JORF n°0252 du 25 octobre 2025

Décision n°05-38-25 du 22 octobre 2025

Objet du différend

Le différend porte sur le raccordement d'une installation de consommation au réseau public de distribution d'électricité.

Conclusions des parties

Pour le demandeur :
Par une saisine enregistrée le 17 février 2025 sous le numéro 05-38-25 et un mémoire complémentaire enregistré le 3 avril 2025, ainsi que de nouvelles pièces produites les 11 juin et 1er juillet 2025, M. L. demande au comité de règlement des différends et des sanctions (le CoRDiS ou le « comité ») de :

- constater le délai déraisonnable concernant l'exécution de travaux d'extension par le syndicat intercommunal d'électricité du département de La Réunion (SIDÉLEC), ainsi que la négligence d'EDF Réunion quant au suivi de cette affaire et au manquement à ses obligations de gestionnaire du réseau public de distribution d'électricité ;
- ordonner à la société EDF (ci-après « EDF ») et au SIDÉLEC, ainsi que les mettre en demeure, d'exécuter le raccordement au réseau public d'électricité du bien dont il est propriétaire, sis 61 D, route de Grand-Coude à Saint-Joseph - parcelle cadastrale AN 753 - à La Réunion (97480), sous un délai maximum de 45 jours à compter de la notification de la décision à intervenir ;
- enjoindre à EDF ainsi qu'au SIDÉLEC d'informer le comité de l'exécution de l'injonction susmentionnée ;
- condamner solidairement EDF et le SIDÉLEC à une astreinte de 1 000 € par jour de retard pendant un délai d'un an en cas de non-exécution de l'injonction dans le délai imparti ;
- réserver la liquidation de l'astreinte par le comité.

M. L. soutient que :

- aucune date précise ne lui a été indiquée concernant la réalisation des travaux, alors que sa demande de raccordement, effectuée le 22 octobre 2023, a été jugée recevable le 13 novembre 2023 et que les pièces justificatives nécessaires à la complétude de la demande d'extension ont été transmises au SIDÉLEC le 30 novembre 2023 ;
- EDF Réunion a négligé le suivi de cette affaire et manqué à ses obligations en tant que gestionnaire du réseau de distribution d'électricité ;
- le SIDÉLEC a excédé le délai raisonnable de réalisation des travaux d'extension du réseau ;
- en l'absence de toute justification technique sérieuse, un refus ou un retard prolongé constitue une faute engageant la responsabilité du gestionnaire du réseau public d'électricité ainsi que celle de l'autorité concédante, conformément aux article L. 322-8 et L. 342-3 du code de l'énergie.

Pour les défendeurs :
Par deux mémoires en défense, enregistrés les 20 mars 2025 et 22 avril 2025, EDF, représentée par ses représentants légaux et ayant pour avocat Me Pouzilhac, cabinet Aramis Avocats, demande au comité de :

- constater qu'EDF a rempli ses obligations en qualité de gestionnaire du réseau de distribution d'électricité et de concessionnaire ;
- rejeter les demandes de M. Anthony L. à l'encontre d'EDF.

EDF soutient que :

