JORF n°136 du 13 juin 2004

INTRODUCTION

Sur le câble SAFE :
France Télécom rappelle que l'accord de construction et de maintenance du câble SAFE a été signé en juin 1999 et qu'à cette date le secteur des télécommunications était déjà ouvert à la concurrence. Elle indique que tout opérateur pouvait rejoindre le consortium du câble afin de relier la Réunion à la métropole, mais que seule France Télécom a jugé bon de le faire.
France Télécom précise qu'elle a investi 96 millions de USD dans le SAFE, ce qui représente 15 % de ce système, et qu'elle a été le premier investisseur dans le câble SAFE et regrette que d'autres opérateurs français n'aient pas fait le choix d'investir.
France Télécom estime que la véritable concurrence pour le bénéfice des consommateurs ne peut s'effectuer que par la présence d'opérateurs qui investissent et non au travers d'une concurrence artificielle. France Télécom rappelle que l'investissement minimal sur le câble SAT/WASC/SAFE était fixé à (...) pour un demi-circuit de 2 Mbits/s entre Saint-Paul de la Réunion et Bay Jacotet à Maurice.
A titre liminaire, France Télécom indique que la saisine d'Outremer Télécom comporte des contradictions qui tendent à fragiliser une argumentation déjà quasi inexistante. Ainsi, elle note que la société Outremer Télécom demande au final à l'Autorité la fourniture d'IRU entre la Réunion et la métropole à un tarif au moins cinq fois inférieur à celui proposé par France Télécom le 8 octobre 2003, alors que tout au long de sa saisine elle demande une offre de transit IP.

I. - Sur l'absence d'échec des négociations

France Télécom conteste la présentation des faits exposés par Outremer Télécom dans sa saisine en ce qu'elle la considère comme inexacte tant sur la forme que sur le fond.
France Télécom indique que, sans aucune réelle qualification de ses besoins, Outremer Télécom, dans un courrier en date du 11 juillet 2003, a souhaité bénéficier, en recourant à des capacités sur le câble SAFE, des prestations suivantes :
- acquisition de droits irrévocables d'usage (IRU) sur les capacités disponibles du câble sous-marin SAFE en circuit complet et demi-circuit vers la France métropolitaine, l'île Maurice, l'Afrique du Sud, l'Inde ;
- services de liaisons de « backhaul » prolongeant les têtes de câble sous-marin en métropole et à la Réunion ;
- services de liaisons louées en circuit complet et demi-circuit vers la France métropolitaine, l'île Maurice, l'Afrique du Sud et l'Inde ;
- services de transmission de données ATM ou Frame Relay vers la France métropolitaine, l'île Maurice, l'Afrique du Sud et l'Inde ;
- offres de transit IP.
France Télécom indique que les demandes d'Outremer Télécom étaient nombreuses, peu documentées quant aux besoins auxquels elles devaient répondre et, pour certaines d'entre elles, substituables.
Ainsi, France Télécom a demandé dans un courrier, en date du 4 août 2003, à Outremer Télécom, des informations sur les prestations sollicitées, notamment sur leur degré de priorité et sur le planning prévisionnel de déploiement de capacité et de montée en débit. Sans ces informations complémentaires, France Télécom était dans l'impossibilité de se prononcer sur la faisabilité des projets d'Outremer Télécom.
France Télécom précise qu'elle n'avait ni réseau, ni licence en Afrique du Sud, en Inde et à l'île Maurice et indiquait qu'afin de lancer l'étude de faisabilité technique et tarifaire de l'offre de liaisons louées ou de service de transmission de données en circuit complet entre la Réunion et ces trois pays, elle demandait à Outremer Télécom de lui fournir, liaison par liaison, l'adresse des deux extrémités.
France Télécom précise que, dans un courrier en date du 11 août 2003, Outremer Télécom indiquait de façon succincte ses besoins prioritaires, tant au niveau des capacités souhaitées que du planning prévisionnel envisagé. France Télécom indique que le 8 octobre 2003, après l'étude de faisabilité, elle avait proposé à Outremer Télécom, dans le cadre d'une offre commerciale, une solution à base de liaisons louées point à point en circuit complet entre les POPs d'Outremer Télécom situés sur la Réunion et à Paris. France Télécom indique qu'elle offrait aussi pour des engagements de 10 et 15 ans un montage financier spécifique consistant en une remise supplémentaire sur les tarifs du catalogue de liaison louée à 2 Mbits/s et d'un préfinancement pour les capacités de débit supérieur ou égal à 34 Mbits/s entre les POPs d'Outremer Télécom situés sur la Réunion et à Paris.
France Télécom indique que, le 10 novembre 2003, Outremer Télécom faisait part de son insatisfaction par rapport aux offres tarifaires de France Télécom, car elles ne répondaient pas aux obligations réglementaires pesant sur France Télécom. Le 9 décembre 2003, France Télécom confirmait sa volonté d'étudier la réponse au besoin d'Outremer Télécom dans les limites des ressources disponibles sur son réseau.
France Télécom précise qu'elle réitérait son offre de liaisons louées entre la métropole et les DOM et informait Outremer Télécom qu'elle ne possédait pas de réseau, ni de licence en Afrique du Sud, en Inde et à l'île Maurice. France Télécom indiquait à Outremer Télécom qu'elle pouvait lui offrir des propositions en IRU en demi-circuits 2 Mbits/s à 10 et 15 ans sur les capacités internationales du câble sous-marin SAT3/WASC/SAFE au départ de la tête de câble de la Réunion et à destination des têtes de câbles en Afrique du Sud, en Inde et à l'île Maurice et d'offrir le prolongement terrestre sur l'île de la Réunion vers son POP sur la base d'un contrat « backhaul » de durée de 1, 3 ou 5 ans.
France Télécom indique que, le 29 décembre 2003, Outremer Télécom n'a pas précisé clairement ses besoins et a sollicité des réponses complémentaires notamment sur des propositions d'IRU vers le Portugal, sur le tarif des backhaul ainsi que sur le tarif des droits d'accès à la station où atterrit la tête du câble SAFE sur l'île de la Réunion.
France Télécom souligne qu'aucun refus de négocier ou d'échec des négociations ne peut lui être imputé et que la saisine d'Outremer Télécom ne remplit pas les conditions de recevabilité prévues à l'article L. 36-8 du code des postes et télécommunications.

