment utilisés pour un composer un SMS.
Comment un message oral peut-il par exemple reproduire un smiley (49) ou bien restituer l'écriture phonétique propre au SMS ? Par exemple, la suite alphanumérique « g ht 1 kdo a Pr » qui correspond à la phrase « J'ai acheté un cadeau à Pierre », contient des éléments qui permettent à l'appelant et à l'appelé de créer un espace commun dans lequel la communication prend forme. Ces codes, qui peuvent être propres à l'appelant et à l'appelé, leur permettent notamment d'exclure de leur univers les personnes qui ne les connaissent pas. Ainsi, un message vocal laissé sur répondeur ne permet pas la communication de ces jeux d'écriture propres au SMS qui sont par ailleurs largement diffusés parmi ceux qui utilisent massivement le service (les moins de 17 ans notamment).

En ce sens, un message laissé sur une boîte de messagerie vocale n'est pas un substitut du SMS.

2.3.3.2.4. Conclusion

Au terme de ses analyses à la fois quantitative et qualitative, l'Autorité considère donc qu'une communication vocale mobile-mobile ou fixe-mobile n'est pas un substitut à l'envoi d'un SMS du point de vue de la demande.

2.3.3.3. Non-substituabilité d'un SMS par un autre service de messagerie mobile

Comme il a déjà été dit auparavant (cf. 2.2.1.2), le succès du SMS a soutenu l'essor de nouveaux services de messagerie, notamment ceux du MMS (Multimedia Message Service) et des services Internet (e-mail mobile, Instant Messaging, etc.). A l'horizon de la période couverte par la présente décision, les risques de substitution du SMS par ces nouveaux services de messagerie demeurent toutefois extrêmement limités étant donné leur caractère émergent, les différences d'usage et de prix, ainsi que le faible nombre d'utilisateurs potentiellement concernés.

2.3.3.3.1. Non-substituabilité d'un SMS par un MMS (Multimedia Messaging Service)

Les MMS permettent de disposer de fonctionnalités beaucoup plus évoluées que les SMS. Certes, ils peuvent répondre aux mêmes usages que les SMS interpersonnels puisque tous deux assurent la transmission d'un message, mais l'intérêt du MMS est justement de pouvoir accompagner ce message écrit d'une photo, d'un enregistrement vocal, d'une musique ou d'une vidéo. En ce sens, la distinction entre les deux services est assez nette. Elle se reflète notamment dans les usages et dans les prix associés à ces deux services.

Contrairement au SMS, le MMS n'est pas encore entré dans les moeurs

Selon l'étude du CREDOC précitée (50), seuls 11 % des personnes équipées d'un téléphone mobile ont déjà envoyé un MMS en 2004. 26 % des 12-17 ans et 23 % des 18-24 ans équipés ont déjà utilisé le service au moins une fois, tandis que 34 % des plus de 60 ans déclarent ne pas savoir ce qu'est un MMS. Ainsi, les usages liés au MMS restent limités. Sur le parc actuel, le nombre de mobiles capables d'envoyer et de recevoir de tels messages est encore réduit (moins de 30 % des personnes équipées d'un mobile).

En moyenne, le prix d'un MMS est trois fois plus cher que celui d'un SMS

Le tableau ci-dessous présente la tarification d'un MMS en heure pleine, hors forfait, par les principaux opérateurs mobiles métropolitains. Comme on peut l'observer, le prix d'un MMS est jusqu'à 15 fois supérieur à celui d'un SMS (51).

En se basant sur la règle d'équivalence 1 MMS = 3 SMS appliquée par les trois principaux opérateurs mobiles métropolitains dans le cadre de leur forfait SMS, on peut dire qu'en moyenne un MMS est trois fois plus cher qu'un SMS, ce qui tend aujourd'hui à limiter les possibilités de substitution entre ces deux services.
En d'autres termes, étant donné le niveau des tarifs actuels, une augmentation de 10 à 15 % du prix du SMS ne suffirait pas à provoquer un effet de substitution sur les consommateurs. En ce sens, le MMS n'est pas un substitut du SMS.

