JORF n°136 du 13 juin 2004

A. - Sur le câble SAFE

Sur le risque d'investissement pris par France Télécom :
France Télécom souligne que la possibilité d'investir dans le câble SAT3/WASC/SAFE était ouverte à tout opérateur licencié jusqu'au 16 juin 1999 et que la signature de l'accord C&MA qui formalise l'accord des 36 opérateurs internationaux a eu lieu le 17 juin 1999 en Afrique du Sud, concomitamment à la signature des contrats avec les fournisseurs Tyco et Alcatel Submarine Networks.
France Télécom précise qu'elle a rejoint le MoU le 10 juin 1997 pour inclure l'île de la Réunion dans la configuration du câble sans engagement d'investir à ce stade.
France Télécom indique que, pour obtenir un point d'atterrissement à la Réunion, elle devait investir au minimum [...] et devait fournir à ses frais la station terminale d'atterrissement : le coût de la mise en place étant estimé à [...], entièrement à la charge de France Télécom.
France Télécom précise qu'en dehors des parties terminales du câble tenues à des minima d'investissement les autres cocontractants pouvaient participer au minimum à hauteur du MIU, soit un 2 Mbits/s sur la distance la plus courte du système (275 km) correspondant à un demi-circuit 2 Mbits/s entre l'île Maurice et l'île de la Réunion au tarif de 38 500 USD. France Télécom indique que cet investissement minimal doit permettre de participer à des augmentations ultérieures sur la base du volontariat, sans surinvestir au départ au-delà des besoins anticipés.
Sur les conditions de commercialisation du câble :
France Télécom rappelle qu'elle ne dispose pas d'une « exclusivité de commercialisation » pour des capacités vers la Réunion. France Télécom rappelle que les termes et les conditions inscrites au C&MA ne sont pas la conséquence d'une volonté unilatérale de France Télécom, mais le résultat de négociations longues avec les parties terminales asiatiques et africaines qui exigeaient des clauses de protection de l'investissement.
France Télécom indique, d'une part, que, dans cette négociation, elle s'est opposée à l'établissement de telles règles, d'autre part, que l'accord SAT3/WASC/SAFE a été notifié à la Commission européenne en 1999. France Télécom rappelle que les règles applicables à la commercialisation des capacités du câble résultent de l'accord passé entre les différents investisseurs étrangers.
France Télécom précise qu'il a été obtenu de limiter l'application des règles édictées à 5 ans après la mise en service du câble, après quoi la priorité de la partie terminale s'éteint et les ventes sont libérées.

France Télécom souligne que les droits exclusifs dont elle disposait ne sont qu'une priorité, ne faisant pas l'objet d'un usage systématique et qu'elle peut renoncer à faire jouer au bénéfice d'un autre fournisseur de la capacité SAT-3/WASC/SAFE.
France Télécom rappelle que les opérateurs tiers, notamment Mobius, peuvent acquérir des capacités de transmission sur un marché ouvert où s'exerce la concurrence. Les tarifs pour des contrats à long terme peuvent avoir un impact non négligeable pour de petits opérateurs et ceux-ci ont la flexibilité d'acquérir la capacité nécessaire pour un mode location, correspondant mieux à leur gestion de trésorerie pour la juste quantité voulue, tout en anticipant sur la baisse future du prix des capacités.

B. - Sur les demandes et les besoins de Mobius

France Télécom estime qu'elle n'a pas opposé de refus aux demandes formulées par Mobius. France Télécom indique qu'au regard des réalités techniques et des modalités de mise en oeuvre des prestations, il apparaît peu concevable de faire peser sur France Télécom une absence de réponse dès lors que le périmètre des besoins n'était pas délimité.
France Télécom précise que malgré la variabilité des positions de Mobius, elle n'a pas opposé de fin de non-recevoir et s'est évertuée à proposer des solutions selon des délais tenant compte de l'analyse technique et économique du dossier.

I. - Sur l'absence d'échec des négociations

France Télécom conclut aux mêmes fins que ses premières écritures par les mêmes moyens que précédemment.
Dans ces conditions, France Télécom souligne qu'aucun refus de négocier ou échec des négociations ne peut lui être imputé et que la saisine de Mobius ne remplit pas les conditions de recevabilité énoncées à l'article L. 36-8 du code des postes et télécommunications.

II. - Sur l'irrecevabilité de la demande
de liaisons louées
2.1. L'offre de liaisons louées
ne relève pas de l'interconnexion

France Télécom souligne que tout service de télécommunications fourni à un opérateur ne peut être considéré comme une prestation d'interconnexion. France Télécom estime que la qualité juridique des personnes qui fournissent et utilisent la prestation ne suffit pas à qualifier une prestation de prestation d'interconnexion comme le prétend Mobius.
France Télécom précise que la recommandation de l'Autorité, en date du 25 juillet 2001, n'a pas de valeur réglementaire. France Télécom estime que les liaisons louées sollicitées par Mobius n'entrent pas dans le champ des prestations de liaisons louées visées par l'Autorité dans sa décision n° 2002-147 et ne relèvent pas du régime de l'interconnexion.

2.2. L'offre de liaisons louées ne relève pas de l'accès

France Télécom indique qu'aux termes de l'article L. 32-2 du code des postes et télécommunications les points de terminaison du réseau sont exclus du champ réglementaire de l'accès et que, dès lors, les liaisons louées qui sont définies comme « la mise à disposition par un opérateur d'une capacité de transmission entre des points de terminaison déterminés d'un réseau ouvert au public, au profit d'un utilisateur, à l'exclusion de toute commutation contrôlée par cet utilisateur » ne sauraient être regardées comme une offre d'accès au réseau de France Télécom au sens de l'article L. 34-8 IV du code des postes et télécommunications.
En outre, se fondant sur les dispositions de l'article 4-2 de la directive 97/33/CE, France Télécom soutient que l'obligation de répondre à toute demande raisonnable d'accès au réseau ne saurait porter sur les points de terminaison du réseau.
France Télécom estime que la demande de Mobius relative aux liaisons louées ne peut être qualifiée d'offre d'accès au réseau au sens de l'article L. 34-8 IV du code des postes et télécommunications et ne remplit pas les conditions de recevabilité énoncées par l'article L. 36-8 du code des postes et télécommunications.

2.3. Sur l'homologation tarifaire

France Télécom indique qu'il n'est pas concevable que l'Autorité, qui ne dispose que d'une fonction consultative en matière d'homologation tarifaire, puisse remettre en cause les décisions du ministre dès lors que son avis ne serait pas suivi.
Se fondant sur des décisions de règlements de différends de l'Autorité, France Télécom précise que l'Autorité a reconnu que dès lors que la loi avait établi la compétence du ministre en matière d'homologation, sa propre compétence s'effaçait au profit de celui-ci, y compris dans le cadre d'un règlement de différend.
En outre, France Télécom indique que ce débat a été tranché concernant les tarifs de « collecte IP/ADSL » et « accès IP/ADSL » par le Conseil d'Etat.

III. - Sur les compétences tarifaires

France Télécom ne peut que remettre en cause la méthode développée par Mobius dès lors qu'elle est amenée à justifier son positionnement tarifaire par rapport à des offres dont elle n'est pas en mesure de vérifier la viabilité économique.

3.1. Sur l'absence de pertinence des comparaisons tarifaires

Sur Flag Télécom :
France Télécom note que la société Flag Télécom a été placée sous le chapitre 11 de la loi américaine sur les faillites et qu'ayant réglé sa dette, sa structure de coûts est différente de celle d'un opérateur historique tel que France Télécom. France Télécom indique que n'ayant pas de visibilité sur la structure des coûts de Flag Télécom et ses méthodes comptables, il n'est pas possible de présumer que Flag Télécom vend ses produits avec une marge.

France Télécom rappelle que la route Inde-Royaume Uni est très utilisée et que ceci a une incidence sur le coût unitaire des liaisons louées qui baisse en proportion.
France Télécom indique que le taux de change constitue un élément de pondération des comparatifs présentés.
France Télécom note que le support utilisé n'est ni le SeaMeWe3 ni le SAT3/WASC/SAFE et qu'en conséquence les coûts de Flag Télécom ne sont pas comparables à ceux de France Télécom. Concernant les liaisons Inde-Londres, Flag Télécom utilise ses propres ressources sur le câble Flag Europe-Asie. France Télécom précise que ses prix comprennent la capacité sous-marine, le backhaul Réunion, le backhaul France ainsi que la compétitivité française et réunionnaise afin de fournir cette liaison au plus près du client.
France Télécom indique que les tarifs de liaisons 155 Mbits/s fournis par Flag Télécom ne peuvent être comparés à ceux de France Télécom étant donné que le service de liaisons 155 Mbits/s entre la métropole et la Réunion nécessite une étude de faisabilité particulière avant toute cotation.
France Télécom note que le prix du 45 Mbits/s de Flag Télécom est 18 fois supérieur à celui du 2 Mbits/s. France Télécom propose un ratio de [...] entre le prix d'une liaison louée 2 Mbits/s et d'une liaison 45 Mbits/s, ce qui permet d'obtenir un prix de [...] euros par mois pour une liaison louée 45 Mbits/s en incluant les deux boucles locales, quelle que soit la destination finale du lien.
Sur Mauritius Télécom :
France Télécom note que les tarifs 34 et 45 Mbits/s ne figurent pas en annexe et qu'il n'y a pas de moyen d'en vérifier la véracité. France Télécom précise que le tarif de 10 588 EUR pour 2 Mbits/s est partiellement comparable à son offre Réunion-Paris, mais qu'il faut rajouter le prix de la boucle locale côté France.
France Télécom souligne que la différence de tarif avec Mauritius Télécom sur le câble Safe s'explique par les niveaux d'investissement consentis au départ, et donc des structures de coûts proportionnellement différentes.
France Télécom indique que son offre reste attractive en 2003 pour un client qui cherche un équilibre entre les prix du 2 Mbits/s et du 34/45 Mbits/s et que celle-ci inclut les deux boucles locales qui ne sont pas indexées sur le cours d'une monnaie, ce qui la rend prévisible pour le client.
France Télécom indique que les différences entre le tarif de 175 000 EUR par mois pour une liaison 34 Mbits/s entre la métropole et la Réunion, les tarifs de 109 244 EUR par mois pour un 34 Mbits/s entre l'île Maurice et Paris fournis par Mauritius Télécom ou celui de 126 050 EUR par mois pour un 45 Mbits/s entre Londres et l'Inde par Flag Télécom s'expliquent au regard des différences de prestation.

3.2. Sur les incohérences au regard des distances

Une comparaison du tarif au kilomètre demeure sans pertinence :
France Télécom note que le prix des liaisons louées internationales est basé sur le principe de la bilatéralité, chaque opérateur facturant son demi-circuit, et qu'une comparaison du tarif au kilomètre n'a pas de sens car elle ne prend pas en compte :
- le type de support employé (câble ou satellite) ;
- le coût fixe de chaque opérateur.
France Télécom indique que l'offre de liaisons louées internationales au départ de la Réunion comprend 4 tarifs. France Télécom précise que la structure tarifaire a toujours pour objectif de faire abstraction de la distance séparant l'île de la métropole.
Sur l'analyse des prix au kilomètre :
France Télécom indique que les écarts de prix en USD au Mbit/s par kilomètre sont très importants, quelle que soit la période de la cotation.

IV. - Sur le niveau tarifaire
de l'offre de liaisons louées
4.1. Sur les fondements réglementaires
de l'offre de liaisons louées

France Télécom rappelle que l'Autorité, dans son avis n° 2003-70 du 16 janvier 2003, relatif à l'évolution de tarifs des liaisons louées entre la métropole et les départements d'outre-mer et entre départements d'outre-mer, a accueilli favorablement la décision tarifaire de France Télécom proposant une baisse d'au moins 20 % des tarifs des liaisons louées 2 Mbits/s entre la métropole et les départements d'outre-mer.
France Télécom précise qu'elle soumettra prochainement une nouvelle baisse conforme aux coûts les plus récents dont elle dispose et que les effets de la mise en service du câble SAFE sur les coûts, et le délai avec lequel ces derniers sont connus, ont conduit à une baisse des tarifs décalée dans le temps. France Télécom souligne que dans sa réponse au second questionnaire du rapporteur, elle apportera des éclaircissements sur les hypothèses de coûts retenues dans le modèle transmis par Mobius le 25 février 2004.
S'agissant de la modélisation des coûts, France Télécom souligne qu'il revient à la partie adverse d'avoir choisi un modèle reposant sur les CMILT.

4.2. Sur les tarifs des liaisons louées
et les tarifs d'interconnexion

France Télécom indique que la différence entre le tarif de détail et le tarif d'interconnexion est hors de propos dans la mesure où France Télécom a précisé que les tarifs des FAS à prendre en compte sont ceux des liaisons louées de détail, non ceux des LPT.
France Télécom rappelle que les tarifs des FAS des liaisons louées n'ont pas à être égaux à un quelconque coût, mais relèvent d'un choix marketing quant à la répartition du prix entre cette partie fixe et la partie récurrente du tarif. Le seul cas où le tarif des FAS est tenu de refléter un coût bien identifié est celui du dégroupage.

V. - Sur l'offre de transit IP

France Télécom rappelle, d'une part, qu'elle a souhaité rencontrer Mobius afin de prendre en compte les spécificités de sa demande, d'autre part, que la seule offre disponible et commercialisable est l'offre Open Transit Internet (OTI) qui permet de fournir la connectivité sous différentes formes depuis de nombreux points dans le monde.
France Télécom indique qu'elle a un point de présence international OTI à la Martinique qui permet de proposer la connectivité internationale sur la zone Antilles, mais que ce point n'existe pas à la Réunion, et que la Martinique et Paris sont les deux points existants sur le territoire français pouvant proposer directement la connectivité Internet mondiale.
France Télécom précise qu'elle a proposé ce service avec une connectivité mondiale départ Paris auquel on aboute un lien dédié comparable à celui d'une liaison louée Réunion-Paris, Cette prestation n'est pas comparable à celle proposée depuis la Martinique, pour laquelle la connectivité internet mondiale est disponible depuis ce site sans nécessiter un déport depuis un site éloigné. La seule composante transmission est celle relative à la boucle locale pour joindre le site client.
France Télécom indique qu'elle ne propose pas d'offre de connectivité internet au départ de la Réunion, Wanadoo a souscrit aux offres de collecte IP disponibles au catalogue. France Télécom rappelle qu'elle a déployé sur le territoire français et dans tous les DOM son réseau RBCI, mais que dans les DOM il est actuellement dédié à la collecte IP bas débit et haut débit.
France Télécom indique les conditions dans lesquelles elle serait en mesure d'entreprendre tout développement nécessaire si l'Autorité répondait favorablement à Mobius. France Télécom précise qu'une proposition de ce type imposerait des travaux préalables dont l'échéance et la complexité dépendent in fine de la solution retenue. France Télécom précise qu'en se limitant à une offre de connectivité se basant sur le point de présence domestique sur place, il faudrait en amont une analyse technique et économique. France Télécom n'est pas en mesure de garantir un délai inférieur à trois mois à compter d'une décision de lancement et rappelle les opérations à conduire.
En conséquence, France Télécom conclut aux mêmes demandes que dans son premier mémoire.
Vu la décision n° 2004-263 de l'Autorité, en date du 9 mars 2004, prorogeant d'un mois le délai dans lequel l'Autorité doit se prononcer sur le règlement de différend opposant Mobius à France Télécom ;
Vu les réponses des parties au second questionnaire du rapporteur enregistrées le 12 mars 2004 ;
Vu le courrier de la société Mobius enregistré le 19 mars 2004, transmettant ses observations sur les réponses de France Télécom au second questionnaire du rapporteur ;
Vu le courrier de la société France Télécom enregistré le 24 mars 2004, transmettant des observations à la lettre de Mobius en date du 19 mars 2004 ;
Vu la lettre du chef du service juridique, en date du 25 mars 2004, convoquant les parties à une audience devant le collège le 8 avril 2004 ;
Vu le courrier de la société Mobius enregistré le 5 avril 2004, souhaitant que l'audience devant le collège soit publique ;
Vu le courrier de la société France Télécom enregistré le 5 avril 2004, souhaitant que l'audience devant le collège ne soit pas publique ;
Après avoir entendu le 8 avril 2004, lors de l'audience devant le collège :
- le rapport de M. Nicolas Deffieux, rapporteur présentant les conclusions et les moyens des parties ;
- les observations de MM. Jean-Daniel Lallemand et Lionel Grosclaude pour la société France Télécom ;
- les observations de M. Yann de Prince, pour la société Mobius et de Me Frédérique Dupuis-Toubol, pour le cabinet Bird & Bird ;
En présence de :
- MM. Jean-Daniel Lallemand, Jean Mazier, Lionel Grosclaude, Gabriel Lluch pour la société France Télécom ;
- M. Yann de Prince, pour la société Mobius, et de Me Frédérique Dupuis-Toubol pour le cabinet Bird & Bird ;
- MM. Philippe Distler, directeur général, Laurent Laganier, Nicolas Deffieux, Elies Chitour, Benoît Loutrel et de Mmes Elisabeth Rolin, Christine Galliard, agents de l'Autorité ;
Sur la publicité de l'audience :
Aux termes de l'article 14 du règlement intérieur : « l'audience est publique, sauf demande conjointe de toutes les parties. Si cette demande n'est pas conjointe, le collège de l'Autorité en délibère ».
France Télécom, par un courrier enregistré le 5 avril 2004, a demandé que l'audience devant le collège ne soit pas publique ; la société Mobius, par un courrier enregistré le 5 avril 2004, a demandé que l'audience devant le collège soit publique. Interrogée sur ce point par le président de l'Autorité à l'ouverture de l'audience du 8 avril 2004, France Télécom a précisé qu'elle acceptait de souscrire à la demande de la société Mobius, en conséquence de quoi, l'audience a été publique.