II. - Sur l'irrecevabilité de la demande relative
aux liaisons louées

France Télécom indique qu'Outremer Télécom ne peut soutenir que l'offre de liaisons louées constitue une prestation d'interconnexion et/ou d'accès au sens de l'article L. 34-8 IV du code des postes et télécommunications et entre ainsi dans le champ des demandes pouvant être soumises à l'Autorité dans le cadre de la procédure de règlement de différend prévue à l'article L. 36-8 du code des postes et télécommunications.
En premier lieu, elle estime que l'offre de liaisons louées sollicitée par Outremer Télécom ne constitue pas une prestation d'interconnexion, mais une prestation commerciale.
En second lieu, elle considère que l'offre de liaisons louées sollicitée par Outremer Télécom ne constitue pas une offre d'accès au sens de l'article L. 34-8 du code des postes et télécommunications. Elle souhaite rappeler que, dans le cadre de l'analyse des marchés menée par l'Autorité, celle-ci classe le marché « des liaisons louées 2 fils, 4 fils, 64 Kbits/s, 2 Mbits/s » parmi les « offres de détail » et non dans la catégorie des « offres d'interconnexion ou d'accès ».
France Télécom estime que la demande d'Outremer Télécom relative aux liaisons louées ne constitue pas une offre d'accès et ne relève d'ailleurs pas plus du régime de l'interconnexion.
En conséquence, elle considère que cette demande ne remplit pas les conditions de recevabilité énoncées par l'article L. 36-8 du code des postes et télécommunications et doit être déclarée irrecevable.
Enfin, France Télécom indique que l'offre de liaisons louées sollicitée fait l'objet de la procédure d'homologation des tarifs. Ainsi, elle estime que l'Autorité ne saurait se prononcer sur cette demande relative aux conditions tarifaires de l'offre de liaisons louées Réunion/métropole dans la présente procédure de règlement de différend sans détourner la procédure d'homologation des tarifs. La décision d'homologuer ou non une offre appartient au ministre chargé des télécommunications.
En conséquence, France Télécom demande à l'Autorité de se déclarer incompétente pour statuer sur les conditions tarifaires de l'offre de liaisons louées dans le cadre de la présente procédure.

