A N N E X E S
A N N E X E I
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JOn° 289 du 13/12/2013 texte numéro 80
A N N E X E I I
NOTE SUR LE PROJET DE LOI ET LE PROJET DE LOI ORGANIQUE RELATIFS À LA TRANSPARENCE DE LA VIE PUBLIQUE ADOPTÉE PAR LA COMMISSION LORS DE SA SÉANCE PLÉNIÈRE DU 15 MAI 2013
Depuis sa création par la loi du 11 mars 1988, la Commission pour la transparence financière de la vie politique n'a cessé de proposer, dans ses différents rapports publics publiés au Journal officiel de la République française, un renforcement de ses pouvoirs afin de lui permettre de mieux exercer sa mission : le contrôle des variations de situations patrimoniales des principaux élus et dirigeants d'organismes publics.
Le projet de loi organique et le projet de loi relatifs à la transparence de la vie publique prévoient plusieurs avancées remarquables, dont certaines font écho aux propositions formulées par la commission dans ses rapports publics. Ces avancées permettront à la future Haute Autorité de la transparence de la vie publique de disposer de pouvoirs significativement renforcés par rapport à ceux de la commission.
Toutefois, la réforme semble insuffisante au regard des enjeux actuels. Sur le fondement de son expérience tirée du contrôle de plus de 11 000 variations de situations patrimoniales, la commission préconise l'adoption des mesures suivantes afin de permettre à la Haute Autorité d'exercer efficacement ses missions.
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Assurer un meilleur partage d'informations avec les administrations, notamment avec l'administration fiscale
Mesure 1. Renforcement des échanges d'informations avec l'administration fiscale.
Afin de permettre un contrôle effectif des déclarations, il apparaît nécessaire :
― de conférer aux membres et rapporteurs de la Haute Autorité un droit de communication général des dossiers et informations relatifs aux assujettis qui sont détenus par l'administration fiscale. Dans certains cas, la seule connaissance des déclarations faites au titre de l'impôt sur le revenu ou de l'impôt de solidarité sur la fortune ne suffit pas à obtenir une vision complète de la situation des intéressés. Ce droit de communication permettrait à la Haute Autorité de disposer de l'intégralité des informations que l'administration fiscale possède sur un assujetti (redressement, résultat des contrôles sur pièce...). Ce droit de communication doit inclure le droit d'accès au fichier national des comptes bancaires et assimilés (« FICOBA ») ;
― de permettre aux membres et rapporteurs de la Haute Autorité d'accéder sur place aux dossiers des assujettis (dans les locaux de l'administration fiscale). Ce mode d'accès permettra d'obtenir rapidement ces informations dans les cas d'urgence, afin par exemple de respecter les délais contraints d'examen de certains dossiers ;
― de permettre à la Haute Autorité de demander à l'administration fiscale, si un dossier le nécessite, d'exercer, sous sa responsabilité, une vérification de situation fiscale au titre de l'impôt sur le revenu ou de l'impôt de solidarité sur la fortune et plus largement de faire des investigations dans son champ de compétence. Si le projet de loi prévoit le déclenchement automatique de cette vérification pour les ministres, il paraît très opportun d'en prévoir la faculté pour les autres assujettis ;
― de permettre à la Haute Autorité de demander à TRACFIN de lui communiquer sous soixante jours toute information qui serait détenue par ce service sur des assujettis et qui serait nécessaire à l'exercice de ses missions.
Mesure 2. Assistance en matière internationale.
Cette assistance doit emprunter deux canaux :
― prévoir la possibilité pour la Haute Autorité de faire appel aux procédures de coopération et d'assistance administrative internationale, soit directement, soit en demandant à l'administration fiscale d'activer ces procédures ;
― permettre à la Haute Autorité de demander, dans un délai fixé à soixante jours, assistance aux postes diplomatiques français à l'étranger (et notamment, par leur biais, aux services économiques et financiers placés auprès d'eux). -
Renforcer l'effectivité du contrôle de la Haute Autorité
de la transparence de la vie publique
Mesure 3. Possibilité de contrôler la cellule familiale dans son ensemble en cas de doute.
La Haute Autorité doit disposer de moyens lui permettant de lutter efficacement, dans les situations douteuses, contre toute stratégie de contournement. Cela suppose tout d'abord qu'elle puisse étendre ses investigations au patrimoine des proches de l'assujetti :
― d'une part, aux biens propres du conjoint, quelle que soit la nature du contrat de mariage, du partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou du concubin ;
― d'autre part, à ceux des enfants mineurs dont l'assujetti, son conjoint, son partenaire ou son concubin a l'administration légale des biens.
Le projet de loi, en particulier son article 5, devrait dès lors être complété afin d'instaurer un tel mécanisme de contrôle qui n'est pas expressément mentionné et d'y inclure les enfants mineurs.
La prévention des contournements implique, en outre, que la Haute Autorité puisse accéder aux informations dont l'administration fiscale est détentrice quant aux donations effectuées par les personnes entrant dans son champ de contrôle ou à leur profit. Cet objectif pourrait être atteint dans le cadre de la mesure n° 1 proposée ci-dessus.
Mesure 4. Institution d'un pouvoir d'enquête.