Le collège en ayant délibéré le 4 mai 2004, hors la présence du rapporteur, du rapporteur adjoint et des agents de l'Autorité ;
Adopte la présente délibération fondée sur les faits et les moyens exposés ci-après :

  1. Sur la recevabilité des demandes de la société Mobius

Aux termes de l'article L. 36-8 du code des postes et télécommunications : « En cas de refus d'interconnexion, d'échec des négociations commerciales ou de désaccord sur la conclusion ou l'exécution d'une convention d'interconnexion ou d'accès à un réseau de télécommunications, l'Autorité de régulation des télécommunications peut être saisie du différend par l'une ou l'autre des parties. (...) »
La société France Télécom, dans ses observations en défense, soutient, d'une part, que l'Autorité est incompétente pour statuer sur la demande relative aux liaisons louées présentée par la société Mobius, car elle n'entre pas dans le champ d'application de l'article L. 36-8 du code des postes et télécommunications. En effet, elle estime que la prestation sollicitée par la société Mobius ne relève ni du régime de l'interconnexion, ni de l'accès au sens de l'article L. 34-8 du code des postes et télécommunications. D'autre part, elle considère qu'aucun refus de négocier ou échec des négociations ne peut être imputé à France Télécom sur les demandes de la société Mobius.

1.1. Sur la qualification juridique des prestations demandées
par la société Mobius
a) Sur l'offre de transit IP

Il ressort des pièces du dossier que la prestation demandée par la société Mobius a pour finalité de lui permettre d'acheminer le trafic de données de son point de concentration situé à la Réunion vers le point de présence d'un opérateur qui assure son aboutissement sur le réseau mondial Internet via une offre spécifique au transit IP.
L'Autorité constate qu'il ressort également des pièces du dossier que la société France Télécom ne conteste à aucun moment le fait que l'offre de transit IP sollicitée par la société Mobius soit une prestation d'accès.
Ainsi, aux termes des dispositions du IV de l'article L. 34-8 du code des postes et télécommunications : « (...) Les mêmes exploitants [les exploitants de réseaux ouverts au public figurant sur les listes établies en application des a, b, et c du 7° de l'article L. 36-7] assurent, dans les mêmes conditions, un accès à leur réseau aux utilisateurs et fournisseurs de services de télécommunications autres que le service téléphonique au public, ainsi qu'aux services de communication audiovisuelle autres que les services de radiodiffusion sonore ou de télévision diffusés par voie hertzienne terrestre ou par satellite, ou distribués par câble. Ils répondent également aux demandes justifiées d'accès spécial correspondant à des conditions techniques ou tarifaires non publiées, émanant de ces fournisseurs de service ou des utilisateurs. (...) ».
Il résulte ce qui précède que la prestation sollicitée par la société Mobius doit, en l'état actuel du droit, être qualifiée d'accès spécial au sens des dispositions précitées de l'article L. 34-8. En effet, les conditions techniques et tarifaires de l'offre sollicitée par la société Mobius n'ont pas été publiées par France Télécom. Il s'ensuit que France Télécom, en tant qu'opérateur figurant sur les listes établies en application des a et b du 7° de l'article L. 36-7 du code des postes et télécommunications, est tenue de répondre aux demandes justifiées d'accès spécial émanant de ces fournisseurs de service ou des utilisateurs.
Il appartient donc à l'Autorité, saisie d'une demande de règlement de différend sur le fondement des dispositions de l'article L. 36-8 du code des postes et télécommunications, de préciser, le cas échéant, les conditions équitables, d'ordre technique et financier, de cette prestation d'accès spécial.

b) Sur l'offre de liaison louée sollicitée par la société Mobius

Le 2° de l'article L. 32 du code des postes et télécommunications définit le réseau de télécommunication comme : « (...) toute installation ou tout ensemble d'installations assurant soit la transmission, soit la transmission et l'acheminement de signaux de télécommunications ainsi que l'échange des informations de commande et de gestion qui y est associé, entre les points de terminaison du réseau ».
Il résulte des dispositions de l'article 2 de la directive 92/44/CE modifiée par la directive 97/51/CE (dite « ONP liaisons louées ») et de l'annexe I de la directive 97/33/CE du 30 juin 1997 relative à l'interconnexion, transposées par l'article R. 9 du code des postes et télécommunications, que les liaisons louées constituent des « capacités de transmission transparentes entre points de terminaison du réseau, à l'exclusion de la commutation sur demande ».
France Télécom, dans ses observations en défense, considère que la prestation demandée par Mobius ne constitue pas une prestation d'interconnexion, mais une offre de détail, en se limitant à faire valoir que la seule offre de liaison louée disponible à la Réunion est une offre de détail Transfix. France Télécom considère donc que l'Autorité ne peut faire droit à la demande de Mobius dans le cadre d'un règlement de différend, l'offre de détail Transfix ayant été homologuée par le ministre chargé des télécommunications.
L'Autorité rappelle que France Télécom commercialise à ce jour deux catégories d'offres de liaisons louées :
- une offre de détail Transfix, faisant l'objet d'une homologation tarifaire par le ministre en charge des télécommunications ;
- un service d'interconnexion de liaisons louées, dont les modalités sont décrites au chapitre VIII du catalogue d'interconnexion de France Télécom ; cette offre comprend la fourniture par France Télécom à l'opérateur tiers d'une liaison louée partielle (LPT) entre un site client et un centre de France Télécom ouvert au service d'aboutement, cette liaison louée étant prolongée à travers le service d'aboutement au point de présence de l'opérateur tiers. Elle comprend également un service d'aboutement de liaison louée.

Aux termes de l'article D. 99-11 du code des postes et télécommunications « ces opérateurs [les opérateurs figurant sur la liste établie en application du 7° de l'article L. 36-7] ne peuvent invoquer l'existence d'une offre inscrite au catalogue pour refuser d'engager des négociations commerciales avec un autre opérateur en vue de la détermination de conditions d'interconnexion qui n'auraient pas été prévues par leur catalogue, notamment les conditions d'accès direct aux commutateurs internationaux et à d'autres infrastructures internationales ».
Il résulte de l'instruction que la prestation sollicitée par la société Mobius, opérateur de réseau de télécommunications, a pour finalité de disposer, en s'interconnectant au réseau de France Télécom, d'une offre de capacité entre la Réunion et la métropole, lui permettant non pas de répondre aux besoins propres de l'entreprise, mais d'élaborer des offres de détail ayant vocation à être commercialisées sur le marché final.
L'Autorité constate, au regard des pièces du dossier, que France Télécom possède un monopole de fait sur le transport entre la Réunion et la métropole. Or, l'accès de la société Mobius à une capacité de transport sur le câble sous-marin est une condition essentielle à la commercialisation par cet opérateur d'offres concurrentielles sur le marché de détail des services de télécommunications à la Réunion.
L'Autorité comprend donc la demande de Mobius comme une demande de service d'interconnexion de liaisons louées de gros sur le segment du transport, comparable dans son principe et ses modalités au service d'interconnexion de liaisons louées partielles sur le segment de l'accès et qui s'utilisera concurremment avec le service d'aboutement, tel que défini dans le catalogue d'interconnexion de France Télécom.
Une offre de liaison louée de gros se distingue d'une offre de détail, notamment par l'architecture et la géographie de ses points d'extrémités. Alors qu'une liaison louée de détail a vocation à être livrée dans un site client, une offre d'interconnexion est livrée dans un site de France Télécom, ainsi qu'illustré dans le schéma ci-dessous.

Cette analyse est confortée par France Télécom qui, dans ses observations en défense du 5 février 2004, soutient que : « de la même façon, dans le cas des liaisons louées, il ne s'agit pas de livrer un produit fini mais de fournir aux opérateurs un service d'interconnexion de liaison louée aux fins de la fourniture de services de liaisons louées de bout en bout ».
Aussi, de la même manière que la situation particulière de France Télécom sur le segment de l'accès a conduit l'Autorité à introduire en 2002 une offre de liaisons louées partielles et de liaisons d'aboutement d'interconnexion dans le catalogue d'interconnexion, il apparaît légitime de créer une offre de liaison louée d'interconnexion sur le segment du transport dans le cas particulier de La Réunion, compte tenu de la position de France Télécom sur ce segment et du caractère indispensable de cette prestation pour les opérateurs alternatifs.
L'Autorité considère donc, pour les motifs exposés ci-dessus, que la demande formulée par Mobius est une demande d'accès à un service de liaisons louées de transport, ci-après abrégées LLT, qui relève du régime juridique de l'interconnexion.

1.2. Sur l'échec des négociations

La société France Télécom soutient que la demande de règlement de différend de la société Mobius est irrecevable, car aucun refus de négocier ou échec des négociations ne peut être imputé à France Télécom. En conséquence, elle soutient que la saisine ne remplit pas les conditions de recevabilité énoncées à l'article L. 36-8 du code des postes et télécommunications.
Il ressort des pièces du dossier que les négociations commerciales ont commencé entre les parties par une lettre datée du 11 juillet 2003 de la société Mobius. Par ce courrier, elle demande à France Télécom d'engager des négociations commerciales aux fins de définir les conditions techniques et tarifaires de certaines prestations relevant du régime de l'interconnexion, de l'accès ou de l'accès spécial. La société Mobius envisage de recourir aux prestations suivantes : IRU sur le câble SAFE, liaisons de backhaul depuis les stations d'atterrissement du câble, liaisons louées, service de transmission de données ATM, transit IP. De même, dans son courrier, Mobius indique que, compte tenu de l'utilisation des capacités sur le câble par le groupe France Télécom pour ses propres offres clientèle, il devrait être aisé à France Télécom d'établir très rapidement une proposition fondée sur des conditions non discriminatoires.

Dans sa réponse à cette lettre en date du 29 juillet 2003, France Télécom indique que certaines des demandes de la société Mobius relèvent de l'interconnexion et sont donc offertes à des opérateurs de réseau. Ainsi, elle invite Mobius à solliciter le statut d'opérateur de réseau auprès de l'Autorité afin d'être en mesure de bénéficier des prestations relevant du régime de l'interconnexion et à s'adresser à son agence commerciale pour bénéficier des prestations relevant du régime commercial général.
A la suite de ce courrier de France Télécom, la société Mobius, dans un courrier en date du 2 septembre 2003, réitère sa demande telle que formulée dans son courrier en date du 11 juillet 2003. Elle précise les offres dont elle souhaite disposer en priorité (Transit IP, IPL avec engagement 1, 3 et 5 ans, IRU sur 10 ou 15 ans) ainsi que le planning prévisionnel des besoins en débit (fin 2003 : de 2 à 8 Mbits/s, fin 2004 : de 12 à 34 Mbits/s, etc.). En outre, dans ce même courrier, la société Mobius souhaite connaître les tarifs de France Télécom sur la base des extrémités existantes ou/et faisables. Enfin, la société Mobius indique qu'elle attend de la part de France Télécom une première proposition dans un délai maximal de 15 jours.
Dans un courrier en date du 24 septembre 2003, à l'occasion d'une réunion en date du 19 septembre 2003 organisée entre Mobius et les services de France Télécom, la société France Télécom, concernant la demande relative au transit IP de Mobius, lui demande de disposer de précisions supplémentaires sur ces besoins, et en particulier de savoir s'il s'agit de « réseaux privés virtuels IP avec des sites partenaires à [lui] indiquer » ou de « connectivité Internet générale en France et à l'étranger ».
Dans un courrier en date du 5 octobre 2003, la société Mobius, s'agissant de la reprise de son parc de liaisons louées au titre des offres réservées aux opérateurs, s'interroge sur les réserves de France Télécom pour faire migrer ses liaisons louées dans le cadre d'un contrat d'interconnexion. Elle précise qu'elle ne comprendrait pas les motifs juridiques qui pourraient fonder le refus de France Télécom. En outre, elle indique que cette demande équitable permettant à des opérateurs de bénéficier des tarifs qui leur sont réservés a d'ailleurs déjà été formulée dans des termes similaires par d'autres opérateurs et a fait l'objet d'une décision n° 2002-147 de l'Autorité, en date du 12 février 2002, relative à un règlement de différend entre MFS Communications et France Télécom. Dans ces conditions, elle souhaiterait connaître les modalités envisageables afin d'obtenir une migration du parc de liaisons louées que Mobius loue à France Télécom sur la base des offres grand public vers une offre opérateur. Dans ce même courrier, la société Mobius, concernant ses besoins de transit IP, précise expressément qu'il s'agit bien d'une connectivité internet générale. Enfin, elle rappelle à France Télécom qu'elle attend toujours une réponse à son courrier du 2 septembre 2003. Un silence de France Télécom serait assimilé à un refus de négocier de sa part.
Dans un courrier en date du 8 octobre 2003 intitulé « Ouverture d'une négociation commerciale suite à la mise en service du câble SAFE à la Réunion », France Télécom propose à la société Mobius, en offre commerciale, d'une part, une solution de Transit IP international et, d'autre part, une solution à base de liaisons louées point à point en circuit complet entre ses POP de la Réunion et de Paris, dans la limite des ressources disponibles sur le réseau de France Télécom et reposant sur des engagements de durées 1 an, 3 ans et 5 ans. En outre, pour les engagements de durées 10 ans et 15 ans, France Télécom indique qu'elle est en mesure de proposer à la société Mobius un montage financier spécifique sur la base d'une remise supplémentaire sur le tarif de la liaison louée à 2 Mbits/s en vigueur au catalogue des prix et d'un préfinancement pour les capacités de débit supérieur ou égal à 34 Mbits/s entre ses POP de la Réunion et de Paris. Elle indique également que l'étude des disponibilités des ressources sur câble sous-marin et le délai de réalisation seront communiqués à la société Mobius dans l'accusé de réception de commande faisant suite à la réception de sa commande par France Télécom. Ainsi, elle précise que le présent courrier n'entraîne en aucun cas réservation de ressources.
Dans ce même courrier, elle indique que les prix rassemblés en annexe à ce courrier sont donnés en euros hors taxes et sont soumis à la TVA en vigueur à la date de facturation. France Télécom précise que les prix sont valables pendant une durée de 1 mois dans la limite des ressources disponibles à compter de la date d'émission qui figure sur le document correspondant. Enfin, elle informe la société Mobius qu'elle n'est pas en mesure de répondre en l'état aux demandes de circuit complet de la Réunion vers l'Afrique du Sud, l'Inde et l'île Maurice.
Dans un courrier en date du 4 novembre 2003, répondant au courrier de France Télécom du 8 octobre 2003, la société Mobius relève, en premier lieu, que France Télécom ne répond pas à sa demande relative à des circuits complets de la Réunion vers l'Afrique du Sud, l'Inde et l'île Maurice, ainsi que les demandes tarifaires qui ont été faites au titre des IRU. En conséquence, elle acte le refus pur et simple de France Télécom de négocier sur ces points.
En second lieu, elle indique que la proposition de France Télécom relative à une offre de transit IP est insatisfaisante, tant du point de vue technique que tarifaire, compte tenu des obligations qui pèsent sur France Télécom.
Sur le plan technique, la société Mobius indique qu'elle constate que la proposition de France Télécom prend en compte la prise en charge du trafic depuis la Réunion vers un POP IP de France Télécom situé à Paris, alors même que France Télécom dispose d'un POP IP à la Réunion utilisé pour la fourniture des services de Wanadoo, permettant ainsi de traiter localement le trafic IP local. Dans ces conditions, la société Mobius demande à France Télécom de lui fournir une proposition de transit IP à partir d'un POP IP situé à la Réunion permettant d'atteindre localement les clients de Wanadoo situés à la Réunion.
Sur le plan tarifaire, la société Mobius indique que l'offre de France Télécom ne remplit nullement l'obligation d'orientation vers les coûts à laquelle France Télécom est astreinte en l'espèce. Elle estime que cette offre revient à exiger des frais d'accès au service (FAS) d'un montant prohibitif, à fournir une prestation de transit IP en exigeant le paiement d'une somme d'environ 17 000 EUR HT/Mbit/s, ce qui ne correspond, non seulement pas aux prix du marché pour des prestations comparables, ni à un montant orienté vers les coûts excluant toute marge commerciale. Elle précise que les premières analyses qu'elle a menées la conduisent à estimer qu'un tarif raisonnable pour les prestations demandées serait environ 10 fois inférieur au tarif sollicité, et ce indépendamment du débit demandé.