III. - Sur l'irrecevabilité de la demande de fourniture d'IRU
entre la Réunion et la métropole

Sur les obligations pesant sur France Télécom en matière d'IRU au terme de son cahier des charges :
France Télécom rappelle que, conformément à l'article 8, point 4, de son cahier des charges lorsqu'elle est co-investisseur dans un câble sous-marin, elle fait droit sans discrimination aux demandes de droits irrévocables d'usage sur les capacités disponibles de ce câble de la part d'opérateurs autorisés, en application de l'article L. 33-1 du code des postes et télécommunications. France Télécom indique que l'Autorité, dans ses lignes directrices relatives aux conditions d'accès aux câbles sous-marins, a effectué une analyse des dispositions applicables aux conditions d'acquisition de droits irrévocables d'usage. France Télécom considère que ces lignes directrices peuvent constituer une certaine référence.
France Télécom souligne qu'en matière de cession de droits irrévocables d'usage sur un câble sous-marin elle est soumise à une obligation de non-discrimination et non à une obligation d'orientation vers les coûts comme le soutient à tort Outremer Télécom dans sa saisine. France Télécom tient à préciser que l'appréciation du principe de non-discrimination ne doit pas avoir pour conséquence de nier un droit résultant d'un investissement.
France Télécom estime que la demande d'Outremer Télécom porte sur un système ouvert à la participation après le 1er janvier 1998 et que l'accord de construction et de maintenance du câble SAFE a été signé le 1er juin 1999. France Télécom considère que les dispositions de l'article 8 de son cahier des charges ne devraient pas s'appliquer et qu'aucune obligation spécifique ne devrait peser sur elle.
Sur l'impossibilité de fournir des IRU sur le câble SAFE entre la Réunion et la métropole :
France Télécom précise que, dans un courrier en date du 11 juillet 2003, Outremer Télécom a demandé des IRU sur le câble SAFE entre la Réunion et la métropole, mais que cette demande méconnaît le parcours du câble SAFE qui s'arrête au Portugal. France Télécom indique qu'elle n'est pas en mesure de répondre à la demande d'Outremer Télécom de fourniture d'IRU entre la Réunion et la métropole sur le câble SAFE.
La demande de fourniture d'IRU entre la Réunion et la métropole n'est en réalité rien d'autre qu'une demande de liaisons louées :
France Télécom indique que, dans un courrier en date du 8 octobre 2003, elle a fait des propositions tarifaires à Outremer Télécom, ne portant pas sur des IRU, mais sur des liaisons louées.
France Télécom rappelle qu'elle proposait dans le cadre d'une offre commerciale, une solution à base de liaisons louées point à point en circuit complet entre les POPs d'Outremer Télécom situés sur l'île de la Réunion et à Paris et offrait pour des engagements de 10 et 15 ans un montage financier spécifique consistant en une remise supplémentaire sur les tarifs catalogue de la liaison louée à 2 Mbits/s et d'un préfinancement pour les capacités de débit supérieur ou égal à 34 Mbits/s entre les POPs d'Outremer Télécom situés sur l'île de la Réunion et à Paris.
France Télécom indique qu'un IRU est un contrat de concession d'un droit d'usage irrévocable sur une certaine durée, sur une infrastructure de câbles sous-marins. France Télécom précise que ce type de contrat a pour objet d'accorder des droits sur des infrastructures ou capacité d'infrastructures et non de fournir des services de télécommunications tels que les liaisons louées.
France Télécom considère que la société Outremer Télécom ne saurait donc se prévaloir de cette notion pour une prestation consistant à lui offrir des liaisons louées. Ainsi, elle estime que la demande de fourniture d'IRU à un tarif cinq fois inférieur à celui proposé le 8 octobre 2003 est infondée et que l'Autorité ne pourra que rejeter la demande.

IV. - Sur les comparaisons proposées par Outremer Télécom

France Télécom estime qu'Outremer Télécom se livre tout au long de la saisine à des affirmations gratuites, sans aucune démonstration, ainsi qu'à des comparaisons de prix peu sérieuses.
Elle indique que la comparaison faite par Outremer Télécom avec la liaison proposée par Flag Télécom entre Londres et l'Inde est inexacte car elle ne comprend pas les backhaul. France Télécom indique que les tarifs proposés par VSNL sont de trois millions de USD par an pour un STM-1. En conséquence, les deux offres ne sont donc manifestement pas comparables. En outre, France Télécom note que le parcours n'est pas le même que celui emprunté par le SAFE, puisque la liaison passe par le câble Flag en mer Rouge.