2.3.3.3.2. Non-substituabilité d'un SMS par un e-mail mobile

L'envoi d'e-mails ou de messages instantanés nécessitant une connexion préalable à une boîte de messagerie ou à un portail Internet, le SMS, d'une part, et les services de données Internet (e-mail, Instant Messaging, etc.), d'autre part, diffèrent à la fois dans leur usage et dans leur mode de facturation.
Comme il a été exposé dans la section 1.5.3.2, le modèle économique « Télécom » est celui du calling party pays : c'est l'utilisateur à l'origine de l'appel - qu'il s'agisse de voix ou de données - qui supporte l'intégralité du coût. Ainsi, l'appelant paye pour chaque SMS envoyé, tandis que la réception de SMS est entièrement gratuite pour l'appelé.
A contrario, dans le modèle économique « Internet » du receiving party pays, l'utilisateur est facturé de manière forfaitaire - en fonction du temps de connexion ou de la capacité - indépendamment du contenu ou de la destination ainsi que du sens de transmission. L'utilisateur est donc facturé à la fois pour l'émission et la réception du message, ce qui a des conséquences à la fois sur la manière dont il perçoit le service et dont il le consomme.
Cela est particulièrement visible quand on analyse les niveaux de prix. En effet, en calculant le prix d'un kilo-octet ou l'envoi d'un e-mail mobile converti en équivalent SMS (52), on peut s'apercevoir qu'un e-mail mobile coûte 15 à 150 fois moins cher qu'un SMS (53).

Comparaison des prix SMS et e-mail mobile sur i-mode

Comparaison des prix SMS et e-mail mobile sur Orange World

Ainsi, outre le caractère émergent de ce service qui reste déterminé par un faible taux d'équipement en terminaux compatibles (moins de 30 % du parc actif total) et les différences entre les modèles économiques « Télécom » et « Internet », une augmentation de 10 à 15 % du prix du SMS, étant donné le niveau des tarifs actuels, ne provoquerait aucun effet de substitution sur les consommateurs. En ce sens, l'e-mail mobile n'est pas un substitut du SMS.

2.3.3.3.3. Non-substituabilité d'un SMS par un service de messagerie instantanée

Outre le faible taux d'équipement en terminaux compatibles et l'incompatibilité des modèles économiques sous-jacents, les services de messagerie instantanée instaurent une communication en temps réel entre plusieurs abonnés mobiles (54). Le SMS ayant pour fonction essentielle d'instaurer une communication en temps différé entre deux personnes en situation de mobilité, d'une part, et l'envoi de messages instantanés requérant une connexion préalable à Internet, d'autre part, les arguments déjà mis en avant dans les sections 2.3.3.2.2 et 2.3.3.3.2 restent entièrement valables.
Par suite, le SMS n'est pas substituable aux services de messagerie instantanée.

2.3.3.4. Conclusion sur l'absence de substituabilité sur les marchés de détail

L'analyse du marché de détail montre qu'une personne souhaitant envoyer un SMS vers un client mobile, que ce soit d'un réseau mobile, d'un réseau fixe ou d'Internet, ne dispose pas de réels services de substitution à l'horizon de la période couverte par la présente décision.

2.3.4. Analyse de la substitution du côté de l'offre

En première analyse, il ne semble pas qu'il y ait de substitution du côté de l'offre envisageable sur la période couverte par la présente décision. En effet, celle-ci supposerait que, en cas d'augmentation des prix de l'offre d'interconnexion SMS par un opérateur mobile, un opérateur en place ou un nouvel entrant pourrait offrir ce service de terminaison. Une telle éventualité n'est pas possible du fait que, dans le système actuel, l'opérateur de terminaison est l'opérateur qui offre l'accès au réseau mobile et qui maîtrise le terminal du client.
Néanmoins, l'analyse des marchés ayant un caractère prospectif et non contingent et étant donné à la fois le développement rapide du SMS et la qualification juridique des acteurs examinée dans la partie 1.6, il paraît réaliste que d'autres opérateurs que les opérateurs mobiles, notamment les fournisseurs d'accès Internet et les agrégateurs de SMS, puissent offrir leurs services dans des conditions d'interconnexion. En d'autres termes, ce n'est pas parce que les FAI et les agrégateurs de SMS n'achètent pas à ce jour une offre d'interconnexion SMS qu'ils ne le feront pas demain. Etant donné qu'ils peuvent être qualifiés d'exploitants de réseau de communications électroniques ouvert au public au sens de l'article L. 32-3 du CPCE, rien ne les empêche d'obtenir de telles conditions à l'horizon de cette analyse.
Ainsi, en considérant cette hypothèse et en se plaçant dans une perspective prospective, dans laquelle tous les exploitants de réseau de services de communications électroniques ouvert au public ont accès non seulement aux offres de SMS Push des opérateurs mobiles, mais également à l'interconnexion SMS, la substituabilité entre les offres d'interconnexion SMS et celles de SMS Push (cf. 2.3.2.3) se trouve confortée : si le prix des offres de SMS Push des opérateurs mobiles augmente de manière sensible et durable, toutes choses égales par ailleurs, les agrégateurs de SMS, les FAI et les opérateurs fixes préféreront acheter une prestation d'interconnexion SMS. Certains acteurs, notamment les agrégateurs de SMS dont c'est le coeur de métier, seront même en mesure de proposer à leurs clients (éditeurs de services) des offres Push à un prix inférieur aux offres Push proposées par les opérateurs mobiles eux-mêmes.
Du point de vue de l'offre, les offres d'interconnexion SMS constituent donc des substituts aux offres de SMS Push.