Enfin, dans ce même courrier, la société Mobius estime que la proposition relative à sa demande concernant une offre de liaisons louées est insatisfaisante. Elle précise que les FAS sont quasiment identiques aux FAS facturés à des clients finals via l'offre commerciale Transfix de France Télécom et sont donc loin d'être une offre orientée vers les coûts.
Ainsi, la société Mobius demande à France Télécom de prendre en compte ses observations, à défaut de quoi elle se verrait contrainte de constater le refus de négocier de France Télécom concernant les demandes de circuits complets et le désaccord relatif aux offres de liaisons louées et de transit IP.
Dans un courrier en date du 23 décembre 2003, en réponse au courrier du 4 novembre de la société Mobius, la société France Télécom indique qu'elle étudiera, dans le cadre de son cahier des charges inscrit dans le décret du 27 décembre 1996, la réponse à ses besoins dans la limite des ressources disponibles sur notre réseau. Ainsi, pour la part des offres qui concerne des prestations internationales sur un câble sous-marin, France Télécom précise que conformément aux obligations fixées à l'article 8 du décret du 27 décembre 1996, elle fait droit sans discrimination aux demandes de droits irrévocables d'usage sur les capacités disponibles dont elle dispose émanant d'opérateurs autorisés en application de l'article L. 33-1 du CPT. Concernant les demandes de circuits complets 2 Mbits/s de la Réunion vers l'Afrique du Sud, l'Inde et l'île Maurice, France Télécom informe la société Mobius qu'elle ne possède ni réseau, ni licence dans ces trois pays. Dans ces conditions, elle précise qu'il lui est nécessaire de disposer, liaison par liaison, de l'adresse des deux extrémités afin de lancer l'étude de faisabilité pour la fourniture de liaisons louées internationales en circuit complet. En outre, France Télécom indique qu'elle est en mesure de fournir sur demande aux opérateurs de réseau des propositions commerciales en IRU 2 Mbits/s à 10 ans et à 15 ans sur les capacités internationales.
Dans ce même courrier, France Télécom, concernant les offres de liaisons louées entre la métropole et les DOM, indique qu'elle répond à ses obligations de service universel au travers d'offres homologuées par le ministre et précise qu'elle maintient sa proposition formulée dans son courrier du 8 octobre 2003, qui est constituée par la fourniture de liaisons louées métropole-DOM à 2 Mbits/s de durées 1 an, 3 ans et 5 ans. Enfin, concernant les besoins en connectivité Internet, France Télécom se propose de tenir une réunion dès que possible.
Contrairement à ce que soutient France Télécom, il résulte de tout ce qui précède que les échanges ci-dessus relatés démontrent un échec des négociations entre les deux parties sur la négociation d'une offre de service de Transit IP et d'une offre de liaisons louées entre la Réunion et la métropole. Il s'ensuit que ladite saisine est recevable au regard de l'article L. 36-8 du code des postes et télécommunications.

  1. Sur le caractère justifié des demandes de Mobius

Au regard des éléments échangés dans le cadre de cette procédure, l'Autorité rappelle qu'il lui revient, dans le cadre du règlement de ce litige de « préciser les conditions équitables, d'ordre technique et financier, dans lesquelles l'interconnexion ou l'accès spécial doivent être assurés » conformément à l'article L. 36-8 du code des postes et télécommunications.

2.1. Sur les obligations de France Télécom

En premier lieu, l'Autorité rappelle qu'il résulte des dispositions de l'article L. 34-8 précité que la société France Télécom, en tant qu'opérateur figurant sur les listes établies en application des a et b du 7° de l'article L. 36-7 du code des postes et télécommunications, est tenue de faire droit dans des conditions objectives, transparentes et non discriminatoires aux demandes d'interconnexion de la société Mobius, si celles-ci sont justifiées au regard de ses besoins et de la capacité de France Télécom à la satisfaire.
En outre, il ressort de cette même disposition que les tarifs d'interconnexion « rémunèrent l'usage effectif du réseau de transport et de desserte et reflètent les coûts du service rendu ».
En second lieu, il résulte également de l'article L. 34-8 précité que la société France Télécom, en tant qu'opérateur figurant sur la liste établie en application du a du 7° de l'article L. 36-7 du code des postes et télécommunications, est tenue de faire droit dans des conditions objectives, transparentes et non discriminatoires aux demandes d'accès spécial de la société Mobius, si celles-ci sont justifiées au regard de ses besoins et de la capacité de France Télécom à la satisfaire.
En outre, il ressort de cette même disposition que la fourniture de cet accès doit donner lieu une rémunération reflétant les coûts du service rendu.

2.2. Sur la capacité technique de France Télécom
à répondre aux demandes de Mobius

Il ressort de l'analyse des pièces du dossier que la société France Télécom apparaît être en mesure de proposer la prestation de liaison louée de transport (LLT), dans la mesure où elle dispose de capacité sur les câbles concernés et qu'elle commercialise déjà une offre de liaison louée de détail Transfix, qui utilise les éléments de réseau nécessaires à la fourniture de l'offre de LLT.
Dans ces conditions, l'Autorité estime que France Télécom dispose de la capacité technique pour répondre à la demande de LLT de la société Mobius.
Par ailleurs, l'Autorité constate que France Télécom dispose de capacité sur les câbles concernés et qu'elle utilise déjà des équipements de routage et de transmission IP, notamment pour la fourniture de son offre de collecte IP/ADSL utilisée aujourd'hui principalement par Wanadoo. Le traceroute fourni par la société Mobius confirme d'ailleurs la présence d'un routeur IP de France Télécom à la Réunion. En métropole, ces équipements sont très courants et servent notamment à l'acheminement du trafic de l'offre Collecte IP/ADSL, utilisée majoritairement par les fournisseurs d'accès Internet pour proposer des services d'accès Internet haut débit. Sur l'intégralité du trajet de l'offre de transit IP demandée par Mobius, France Télécom dispose donc déjà des équipements nécessaires à la fourniture de cette prestation.

Au regard de ces éléments, l'Autorité estime donc que France Télécom dispose de la capacité technique pour proposer une offre de transit IP.

2.3. Sur le caractère justifié des demandes de Mobius

L'Autorité constate, au regard des pièces du dossier, qu'une prestation de transport entre la Réunion et la métropole est nécessaire à l'activité de la société Mobius. En effet, Mobius collecte son trafic au sein de l'île de la Réunion et doit disposer d'une solution pour acheminer ce trafic hors de l'île, afin de permettre la communication de ses abonnés avec le reste du monde.
L'Autorité estime que les offres actuelles de France Télécom qui incluent une composante de transport ne répondent pas aux besoins de Mobius. En effet, l'offre de collecte IP/ADSL oblige son bénéficiaire à confier l'accès et la collecte à France Télécom, alors que Mobius réalise elle-même ces prestations et que cela constitue le coeur de son activité. Concernant l'offre de liaison louée de détail Transfix, elle est construite et mise en place pour les entreprises, c'est-à-dire les utilisateurs finals, mais n'est pas adaptée pour les opérateurs.
Pour permettre à Mobius d'acheminer son trafic hors de l'île, la prestation de base dont il a besoin est une offre de liaison louée de transport adaptée aux opérateurs. En effet, seule une liaison louée lui permet de bénéficier d'une réelle sécurité de transmission, exigée par certains de ses clients pour des applications sensibles à la qualité de transmission.
En conséquence, l'Autorité estime que la prestation de liaison louée de transport, telle que demandée par la société Mobius, est justifiée.
Par ailleurs, l'Autorité constate que l'offre de transit IP permet de bénéficier d'économies importantes dues au multiplexage statistique des trafics des abonnés, comme le montre la différence de prix actuelle entre l'offre de liaison louée Transfix disponible à la Réunion, et le tarif de collecte de l'offre Collecte IP/ADSL, qui inclut une prestation de transport. La disponibilité d'une telle offre apparaît donc comme un élément déterminant pour permettre à la société Mobius de proposer une offre d'accès internet à haut débit compétitive. Dans ces conditions, l'Autorité considère que la demande d'une offre de transit IP est justifiée.
3. Sur la demande de Mobius relative à la fourniture d'une offre de liaisons louées entre la Réunion et la métropole

3.1. Sur le principe

Il résulte des dispositions de l'article L. 34-8 et du caractère justifié de la demande de Mobius étudié ci-avant que la demande d'interconnexion de Mobius ne peut être refusée. En outre, sur le fondement de ce même article, l'offre de liaison louée de transport doit donner lieu à une rémunération de l'usage effectif du réseau de transport, reflétant les coûts du service rendu.

3.2. Sur l'architecture technique

Il ressort de la description de l'architecture technique présentée par France Télécom dans sa réponse au premier questionnaire que les sites à partir desquels elle construit son offre de détail sont situés à la Réunion sur l'anneau réunionnais (Saint-Paul, Saint-Denis, Saint-Benoît et Saint-Pierre) et à Paris sur le réseau sectoriel (site de Saint-Amand notamment).
Par ailleurs, dans le cadre d'une offre de gros, il apparaît que les points d'interconnexion devront être des centres de brassage où sont disponibles des offres de liaisons d'aboutement, afin de permettre aux opérateurs, clients de l'offre de LLT, d'interconnecter cet élément de réseau au reste de leur réseau.
Il résulte de ces deux observations que les points d'interconnexion pertinents pour l'offre de gros de liaison louée entre la Réunion et la métropole sont :
- un site France Télécom ouvert à l'interconnexion et dans lequel est disponible un service d'aboutement de liaisons louées à Saint-Denis de la Réunion ;
- un site France Télécom ouvert à l'interconnexion et dans lequel est disponible un service d'aboutement de liaisons louées à Paris.
Contrairement à l'offre de détail Transfix déjà disponible à la Réunion, les points d'extrémité de l'offre de LLT sont donc fixes et sont des points de présence du réseau de France Télécom. L'architecture des deux offres est décrite dans le schéma ci-dessous.

Par ailleurs, Mobius demande que la prestation de liaison louée soit fournie à partir d'un câble sous-marin, et non d'une liaison satellite, les caractéristiques techniques du câble étant plus favorables à son activité, notamment en termes de temps de réponse et de disponibilité. L'Autorité considère que les caractéristiques techniques du câble et du satellite sont effectivement différentes et que France Télécom doit donc s'engager à faire reposer son offre sur un câble sous-marin atterrissant à la Réunion.

Enfin, l'Autorité estime que l'offre de France Télécom n'a pas en 2004 à être sécurisée par une liaison satellite, l'architecture technique en boucle du câble sous-marin assurant déjà une sécurisation suffisante. France Télécom annonce d'ailleurs la suppression de cette sécurisation dans ses écrits.

3.3. Sur les modèles de coûts présentés par les parties

Les parties ont présenté, dans le cadre de ce règlement de différend, deux modélisations qui amènent à des résultats sensiblement différents :
- la société Mobius a fourni à l'appui de sa demande une modélisation réalisée par un cabinet de consultant, qui établit un coût de 1 550 EUR par Mbit/s et par mois en 2003 pour une liaison louée. Ce coût est de 1 272 EUR par Mbit/s et par mois en 2004 ;
- la société France Télécom a modifié des hypothèses du modèle proposé par la société Mobius et a, par ailleurs, fourni ses propres estimations de coûts, qui s'établissent au niveau de [...] par Mbit/s et par mois pour une liaison louée. Il est à noter que ce coût recouvre une prestation plus large que celle modélisée par Mobius, incluant notamment des parties terrestres.
Si les hypothèses de calcul et les méthodes utilisées par la société Mobius au soutien de sa demande ont pu faire l'objet de débats contradictoires entre les parties, puisque le modèle complet a été communiqué et a pu être commenté par France Télécom, l'Autorité note que France Télécom s'est limitée à fournir les coûts de différents tronçons de la prestation en question, sans aucunement justifier de leur niveau, ni expliciter la formation de ces coûts, et ce, alors même que lui incombait la charge de la preuve de ses tarifs.
En effet, en vertu des dispositions des paragraphes III de l'article L. 34-8, les tarifs relatifs aux prestations d'interconnexion de France Télécom, en tant qu'opérateur figurant sur la liste établie en application des a et b du 7° de l'article L. 36-7 du code des postes et télécommunications, doivent donner lieu à une rémunération de l'usage effectif du réseau de transport, reflétant les coûts du service rendu. Dans ces conditions, France Télécom est tenue de justifier que chacun de ces tarifs proposés en l'espèce respectent ce principe, conformément, tant aux dispositions de l'article 7, § 2, de la directive n° 97/33/CE du 30 juin 1997 susvisée, qu'à celles de l'article 13, § 3, de la directive n° 2002/19 susvisée.
L'Autorité rappelle que l'article 7, § 2, de la directive n° 97/33 prévoit que : « La charge de la preuve que les redevances sont déterminées en fonction des coûts réels, y compris un rendement raisonnable des investissements, incombe à l'organisme qui fournit l'interconnexion avec ses installations ». En outre, elle relève également que l'article 13, § 3, de la directive n° 2002/19 précitée dispose que « lorsqu'une entreprise est soumise à une obligation des prix en fonction des coûts, c'est à elle qu'il incombe de prouver que les redevances sont déterminées en fonction des coûts, en tenant compte d'un retour sur investissement raisonnable ».