- le comité n'a pas le pouvoir de mettre en demeure EDF et le SIDÉLEC d'exécuter le raccordement sur le fondement de l'article L. 134-30 du code de l'énergie, celui-ci visant des « manquements du gestionnaire du réseau public de transport d'électricité ou d'un gestionnaire de réseau de transport de gaz naturel » et ne s'appliquant pas dans le cadre d'une procédure de règlement d'un différend ;
- EDF exerce ses missions de gestionnaire du réseau public de distribution d'électricité (GRD) dans les limites fixées par la loi et par le contrat de concession de service public et son cahier des charges conclu avec l'AODE concernée, et sous le contrôle de celle-ci ; que dans ce cadre, le SIDÉLEC, en tant qu'AODE, est le maître d'ouvrage des travaux d'extension, et EDF ne peut se substituer à lui pour leur réalisation, comme il en résulte de l'article 5 de l'annexe 1 du cahier des charges ;
- pour proposer à M. L. un délai prévisionnel de mise en service, tel que prévu par la procédure Enedis-PRO-RAC_21E V3, appliquée par EDF, cette dernière doit réaliser une étude permettant de déterminer l'opération de raccordement de référence, puis transmettre une proposition de raccordement en bonne et due forme ;
- en l'espèce, elle a exécuté ses obligations en ayant transmis un schéma d'installation « souhaitable » au SIDÉLEC, pour instruction des travaux d'extension, dès mai 2023, ainsi qu'un avant-projet simplifié du plan de raccordement le 29 janvier 2024, réalisée par le bureau d'étude d'EDF sur la base de l'intervention sur place de l'entreprise REEL en novembre 2023 ;
- elle n'a jamais eu de retour du SIDÉLEC et n'est donc pas en possession de la totalité des éléments techniques nécessaires lui permettant de communiquer un délai prévisionnel de mise en service, ni une proposition de raccordement complète ; qu'à date, en l'absence d'indication sur les travaux d'extension par l'AODE, il lui est donc impossible d'accéder aux demandes du requérant ;
- s'il ressort des pièces produites qu'il pourrait exister un lien entre le dossier de M. L. et celui de M. X., propriétaire de la parcelle voisine, dans l'organisation des travaux par le SIDÉLEC, le projet de raccordement de la parcelle de M. X. a été validé par EDF le 2 avril 2025, soit un jour après que le dossier lui a été transmis par le SIDÉLEC ;
- le délai de raccordement invoqué par M. L. n'est qu'indicatif, dès lors que le raccordement est conditionné par la réalisation des travaux d'extension par le SIDÉLEC ;
- en tout état de cause, EDF accepte d'envoyer très rapidement au demandeur une offre de raccordement limité à la seule part branchement et de s'engager à le réaliser dans le délai de 10 jours à compter de la réception des travaux d'extension du réseau réalisés par l'AODE ;
- en l'absence de résistance de sa part dans l'exécution des obligations qui sont les siennes, aucune astreinte ne saurait lui être imposée.

Par deux mémoires en défense, enregistrés les 19 avril et 9 juillet 2025, le SIDÉLEC, représenté par ses représentants légaux et ayant pour avocat Me Ramsamy, cabinet d'avocats SELARL Ramsamy Avocats, demande au comité de :

- à titre principal, se déclarer incompétent pour connaître des demandes formées par M. L. à l'encontre du SIDÉLEC ;
- à titre subsidiaire, rejeter l'ensemble des demandes formées à son encontre.

Le SIDÉLEC soutient que :

- il est une autorité organisatrice de la distribution d'électricité (« AODE »), distincte d'un « gestionnaire » au sens de L. 134-19 du code de l'énergie, et que, partant, le CoRDiS est incompétent pour connaitre des demandes dirigées à son encontre ;
- sur le fond, aucune disposition législative ou règlementaire, ni aucune stipulation contractuelle, n'impose à l'AODE en général, ou au SIDÉLEC en particulier, un délai contraignant pour la réalisation des travaux d'extension de réseau ;
- en tout état de cause, le respect du délai raisonnable doit être apprécié à l'aune des circonstances spécifiques de réalisation de chaque projet ;
- en l'espèce, la solution technique mutualisée entre les projets de MM. X. et L. a été soumise à la commune de Saint-Joseph pour la validation du financement, indispensable à l'émission de tout bon de commande, qui ne l'a approuvé que le 18 mars 2024 ; par ailleurs, en ce qui concerne la maîtrise d'œuvre, le SIDÉLEC ne pouvait engager de prestations techniques qu'au titre du nouveau marché public, lequel ne lui a été notifié qu'en septembre 2024 ; le bon de commande n'a ainsi pu être notifié à la maître d'œuvre, la SARL BETEL, que le 16 janvier 2025 ;
- par la suite, la SARL BETEL est intervenue sur les deux parcelles, comme en atteste la convention de passage signée le 28 mars 2025 par M. L. lui-même, et le 1er avril 2025 la SARL BETEL a transmis à EDF les études techniques qui ont été validées par EDF le 2 avril 2025 ;
- dès que la phase d'études par la SARL BETEL sera achevée, un autre bon de commande sera émis par le SIDÉLEC pour la réalisation des travaux, le délai contractuel étant de 70 jours calendaires à compter de la notification du bon de commande ;
- cependant, la parcelle de M. L. a été « déclarée sans suite pour cause d'infructuosité », situation totalement indépendante de la volonté du SIDÉLEC et que des réflexions sont en cours en interne afin de déterminer les meilleures suites à donner à cette procédure.