2.3.5. Conclusion sur l'analyse de la substituabilité

A l'issue de cette analyse, il ressort donc que les offres d'interconnexion SMS sont substituables aux offres de terminaison d'appel SMS dans une analyse prospective.
En outre, le seul substitut à ces offres sur réseau mobile, envisagé individuellement, est la vente en gros de SMS-MT (SMS Push). En effet, l'analyse de la substituabilité montre que l'interconnexion SMS est substituable au SMS Push du point de vue de la demande, tandis que le SMS Push est substituable à l'interconnexion SMS du point de vue de l'offre : en cas de hausse de la charge d'interconnexion SMS, les demandeurs préféreraient acheter du SMS Push, tandis que, en cas de hausse du prix du SMS Push, des agrégateurs achèteraient une offre d'interconnexion SMS pour vendre du SMS Push à un prix inférieur. Au bilan, les deux produits se trouvent donc soumis à des contraintes concurrentielles identiques. Ces produits couvrent les SMS-MT qu'ils soient 2G, 3G, ou reroutés par l'international.
Au-delà, il n'existe pas d'autre produit de substitution envisageable à l'horizon de la période couverte par cette décision.
En raison de l'impossibilité technique pour un opérateur de terminer un appel vers un terminal mobile dont il n'est pas propriétaire de la carte SIM, il n'y a pas d'autre substitution du côté de la demande, non seulement sur le marché de gros, mais aussi sur les marchés de détail, entre voix, SMS et autres services de messagerie mobiles. Il n'est donc pas envisageable de définir un marché national de la terminaison d'appel SMS.
En raison de l'absence de substitution du côté de la demande, il est donc envisageable de définir, pour chaque opérateur de réseau mobile, le marché de la terminaison d'appel SMS sur son réseau, comprenant l'ensemble des offres d'interconnexion SMS, ainsi que les offres de SMS Push, à destination de ses clients.

2.4. Délimitation géographique des marchés de gros

Il est ensuite nécessaire de définir le périmètre géographique de ces marchés. S'agissant de réseaux mobiles, la notion de segmentation géographique est sans doute plus complexe que pour le fixe. Ainsi, un client d'un opérateur mobile français peut voyager dans l'ensemble des pays où un réseau est compatible GSM-UMTS et recevoir des SMS. Cependant, il n'en demeure pas moins que les clients restent généralement dans une aire géographique limitée, correspondant à la zone de couverture de l'opérateur. De plus, à l'extérieur de la zone de couverture de l'opérateur, l'appelé reçoit ses SMS grâce à l'itinérance.
L'étendue de la couverture des opérateurs mobiles dépend des périmètres d'autorisations de fréquences, qui eux-mêmes suivent le découpage administratif de la France. La segmentation géographique retient donc un périmètre métropolitain, qui correspond à l'étendue des autorisations d'usage de fréquences des opérateurs Orange France, SFR et Bouygues Telecom.

2.5. Liste des marchés de gros

Les marchés de gros recensés dans le cadre de cette analyse de marché sont les suivants :
- marché de gros de la terminaison de SMS sur le réseau d'Orange France ;
- marché de gros de la terminaison de SMS sur le réseau de SFR ;
- marché de gros de la terminaison de SMS sur le réseau de Bouygues Telecom ;
Comme indiqué précédemment, l'Autorité inclut dans ce marché toute prestation de terminaison SMS (offres d'interconnexion SMS et SMS Push) quelle que soit l'origine du SMS (mobile, fixe, Internet, nationale ou internationale), quel que soit le destinataire, client de l'opérateur ou d'un MVNO recourant au réseau de l'opérateur, et quelle que soit la technologie utilisée pour produire cette prestation (GSM ou UMTS).