V. - Sur le niveau tarifaire de l'offre de liaisons louées

France Télécom considère comme infondées les affirmations d'Outremer Télécom selon lesquelles « les tarifs proposés par France Télécom sont manifestement non orientés vers les coûts ».
En outre, France Télécom souhaite rappeler à Outremer Télécom que, contrairement à ce qu'elle prétend, elle n'a aucunement l'obligation de lui fournir des éléments attestant de ses coûts.
S'agissant du niveau tarifaire de cette offre, France Télécom précise que celui-ci reflète encore les investissements liés au câble SAFE, ainsi que, de façon incompressible, la distance à la métropole. France Télécom souligne que l'évolution de son tarif est conforme à la tendance de baisse du coût de la transmission liée à l'utilisation de cette nouvelle technologie.
Elle indique qu'une première baisse de 20 % à 30 % a été effectuée en avril 2003 sur tous les débits de 64 à 2 048 Kbits/s. En outre, elle précise qu'elle peut indiquer à Outremer Télécom qu'une nouvelle baisse pour 2004 va être soumise dans les prochaines semaines à la procédure d'homologation sur la base des derniers coûts constatés.
France Télécom souligne que l'abandon progressif du système de sécurisation des liaisons louées par satellite entraîne une baisse du tarif de ces liaisons. Cette sécurisation des liaisons louées impliquait plus qu'un doublement des coûts de ces liaisons louées.
France Télécom rappelle que le concept CMILT fait référence à un contexte très précis et suppose une mise en couvre longue et complexe. En conséquence, elle estime que la notion de CMILT n'a pas de sens au cas présent, le câble étant une infrastructure récente qui pèse encore beaucoup dans le coût global de la liaison. Le coût en CMILT et le coût historique sont, dans le cas du câble sous-marin, comparables.

VI. - Sur la demande relative aux FAS

France Télécom indique que les FAS ne sont pas supposés refléter des coûts identifiés comme spécifiques à la fourniture d'un service particulier mais correspondant à un choix du fournisseur entre la partie fixe du tarif et la partie récurrente. France Télécom précise que la variable à considérer est la somme des FAS et du tarif du service.
France Télécom souligne que la valeur des FAS est la même pour la métropole et les DOM qui s'élève à 600 EUR pour une extrémité des liaisons louées à 64 Kbits et 128 Kbits, de 1 060 EUR pour une liaison louée à 256 Kbits, de 1 500 EUR pour 512 Kbits et de 2 200 EUR pour une liaison louée à 2 Mbits/s.
En conclusion, France Télécom demande à l'Autorité de déclarer irrecevable la saisine d'Outremer Télécom. A titre subsidiaire, si l'Autorité devait déclarer la saisine recevable, France Télécom demande à l'Autorité de rejeter l'ensemble des demandes d'Outremer Télécom.
Vu les réponses des parties au questionnaire du rapporteur enregistrées le 12 février 2004 ;
Vu les observations en réplique enregistrées le 19 février 2004 présentées par la société Outremer Télécom ;
Outremer Télécom constate que dans ses observations en défense, France Télécom ne se prononce pas sur les tarifs et se trouve ainsi dans l'incapacité de justifier le caractère exorbitant de ceux-ci par rapport à ceux observés de la part d'autres opérateurs ou d'elle-même concernant l'offre Opentransit vers la Martinique. Outremer Télécom estime que l'objet de la saisine porte sur les coûts des infrastructures longue distance reliant la Réunion à la Métropole qui pénalisent le développement de l'île de la Réunion et demande à France Télécom une baisse de ses tarifs pour favoriser le développement de l'usage des technologies de l'information à la Réunion.
Sur le câble SAFE :
Outremer Télécom indique qu'elle a démarré son activité courant décembre 1999 et qu'il lui était impossible d'investir dans ce projet puisqu'un tel type d'investissement d'un montant très conséquent ne peut être réalisé lors de la phase de démarrage d'un opérateur.
Outremer Télécom souligne qu'il devrait exister une concurrence sur la commercialisation de capacités sur ce câble dès lors que 36 autres opérateurs en sont copropriétaires, mais que l'exclusivité de commercialisation dont dispose France Télécom pour des capacités vers la Réunion leur interdit de commercialiser leurs services. Outremer Télécom indique que France Télécom a volontairement gelé l'ouverture à la concurrence des capacités longue distance vers et au départ de la Réunion en introduisant à son seul bénéfice une exclusivité de commercialisation dans l'accord de consortium.

