Dans ses observations, la société Enjoy Montpellier soutient que le comité de règlement des différends et des sanctions est compétent pour connaître du présent différend qui concerne les modalités de raccordement d'une installation de production photovoltaïque et le non-respect par la société ERDF de sa propre réglementation technique de référence.
La société Enjoy Montpellier indique qu'elle est utilisateur du réseau et donc que son recours dirigé à l'encontre du gestionnaire de réseau est tout à fait recevable.
Elle considère que le non-respect du délai de trois mois pour la délivrance de la proposition technique et financière constitue un manquement de la société ERDF aux obligations issues de la procédure de traitement des demandes de raccordement.
La société Enjoy Montpellier ajoute qu'au regard des éléments tant textuels que jurisprudentiels, le dépassement de ce délai pour délivrer la proposition technique et financière constitue une méconnaissance par la société ERDF de ses obligations et de sa documentation technique de référence.
Elle soutient que l'obligation faite aux Etats membres d'assurer la non-discrimination, une concurrence effective et le fonctionnement des marchés ne peut être remplie que si des référentiels techniques, avec un contenu impératif, sont mis en place.
La société Enjoy Montpellier ajoute que ce délai de trois mois constitue donc une obligation de résultat au regard de la directive 2003/54/CE.
Elle soutient que la décision de la Commission de régulation de l'énergie du 7 avril 2004 fait ressortir clairement que les délais constituent des obligations de résultat dont la méconnaissance induit un comportement fautif du gestionnaire de réseaux.
La société Enjoy Montpellier considère que le manquement de la société ERDF aux obligations issues des documents techniques de référence a eu pour conséquence directe de la soumettre aux nouveaux tarifs de rachat d'électricité, tels qu'ils ressortent des arrêtés du 12 janvier 2010 et du 16 mars 2010.
La société Enjoy Montpellier demande en conséquence au comité de règlement des différends et des sanctions de la Commission de régulation de l'énergie de :
― constater que la société ERDF a méconnu ses obligations issues de sa propre documentation technique de référence ;
― constater que le délai de trois mois pour présenter la proposition technique et financière constitue une obligation de résultat à la charge du gestionnaire du réseau ;
― en déduire, qu'en l'absence de méconnaissance de la société ERDF par sa documentation technique de référence, la proposition technique et financière aurait été renvoyée par le producteur accompagnée de l'acompte demandé avant le 11 janvier 2010.
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Vu les observations en défense, enregistrées le 23 juillet 2012, présentées par la société Electricité Réseau Distribution France (ERDF), société anonyme, immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Nanterre sous le numéro B 444 608 442, dont le siège social est situé 102, terrasse Boieldieu, 92085 Paris La Défense Cedex, représentée par sa présidente du directoire, Mme Michèle BELLON, ayant pour avocat Me Romain GRANJON, cabinet Adamas, 55, boulevard des Brotteaux, 69006 Lyon.
La société ERDF indique que le différend qui ne porte que sur la détermination du tarif d'achat d'électricité, en l'absence de tout litige quant au raccordement désormais effectif de l'installation de production, ne relève pas de la compétence du comité de règlement des différends et des sanctions.
Elle considère que la demande de la société Enjoy Montpellier ne vise pas à la résolution d'un litige relatif à l'accès aux réseaux et à leur utilisation, mais à obtenir la modification du régime tarifaire applicable à l'installation de production.
La société ERDF soutient que la saisine de la société Enjoy Montpellier ne soulève l'existence d'aucune difficulté actuelle d'accès au réseau qui justifierait une intervention du comité de règlement des différends et des sanctions. Elle ajoute que l'installation de production est raccordée et bénéficie depuis deux ans d'un accès effectif au réseau et qu'il n'existe aucune difficulté d'accès susceptible d'être résolue par le comité.
Elle prétend enfin qu'il n'appartient pas au comité de règlement des différends et des sanctions de s'immiscer dans un contentieux éventuel en responsabilité qui relève de la seule compétence des juridictions de droit commun, par une décision qui porterait atteinte au pouvoir d'appréciation desdites juridictions.
La société ERDF demande en conséquence au comité de règlement des différends et des sanctions de rejeter l'ensemble des prétentions de la société Enjoy Montpellier.
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Vu les observations en réplique, enregistrées le 6 août 2012, présentées par la société Enjoy Montpellier.
La société Enjoy Montpellier soutient que le présent litige concerne les modalités et les conditions de raccordement d'une installation de production photovoltaïque au réseau public de distribution, et plus précisément le non-respect par la société ERDF de sa propre réglementation technique et financière, contrairement à ce que soutient la société ERDF.
Elle indique que le comité de règlement des différends et des sanctions a d'ailleurs confirmé ce point à plusieurs reprises, notamment dans sa décision n° 193-38-11 du 30 septembre 2011 et dans sa décision n° 241-38-11 du 12 décembre 2011.
La société Enjoy Montpellier persiste, donc, dans ses précédentes observations et demande au comité de règlement des différends et des sanctions de :
― constater que la société ERDF a méconnu ses obligations issues de sa propre documentation technique de référence ;
― constater que le délai de trois mois pour présenter la proposition technique et financière constitue une obligation de résultat à la charge du gestionnaire du réseau.
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Vu les observations en duplique, enregistrées le 27 août 2012, présentées par la société ERDF.
La société ERDF soutient que les deux décisions du comité de règlement des différends et des sanctions, en date des 30 septembre 2001 et 12 décembre 2011, concernaient le refus, par la société ERDF, de poursuivre la procédure de raccordement en vertu du décret du 9 décembre 2010 relatif au moratoire des tarifs de rachat de l'électricité.