3.4. Sur la méthode des CMILT

L'Autorité a pris en compte les observations des parties visant à établir le niveau des coûts des prestations en question.
L'Autorité note cependant que la démarche retenue pour l'établissement des coûts ne s'inscrit pas dans une logique de type CMILT, contrairement à ce qui est soutenu par Mobius. En effet, les évaluations retenues :
- ne se fondent pas sur la définition d'un incrément de service, mais bien sur une allocation d'un coût entre tous les produits ;
- ne se fondent pas sur des optimisations d'architecture, ni sur les coûts actuels des meilleures technologies disponibles, mais bien sur les investissements effectivement consentis pour le cas particulier des infrastructures étudiées à la date de leur réalisation.
Les coûts ainsi déterminés ne sont pas des coûts CMILT, mais bien une approximation des coûts effectivement supportés par l'opérateur historique pour le cas particulier des prestations litigieuses.
L'Autorité note cependant, conformément aux écritures de France Télécom, que l'âge récent du câble en question tend à diminuer les écarts qui peuvent exister entre une méthode fondée sur des coûts historiques et une méthode fondée sur des coûts prospectifs.

3.5. Sur la dimension temporelle des coûts évalués
a) Concernant la méthode d'amortissement retenue

L'Autorité observe que l'annualisation du coût d'investissement initial repose sur la méthode des coûts de remplacement, qui prend en compte le renouvellement à l'infini des infrastructures.
Cette méthode est favorable à France Télécom et permet de prendre en compte, non pas le coût unique de l'infrastructure disponible aujourd'hui, mais également son remplacement régulier lorsqu'elle sera amortie.
Cette méthode utilisée par Mobius dans sa modélisation n'est pas contestée par France Télécom et a été reprise par l'Autorité dans ses évaluations.

b) Concernant le calcul année par année des coûts

L'Autorité note que France Télécom procède à une tarification des prestations qui fait supporter le coût de la phase de démarrage du service aux acheteurs de la prestation.
Cette méthode, qui induit une très forte dégressivité des coûts en fonction de l'augmentation du taux de remplissage des équipements, ne semble pas à même de fournir un signal économique cohérent pour les opérateurs concurrents qui achètent la prestation.
En effet, elle risque de constituer un frein à l'entrée susceptible de retarder l'arrivée de la concurrence sur des marchés en développement. Les tarifs ainsi calculés par France Télécom sont élevés dans la phase de démarrage du service. Cette situation est d'autant plus regrettable que les années à venir seront déterminantes pour le développement du marché du haut débit.
Pourtant, l'Autorité observe que la modélisation proposée par Mobius repose sur ce même principe.

L'Autorité a ainsi fondé ses propres estimations sur ce principe de recouvrement des coûts, sans le remettre en cause à ce stade.

3.6. Sur les principales hypothèses retenues

Les hypothèses présentées sont celles qui ont été retenues par l'Autorité pour le calcul du coût des prestations demandées par Mobius. Elles proviennent des mémoires échangés par les plaignants et de l'audience devant le collège de l'Autorité.
La modélisation présentée par Mobius et séparant les câbles SAT3/WASC et SAFE n'a pas été retenue par l'Autorité. En effet, comme le fait remarquer France Télécom dans ses réponses au deuxième questionnaire, SAT3/WASC/SAFE est une seule et même infrastructure gouvernée par un seul et même accord. La modélisation retenue porte donc sur l'intégralité du câble SAT3/WASC/SAFE.
Les montants des investissements de France Télécom ont été donnés par celle-ci dans sa réponse au deuxième questionnaire et dans ses nouvelles observations en défense du 4 mars 2004. Ils sont de 3 millions de USD pour la station d'atterrissement à la Réunion et de 50 millions de USD pour le câble. La capacité totale du câble étant de 120 Gbits/s ou 130 Gbits/s selon les tronçons, la capacité totale disponible pour France Télécom est a minima de 9,2 Gbits/s, par proportionnalité avec l'investissement engagé. L'Autorité a retenu ce chiffre dans le cadre de la présente demande de règlement de différend, bien qu'il soit probable que la capacité allouée à France Télécom soit en réalité supérieure, France Télécom étant le premier actionnaire du consortium.

Le coût du capital utilisé par France Télécom est de 14,3 %, d'après ses réactions au modèle de coût présenté par Mobius.
Les coûts opérationnels retenus par l'Autorité sont ceux déclarés par France Télécom dans ses réactions au modèle de coût. Ils sont de 10 % de l'investissement initial et de 20 % du montant de l'amortissement annuel. Ces chiffres n'ont pas été justifiés par France Télécom, mais paraissent les plus fiables à ce stade.

Les hypothèses de durée de vie et de remplissage du câble SAT3/WASC/SAFE ont été communiquées par France Télécom au cours de l'audience. France Télécom prévoit que le câble sera saturé dans 11 ans si son remplissage se poursuit au rythme actuel. L'hypothèse de remplissage retenue est donc une croissance linéaire du trafic sur le câble jusqu'à saturation.
[...]
[...]
Le pourcentage du câble utilisé pour la liaison Réunion-métropole est de [...]. Il est obtenu en comptant une utilisation à [...] de la partie SAT3/WASC entre le Portugal et l'Afrique du Sud, et à [...] du câble SAFE, conformément aux données fournies par France Télécom sur la matrice de distance du consortium dans sa réaction au modèle de coût pour une liaison de la Réunion vers l'Afrique du Sud.
[...]
Les hypothèses de consommation à la Réunion retenues sont celles communiquées par France Télécom dans ses réponses au deuxième questionnaire et dans ses réactions au modèle de coût présenté par Mobius. En l'absence de réponse de France Télécom, les données utilisées sont celles fournies dans le modèle de coût et que France Télécom n'a pas contestées.
La capacité réservée sur le câble par utilisateur a été communiquée par France Télécom dans ses réponses au deuxième questionnaire. Elle est de 0,75 kbit/s par abonné RTC et de 22,5 kbits/s par abonné ADSL.
[...]
[...]
[...]
[...]
[...]
Les taux de remplissage utilisés sont ceux communiqués par France Télécom dans ses réponses au deuxième questionnaire. France Télécom n'ayant pas communiqué le taux de remplissage des STM1 en bande passante « paquets » pour le câble SAT3/WASC/SAFE, ce taux a été calculé à partir du taux « tous supports de transmission » en appliquant le ratio correspondant fourni pour les liaisons louées. Ces chiffres n'ont pas été justifiés précisément par France Télécom, mais paraissent les plus fiables à ce stade.
[...]
[...]
[...]

Concernant les coûts associés au transport du trafic entre le Portugal et Penmarch, par le câble SEA-ME-WE, l'Autorité a appliqué le coût linéaire de transport du câble SAT3/WASC/SAFE sur la distance considérée. Cette modélisation est favorable à France Télécom, car le trafic sur cette partie de SEA-ME-WE est supérieur au trafic moyen sur SAT3/WASC/SAFE ; les coûts associés sont donc inférieurs. Le coût retenu pour cette portion du trajet est de 40 EUR par mois et par Mbit/s.
Concernant les coûts de la partie terrestre de la liaison louée comprise entre Penmarch et Paris, l'Autorité a retenu l'hypothèse de France Télécom présentée dans son modèle, transmis à l'occasion de ses réponses au deuxième questionnaire du rapporteur, et conformément à la description de l'architecture technique du réseau fournie par France Télécom dans ses réponses au premier questionnaire, c'est-à-dire un coût de 3 200 EUR par an pour un équivalent 2 Mbits/s, soit 133 EUR par Mbit/s et par mois.
Concernant les coûts de la partie terrestre de la liaison louée comprise entre la station d'atterrissement à Saint-Paul et Le Port, France Télécom et Mobius n'ont pas fourni d'estimation des coûts associés. En l'absence d'éléments, l'Autorité considère qu'une liaison louée sur ce segment ne peut présenter un coût supérieur à celui d'une liaison louée d'aboutement, dont le tarif est fixé au catalogue d'interconnexion, soit 140,4 EUR par mois et par Mbit/s, sur la base d'une liaison de 2 Mbits/s de 28 kilomètres.

3.7. Evaluation du coût de transport

L'Autorité a réalisé ses propres estimations des coûts liés à l'utilisation du câble SAT3/WASC/SAFE, à partir des observations des parties et des hypothèses décrites ci-avant.
Pour la station d'atterrissement, les coûts et les trafics à prendre en compte sont les suivants :

[...]

Pour le câble, les coûts et les trafics à prendre en compte sont les suivants :

Au total, le coût du transport sur le câble SAT3/WASC/SAFE est donc donné par le calcul suivant :

L'Autorité estime donc que le coût du transport sur le câble SAT3/WASC/SAFE est de 574 EUR par Mbit/s en 2004. En tenant compte de l'ensemble des segments de réseau qui sont utilisés pour fournir l'offre de liaison louée décrite par la présente décision, le coût de cette prestation est donc de 887 EUR par mois et par Mbit/s.
Dans ces conditions, l'Autorité étant liée par la demande de la société Mobius, France Télécom devra faire droit à la demande de celle-ci concernant la fixation d'un tarif de la prestation de LLT à 1 550 EUR par Mbit/s et par mois.

3.8. Sur les frais d'accès au service

Les frais d'accès au service sont un élément de la tarification de l'offre de liaison louée de transport. Il revient donc à l'Autorité, aux termes de l'article L. 36-8, de préciser les conditions de fixation de leur tarif, dès lors que cette offre constitue une prestation d'interconnexion.
Il résulte de ce qui précède que les frais d'accès au service de l'offre de liaison louée de transport sont ceux d'une offre de gros et qu'ils doivent être orientés vers les coûts. En effet, dès lors que l'ensemble de l'offre est soumise à l'orientation vers les coûts, que la partie récurrente du tarif est fixée dans le respect de ce principe, il doit en aller de même pour les frais d'accès au service.
Mobius demande à l'Autorité de fixer les tarifs des frais d'accès au service pour l'offre de liaisons louées au niveau des frais d'accès au service définis au catalogue d'interconnexion.
La prestation de gros définie par la présente décision repose sur trois tronçons principaux :
- un backhaul en métropole entre la station d'atterrissement et le point de livraison ;
- une capacité à fournir par France Télécom au sein de la capacité dont elle dispose déjà entre les stations d'atterrissement à la Réunion et à Penmarch ;
- un backhaul à la Réunion entre la station d'atterrissement et le point de livraison.
Cette architecture n'implique un raccordement entre le client et France Télécom qu'en deux points, tous deux situés dans des bâtiments France Télécom. En effet, seuls les deux brasseurs d'extrémité de l'offre doivent être configurés, les brasseurs ou stations d'atterrissement traversés n'étant pas impactés par la création de l'offre de liaison louée de transport. Chacun de ces raccordements est semblable à celui opéré dans le cas d'une liaison d'aboutement. La mise en service de la LLT est donc comparable à la mise en service de deux liaisons d'aboutement.

En l'absence de toute justification de ses coûts de la part de France Télécom, l'Autorité estime donc que les frais d'accès au service pour l'offre de liaison louée de transport ne pourront excéder le coût de mise en service de deux liaisons d'aboutement.
Pour des débits de 2 Mbits/s, le tarif des frais d'accès au service pour une liaison d'aboutement est de 1 959 EUR. Pour des débits supérieurs, le tarif des frais d'accès au service devra également être cohérent avec le tarif des frais d'accès au service des liaisons d'aboutement à 155 Mbits/s, à savoir 4 035 EUR.
Par ailleurs, les opérateurs pourront utiliser des offres de liaisons d'aboutement définies au catalogue d'interconnexion pour le raccordement de cette liaison louée de transport à leur réseau. Les frais d'accès au service de ces liaisons louées utilisées pour le raccordement sont déjà définis au catalogue d'interconnexion.

  1. Sur la demande de Mobius relative au transit IP
    4.1. Sur le principe

Il résulte des dispositions de l'article L. 34-8 du code des postes et télécommunications que la société France Télécom, en tant qu'opérateur figurant sur la liste établie en application du a du 7° de l'article L. 36-7 du code des postes et télécommunications est tenue de faire droit dans des conditions objectives, transparentes et non discriminatoires, aux demandes d'accès spécial de la société Mobius, si celles-ci sont justifiées au regard de ses besoins et de la capacité de France Télécom à la satisfaire, en l'absence d'une prestation d'accès publiée par France Télécom aux conditions techniques et tarifaires répondant à ces besoins.
Il ressort donc en particulier que la fourniture de l'offre de transit IP doit donner lieu à une rémunération reflétant les coûts du service rendu.

4.2. Sur l'architecture technique

L'offre de transit IP consiste dans le transport entre le site du BAS France Télécom de Saint-Denis de la Réunion et un site à Paris fixé en accord avec Mobius.
Par ailleurs, la société Mobius souligne l'importance de la possibilité d'échanger du trafic localement avec les filiales de France Télécom, comme le fait actuellement Wanadoo. Elle demande donc l'accès au POP IP de France Télécom à la Réunion.
Au regard des éléments échangés dans le cadre de cette procédure, l'Autorité estime que la demande de la société Mobius d'échange local de trafic est justifiée.
L'Autorité note que le GIP Renater a déclaré, sur son site internet, ouvrir prochainement un GIX à la Réunion, et avoir obtenu l'accord de France Télécom pour la participation de cette dernière à l'échange de trafic en ce point. Dans ces conditions, l'Autorité considère que cette solution répond aux préoccupations de Mobius.
Si, toutefois, France Télécom n'échangeait pas réellement son trafic, ainsi que le trafic de ses filiales, sur le GIX Renater avant le 31 juillet 2004, l'Autorité estime que la demande de Mobius d'accéder au POP IP de France Télécom à la Réunion serait justifiée et que France Télécom devrait y faire droit.

4.3. Sur les tarifs

Les éléments de réseau utilisés pour la fourniture de l'offre de transit IP sont pour grande partie les mêmes que ceux utilisés pour fournir de la capacité. Les différences qui existent entre ces deux offres consistent ainsi :
- principalement, en la possibilité de réaliser du multiplexage statistique dans le cas de l'offre de transit IP (la capacité n'est alors pas dédiée, contrairement à l'offre de liaison louée) ;
- accessoirement, en l'utilisation d'équipements IP à la place de brasseurs de liaisons louées.
Il apparaît dès lors que les tarifs de l'offre de transit IP doivent être cohérents avec les coûts calculés pour l'offre de liaison louée. Ils devront également tenir compte des gains correspondant au multiplexage statistique. L'Autorité estime donc que le tarif de l'offre de transit IP devra être égal au tarif de l'offre de liaison louée corrigé d'un facteur correspondant au multiplexage statistique. Ce ratio devra être cohérent avec ceux constatés pour les offres existantes de France Télécom, tant dans les DOM qu'en métropole.
En outre, il résulte de ce qui précède que les frais d'accès au service de l'offre de transit IP sont ceux d'une offre de gros et qu'ils doivent être orientés vers les coûts, la partie récurrente du tarif étant elle-même soumise à ce principe,
Décide :


Historique des versions

Version 1

A. - Sur le câble SAFE

Sur le risque d'investissement pris par France Télécom :

France Télécom souligne que la possibilité d'investir dans le câble SAT3/WASC/SAFE était ouverte à tout opérateur licencié jusqu'au 16 juin 1999 et que la signature de l'accord C&MA qui formalise l'accord des 36 opérateurs internationaux a eu lieu le 17 juin 1999 en Afrique du Sud, concomitamment à la signature des contrats avec les fournisseurs Tyco et Alcatel Submarine Networks.