Outremer Télécom rappelle que la véritable concurrence sur une liaison intercontinentale sous-marine ne peut être mise en oeuvre que grâce à une utilisation optimale d'une infrastructure commune et ne passe pas par la duplication du câble, notamment lorsqu'il existe une infrastructure nouvelle d'une capacité telle que le câble SAFE dont la configuration à terme dépasse les 100 Gbits/s.
Sur les demandes d'Outremer Télécom :
Outremer Télécom indique que France Télécom invoque, pour tenter de justifier son refus de répondre à ses demandes, la prétendue absence de clarté de ces dernières.
Elle précise qu'elle ignore le principe dont France Télécom se prévaut et qui imposerait à Outremer Télécom de devoir expliciter l'ensemble de ses besoins à son fournisseur et concurrent France Télécom. En effet, à sa connaissance, France Télécom n'a pas à subordonner la proposition de ses offres à sa connaissance de l'utilisation des prestations que lui achètent les opérateurs alternatifs, dès lors que le tarif des prestations est indépendant du type d'application qu'ils en font. Outremer Télécom estime qu'il appartient à France Télécom de lui soumettre des offres en retour des demandes qu'elle lui adresse.

I. - Sur l'échec des négociations commerciales

Outremer Télécom indique que France Télécom ne peut soutenir qu'il n'y a pas eu échec des négociations et qu'elle n'a pas répondu ou que partiellement à ses demandes. Outremer Télécom souligne qu'il y a un désaccord entre les parties sur les suites à apporter à sa demande, désaccord qui permet de porter le présent différend devant l'Autorité.
Outremer Télécom estime que les négociations avec France Télécom ont échoué sur l'ensemble des demandes qu'elle a formulées dans sa saisine du 6 janvier 2004.

II. - Sur l'irrecevabilité de la demande
des liaisons louées
2.1. L'offre de liaisons louées constitue une offre d'interconnexion

Outremer Télécom indique que l'article D. 99-9 du code des postes et télécommunications ne limite pas à un certain type les liaisons louées relevant des services d'interconnexion. Outremer Télécom estime qu'il est incontestable que les liaisons louées utilisées par France Télécom et par elle-même relèvent du régime juridique de l'interconnexion et que c'est à ce titre qu'elle peut saisir l'Autorité d'un règlement de différend. Outremer Télécom précise que les références faites par France Télécom à l'article D. 99-16 et à la recommandation de la Commission européenne du 24 novembre 1999 ne sont pas pertinentes. Le fait que les liaisons longue distance ne soient pas visées dans cette recommandation ne les exclut pas pour autant de la qualification de liaisons relevant du régime juridique de l'interconnexion.
Outremer Télécom souligne que la directive 97/33 liste les liaisons louées comme relevant des obligations spécifiques en matière d'interconnexion et d'accès imposées aux opérateurs puissants sans que le service de lignes louées visé par cette directive ne se limite au circuit partiel de lignes louées comme relevant seul des services d'interconnexion.

2.2. L'offre de liaisons louées constitue une offre d'accès

Se fondant sur l'article 2 (a) de la directive « Accès », Outremer Télécom rappelle la définition de l'accès comme « la mise à disposition d'une autre entreprise, dans des conditions bien définies de manière exclusive ou non exclusive de ressources et/ou de services en vue de la fourniture de services de communications électroniques. Cela couvre notamment : l'accès à des éléments de réseaux et à des ressources associées (...) ».
Ainsi, il considère que les éléments de réseau (tels que les capacités de transmission entre des points de terminaison déterminés d'un réseau, pour reprendre la définition des liaisons louées telle que figurant à l'article R. 9 du code des postes et télécommunications) font donc partie intégrante de ce dernier, les demandes d'accès aux éléments étant qualifiés comme des « demandes d'accès » au sens du droit communautaire.
Outremer Télécom souligne que le fait de savoir si les liaisons louées font ou non partie du marché de détail ou de gros au sens de la directive « cadre » n'a pas de pertinence pour déterminer si une demande d'accès à des liaisons louées constitue ou non une demande d'accès au réseau au sens de l'article L. 34-8 IV du code des postes et télécommunications.