Par une décision du 16 juin 2025, la clôture de l'instruction a été fixée au 9 juillet 2025, à 12 heures.
Par des courriers du 23 septembre 2025, les parties ont été informées que la séance publique était fixée au 8 octobre 2025 à 14 h 30.
Les parties ont été régulièrement convoquées à la séance du Comité de règlement de différends et des sanctions, composé de Mme Morellet-Steiner, présidente, M. Dary, Mme Poillot-Peruzzetto et M. Mahé, membres, qui s'est tenue le 8 octobre 2025, en présence de :

- M. Rodriguez, directeur adjoint des affaires juridiques et représentant le directeur général empêché ;
- M. Giafferi, rapporteur ;
- M. L. ;
- les représentants d'EDF, assistés de Me Pouzilhac ;
- les représentants du SIDÉLEC, assistés de Me Ramsamy.

Le Comité a entendu :

- le rapport de M. Giafferi, présentant les moyens et les conclusions des parties ;
- les observations de M. L. ;
- les observations de Me Pouzilhac, pour EDF ;
- les observations de Me Ramsamy, pour le SIDÉLEC.

Vu :

- le code de l'énergie, notamment ses articles L. 134-19 et suivants et R. 134-7 et suivants ;
- le cahier des charges de concession du 22 novembre 2022 ayant pour objet la concession accordée par le SIDÉLEC à EDF pour le service public du développement et de l'exploitation du réseau public de distribution d'électricité et de la fourniture électrique aux tarifs réglementés de vente ;
- la décision du 13 février 2019 portant adoption du règlement intérieur du comité de règlement des différends et des sanctions de la Commission de régulation de l'énergie ;
- la décision du 13 juin 2025 de la présidente du comité de règlement des différends et des sanctions de la Commission de régulation de l'énergie relative à la désignation d'un rapporteur pour l'instruction d'une demande de règlement de différend.

Vu les autres pièces du dossier ;
A l'issue de son délibéré, le comité a adopté la décision qui suit.

Exposé du différend

  1. Le 5 mai 2023, M. L. a obtenu un permis de construire n° PC 974412 23 00055 pour la construction d'une maison individuelle sur la parcelle n° 753, route de Grand-Coude à Saint-Joseph (97480). Le 9 mai 2023, EDF a transmis au SIDÉLEC le résultat de l'étude électrique pour l'instruction de l'autorisation d'urbanisme obtenue par M. L. et lui a indiqué : « Selon le Cahier des Charges de Concession relatif à cette opération, des travaux de raccordement sous [la] maîtrise d'ouvrage [du SIDÉLEC] sont nécessaires pour alimenter cette parcelle ». Le 15 mai 2023, le SIDÉLEC a transmis au service de l'urbanisme de la mairie de Saint Joseph les conclusions d'EDF, en estimant les travaux d'extension nécessaires, à la charge de la commune, à un montant de 38 020,00 € HT, en précisant que le raccordement devrait être effectué dans un délai prévisionnel de 6 à 18 mois à compter de la date de dépôt du dossier de raccordement auprès de ses services.