France Télécom précise qu'elle a rejoint le MoU le 10 juin 1997 pour inclure l'île de la Réunion dans la configuration du câble sans engagement d'investir à ce stade.

France Télécom indique que, pour obtenir un point d'atterrissement à la Réunion, elle devait investir au minimum [...] et devait fournir à ses frais la station terminale d'atterrissement : le coût de la mise en place étant estimé à [...], entièrement à la charge de France Télécom.

France Télécom précise qu'en dehors des parties terminales du câble tenues à des minima d'investissement les autres cocontractants pouvaient participer au minimum à hauteur du MIU, soit un 2 Mbits/s sur la distance la plus courte du système (275 km) correspondant à un demi-circuit 2 Mbits/s entre l'île Maurice et l'île de la Réunion au tarif de 38 500 USD. France Télécom indique que cet investissement minimal doit permettre de participer à des augmentations ultérieures sur la base du volontariat, sans surinvestir au départ au-delà des besoins anticipés.

Sur les conditions de commercialisation du câble :

France Télécom rappelle qu'elle ne dispose pas d'une « exclusivité de commercialisation » pour des capacités vers la Réunion. France Télécom rappelle que les termes et les conditions inscrites au C&MA ne sont pas la conséquence d'une volonté unilatérale de France Télécom, mais le résultat de négociations longues avec les parties terminales asiatiques et africaines qui exigeaient des clauses de protection de l'investissement.

France Télécom indique, d'une part, que, dans cette négociation, elle s'est opposée à l'établissement de telles règles, d'autre part, que l'accord SAT3/WASC/SAFE a été notifié à la Commission européenne en 1999. France Télécom rappelle que les règles applicables à la commercialisation des capacités du câble résultent de l'accord passé entre les différents investisseurs étrangers.

France Télécom précise qu'il a été obtenu de limiter l'application des règles édictées à 5 ans après la mise en service du câble, après quoi la priorité de la partie terminale s'éteint et les ventes sont libérées.

France Télécom souligne que les droits exclusifs dont elle disposait ne sont qu'une priorité, ne faisant pas l'objet d'un usage systématique et qu'elle peut renoncer à faire jouer au bénéfice d'un autre fournisseur de la capacité SAT-3/WASC/SAFE.

France Télécom rappelle que les opérateurs tiers, notamment Mobius, peuvent acquérir des capacités de transmission sur un marché ouvert où s'exerce la concurrence. Les tarifs pour des contrats à long terme peuvent avoir un impact non négligeable pour de petits opérateurs et ceux-ci ont la flexibilité d'acquérir la capacité nécessaire pour un mode location, correspondant mieux à leur gestion de trésorerie pour la juste quantité voulue, tout en anticipant sur la baisse future du prix des capacités.

B. - Sur les demandes et les besoins de Mobius

France Télécom estime qu'elle n'a pas opposé de refus aux demandes formulées par Mobius. France Télécom indique qu'au regard des réalités techniques et des modalités de mise en oeuvre des prestations, il apparaît peu concevable de faire peser sur France Télécom une absence de réponse dès lors que le périmètre des besoins n'était pas délimité.

France Télécom précise que malgré la variabilité des positions de Mobius, elle n'a pas opposé de fin de non-recevoir et s'est évertuée à proposer des solutions selon des délais tenant compte de l'analyse technique et économique du dossier.

I. - Sur l'absence d'échec des négociations

France Télécom conclut aux mêmes fins que ses premières écritures par les mêmes moyens que précédemment.

Dans ces conditions, France Télécom souligne qu'aucun refus de négocier ou échec des négociations ne peut lui être imputé et que la saisine de Mobius ne remplit pas les conditions de recevabilité énoncées à l'article L. 36-8 du code des postes et télécommunications.

II. - Sur l'irrecevabilité de la demande

de liaisons louées

2.1. L'offre de liaisons louées

ne relève pas de l'interconnexion

France Télécom souligne que tout service de télécommunications fourni à un opérateur ne peut être considéré comme une prestation d'interconnexion. France Télécom estime que la qualité juridique des personnes qui fournissent et utilisent la prestation ne suffit pas à qualifier une prestation de prestation d'interconnexion comme le prétend Mobius.

France Télécom précise que la recommandation de l'Autorité, en date du 25 juillet 2001, n'a pas de valeur réglementaire. France Télécom estime que les liaisons louées sollicitées par Mobius n'entrent pas dans le champ des prestations de liaisons louées visées par l'Autorité dans sa décision n° 2002-147 et ne relèvent pas du régime de l'interconnexion.

2.2. L'offre de liaisons louées ne relève pas de l'accès

France Télécom indique qu'aux termes de l'article L. 32-2 du code des postes et télécommunications les points de terminaison du réseau sont exclus du champ réglementaire de l'accès et que, dès lors, les liaisons louées qui sont définies comme « la mise à disposition par un opérateur d'une capacité de transmission entre des points de terminaison déterminés d'un réseau ouvert au public, au profit d'un utilisateur, à l'exclusion de toute commutation contrôlée par cet utilisateur » ne sauraient être regardées comme une offre d'accès au réseau de France Télécom au sens de l'article L. 34-8 IV du code des postes et télécommunications.

En outre, se fondant sur les dispositions de l'article 4-2 de la directive 97/33/CE, France Télécom soutient que l'obligation de répondre à toute demande raisonnable d'accès au réseau ne saurait porter sur les points de terminaison du réseau.

France Télécom estime que la demande de Mobius relative aux liaisons louées ne peut être qualifiée d'offre d'accès au réseau au sens de l'article L. 34-8 IV du code des postes et télécommunications et ne remplit pas les conditions de recevabilité énoncées par l'article L. 36-8 du code des postes et télécommunications.

2.3. Sur l'homologation tarifaire

France Télécom indique qu'il n'est pas concevable que l'Autorité, qui ne dispose que d'une fonction consultative en matière d'homologation tarifaire, puisse remettre en cause les décisions du ministre dès lors que son avis ne serait pas suivi.

Se fondant sur des décisions de règlements de différends de l'Autorité, France Télécom précise que l'Autorité a reconnu que dès lors que la loi avait établi la compétence du ministre en matière d'homologation, sa propre compétence s'effaçait au profit de celui-ci, y compris dans le cadre d'un règlement de différend.

En outre, France Télécom indique que ce débat a été tranché concernant les tarifs de « collecte IP/ADSL » et « accès IP/ADSL » par le Conseil d'Etat.

III. - Sur les compétences tarifaires

France Télécom ne peut que remettre en cause la méthode développée par Mobius dès lors qu'elle est amenée à justifier son positionnement tarifaire par rapport à des offres dont elle n'est pas en mesure de vérifier la viabilité économique.

3.1. Sur l'absence de pertinence des comparaisons tarifaires

Sur Flag Télécom :

France Télécom note que la société Flag Télécom a été placée sous le chapitre 11 de la loi américaine sur les faillites et qu'ayant réglé sa dette, sa structure de coûts est différente de celle d'un opérateur historique tel que France Télécom. France Télécom indique que n'ayant pas de visibilité sur la structure des coûts de Flag Télécom et ses méthodes comptables, il n'est pas possible de présumer que Flag Télécom vend ses produits avec une marge.

France Télécom rappelle que la route Inde-Royaume Uni est très utilisée et que ceci a une incidence sur le coût unitaire des liaisons louées qui baisse en proportion.

France Télécom indique que le taux de change constitue un élément de pondération des comparatifs présentés.

France Télécom note que le support utilisé n'est ni le SeaMeWe3 ni le SAT3/WASC/SAFE et qu'en conséquence les coûts de Flag Télécom ne sont pas comparables à ceux de France Télécom. Concernant les liaisons Inde-Londres, Flag Télécom utilise ses propres ressources sur le câble Flag Europe-Asie. France Télécom précise que ses prix comprennent la capacité sous-marine, le backhaul Réunion, le backhaul France ainsi que la compétitivité française et réunionnaise afin de fournir cette liaison au plus près du client.

France Télécom indique que les tarifs de liaisons 155 Mbits/s fournis par Flag Télécom ne peuvent être comparés à ceux de France Télécom étant donné que le service de liaisons 155 Mbits/s entre la métropole et la Réunion nécessite une étude de faisabilité particulière avant toute cotation.

France Télécom note que le prix du 45 Mbits/s de Flag Télécom est 18 fois supérieur à celui du 2 Mbits/s. France Télécom propose un ratio de [...] entre le prix d'une liaison louée 2 Mbits/s et d'une liaison 45 Mbits/s, ce qui permet d'obtenir un prix de [...] euros par mois pour une liaison louée 45 Mbits/s en incluant les deux boucles locales, quelle que soit la destination finale du lien.

Sur Mauritius Télécom :

France Télécom note que les tarifs 34 et 45 Mbits/s ne figurent pas en annexe et qu'il n'y a pas de moyen d'en vérifier la véracité. France Télécom précise que le tarif de 10 588 EUR pour 2 Mbits/s est partiellement comparable à son offre Réunion-Paris, mais qu'il faut rajouter le prix de la boucle locale côté France.

France Télécom souligne que la différence de tarif avec Mauritius Télécom sur le câble Safe s'explique par les niveaux d'investissement consentis au départ, et donc des structures de coûts proportionnellement différentes.

France Télécom indique que son offre reste attractive en 2003 pour un client qui cherche un équilibre entre les prix du 2 Mbits/s et du 34/45 Mbits/s et que celle-ci inclut les deux boucles locales qui ne sont pas indexées sur le cours d'une monnaie, ce qui la rend prévisible pour le client.

France Télécom indique que les différences entre le tarif de 175 000 EUR par mois pour une liaison 34 Mbits/s entre la métropole et la Réunion, les tarifs de 109 244 EUR par mois pour un 34 Mbits/s entre l'île Maurice et Paris fournis par Mauritius Télécom ou celui de 126 050 EUR par mois pour un 45 Mbits/s entre Londres et l'Inde par Flag Télécom s'expliquent au regard des différences de prestation.

3.2. Sur les incohérences au regard des distances

Une comparaison du tarif au kilomètre demeure sans pertinence :

France Télécom note que le prix des liaisons louées internationales est basé sur le principe de la bilatéralité, chaque opérateur facturant son demi-circuit, et qu'une comparaison du tarif au kilomètre n'a pas de sens car elle ne prend pas en compte :

- le type de support employé (câble ou satellite) ;

- le coût fixe de chaque opérateur.

France Télécom indique que l'offre de liaisons louées internationales au départ de la Réunion comprend 4 tarifs. France Télécom précise que la structure tarifaire a toujours pour objectif de faire abstraction de la distance séparant l'île de la métropole.

Sur l'analyse des prix au kilomètre :

France Télécom indique que les écarts de prix en USD au Mbit/s par kilomètre sont très importants, quelle que soit la période de la cotation.

IV. - Sur le niveau tarifaire

de l'offre de liaisons louées

4.1. Sur les fondements réglementaires

de l'offre de liaisons louées

France Télécom rappelle que l'Autorité, dans son avis n° 2003-70 du 16 janvier 2003, relatif à l'évolution de tarifs des liaisons louées entre la métropole et les départements d'outre-mer et entre départements d'outre-mer, a accueilli favorablement la décision tarifaire de France Télécom proposant une baisse d'au moins 20 % des tarifs des liaisons louées 2 Mbits/s entre la métropole et les départements d'outre-mer.

France Télécom précise qu'elle soumettra prochainement une nouvelle baisse conforme aux coûts les plus récents dont elle dispose et que les effets de la mise en service du câble SAFE sur les coûts, et le délai avec lequel ces derniers sont connus, ont conduit à une baisse des tarifs décalée dans le temps. France Télécom souligne que dans sa réponse au second questionnaire du rapporteur, elle apportera des éclaircissements sur les hypothèses de coûts retenues dans le modèle transmis par Mobius le 25 février 2004.

S'agissant de la modélisation des coûts, France Télécom souligne qu'il revient à la partie adverse d'avoir choisi un modèle reposant sur les CMILT.

4.2. Sur les tarifs des liaisons louées

et les tarifs d'interconnexion

France Télécom indique que la différence entre le tarif de détail et le tarif d'interconnexion est hors de propos dans la mesure où France Télécom a précisé que les tarifs des FAS à prendre en compte sont ceux des liaisons louées de détail, non ceux des LPT.

France Télécom rappelle que les tarifs des FAS des liaisons louées n'ont pas à être égaux à un quelconque coût, mais relèvent d'un choix marketing quant à la répartition du prix entre cette partie fixe et la partie récurrente du tarif. Le seul cas où le tarif des FAS est tenu de refléter un coût bien identifié est celui du dégroupage.

V. - Sur l'offre de transit IP

France Télécom rappelle, d'une part, qu'elle a souhaité rencontrer Mobius afin de prendre en compte les spécificités de sa demande, d'autre part, que la seule offre disponible et commercialisable est l'offre Open Transit Internet (OTI) qui permet de fournir la connectivité sous différentes formes depuis de nombreux points dans le monde.

France Télécom indique qu'elle a un point de présence international OTI à la Martinique qui permet de proposer la connectivité internationale sur la zone Antilles, mais que ce point n'existe pas à la Réunion, et que la Martinique et Paris sont les deux points existants sur le territoire français pouvant proposer directement la connectivité Internet mondiale.

France Télécom précise qu'elle a proposé ce service avec une connectivité mondiale départ Paris auquel on aboute un lien dédié comparable à celui d'une liaison louée Réunion-Paris, Cette prestation n'est pas comparable à celle proposée depuis la Martinique, pour laquelle la connectivité internet mondiale est disponible depuis ce site sans nécessiter un déport depuis un site éloigné. La seule composante transmission est celle relative à la boucle locale pour joindre le site client.

France Télécom indique qu'elle ne propose pas d'offre de connectivité internet au départ de la Réunion, Wanadoo a souscrit aux offres de collecte IP disponibles au catalogue. France Télécom rappelle qu'elle a déployé sur le territoire français et dans tous les DOM son réseau RBCI, mais que dans les DOM il est actuellement dédié à la collecte IP bas débit et haut débit.

France Télécom indique les conditions dans lesquelles elle serait en mesure d'entreprendre tout développement nécessaire si l'Autorité répondait favorablement à Mobius. France Télécom précise qu'une proposition de ce type imposerait des travaux préalables dont l'échéance et la complexité dépendent in fine de la solution retenue. France Télécom précise qu'en se limitant à une offre de connectivité se basant sur le point de présence domestique sur place, il faudrait en amont une analyse technique et économique. France Télécom n'est pas en mesure de garantir un délai inférieur à trois mois à compter d'une décision de lancement et rappelle les opérations à conduire.

En conséquence, France Télécom conclut aux mêmes demandes que dans son premier mémoire.