Les obstacles au développement d'une concurrence effective relevés en section 4.1.1 justifient que l'Autorité considère comme pertinents ces marchés au sens de l'article L. 37-1.
Conformément à l'article 7 de la directive « Cadre », ces marchés vérifient également les trois critères définis par la Commission dans sa recommandation (cf. section 4.1.3).

2.6. Prise en compte des contributions aux consultations publiques
sur la définition des marchés de gros
2.6.1. Principales remarques des acteurs sur la définition des marchés de gros
2.6.1.1. Tableau synthétique des contributions à la première consultation publique
concernant la définition des marchés de gros

Le tableau ci-dessous a pour objectif de donner une vision synthétique des contributions reçues par l'ARCEP suite à la première consultation publique qu'elle a lancée. Par nature, ce tableau ne peut pas refléter le sens complet des contributions qui, pour certaines, sont couvertes par le secret des affaires, mais donne une idée du point de vue défendu par chacun.
Les cases non renseignées signifient que le contributeur ne s'est pas prononcé explicitement pour ou contre la proposition de l'Autorité.

Acteurs ayant exprimé un accord avec le point de vue défendu par l'ARCEP
dans son projet d'analyse de marché

2.6.1.2. Sur la délimitation des marchés de gros et l'analyse de la substituabilité

L'Autorité note tout d'abord que plusieurs acteurs, en particulier [SDA], Télé2 et Télégate/le 118000, approuvent l'analyse développée par l'ARCEP.
Pour l'AdUF (Association des Utilisateurs de Free), il est nécessaire de ne pas limiter le marché de gros à la terminaison sur les seuls réseaux mobiles, mais d'inclure également les réseaux fixes, notamment celui de France Télécom.

MMA France (Mobile Marketing Association) ne partage quant à elle pas l'analyse de l'ARCEP sur la non-substituabilité entre l'activité de Push SMS et celle de Push MMS texte, estimant que l'une est substituable à l'autre.
Enfin, de manière générale, les opérateurs mobiles estiment que l'Autorité ne procède pas à une analyse suffisamment prospective du marché, ce qui conduirait, selon eux, l'Autorité à retenir un périmètre de marché inexact :
[SDA] estime tout d'abord que la TA SMS et l'offre de SMS Push n'appartiennent pas au même marché de gros. La société considère en effet que la TA SMS et l'offre de Push SMS ne sont pas substituables en raison des différences d'usage, mais aussi des différences techniques. La société note que l'offre de SMS Push est en revanche substituable à d'autres services de transmission en ligne. [SDA] estime ensuite que les services SMS au détail ne constituent pas un marché à part entière dans la mesure où, d'une part, il n'y a pas de demande, ni d'offre isolée pour les SMS et, d'autre part, les SMS sont substituables à d'autres services. Ainsi, l'opérateur considère que les SMS de personne à personne sont substituables à d'autres services de communications interpersonnelles (communication vocale, message vocal, message data), tandis que les SMS de contenu sont substituables à d'autres services en ligne (services vocaux, Wap, i-mode, MMS).
Pour Orange France, l'analyse du marché de détail mobile ne permet pas de définir un « marché des SMS » : les services mobiles sont consommés de manière groupée par les clients finals, l'offre mobile étant perçue comme un bien système articulé autour des usages de communications personnelles. Les services mobiles (émission et réception d'appels vocaux, de messages SMS, MMS, e-mail, etc.) sont à la fois complémentaires et substituables en termes d'usage pour les consommateurs. C'est pourquoi, selon la société, si l'on regarde de plus près les usages clients liés au SMS, notamment l'échange de messages interpersonnels en mode asynchrone en situation de mobilité, on peut constater que les SMS, les MMS, les e-mails mobiles et les messages instantanés remplissent tous cet office. Si ces divers supports n'en sont pas au même stade de développement et ne se présentent pas exactement sous la même forme à l'heure actuelle, les évolutions attendues dans les années à venir vont dans le sens d'une très forte homogénéisation de ces services de messagerie mobile.
[SDA] estime quant à elle que la définition du marché proposée par l'ARCEP repose sur un examen fragile et partiel des substituabilités. D'une part, la société attire l'attention de l'ARCEP sur le fait qu'il est difficile de corréler deux courbes d'usage et d'en tirer un principe de non-substituabilité. Pour ce faire, [SDA] s'appuie sur une étude interne tendant à montrer l'existence d'une certaine substituabilité des courbes voix et SMS prépayées pour la Grèce. D'autre part, selon la société, l'ARCEP oublie tout un pan de l'analyse de substituabilité nécessaire à la détermination d'un marché pertinent : l'analyse de la substituabilité du côté de l'offre et des contraintes concurrentielles. De ce point de vue, [SDA] estime qu'il existe une réelle substituabilité entre les SMS et les autres services de communications mobiles, comme illustrée dans plusieurs études citées par la société prédisant une décroissance du SMS au profit des nouvelles messageries.
Dans sa contribution à la consultation publique lancée le 16 juin 2006, [SDA] estime qu'à l'horizon 2008 l'échange de services de messages textes sur mobile, au-delà des SMS, se développera via d'autres supports comme les MMS, les e-mails ou les messageries instantanées, et ce en France comme dans d'autres pays. [SDA] prend d'ailleurs l'exemple de Ten, MVNO lancé commercialement en juin dernier, comme illustration des évolutions à venir sur le marché de détail. Dans le mesure où selon [SDA], ces différentes solutions techniques remplissent le même usage, cet acteur considère que la substituabilité entre les différents services de messagerie mobile sur le marché de détail se matérialisera avant la fin de période de validité de l'analyse de l'Autorité.