  2. M. L. a effectué une demande de raccordement n° 00020376 auprès d'EDF le 22 octobre 2023, qui a été déclarée recevable le 13 novembre 2023. Le 18 novembre 2023, la société REEL, mandatée par EDF, a confirmé, dans un compte rendu d'étude de branchement, qu'une extension du réseau était à prévoir pour le raccordement de l'installation de M. L. Par un courriel du 30 novembre 2023, le SIDÉLEC a indiqué à M. L., qui les a transmises le même jour, la liste des pièces à fournir pour pouvoir « relier [son] dossier à celui de M. [X.] ». Le 5 décembre 2023, EDF a informé M. L. des conclusions de la société REEL et qu'elle était dans l'attente de la réalisation des travaux, l'invitant à se rapprocher de la Collectivité en Charge de l'Urbanisme (CCU) pour en connaitre l'évolution. Le 29 janvier 2024, EDF a transmis au SIDÉLEC le dossier pour instruction de la demande d'extension dont le SIDÉLEC a accusé réception le 30 janvier 2024. Le 13 mars 2024, un avis favorable a été émis par la commune de Saint-Joseph pour la prise en charge des travaux d'extension à effectuer sur la parcelle n° 683 appartenant à M. X.
  3. Par un courriel du 24 novembre 2024, M. L. a indiqué au SIDÉLEC n'avoir eu aucun retour ou prise de contact relativement aux travaux d'extension. Le 28 novembre 2024, le SIDÉLEC a indiqué à M. L. : « Le bon de commande adressé au bureau d'étude a dû être réédité suite à une erreur sur les articles. Il est actuellement en cours de signature et sera retourné à BETEL dès réception ». Le 16 janvier 2025, la société BETEL a accusé réception et signé un bon de commande émis par le SIDÉLEC le 19 décembre 2024 concernant la parcelle de M. X. Le 28 mars 2025, M. L. a signé une convention de servitude transmise par le SIDÉLEC et autorisant ce dernier ainsi que la société EDF à pénétrer sur sa parcelle et à y effectuer les travaux nécessaires au raccordement de son installation de consommation. Le 9 juillet 2025, le SIDÉLEC a indiqué à M. L. que : « le lot n° 8 de la procédure 2024PO15 - portant sur le renforcement de câbles ou créations de départ et les extensions sur certaines communes du sud dont Saint-Joseph - n'a pas été « annulé », mais déclaré sans suite pour cause d'infructuosité. » et que : « Des réflexions sont en cours en interne afin de décider des meilleures suites à donner à cette procédure. »
  4. C'est dans ce contexte que M. L. a saisi le comité d'une demande de règlement d'un différend.