Vu la décision n° 2004-263 de l'Autorité, en date du 9 mars 2004, prorogeant d'un mois le délai dans lequel l'Autorité doit se prononcer sur le règlement de différend opposant Mobius à France Télécom ;

Vu les réponses des parties au second questionnaire du rapporteur enregistrées le 12 mars 2004 ;

Vu le courrier de la société Mobius enregistré le 19 mars 2004, transmettant ses observations sur les réponses de France Télécom au second questionnaire du rapporteur ;

Vu le courrier de la société France Télécom enregistré le 24 mars 2004, transmettant des observations à la lettre de Mobius en date du 19 mars 2004 ;

Vu la lettre du chef du service juridique, en date du 25 mars 2004, convoquant les parties à une audience devant le collège le 8 avril 2004 ;

Vu le courrier de la société Mobius enregistré le 5 avril 2004, souhaitant que l'audience devant le collège soit publique ;

Vu le courrier de la société France Télécom enregistré le 5 avril 2004, souhaitant que l'audience devant le collège ne soit pas publique ;

Après avoir entendu le 8 avril 2004, lors de l'audience devant le collège :

- le rapport de M. Nicolas Deffieux, rapporteur présentant les conclusions et les moyens des parties ;

- les observations de MM. Jean-Daniel Lallemand et Lionel Grosclaude pour la société France Télécom ;

- les observations de M. Yann de Prince, pour la société Mobius et de Me Frédérique Dupuis-Toubol, pour le cabinet Bird & Bird ;

En présence de :

- MM. Jean-Daniel Lallemand, Jean Mazier, Lionel Grosclaude, Gabriel Lluch pour la société France Télécom ;

- M. Yann de Prince, pour la société Mobius, et de Me Frédérique Dupuis-Toubol pour le cabinet Bird & Bird ;

- MM. Philippe Distler, directeur général, Laurent Laganier, Nicolas Deffieux, Elies Chitour, Benoît Loutrel et de Mmes Elisabeth Rolin, Christine Galliard, agents de l'Autorité ;

Sur la publicité de l'audience :

Aux termes de l'article 14 du règlement intérieur : « l'audience est publique, sauf demande conjointe de toutes les parties. Si cette demande n'est pas conjointe, le collège de l'Autorité en délibère ».

France Télécom, par un courrier enregistré le 5 avril 2004, a demandé que l'audience devant le collège ne soit pas publique ; la société Mobius, par un courrier enregistré le 5 avril 2004, a demandé que l'audience devant le collège soit publique. Interrogée sur ce point par le président de l'Autorité à l'ouverture de l'audience du 8 avril 2004, France Télécom a précisé qu'elle acceptait de souscrire à la demande de la société Mobius, en conséquence de quoi, l'audience a été publique.

Le collège en ayant délibéré le 4 mai 2004, hors la présence du rapporteur, du rapporteur adjoint et des agents de l'Autorité ;

Adopte la présente délibération fondée sur les faits et les moyens exposés ci-après :

1. Sur la recevabilité des demandes de la société Mobius

Aux termes de l'article L. 36-8 du code des postes et télécommunications : « En cas de refus d'interconnexion, d'échec des négociations commerciales ou de désaccord sur la conclusion ou l'exécution d'une convention d'interconnexion ou d'accès à un réseau de télécommunications, l'Autorité de régulation des télécommunications peut être saisie du différend par l'une ou l'autre des parties. (...) »

La société France Télécom, dans ses observations en défense, soutient, d'une part, que l'Autorité est incompétente pour statuer sur la demande relative aux liaisons louées présentée par la société Mobius, car elle n'entre pas dans le champ d'application de l'article L. 36-8 du code des postes et télécommunications. En effet, elle estime que la prestation sollicitée par la société Mobius ne relève ni du régime de l'interconnexion, ni de l'accès au sens de l'article L. 34-8 du code des postes et télécommunications. D'autre part, elle considère qu'aucun refus de négocier ou échec des négociations ne peut être imputé à France Télécom sur les demandes de la société Mobius.

1.1. Sur la qualification juridique des prestations demandées

par la société Mobius

a) Sur l'offre de transit IP

Il ressort des pièces du dossier que la prestation demandée par la société Mobius a pour finalité de lui permettre d'acheminer le trafic de données de son point de concentration situé à la Réunion vers le point de présence d'un opérateur qui assure son aboutissement sur le réseau mondial Internet via une offre spécifique au transit IP.

L'Autorité constate qu'il ressort également des pièces du dossier que la société France Télécom ne conteste à aucun moment le fait que l'offre de transit IP sollicitée par la société Mobius soit une prestation d'accès.

Ainsi, aux termes des dispositions du IV de l'article L. 34-8 du code des postes et télécommunications : « (...) Les mêmes exploitants [les exploitants de réseaux ouverts au public figurant sur les listes établies en application des a, b, et c du 7° de l'article L. 36-7] assurent, dans les mêmes conditions, un accès à leur réseau aux utilisateurs et fournisseurs de services de télécommunications autres que le service téléphonique au public, ainsi qu'aux services de communication audiovisuelle autres que les services de radiodiffusion sonore ou de télévision diffusés par voie hertzienne terrestre ou par satellite, ou distribués par câble. Ils répondent également aux demandes justifiées d'accès spécial correspondant à des conditions techniques ou tarifaires non publiées, émanant de ces fournisseurs de service ou des utilisateurs. (...) ».

Il résulte ce qui précède que la prestation sollicitée par la société Mobius doit, en l'état actuel du droit, être qualifiée d'accès spécial au sens des dispositions précitées de l'article L. 34-8. En effet, les conditions techniques et tarifaires de l'offre sollicitée par la société Mobius n'ont pas été publiées par France Télécom. Il s'ensuit que France Télécom, en tant qu'opérateur figurant sur les listes établies en application des a et b du 7° de l'article L. 36-7 du code des postes et télécommunications, est tenue de répondre aux demandes justifiées d'accès spécial émanant de ces fournisseurs de service ou des utilisateurs.

Il appartient donc à l'Autorité, saisie d'une demande de règlement de différend sur le fondement des dispositions de l'article L. 36-8 du code des postes et télécommunications, de préciser, le cas échéant, les conditions équitables, d'ordre technique et financier, de cette prestation d'accès spécial.

b) Sur l'offre de liaison louée sollicitée par la société Mobius

Le 2° de l'article L. 32 du code des postes et télécommunications définit le réseau de télécommunication comme : « (...) toute installation ou tout ensemble d'installations assurant soit la transmission, soit la transmission et l'acheminement de signaux de télécommunications ainsi que l'échange des informations de commande et de gestion qui y est associé, entre les points de terminaison du réseau ».

Il résulte des dispositions de l'article 2 de la directive 92/44/CE modifiée par la directive 97/51/CE (dite « ONP liaisons louées ») et de l'annexe I de la directive 97/33/CE du 30 juin 1997 relative à l'interconnexion, transposées par l'article R. 9 du code des postes et télécommunications, que les liaisons louées constituent des « capacités de transmission transparentes entre points de terminaison du réseau, à l'exclusion de la commutation sur demande ».

France Télécom, dans ses observations en défense, considère que la prestation demandée par Mobius ne constitue pas une prestation d'interconnexion, mais une offre de détail, en se limitant à faire valoir que la seule offre de liaison louée disponible à la Réunion est une offre de détail Transfix. France Télécom considère donc que l'Autorité ne peut faire droit à la demande de Mobius dans le cadre d'un règlement de différend, l'offre de détail Transfix ayant été homologuée par le ministre chargé des télécommunications.

L'Autorité rappelle que France Télécom commercialise à ce jour deux catégories d'offres de liaisons louées :

- une offre de détail Transfix, faisant l'objet d'une homologation tarifaire par le ministre en charge des télécommunications ;

- un service d'interconnexion de liaisons louées, dont les modalités sont décrites au chapitre VIII du catalogue d'interconnexion de France Télécom ; cette offre comprend la fourniture par France Télécom à l'opérateur tiers d'une liaison louée partielle (LPT) entre un site client et un centre de France Télécom ouvert au service d'aboutement, cette liaison louée étant prolongée à travers le service d'aboutement au point de présence de l'opérateur tiers. Elle comprend également un service d'aboutement de liaison louée.

Aux termes de l'article D. 99-11 du code des postes et télécommunications « ces opérateurs [les opérateurs figurant sur la liste établie en application du 7° de l'article L. 36-7] ne peuvent invoquer l'existence d'une offre inscrite au catalogue pour refuser d'engager des négociations commerciales avec un autre opérateur en vue de la détermination de conditions d'interconnexion qui n'auraient pas été prévues par leur catalogue, notamment les conditions d'accès direct aux commutateurs internationaux et à d'autres infrastructures internationales ».

Il résulte de l'instruction que la prestation sollicitée par la société Mobius, opérateur de réseau de télécommunications, a pour finalité de disposer, en s'interconnectant au réseau de France Télécom, d'une offre de capacité entre la Réunion et la métropole, lui permettant non pas de répondre aux besoins propres de l'entreprise, mais d'élaborer des offres de détail ayant vocation à être commercialisées sur le marché final.

L'Autorité constate, au regard des pièces du dossier, que France Télécom possède un monopole de fait sur le transport entre la Réunion et la métropole. Or, l'accès de la société Mobius à une capacité de transport sur le câble sous-marin est une condition essentielle à la commercialisation par cet opérateur d'offres concurrentielles sur le marché de détail des services de télécommunications à la Réunion.

L'Autorité comprend donc la demande de Mobius comme une demande de service d'interconnexion de liaisons louées de gros sur le segment du transport, comparable dans son principe et ses modalités au service d'interconnexion de liaisons louées partielles sur le segment de l'accès et qui s'utilisera concurremment avec le service d'aboutement, tel que défini dans le catalogue d'interconnexion de France Télécom.

Une offre de liaison louée de gros se distingue d'une offre de détail, notamment par l'architecture et la géographie de ses points d'extrémités. Alors qu'une liaison louée de détail a vocation à être livrée dans un site client, une offre d'interconnexion est livrée dans un site de France Télécom, ainsi qu'illustré dans le schéma ci-dessous.

Cette analyse est confortée par France Télécom qui, dans ses observations en défense du 5 février 2004, soutient que : « de la même façon, dans le cas des liaisons louées, il ne s'agit pas de livrer un produit fini mais de fournir aux opérateurs un service d'interconnexion de liaison louée aux fins de la fourniture de services de liaisons louées de bout en bout ».

Aussi, de la même manière que la situation particulière de France Télécom sur le segment de l'accès a conduit l'Autorité à introduire en 2002 une offre de liaisons louées partielles et de liaisons d'aboutement d'interconnexion dans le catalogue d'interconnexion, il apparaît légitime de créer une offre de liaison louée d'interconnexion sur le segment du transport dans le cas particulier de La Réunion, compte tenu de la position de France Télécom sur ce segment et du caractère indispensable de cette prestation pour les opérateurs alternatifs.

L'Autorité considère donc, pour les motifs exposés ci-dessus, que la demande formulée par Mobius est une demande d'accès à un service de liaisons louées de transport, ci-après abrégées LLT, qui relève du régime juridique de l'interconnexion.

1.2. Sur l'échec des négociations

La société France Télécom soutient que la demande de règlement de différend de la société Mobius est irrecevable, car aucun refus de négocier ou échec des négociations ne peut être imputé à France Télécom. En conséquence, elle soutient que la saisine ne remplit pas les conditions de recevabilité énoncées à l'article L. 36-8 du code des postes et télécommunications.

Il ressort des pièces du dossier que les négociations commerciales ont commencé entre les parties par une lettre datée du 11 juillet 2003 de la société Mobius. Par ce courrier, elle demande à France Télécom d'engager des négociations commerciales aux fins de définir les conditions techniques et tarifaires de certaines prestations relevant du régime de l'interconnexion, de l'accès ou de l'accès spécial. La société Mobius envisage de recourir aux prestations suivantes : IRU sur le câble SAFE, liaisons de backhaul depuis les stations d'atterrissement du câble, liaisons louées, service de transmission de données ATM, transit IP. De même, dans son courrier, Mobius indique que, compte tenu de l'utilisation des capacités sur le câble par le groupe France Télécom pour ses propres offres clientèle, il devrait être aisé à France Télécom d'établir très rapidement une proposition fondée sur des conditions non discriminatoires.

Dans sa réponse à cette lettre en date du 29 juillet 2003, France Télécom indique que certaines des demandes de la société Mobius relèvent de l'interconnexion et sont donc offertes à des opérateurs de réseau. Ainsi, elle invite Mobius à solliciter le statut d'opérateur de réseau auprès de l'Autorité afin d'être en mesure de bénéficier des prestations relevant du régime de l'interconnexion et à s'adresser à son agence commerciale pour bénéficier des prestations relevant du régime commercial général.

A la suite de ce courrier de France Télécom, la société Mobius, dans un courrier en date du 2 septembre 2003, réitère sa demande telle que formulée dans son courrier en date du 11 juillet 2003. Elle précise les offres dont elle souhaite disposer en priorité (Transit IP, IPL avec engagement 1, 3 et 5 ans, IRU sur 10 ou 15 ans) ainsi que le planning prévisionnel des besoins en débit (fin 2003 : de 2 à 8 Mbits/s, fin 2004 : de 12 à 34 Mbits/s, etc.). En outre, dans ce même courrier, la société Mobius souhaite connaître les tarifs de France Télécom sur la base des extrémités existantes ou/et faisables. Enfin, la société Mobius indique qu'elle attend de la part de France Télécom une première proposition dans un délai maximal de 15 jours.

Dans un courrier en date du 24 septembre 2003, à l'occasion d'une réunion en date du 19 septembre 2003 organisée entre Mobius et les services de France Télécom, la société France Télécom, concernant la demande relative au transit IP de Mobius, lui demande de disposer de précisions supplémentaires sur ces besoins, et en particulier de savoir s'il s'agit de « réseaux privés virtuels IP avec des sites partenaires à [lui] indiquer » ou de « connectivité Internet générale en France et à l'étranger ».

Dans un courrier en date du 5 octobre 2003, la société Mobius, s'agissant de la reprise de son parc de liaisons louées au titre des offres réservées aux opérateurs, s'interroge sur les réserves de France Télécom pour faire migrer ses liaisons louées dans le cadre d'un contrat d'interconnexion. Elle précise qu'elle ne comprendrait pas les motifs juridiques qui pourraient fonder le refus de France Télécom. En outre, elle indique que cette demande équitable permettant à des opérateurs de bénéficier des tarifs qui leur sont réservés a d'ailleurs déjà été formulée dans des termes similaires par d'autres opérateurs et a fait l'objet d'une décision n° 2002-147 de l'Autorité, en date du 12 février 2002, relative à un règlement de différend entre MFS Communications et France Télécom. Dans ces conditions, elle souhaiterait connaître les modalités envisageables afin d'obtenir une migration du parc de liaisons louées que Mobius loue à France Télécom sur la base des offres grand public vers une offre opérateur. Dans ce même courrier, la société Mobius, concernant ses besoins de transit IP, précise expressément qu'il s'agit bien d'une connectivité internet générale. Enfin, elle rappelle à France Télécom qu'elle attend toujours une réponse à son courrier du 2 septembre 2003. Un silence de France Télécom serait assimilé à un refus de négocier de sa part.

Dans un courrier en date du 8 octobre 2003 intitulé « Ouverture d'une négociation commerciale suite à la mise en service du câble SAFE à la Réunion », France Télécom propose à la société Mobius, en offre commerciale, d'une part, une solution de Transit IP international et, d'autre part, une solution à base de liaisons louées point à point en circuit complet entre ses POP de la Réunion et de Paris, dans la limite des ressources disponibles sur le réseau de France Télécom et reposant sur des engagements de durées 1 an, 3 ans et 5 ans. En outre, pour les engagements de durées 10 ans et 15 ans, France Télécom indique qu'elle est en mesure de proposer à la société Mobius un montage financier spécifique sur la base d'une remise supplémentaire sur le tarif de la liaison louée à 2 Mbits/s en vigueur au catalogue des prix et d'un préfinancement pour les capacités de débit supérieur ou égal à 34 Mbits/s entre ses POP de la Réunion et de Paris. Elle indique également que l'étude des disponibilités des ressources sur câble sous-marin et le délai de réalisation seront communiqués à la société Mobius dans l'accusé de réception de commande faisant suite à la réception de sa commande par France Télécom. Ainsi, elle précise que le présent courrier n'entraîne en aucun cas réservation de ressources.