2.6.2. Réponses de l'Autorité

A titre liminaire, l'Autorité souligne que les arguments avancés par les opérateurs mobiles concernant la délimitation d'un marché de détail de la téléphonie mobile sont sans objet eu égard à la définition du marché de gros analysé dans la présente décision. Au surplus, l'Autorité fait remarquer que les positions défendues par Orange France, [SDA] et, dans une certaine mesure, par [SDA] la conduiraient à définir un marché de gros global de la terminaison d'appels pour toutes les communications mobiles (voix, SMS, MMS, visiophonie) ou pour toutes les communications de données (SMS, MMS). D'une part, cette démarche n'est pas cohérente avec celle retenue par la commission dans le cadre de sa recommandation, puisqu'elle identifie un marché de gros de la terminaison d'appel vocal (marché n° 16). D'autre part, quand bien même un marché de gros de terminaison des services de données sur les réseaux mobiles pourrait être identifié, les implications en termes de régulation sectorielle seraient rigoureusement identiques pour ce qui concerne les SMS.
En réponse à l'AdUF, l'Autorité constate que les SMS ont aujourd'hui un caractère essentiellement « mobile ». Si son action vise bien à diffuser le service au-delà du seul monde mobile, l'Autorité estime néanmoins qu'il est prématuré à ce stade d'examiner la situation concurrentielle de la TA SMS sur les réseaux fixes. L'Autorité précise toutefois qu'elle dispose de la faculté de réviser son analyse avant son terme, si la situation du marché et son évolution le justifient. Si tant est que cela soit opportun, l'Autorité note que l'inclusion des réseaux fixe et mobile dans le périmètre de l'analyse ne changerait rien à l'examen de la puissance de marché des acteurs en présence (cf. section 3.2.2.2.4) et les conclusions en termes de régulation pour les opérateurs mobiles demeureraient inchangées.
En réponse à MMA France, l'Autorité, si elle s'interroge effectivement sur l'existence possible d'une substituabilité à long terme entre le SMS Push et le Push MMS texte pour les activités de services en ligne, considère que ce commentaire n'est pas pertinent pour les usages de SMS interpersonnels qui représentent la majeure partie des envois de SMS. Concernant plus spécifiquement le Push MMS texte, l'Autorité précise qu'à sa connaissance ce produit, essentiellement destiné aux éditeurs de services et aux annonceurs désirant mener une campagne de marketing sur mobile, n'est apparu qu'au cours du second semestre de l'année 2005. D'une part, dans le cas du Push MMS texte, une telle campagne nécessite que les annonceurs aient accès à une base composée exclusivement de clients possédant un terminal compatible MMS, contrairement aux campagnes de SMS Push qui touchent potentiellement tous les clients mobiles ayant donné leur accord. D'autre part, il n'existe pas encore d'offre de gros, ni de grille tarifaire clairement identifiées, comme c'est le cas notamment pour le SMS Push. Dans ces conditions, même à supposer que le Push MMS texte connaisse une percée rapide sur ce segment d'activité spécifique, l'Autorité considère qu'une substituabilité, telle que décrite par MMA France, ne pourrait commencer à s'opérer qu'après la période couverte par la présente décision, c'est-à-dire à l'horizon 2009.
En réponse à la première partie des commentaires de [SDA], l'Autorité précise tout d'abord que l'étude quantitative, jointe dans l'annexe D de la présente analyse, si elle ne suffit pas à elle seule à démontrer un principe général de non-substituabilité, n'en constitue pas moins un faisceau d'indices précis et concordants. Ensuite, l'Autorité note que l'étude présentée par la société sur la substituabilité entre les courbes voix et SMS en Grèce portent sur un segment très particulier qui est celui des offres prépayées, qui représentent en France, selon les derniers chiffres publiés par l'ARCEP (55), environ 35 % du parc total de clients. Outre le fait que cette étude oublie potentiellement 65 % des utilisateurs du SMS, il est fort probable que cette catégorie de clients, par essence moins consommatrice de services vocaux, a un comportement spécifique quant à l'utilisation du SMS. Par ailleurs, compte tenu des courbes présentées, l'Autorité juge que la conclusion de [SDA] sur la substituabilité possible entre la voix et le SMS n'est pas probante. Enfin, si tant est que l'on puisse tirer de ces courbes une conclusion extrapolable à l'ensemble des segments prépayés et postpayés du marché français, cette étude n'est par définition valable que pour la Grèce et ne tient pas compte d'éventuelles spécificités nationales.