Sur la compétence du comité :

  1. Aux termes de l'article L. 134-19 du code de l'énergie : « Le comité de règlement des différends et des sanctions peut être saisi en cas de différend : / 1° Entre les gestionnaires et les utilisateurs des réseaux publics de transport ou de distribution d'électricité ou de réseaux fermés de distribution d'électricité ; / […] / Ces différends portent sur l'accès auxdits réseaux, ouvrages et installations ou à leur utilisation, notamment en cas de refus d'accès ou de désaccord sur la conclusion, l'interprétation ou l'exécution des contrats mentionnés aux articles L. 111-91 à L. 111-94, L. 111-97, L. 321-11 et L. 321-12, ou des contrats relatifs aux opérations de transport et de stockage géologique de dioxyde de carbone mentionnés à l'article L. 229-49 du code de l'environnement. / […] ».
  2. L'article L. 121-4 du code de l'énergie dispose que « I. - La mission de développement et d'exploitation des réseaux publics de transport et de distribution d'électricité consiste à assurer : 1° La desserte rationnelle du territoire national par les réseaux publics de transport et de distribution, dans le respect de l'environnement, et l'interconnexion avec les pays voisins ; 2° Le raccordement et l'accès, dans des conditions non discriminatoires, aux réseaux publics de transport et de distribution. II. - Sont chargées de cette mission, conformément à leurs compétences respectives, […] la société gestionnaire de réseaux publics de distribution issue de la séparation des activités d'Electricité de France en application de l'article L. 111-57, […] et les autorités organisatrices de la distribution publique d'électricité. Elles accomplissent cette mission conformément aux dispositions du présent code relatives au transport et à la distribution d'électricité ainsi qu'au raccordement aux réseaux et, s'agissant des réseaux publics de distribution, à celles des cahiers des charges des concessions ou des règlements de service des régies mentionnés au II de l'article L. 2224-31 du code général des collectivités territoriales. Les charges en résultant sont réparties dans les conditions prévues aux articles L. 121-9 à L. 121-31. »
  3. Aux termes des dispositions de l'article L. 322-1 du code de l'énergie : « Les autorités organisatrices d'un réseau public de distribution sont définies à l'article L. 2224-31 du code général des collectivités territoriales » ; aux termes du premier alinéa de l'article L. 2224-31 du code général des collectivités territoriales « I. - Sans préjudice des dispositions de l'article 23 de la loi n° 46-628 du 8 avril 1946 sur la nationalisation de l'électricité et du gaz, les collectivités territoriales ou leurs établissements publics de coopération, en tant qu'autorités concédantes de la distribution publique d'électricité et de gaz en application de l'article 6 de la loi du 15 juin 1906 sur les distributions d'énergie et de l'article 36 de la loi n° 46-628 du 8 avril 1946 précitée, négocient et concluent les contrats de concession, et exercent le contrôle du bon accomplissement des missions de service public fixées, pour ce qui concerne les autorités concédantes, par les cahiers des charges de ces concessions ». Aux termes des dispositions de l'article L. 322-6 du code de l'énergie, « Les autorités organisatrices du réseau public de distribution d'électricité ont la faculté de faire exécuter en tout ou en partie à leur charge, les travaux de premier établissement, d'extension, de renforcement et de perfectionnement des ouvrages de distribution. Les dispositions relatives à la maîtrise d'ouvrage par ces autorités sont énoncées aux articles L. 2224-31 et L. 3232-2 du code général des collectivités territoriales. »
  4. En application de ces dispositions, les décisions du CoRDiS peuvent s'imposer, en particulier, à une autorité organisatrice de la distribution d'électricité (AODE) agissant en qualité de gestionnaire de réseau de distribution d'électricité au sens et pour l'application de l'article L. 134-19 du code de l'énergie, en tant qu'elle exerce des compétences de développement et d'exploitation des réseaux publics de distribution d'électricité qui relèvent de l'activité du gestionnaire de réseau de distribution et dans la stricte limite des compétences qu'elle n'a pas déléguées.
  5. En l'espèce, aux termes de l'article 5 de l'annexe 1 du cahier des charges de concession du 22 novembre 2022 ayant pour objet la concession accordée par le SIDÉLEC à EDF pour le service public du développement et de l'exploitation du réseau public de distribution d'électricité et de la fourniture électrique aux tarifs réglementés de vente : « […] conformément à l'accord-cadre signé entre la FNCCR et EDF le 1er mars 2022, la répartition de la maitrise d'ouvrage des travaux sur les réseaux concédés est établie en fonction de l'origine et de la nature des travaux et de la catégorie des communes […] ». Il ressort du même article du cahier des charges qu'une « extension BT pour le raccordement individuel d'une installation de consommation » en zone rurale relève de la maîtrise d'ouvrage de l'AODE ou de la collectivité. Il résulte de ces stipulations que, dans le cadre d'une demande de raccordement formée auprès d'EDF, le SIDÉLEC est en charge, notamment, des travaux d'extension du réseau électrique dans le cadre du raccordement d'une installation de consommation au réseau public de distribution, lorsque cette dernière se trouve en zone rurale.
  6. Par suite, le comité est compétent pour connaître des demandes portées devant lui par M. L. à l'encontre du SIDÉLEC. L'exception d'incompétence soulevée par le SIDÉLEC doit dès lors être rejetée.

Sur le fond :