Dans ce même courrier, elle indique que les prix rassemblés en annexe à ce courrier sont donnés en euros hors taxes et sont soumis à la TVA en vigueur à la date de facturation. France Télécom précise que les prix sont valables pendant une durée de 1 mois dans la limite des ressources disponibles à compter de la date d'émission qui figure sur le document correspondant. Enfin, elle informe la société Mobius qu'elle n'est pas en mesure de répondre en l'état aux demandes de circuit complet de la Réunion vers l'Afrique du Sud, l'Inde et l'île Maurice.

Dans un courrier en date du 4 novembre 2003, répondant au courrier de France Télécom du 8 octobre 2003, la société Mobius relève, en premier lieu, que France Télécom ne répond pas à sa demande relative à des circuits complets de la Réunion vers l'Afrique du Sud, l'Inde et l'île Maurice, ainsi que les demandes tarifaires qui ont été faites au titre des IRU. En conséquence, elle acte le refus pur et simple de France Télécom de négocier sur ces points.

En second lieu, elle indique que la proposition de France Télécom relative à une offre de transit IP est insatisfaisante, tant du point de vue technique que tarifaire, compte tenu des obligations qui pèsent sur France Télécom.

Sur le plan technique, la société Mobius indique qu'elle constate que la proposition de France Télécom prend en compte la prise en charge du trafic depuis la Réunion vers un POP IP de France Télécom situé à Paris, alors même que France Télécom dispose d'un POP IP à la Réunion utilisé pour la fourniture des services de Wanadoo, permettant ainsi de traiter localement le trafic IP local. Dans ces conditions, la société Mobius demande à France Télécom de lui fournir une proposition de transit IP à partir d'un POP IP situé à la Réunion permettant d'atteindre localement les clients de Wanadoo situés à la Réunion.

Sur le plan tarifaire, la société Mobius indique que l'offre de France Télécom ne remplit nullement l'obligation d'orientation vers les coûts à laquelle France Télécom est astreinte en l'espèce. Elle estime que cette offre revient à exiger des frais d'accès au service (FAS) d'un montant prohibitif, à fournir une prestation de transit IP en exigeant le paiement d'une somme d'environ 17 000 EUR HT/Mbit/s, ce qui ne correspond, non seulement pas aux prix du marché pour des prestations comparables, ni à un montant orienté vers les coûts excluant toute marge commerciale. Elle précise que les premières analyses qu'elle a menées la conduisent à estimer qu'un tarif raisonnable pour les prestations demandées serait environ 10 fois inférieur au tarif sollicité, et ce indépendamment du débit demandé.

Enfin, dans ce même courrier, la société Mobius estime que la proposition relative à sa demande concernant une offre de liaisons louées est insatisfaisante. Elle précise que les FAS sont quasiment identiques aux FAS facturés à des clients finals via l'offre commerciale Transfix de France Télécom et sont donc loin d'être une offre orientée vers les coûts.

Ainsi, la société Mobius demande à France Télécom de prendre en compte ses observations, à défaut de quoi elle se verrait contrainte de constater le refus de négocier de France Télécom concernant les demandes de circuits complets et le désaccord relatif aux offres de liaisons louées et de transit IP.

Dans un courrier en date du 23 décembre 2003, en réponse au courrier du 4 novembre de la société Mobius, la société France Télécom indique qu'elle étudiera, dans le cadre de son cahier des charges inscrit dans le décret du 27 décembre 1996, la réponse à ses besoins dans la limite des ressources disponibles sur notre réseau. Ainsi, pour la part des offres qui concerne des prestations internationales sur un câble sous-marin, France Télécom précise que conformément aux obligations fixées à l'article 8 du décret du 27 décembre 1996, elle fait droit sans discrimination aux demandes de droits irrévocables d'usage sur les capacités disponibles dont elle dispose émanant d'opérateurs autorisés en application de l'article L. 33-1 du CPT. Concernant les demandes de circuits complets 2 Mbits/s de la Réunion vers l'Afrique du Sud, l'Inde et l'île Maurice, France Télécom informe la société Mobius qu'elle ne possède ni réseau, ni licence dans ces trois pays. Dans ces conditions, elle précise qu'il lui est nécessaire de disposer, liaison par liaison, de l'adresse des deux extrémités afin de lancer l'étude de faisabilité pour la fourniture de liaisons louées internationales en circuit complet. En outre, France Télécom indique qu'elle est en mesure de fournir sur demande aux opérateurs de réseau des propositions commerciales en IRU 2 Mbits/s à 10 ans et à 15 ans sur les capacités internationales.

Dans ce même courrier, France Télécom, concernant les offres de liaisons louées entre la métropole et les DOM, indique qu'elle répond à ses obligations de service universel au travers d'offres homologuées par le ministre et précise qu'elle maintient sa proposition formulée dans son courrier du 8 octobre 2003, qui est constituée par la fourniture de liaisons louées métropole-DOM à 2 Mbits/s de durées 1 an, 3 ans et 5 ans. Enfin, concernant les besoins en connectivité Internet, France Télécom se propose de tenir une réunion dès que possible.

Contrairement à ce que soutient France Télécom, il résulte de tout ce qui précède que les échanges ci-dessus relatés démontrent un échec des négociations entre les deux parties sur la négociation d'une offre de service de Transit IP et d'une offre de liaisons louées entre la Réunion et la métropole. Il s'ensuit que ladite saisine est recevable au regard de l'article L. 36-8 du code des postes et télécommunications.

2. Sur le caractère justifié des demandes de Mobius

Au regard des éléments échangés dans le cadre de cette procédure, l'Autorité rappelle qu'il lui revient, dans le cadre du règlement de ce litige de « préciser les conditions équitables, d'ordre technique et financier, dans lesquelles l'interconnexion ou l'accès spécial doivent être assurés » conformément à l'article L. 36-8 du code des postes et télécommunications.

2.1. Sur les obligations de France Télécom

En premier lieu, l'Autorité rappelle qu'il résulte des dispositions de l'article L. 34-8 précité que la société France Télécom, en tant qu'opérateur figurant sur les listes établies en application des a et b du 7° de l'article L. 36-7 du code des postes et télécommunications, est tenue de faire droit dans des conditions objectives, transparentes et non discriminatoires aux demandes d'interconnexion de la société Mobius, si celles-ci sont justifiées au regard de ses besoins et de la capacité de France Télécom à la satisfaire.

En outre, il ressort de cette même disposition que les tarifs d'interconnexion « rémunèrent l'usage effectif du réseau de transport et de desserte et reflètent les coûts du service rendu ».

En second lieu, il résulte également de l'article L. 34-8 précité que la société France Télécom, en tant qu'opérateur figurant sur la liste établie en application du a du 7° de l'article L. 36-7 du code des postes et télécommunications, est tenue de faire droit dans des conditions objectives, transparentes et non discriminatoires aux demandes d'accès spécial de la société Mobius, si celles-ci sont justifiées au regard de ses besoins et de la capacité de France Télécom à la satisfaire.

En outre, il ressort de cette même disposition que la fourniture de cet accès doit donner lieu une rémunération reflétant les coûts du service rendu.

2.2. Sur la capacité technique de France Télécom

à répondre aux demandes de Mobius

Il ressort de l'analyse des pièces du dossier que la société France Télécom apparaît être en mesure de proposer la prestation de liaison louée de transport (LLT), dans la mesure où elle dispose de capacité sur les câbles concernés et qu'elle commercialise déjà une offre de liaison louée de détail Transfix, qui utilise les éléments de réseau nécessaires à la fourniture de l'offre de LLT.

Dans ces conditions, l'Autorité estime que France Télécom dispose de la capacité technique pour répondre à la demande de LLT de la société Mobius.

Par ailleurs, l'Autorité constate que France Télécom dispose de capacité sur les câbles concernés et qu'elle utilise déjà des équipements de routage et de transmission IP, notamment pour la fourniture de son offre de collecte IP/ADSL utilisée aujourd'hui principalement par Wanadoo. Le traceroute fourni par la société Mobius confirme d'ailleurs la présence d'un routeur IP de France Télécom à la Réunion. En métropole, ces équipements sont très courants et servent notamment à l'acheminement du trafic de l'offre Collecte IP/ADSL, utilisée majoritairement par les fournisseurs d'accès Internet pour proposer des services d'accès Internet haut débit. Sur l'intégralité du trajet de l'offre de transit IP demandée par Mobius, France Télécom dispose donc déjà des équipements nécessaires à la fourniture de cette prestation.

Au regard de ces éléments, l'Autorité estime donc que France Télécom dispose de la capacité technique pour proposer une offre de transit IP.

2.3. Sur le caractère justifié des demandes de Mobius

L'Autorité constate, au regard des pièces du dossier, qu'une prestation de transport entre la Réunion et la métropole est nécessaire à l'activité de la société Mobius. En effet, Mobius collecte son trafic au sein de l'île de la Réunion et doit disposer d'une solution pour acheminer ce trafic hors de l'île, afin de permettre la communication de ses abonnés avec le reste du monde.

L'Autorité estime que les offres actuelles de France Télécom qui incluent une composante de transport ne répondent pas aux besoins de Mobius. En effet, l'offre de collecte IP/ADSL oblige son bénéficiaire à confier l'accès et la collecte à France Télécom, alors que Mobius réalise elle-même ces prestations et que cela constitue le coeur de son activité. Concernant l'offre de liaison louée de détail Transfix, elle est construite et mise en place pour les entreprises, c'est-à-dire les utilisateurs finals, mais n'est pas adaptée pour les opérateurs.

Pour permettre à Mobius d'acheminer son trafic hors de l'île, la prestation de base dont il a besoin est une offre de liaison louée de transport adaptée aux opérateurs. En effet, seule une liaison louée lui permet de bénéficier d'une réelle sécurité de transmission, exigée par certains de ses clients pour des applications sensibles à la qualité de transmission.

En conséquence, l'Autorité estime que la prestation de liaison louée de transport, telle que demandée par la société Mobius, est justifiée.

Par ailleurs, l'Autorité constate que l'offre de transit IP permet de bénéficier d'économies importantes dues au multiplexage statistique des trafics des abonnés, comme le montre la différence de prix actuelle entre l'offre de liaison louée Transfix disponible à la Réunion, et le tarif de collecte de l'offre Collecte IP/ADSL, qui inclut une prestation de transport. La disponibilité d'une telle offre apparaît donc comme un élément déterminant pour permettre à la société Mobius de proposer une offre d'accès internet à haut débit compétitive. Dans ces conditions, l'Autorité considère que la demande d'une offre de transit IP est justifiée.

3. Sur la demande de Mobius relative à la fourniture d'une offre de liaisons louées entre la Réunion et la métropole

3.1. Sur le principe

Il résulte des dispositions de l'article L. 34-8 et du caractère justifié de la demande de Mobius étudié ci-avant que la demande d'interconnexion de Mobius ne peut être refusée. En outre, sur le fondement de ce même article, l'offre de liaison louée de transport doit donner lieu à une rémunération de l'usage effectif du réseau de transport, reflétant les coûts du service rendu.

3.2. Sur l'architecture technique

Il ressort de la description de l'architecture technique présentée par France Télécom dans sa réponse au premier questionnaire que les sites à partir desquels elle construit son offre de détail sont situés à la Réunion sur l'anneau réunionnais (Saint-Paul, Saint-Denis, Saint-Benoît et Saint-Pierre) et à Paris sur le réseau sectoriel (site de Saint-Amand notamment).

Par ailleurs, dans le cadre d'une offre de gros, il apparaît que les points d'interconnexion devront être des centres de brassage où sont disponibles des offres de liaisons d'aboutement, afin de permettre aux opérateurs, clients de l'offre de LLT, d'interconnecter cet élément de réseau au reste de leur réseau.

Il résulte de ces deux observations que les points d'interconnexion pertinents pour l'offre de gros de liaison louée entre la Réunion et la métropole sont :

- un site France Télécom ouvert à l'interconnexion et dans lequel est disponible un service d'aboutement de liaisons louées à Saint-Denis de la Réunion ;

- un site France Télécom ouvert à l'interconnexion et dans lequel est disponible un service d'aboutement de liaisons louées à Paris.

Contrairement à l'offre de détail Transfix déjà disponible à la Réunion, les points d'extrémité de l'offre de LLT sont donc fixes et sont des points de présence du réseau de France Télécom. L'architecture des deux offres est décrite dans le schéma ci-dessous.

Par ailleurs, Mobius demande que la prestation de liaison louée soit fournie à partir d'un câble sous-marin, et non d'une liaison satellite, les caractéristiques techniques du câble étant plus favorables à son activité, notamment en termes de temps de réponse et de disponibilité. L'Autorité considère que les caractéristiques techniques du câble et du satellite sont effectivement différentes et que France Télécom doit donc s'engager à faire reposer son offre sur un câble sous-marin atterrissant à la Réunion.

Enfin, l'Autorité estime que l'offre de France Télécom n'a pas en 2004 à être sécurisée par une liaison satellite, l'architecture technique en boucle du câble sous-marin assurant déjà une sécurisation suffisante. France Télécom annonce d'ailleurs la suppression de cette sécurisation dans ses écrits.

3.3. Sur les modèles de coûts présentés par les parties

Les parties ont présenté, dans le cadre de ce règlement de différend, deux modélisations qui amènent à des résultats sensiblement différents :

- la société Mobius a fourni à l'appui de sa demande une modélisation réalisée par un cabinet de consultant, qui établit un coût de 1 550 EUR par Mbit/s et par mois en 2003 pour une liaison louée. Ce coût est de 1 272 EUR par Mbit/s et par mois en 2004 ;

- la société France Télécom a modifié des hypothèses du modèle proposé par la société Mobius et a, par ailleurs, fourni ses propres estimations de coûts, qui s'établissent au niveau de [...] par Mbit/s et par mois pour une liaison louée. Il est à noter que ce coût recouvre une prestation plus large que celle modélisée par Mobius, incluant notamment des parties terrestres.

Si les hypothèses de calcul et les méthodes utilisées par la société Mobius au soutien de sa demande ont pu faire l'objet de débats contradictoires entre les parties, puisque le modèle complet a été communiqué et a pu être commenté par France Télécom, l'Autorité note que France Télécom s'est limitée à fournir les coûts de différents tronçons de la prestation en question, sans aucunement justifier de leur niveau, ni expliciter la formation de ces coûts, et ce, alors même que lui incombait la charge de la preuve de ses tarifs.

En effet, en vertu des dispositions des paragraphes III de l'article L. 34-8, les tarifs relatifs aux prestations d'interconnexion de France Télécom, en tant qu'opérateur figurant sur la liste établie en application des a et b du 7° de l'article L. 36-7 du code des postes et télécommunications, doivent donner lieu à une rémunération de l'usage effectif du réseau de transport, reflétant les coûts du service rendu. Dans ces conditions, France Télécom est tenue de justifier que chacun de ces tarifs proposés en l'espèce respectent ce principe, conformément, tant aux dispositions de l'article 7, § 2, de la directive n° 97/33/CE du 30 juin 1997 susvisée, qu'à celles de l'article 13, § 3, de la directive n° 2002/19 susvisée.