2.3. Sur l'homologation tarifaire

Outremer Télécom rappelle que la procédure d'homologation tarifaire est prévue à l'article 17 du cahier des charges de France Télécom et que celle de règlement de différend est prévue par les dispositions du code des postes et télécommunications. Il estime que ces deux procédures ne sont pas opposées mais complémentaires dans la mesure où elles remplissent des fonctions différentes.
Outremer Télécom indique que l'homologation tarifaire permet de se prononcer sur un tarif, tel que proposé par France Télécom. Concernant les baisses de tarifs, l'homologation tarifaire vise à entériner une modification de tarif proposé par l'opérateur historique. Outremer Télécom indique que l'Autorité n'a pas la possibilité d'exiger, lorsqu'elle examine le tarif proposé en vue de son homologation, une modification du tarif qui lui est soumis, ni de pouvoir exiger la production de tous les documents lui permettant d'évaluer ce tarif. Il précise que le fait qu'un tarif soit homologué n'implique pas que celui-ci soit « juste » au sens de non excessif.
Outremer Télécom souligne que la procédure de règlement de différend est un contrôle a posteriori qui donne à l'Autorité un pouvoir beaucoup plus étendu lui permettant d'exiger toute modification des conditions de fourniture des prestations, tant techniques que tarifaires. Ainsi, l'Autorité a ainsi la possibilité de demander des informations et de se prononcer sur les conditions, tant techniques que tarifaires, auxquelles doivent se faire notamment les demandes d'interconnexion et d'accès au réseau et que les demandes en cause portent ou non sur des tarifs homologués.

III. - Sur l'irrecevabilité de la demande de fourniture d'IRU
entre la Réunion et la métropole
3.1. Sur les obligations pesant sur France Télécom

Outremer Télécom souligne que la demande d'IRU ne se distingue de la fourniture d'autres capacités du réseau de France Télécom, notamment de la fourniture de liaisons louées, qu'en ce qui concerne les modalités financières et la qualité des droits accordés et, dès lors, la fourniture d'IRU sur le réseau de France Télécom relève du régime réglementaire de l'interconnexion.
Se fondant sur les lignes directrices du 17 décembre 1997 de l'Autorité sur les câbles sous-marin, Outremer Télécom considère que l'ensemble des obligations imposées au titre de l'interconnexion, tels que les principes de non-discrimination et d'orientation vers les coûts, s'appliquent à la fourniture d'IRU.

3.2. Sur l'impossibilité
de France Télécom de fournir des IRU

Outremer Télécom souligne que l'échange de correspondances avec France Télécom attestait clairement que France Télécom avait parfaitement compris qu'il s'agissait d'un droit irrévocable d'usage sur le câble SAFE prolongé d'autres infrastructures sous-marines et terrestres entre le Portugal et Paris.

3.3. Sur la demande de fourniture d'IRU
entre la Réunion et la métropole

Outremer Télécom constate un désaccord sur la qualification de la prestation proposée par France Télécom le 8 octobre 2003 sur la fourniture de liaisons à 34 et 45 Mbits/s entre le POP de la Réunion et le POP de Paris d'Outremer Télécom pour des durées de 10 et 15 ans. France Télécom qualifie ces prestations de fourniture de liaisons louées tandis que pour Outremer Télécom, il s'agit d'un IRU.
Outremer Télécom maintient que cette proposition de fourniture de ressources sur le câble sous-marin entre la Réunion et Paris pour des durées de 10 et 15 ans moyennant un préfinancement correspond à des prestations dites d'IRU relevant du cadre réglementaire de l'interconnexion et doivent être orientées vers les coûts.

IV. - Sur les comparaisons
proposées par Outremer Télécom

Outremer Télécom note que le seul élément de comparaison discuté par France Télécom porte sur le tarif de Flag Télécom et donc que France Télécom ne trouve rien à redire sur les autres comparaisons. En outre, elle estime que France Télécom est dans l'incapacité d'expliquer les incohérences des tarifs qu'elle a proposés.
S'agissant du tarif de Flag Télécom, Outremer Télécom souligne que les arguments de France Télécom ne peuvent être pris en compte, d'une part, en raison de l'inclusion des backhaul et, d'autre part, de la différence de distance parcourue compte tenu de la différence de parcours.
Concernant le tarif proposé par VNSL, Outremer Télécom constate que France Télécom ne communique aucune pièce à l'appui de son affirmation.