Enfin, sur l'absence de vision prospective, l'Autorité ne partage pas la position des différents contributeurs ayant exprimé cet avis :
- d'une part, dans son analyse de la substituabilité, l'Autorité a bien pris en compte (cf. sections 2.3.1.1 et 2.3.2.1) le phénomène de convergence des réseaux qui s'observe actuellement et dont le secteur s'accorde à dire qu'il modifiera en profondeur la manière dont seront acheminées demain les communications électroniques en précisant, dans le présent document, que l'exploitant de réseau ouvert au public dont il était question pouvait « être aussi bien, dans une vision prospective, un opérateur mobile, un opérateur fixe, un FAI ou encore un agrégateur ». De la même manière, l'analyse de la substituabilité du côté de l'offre menée par l'Autorité dans la section 2.3.4 comporte bien un caractère prospectif, qui conduit notamment l'Autorité à conclure qu'il existe une réelle substituabilité entre les offres d'interconnexion SMS et de SMS Push et qui justifie, contrairement à ce que soutient [SDA], de les inclure dans le même marché de gros ;
- d'autre part, l'Autorité relève un certain nombre de contradictions dans les études prévisionnelles présentées par les opérateurs mobiles et note que certaines d'entre elles, loin de justifier leur position, légitiment au contraire l'action de l'Autorité dans la mesure où elles mettent en avant une possible décroissance du SMS à l'horizon 2008-2010, alors que la période couverte par la présente analyse ne porte que sur une période d'une durée de trois ans. Enfin, l'Autorité précisait dans le présent document que « (...) si les évolutions des caractéristiques du marché le justifiaient, l'Autorité réexaminerait pendant cette période le marché de gros de la terminaison d'appel SMS sur les réseaux mobiles et pourrait, le cas échéant, être amenée à prendre une nouvelle décision ».

2.7. Relation avec le cadre réglementaire
2.7.1. Avis du Conseil de la concurrence
2.7.1.1. Sur l'analyse de la substituabilité du côté de la demande sur les marchés de détail

S'agissant de la voix, le Conseil de la concurrence indique dans son avis n° 2006-A-05 du 10 mars 2006 précité (§ 7) que, « si dans certains cas l'envoi d'un SMS peut se substituer à une conversation vocale, le SMS se distingue de la voix en ce qu'il permet une communication différée et synthétique (160 caractères maximum) et par son prix beaucoup plus faible ». Le Conseil ajoute par ailleurs que « le SMS est devenu un moyen de conversation bien spécifique, avec ses propres codes (langages phonétiques notamment), correspondant à une forme de communication singulière, particulièrement prisée par les jeunes ».
S'agissant des autres services de messagerie mobile (MMS, IM, e-mail mobile), le conseil de la concurrence indique (§ 8) que leur « substituabilité avec le SMS est encore fortement contrainte par le taux de pénétration des équipements nécessaires. Aujourd'hui, si tous les terminaux mobiles peuvent émettre et recevoir des SMS, seule une minorité de consommateurs peut effectivement émettre et recevoir des MMS ou utiliser les services d'IM ou d'e-mail à partir de leurs terminaux mobiles ». Le conseil ajoute que « le rythme rapide d'expansion de ces marchés laisse toutefois prévoir que ce ne sera plus le cas avant la fin de la période envisagée par l'analyse de marché (2006-2008). En outre, si les niveaux et les structures de tarification de ces différentes prestations de détail sont encore nettement différents, ils sont tous tributaires du niveau des charges de terminaison sur les réseaux des opérateurs mobiles qui font l'objet du présent avis et les choix en matière de régulation pourraient donc jouer un rôle dans l'évolution de cette substituabilité. En tout état de cause, une progression de cette substituabilité entre SMS, MMS, IM et e-mails sera sans effet sur la situation de la concurrence sur les marchés de gros (...) ».