La crédibilité et l'efficacité de la Haute Autorité dépendront en grande partie des moyens d'investigation propres dont elle pourra être dotée. A ce titre :
― la Haute Autorité doit disposer d'un pouvoir d'enquête consistant, pour la recherche d'une infraction précise (par exemple, déclaration de patrimoine mensongère), en un droit d'accès à tous documents et à tous locaux professionnels, à condition du moins que ceux-ci soient exclusivement consacrés à cet usage. Il ne s'agirait pas de conférer à la Haute Autorité des pouvoirs de perquisition ou de saisie de documents ― de tels pouvoirs, passant outre au consentement des intéressés, requérant en tout état de cause l'autorisation préalable d'un juge. Il s'agirait seulement de lui permettre, avec le consentement des assujettis, de se rendre sur place et de prendre copie par tout moyen et sur tout support des documents de toute nature utiles à l'accomplissement de sa mission. Malgré les limites tenant à l'absence de contrainte matérielle, une telle prérogative, dont l'exercice serait nécessairement cantonné aux dossiers les plus douteux, permettrait de lever efficacement certaines ambiguïtés ou obscurités ;
― si le projet de loi prévoit la faculté pour la Haute Autorité d'entendre toute personne dont le concours lui paraît utile (article 13), ces dispositions devront être complétées afin de clarifier les pouvoirs de la nouvelle autorité à l'égard des personnes entendues, dans les termes suivants : « La Haute Autorité de la transparence de la vie publique peut demander des informations, des pièces et des explications à toute personne soumise à son contrôle. Elle peut entendre toute autre personne dont le concours lui paraît utile et demander communication de toute information ou document utile à l'exercice de sa mission » ;
― enfin, il apparaît nécessaire que les personnes entendues par la Haute Autorité dans le cadre de sa mission soient libérées du secret professionnel, notamment les agents publics, les commissaires aux comptes, sauf lorsque ces professionnels disposent d'une protection spécifique au titre du secret ou si celui-ci est dépourvu de tout lien avec le contrôle de la variation des patrimoines.
Mesure 5. Inclusion de la Haute Autorité parmi les destinataires d'alertes.
Le dispositif d'autosaisine de la Haute Autorité doit lui permettre de s'emparer des problématiques qui lui sembleront le mériter (article 13-II du projet de loi ordinaire).
En complément, il est toutefois souhaitable de préciser explicitement que la Haute Autorité figure parmi les destinataires des alertes que peuvent envoyer les « lanceurs d'alerte » pour signaler toute infraction pénale. Cela implique :
― d'une part, de modifier l'article 13 du projet pour y indiquer que la réception et le traitement des alertes sont au nombre des missions confiées à la Haute Autorité ;
― d'autre part, d'amender l'article 17 pour étendre la protection des « lanceurs d'alerte », actuellement cantonnée aux situations de conflits d'intérêts, au moins au dispositif de vérification des situations patrimoniales.
3. Garantir des moyens suffisants à la Haute Autorité de la transparence de la vie publique au regard de son champ de compétence
L'élargissement du périmètre des personnes assujetties au contrôle de la Haute Autorité, par rapport au cercle des personnes contrôlées par l'actuelle commission, et l'approfondissement de ses pouvoirs de contrôle, vont impliquer l'allocation de moyens humains et financiers supplémentaires lui permettant d'assumer ses missions. Afin de tirer les conséquences de ces charges nouvelles et d'en maîtriser le coût, les mesures suivantes sont proposées.
Mesure 6. Attribution de l'autonomie financière à la Haute Autorité.
De même que pour toute autorité administrative indépendante, il convient de doter la Haute Autorité de l'autonomie financière et de prévoir les dispositions classiques lui permettant d'exercer cette autonomie : budget arrêté par le collège sur proposition du secrétaire général, non-applicabilité des dispositions relatives à l'organisation du contrôle des dépenses engagées.
Mesure 7. Envoi automatique de la dernière déclaration fiscale avec la déclaration de patrimoine.
Depuis plusieurs années, la commission demande qu'avec les déclarations de patrimoine d'entrée et de sortie lui soient adressées la dernière déclaration fiscale à l'IR, et le cas échéant, à l'ISF. Le projet de loi prévoit que la Haute Autorité dispose d'un droit d'accès à ces déclarations fiscales. Ces informations sur les flux (les revenus) sont en effet indispensables pour apprécier la variation de stock (le patrimoine). Cependant, l'envoi ab initio et spontané des déclarations simplifierait les procédures et permettrait à la Haute Autorité de se consacrer aux dossiers méritant un examen approfondi. Dans le cas contraire, il faudrait que la Haute Autorité envoie plus de 1 500 courriers par an pour demander leurs déclarations aux assujettis.
Mesure 8. Dispense de la double déclaration dans un délai de six mois.
Pour les mêmes raisons, il importe de maintenir la règle selon laquelle un élu est dispensé de déposer une nouvelle déclaration de patrimoine ou d'intérêts dans le cas où de telles déclarations ont été déposées dans les six mois précédents. L'élu aurait en contrepartie l'obligation d'actualiser sa déclaration si nécessaire.
Mesure 9. Recentrage du contrôle sur les filiales les plus importantes.
Le contexte budgétaire contraint ainsi que l'efficacité du contrôle plaident pour un recentrage du champ de compétence de la Haute Autorité sur les seuls dirigeants des filiales d'entreprises nationales et d'établissements publics nationaux à caractère industriel et commercial dont le chiffre d'affaires est supérieur à 15 M€ (contre 10 M€ dans le projet de loi actuel). Sous réserve des éventuels doubles comptes, le nombre d'organismes entrant dans les prévisions du dispositif évolue comme suit en fonction du seuil de chiffre d'affaires :
| SEUIL DE CA |5 M€|10 M€|15 M€| |-----------------------------|----|-----|-----| |Nombre d'organismes contrôlés|536 | 438 | 373 |
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