V. - Sur le niveau tarifaire
de l'offre de liaisons louées

A titre liminaire, Outremer Télécom observe que France Télécom admet que ses tarifs doivent être orientés vers les coûts, mais toutefois se limite à des considérations générales qui ne permettent pas de vérifier que tel est bien le cas en l'espèce. Se fondant sur l'article 7.2 de la directive 97/33 « Interconnexion », Outremer Télécom estime que France Télécom doit apporter des éléments probants justifiant la tarification actuelle des liaisons louées, ce qu'elle ne fait pas.

5.1. Sur l'absence de fondements juridiques
mentionnés par France Télécom

Outremer Télécom souligne l'absence de pertinence de l'article des Echos cités par France Télécom dans la mesure où celui-ci a trait à la téléphonie sur internet et à la problématique de déterminer si le contrôle des tarifs de France Télécom sur la téléphonie vocale fixe devait où non être allégé en raison du développement de la concurrence.
Concernant la justification du niveau tarifaire de l'offre de liaisons louées, Outremer Télécom indique que l'avis n° 98-223 de l'Autorité, en date du 2 avril 1998, auquel se réfère France Télécom est peu pertinent dans le sens où le câble SAFE est opérationnel depuis juin 2002.

5.2. Sur l'absence d'orientation vers les coûts du niveau
de l'offre de liaisons louées de France Télécom

S'agissant de la non-orientation des prix avec les coûts du câble SAFE, Outremer Télécom indique que sa position ne peut qu'être renforcée à la lumière même des contradictions des affirmations de France Télécom dans son mémoire du 2 février 2004.
Outremer Télécom estime que l'imprécision des commentaires de France Télécom sur les coûts relatifs au câble SAFE se retrouve dans le flou des baisses tarifaires effectuées ou annoncées relativement à l'utilisation de ce câble.

5.3. Sur la mise en place d'un modèle CMILT pour l'application
de l'orientation vers les coûts du tarif de liaisons louées

Outremer Télécom rappelle que les offres de liaisons louées aux clients finals sont soumises aux conditions de l'ONP qui prennent la forme d'obligations renforcées :
- l'orientation des tarifs vers les coûts ;
- l'obligation de disposer d'un système de comptabilisation des coûts permettant de s'assurer que les tarifs sont orientés vers les coûts.
Dans ces conditions, Outremer Télécom indique que pour vérifier qu'un tarif est orienté vers les coûts pertinents, il convient de disposer d'un modèle adéquat de ces coûts.
Outremer Télécom précise que dans nombre d'avis tarifaires, l'Autorité émettait des doutes quant au caractère orienté vers les coûts des tarifs de liaisons louées de France Télécom, mais que faute d'une comptabilité appropriée, elle ne peut vérifier. Or, Outremer Télécom estime qu'il apparaît que France Télécom connaît ses « coûts constatés » puisqu'elle indique que la nouvelle baisse tarifaire de 2004 sera calculée en fonction de ces derniers.
Outremer Télécom note que si France Télécom avait une politique dynamique prenant en compte les effets d'une baisse des tarifs sur les « taux de remplissage », ses baisses devraient aller au-delà de ce qu'elle envisage.

VI. - Sur les FAS

Outremer Télécom constate que France Télécom reconnaît que les FAS correspondent à un choix marketing de répartition entre une partie fixe et une partie récurrente du tarif. Outremer Télécom souligne qu'il est manifeste, à la lumière même des observations de France Télécom, que le tarif des FAS doit être orienté vers les coûts, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.
Outremer Télécom demande à l'Autorité de :
- rejeter l'ensemble des arguments présentés par France Télécom comme non fondés en fait et en droit ;
- faire droit à l'ensemble des demandes d'Outremer Télécom telles qu'exprimées dans sa saisine du 6 janvier 2004.
Vu le courrier de la société Outremer Télécom enregistré le 25 février 2004, transmettant son modèle de coûts ;
Vu la lettre de l'adjoint au chef du service juridique, en date du 26 février 2004, transmettant le second questionnaire du rapporteur adressé aux parties et fixant au 12 mars 2004 la date de clôture de remise des réponses ;
Vu les nouvelles observations en défense enregistrées le 4 mars 2004 présentées par la société France Télécom ;
France Télécom conclut aux mêmes fins que son précédent mémoire par les mêmes moyens que précédemment.
Dans ses nouvelles observations, France Télécom, à titre liminaire, souhaite rappeler certains éléments sur la présente procédure de règlement des différends.