2.7.1.2. Sur la délimitation du marché de gros pertinent

Le Conseil de la concurrence indique dans son avis (§ 15) que, « sur un plan technique, deux modes d'acheminement du SMS peuvent être utilisés : le premier implique une interrogation directe du HLR », tandis que le second, dénommé SMS Push, est « (...) un service plus complet et plus complexe que la terminaison d'appel SMS utilisée par les opérateurs mobiles ».
En l'état des architectures existantes, le conseil précise (§ 16) que « les tarifs de SMS Push ne sont pas contraints directement par ceux des terminaisons SMS même si ceux-ci peuvent servir de référence dans les négociations des tarifs SMS Push. Seule l'ouverture de l'accès à la prestation de terminaison SMS à d'autres opérateurs que les opérateurs mobiles pourrait faire de ces deux modes d'acheminement de réels substituts ».
Enfin, le conseil conclut (§ 17) que, « en tout état de cause, quelle que soit la solution retenue à ce sujet, les conclusions sur la puissance de marché des opérateurs n'en sont pas modifiées (...) ».

2.7.2. Commentaires des autorités réglementaires nationales et de la Commission européenne

Aucune autorité réglementaire nationale n'a transmis d'observation à l'Autorité.
La Commission européenne n'a pas transmis d'observation à l'Autorité sur cette partie de l'analyse ; elle a ainsi approuvé la définition du marché telle que proposée par l'Autorité.

2.7.3. Commentaires de l'Autorité
2.7.3.1. Sur l'analyse de la substituabilité du côté de la demande
sur les marchés de détail

L'Autorité note tout d'abord que la position exprimée par le Conseil de la concurrence dans son avis sur l'analyse de la substitution entre le SMS et la voix est sans équivoque et rejoint en grande partie celle exprimée par l'Autorité dans le cadre de la présente analyse.
S'agissant des autres services de messagerie mobile (MMS, IM, e-mail mobile), l'Autorité constate que le conseil a exprimé un point de vue différent du sien en indiquant que le rythme rapide d'expansion de ces marchés pouvait laisser prévoir une possible substitution de ces services avec le SMS avant la fin de la période envisagée par l'analyse de marché, mais que, en tout état de cause, une progression de cette substituabilité entre SMS, MMS, IM et e-mails sera sans effet sur la situation de la concurrence sur les marchés de gros.
L'Autorité entend ici à apporter une réponse à ce commentaire.
En premier lieu, l'Autorité ne nie pas qu'à long terme une certaine substituabilité entre le SMS et les autres services de messagerie mobile de type MMS, IM ou e-mails mobiles puisse apparaître. La seule question est de savoir quand celle-ci aura effectivement lieu.
En se fondant sur une étude réalisée par le cabinet Forrester en mars 2005 et citée par Orange France dans sa contribution publique, il peut être intéressant de noter que le SMS, loin de s'effondrer face au développement des autres services de données mobiles, gardera une place importante dans la structure de revenu des opérateurs jusqu'en 2008-2010, puisqu'il représentera, selon cette étude, plus de 75 % des revenus data en 2008, pour atteindre encore 56 % à l'horizon 2010.