L'Autorité rappelle que l'article 7, § 2, de la directive n° 97/33 prévoit que : « La charge de la preuve que les redevances sont déterminées en fonction des coûts réels, y compris un rendement raisonnable des investissements, incombe à l'organisme qui fournit l'interconnexion avec ses installations ». En outre, elle relève également que l'article 13, § 3, de la directive n° 2002/19 précitée dispose que « lorsqu'une entreprise est soumise à une obligation des prix en fonction des coûts, c'est à elle qu'il incombe de prouver que les redevances sont déterminées en fonction des coûts, en tenant compte d'un retour sur investissement raisonnable ».

3.4. Sur la méthode des CMILT

L'Autorité a pris en compte les observations des parties visant à établir le niveau des coûts des prestations en question.

L'Autorité note cependant que la démarche retenue pour l'établissement des coûts ne s'inscrit pas dans une logique de type CMILT, contrairement à ce qui est soutenu par Mobius. En effet, les évaluations retenues :

- ne se fondent pas sur la définition d'un incrément de service, mais bien sur une allocation d'un coût entre tous les produits ;

- ne se fondent pas sur des optimisations d'architecture, ni sur les coûts actuels des meilleures technologies disponibles, mais bien sur les investissements effectivement consentis pour le cas particulier des infrastructures étudiées à la date de leur réalisation.

Les coûts ainsi déterminés ne sont pas des coûts CMILT, mais bien une approximation des coûts effectivement supportés par l'opérateur historique pour le cas particulier des prestations litigieuses.

L'Autorité note cependant, conformément aux écritures de France Télécom, que l'âge récent du câble en question tend à diminuer les écarts qui peuvent exister entre une méthode fondée sur des coûts historiques et une méthode fondée sur des coûts prospectifs.

3.5. Sur la dimension temporelle des coûts évalués

a) Concernant la méthode d'amortissement retenue

L'Autorité observe que l'annualisation du coût d'investissement initial repose sur la méthode des coûts de remplacement, qui prend en compte le renouvellement à l'infini des infrastructures.

Cette méthode est favorable à France Télécom et permet de prendre en compte, non pas le coût unique de l'infrastructure disponible aujourd'hui, mais également son remplacement régulier lorsqu'elle sera amortie.

Cette méthode utilisée par Mobius dans sa modélisation n'est pas contestée par France Télécom et a été reprise par l'Autorité dans ses évaluations.

b) Concernant le calcul année par année des coûts

L'Autorité note que France Télécom procède à une tarification des prestations qui fait supporter le coût de la phase de démarrage du service aux acheteurs de la prestation.

Cette méthode, qui induit une très forte dégressivité des coûts en fonction de l'augmentation du taux de remplissage des équipements, ne semble pas à même de fournir un signal économique cohérent pour les opérateurs concurrents qui achètent la prestation.

En effet, elle risque de constituer un frein à l'entrée susceptible de retarder l'arrivée de la concurrence sur des marchés en développement. Les tarifs ainsi calculés par France Télécom sont élevés dans la phase de démarrage du service. Cette situation est d'autant plus regrettable que les années à venir seront déterminantes pour le développement du marché du haut débit.

Pourtant, l'Autorité observe que la modélisation proposée par Mobius repose sur ce même principe.

L'Autorité a ainsi fondé ses propres estimations sur ce principe de recouvrement des coûts, sans le remettre en cause à ce stade.

3.6. Sur les principales hypothèses retenues

Les hypothèses présentées sont celles qui ont été retenues par l'Autorité pour le calcul du coût des prestations demandées par Mobius. Elles proviennent des mémoires échangés par les plaignants et de l'audience devant le collège de l'Autorité.

La modélisation présentée par Mobius et séparant les câbles SAT3/WASC et SAFE n'a pas été retenue par l'Autorité. En effet, comme le fait remarquer France Télécom dans ses réponses au deuxième questionnaire, SAT3/WASC/SAFE est une seule et même infrastructure gouvernée par un seul et même accord. La modélisation retenue porte donc sur l'intégralité du câble SAT3/WASC/SAFE.

Les montants des investissements de France Télécom ont été donnés par celle-ci dans sa réponse au deuxième questionnaire et dans ses nouvelles observations en défense du 4 mars 2004. Ils sont de 3 millions de USD pour la station d'atterrissement à la Réunion et de 50 millions de USD pour le câble. La capacité totale du câble étant de 120 Gbits/s ou 130 Gbits/s selon les tronçons, la capacité totale disponible pour France Télécom est a minima de 9,2 Gbits/s, par proportionnalité avec l'investissement engagé. L'Autorité a retenu ce chiffre dans le cadre de la présente demande de règlement de différend, bien qu'il soit probable que la capacité allouée à France Télécom soit en réalité supérieure, France Télécom étant le premier actionnaire du consortium.

Le coût du capital utilisé par France Télécom est de 14,3 %, d'après ses réactions au modèle de coût présenté par Mobius.

Les coûts opérationnels retenus par l'Autorité sont ceux déclarés par France Télécom dans ses réactions au modèle de coût. Ils sont de 10 % de l'investissement initial et de 20 % du montant de l'amortissement annuel. Ces chiffres n'ont pas été justifiés par France Télécom, mais paraissent les plus fiables à ce stade.

Les hypothèses de durée de vie et de remplissage du câble SAT3/WASC/SAFE ont été communiquées par France Télécom au cours de l'audience. France Télécom prévoit que le câble sera saturé dans 11 ans si son remplissage se poursuit au rythme actuel. L'hypothèse de remplissage retenue est donc une croissance linéaire du trafic sur le câble jusqu'à saturation.

[...]

[...]

Le pourcentage du câble utilisé pour la liaison Réunion-métropole est de [...]. Il est obtenu en comptant une utilisation à [...] de la partie SAT3/WASC entre le Portugal et l'Afrique du Sud, et à [...] du câble SAFE, conformément aux données fournies par France Télécom sur la matrice de distance du consortium dans sa réaction au modèle de coût pour une liaison de la Réunion vers l'Afrique du Sud.

[...]

Les hypothèses de consommation à la Réunion retenues sont celles communiquées par France Télécom dans ses réponses au deuxième questionnaire et dans ses réactions au modèle de coût présenté par Mobius. En l'absence de réponse de France Télécom, les données utilisées sont celles fournies dans le modèle de coût et que France Télécom n'a pas contestées.

La capacité réservée sur le câble par utilisateur a été communiquée par France Télécom dans ses réponses au deuxième questionnaire. Elle est de 0,75 kbit/s par abonné RTC et de 22,5 kbits/s par abonné ADSL.

[...]

[...]

[...]

[...]

[...]

Les taux de remplissage utilisés sont ceux communiqués par France Télécom dans ses réponses au deuxième questionnaire. France Télécom n'ayant pas communiqué le taux de remplissage des STM1 en bande passante « paquets » pour le câble SAT3/WASC/SAFE, ce taux a été calculé à partir du taux « tous supports de transmission » en appliquant le ratio correspondant fourni pour les liaisons louées. Ces chiffres n'ont pas été justifiés précisément par France Télécom, mais paraissent les plus fiables à ce stade.

[...]

[...]

[...]

Concernant les coûts associés au transport du trafic entre le Portugal et Penmarch, par le câble SEA-ME-WE, l'Autorité a appliqué le coût linéaire de transport du câble SAT3/WASC/SAFE sur la distance considérée. Cette modélisation est favorable à France Télécom, car le trafic sur cette partie de SEA-ME-WE est supérieur au trafic moyen sur SAT3/WASC/SAFE ; les coûts associés sont donc inférieurs. Le coût retenu pour cette portion du trajet est de 40 EUR par mois et par Mbit/s.

Concernant les coûts de la partie terrestre de la liaison louée comprise entre Penmarch et Paris, l'Autorité a retenu l'hypothèse de France Télécom présentée dans son modèle, transmis à l'occasion de ses réponses au deuxième questionnaire du rapporteur, et conformément à la description de l'architecture technique du réseau fournie par France Télécom dans ses réponses au premier questionnaire, c'est-à-dire un coût de 3 200 EUR par an pour un équivalent 2 Mbits/s, soit 133 EUR par Mbit/s et par mois.

Concernant les coûts de la partie terrestre de la liaison louée comprise entre la station d'atterrissement à Saint-Paul et Le Port, France Télécom et Mobius n'ont pas fourni d'estimation des coûts associés. En l'absence d'éléments, l'Autorité considère qu'une liaison louée sur ce segment ne peut présenter un coût supérieur à celui d'une liaison louée d'aboutement, dont le tarif est fixé au catalogue d'interconnexion, soit 140,4 EUR par mois et par Mbit/s, sur la base d'une liaison de 2 Mbits/s de 28 kilomètres.

3.7. Evaluation du coût de transport

L'Autorité a réalisé ses propres estimations des coûts liés à l'utilisation du câble SAT3/WASC/SAFE, à partir des observations des parties et des hypothèses décrites ci-avant.

Pour la station d'atterrissement, les coûts et les trafics à prendre en compte sont les suivants :

[...]

Pour le câble, les coûts et les trafics à prendre en compte sont les suivants :

Au total, le coût du transport sur le câble SAT3/WASC/SAFE est donc donné par le calcul suivant :

L'Autorité estime donc que le coût du transport sur le câble SAT3/WASC/SAFE est de 574 EUR par Mbit/s en 2004. En tenant compte de l'ensemble des segments de réseau qui sont utilisés pour fournir l'offre de liaison louée décrite par la présente décision, le coût de cette prestation est donc de 887 EUR par mois et par Mbit/s.

Dans ces conditions, l'Autorité étant liée par la demande de la société Mobius, France Télécom devra faire droit à la demande de celle-ci concernant la fixation d'un tarif de la prestation de LLT à 1 550 EUR par Mbit/s et par mois.

3.8. Sur les frais d'accès au service

Les frais d'accès au service sont un élément de la tarification de l'offre de liaison louée de transport. Il revient donc à l'Autorité, aux termes de l'article L. 36-8, de préciser les conditions de fixation de leur tarif, dès lors que cette offre constitue une prestation d'interconnexion.

Il résulte de ce qui précède que les frais d'accès au service de l'offre de liaison louée de transport sont ceux d'une offre de gros et qu'ils doivent être orientés vers les coûts. En effet, dès lors que l'ensemble de l'offre est soumise à l'orientation vers les coûts, que la partie récurrente du tarif est fixée dans le respect de ce principe, il doit en aller de même pour les frais d'accès au service.

Mobius demande à l'Autorité de fixer les tarifs des frais d'accès au service pour l'offre de liaisons louées au niveau des frais d'accès au service définis au catalogue d'interconnexion.

La prestation de gros définie par la présente décision repose sur trois tronçons principaux :

- un backhaul en métropole entre la station d'atterrissement et le point de livraison ;

- une capacité à fournir par France Télécom au sein de la capacité dont elle dispose déjà entre les stations d'atterrissement à la Réunion et à Penmarch ;

- un backhaul à la Réunion entre la station d'atterrissement et le point de livraison.

Cette architecture n'implique un raccordement entre le client et France Télécom qu'en deux points, tous deux situés dans des bâtiments France Télécom. En effet, seuls les deux brasseurs d'extrémité de l'offre doivent être configurés, les brasseurs ou stations d'atterrissement traversés n'étant pas impactés par la création de l'offre de liaison louée de transport. Chacun de ces raccordements est semblable à celui opéré dans le cas d'une liaison d'aboutement. La mise en service de la LLT est donc comparable à la mise en service de deux liaisons d'aboutement.

En l'absence de toute justification de ses coûts de la part de France Télécom, l'Autorité estime donc que les frais d'accès au service pour l'offre de liaison louée de transport ne pourront excéder le coût de mise en service de deux liaisons d'aboutement.

Pour des débits de 2 Mbits/s, le tarif des frais d'accès au service pour une liaison d'aboutement est de 1 959 EUR. Pour des débits supérieurs, le tarif des frais d'accès au service devra également être cohérent avec le tarif des frais d'accès au service des liaisons d'aboutement à 155 Mbits/s, à savoir 4 035 EUR.

Par ailleurs, les opérateurs pourront utiliser des offres de liaisons d'aboutement définies au catalogue d'interconnexion pour le raccordement de cette liaison louée de transport à leur réseau. Les frais d'accès au service de ces liaisons louées utilisées pour le raccordement sont déjà définis au catalogue d'interconnexion.

4. Sur la demande de Mobius relative au transit IP

4.1. Sur le principe

Il résulte des dispositions de l'article L. 34-8 du code des postes et télécommunications que la société France Télécom, en tant qu'opérateur figurant sur la liste établie en application du a du 7° de l'article L. 36-7 du code des postes et télécommunications est tenue de faire droit dans des conditions objectives, transparentes et non discriminatoires, aux demandes d'accès spécial de la société Mobius, si celles-ci sont justifiées au regard de ses besoins et de la capacité de France Télécom à la satisfaire, en l'absence d'une prestation d'accès publiée par France Télécom aux conditions techniques et tarifaires répondant à ces besoins.

Il ressort donc en particulier que la fourniture de l'offre de transit IP doit donner lieu à une rémunération reflétant les coûts du service rendu.

4.2. Sur l'architecture technique

L'offre de transit IP consiste dans le transport entre le site du BAS France Télécom de Saint-Denis de la Réunion et un site à Paris fixé en accord avec Mobius.

Par ailleurs, la société Mobius souligne l'importance de la possibilité d'échanger du trafic localement avec les filiales de France Télécom, comme le fait actuellement Wanadoo. Elle demande donc l'accès au POP IP de France Télécom à la Réunion.

Au regard des éléments échangés dans le cadre de cette procédure, l'Autorité estime que la demande de la société Mobius d'échange local de trafic est justifiée.

L'Autorité note que le GIP Renater a déclaré, sur son site internet, ouvrir prochainement un GIX à la Réunion, et avoir obtenu l'accord de France Télécom pour la participation de cette dernière à l'échange de trafic en ce point. Dans ces conditions, l'Autorité considère que cette solution répond aux préoccupations de Mobius.

Si, toutefois, France Télécom n'échangeait pas réellement son trafic, ainsi que le trafic de ses filiales, sur le GIX Renater avant le 31 juillet 2004, l'Autorité estime que la demande de Mobius d'accéder au POP IP de France Télécom à la Réunion serait justifiée et que France Télécom devrait y faire droit.

4.3. Sur les tarifs

Les éléments de réseau utilisés pour la fourniture de l'offre de transit IP sont pour grande partie les mêmes que ceux utilisés pour fournir de la capacité. Les différences qui existent entre ces deux offres consistent ainsi :

- principalement, en la possibilité de réaliser du multiplexage statistique dans le cas de l'offre de transit IP (la capacité n'est alors pas dédiée, contrairement à l'offre de liaison louée) ;

- accessoirement, en l'utilisation d'équipements IP à la place de brasseurs de liaisons louées.

Il apparaît dès lors que les tarifs de l'offre de transit IP doivent être cohérents avec les coûts calculés pour l'offre de liaison louée. Ils devront également tenir compte des gains correspondant au multiplexage statistique. L'Autorité estime donc que le tarif de l'offre de transit IP devra être égal au tarif de l'offre de liaison louée corrigé d'un facteur correspondant au multiplexage statistique. Ce ratio devra être cohérent avec ceux constatés pour les offres existantes de France Télécom, tant dans les DOM qu'en métropole.

En outre, il résulte de ce qui précède que les frais d'accès au service de l'offre de transit IP sont ceux d'une offre de gros et qu'ils doivent être orientés vers les coûts, la partie récurrente du tarif étant elle-même soumise à ce principe,

Décide :