Elle indique que la saisine de la société Enjoy Montpellier ne soulève l'existence d'aucune difficulté actuelle d'accès au réseau qui justifierait une intervention du comité.
La société ERDF soutient donc que le litige n'entre pas dans le champ d'application de l'article L. 134-19 du code de l'énergie, puisque l'installation de production de la société Enjoy Montpellier est raccordée et bénéficie d'un accès effectif au réseau.
La société ERDF persiste en conséquence dans ses précédentes conclusions.
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'énergie, notamment ses articles L. 134-19 et suivants ;
Vu le décret n° 2000-894 du 11 septembre 2000 modifié relatif aux procédures applicables devant la Commission de régulation de l'énergie ;
Vu la décision du 20 février 2009 relative au règlement intérieur du comité de règlement des différends et des sanctions de la Commission de régulation de l'énergie ;
Vu la décision du 8 juin 2012 du président du comité de règlement des différends et des sanctions de la Commission de régulation de l'énergie relative à la désignation d'un rapporteur et d'un rapporteur adjoint pour l'instruction de la demande de règlement de différend enregistrée sous le numéro 19-38-12 ;
Vu la décision du 4 août 2012 du comité de règlement des différends et des sanctions de la Commission de régulation de l'énergie relative à la prorogation du délai d'instruction de la demande de différend introduite par la société Enjoy Montpellier ;
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Les parties ayant été régulièrement convoquées à la séance publique, qui s'est tenue le 12 décembre 2012, du comité de règlement des différends et des sanctions, composé de M. Pierre-François RACINE, président, Mme Sylvie MANDEL, M. Roland PEYLET et M. Christian PERS, membres, en présence de :
M. Olivier BEATRIX, directeur juridique et représentant le directeur général empêché ;
M. Didier LAFFAILLE, rapporteur, et M. Thibaut DELAROCQUE, rapporteur adjoint ;
Me Anne LECARD, pour la société Enjoy Montpellier ;
Les représentants de la société ERDF, assistés de Me Gaëlle COGNET.
Après avoir entendu :
― le rapport de M. Didier LAFFAILLE, présentant les moyens et les conclusions des parties ;
― les observations de Me Anne LECARD pour la société Enjoy Montpellier ; la société Enjoy Montpellier persiste dans ses moyens et conclusions ;
― les observations de Me Gaëlle COGNET et M. Christopher MENARD pour la société ERDF ; la société ERDF persiste dans ses moyens et conclusions ;
Aucun report de séance n'ayant été sollicité ;
Le comité de règlement des différends et des sanctions en ayant délibéré le 12 décembre 2012, après que les parties, le rapporteur, le rapporteur adjoint, le public et les agents des services se sont retirés.
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La société Enjoy Montpellier soutient que le comité de de règlement des différends et des sanctions est compétent pour connaître du présent différend qui concerne les modalités de raccordement d'une installation de production photovoltaïque et le non-respect par la société ERDF de sa documentation technique de référence.
La société ERDF fait valoir que le litige n'entre pas dans le champ d'application de l'article L. 134-19 du code de l'énergie, puisque l'installation de production de la société Enjoy Montpellier est raccordée et bénéficie d'un accès effectif au réseau. Elle considère donc que le comité de règlement des différends et des sanctions n'est pas compétent pour se prononcer sur la méconnaissance d'une procédure de traitement de demande de raccordement dès lors qu'il n'en résulterait aucune décision de règlement d'un différend.
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L'article L. 134-19 du code de l'énergie dispose que le « comité de règlement des différends et des sanctions peut être saisi en cas de différend : 1° Entre les gestionnaires et les utilisateurs des réseaux publics de transport ou de distribution d'électricité [...] sur l'accès auxdits réseaux [...] ou à leur utilisation, notamment en cas de refus d'accès ou de désaccord sur la conclusion, l'interprétation ou l'exécution des contrats mentionnés aux articles L. 111-91 à L. 111-94, L. 321-11 et L. 321-12 [...], la saisine du comité est à l'initiative de l'une ou l'autre des parties [...] ».
Il ressort des termes mêmes du code de l'énergie qu'un différend n'entre dans la compétence du comité de règlement des différends et des sanctions, laquelle est une compétence d'attribution, qu'à deux conditions tenant l'une à la qualité des personnes qu'un différend oppose et l'autre à l'objet du différend. Il ne suffit donc pas qu'un différend oppose un gestionnaire de réseau à un utilisateur pour que le comité soit compétent pour le trancher. Encore faut-il que l'objet du différend corresponde à l'une des catégories limitativement énoncées par le code.
Tel n'est pas le cas de l'espèce, dès lors que la convention de raccordement a été signée par les deux parties, sans aucune réserve de la société Enjoy Montpellier et que l'installation de production a été mise en service le 26 août 2010. La circonstance que la société ERDF a délivré une proposition technique et financière dans un délai supérieur à trois mois ne permettant pas à la société Enjoy Montpellier de bénéficier pour l'achat de l'électricité produite par son installation de production d'électricité du tarif édicté par l'arrêté du 10 juillet 2006 ne suffit pas pour que le différend les opposant soit regardé comme lié à l'accès au réseau.
Ainsi, le présent différend, qui vise uniquement à l'obtention d'un tarif d'achat d'électricité, n'est pas relatif à l'accès ou à l'utilisation des réseaux publics, ni à un désaccord sur la conclusion, l'interprétation ou l'exécution d'un contrat visé aux articles L. 111-91 à L. 111-94, L. 321-11 et L. 321-12 du code de l'énergie. Le comité de règlement des différends et des sanctions n'est donc pas compétent pour connaître du différend soulevé par la société Enjoy Montpellier.
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Décide :
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