  1. Aux termes de l'article L. 121-1 du code de l'énergie : « Le service public de l'électricité a pour objet de garantir, dans le respect de l'intérêt général, l'approvisionnement en électricité sur l'ensemble du territoire national. / Dans le cadre de la politique énergétique, il contribue à l'indépendance et à la sécurité d'approvisionnement, à la qualité de l'air et à la lutte contre l'effet de serre, à la gestion optimale et au développement des ressources nationales, à la maîtrise de la demande d'énergie, à la compétitivité de l'activité économique et à la maîtrise des choix technologiques d'avenir, comme à l'utilisation rationnelle de l'énergie. / Il concourt à la cohésion sociale, à la lutte contre les exclusions, au développement équilibré du territoire, dans le respect de l'environnement, à la recherche et au progrès technologique, ainsi qu'à la défense et à la sécurité publique. / Matérialisant le droit de tous à l'électricité, produit de première nécessité, le service public de l'électricité est géré dans le respect des principes d'égalité, de continuité et d'adaptabilité et dans les meilleures conditions de sécurité, de qualité, de coûts, de prix et d'efficacité économique, sociale et énergétique. » Aux termes de l'article L. 322-2 du même code : « Le gestionnaire du réseau public de distribution d'électricité exerce ses missions dans les conditions fixées par le cahier des charges pour les concessions […] ».
  2. Il résulte des stipulations de l'article 5 de l'annexe 1 du cahier des charges citées au point 9 de la présente décision que les travaux d'extension nécessaires au raccordement d'une installation de consommation qui se situe en zone rurale relèvent de la maitrise d'ouvrage de l'AODE ou de la collectivité. C'est donc régulièrement qu'EDF a laissé au SIDÉLEC la charge d'effectuer les travaux d'extension nécessaires au raccordement de l'installation de consommation de M. L., dont il n'est pas contesté qu'elle se situe en zone rurale au sens et pour l'application du cahier des charges visé ci-dessus. Dans ces conditions il n'apparait pas que la société EDF, qui a au demeurant déclaré au cours de la séance publique être prête à réaliser les travaux concernant la « partie branchement » de l'ouvrage de raccordement au réseau public d'électricité de l'installation de consommation de M. L. « dans les dix jours à compter de la mise en exploitation », a manqué à ses obligations.
  3. Il ressort de l'instruction que si, le 16 janvier 2025, la société BETEL a accusé réception et signé un bon de commande émis par le SIDÉLEC et si, le 28 mars 2025, M. L. a signé une convention de servitude transmise par le SIDÉLEC, la réalisation des ouvrages d'extension n'a, pour autant, toujours pas été réalisée et n'a pas même débuté à la date de la présente décision. Il en résulte que la société EDF n'a toujours pas été mise en mesure par le SIDÉLEC de transmettre une proposition de raccordement complète à M. L, alors que la demande de raccordement de ce dernier a été déclarée recevable le 13 novembre 2023.
  4. A cet égard, la circonstance que le SIDÉLEC était dans l'attente d'un « nouveau marché public », lequel n'a été notifié qu'en septembre 2024, et que la mairie de Saint-Joseph n'a approuvé que le 18 mars 2024 « la validation du financement, indispensable à l'émission de tout bon de commande », est sans incidence sur l'étendue de son obligation de répondre aux demandes de raccordements qui lui sont soumises par l'intermédiaire d'EDF pour la partie de l'ouvrage qui le concerne au titre du cahier des charges de concession. Ainsi, le SIDÉLEC, qui a informé M. L. que le marché relatif aux travaux concernant sa parcelle avait été « déclarée sans suite pour cause d'infructuosité », ne justifie pas les causes de l'arrêt total du processus de raccordement, ni dans ses écritures régulièrement déposées ni lors de la séance publique, et ne propose ainsi aucune perspective sérieuse quant au lancement des travaux d'extension.
  5. En conséquence, pour régler le présent différend, il y a lieu d'enjoindre au SIDÉLEC de débuter, dans un délai de 30 jours à compter de la notification de la présente décision, les travaux d'extension nécessaires afin que M. L. puisse accéder au réseau public de distribution d'électricité, sous une astreinte, passé ce délai, de 200 euros par jour de retard pendant une durée de six mois.
  6. Il y a également lieu d'enjoindre au SIDÉLEC de transmettre, dans un délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision, au comité et à M. L., toutes les informations pertinentes concernant le début effectif des travaux d'extension en cause, puis de transmettre, tous les mois pendant six mois, au comité ainsi qu'à M. L, toutes les informations relatives à l'avancement des travaux en cause, sans qu'il y ait lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Décision

Article 1

Il est enjoint au SIDELEC de débuter, dans un délai de 30 jours à compter de la notification de la présente décision, les travaux d'extension nécessaires afin que M. L. puisse accéder au réseau public de distribution d'électricité, sous une astreinte, passé ce délai, de 200 euros par jour de retard, pendant une durée de six mois.

Article 2

Il est enjoint au SIDÉLEC de transmettre, dans un délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision, au comité et à M. L., toutes les informations pertinentes concernant le début effectif des travaux d'extension en cause, puis de transmettre, tous les mois pendant six mois, au comité ainsi qu'à M. L., toutes les informations relatives à l'avancement des travaux en cause, sans qu'il y ait lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Article 3

Le surplus des demandes des parties est rejeté.

Article 4

La présente décision sera notifiée aux parties. Elle sera publiée au Journal officiel de la République française.

Fait à Paris, le 22 octobre 2025.

Pour le comité de règlement des différends et des sanctions :

La présidente,

P. Morellet-Steiner