Figure 14 : Forecast : European Mobile Messaging Revenues, 2005 To 2010 (56)

S'agissant du nombre de personnes concernées par le développement des nouveaux services de données, il convient de nuancer les prévisions des analystes et les effets de substituabilité, en faisant notamment remarquer que le périmètre pertinent à prendre en compte lorsqu'on se réfère au parc multimédia porte à la fois sur l'origine de l'appel et sur sa réception.
En effet, tous les terminaux actuellement en circulation peuvent émettre et recevoir des SMS, ce qui n'est pas le cas pour les nouveaux services de données mobiles qui nécessitent, au moment de l'envoi et de la réception du message, la possession d'un terminal multimédia adapté.
Partant de ce constat, on ne peut parler de substituabilité qu'en situation de parfaite mobilité. Ainsi, pour comparer le nombre d'utilisateurs potentiellement concernés par le développement des nouveaux services de données mobiles, il convient de comparer non pas le parc total d'utilisateurs au parc multimédia actif mais leurs valeurs élevées au carré.
Comme l'illustre le graphique suivant, sans préjuger du développement du parc multimédia actif au cours de la période considérée par la présente analyse, cet effet démultiplicateur est structurant quant au périmètre de marché concerné.

Ainsi, même à supposer que le parc multimédia atteigne 80 % du parc total à l'horizon de cette analyse valide pendant une durée de trois ans, les personnes pouvant s'échanger directement des e-mails, des IM ou des MMS en situation de mobilité, ne représenteraient encore que 64 % (80 %*80 %) du total d'utilisateurs pouvant communiquer par SMS.

Ainsi, en se fondant sur les nouveaux éléments d'analyse développés dans cette section, l'Autorité maintient sa position qui consiste à dire qu'une certaine substituabilité entre le SMS, d'une part, et les nouveaux services de données mobiles, d'autre part, se développera dans le futur, mais que ces effets de substitution ne commenceront véritablement à s'opérer qu'après le terme de la période couverte par la présente décision.
A ce titre, l'Autorité rappelle que la période couverte par la présente décision porte sur une période d'une durée de trois ans.
Au demeurant, l'Autorité a bien précisé dans le présent document que « (...) si les évolutions des caractéristiques du marché le justifiaient, l'Autorité réexaminerait pendant cette période le marché de gros de la terminaison d'appel SMS sur les réseaux mobiles et pourrait, le cas échéant, être amenée à prendre une nouvelle décision ».
Au surplus, quand bien même un marché de gros de terminaison des services de données sur les réseaux mobiles pourrait être identifié, les implications en terme de régulation sectorielle seraient rigoureusement identiques pour ce qui concerne les SMS. Le Conseil de la concurrence partage d'ailleurs cette position lorsqu'il conclut (§ 8) qu'« en tout état de cause, une progression de cette substituabilité entre SMS, MMS, IM et e-mails sera sans effet sur la situation de la concurrence sur les marchés de gros ».

2.7.3.2. Sur la délimitation du marché de gros pertinent

S'agissant de la délimitation du marché de gros pertinent, l'Autorité partage la même vision que le Conseil de la concurrence en ce qu'il existe aujourd'hui deux prestations techniques différentes pour acheminer un même produit : la TA SMS, qui est une prestation d'interconnexion au sens de l'article L. 32 (9°) du CPCE, et le SMS Push, qui s'apparente à un contrat commercial mettant en relation un exploitant de réseau ouvert au public avec un autre acteur, quel que soit son statut juridique.
L'Autorité partage également le point de vue exprimé par le conseil lorsqu'il écrit (§ 17) qu'en l'état actuel des architectures techniques, « seule l'ouverture de l'accès à la prestation de terminaison SMS à d'autres opérateurs que les opérateurs mobiles pourrait faire de ces deux modes d'acheminement de réels substituts ».
Toutefois, dans la vision prospective de l'Autorité développée dans le cadre de la présente analyse, une telle prestation d'interconnexion SMS aura le temps de se mettre en place avant le terme de l'analyse. En effet, dans la mesure où de telles demandes émanant d'exploitants de réseau ouvert au public se sont déjà exprimées dans le passé et qu'une telle prestation d'interconnexion ne peut leur être refusée, du fait du statut juridique découlant de l'adoption du nouveau cadre réglementaire, la question de l'ouverture et de l'accès aux réseaux mobiles pour l'acheminement des SMS par des acteurs non mobiles se posera à brève échéance. Ainsi, la question de l'interconnexion SMS pour des acteurs non mobiles, même si elle reste aujourd'hui entièrement à inventer, paraît inéluctable à court et moyen terme et s'inscrit dans une problématique plus large de convergence des réseaux.
Au surplus, l'Autorité souscrit à la position du Conseil de la concurrence lorsqu'il conclut (§ 17) que, « en tout état de cause, quelle que soit la solution retenue à ce sujet, les conclusions sur la puissance de marché des opérateurs n'en sont pas modifiées (...) ».